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Schizophrénie et perception du temps : une méta-analyse

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Academic year: 2021

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Schizophrénie et perception du temps : Une

méta-analyse

Mémoire doctoral

Josée Brosseau

Doctorat en psychologie

Docteur en psychologie (D.Psy.)

Québec, Canada

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Schizophrénie et perception du temps : Une

méta-analyse

Mémoire doctoral

Josée Brosseau

Sous la direction de :

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iii Résumé

Des déficits, tant cognitifs que perceptifs, sont observés chez les personnes aux prises avec la schizophrénie. Il est donc possible qu’un déficit de la perception du temps existe chez ces personnes. Le but de la présente méta-analyse est de vérifier si l’estimation d’intervalles de temps diffère chez les personnes atteintes de schizophrénie et celles ne présentant pas cette maladie. Une recherche dans les bases de données, en date d’août 2015, a permis de repérer 17 articles (n= 958) satisfaisant les critères d’inclusion suivants : 1) présence d’un groupe attient de schizophrénie et d’un groupe contrôle sans maladie ; 2) étude d’intervalles de temps de moins de 6 secondes ; 3) estimation du temps réalisée en tâche simple. Ainsi, les résultats de 421 participants atteints de schizophrénie et 537 participants contrôles sont inclus dans les analyses. Les résultats révèlent la présence d’une difficulté de taille modérée (g= -0.67) chez les personnes atteintes de schizophrénie, tant en modalité auditive (g= -0.65) que visuelle (g= -0.43), que les durées estimées soient inférieures (g= -0.59) ou supérieures (g= -0.76) à une seconde. Les résultats suggèrent un déficit d’estimation temporelle chez cette population, par rapport à une population contrôle. Le fait que l’estimation de durées de moins d’une seconde soit également affectée suggère que les difficultés d’estimation temporelle ne sont pas simplement attribuables aux déficits cognitifs généralement observés chez cette population. En effet, alors que l’estimation de durées supérieures à une seconde implique l’attention et la mémoire, l’estimation de durées de moins d’une seconde est relativement peu influencée par ces processus et constitue une mesure plus pure de la capacité d’estimer le temps. De plus, le déficit d’estimation temporelle étant observé tant en modalité visuelle qu’auditive, nous concluons qu’il reflète un problème de traitement temporel central, indépendant des processus périphériques liés

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Table des matières

Résumé ... iii

Table des matières………...……..….iv

Liste des figures ... vi

Remerciements ... vii

Introduction générale ... 1

Perception du temps ... 4

Modèle de traitement de l’information temporelle ... 4

Autres modèles de type « horloge interne » ... 6

Méthodes d’évaluation de la perception du temps ... 6

Schizophrénie ... 9

Critères diagnostiques ... 9

Changements apportés dans le DSM-V ... 9

Manifestations cliniques ... 10

Schizophrénie et estimation temporelle ... 11

Cognition ... 11 Schizophrénie. ... 11 Estimation temporelle ... 12 Neuroanatomie ... 14 Schizophrénie. ... 14 Estimation temporelle. ... 14 Dopamine ... 16 Schizophrénie. ... 17 Estimation temporelle ... 17 Objectifs ... 18 Méthode ... 19

Démarche de recherche d’articles ... 19

Critères de sélection des études ... 21

Description des études retenues ... 22

Méthodes statistiques ... 24

Biais de publication ... 25

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Résultats ... 26

Synthèse des résultats ... 26

Résultats globaux ... 26

Résultats selon la modalité étudiée. ... 29

Biais de publication ... 30

Discussion ... 32

Interprétation des résultats selon les durées étudiées ... 33

Interprétation des résultats selon la modalité étudiée ... 34

Implications au plan pratique ... 35

Limites ... 36

Recherches futures ... 37

Tableau 1. Caractéristiques des études retenues ... 46

Tableau 2. Principaux résultats des études ... 50

Tableau 3. Résultats de la méta-analyse globale (toutes les études incluent) ... 54

Tableau 4. Résultats de la méta-analyse sans l’étude de Rammsayer (1990) ... 55

Tableau 5. Résultats de la méta-analyse selon les durées étudiées ... 56

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Liste des figures

Figure 1. Modèle du traitement de l’information temporelle (Gibbon, Church & Meck,

1984; Allman, Teki, Griffiths & Meck, 2014). ... 5

Figure 2. Schéma des principales méthodes utilisées dans les études sur la perception du temps (adapté de Grondin, 2010). ... 8

Figure 3. Diagramme de flux des références trouvées à l’aide des mots clés sélectionnés selon les lignes directrices de PRISMA ... 20

Figure 4. Valeurs de taille d’effet de toutes les études retenues ... 27

Figure 5. Valeurs de taille d’effet sans l’étude de Rammsayer (1990) ... 28

Figure 6. Valeurs de taille d’effet par étude selon les durées étudiées ... 29

Figure 7. Valeurs de taille d’effet par étude selon la modalité utilisée ... 30

Figure 8. Graphique en entonnoir de la distribution des tailles d’effet autour de l’erreur standard. ... 31

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Remerciements

Écrire ces quelques lignes me fait réaliser que mon parcours doctoral touche à sa fin. Je vais bientôt réaliser mon rêve de devenir docteure en psychologie ! Durant les hauts et les bas qu’a connu mon parcours, j’ai eu la chance d’avoir des personnes extraordinaires à mes côtés. Sans elles, le présent mémoire n’aurait pas pu voir le jour.

Un premier lieu, je tiens à remercier Claudette Fortin, ma directrice de recherche, pour m’avoir partagé son savoir et ses connaissances. Merci d’avoir toujours été là quand j’en ai eu besoin. Votre ouverture et votre écoute m’ont permis d’avancer dans ce projet à mon rythme, sans pression. Surtout, merci d’avoir cru en moi.

Un énorme merci également à Caroline Cellard, pour son implication exceptionnelle au projet. Merci pour les conseils judicieux qui ont fait en sorte de pousser ma réflexion et de m’amener à nuancer mes connaissances sur la schizophrénie.

Un énorme merci à ma sœur, Carole-Anne Brosseau, pour la relecture et ses idées, mais surtout pour son amour et son soutien tout au long de ce parcours. Merci d’avoir été si fière de ta petite sœur. Tu m’as fait prendre conscience de tout ce que j’avais accompli. Plus que tout, merci pour ton écoute et ta présence sur laquelle j’ai toujours pu compter.

Un merci spécial à mon amie, Audrey Blanchette-Marier, présente à mes côtés depuis le début de mes études en psychologie. Merci d’avoir partagé mon rêve d’aller au doctorat, mais surtout d’avoir cru en moi. Merci d’être la personne avec qui je peux faire des « jokes de psy » qu’on est les seules à comprendre. Surtout, merci d’être la personne que tu es et d’être restée à mes côtés, malgré tout.

Enfin, merci à mon conjoint, David Collin, qui m’a encouragée, mais surtout supportée durant toutes ces années de mon parcours doctoral. Tu m’as donné la force de continuer et de foncer lorsque j’ai voulu abandonner. Tu es la personne la mieux placée pour savoir tout ce que cela a nécessité. À toi, mon amour, je dis : on a réussi !

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Introduction générale

Ce mémoire doctoral porte sur l’estimation temporelle chez les personnes atteintes de schizophrénie. L’objectif est de présenter une recension exhaustive des écrits existants sur le sujet en vue d’en faire une méta-analyse. Celle-ci vise à vérifier si une différence existe dans la perception du temps des personnes atteintes de schizophrénie, lorsque comparées à celles n’ayant pas cette maladie.

Pour être à même de produire des comportements adaptés aux situations, il faut estimer le temps correctement (Grondin, Pouthas, Samson & Roy, 2006). La capacité à bien percevoir le temps permet de suivre le cours temporel des évènements et ainsi, d’estimer le bon moment pour produire un comportement (Allman & Meck, 2012). En raison des distorsions et déficits perceptifs observés chez les personnes aux prises avec la schizophrénie, la perception du temps chez cette population est de plus en plus étudiée. Plusieurs études tendent à montrer que la schizophrénie est une maladie susceptible d’être associée à une altération de la perception du temps (p.ex., Carroll, O’Donnell, Shekhar & Hetrick, 2009 ; Davalos, Rojas & Tregeellas, 2011 ; Rammsayer, 1990). Cependant, il n’y a actuellement pas de consensus à savoir si une réelle altération des mécanismes liés à la perception du temps est présente chez cette population ou si les différences observées sont dues à des déficits d’autres processus cognitifs. Ainsi, certains auteurs croient qu’il n’y a pas de réelle altération de la perception du temps chez les personnes atteintes de schizophrénie (p.ex., Lee et al.2009). À ce jour, aucune méta-analyse ne permet d’avoir une perspective globale sur cette question chez les gens aux prises avec la schizophrénie. Une méta-analyse en neuroimagerie fonctionnelle a été produite par Ortuño, Guillén-Grima, López-García, Gómez et Pla (2011). Celle-ci avait deux objectifs, soit de chercher un circuit physiologique cérébral impliqué dans l’estimation du temps et d’établir si celui-ci est affecté chez les personnes atteintes de schizophrénie. Les résultats vont dans le même sens que les études précédentes en ce qui a trait au circuit impliqué dans l’estimation du temps chez les personnes en santé, soit un circuit thalamique-cérébelleux-cortical. La partie de l’hémisphère droit de ce circuit semble moins activée chez les personnes atteintes de schizophrénie, ce qui suggère, selon les auteurs, qu’il y aurait un problème de connectivité dans le circuit d’estimation temporelle de ceux-ci. Deux revues critiques de la littérature ont également été faites sur le sujet. Dans leur

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recension des écrits datant de 2011, Bonnot et ses collaborateurs abordent la psychopathologie et la neuroscience de la perception du temps des personnes atteintes de schizophrénie. Pour leur part, Gόmez, Marin-Méndez, Molero, Atakan et Ortuño (2014), abordent la question des réseaux cérébraux impliqués dans la perception du temps et la cognition chez cette même population. Aucune de ces deux recensions d’écrits n’inclut d’analyse quantitative. Le présent mémoire a donc pour objectif de pallier cette lacune en présentant une méta-analyse des résultats d’études portant sur l’estimation du temps chez les personnes atteintes de schizophrénie. Le but est de déterminer si cette population présente ou non un déficit d’estimation temporelle.

Dans un premier temps, une analyse globale des résultats sera effectuée afin de déterminer s’il existe une différence entre les personnes présentant une schizophrénie et ceux n’ayant pas cette maladie. Dans un deuxième temps, les résultats seront analysés selon les durées étudiées. Ceci permettra de voir, s’il y a présence de difficultés, si celles-ci sont identiques pour des durées courtes (moins de une seconde) ou plus longues (plus de une seconde). Un déficit dans ces deux catégories de durées pourrait indiquer un déficit général de l’estimation du temps chez les personnes atteintes de schizophrénie. Des différences entre ces catégories de durées permettraient de spécifier pour quelles durées les difficultés sont plus importantes. Il est connu que les processus sous-jacents à l’estimation de durées puissent différer selon que la durée considérée soit inférieure ou supérieure à une seconde. L’estimation d’intervalles de temps très brefs, de l’ordre de moins d’une seconde, se fait sur une base sensorielle et met en jeu l’exécution de processus automatiques, alors que l’estimation d’intervalles plus longs, habituellement de plus d’une seconde, requiert le support de processus cognitifs plus contrôlés (Rammsayer & Ulrich, 2005). Enfin, les résultats seront analysés selon que les tâches d’estimation temporelle soient réalisées en modalité auditive ou visuelle. Cette distinction est faite, car il est reconnu dans la littérature que des différences existent entre l’estimation de durées de différentes modalités. Par exemple, un intervalle de temps estimé en modalité visuelle est perçu comme étant plus court qu’un intervalle de même durée estimée en modalité auditive (Penney, Gibbon & Meck, 2000). Cette distinction pourrait permettre de détecter des particularités en fonction des modalités chez la population étudiée dans la présente méta-analyse.

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Dans la section qui suit, les principaux modèles d’estimation temporelle seront décrits. Les critères qui définissent la schizophrénie seront ensuite présentés. Enfin, les points communs entre l’estimation temporelle et la schizophrénie en ce qui a trait à la cognition, la neuroanatomie et la neurotransmission seront discutés.

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Perception du temps

L’estimation du temps est essentielle pour pouvoir se représenter correctement l’environnement qui nous entoure et être à même de prédire les évènements. Comme de nombreuses situations de la vie quotidienne impliquent d’estimer le temps, il est important de comprendre ce qui sous-tend ce processus (Zakay & Block, 1997). Lorsqu’on parle d’estimation du temps, une distinction est faite entre la perception du temps et le timing moteur (Rubia & Smith, 2004). La perception du temps réfère aux aspects passifs et actifs de la gestion cognitive du temps (p.ex. : estimer les durées de pauses « naturelles » dans une conversation ou dans des gestes, évaluer le temps qui passe en situation d’attente). Le timing moteur réfère à l’organisation temporelle des actes moteurs ou cognitifs (p.ex. : mouvements synchronisés dans différents sports, exécution de mouvements moteurs rythmiques en musique). Les aspects abordés dans la présente méta-analyse porteront sur la perception du temps plutôt que sur le timing moteur.

Modèle de traitement de l’information temporelle

Plusieurs modèles ont été développés en vue d’expliquer la façon dont l’information temporelle est traitée. La théorie du temps scalaire est à la base d’un modèle prévalant de traitement de l’information temporelle développé originalement par Gibbon, Church et Meck (1984), modèle le plus couramment utilisé actuellement pour interpréter les données d’estimation temporelle.

Ce modèle postule que le processus de traitement temporel est divisé en trois stades, soit celui de l’horloge interne, celui de la mémoire et celui du processus de décision (Allman, Teki, Griffiths & Meck, 2014; Buhusi & Meck, 2009; Gibbon et al., 1984). Au stade de l’horloge, on postule l’existence d’une source interne d’information temporelle puisqu’aucun organe externe ne permet de percevoir le passage du temps. Cette source est identifiée comme un « pacemaker », qui générerait des pulsations émises de façon relativement régulière pendant toute la durée de l’estimation temporelle. La vitesse d’émission des pulsations par le pacemaker peut être plus ou moins rapide dépendamment du contexte de la tâche d’estimation temporelle. Un interrupteur, se fermant lors de l’estimation, fait passer ces pulsations dans un accumulateur, qui est une sorte de mémoire sensorielle pour l’information temporelle. Le rôle de l’accumulateur est d’enregistrer les

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pulsations émises et la somme de celles-ci est ensuite transférée en mémoire de travail si la tâche le requiert. Cette somme représente la durée cible, qui peut être comparée avec celle d’une durée standard en mémoire de référence (aussi appelée mémoire à long terme). C’est au stade de la mémoire que le traitement comparatif entre les durées est effectué. Le processus de décision est issu de cette comparaison, ce qui permettra de fournir une réponse quant à l’estimation temporelle (Figure 1). Par exemple, dans une tâche de reproduction temporelle, il est demandé au participant de reproduire un intervalle qui lui est présenté. Pour être à même de bien reproduire l’intervalle, le participant doit avoir une idée, en mémoire de référence, de ce que représente la durée qui lui est demandée de reproduire. Tout au long de la reproduction de l’intervalle, le participant doit estimer la durée qui s’écoule jusqu’à ce que le nombre de pulsations accumulées en mémoire de travail soit équivalent à celui présent en mémoire de référence. Lorsqu’il juge que les durées sont identiques, le participant met fin à la reproduction de l’intervalle.

Figure 1. Modèle du traitement de l’information temporelle (Gibbon et al., 1984; Allman et al.,

2014). Comparateur Oui Non Mémoire de référence

Pacemaker Interrupteur Accumulateur l’horloge interne Stade de

Stade de la mémoire Mémoire de travail Stade du processus de décision

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6 Autres modèles de type « horloge interne »

En plus du modèle de traitement de l’information temporelle élaboré par Gibbon et ses collaborateurs (1984), il existe d’autres modèles du type « horloge interne ». Le « Sample Known Exactly Model » de Gibbon (1981) est un modèle spécifiquement conçu pour prendre en compte la variabilité rencontrée dans les tâches de bissection temporelle (voir prochaine section pour une explication de cette méthode). Comme la source majeure de l’imprécision dans les tâches de bissection temporelle est attribuée à la variance de la mémoire de référence, il est défendu que le temps perçu pour chaque durée puisse être connu de façon précise (Carroll et al., 2009). Le modèle « pacemaker-accumulateur » de Treisman (1963) est semblable et a inspiré le développement du modèle de traitement de l’information temporelle de Gibbon et ses collaborateurs (1984). Le modèle de Treisman met cependant l’accent sur le rôle de l’attention et de l’état émotionnel comme modulateur des composantes du modèle, telles que la vitesse de décharge des impulsions du pacemaker et le stade de prise de décision (Ameller, Delevoye-Turrell, Wilquin & Thomas, 2011). Finalement, le modèle de la porte attentionnelle (Attentional Gate Model), de Zakay (2005), dont les principales composantes sont semblables à celles incluses dans le modèle de Gibbon et collaborateurs (1984), c’est-à-dire, pacemaker, accumulateur, mémoire et processus décisionnel, met l’accent sur le fait qu’une porte attentionnelle s’ouvre lorsqu’on prête attention au temps, mais pas lorsqu’on porte attention à des évènements non temporels. Cette porte permet aux impulsions émises par le pacemaker de se rendre aux autres composantes du modèle.

Bien que d’autres modèles existent afin d’expliquer comment une personne perçoit le temps, les modèles précédents sont ceux qui ont été utilisés pour interpréter les données des articles retenus pour la présente méta-analyse. Ce sont donc les modèles d’intérêt dans le cadre de cette recherche.

Méthodes d’évaluation de la perception du temps

Lors d’une tâche d’estimation temporelle, les durées peuvent être estimées verbalement, par reproduction, par production ou par comparaison (Zakay & Block, 1997) (Figure 2). Durant l’estimation verbale, une durée est présentée au participant et lorsque celle-ci est terminée, le

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participant doit estimer, généralement en secondes, le temps écoulé. Dans les tâches de reproduction, il est demandé au participant de reproduire une durée cible après que celle-ci lui ait été présentée, par exemple, sous la forme d’un son émis pendant une certaine durée. Dans les tâches de production, une durée cible, exprimée en unités de temps (p.ex. « 4 secondes »), est mentionnée verbalement au participant et celui-ci doit produire une durée qu’il juge être similaire à celle demandée. Enfin, lors des tâches de comparaison, le participant doit estimer les durées de deux intervalles qui lui sont présentés successivement. Il doit ensuite indiquer si ces deux durées sont semblables ou différentes en indiquant, par exemple, si le deuxième intervalle est plus court ou plus long que celui qui le précède (Grondin, 2010). La méthode de comparaison présente certaines variantes (Grondin, 2010). Dans la méthode de stimulus simple, plutôt que de comparer directement deux intervalles qui sont présentés consécutivement, le participant doit faire un jugement après la présentation de chaque intervalle de temps et doit assigner l’intervalle comme étant soit court, soit long. Deux autres méthodes d’évaluation de la perception du temps découlent de la méthode de stimulus simple. La première est la méthode de bissection où l’intervalle le plus court et l’intervalle le plus long (standards) d’une série d’intervalles sont présentés en premier, et ce à plusieurs reprises afin que le participant les mémorise. Ces standards sont ensuite suivis par une série d’autres intervalles. Le participant doit alors catégoriser ces intervalles comme étant plus proche de l’un ou l’autre des deux standards. La deuxième est la méthode de généralisation temporelle. Dans celle-ci, un intervalle central (un standard se situant au milieu des autres intervalles) est présenté initialement à plusieurs reprises et le participant doit indiquer si les intervalles subséquents sont ou non de même durée que le standard. L’estimation temporelle peut aussi être faite prospectivement ou rétrospectivement (Zakay & Block, 1997). Lors d’une estimation prospective, le participant sait avant l’apparition de la durée cible qu’il devra l’estimer alors que dans l’estimation rétrospective, le participant est informé qu’il devra estimer la durée cible seulement après sa présentation. Le participant, lorsqu’il doit estimer le temps rétrospectivement, doit donc se baser sur des indices qu’il a en mémoire. Cette façon de procéder implique donc des processus cognitifs qui reposent sur de l’information non temporelle en mémoire. Dans l’estimation prospective, le participant étant prévenu qu’il doit estimer la durée à venir, les processus attentionnels sont particulièrement impliqués puisque l’attention du participant est orientée vers l’estimation de durée. Dans la présente méta-analyse, seules les

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études utilisant une méthode d’estimation temporelle prospective seront incluses. D’une part, celles-ci sont beaucoup plus nombreuses que les études d’estimation rétrospective. D’autre part, cela permettra de comparer des études portant sur les mêmes processus d’estimation temporelle.

Figure 2. Schéma des principales méthodes utilisées dans les études sur la perception du temps

(adapté de Grondin, 2010). Méthodes Rétrospective Estimation verbale Reproduction d'intervalles Prospective Estimation verbale Reproduction d'intervalles Production d'intervalles Comparaison d'intervalles Stimulus simple Bissection généralisation temporelle

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Schizophrénie

Critères diagnostiques

DSM-IV-TR1. La schizophrénie est déterminée par un ensemble de symptômes caractéristiques qui doivent être présents pour une durée minimale d’un mois, certains de ces signes devant être présents pendant au moins six mois (Critères A et C). Il doit y avoir présence de deux ou plus des symptômes suivants, soit des idées délirantes, des hallucinations, un discours et/ou un comportement désorganisé ou encore la présence de symptômes négatifs (Critère A). Cependant, un seul symptôme est requis si les idées délirantes sont bizarres, ou si, dans les hallucinations, des voix commentent constamment le comportement du sujet, ou si plusieurs voix conversent entre elles (American Psychiatric Association [APA], 2005). Les signes caractéristiques de la schizophrénie incluent des altérations du fonctionnement cognitif et émotionnel telles que des troubles de la pensée, de la perception, de la communication, de l’affect, du comportement, de l’initiative et de l’attention. C’est sur la base de la présence d’une variété de symptômes causant un dysfonctionnement social ou dans les activités que le diagnostic de schizophrénie peut être porté (Critère B). Finalement, les symptômes ne doivent pas survenir dans le cadre d’un autre trouble mental ou d’une affection médicale générale (Critères D et E) (APA, 2005).

Changements apportés dans le DSM-V. Des changements dans la définition des

symptômes de la schizophrénie ont été faits dans le DSM-V, afin de pallier certaines lacunes de la définition précédente (Bruijnzeel & Tandon, 2011). Cependant, les changements dans le diagnostic de la schizophrénie sont modestes. Trois changements mineurs ont été apportés pour le critère A. Premièrement, dans le DSM-IV-TR, il devait y avoir présence de deux manifestations de symptômes ou plus pour coter pour le critère A, à moins que les idées délirantes soient bizarres. Dans un tel cas, seulement une manifestation était requise. Dans le DSM-V cette distinction est laissée de côté ; toutes les manifestations du critère A sont considérées comme équivalentes, peu importe qu’elles soient bizarres ou non. Deuxièmement, pour poser le

1 Les critères diagnostiques utilisés dans la majorité des études répertoriées pour la méta-analyse sont ceux du

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diagnostic de schizophrénie à l’aide du DSM-V, il faut qu’il y ait obligatoirement un ou plus des symptômes positifs suivants : idées délirantes, hallucinations et/ou discours désorganisé. Finalement, seules la diminution de l’expression émotionnelle et de la volonté sont considérées comme étant des symptômes négatifs du critère A. Les autres critères demeurent inchangés ou incluent des modifications mineures qui n’ont pas d’impact sur le diagnostic. Il est à noter que les sous-types de schizophrénie ne sont plus présents dans le DSM-V.

Bien que le DSM-V prévoie certaines modifications concernant les critères permettant de diagnostiquer la schizophrénie, ces modifications sont modestes et ne semblent pas être d’ampleur à compromettre la validité de la présente étude.

Manifestations cliniques

La schizophrénie est caractérisée par une multitude de signes et de symptômes. Ceux-ci sont généralement catégorisés en symptômes positifs, négatifs, cognitifs, de désorganisation ou émotionnels (Tandon, Narsallah & Keshavan, 2009). On parle de symptômes positifs lorsqu’il y a présence de signes qui n’étaient pas visibles avant le début de la maladie, comme des hallucinations, des idées délirantes et une distorsion de la réalité. Pour leur part, les symptômes négatifs représentent une absence de comportements qui sont présents chez les personnes ne présentant pas la maladie telle une restriction des affects, une alogie et une perte de volonté et/ou d’initiation (Frith, 1992). Les atteintes cognitives sont également très prévalentes chez les personnes atteintes de schizophrénie, telles des difficultés mnésiques et attentionnelles, ainsi qu’au niveau de la vitesse de traitement de l’information et de la mémoire de travail. Celles-ci seront discutées en détail de la prochaine section du présent mémoire. La désorganisation et la pensée et du comportement est également caractéristique de la symptomatologie de la maladie. Chez cette population, il peut y avoir une fragmentation de la logique et de la pensée dirigée vers un but. Enfin, la présence de symptômes de nature émotionnelle est également très présente chez les personnes aux prises avec la schizophrénie. Parmi ces symptômes on compte des atteintes au niveau de l’expérience et de l’expression émotionnelle (Tandon et al., 2009).

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Schizophrénie et estimation temporelle

Cognition

Certains aspects de la cognition touchés chez les personnes atteintes de schizophrénie sont aussi impliqués dans l’estimation temporelle. Plus particulièrement, la mémoire et l’attention sont les domaines cognitifs qui semblent jouer un rôle à la fois dans la pathologie et dans la capacité à estimer le temps correctement.

Schizophrénie. Les personnes atteintes de schizophrénie présentent, en plus des

symptômes habituels de cette maladie, des problèmes au niveau cognitif ; approximativement 55 % à 80 % de ces personnes éprouvent des difficultés à ce niveau (Elissalde et al., 2011). Les problèmes répertoriés incluent des déficits au niveau de la mémoire, de l’attention, de la mémoire de travail, de la fluence verbale, des fonctions exécutives et de la vitesse psychomotrice (Ross, Margolis, Reading, Pletnikov & Coyle, 2006). Dans leur méta-analyse couvrant les années 1980 à 1997, Heinrichs et Zakzanis (1998) concluent que la mémoire verbale est le domaine cognitif le plus touché, suivi de l’attention soutenue et de la fluidité verbale. Bien qu’ils soient touchés à un degré moindre, tous les domaines cognitifs investigués montrent une différence d’en moyenne un écart-type entre les personnes atteintes de schizophrénie et les contrôles, les patients présentant une performance inférieure. Les auteurs suggèrent que les processus cognitifs répertoriés comme étant déficitaires chez cette population s’inscrivent dans le contexte d’un déficit général. Dickinson, Ramsey et Gold (2007) ont repris une méthodologie semblable à celle de Heinrichs et Zakzanis (1998) dans leur méta-analyse couvrant les années 1990 à 2006. Les résultats montrent que la vitesse de traitement de l’information et la mémoire épisodique verbale sont les domaines cognitifs les plus touchés. Des difficultés au niveau des fonctions exécutives, de la mémoire épisodique visuelle, de la mémoire de travail et de la vitesse psychomotrice ont également été répertoriées. Encore une fois, la différence entre les deux groupes est de l’ordre d’un écart-type en moyenne, suggérant des déficits légers à modérer. Une troisième méta-analyse couvrant les années 2006 à 2011 a été réalisée par Schaefer, Giangrande, Weinberger et Dickinson (2013). Les résultats sont similaires à ceux des deux méta-analyses précédentes. Ici également, les auteurs concluent en un déficit global des fonctions cognitives chez les personnes atteintes de

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schizophrénie. Elissalde et collaborateurs (2011) proposent, quant à eux, que les déficits cognitifs chez ces personnes soient spécifiques plutôt que globaux. Selon leurs résultats issus d’une recension d’écrits sur le sujet, la mémoire et les processus exécutifs, dont l’attention, seraient les domaines les plus touchés. Comme certains systèmes mnésiques, dont la mémoire procédurale et sémantique, seraient selon eux préservés, ces auteurs croient plutôt que les déficits sont limités à certains domaines cognitifs. Selon Palmer, Dawes et Heaton (2009), après le début de la maladie, les déficits cognitifs sont relativement stables.

Bien que les déficits énumérés précédemment soient présents chez une majorité de personnes atteintes de schizophrénie, des auteurs postulent que certaines de ces personnes présentent un fonctionnement cognitif intact. Selon Palmer et ses collaborateurs (2009), 20 à 25 % présentent des résultats normaux aux tests neuropsychologiques. De ce fait, les déficits cognitifs ne doivent pas être considérés comme une caractéristique de tous les cas de schizophrénie (Heinrichs & Zakzanis, 1998). Cependant, plusieurs auteurs croient qu’au contraire, les déficits cognitifs seraient universels et présents chez toutes les personnes atteintes de cette maladie (Keefe, Essley & Poe, 2005 ; Saykin et al., 1991). Cependant, la sévérité des problèmes cognitifs diffère grandement d’un individu à l’autre (Elissalde et al., 2011). De plus, les études visant à déterminer les déficits chez les personnes présentant une schizophrénie sont fortement hétérogènes quant aux domaines cognitifs touchés (Fioravanti, Carlone, Vitale, Cinti & Clare, 2005).

Estimation temporelle. Les écrits sur l’estimation temporelle prospective rapporte que

lorsque l’attention est portée sur le temps qui passe, la durée écoulée est perçue comme étant plus longue. Inversement, en présence de distractions et lorsque l’attention n’est pas orientée vers le temps, la durée semble être plus courte (Grondin, 2010). Pour être à même de bien estimer une durée, il faut, dans un premier temps, lui porter attention. L’attention portée aux processus temporels influence grandement l’estimation du temps lorsque celle-ci est faite de façon prospective (Zakay, 1998). De plus, la reproduction d’intervalles de temps est influencée par l’augmentation de la demande au niveau attentionnel (Grondin, 2010). Lorsqu’une tâche d’estimation temporelle est faite simultanément avec une autre tâche, l’attention est divisée entre

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ces deux sources d’information. Ceci fait en sorte que la durée est perçue comme étant plus courte en présence d’un distracteur (Schweickert, Fortin & Sung, 2007; Zakay, 1998). Ceci peut s’expliquer par le fait que, l’attention étant distribuée entre deux éléments, le nombre de pulsations qui est envoyé dans l’accumulateur est plus faible, ce qui fait en sorte que la durée est perçue comme étant plus courte. Le rôle de l’attention dans l’estimation du temps est également illustré lors de tâches où des interruptions dans les durées sont insérées pendant que le participant doit estimer le temps. L’anticipation d’une interruption dans l’estimation de durées fait en sorte que les durées sont perçues comme étant plus courtes (Gaudreault & Fortin, 2013). Ceci est expliqué par le fait que l’attention du participant passe de l’estimation de la durée au monitorage de l’interruption. Comme l’attention est partagée entre le monitorage de l’interruption et la durée, l’accumulation de l’information temporelle est diminuée, et par le fait même, la durée estimée est plus courte (Fortin, 2003).

Pour être à même de bien estimer le temps écoulé, il faut qu’il y ait présence, en mémoire, d’une trace de cette durée. La mémoire sert à emmagasiner les durées, soit à court terme ou à long terme. Lorsque le sujet doit comparer deux durées, il doit obligatoirement emmagasiner en mémoire à court terme une représentation de la première durée jusqu’à ce que la deuxième durée soit présentée (Fortin, Chérif & Neath, 2005). Si le temps écoulé entre la première et la deuxième durée est suffisamment long, la mémoire à long terme (ou de référence) sera également sollicitée (Droit-Volet & Wearden, 2003). Ainsi, la mémoire à court terme est sollicitée lors de l’estimation de courts intervalles de temps dans les tâches d’estimation verbale et de production (Fortin et Breton, 1995 ; Fortin & Massé, 1999 ; Fortin, Rousseau, Bourque, Kirouac, 1993 ; Neath & Fortin, 2005). Elle est également sollicitée dans les tâches de reproduction lorsque l’estimation est faite pendant ou immédiatement après la présentation de l’intervalle (Fortin & Rousseau, 1998). La mémoire à long terme est, quant à elle, sollicitée lors des tâches de comparaison, car l’estimation est faite seulement après la présentation du premier intervalle (standard) et du deuxième intervalle (cible). La mémoire à long terme est également sollicitée dans les tâches où il est demandé au participant de garder en mémoire une durée cible pendant la reproduction d’intervalles (Zakay, 1990).

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Comme certains domaines cognitifs affectés chez les personnes atteintes de schizophrénie sont impliqués lors de l’exécution de certaines tâches d’estimation temporelle (mémoire épisodique verbale et attention), il est possible de croire que l’estimation temporelle soit perturbée chez les personnes atteintes de schizophrénie.

Neuroanatomie

Certaines structures cérébrales susceptibles d’être lésées chez les personnes atteintes de schizophrénie sont également sollicitées lors de l’estimation temporelle. Ces principales structures sont le cervelet et le circuit striato-thalamo-cortical, celui-ci comprenant principalement les ganglions de la base, le thalamus et le cortex frontal.

Schizophrénie. Les anomalies cérébrales structurelles les plus souvent rencontrées chez

les personnes atteintes de schizophrénie incluent un élargissement des ventricules latéraux et du troisième ventricule, ainsi qu’une diminution du volume cérébral des lobes temporaux médians et du gyrus temporal supérieur gauche. Plus spécifiquement, il s’agit d’une réduction de la matière grise de ces lobes (Egan & Weinberger, 1997). Une réduction du volume des lobes frontaux, particulièrement des régions préfrontale et orbitofrontale est aussi souvent rencontrée, ce qui crée un hypofonctionnement de ces régions (Wong & Van Tol, 2003). On observe également des anomalies au niveau des lobes pariétaux, des ganglions de la base, du thalamus et du cervelet (Antonova, Sharma, Morris & Kumari, 2004). De plus, des perturbations dynamiques au niveau neuronal semblent présentes chez ces personnes. Ceci fait référence à un mauvais fonctionnement dans le recrutement de groupes de neurones ainsi que dans leur manière de changer d’état. Les anomalies résultant de ce dysfonctionnement qui sont les plus souvent rencontrées sont des phénomènes de déconnexion entre les régions temporales et frontales (Kaladjian et al., 2011).

Estimation temporelle. Plusieurs structures cérébrales sont impliquées dans l’estimation

temporelle. Il est généralement admis que l’estimation de durée est sous le contrôle d’un réseau neuronal complexe et n’est pas sous-tendue par une région unique du cerveau. Dans leur méta-analyse portant sur des études de neuroimagerie fonctionnelle, Ortuño et ses collaborateurs (2011) ont présenté un résumé des structures cérébrales et les circuits neuronaux impliqués lors

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de tâches d’estimation temporelle. Ils ont conclu que l’aire motrice supplémentaire, la région frontale droite et pariétale inférieure droite, l’insula droite, ainsi que le putamen gauche participent à l’estimation temporelle. Le cervelet postérieur droit et le gyrus temporal supérieur gauche semblent aussi avoir un rôle à jouer dans l’estimation de durées. Des maladies ou lésions focales des ganglions de la base, du thalamus, du cortex frontal prémoteur, du cervelet ainsi qu’au niveau des aires préfrontales droites entraînent plus de variabilité dans les réponses produites aux tâches d’estimation temporelle (Gibbon, Malapani, Dale & Gallistel, 1997). Les ganglions de la base et le cervelet seraient les structures cérébrales de choix pour superviser les opérations liées au temps, tandis que le circuit frontal-pariétal serait impliqué dans l’attention et la mémoire du temps (Pouthas et al., 2005). Pouthas et collaborateurs (2005) appuient l’idée que les régions présentant une hausse de leur activation avec l’augmentation de la durée sont les composantes clés du réseau sous-tendant l’estimation du temps. Ils proposent que l’aire prémotrice supplémentaire et le noyau caudé sont impliqués dans les mécanismes d’horloge interne, que le cortex cingulaire antérieur est impliqué dans l’attention soutenue et les processus liés à la réponse, et que le cortex prémoteur latéral est impliqué dans le maintien de l’information temporelle.

Bien que plusieurs structures cérébrales semblent jouer un rôle dans l’estimation du temps, le cervelet, les ganglions de la base et certaines régions du cortex cérébral semblent plus spécifiquement impliqués lorsque vient le moment d’estimer des durées. Le cervelet semble impliqué dans une variété de tâches dans lesquelles l’estimation du temps est une composante clé, comme la perception et la production du langage (Grondin, 2010). Des interventions chirurgicales ou des maladies affectant le cervelet entraînent généralement une hausse de la variabilité dans les processus temporels (Irvy & Spencer, 2004 ; Gibbon et al., 1997). Malgré le fait que les lésions au cervelet participent à la hausse de la variabilité des réponses dans les tâches d’estimation temporelle, la précision des réponses, à la fois pour les durées courtes et longues, ne semble pas être affectée (Gibbon et al., 1997). Selon Ivry (1996), les durées de moins d’une seconde seraient sous le contrôle du cervelet. Cette idée est supportée par plusieurs études qui montrent le rôle de cette structure cérébrale dans l’estimation de brefs intervalles de temps (Grondin, 2010).

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Les stades de l’horloge et de la mémoire du modèle d’estimation temporelle de Gibbon et al. (1984) sont affectés lors de maladies ou de lésions des ganglions de la base (Gibbon et al., 1997). Selon Ivry et Spencer (2004), ces structures joueraient un rôle dans les processus de décision. Elles seraient également une composante clé du pacemaker et de l’accumulateur. Les ganglions de la base, principalement le noyau caudé et le putamen, seraient également impliqués dans les premiers stades du processus d’estimation temporelle. Ils joueraient donc un rôle dans l’encodage des intervalles de temps (Grondin, 2010). Les lésions aux ganglions de la base font en sorte que les intervalles de temps courts sont sous-estimés, tandis que les intervalles de temps plus longs sont surestimés (Gibbon et al., 1997). Les durées plus longues qu’une seconde seraient modulées par les ganglions de la base (Ivry, 1996 ; Ivry & Spencer, 2004). Cependant, le rôle des ganglions de la base dans l’estimation de courts intervalles de temps demeure ambigu.

Parmi les régions du cortex cérébral impliquées dans la perception du temps, les régions frontales, pariétales et l’aire prémotrice supplémentaire semblent jouer un rôle critique. Les régions frontales semblent être importantes dans l’accumulation de l’information temporelle afin de construire la trace en mémoire d’un intervalle de temps, ainsi que dans la rétention de cette information (Grondin, 2010). Ortuño et collaborateurs (2011) mettent l’accent sur le rôle fonctionnel de l’aire prémotrice supplémentaire en tant qu’accumulateur temporel. Dans leur méta-analyse, ces auteurs confirment l’implication d’un circuit neurophysiologique cortical/sous-cortical relié à l’estimation du temps. Finalement, des lésions du cortex frontales produisent une sous-estimation à la fois des durées courtes et longues (Gibbon et al., 1997).

Comme certaines structures cérébrales affectées chez les personnes atteintes de schizophrénie sont impliquées lors de l’exécution de certaines tâches d’estimation temporelle (ganglions de la base, cervelet, circuit striato-thalamo-cortical), on peut donc penser que l’estimation temporelle soit perturbée chez ces personnes.

Dopamine

La dopamine est un neurotransmetteur impliqué à la fois dans l’estimation temporelle et dans la symptomatologie de la schizophrénie. De ce fait, il est possible de croire que les

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personnes atteintes de cette maladie, en présentant des anomalies dans la neurotransmission de la dopamine, pourraient avoir de la difficulté à percevoir correctement le temps qui passe.

Schizophrénie. Il est largement reconnu dans la littérature que les personnes atteintes de

schizophrénie présentent une hyperactivité dopaminergique, ce qui jouerait un rôle dans l’apparition de délires. Heinz et Schlagenhauf (2010) ont effectué une méta-analyse d’études en neuroimagerie portant sur l’implication de la dopamine dans la schizophrénie. Selon leurs résultats, une série d’études ont démontré un dysfonctionnement de la neurotransmission dopaminergique dans le striatum des patients atteints. Bien que les écrits actuels sur le sujet ne soit pas constante, plusieurs études rapportent des anomalies des récepteurs D1 chez les personnes affectées (Tost, Alam & Meyer-Lindenberg, 2010). Il est suggéré que le fonctionnement neuronal associé à la dopamine, comme l’attribution de saillance à un stimulus, est altéré chez les personnes atteintes de schizophrénie et que cette altération apparait contribuer à la formation de délires. L’augmentation de l’activité dopaminergique ferait en sorte que des stimuli sans importance se voient attribuer une saillance plus importante qu’ils ne le devraient (Heinz & Schlagenhauf, 2010).Les délires seraient alors des tentatives pour expliquer des stimuli perçus de façon erronée comme saillants, mais qui sont neutres en réalité.

Estimation temporelle. La dopamine joue également un rôle de choix dans notre capacité

à estimer le temps correctement. Ce neurotransmetteur jouerait un rôle dans l’estimation de durées relativement courtes, allant de millisecondes à quelques secondes (Jones & Jahanshahi, 2011 ; Meck, 1996). Plus précisément, la dopamine serait impliquée dans le stade de l’horloge interne du modèle du traitement de l’information temporelle de Gibbon et ses collaborateurs (1984). En effet, les substances agonistes à la dopamine, telle la méthamphétamine, augmenteraient la vitesse de l’horloge interne alors que les substances antagonistes comme l’halopéridol diminueraient la vitesse de l’horloge interne (Maricq & Church, 1983). De ce fait, l’administration de substances agonistes et antagonistes de la dopamine mène respectivement à une surestimation et à une sous-estimation des intervalles de temps (Jones & Jahanshahi, 2011). Ces changements suite à l’administration de ces substances dans l’expérience subjective de la

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durée des évènements montrent que la dopamine est impliquée dans l’estimation temporelle (Meck, 1996).

Objectifs

Selon les études recensées pour cette méta-analyse, il semble y avoir un consensus dans la littérature en faveur d’une différence entre les patients atteints de schizophrénie et les contrôles dans la perception du temps, et ce malgré le fait qu’aucune méta-analyse n’ait été réalisée à ce jour sur le sujet. La présente méta-analyse permettra de confirmer ou d’infirmer l’existence d’une telle différence.

L’objectif principal de cette méta-analyse est de savoir s’il existe réellement une différence entre les personnes affectées par la schizophrénie et les contrôles quant à leur estimation temporelle. Si elle existe, les présents résultats permettront d’estimer la taille de cette différence. Également, cette étude permettra de comparer les performances des deux groupes selon différentes durées, soit de moins ou de plus d’une seconde. Enfin, les performances seront analysées selon que les tâches aient été réalisées en modalité auditive ou visuelle.

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19 Méthode

Démarche de recherche d’articles

Les études traitant de la perception du temps chez les personnes aux prises avec la schizophrénie utilisées dans cette méta-analyse ont été trouvées à l’aide des outils suivants : Pubmed (août 2015), PsycNET (août 2015) et FRANCIS (août 2015). Les mots-clés utilisés ont été les suivants : « time perception », « schizophrenia » et « psychotic disorders ». Ces mots ont été trouvés à l’aide des outils mis à disposition dans ces bases de données afin de trouver les mots-clés avec les meilleures définitions. Ainsi, dans Pubmed et dans FRANCIS, ces mots-clés ont été insérés : « schizophrenia » ou « psychotic disorders » et « time perception ». Dans PsycNET, seuls les mots-clés « schizophrenia » et « time perception » ont été utilisés, car le terme « psychotic disorders » n’était pas un mot-clé selon cet outil de recherche. Les références des études ont également été parcourues afin de trouver des essais supplémentaires. Cette façon de procéder a permis de trouver sept études supplémentaires. Un total de 238 références datant de 1950 à août 2015 a été trouvé à l’aide de ces trois outils. Une fois les doublons retirés, il restait un total de 184 références. De celles-ci, 51 ont semblées, sur la base de leur titre et de leur résumé, être pertinentes et ont été retenues pour une évaluation plus attentive (Figure 3). Les diagnostics inclus dans cette méta-analyse étaient exclusivement ceux de «schizophrénie» fait à l’aide du DSM.

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Figure 3. Diagramme de flux des références trouvées à l’aide des mots-clés sélectionnés selon les

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21 Critères de sélection des études

De ces 51 articles, 17 ont été retenus pour être inclus dans la méta-analyse. Ces études ont été sélectionnées en utilisant les outils précédemment mentionnés, tout d’abord, en regardant le titre de celles-ci. Si le titre mentionnait l’étude de l’estimation temporelle chez les personnes atteintes de schizophrénie, l’article était examiné afin de vérifier si l’étude répondait aux critères d’inclusion. Ces critères étaient les suivants : l’étude devait évaluer l’estimation temporelle des personnes atteintes de schizophrénie, il devait y avoir présence d’un groupe contrôle sans maladie, les participants devaient être âgés d’au moins 18 ans, les méthodes utilisées pour mesurer l’estimation du temps devaient être prospectives, les intervalles produits ou estimés devaient être d’au plus six secondes, les tâches utilisées dans les études devaient être des tâches de perception du temps et non de timing moteur, l’estimation temporelle ne devait pas être faite en double tâche et les études devaient comporter des statistiques permettant de calculer un g de Hedges. Enfin, les études devaient être écrites en anglais ou en français. Les études utilisant une méthode de double tâche ont été exclues, car ce type de tâche sollicite des processus mentaux qui ne sont pas évalués dans la présente méta-analyse. Comme mentionné précédemment, l’estimation d’intervalles de plus d’une seconde requiert l’implication de processus cognitifs plus contrôlés (Rammsayer & Ulrich, 2005). Afin de minimiser le rôle des aspects cognitifs sur l’estimation du temps, les durées ne devaient pas dépasser plus de 6 secondes. Si les études trouvées différaient de ces critères, elles n’étaient pas retenues. Pour les études où il n’était pas clair qu’elles remplissaient toutes les conditions pour être incluses dans la méta-analyse, celles-ci ont été contre-vérifiées par Claudette Fortin, Ph.D., superviseure de ce projet de recherche. Diverses méthodes sont utilisées pour mesurer l’estimation du temps dans ces articles. Il s’agit de tâches de comparaison (bissection, stimulus simple, discrimination temporelle, généralisation temporelle), de reproduction, et de production. Également, les tâches pouvaient être réalisées en modalité auditive ou visuelle.

Comme mentionné précédemment, 33 autres articles ont préalablement été sélectionnés quant à leur titre ou à leur résumé, mais ont été exclus lors de leur lecture, car ils ne satisfaisaient pas tous les critères d’inclusion. Les critères d’exclusion étaient les suivants : utiliser des intervalles de temps de plus de six secondes, ne pas avoir de groupe contrôle, utiliser des tâches

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de timing moteur et ne pas avoir suffisamment de données présentées pour calculer une taille d’effet. Ainsi, six études ont été exclues, car les intervalles à estimer étaient de plus de six secondes (Broadhurst, A., 1969 ; Broota, Kaur & Batra, 1988 ; Tracy et al., 1998 ; Tysk, 1990 ; Tysk, 1984 ; Wahl & Sieg, 1980) ; huit, car les tâches utilisées étaient des tâches de timing moteur (Ameller, Delevoye-Turrell, Wilquin & Thomas, 2011 ; Bourdet, Brochard, Rouillon & Drake, 2003 ; Capa, Duval, Blaison & Giersch, 2014 ; Delevoye-Turrell, Wilquin & Giersch, 2012 ; Giersch, et al., 2009 ; Martin, Giersch, Huron & Wassenhove, 2013 ; Turgeon, Giersch, Delevoye-Turrell & Wing, 2012 ; Wilquin, Delevoye-Turrell, Ameller, Wing & Thomas, 2010) ; dix, car elles ne portaient pas sur le bon sujet (Borst & Cohen, 1989 ; Brown et al., 2005 ; Davalos, Kisley, Polk & Ross, 2003 ; Elvevåg, Brown, McCormack, Vousden & Golberg, 2004 ; Herzog & Brand 2009 ; Parsons, et al., 2013 ; Penney, Meck, Roberts, Gibbon & Erlenmeyer-Kimling, 2005 ; Peterburs, Nitsch, Miltner & Straube, 2013 ; Rizzo, Danion, van der Linden & Grangé, 1996 ; Todd, 2006), trois, car il s’agissait d’études descriptives (Brown, 2011 ; Hershey (1978) ; Ward, Kellendonk, Kandel & Balsam, 2012) ; une, car les données utilisées proviennent de mêmes participants qu’une étude déjà incluse (Tysk, 1983a) ; quatre, car il n’y avait pas de groupe contrôle (Badcock, Smith & Rawling, 1988; Crain, Goldstone & Lhamon, 1975; Mo, Kersey & Lowe, 1977; Mo & Kersey, 1980), deux, car elles n’étaient pas disponibles en anglais ou en français (Gudel-Trochimiwicz & Wandel, 1993 ; Iarovitskif & Baturin, 1991), une, car elle ne contenait pas assez de données pour calculer une taille d’effet (Papageorgiou et al., 2013) et une car elle n’était pas accessible (Wisner, 2005).

La principale variable dépendante de cet article est la performance à une tâche d’estimation temporelle, performance évaluée de différentes façons selon les articles, chez des personnes atteintes de schizophrénie et celles ne présentant pas cette maladie. Une description des articles retenus se retrouve dans le Tableau 1 à l’annexe A.

Description des études retenues

Les 17 études retenues montrent des résultats négatifs, ce qui suggère que les personnes atteintes de schizophrénie performent moins bien que les participants sains aux tâches d’estimation d’intervalle de temps. Un total de 421 patients et 537 participants contrôles forment

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l’échantillon final. Le groupe « schizophrène » comprend un total de 300 hommes et 101 femmes. Une étude ne mentionne pas la proportion d’hommes et de femmes de leur groupe expérimental (Davalos, Kisley & Freedman, 2005). L’âge moyen des participants est de 38.01 ans avec un écart-type de 9.94. Le groupe « contrôle » inclut un total de 248 hommes et 225 femmes. Deux études ne mentionnent pas la proportion d’hommes et de femmes dans le groupe contrôle (Davalos et al., 2005 ; Franck, Posada, Pichon & Haggard, 2005). L’âge moyen est de 32,43 ans avec un écart-type de 9,54. Trois études de mentionnent pas l’âge moyen de leurs échantillons (Martinez-Cascales, de la Fuente, Santiago & Santiago, 2003 ; Roy, Grondin & Roy, 2012 ; Bolbecker et al., 2014). Sur les 17 études retenues, neuf études ont tenu compte de la sévérité des symptômes psychotiques dans l’analyse de leurs résultats (Bolbecker, 2014 ; Carroll, Boggs, O’Donnell, Shekhar & Hetrick, 2008 ; Carroll, O’Donnell, Shakhar & Hetrick, 2009 ; Franck, 2005 ; Lee et al., 2009 ; Martinez-Cascales et al., 2013 ; Roy et al., 2012 ; Tysk,1983b et Waters & Jablensky, 2009). De ces neuf études, seulement deux ont trouvé un lien entre la sévérité des symptômes psychotiques et leurs mesures de perception du temps. Le fonctionnement cognitif et intellectuel des participants a été évalué dans huit études également. Trois études n’ont pas trouvé de liens entre le fonctionnement cognitif et intellectuel et leurs mesures de perception du temps, et deux études ont évalué ces variables sans toutefois indiquer si elles avaient un impact sur la performance des participants aux tâches d’estimation temporelle. Trois études ont démontré un impact d’au moins une variable cognitive/intellectuelle sur l’estimation d’intervalles de temps. Carroll et ses collaborateurs (2008) ont démontré un lien entre la tâche de complétion d’image de la WAIS-III et leurs mesurent de bissection visuelle. Lee et ses collaborateurs (2009) mentionnent un lien entre le quotient intellectuel, la performance au CPT-II, à l’empan de chiffre, au rappel différé et au Tri de carte du Wisconsin (WCST), et les mesures de perception du temps. Enfin, Roy et ses collaborateurs (2012) rapportent un lien entre les résultats obtenus à la WMS-III et au test d’empan spatial et leurs mesures d’estimation temporelle. Le niveau de scolarité des participants a été évalué dans dix études. Le niveau de scolarité moyen de l’échantillon global chez le groupe « schizophrène » est de 11.54 ans avec un écart-type de 1.8, alors qu’il est de 13.98 ans avec un écart-type de 2.12 chez le groupe « contrôle ». Aucune des études répertoriées n’a démontré un lien entre le niveau de scolarité et la performance aux mesures de perception du temps.

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En somme, la majorité des études retenues ne démontrent pas de lien entre les capacités d’estimation temporelle des participants et le type de médication, la sévérité des symptômes, le fonctionnement cognitif/intellectuel ou encore le niveau de scolarité.

Méthodes statistiques

Les calculs statistiques ont été effectués à l’aide de la 2e version du logiciel

« Comprehensive Meta-Analysis ». Cet outil permet d’effectuer des méta-analyses complètes, des analyses de sensibilité (par sous-groupe) et des méta-régressions. Lorsque certaines données ne sont pas présentées dans les études, le logiciel permet de les estimer (p.ex. écart-type et moyenne) à partir d’autres données disponibles comme la valeur de p ou de t. Enfin, le logiciel permet de vérifier la présence de biais de publication et de présenter les résultats sous forme de graphique de type « Forest plot ».

La mesure de taille d’effet choisie afin de réaliser la méta-analyse est le g de Hedges, car la majorité des études retenues ont une taille d’échantillon inférieure à 30 participants. Cette mesure de taille d’effet a été utilisée, car les variables des études retenues étaient continues. La statistique g de Hedges exprime une différence standardisée des moyennes des deux groupes à l’étude. Le niveau de signification utilisé dans la présente étude pour le g de Hedges est de 5 %. Les mesures utilisées afin de calculer le g de Hedges varient selon les études. Lorsqu’une fraction de Weber est disponible, cette mesure est privilégiée, car il s’agit d’un indice de la variabilité de l’estimation temporelle. La fraction de Weber provient de la théorie du temps scalaire. Selon cette théorie, l’écart-type d’un jugement temporel est une fraction constante de la moyenne, c’est-à-dire que le coefficient de variation (l’écart-type divisé par la moyenne) est constant malgré la variation de la durée à estimer. Cette relation linéaire entre l’écart-type et la moyenne de la durée subjective se traduit en une fraction de Weber (Droit-Volet & Wearden, 2003). Les autres mesures comprennent le nombre d’erreurs par groupe en termes de moyennes ou de pourcentages, la moyenne des différences des scores des deux groupes en millisecondes, le nombre de bonnes réponses, le coefficient de variation, le quotient moyen, le seuil moyen ou encore le point d’égalité subjective.

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L’homogénéité des résultats entre les différentes études est évaluée à l’aide de la statistique Q de Cochrane. Le niveau critique utilisé est de 0.05. La principale limite de ce test est qu’il est influencé par le nombre d’études inclus dans la méta-analyse. Comme le nombre d’études inclus dans la présente méta-analyse est limité, la statistique I2 sera également utilisée

afin de mesurer l’hétérogénéité (Higgins & Thompson, 2002). Cette statistique corrige le résultat en fonction du nombre d’études inclus.

Biais de publication

Pour vérifier l’existence d’un biais de publication, le Fail-Safe N de Orwin est calculé (Orwin, 1983). Il s’agit du nombre d’études non publiées avec un effet nul nécessaire pour amener l’effet observé à un niveau non significatif. L’analyse visuelle du graphique en entonnoir est également effectuée (Egger, Smith, Schneider & Minder, 1997). Ce graphique montre la taille d’effet de chaque étude individuelle (ici le g de Hedges) en fonction de la précision de l’estimation (ici, l’erreur standard). Un manque de symétrie autour de l’effet moyen est indicateur d’un biais de publication.

Sous-groupes analysés

Après avoir effectué une analyse globale des résultats de toutes les études, deux sous-groupes sont analysés, soit un groupe comprenant l’estimation de durées inférieures à une seconde et un groupe comprenant l’estimation de durées de plus d’une seconde, afin de comparer les différentes tailles d’effet et de savoir si l’estimation temporelle des personnes atteintes de schizophrénie diffère selon les durées. Les résultats des études sont également comparés selon les modalités étudiées, soit auditive et visuelle, afin de savoir si l’estimation de durées diffère selon la modalité utilisée chez cette population. Étant donné le nombre limité d’études incluses dans la méta-analyse, il n’est pas possible d’effectuer une méta-régression des résultats. Ainsi, seules des analyses de sensibilité (par sous-groupe) seront effectuées.

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26 Résultats

Les principales données ayant servi à réaliser la méta-analyse des résultats sont décrites dans le Tableau 2. Les critères de Cohen sont utilisés afin d’interpréter la taille du g de Hedges. Selon ces critères, une taille d’effet de 0.20 est qualifiée de petite, 0.50 de modérée et 0.80 de large (Cohen, 1988).

Synthèse des résultats

Résultats globaux. Au total, les résultats de 17 études ont été inclus dans la méta-analyse.

Ainsi, 421 personnes atteintes de schizophrénie et 537 sujets contrôles ont été évalués en ce qui concerne leur capacité à estimer le temps. Comme en témoigne le Tableau 3, le test d’homogénéité des résultats est significatif à un taux de 0.05, Q = 28.633 (p = 0.027). Selon le I², l’hétérogénéité est modérée (I2 = 44.121). Les résultats des différentes études sont donc

hétérogènes. Une analyse exploratoire a permis de déterminer qu’une étude en particulier contribuait à augmenter de façon significative l’hétérogénéité des résultats. Il s’agit de l’étude de Rammsayer (1990). Lorsque cette étude est retirée, le test d’homogénéité est non significatif, Q = 19.834 (p = 0.178) et l’hétérogénéité est faible (I2 = 24.374). Les analyses par sous-groupe ont été

effectuées sans l’étude de Rammsayer (1990) afin d’éviter d’augmenter l’hétérogénéité et ainsi rendre les comparaisons entre les groupes moins fiables. Ainsi, un total de 394 personnes atteintes de schizophrénie et 427 personnes non atteintes ont été incluses dans les analyses par sous-groupe (Tableau 4). Une justification, quant à l’analyse sans les données de Rammsayer (1990), sera présentée dans la section Discussion.

La taille de l’effet global est de -0.723 lorsque toutes les études sont incluses. L’effet global est statistiquement significatif (p < 0.01) et son intervalle de confiance à 95 % est de -0.888 à -0.559 (Figure 4).

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Figure 4. Valeurs de taille d’effet de toutes les études retenues

Lorsque l’étude de Rammsayer (1990) est exclue des analyses, la taille d’effet global est de 0.667. L’effet global est significatif (p < 0.01) et son intervalle de confiance à 95 % est de -0.811 à -0.523 (Figure 5).

Study name Subgroup within study Hedges's g and 95% CI

Bolbecker et al. (2014) moins 1 sec. Carroll et al. (2008) moins 1 sec. Carroll et al. (2009) Combined Davalos et al. (2002) moins 1 sec. Davalos et al. (2003) Combined Davalos et al. (2005) moins 1 sec. Davalos et al. (2011) moins 1 sec. Elvevag et al. (2003) moins 1 sec. Frank et al. (2005) moins 1 sec. Hooker et Perk (1999) Combined Lee et al. (2009) Combined Martinez-Cascales et al. (2013) plus 1 sec. Rammsayer (1990) moins 1 sec. Roy et al. (2012) Combined Tysk (1983b) plus 1 sec. Volz et al. (2000) plus 1 sec. Waters et Jablensky (2009) plus 1 sec.

-2,00 -1,00 0,00 1,00 2,00

Favours A Favours B

Meta Analysis

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Figure 5. Valeurs de taille d’effet sans l’étude de Rammsayer (1990)

Résultats selon les durées étudiées. Un total de 12 études présentait des données pour

des durées de moins d’une seconde et de neuf études pour des durées de plus d’une seconde (Figure 6).Pour ce qui est des durées de moins d’une seconde, le test d’homogénéité des résultats est non significatif à un taux de 0.05, Q = 10.139 (p = 0.518). Les résultats des différentes études sont donc homogènes. Selon le I2, l’hétérogénéité est négligeable (I2 = 0.000). La taille de l’effet

global est de -0.589. L’effet global est statistiquement significatif (p < 0.01) et son intervalle de confiance à 95 % est de -0.747 à -0.431.

En ce qui concerne les résultats pour les durées de plus d’une seconde, le test d’homogénéité est non significatif, Q = 9.016 (p = 0.341). Selon le I2, l’hétérogénéité est faible

(I2 = 11.266). Les résultats des différentes études sont donc homogènes. La taille de l’effet global

est de -0.759. L’effet global est statistiquement significatif (p < 0.01) et son intervalle de confiance à 95 % est de -0.958 à -0.560 (Tableau 5).

Study name Subgroup within study Hedges's g and 95% CI

Bolbecker et al. (2014) moins 1 sec.

Carroll et al. (2008) moins 1 sec.

Carroll et al. (2009) Combined

Davalos et al. (2002) moins 1 sec.

Davalos et al. (2003) Combined

Davalos et al. (2005) moins 1 sec.

Davalos et al. (2011) moins 1 sec.

Elvevag et al. (2003) moins 1 sec.

Frank et al. (2005) moins 1 sec.

Hooker et Perk (1999) Combined

Lee et al. (2009) Combined

Martinez-Cascales et al. (2013) plus 1 sec.

Roy et al. (2012) Combined

Tysk (1983b) plus 1 sec.

Volz et al. (2000) plus 1 sec.

Waters et Jablensky (2009) plus 1 sec.

-2,00 -1,00 0,00 1,00 2,00

Favours A Favours B

Meta Analysis

(36)

29

Figure 6. Valeurs de taille d’effet par étude selon les durées étudiées

Résultats selon la modalité étudiée. Un total de 11 études utilisait la modalité auditive et

cinq la modalité visuelle lors de la réalisation des tâches d’estimation d’intervalles de temps (Figure 7). Pour ce qui est des études en modalité auditive, le test d’homogénéité des résultats est non significatif à un taux de 0.05, Q = 12.604 (p = 0.247). Les résultats des différentes études sont donc homogènes. Selon le I2, l’hétérogénéité est faible (I2 = 20.658). La taille de l’effet

global est de -0.692. L’effet global est statistiquement significatif (p < 0.01) et son intervalle de confiance à 95 % est de -0.851 à -0.534.

En ce qui concerne les résultats pour les études en modalité visuelle, le test d’homogénéité est non significatif, Q = 6.919 (p = 0.140). Les résultats des différentes études

Group by

Subgroup within study

Study name Subgroup within study Hedges's g and 95% CI

moins 1 sec. Bolbecker et al. (2014) moins 1 sec. moins 1 sec. Carroll et al. (2008) moins 1 sec. moins 1 sec. Carroll et al. (2009) moins 1 sec. moins 1 sec. Davalos et al. (2002) moins 1 sec. moins 1 sec. Davalos et al. (2003) moins 1 sec. moins 1 sec. Davalos et al. (2005) moins 1 sec. moins 1 sec. Davalos et al. (2011) moins 1 sec. moins 1 sec. Elvevag et al. (2003) moins 1 sec. moins 1 sec. Frank et al. (2005) moins 1 sec. moins 1 sec. Hooker et Perk (1999) moins 1 sec. moins 1 sec. Lee et al. (2009) moins 1 sec. moins 1 sec. Roy et al. (2012) moins 1 sec. moins 1 sec.

plus 1 sec. Carroll et al. (2009) plus 1 sec. plus 1 sec. Davalos et al. (2003) plus 1 sec. plus 1 sec. Hooker et Perk (1999) plus 1 sec. plus 1 sec. Lee et al. (2009) plus 1 sec. plus 1 sec. Martinez-Cascales et al. (2013) plus 1 sec. plus 1 sec. Roy et al. (2012) plus 1 sec. plus 1 sec. Tysk (1983b) plus 1 sec. plus 1 sec. Volz et al. (2000) plus 1 sec. plus 1 sec. Waters et Jablensky (2009) plus 1 sec. plus 1 sec.

-2,00 -1,00 0,00 1,00 2,00

Favours A Favours B

Meta Analysis

Figure

Figure 1. Modèle du traitement de l’information temporelle (Gibbon et al., 1984; Allman et al.,  2014)
Figure 2. Schéma des principales méthodes utilisées dans les études sur la perception du temps  (adapté de Grondin, 2010)
Figure 3. Diagramme de flux des références trouvées à l’aide des mots-clés sélectionnés selon les  lignes directrices de PRISMA
Figure 4. Valeurs de taille d’effet de toutes les études retenues
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