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Farmer, le plus vieux métier du monde des jeux vidéo ?

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Farmer, le plus vieux métier du monde des jeux vidéo ?

Bruno Vétel

To cite this version:

Bruno Vétel. Farmer, le plus vieux métier du monde des jeux vidéo ?. praxis, IAE Poitiers, 2018.

�halshs-02146261�

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Farmer, le plus vieux métier du monde des jeux vidéo ?

Bruno VÉTEL

Maître de Conférences en Sciences de l'Information et de la Communication à l'IAE de Poitiers et chercheur au CEREGE. Tag(s) : Économie informelle, Numérique

Publication : Revue Praxis-IAE de Poitiers Date : 09/2018

Un jeu en ligne massivement multijoueur (MMOG, pour Massively Multiplayer Online Game) réunit plusieurs milliers de joueurs dans un univers commun. Dans la majorité des MMOG, la progression du personnage joué est adossée à la collecte et à l’accumulation d’objets du jeu. La plupart des objets facilitent la confrontation avec des ennemis – épées, casques, etc. Les joueurs se les échangent contre des monnaies spécifiques du jeu, souvent représentées comme des pièces d’or. Ces objets et monnaies sont créés par l’action des joueurs : plus ils tuent de monstres, plus ils en augmentent la quantité en circulation. Dans le cadre d’un MMOG, c’est donc aux joueurs que reviennent la création monétaire et l’animation de l’offre et de la demande sur un marché spécifique du jeu.

Pour produire plus de pièces d’or, certains joueurs se spécialisent dans l’attaque de certains types de monstres, dont le succès génère davantage de monnaie. Lorsque cette pratique de jeu est inlassablement répétée, elle est appelée « farming ». Les pièces d’or sont alors injectées dans l’économie du jeu, par exemple pour y acheter des objets. Mais elles peuvent aussi être revendues contre des euros sonnants et trébuchants, sur des marchés en ligne parallèles : c’est le farming à but lucratif. Pour cela, il existe sur internet des plateformes de courtage : pour tous les jeux de ce type existant (il y en a des dizaines), on peut y acheter et y vendre de la monnaie du jeu contre des euros, des yuans, etc. L’existence de ces plateformes de courtage incite donc certains joueurs à amplifier leur production monétaire dans le jeu, pour tenter de gagner un peu d’argent.

Les enquêtes sur le farming à but lucratif présentent souvent l’activité de la Chine. Là-bas, des acteurs se sont fortement spécialisés dans cette activité, poussant au maximum l’organisation collective du travail, afin de créer des filières d’approvisionnement massif en monnaie du jeu. Celle-ci est échangée contre la monnaie nationale de joueurs plus riches, a priori occidentaux (les acheteurs d’autres pays sont très peu étudiés).

Mes recherches portent sur le jeu Dofus, un MMOG français, sorti en 2004. Il est développé et édité par l’entreprise française Ankama, basée à Roubaix. Une petite startup devenue aujourd’hui une véritable multinationale. Mon enquête montre que la répartition des tâches entre producteurs et consommateurs d’objets du jeu se fait également en fonction de leur classe sociale, à l’intérieur d’un même pays. Les joueurs des pays occidentaux qui paient leur abonnement et ont envie de passer moins de temps à réaliser des taches basiques et répétitives rémunèrent non seulement des joueurs étrangers pour le faire à leur place, mais aussi des joueurs de leur pays qui sont issus de milieux populaires. Les farmers que j’ai rencontrés en banlieue parisienne ou lilloise expliquent qu’ils « rentabilisent le jeu » : les plus jeunes d’entre eux ne partent pas en vacances, et sont « coincés » à la maison pendant les congés scolaires, souvent sans moyen de locomotion et sans argent de poche pour aller « en ville ». Ils restent chez eux et collectent des pièces d’or à longueur de journée, pour les vendre à des joueurs plus aisés en échange d’euros. L’argent qu’ils obtiennent en revendant le produit de leur activité de farming leur sert souvent à se réabonner à Dofus pour continuer à jouer ou à acheter des objets du jeu pour progresser : il est réinvesti dans l’activité de jeu alors, que les farmers mieux organisés situés dans des pays plus pauvres l’utilisent pour des dépenses courantes de subsistance.

La récente « monétisation » des jeux en ligne consiste à limiter les échanges d’objets entre joueurs, obligeant autant que possible l’achat d’objets dans un « item mall » central contrôlé par l’entreprise créatrice du jeu. Ce design « Top Down » simplifie à l’extrême l’économie interne du jeu vidéo. Il freine le développement du farming à but lucratif qui permettait le maintient en jeu des participants de classes populaires et d’étrangers de pays pauvres. Ainsi, ces nouveaux systèmes de jeu réduisent l’accès aux publics aisés. De plus, en empêchant les échanges marchands entre les joueurs, ils se privent des ressorts ludiques propres aux activités de marchandage. Si l’enrichissement des joueurs est compliqué, le farming sans visée lucrative n’en disparait pas pour autant. En effet, ces jeux reposent sur des mécanismes d’incitation aux actions de jeu répétitives : le farming se maintient donc comme le plus vieux métier des jeux en ligne.

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