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La lutte contre la désertification en droit malien

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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© Alima Diabate, 2019

La lutte contre la desertification en droit malien

Mémoire

Alima Diabate

Maîtrise en droit - avec mémoire

Maître en droit (LL. M.)

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LA LUTTE CONTRE LA DESERTIFICATION

EN DROIT MALIEN

Mémoire

Mlle Alima Diabate

Sous la direction de :

Mme Paule HALLEY

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ii

Résumé

Ce mémoire porte un regard critique sur les instruments juridiques relatifs à la lutte contre la désertification adoptés par le Mali depuis son indépendance jusqu’à nos jours.

La désertification a commencé à prendre de l’ampleur dans les pays d’Afrique de l’Ouest, notamment au Mali, avec les grandes périodes de sècheresses de 1968 à 1973 et de 1982 à 1984. Nous verrons que dès l’indépendance acquise en 1960, le Mali a entrepris de protéger juridiquement son environnement avec la Convention d’Alger de 1968 et la loi forestière de la même année.

Le présent mémoire est divisé en deux parties, la première étant consacrée à la période pré démocratique, allant de 1960 à 1991, et la seconde couvrant la période démocratique, allant de 1991 à nos jours. Pendant la période pré démocratique, le Mali a adopté peu de textes juridiques dans le domaine de la lutte contre la désertification. Cette faille fut corrigée au cours de la seconde période. En ce sens, l’analyse effectuée permet de relever les failles dans les textes juridiques maliens en matière de lutte contre la désertification depuis l’indépendance du pays à nos jours et de proposer des recommandations en vue de parfaire le droit de la lutte contre la désertification.

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iii

Abstract

This thesis takes a critical look at the legal instruments relating to the fight against desertification adopted by Mali since its independence until today.

Desertification has begun to increase in West African countries, particularly in Mali, with the major drought periods from 1968 to 1973 and 1982 to 1984. We will see that since independence in 1960, Mali has undertaken to legally protect its environment with the Algiers Convention of 1968 and the Forest Law of the same year.

This thesis is divided into two parts, the first dealing with the pre-democratic period from 1960 to 1991, and the second covering the democratic period from 1991 to the present. In the pre-democratic period, Mali adopted few legal texts in the field of combating desertification. This flaw was corrected in the second period. In this sense, the analysis carried out makes it possible to identify gaps in Malian legal texts in the fight against desertification since the country's independence to date and to propose recommendations for improving the law to combat desertification.

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iv

Table des matières

Résumé  ...  ii  

Abstract  ...  iii  

Table des matières  ...  iv  

Liste des abréviations, sigles, acronymes  ...  vi  

Remerciements  ...  viii  

Introduction  ...  1  

Partie I : La problématique de la désertification au Mali et les premières réponses pré démocratiques  ...  17  

Chapitre 1 La problématique de la désertification au Mali  ...  18  

1.1   Les causes de la désertification  ...  18  

1.1.1   L’augmentation démographique  ...  18  

1.1.2   Le déboisement dans le domaine forestier  ...  19  

1.1.3   Le surpâturage  ...  22  

1.1.4   Les feux de brousse  ...  23  

1.1.5   L’expansion agricole  ...  24  

1.1.6   L’orpaillage  ...  25  

1.1.7   L’irrigation  ...  26  

1.1.8   Les mauvaises pratiques de prélèvement de la médecine traditionnelle  ...  27  

1.2   Les Impacts sociaux économiques de la désertification au Mali  ...  28  

1.2.1   La pauvreté  ...  28  

1.2.2   L’insécurité alimentaire  ...  32  

1.2.3   L’exode rural  ...  34  

1.2.4   Les changements climatiques  ...  35  

1.2.5   L’augmentation des conflits et les conséquences économiques de la désertification  ...  37  

Chapitre 2 : Les réponses juridiques pré démocratiques à la désertification  ...  39  

2.1   Les mesures politiques de lutte contre la désertification  ...  39  

2.1.1   De la sècheresse de 1968-1973 au Plan d’action de Nairobi de 1977  ...  40  

2.1.2   De la sècheresse de 1982-1984 au plan d’action national de lutte contre la désertification et l’avancée du désert du Mali  ...  42  

2.1.2.2   Le Programme d’action nationale de lutte contre la désertification de 1985  ...  44  

2.2   Les mesures conventionnelles de la lutte contre la désertification  ...  46  

2.2.1   La Convention d’Alger sur la conservation et la protection de la nature et des ressources naturelles  ...  47  

2.2.2   La Convention relative aux zones humides d’importance internationale particulièrement comme habitats des oiseaux d’eaux  ...  50  

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v

2.2.3   Les mesures législatives de la lutte contre la désertification  ...  52  

Conclusion de la première partie  ...  64  

Partie II : Les réponses juridiques démocratiques à la désertification  ...  68  

Chapitre 3 : Les mesures conventionnelles  ...  69  

3.1   La Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification  ...  69  

3.1.1   Le Plan national d’action environnemental (PNAE)  ...  70  

3.1.2   Le projet de gestion durable des terres  ...  74  

3.1.3   Le cadre stratégique décennal 2008-2018 et la Stratégie malienne de la grande muraille verte  ...  75  

3.1.4   Le Cadre institutionnel de la lutte contre la désertification  ...  78  

3.1.5   La participation de la population  ...  79  

3.1.6   La participation des collectivités locales  ...  81  

3.1.7   La coopération internationale  ...  83  

3.2   Les autres conventions traitant indirectement de la désertification  ...  85  

3.2.1   La Convention Cadre des Nations Unies sur les changements climatiques  ...  85  

3.2.3   La Convention sur la conservation de la nature et des ressources naturelles  ...  89  

Chapitre 4 Les mesures législatives règlementant toutes les activités causales de la désertification  ...  92  

4.1   Le droit constitutionnel à l’environnement  ...  92  

4.2   D’une loi d’application générale et des lois forestières pendant presque la première décennie du Mali démocratique  ...  95  

4.2.1   La Loi de 1991 relative à la protection de l’environnement et du cadre de vie  .  95   4.3   À l’adoption de plusieurs textes sectoriels à partir de 2000  ...  100  

4.3.1   Des textes législatifs mentionnant explicitement la désertification  ...  100  

4.3.2   Les autres textes sectoriels traitant indirectement de la désertification  ...  105  

Conclusion de la partie II  ...  115  

Conclusion générale  ...  117  

Bibliographie  ...  121  

Annexe 1 : Programme National de lutte contre la désertification et l’avancée du désert  .  128   B. Par région  ...  143  

Annexe 2 : COLLOQUE INTERNATIONAL SUR LE LOGEMENT SOCIAL  ...  215  

Annexe 3 Convention des Nation Unies sur la lutte contre la désertification  ...  226  

DE L’ENVIRONNEMENT ET REPUBLIQUE DU MALI ...  227  

DE L’ASSAINISSEMENT Un Peuple – Un But – Une Foi  ...  227  

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vi

Liste des abréviations, sigles, acronymes

CNULD : Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification et/ou la sècheresse

notamment dans les pays gravement touchés en particulier l’Afrique

PACD : Plan d’action de Nairobi de 1977 PNAE : Plan d’action national environnementale

PANAE/PNAE-CID : Plan national d’action environnementale et les programmes d’action

nationaux de lutte contre la désertification

Convention de RAMSAR : Convention relative aux zones humides d’importance internationale

particulièrement comme habitats des oiseaux d’eaux

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vii

Dédicace

Je dédie ce mémoire à mon cher père Souleymane Diabaté pour lui témoigner ma gratitude pour sa présence dans ma vie ainsi que tout son amour

(9)

viii

Remerciements

Ce travail n’aurait pas pu arriver à terme sans l’excellent sens d’orientation de ma directrice de mémoire, madame Paule Halley.

Toujours aussi rassurante et bienveillante à mon égard, c’est donc tout naturellement à vous que j’adresse mes premiers remerciements. Merci pour votre gentillesse, vos conseils avisés, votre patience ainsi que votre soutien. Grâce à vous, je suis parvenue à surpasser mes difficultés ce qui m’a permis d’arriver au bout de cette maîtrise.

Je vous remercie également de m’avoir accueillie dans votre chaire de recherche en droit de l’environnement.

Mes remerciements vont à l’endroit de mes parents Souleymane Diabate et Oumou Doumbia pour leur amour, leur soutien et leur présence tout au long de ce mémoire.

Je remercie également Bakary Koné, Mamoutou Diabaté et Kadiatou Doumbia pour leur soutien matériel.

Je remercie aussi mes sœurs Sanata Diabaté et Mariam Diabaté pour leur soutien moral.

Merci à tous ceux qui m’ont soutenue de près ou de loin.

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1

Introduction

Ce travail de recherche s’articule autour de la problématique de la lutte contre la désertification au Mali, depuis son indépendance en 1960, afin de voir comment le pays à mobiliser son cadre juridique pour lutter contre le phénomène.

Objet de notre étude, le Mali est l’un des pays les plus vastes de l’Afrique de l’Ouest durement touché par le phénomène de la désertification. Enclavé, sans débouché sur la mer, avec ses 1 241 000 km2, il dispose de sept frontières : le Niger, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée, le Sénégal, la Mauritanie et l’Algérie. La langue officielle est le français. Le dialecte couramment parlé est le Bambara. Par contre, il existe plusieurs autres dialectes tels que le Soninké, le Sonrhaï, le Malinké, le Bobo, etc.

La population malienne était estimée à 14 517176 d’habitants en 20091 dont plus de 80 % concentrée au Sud2. Le taux de croissance de la population était estimé à 3.6 % en 2009 et elle pourrait atteindre 35 944 529 en 20503.

Le revenu national brut (RNB) est de 650 $ US par habitant, ce qui place le Mali au 176e rang sur les 187 pays selon l’indice de développement humain (IHD) du PNUD de 20144. L’économie du pays repose essentiellement sur le secteur primaire, dont l’agriculture occupe plus de 80 % de la population active5, suivie de l’élevage qui représente l’activité principale

1 Mali, Direction nationale de la statistique et de l’informatique, « Recensement général de la population et de

l’habitat », 2009, en ligne : < http://www.instat-mali.org/nada/index.php/catalog/8 > (consulté le 10 septembre 2018). Soulignons que depuis 2009 il n’y a pas eu de recensement officiel de la population au Mali

2 Mali, République du Mali, ministère de l’Environnement et Secrétariat permanent du PNAE-CID, Résumé

du PANE/PNAE/PAN-CID, JUIN 1998, à la p 12

3 Ce calcul est fait par nous de la manière suivante : Considérant que le taux de croissance est de 3.6%,

l’augmentation annuelle de la population sera de (3.6 x 14 517176) /100 = 522 618, 366 Si l’augmentation annuelle est de 522 618. 366 par an, la population atteindra en 2050 selon les prévisions 527991x (2050-2015) + 14517176 = 35 944 529

4 Délégation de l’Union européenne au Mali, « Révision du profil environnemental du Mali », 2014, à la p 34,

en ligne : < https://eeas.europa.eu/sites/eeas/files/profil_environnemental_du_mali_0.pdf > (consulté le 10 mai 2018)

5 Mission permanente de la République du Mali auprès des Nations Unies, « Développement agricole, Sécurité

alimentaire et Nutrition », New York, 2015, à la p 1, en ligne : < https://papersmart.unmeetings.org/media2/7654430/mali.pdf> (consulté le 10 juillet 2018)

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du Nord6. Avec la désertification cette économie est fortement menacée dans la mesure où l’élevage (pâturage) et l’agriculture ne peuvent être pratiqués sur des terres dégradées. De l’indépendance à nos jours, le Mali a connu trois régimes politiques. Le premier régime, conduit par Modibo Keita de 1960 à 1968, était de type socialiste. Le second régime, instauré par un coup d’État et conduit par le Général Moussa Traoré de 1968 à 1991, était de type dictatorial. Enfin, le dernier régime instauré aussi par un coup d’État militaire en 1991 est, de type démocratique. C’est donc un régime démocratique qui est en place au Mali depuis 1991.

Soulignons également que, depuis 2012, le Nord du Mali est sous l’emprise des djihadistes obscurantistes et quelques sécessionnistes réclamant la séparation du pays et l’imposition de l’État islamique7. Cette situation, qui est à l’origine d’une guerre au Nord du pays, a conduit au déplacement de nombreuses personnes vers le Sud, dépeuplant encore plus le Nord, d’une part, et à l’accroissement de la pression des hommes sur les terres au Sud, d’autre part, ce qui a eu pour conséquence d’exposer davantage les terres à la désertification8.

Le terme désertification a fait l’objet de plusieurs définitions9. Toutefois, pour notre étude nous retenons la définition donnée par la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification10. Selon l’article premier de cette Convention, la désertification désigne « la dégradation des terres dans les zones arides semi-arides et subhumides sèches par la suite de divers facteurs parmi lesquels les changements climatiques et les activités anthropiques ».

6 Fonds international de développement agricole, République du Mali, « programme d’investissement et de

développement rural des régions du Nord Mali, Rapport de pré-évaluation: rapport principal et appendices », volume 1, no1662, 2005, à la p 2, en ligne : < https://www.ifad.org/documents/10180/958897ce-7c22-444c-8d93-3ec311ebd9fd > (consulté le 10 janvier) 2019

7 Tiekorobani, « Guerre au Mali depuis 2012 : Le vrai bilan humain », maliweb.net (août 2015), en ligne :<

http://www.maliweb.net/la-situation-politique-et-securitaire-au-nord/guerre-au-mali-depuis-2012-le-vrai-bilan-humain-1100652.html > (consulté le 1 mars 2017)

8 Supra note 4 à la p 4

9 Antoine Cornet, « La désertification à la croisée de l’environnement et du développement, un problème qui

nous concerne tous », 2002, à la p 4, en ligne : < http://horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers18-07/010045185.pdf > (consulté le 2 juin 2018)

10 Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification dans les pays gravement touchés par la

sècheresse et/ ou la désertification, en particulier en Afrique, 14 novembre 1994, 1954 RTNU 108 (entrée en

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À cet effet, il ressort d’une étude de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation (FAO) que plusieurs parties des zones sèches du Mali (zone aride, semi-aride et subhumide sèche) sont touchées par la désertification. Toutefois, l’état d’avancement du fléau n’est pas uniforme dans les trois zones11. La zone sahélienne ou zone aride occupant 24 % du territoire est la plus affectée par la désertification. Elle est suivie de la zone soudanienne ou zone semi-aride. Cette dernière occupe 19 % du territoire. La zone la moins touchée par la désertification est la zone guinéenne ou zone subhumide sèche, elle occupe 6 % du territoire12. Actuellement ces zones précitées, qui au total occupent 49 % du territoire, font face à une inquiétante et continue problématique de désertification. Cette situation n’est pas sans conséquence, car ce sont ces zones situées au Sud du pays qui permettent de satisfaire aujourd’hui les besoins alimentaires et énergétiques de la population malienne13. Quant au reste du territoire,

c’est-à-dire la partie Nord (51 %), elle est presque totalement dégradée depuis la sècheresse de 1982-1984 et donc elle ne peut satisfaire actuellement les besoins alimentaires de la population14.

La désertification est un phénomène qui a de lourdes conséquences. En effet, la désertification faisant référence à la dégradation des terres, ces dernières terres jouent deux rôles essentiels. D’une part, elles sont régulatrices du climat et d’autre part, elles sont à la base de diverses activités telles que l’agriculture, l’irrigation, le pâturage, la formation forestière, etc. Dès que les terres n’arrivent plus à assurer ces deux rôles essentiels, il y a dégradation ou désertification15.

La désertification se manifeste par une altération du couvert végétal. Cela se reflète par la modification de la composition floristique, la raréfaction ou la disparition des espèces les

11 Gaoussou Konaté, « FOSA Document national de Prospective-Mali », 2001, en ligne : <

http://www.fao.org/3/AB571F/AB571F00.htm > (consulté le 15 septembre 2018)

12 Ibid

13 Supra note 2, à la p 13

14 Mamadou Doumbia, Yusuke Goto et Natsuko Toba, « Place de la gestion durable des terres au Mali » (2006-

2007), TerrAfrica, 2009, à la p 15

15 Caroline Piersotte, La lutte contre la désertification : De la Convention des Nations Unies aux activités des

organisations non-gouvernementales belge dans la région du Sahel : Cas du Burkina Faso et du Niger,

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plus utilisées, la diminution de la biomasse et la réduction des capacités de production et de régénération de la végétation. À la suite de cette altération, le couvert végétal s’éclaircit, et le sol pratiquement dénudé devient moins protégé. Parallèlement, la diminution de la biomasse et sa restitution au sol entraîne des pertes progressives d’un élément essentiel du sol, à savoir la matière organique. Donnant suite à tous ces processus, la stabilité structurale et la porosité décroissent en même temps, l’érosion s’accroît et entraîne la destruction progressive du sol. Ce dernier est ainsi soumis à l’action mécanique des pluies et des vents qui provoquent une modification des états des surfaces. Les conséquences sont de deux ordres. La première concerne la fertilité qui se manifeste par une chute de la capacité d’échange et des éléments disponibles. Quant à la deuxième, elle concerne le bilan hydrique qui se manifeste par une augmentation du ruissèlement, une baisse de la réserve en eau disponible pour les plantes, une modification du régime hydrique et des échanges avec l’atmosphère et enfin une acidification. En retour ces conséquences auront des effets sur la production et la végétation16.

Sur le plan humain, la destruction progressive du sol se traduira par la détérioration de la capacité des terres à supporter les populations qui y vivent. À cet égard, une spirale de dégradation est constituée. Sans intervention, elle conduirait à une dégradation irréversible qui se traduit par l’érosion et l’ensablement17. L’ensablement est le dernier stade de la désertification. C’est à cause de ce dernier qu’il est aisé de confondre la désertification avec l’avancée du désert. Toutefois, comme le souligne Bonefils cette confusion présente un inconvénient majeur. En effet, elle risque d’être trompeuse, dans la mesure où si les dunes de sable ne se posent pas dans un endroit, il ne sera pas considéré comme dégradé18. Or, la désertification commence bien avant l’ensablement.

La Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification énumère quatre causes à la désertification à savoir les facteurs physiques, biologiques, sociopolitiques, culturels et économiques19.

16 Supra note 9 à la p 6

17 Idem, Voir aussi le tableau à la p 6. Dans ce tableau Cornet a classé par ordre les manifestations de la

désertification.

18 Bonefils, Michel, Halte à la désertification au Sahel, Karthala, 1987 à la p 31 19 Voir le préambule de la CNULD

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Quant aux auteurs, leurs positions diffèrent quant aux facteurs causaux de la désertification. Ainsi selon certains auteurs, les activités anthropiques constituent l’unique facteur causal de la désertification. À cet effet, A. Cornet souligne que la désertification est due essentiellement aux activités humaines20. L’analyse des auteurs, tels que Eswanrant, Lal et Reich21, s’inscrit dans la même optique22. Quant à d’autres, ils soulignent que la désertification serait principalement causée par les activités anthropiques et les changements climatiques ne sont que des causes secondaires. À titre illustratif, Grainger énumère quatre activités anthropiques comme principales causes de la désertification. Ces activités sont la surexploitation des terres agricoles, le surpâturage, le déboisement, et le mal fonctionnement des réseaux d’irrigation. À ceci, l’auteur ajoute des causes secondaires qui sont les changements climatiques, l’explosion démographique et la pauvreté23.

Enfin, des auteurs comme Émile Sinave ont énuméré deux causes principales à la désertification, à savoir les causes directes qui sont les changements climatiques et les systèmes d’utilisation des terres et les causes indirectes qui sont l’accroissement démographique, la pauvreté, la mondialisation et certaines politiques imposées24.

Donnant raison à tous ces auteurs quant aux facteurs causaux qu’ils ont énumérés à la désertification, nous tenons à spécifier que contrairement à leur affirmation, les causes du fléau diffèrent d’une région à l’autre. À cet effet, il ressort d’une étude effectuée dans le cadre de la gestion durable des terres au Mali entre 2006 et 2007 que la cause principale de la désertification dans les zones sèches se situe au niveau des activités anthropiques25. Ainsi au cours de notre étude nous nous intéresserons principalement à ce facteur causal. Même si les

20 Antoine Cornet, « La désertification, un problème d’environnement, un problème de développement », 2002,

en ligne : < http://www.museum.agropolis.fr/pages/savoirs/desertification/Textes/text.htm#causes >

21 H. Eswaran, R. Lal and P.F. Reich. « Land degradation : An Overview », in E.M. Bridges and al. (eds.)

Response to Land Degradation, Oxford & IBH Publishing, New Delhi, 2001, en ligne : <

http://www.oalib.com/references/14954325 > (consulté le 15 mai 2018)

22 Ibid

23 Grainger, Alan et Jon Tinker. La désertification  : la responsabilité de l’homme, les solutions possibles, les

raisons de l’échec, Earthscan, London, 1983, à la p 13

24 Emile Sinave, Les défis de la mise en œuvre de la convention des Nations Unies sur la lutte contre la

désertification, Mémoire, Université de Sherbrooke, aux pp 15 et 18 [non publié]

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changements climatiques font partie des causes de la désertification au Mali, notamment le second facteur, nous allons nous y intéresser de façon superflue, ceci pour la simple raison que le Mali n’est pas un grand émetteur de C0226.

Par ailleurs, nous appuyons aussi les propos des Auteurs comme Emile Sinave et Grainger à savoir que la désertification à des causes directes et indirectes. En effet, la désertification est le résultat de certaines gestions inappropriées des terres par les exploitants en vue de satisfaire l’augmentation démographique, qui ne peut être satisfaite par une gestion appropriée des terres27. Cette augmentation démographique que l’on considère comme cause indirecte de la désertification aboutie à la surexploitation des terres, voire à leur gestion non durable. C’est cette surexploitation des terres à travers l’agriculture intensive, le déboisement, le surpâturage, l’irrigation, l’orpaillage et la mauvaise pratique du prélèvement de la médecine traditionnelle qui cause directement la désertification dans plusieurs pays touchés notamment le Mali28. Une autre cause indirecte apparait en matière de désertification, à savoir les changements climatiques. Ainsi et comme il apparait dans le site du gouvernement du Canada, la cause principale des changements climatiques provient des activités humaines telles que la transformation des forêts régulatrices de climats, en terres agricoles29. En ce sens, on comprend que la désertification due aux changements climatiques est liée directement aux activités anthropiques.

La mobilisation pour combattre la désertification a été tardive. En effet, la nécessité de lutter contre la désertification a été reconnue par la communauté internationale en 1977 alors que le phénomène a commencé bien avant cette période30. À cet effet, c’est suite à la sècheresse de 1968 à 1973 qui a frappé le Sahel, dont le Mali, que les Nations Unies à travers son

26 Les plus grands émetteurs de CO2 recensés entre 2005 et 2013 selon un article de l’indicateur canadien de

durabilité de l’environnement sont : la Chine, les USA, l’UE, l’Inde, la Russie, le Japon, le Brésil, l’Indonésie, le Canada et le Mexique. Selon d’autres données plus récentes, notamment celles de 2018, c’est la chine qui a été classée plus grande émetteur de C02. Voir :< https://fr.statista.com/infographie/9668/plus-gros-emetteurs-de-co2-dans-le-monde/ >. C’est généralement les pays développés qui sont les plus grands émetteurs de C02.

27 Hama Arba Diallo, « Ecosysteme et bien être humain : Synthèse sur la désertification ». 2005, à

la page 9, en ligne : < http://www.millenniumassessment.org/documents/document.797.aspx.pdf > 28 Ibid, à la page 9

29 voir https://www.canada.ca/fr/environnement-changement-climatique/services/changements-climatiques/causes.html?fbclid=IwAR3lH9rbZA5UnOBEj82YPBgVuuvuzgf5y

30 Centre d'actions et de réalisations internationales (CARI), « La Lutte contre la désertification : Un cadre

international, la Convention sur la lutte contre la désertification (CDD) », août 2003, en ligne : <

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organisme pour l’environnement (PNUE) organisèrent la première conférence internationale spécifique sur la désertification, lancée à son siège à Nairobi du 29 août au 7 septembre 197731. Ainsi, reconnaissant le caractère planétaire d’une part et d’autre part la gravité du problème sous toutes ses dimensions économique, sociale et écologique, la conférence avait débouché sur l’adoption d’un plan d’action pour combattre la désertification (PACD) préconisant 28 recommandations visant à lutter contre la désertification. La finalité de cette rencontre était d’analyser les effets de la sécheresse et les causes de la famine, et pour cela, elle eut pour thème central « la désertification ». Les débats ont été organisés autour des trois points suivants : l’étude des risques de désertification; la recherche de solutions permettant d’enrayer la dégradation des ressources et la mise en place d’un programme international de lutte contre la désertification32.

En vue de mettre en œuvre le plan d’action, il a été demandé à chaque pays concerné d’élaborer un Plan d’action nationale de lutte contre la désertification (PACD)33. C’est dans cet élan que le Mali élabora son Plan d’action national en 198534. D’ailleurs peu de pays touchés ont produit leur plan d’action. Cette situation trouverait sa justification comme l’expliquait P. Rognon, du fait que « nombre des États concernés pourtant indépendants depuis deux ou trois décennies à cette période n’étaient pas préparés à la rédaction de tels documents »35.

Ainsi, le PACD constitue la première réponse, mais aussi le premier instrument utilisé pour la gestion de la crise écologique en lien avec la désertification. En pratique et de façon générale, la mise en œuvre du plan d’action n’a pas donné lieu à un important suivi, faute

31 À Kiss et J.-P. Beurier, Droit international de l’environnement, Pedone, 2004, à la page 46

32 R. Jaubert, « De 270 millions à 2 milliards de personnes touchées par la désertification : le crépuscule d’une

convention internationale ? », Science et changement planétaire/ Sècheresse, 2012 23:3, en ligne : <

http://www.jle.com/fr/revues/sec/edocs/de_270_millions_a_2_milliards_de_personnes_touchees_par_la_dese rtification_le_crepuscule_dune_convention_internationale__294920/article.phtml > (consulté le 2 août 2018)

33 Voir le plan d’action de Nairobi de 1977

34 Amadou Hammath Dia, Sylvia Becerra et Fabrice Gagneron, « Crises climatiques, ruptures politiques et

transformation de l’action publique environnementale au Mali », Vertigo, 2008, volume 8, n°1, en ligne : <

https://journals.openedition.org/vertigo/1468?file=1 > (consulté le 2 juin 2018)

35 P. Rognon, « Lutte sans vigueur contre la désertification », Le Monde diplomatique, décembre 2000, à la p

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d’une réelle volonté politique36. Ce constat d’échec est le même au Mali, où les efforts consentis n’ont pu aboutir à cause, principalement du manque de participation du public37. Les efforts déployés se sont montrés décevants et les déconvenues observées ont révélé la nécessité d’une approche de lutte plus efficace à tous les niveaux, au niveau mondial, au niveau sous régional, au niveau national et particulièrement au niveau local. En 1991, le PNUE a confirmé l’échec du plan d’action de 1977 et l’évolution des surfaces atteintes par la désertification38.

Devant la gravité de la situation, la Conférence de Rio de Janeiro sur l’environnement et le développement, qui s’est tenue en juin 1992, a donné une nouvelle opportunité d’examiner la question de la désertification. À cet effet, les participants à cette conférence ont préconisé l’élaboration d’une convention juridiquement contraignante ayant pour but d’engager les parties à long terme39. La conférence a permis l’adoption de deux conventions, à savoir la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique et la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques40. De plus, trois instruments non obligatoires ont

également été adoptés à cette occasion : une déclaration énonçant des principes généraux, une déclaration sur la forêt et un programme d’action appelé Action 2141. Le chapitre 12 de ce dernier évoque la désertification dans le cadre de la protection des écosystèmes fragiles. Il fournit les bases techniques et les lignes de conduite pour enrayer le phénomène (inventaire des causes, principes d’actions, moyens d’exécution)42. Cet instrument sera donc à l’origine de l’adoption de la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification (CNULD)43.

36 Supra note 34

37 Supra note 2 à la p 7

38 Organisation internationale de la francophonie, « Convention des Nations Unies sur la lutte contre la

désertification, Guides des Négociations », 2007, à la p 2 en ligne : <https://endaenergy.files.wordpress.com/2008/10/guidecld.pdf > (consulté le 10 juillet 2018)

39 Ibid, aux pp 2 à 3

40 Stephanie Meakin, « Le sommet de la terre de Rio : Sommaire de la Conférence des Nations Unies sur

l’environnement et le développement », Ottawa, Bibliothèque du Parlement, Service de recherche, 1992, en ligne : < http://publications.gc.ca/Collection-R/LoPBdP/BP/bp317-f.htm > (consulté le 1er janvier 2019) 41 Infra note 42

42 Action 21, en ligne : < www.un.org/french/ga/special/sids/agenda21/action12.htm > (consulté le 10 juin 208) 43 Supra note 40

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Sur le plan international, la CNULD est le seul instrument juridiquement contraignant qui incite les États partis à lutter contre la désertification44. Adoptée à Paris le 17 juin 1994, elle est rapidement entrée en vigueur le 26 décembre 1996. La CNULD fait partie de la série des conventions « post-Rio ». Elle compte 190 États partis et constitue un traité-cadre comprenant surtout des principes de participation et de coopération.

L’on ne peut mener à bien le combat contre la désertification sans la participation de la population et l’implication du gouvernement à toutes les activités de lutte contre la désertification. À cet égard, selon le préambule de la CNULD, « les gouvernements nationaux jouent un rôle crucial dans la lutte contre la désertification et dans l’atténuation des effets de la sècheresse et dont les progrès à ce niveau dépendent de la mise en œuvre dans les zones touchées des programmes d’action au niveau local ». Ainsi, au Mali, la désertification étant principalement causée par les activités humaines, et les humains, plus préoccupés par leur survie que la protection des terres, il revient au gouvernement malien de prendre des mesures adéquates afin de prévenir les activités néfastes pour les terres.

Toutefois, plusieurs terres ayant déjà été dégradées, la prise de mesure pour leur récupération par le gouvernement ne doit cependant pas être négligée. C’est d’ailleurs ce qui ressort du paragraphe 12.3 d’Action 21 : « Dans la lutte contre la désertification, la priorité devrait être accordée à la mise en œuvre des mesures préventives en faveur des terres non dégradées ou qui ne le sont que légèrement. Les zones ayant subi une sévère dégradation ne doivent cependant pas être négligées » [nous soulignons].

Par ailleurs, comme le souligne le préambule de la CNULD, les progrès ne peuvent être observés dans la lutte contre la désertification sans l’élaboration par les gouvernements des programmes d’action au niveau local. Pour que ces programmes d’action obtiennent de meilleurs taux de réussite, ils doivent être élaborés et mis en œuvre avec la participation de la population. À cet égard, il ressort du mémoire de Laure Sandrine Lompo qu’un rapport de la banque Mondiale soutient que : « les programmes donnent de meilleurs résultats lorsqu’ils sont exécutés avec la participation des bénéficiaires et lorsqu’ils exploitent le potentiel

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associatif de la collectivité »45. De plus, si le premier plan d’action national du Mali s’est soldé par un échec, c’est principalement à cause du manque de participation et implication du public46.

En somme, l’élaboration des programmes d’action étant importante en matière de lutte contre la désertification et leur réussite dépend de la participation du public, cette dernière se classe alors comme indispensable dans la lutte contre la désertification. Ceci est également confirmé dans le paragraphe 12.3 d’Action 21 qui stipule que : « la participation des communautés locales, des organisations rurales […] est indispensable à la lutte contre la désertification et la sècheresse ».

Au regard des développements précédents, la lutte contre la désertification s’impose comme un problème fondamental au Mali. De ce fait, il nous est apparu important de faire une étude sur les mécanismes juridiques retenus par le Mali pour lutter contre la désertification. À notre avis, bien qu’il ne constitue pas le seul instrument à mettre de l’avant, le droit à travers ses règles contraignantes et ses effets normatifs constitue un instrument à promouvoir afin de lutter contre la désertification au Mali, et cela en conformité avec les engagements pris par le pays sur la scène internationale47. Le droit fait référence à l’ensemble des normes ou règles générales qui régissent les rapports entre les individus et définissent leurs droits et prérogatives ainsi que ce qui est obligatoire, autorisé ou interdit. Le droit est susceptible de voir son exécution appliquée de manière contraignante par l’intervention de la puissance publique. Considérant que la désertification est principalement causée au Mali par la surexploitation des ressources naturelles par les hommes et, comme le souligne l’Institut de Recherche et de Développement (IRD), c’est « l’absence ou l’obsolescence de règles d’accès aux ressources naturelles qui conduisent à un accroissement de la pression sur les ressources et à des pratiques inadaptées et néfastes »48. Le droit à travers son pouvoir d’interdiction et

45 Laure Sandrine Lompo, Participation publique à la gestion durable des forêts ; Quelle intégration pour le

Burkina Faso et le Québec, Mémoire, Université Laval, 2015, à la p 7, en ligne : <

http://theses.ulaval.ca/archimede/meta/31701 > (consulté le 10 septembre 2018) [non publié]

46 Supra note 2 à la p 7

48 Institut de Recherche pour le développement, « Qu’est-ce que la désertification ? », Les dossiers

thématiques de l’IRD, à la p 1, en ligne : < http://www.suds-en-ligne.ird.fr/desertif/desert.pdf > (consulté le 10 septembre 2018)

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de règlementation des conduites peut contrôler la surexploitation des ressources naturelles par le fait de l’homme, laquelle conduit à la désertification.

À cet effet, des normes juridiques assorties de sanction doivent être élaborées afin de règlementer l’accès des hommes aux ressources naturelles. Les normes peuvent préciser, par exemple, la quantité d’arbres à couper dans une zone pour que celle-ci ne se dégrade pas, les techniques pour exploiter les terres arables, ou encore l’interdiction du défrichement ou d’exploitation de certaines zones pour cause de restauration, etc. Quant aux sanctions, elles ont pour but de dissuader les individus de contrevenir aux normes établies. Les sanctions peuvent être de type pécuniaire ou prévoir une peine d’emprisonnement selon l’ampleur de l’infraction.

En plus de l’adoption des normes, la lutte contre la désertification implique la mise en œuvre des prescriptions de la scène internationale. Ces prescriptions visent la participation du public, la décentralisation, la création de mécanismes de financement, le renforcement ou création des institutions, l’adoption des lois et l’élaboration des programmes et politiques nationales ne pouvant se réaliser sans l’intervention de l’organe gouvernemental49. Le droit

à travers son pouvoir de contraindre peut inciter tout organe concerné à mettre en œuvre les prescriptions précitées. D’ailleurs le chapitre 8 du programme Action 21 souligne l’efficacité du droit à travers son pouvoir de contraindre dans son paragraphe 8.13 : « des Lois et règlementations adaptées à la situation particulière de chaque pays figurent parmi les instruments les plus importants pour assurer l’application des politiques de l’environnement et du développement non seulement en raison de leur caractère obligatoire […] ».

Par exemple, afin de s’assurer que toutes personnes concernées respectent les obligations de lutte contre la désertification édictée par les normes, la Chine les a assorties de sanction. L’article 4 de sa loi sur la désertification mentionne:

« The State Council and the people's governments at or above the county level located in desertified regions shall incorporate plans for prevention and control of desertification into the national economic and social development plan, guaranteeing and supporting endeavors to prevent and control

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desertification.

The people's governments located in desertified regions shall take effective measures to prevent land desertification, rehabilitate desertified land, maintain and improve the ecological quality in their respective administrative areas.

The State, in desertified regions, establishes a responsibility, appraisal, reward and punishment system with respect to the targets set to government leaders during their term of office. People's governments at or above the county level located in desertified regions shall report to the people's congresses and their standing committees at the corresponding level on prevention and control desertification. »50

En somme, à travers la possibilité d’imposer des interdictions, des mécanismes de contrôle des facteurs causaux de la désertification (activités humaines) et des obligations contraignantes aux organes gouvernementaux afin qu’ils réalisent des activités de manière à ne pas aggraver et à lutter contre la désertification, le droit peut être considéré comme un outil important en matière de lutte contre la désertification.

D’après nos recherches, depuis son indépendance, en 1960, jusqu’à l’avènement de la démocratie en 1991, le Mali a assuré la lutte contre la désertification à travers la ratification de deux conventions internationales et de sa législation nationale. Concernant les conventions, il s’agit de celle d’Alger sur la conservation de la nature et des ressources naturelles et de la Convention sur les zones humides d’importance internationale (RAMSAR), ratifiées successivement par le Mali en 1969 et 1987. Au niveau de la législation nationale, avant l’avènement de la démocratie, seuls le code forestier et le code du Feu de 1986 consacraient quelques dispositions à la lutte contre la désertification. Après 1991, ces derniers codes étant basés sur une gestion centralisée des ressources forestières seront abrogés au profit de nouvelles dispositions forestières prônant le partage de la gestion des ressources forestières entre l’État et les collectivités locales ainsi que la participation du public à la protection des ressources forestières.

50 Laws of the people’s republic of China, Prevention and control of desertification law, en ligne : <

http://www.china.org.cn/china/LegislationsForm2001-2010/2011-02/14/content_21915867.htm > (consulté le 10 juillet 2018)

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Hormis les dispositions forestières, la constitution de 1991 à travers son article 15 peut servir également de base juridique pour lutter contre la désertification au Mali. Après l’avènement de la démocratie au Mali en 1991, on peut observer que le pays a été beaucoup plus actif en matière de législation touchant les ressources naturelles. Par exemple, le Mali a ratifié la CNULD dès 1995 et a élaboré son premier Plan national d’action pour l’environnement en 1998. Cette dynamique s’est poursuivie dans les années 2000 avec l’adoption de nouvelles lois sectorielles, telles que le code domanial et foncier (2000), la charte pastorale (2001), le code de l’eau (2002), la Loi d’orientation agricole (2006), la Loi n°10-026 du 12 juillet 2010 déterminant les principes de gestion des ressources du domaine forestier national et le code minier (2012).

Au final, malgré le développement d’un cadre juridique national qui aujourd’hui ne manque pas de lois et de conventions ratifiées pouvant participer à la lutte contre la désertification, le phénomène ne cesse de prendre de l’ampleur au Mali. Ce constat souligne l’importance de cette étude consacrée à l’évolution de la législation nationale malienne en matière de lutte contre la désertification. En effet, cette étude permettra de détecter les forces et les faiblesses du système juridique élaboré par le Mali pour lutter contre la désertification.

Depuis l’apparition de la désertification au Mali vers 190051 et la ratification de la convention d’Alger en 1969, jusqu’à nos jours, de nombreux textes de nature juridique ont été adoptés pour encadrer la protection de l’environnement et notamment lutter contre la désertification. En revanche, à notre connaissance aucune étude scientifique n’a été réalisée par des juristes dans le domaine de la désertification au Mali d’où la pertinence scientifique de cette recherche et son apport scientifique dans le domaine juridique au Mali. Par ailleurs, même si aucune étude scientifique n’a été produite par des juristes, des études ont été réalisées dans le cadre de financements par des organismes internationaux, ainsi que par des scientifiques issus de plusieurs disciplines, comme l’agroforesterie, la biologie, l’économie, etc. Parmi ces études, nous pouvons citer le mémoire de Djénèba Diarra qui aborde la participation des femmes dans la lutte contre la désertification au Mali52, l’étude d’Ousmane Sy, qui, dans son

51 Voir Vivre au Sahel, en ligne, < http://evblacsq.org > (consulté le 2 mai 2018)

52 Djeneba Diarra, Les femmes maliennes et la lutte contre la désertification, Université Laval, Mémoire,

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livre, fait une analyse et un bilan des projets et programmes de lutte contre la désertification au Mali53. Sur le plan régional, il y a une étude qui a été effectuée par plusieurs auteurs sur la mise en œuvre du projet de la grande muraille verte dans sept régions de l’Afrique, dont le Mali. Ce projet de la grande muraille verte a pour objectif de lutter contre la désertification54. Toujours sur le plan africain, Michel Bonefils a également effectué une étude sur la lutte contre la désertification au Sahel, dont le Mali fait partie55. Concernant le cadre de financement des organismes internationaux, les organes gouvernementaux ont élaboré, en 2016 avec un financement du PNUD, un catalogue faisant état des meilleurs techniques et moyens d’une bonne gestion durable des terres et des eaux dans le bassin de production des céréales sèches au Mali56.

Si ces différentes études diffèrent selon la manière et l’angle sous lequel elles abordent la désertification, elles ont toutes la particularité de ne pas l’avoir abordée sous l’angle juridique. Ainsi l’originalité de notre recherche sera de faire une analyse du cadre juridique de la lutte contre la désertification au Mali de 1960 à nos jours.

L’objectif de recherche consiste d’abord à identifier les principales composantes du droit malien de lutte contre la désertification depuis 1960, ensuite d’analyser de manière critique le droit malien au regard de la mise en œuvre de ses engagements en matière de lutte contre la désertification et enfin, le cas échéant, de proposer des résultats explicatifs et des améliorations à apporter au droit.

L’intérêt de la recherche vise principalement à documenter le droit malien dans le secteur de la désertification compte tenu du manque d’écrits à ce niveau.

53 Ousmane Sy, Bilan analytique des projets et programmes relatifs à la gestion des ressources naturelles et la

lutte contre la désertification au Mali, CILSS, 1990

54 Abdoulaye Dia (dir) et Robin Duponnois (dir), « Le projet majeur africain de la grande muraille verte », IRD,

Marseille, 2010, en ligne : < http://horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-06/010050326.pdf > (consulté le 2 mai 2018)

55 Supra note 18

56 Projet de gestion durable des terres, « Catalogues de bonnes pratiques pour la gestion durable des terres et

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De plus, il est important de faire un bilan de l’expérience malienne en matière de mise en œuvre de ses engagements internationaux de lutte contre la désertification compte tenu de la fin du cadre stratégique décennale 2008-2018.

Enfin compte tenu de la difficulté d’accéder à la documentation malienne, nous allons mettre certains de nos documents en annexe afin de faciliter l’accès à la documentation pour les prochains chercheurs qui s’intéresseront au domaine.

Au regards des développements précédents et pour mener à bien cette étude, deux questions essentielles ont été retenues : que nous apprend l’évolution du droit malien sur la manière dont le pays lutte contre la désertification depuis l’indépendance jusqu’à nos jours ? Quels sont les défis à relever ?

Nous formons l’hypothèse que pendant la période pré démocratique, peu de lois ont été adoptées au Mali, en matière de lutte contre la désertification. Cela est dû aux deux régimes non démocratiques qui se sont succédés pendant cette période. Par ailleurs avec l’avènement de la démocratie, nous formons l’hypothèse que plusieurs lois ont été adoptées. Toutefois, le Mali est toujours resté un mauvais élève en matière de lutte contre la désertification.

Pour répondre à nos questions de recherche, nous retenons le cadre théorique du positivisme juridique pour notre étude des instruments juridiques, auquel se joignent le cadre conceptuel de la désertification et une approche permettant de mettre en valeur les facteurs explicatifs du contexte (le Mali) dans lequel ces normes émergent57.

Comme l’ont souligné M. Cumyn et M. Samson, la démarche des tenants du positivisme juridique est axée sur l’herméneutique dans le sens où ils n’appliquent pas le droit de façon mécanique. L’herméneutique est définie comme l’art d’interpréter un texte correctement58. Cet exercice permet de détecter le sens caché d’un texte et même de comprendre l’auteur mieux que lui-même selon les auteures. Ainsi hormis la CNULD, comme les autres textes

57 Michelle Cumyn et Mélanie Samson, « La méthodologie juridique en quête d’identité », 2013, volume 71,

Revue interdisciplinaire d’études juridiques, aux pp 15 à 19

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que nous allons utiliser n’ont pas été élaborés en vue de lutter contre la désertification, nous allons les interpréter, dans le but de faire ressortir les dispositions qui peuvent être utilisées pour lutter contre la désertification sans le mentionner explicitement.

Pour réaliser notre démarche, nous allons nous servir des conventions et de la législation nationale dans la mesure où l’interprétation ne peut se faire sans une source qui sert de point de départ. Comme notre exercice ne se limite pas à l’interprétation des textes, mais également à leurs mises en œuvre, nous nous servirons des rapports nationaux des doctrines et des articles de journaux pour démontrer les forces et les faiblesses à ce niveau. Ces derniers nous aideront également à étudier les causes et conséquences de la désertification. Nous n’allons pas utiliser de jurisprudence dans notre étude, pour cause que celle-ci est inexistante dans le domaine de notre étude59.

Étant donné que ce travail de recherche est basé sur une évolution historique et que certaines lois ont été abrogées, nous ne nous servirons pas des motifs de l’Assemblée nationale du Mali pour appuyer les causes de leurs abrogations, mais en revanche des articles scientifiques. La raison qui explique cela est le fait que nous n’avons pas réussi à accéder à tous les documents utiles pour notre recherche, étant donné que pendant la révolution de 1991, l’Assemblée nationale a brûlé et de ce fait de nombreux documents n’existent plus. Par conséquent, à cause de la difficulté d’accès à la documentation ou à leur inexistence, nous n’excluons pas l’idée que certaines données peuvent manquer à notre étude.

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Partie I : La problématique de la désertification au Mali

et les premières réponses pré démocratiques

Dans cette partie, il sera question de relever les causes et les conséquences de la désertification au Mali et ensuite de faire une analyse critique des mesures juridiques prises depuis l’indépendance jusqu’en 1991 dans le but de lutter contre la désertification.

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Chapitre 1 La problématique de la désertification au

Mali

La problématique de la désertification n’est plus à négliger au Mali. En effet, la désertification a de graves répercussions sur la population et l’environnement. Elle engendre plusieurs problèmes dont les plus importants sont : l’insécurité alimentaire, énergétique et la pauvreté et ces problèmes à leur tour sont susceptibles de menacer la survie de la population. Afin de pallier à ces différents problèmes, le Mali s’est engagé très tôt dans la lutte contre la désertification. Ainsi, dans ce chapitre, après avoir étudié les causes et les conséquences de la désertification, nous étudierons les premières mesures juridiques que le Mali a adoptées afin de lutter contre le fléau60.

1.1  Les causes de la désertification

Au Mali, dans les zones sèches, la désertification est principalement causée par les activités anthropiques. En rappel, ces activités sont le déboisement dans les domaines forestiers, le surpâturage, les feux de brousse, l’expansion agricole, l’irrigation, les mauvaises pratiques de la médecine traditionnelle et l’orpaillage.

1.1.1   L’augmentation démographique

L’augmentation démographique constitue la première cause de la désertification au Mali dans la mesure où c’est cette dernière qui est la cause de la surexploitation des terres61.

60Nous entendons par premières mesures celles prises avant l’accès à la démocratie

61 Voir Moutaga Toure, Démographie au Mali : situation et implication, Association Malienne pour la

Protection et la Promotion de la Famille, à la p 9 pour la période post démocratique. Pour la période pré démocratique, voir Mali, Ministère des ressources naturelles et de l’élevage, Programme national de lutte

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Depuis l’indépendance à nos jours, quatre recensements officiels ont été effectués au Mali. Le premier a été fait en 1976, le second en 1987, le troisième en 1998 et le dernier en 200962.

Ces recensements ont démontré que le taux de croissance annuel était de 2.2 % entre 1987 et 1998. Entre 1998 et 2009, il est passé à 3.6%63. À cet effet, la population a augmenté de près de 130% passant de 6.4 millions en 1976 à 14.517 176 millions en 200964. Il est prouvé qu’à ce rythme d’évolution de la population, d’ici 20 ans, elle atteindra 30 millions d’habitants65. Le problème avec cette augmentation vient du fait que 90% des personnes sont concentrées au Sud, soit dans les régions de Koulikoro, Sikasso, Mopti, Ségou et le District de Bamako. En conséquence, des pressions anthropiques sont exercées sur ces ressources naturelles, dont les terres, ce qui a pour effet de les dégrader66.

1.1.2   Le déboisement dans le domaine forestier

La cueillette des bois d’énergie est la principale source de l’exploitation forestière au Mali. Quant aux bois de service et d’œuvre, ils ne représenteraient que 15% du volume de bois exploité notamment 10% pour les bois de service et 5% pour les bois d’œuvre67.

Au Mali, d’après les calculs de la délégation de l’Union européenne le défrichement du couvert boisé forestier s’effectue à un rythme de 500.000 hectares par an, dont 400.000, à cause des coupes de bois illégales68. En 1985, pendant la période pré démocratique, le déboisement s’effectuait à un rythme de 300.000 à 400.000 par an69. Ces chiffres sont loin d’être étonnants. En effet, au Mali, le bois est un produit demandé, environ 93% des ménages

62 Moutaga Toure, Supra note 61, à la page 4

63 Ibid à la p 22

64 L’Essor, « La population au Mali : Des atouts et des défis », maliweb.net, 3 novembre 2011, en ligne <

http://www.maliweb.net/societe/population-au-mali-des-atouts-et-des-defis-2-33806.html > (consulté le 22 février 2018)

65 Supra note 61, à la p 4

66 Supra note 61, à la p 8; le Sud est la zone qui satisfait actuellement aux besoins de la population 67 Supra note 11

68 Supra note 4, à la p 23 69 Supra note 2, à la p 48

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l’utilisent comme énergie domestique (milieu urbain, milieux ruraux)70. En milieu rural, il

est utilisé par 100% des ménages en vue de satisfaire leurs besoins en cuisson d’aliments en chauffage, en éclairage et en artisanat71. L’exploitation du bois est aussi à la base de plusieurs emplois (menuisier bucheron, etc.)72. À cet effet, elle contribue au développement économique de la population.

Par ailleurs, force est de constater qu’avec l’augmentation croissante de la population cette forte demande de bois a eu des effets néfastes sur les forêts. Elle a conduit à leur exploitation anarchique73. Cette exploitation anarchique s’explique par l’insuffisance du nombre d’agents forestiers chargés de contrôler la coupe abusive des bois74. Selon ce qui ressort des calculs de la délégation de l’Union européenne, la superficie contrôlée des forêts est de 300.000 ha contre un besoin de 16700.000 ha75. Dans cette logique, Ousmane Berthe, un journaliste malien soulignera : « qu’avant, il était rare d’aller d’une zone à une autre sans rencontrer un agent forestier qui veille à la préservation des végétaux. De nos jours le constat est amer on a l’impression qu’une mission commandée de bucherons et autres exploitants forestiers est en train d’envahir les forêts »76.

Selon ce qui ressort des schémas d’apprivoisement en bois énergie (SDA), à la suite de l’exploitation anarchique des bois, le capital forestier de plusieurs zones du Mali a été détruit77. Cela s’explique par le fait que le prélèvement du bois d’énergie dépasse largement la capacité de régénération des forêts78. À titre d’exemple, selon le chef de village de

70 Supra note 4, à la p 23 71Supra note 11

72Supra note 4, à la p 22

73Même les forêts classées n’échappent pas à cette exploitation anarchique

74Ousmane Berthe, « Lutte contre la déforestation au Mali : Que vaut la mission des agents forestiers »,

malijet.com (novembre 2008), en ligne : < http://malijet.com/a_la_une_du_mali/8372-lutte_contre_la_deforestation_au_mali_que_vaut_la_mission_des_ag.html >

75Supra note 4, à la p 23 76Supra note 74

77Hamata Ag Hantafaye, Présentation de la situation énergétique au Mali, Direction nationale de l’énergie.

Mali

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sokonafing la forêt classée de Koulouba regorgeait auparavant de plusieurs espèces d’arbres. Toutefois à cause de leurs exploitations anarchiques par la population, tous les arbres ont disparu79. Ces disparitions ne sont pas sans conséquence, elles conduisent à la désertification des terres forestières. En effet, les arbres protègent ces dernières contre le ruissèlement et l’érosion. Ainsi et comme il ressort du livre de Grainger, dès que les arbres reculent le désert avance80. Ce qui est le cas au Mali, où année après année à cause principalement du déboisement les forêts claires sont transformées en savane, les savanes en steppes et les steppes en désert81.

Pour faire face à cette situation, le gouvernement a mis en œuvre depuis 1996 plusieurs projets, dont la promotion de l’utilisation des foyers améliorés, du gaz butane, des briquettes combustibles. Toutefois, son effort est resté vain, car les habitudes de la population sont restées les mêmes82.

À titre illustratif, en 2000, la consommation de bois était estimée à 179605.6 stères (st) et en 2011 elle est passée à 383141.062st. Quant à la consommation de charbon, en 2000 elle était de 74463.37 quantum (qtm), passant à 2011 en 140578.91qtm83. Soulignons que les chiffres de 2011 ne sont plus d’actualité, car la consommation de bois et de charbon est en augmentation continue depuis cette période.

79 Moussa Samba Diallo, « Environnement : La forêt de Koulouba se meurt», maliactu.info (août 2015), en

ligne :< https://maliactu.info/societe/environnement/environnement-la-foret-classee-de-koulouba-se-meurt > (consulté le 10 janvier 2017)

80 Supra note 23, à la p 37

81Ibrahima Poudiougou, État des politiques de l’environnement au Mali, Maroc, Mémoire, Université Cadi

AYYAD, 2013-2015, à la p 6, en ligne : <

http://www.academia.edu/12005125/Rapport_sur_l%C3%A9tat_de_lenvironnement_au_Mali > [non publié]

82ONG AMADE PELCODE, Association malienne pour le développement, « la protection de l’environnement

et la lutte contre la désertification. Favoriser l’accès aux foyers améliorés pour le plus de démunis », en ligne : < http://climatdeveloppement.org/wp-content/uploads/2014/08/Argumentaire-pour-les-d%C3%A9cideurs-du-Mali-FINAL.pdf > (consulté le 2 mai 2017). Voir aussi Ramata Diaoure, « Lutte contre la désertification au Mali, le Sahara avance et nos habitudes en sont pour beaucoup responsable », maliweb.net (mai 2003), en ligne : <http://www.maliweb.net/environnement/lutte-contre-la-desertification-au-mali-le-sahara-avance-et-nos-habitudes-en-sont-pour-beaucoup-responsables-10869.html > (consulté le 10 juin 2016)

83 Mali, Ministère de l’Environnement de l’eau et de l’assainissement, Stratégie nationale d’action pour la

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22

Si le déboisement conduit à la désertification au Mali, il ne constitue pas le seul facteur. Un autre facteur conduit à la désertification des terres maliennes, il s’agit du surpâturage.

1.1.3   Le surpâturage

Selon les calculs de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) le surpâturage se classe comme la principale cause de la désertification dans le monde (36% des sols sont dégradés à cause du surpâturage)84. Au Mali, il n’est pas considéré comme la première cause de la désertification, mais constitue la première cause de la dégradation des sols pastoraux85 et également la principale cause de la baisse du couvert végétal des zones arides86. Le surpâturage fait référence à l’excès de la pression du bétail dans une zone pastorale donnée87. Il est causé par l’augmentation du cheptel et la régression des pâturages88.

Depuis l’avènement de la sècheresse de 1970, il y a eu une régression des zones pastorales au Mali et la plupart des zones pastorales du Nord ont été perdues89.

Cette situation a conduit à l’accroissement de la pression du cheptel dans les zones pastorales du Sud90 peu suffisantes pour accueillir 10 millions de bovins, 33 millions de petits ruminants, près d’un million de camélidés et tous les autres cheptels venant de la sous-région91.

84Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, « Choyez la terre : Aménagement sol pour

l’agriculture durable et la protection de l’environnement sous les tropiques », 1996, à la p 8 en ligne : < http//wgbis.ces.iisc.ernet.in/energy/hc270799/lm/suslup/fao/CHRSHFRN.PDF > (consulté le 8 mai 2018)

85Supra note 83, à la p 5

86 Mali, Ministère de l’environnement et du développement Durable, Programme d’action national aligné au

Plan cadre stratégique décennale 2008-2018, 2015, à la p 18

87Cette définition est tirée du Larousse version 2019 88Supra note 23, à la p 25.

89Supra note 14, à la p 13 90Idem

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De nos jours, c’est cet accroissement du cheptel dans les zones pastorales du Sud qui est à la base de leurs surexploitations. Une situation qui a pour effet d’enlever le sol de sa couverture végétale et d’exposer les points d’eau aux gaspillages. Ce qui à leur tour conduit à la désertification des zones pastorales.

Hormis le surpâturage et le déboisement, un autre phénomène dégrade les terres du Mali. Il s’agit des feux de brousse.

1.1.4   Les feux de brousse

Les feux de brousse constituent un des facteurs les plus importants de la dégradation des terres92 au Mali, leur gestion demeure préoccupante malgré une législation adaptée au contexte de la décentralisation93. Au Mali, il existe deux types de feux de brousse. D’une part, il y a les feux précoces et d’autre part les feux tardifs94. Les premiers sont allumés après l’assèchement de la végétation et favorisent dans les brousses la régénération de la couverture végétale protectrice des terres. Les feux précoces protègent les terres de la désertification. Ils sont toujours allumés durant une période fixée par les autorités administratives. Quant aux seconds (feux tardifs), ils échappent au contrôle des autorités administratives. Ils sont allumés avant l’assèchement de la végétation95. Cela a pour conséquence de dénuder la terre de sa végétation et de l’exposer à la désertification. 70% des feux de brousse allumés au Mali sont des feux tardifs96. Ces derniers ont brulé en 2007, 90795 ha. En 2008, ce chiffre est passé à 130338 ha97. Sur le territoire malien, aucune zone n’échappe aux feux de brousse tardifs même les endroits protégés. C’est ainsi que récemment, la forêt classée du mont mandingue

92Supra note 83, à la p 3. Voir aussi Programme national de lutte contre la désertification et l’avancée du

désert de 1985, à la p 48

93 Mali, Ministère de l’Économie et des Finances. Troisième rapport de suivi de la mise en œuvre des objectifs

du millénaire pour le développement au Mali, 2015, à la p 60

94Supra note 83, à la p 7

95C. A. Dia, « Feux de brousse : Plutôt prévenir que guérir », malijet.com (juillet 2008), en ligne : <

http://malijet.com/la_societe_malienne_aujourdhui/4247-feux_de_brousse_plutot_prevenir_que_guerir.html > (consulté le 6 mars 2017)

96Supra note 81, à la p 7 97Ibid

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a été la proie d’un feu tardif98. Les feux tardifs peuvent être accidentels ou intentionnels selon

le contexte dans lequel ils ont été allumés99. À titre d’exemple, un feu allumé par le rejet d’un

mégot de cigarette dans la nature peut être considéré comme accidentel tant disque qu’un feu allumé pour chasser des insectes durant une période prohibée par les autorités administratives ne peut être qu’intentionnel. En plus des feux de brousse, du déboisement et du surpâturage, un autre facteur anthropique contribue fortement à la dégradation des terres au Mali. Il s’agit de l’expansion agricole.

1.1.5   L’expansion agricole

Au Mali, avec l’accroissement démographique, l’agriculture est devenue une des principales sources de la dégradation des terres100. En effet, l’augmentation de la population a conduit à l’accroissement des superficies cultivées. Des statistiques montrent qu’en 1984, les superficies cultivées étaient de l’ordre de 150.000 ha pour les cultures céréalières et industrielles. En 1990, ce chiffre est passé à 269120 ha soit une augmentation de 180%. En 2014 il est passé à 4355950 ha, proche du double du chiffre de 1990.101 Rappelons que le chiffre de 2014 n’est plus d’actualité, car les superficies cultivées sont en évolution continue. Chaque année l’expansion agricole fait perdre au Mali de 6,5t/ha à 30 t/ha de terres arables102 . Cela est dû à la mauvaise utilisation et gestion des terres par les agriculteurs. À cet égard, l’agriculture itinérante (technique traditionnelle d’utilisation des sols), qui avec de longues périodes de jachère permettait d’une part de maintenir la fertilité du sol et d’autre part protégeait ce dernier (le sol) contre l’érosion, a été abandonnée103. De plus les terres

marginales sont mises en culture chaque année pour la production alimentaire et

98A. Sow, « Feux de Brousse dans la forêt classée des monts mandingues : comment circonscrire le fléau ? »,

malijet.com (février 2016), en ligne : < https://bamada.net/feux-de-brousse-dans-la-foret-classee-des-monts-manding-comment-circonscrire-le-fleau > (consulté le 5 avril 2017)

99 Ibid

100L’agriculture constitue une des principales activités de la population malienne. Elle occupe 80% de la

population active

101Supra note 83, à la p 1 102Supra note 4, à la p 1 103Supra note 83, à la p 1

Figure

Tableau N°8 : utilisation des engrais de 1982/83 à 1984/1985
Tableau N°10 A : principales causes de la désertification au Mali
Tableau  n°11  :  OBJECTIF  ET  REALISATION  DES  OPERATIONS  DE  DEVELOPPEMENT RURAL EN 1983/84et 1984/85

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