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Contributions à l’étude de l’insertion de l’évaluation environnementale dans les processus de décision de gestion des déchets Livrable 2 du projet PRODDEVAL

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HAL Id: hal-02605682

https://hal.inrae.fr/hal-02605682

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environnementale dans les processus de décision de

gestion des déchets Livrable 2 du projet PRODDEVAL

Lynda Aissani, R. Barbier, C. Beurois, C. Déchaux, Jacques Méry, P. Ward

Perkins

To cite this version:

Lynda Aissani, R. Barbier, C. Beurois, C. Déchaux, Jacques Méry, et al.. Contributions à l’étude

de l’insertion de l’évaluation environnementale dans les processus de décision de gestion des déchets

Livrable 2 du projet PRODDEVAL. [Rapport de recherche] irstea. 2014, pp.118. �hal-02605682�

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DEVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT MINISTERE DE L’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE MINISTERE DE L’INDUSTRIE, DE L’ENERGIE ET DE L’ECONOMIE NUMERIQUE

Contributions à l’étude de

l’insertion de l’évaluation

environnementale dans les

processus de décision de

gestion des déchets

Livrable 2 du projet PRODDEVAL

AVRIL 2014

Aissani Lynda, Irstea ; Barbier Remi, Engees ; Beurois Christophe,

Médiation & Environnement ; Déchaux Claire, Irstea ; Mery Jacques,

Irstea ; Paul Ward-Perkins, Engees (par ordre alphabétique)

Coordinateur Technique : Elisabeth Poncelet

Ademe Direction Déchets et Sols

20 avenue du Grésillé

BP90406

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L’ADEME en bref

L'Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie (ADEME) est un établissement public sous la tutelle conjointe du ministère de l'Ecologie, de l'Energie, du Développement durable et de la Mer et du ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche. Elle participe à la mise en œuvre des politiques publiques dans les domaines de l'environnement, de l'énergie et du développement durable. L'agence met ses capacités d'expertise et de conseil à disposition des entreprises, des collectivités locales, des pouvoirs publics et du grand public et les aide à financer des projets dans cinq domaines (la gestion des déchets, la préservation des sols, l'efficacité énergétique et les énergies renouvelables, la qualité de l'air et la lutte contre le bruit) et à progresser dans leurs démarches de développement durable.

www.ademe.fr

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Table des matières

Présentation du document ... 6

1ère partie – Synthèse des monographies des cas d’usage de l’ACV à l’étranger ... 7

1 L’ACV dans la planification régionale en Lombardie... 7

2 L’ACV et l’incinérateur de Turin ... 9

2ème partie – Les ateliers Proddeval – ORDIF ... 13

Préambule ... 13

1. La mise en œuvre de trois ateliers avec des acteurs de l’ORDIF ... 13

1.1. Pourquoi des ateliers de parties prenantes dans le programme Proddeval ? ... 13

1.2. Partenariat avec l’ORDIF et construction du panel d’acteurs ... 14

2. Réalisation et résultats des trois ateliers ... 15

2.1. Atelier 1 ... 15

2.2. Atelier 2 ... 16

2.3. Atelier 3 ... 18

2.4. Eléments de synthèse ... 20

3ème partie – La problématique des nuisances odorantes : approche bibliographique ... 23

1 Les odeurs et leur perception ... 23

2 L’odeur comme stresseur environnemental. ... 24

3 La gestion des nuisances odorantes ... 27

Références bibliographiques ... 29

Annexe 1 – Cas d’usage à l’étranger identifiés dans la littérature ... 31

Annexe 2 – Monographie du cas d’étude de Lombardie / Milan ... 39

Annexe 3 – Monographie du cas d’étude de Turin ... 63

Annexe 4 – Présentation de Proddeval aux participants de l’atelier 1 ... 89

Annexe 5 – Tableau de repérage besoins/outils dans les conduites de projets (atelier 2) ... 91

Annexe 6 – Optimisation des dispositifs d’évaluation environnementale ex ante (atelier 2) ... 93

Annexe 7 – Présentation du format « ACV pas à pas » et production des participants (atelier 3) ... 95

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Liste des sigles

ACV = Analyse du Cycle de Vie

ATO = Ambito Territoriale Ottimale (traduit en français par zones territoriales optimales) CESTEC = CEntro per lo Sviluppo Tecnologico, l’Energia e la Competitività

CS = collecte sélective

Finlombarda = Finanziaria per lo sviluppo della Lombardia (une agence technique publique au service de la Région Lombardie, remplace CESTEC)

ORDIF = Observatoire Régional des Déchets d'île-de-France

PPGR = Piano Provinciale per la Gestione dei Rifiuti (Plan Provincial de Gestion des Déchets) SEA = Strategic Environmental Analysis (traduit en français par analyse environnementale stratégique) TMB = Traitement Mécano-biologique

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Résumé du projet

La mise en place de nouvelles installations de traitement de déchets municipaux se voit souvent confrontée à des controverses locales importantes concernant notamment leur impact sur l’environnement et la santé des riverains. Pour faire la preuve de la pertinence environnementale de leurs choix, les collectivités ont de ce fait de plus en plus recours à des outils d’évaluation environnementale à caractère systémique. Par ailleurs, les évaluations environnementales des scénarios de gestion de déchets envisagés sont devenues obligatoires pour les plans de gestion des déchets. Il est possible de dénombrer trois grands types de méthodologie d’évaluation environnementale : l’Analyse du Cycle de Vie, l’Empreinte Ecologique et le Bilan Carbone® ou Bilan GES. Dans ce contexte, les objectifs du projet PRODDEVAL sont (i) de comprendre la place des outils d’évaluation environnementale dans le processus décisionnel et dans le dialogue public en matière de gestion des déchets (rôles de « langage de discussion » ou de « juge de paix » par exemple) ; (ii) d’analyser leur efficience au regard de leurs cibles et de leurs usages et (iii) d’améliorer ces outils en tant que supports aux processus décisionnels, au regard des besoins identifiés.

La méthodologie employée se décline en quatre étapes :

− Inventaire de situations d’usage de ces outils au cours de processus décisionnel ;

− Monographie et analyse sociotechnique d’études de cas ;

− Bilan et émergence de modalités de déploiement visant à une meilleure intégration au processus ;

− Tentative de conception d’un outil amélioré au regard des enjeux mis en lumière.

Cette dernière étape sera menée en parallèle, sous forme d’un travail de thèse (ADEME) intitulé « Méthodologies d’évaluation locale de la toxicité et des odeurs intégrées à l’Analyse du Cycle de Vie déployées dans un processus décisionnel de gestion des déchets ».

Les résultats attendus à l’issue de ce projet sont la mise en évidence des usages et effets sociaux de ces outils et de leur adéquation ou inadéquation aux modalités actuelles de décision et de concertation dans le domaine de la gestion des déchets. Ces résultats doivent nous permettre de répondre aux questions suivantes : les réponses apportées par de tels outils sont-elles suffisantes pour les parties intéressées ? Comment doivent-ils être conçus et mis en œuvre pour répondre aux diverses attentes des collectivités et des parties prenantes ?

Project abstract

The introduction of new municipal waste treatment facilities is frequently faced with significant local controversy particularly concerning their impact on the environment and health. To demonstrate the environmental relevance of their choices, the local authorities thereby have increased their use of systemic environmental assessment tools. Besides the environmental assessment of waste management scenarios have become compulsory for waste management plans. There are three main types of environmental assessment methodology: Life Cycle Assessment, Ecological Footprint or Carbon Footprint.In this context, the objectives of the PRODDEVAL project are (i) to understand the role of environmental assessment tools into decision-making and for public dialogue in the field of waste management (role of “language focus” or “judge of peace” for example), (ii) to analyze their efficiency in terms of their targets and their uses, and (iii) to improve these tools as supports decision-making with regard to the identified needs.

The methodology consists in four steps:

− Inventory of situations to use these tools in decision-making;

− monograph and socio-technical analysis of case studies;

− review and emerging deployment keys for a best integration in the decision-making process;

− Attempt to design an improved tool in terms of highlighted issues.

This last step will be conducted in parallel, as a thesis (ADEME) entitled “Methodologies for local assessments of toxicity and odours incorporated into the Life Cycle Assessment for a waste management decision-making”.

Expected results at the end of this project are the identification of uses and social effects of these tools and their adequacy or inadequacy of existing arrangements for consultation and decision-making in the field of waste management. These results should allow us to answer the following questions: Are the answers provided by these tools sufficient to stakeholders? How should they be designed and implemented to answer the diverse needs of local authorities and stakeholders?

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Présentation du document

Ce rapport présente la suite des travaux menés dans le cadre du projet Proddeval afin d’éclairer le rôle des outils d’évaluation environnementale dans la décision de gestion des déchets.

A la suite des premières enquêtes menées en France et des deux monographies discutées dans le livrable n°1, l’enquête s’est poursuivie à l’étranger pour i dentifier d’autres contextes et, peut-être, d’autres usages et d’autres effets des outils d’évaluation. L’identification de cas d’utilisation effective a été difficile, et le choix s’est finalement centré sur l’Italie où deux situations intéressantes ont été analysées, respectivement en Lombardie (Milan) et à Turin.

Nous avons parallèlement mis en discussion nos résultats et exploré des pistes d’amélioration des usages des outils d’évaluation environnementale avec des professionnels de la gestion des déchets, dans le cadre d’un partenariat avec l’ORDIF. Trois ateliers ont été organisés entre fin 2013 et début 2014, dont nous restituons le déroulement.

Enfin, nous avons abordé la problématique des odeurs, dont la prise en charge par les outils d’évaluation ex ante de type ACV en est à ses balbutiements. Pour l’heure, il apparaît que la question des nuisances odorantes s’invite essentiellement dans les dernières phases des processus décisionnels, lorsque le projet est rendu public, qu’une enquête est menée, puis naturellement qu’elle est susceptible de prendre de l’ampleur en phase de cohabitation. Le travail bibliographique qui a été conduit permet de brosser un état des lieux sur la question du passage de la perception des odeurs à l’expression publique d’une nuisance, puis sur la gestion de ces nuisances.

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ère

partie – Synthèse des monographies des cas d’usage de

l’ACV à l’étranger

Auteurs : Paul Ward-Perkins, Rémi Barbier

Afin de compléter l’identification des usages et effets potentiels des outils d’évaluation environnementale dans les processus décisionnels, nous avons orienté notre enquête vers l’étranger. Nous avons procédé dans un premier temps à l’identification de cas d’étude potentiels. Ce travail d’identification a été long1 et globalement peu fructueux : seul un nombre limité de cas a pu être recensé à partir d’articles publiés dans des journaux scientifiques consacrés à l’ACV, l’évaluation environnementale et/ou la gestion des déchets, en contactant les auteurs puis, de fil en aiguille, les contacts que ceux-ci nous avaient fournis (cf. Annexe 1). En fin de compte, au regard de leur intérêt potentiel pour le projet et de l’intérêt manifesté pour l’enquête par les universitaires auteurs des ACV2, deux cas italiens ont été retenus : ils concernent respectivement la planification régionale en Lombardie, et un projet controversé d’incinérateur à Turin. On propose ci-après une synthèse de ces deux cas d’étude en Lombardie et à Turin, les monographies complètes étant disponibles respectivement en Annexes 2 et 3.

1 L’ACV dans la planification régionale en Lombardie

L’Analyse du Cycle de Vie a été mobilisée comme aide pour la révision du plan de gestion des déchets municipaux de la région lombarde. Celle-ci compte 9,8 millions d’habitants, et 12 provinces (l’équivalent des départements français). En Italie, les Régions établissent des plans de gestion de déchets municipaux tous les 5-6 ans, dont le but est de définir les grandes orientations et objectifs chiffrés, qui servent ensuite de cadre stratégique pour la mise en œuvre de systèmes de gestion intégrés au sein de « zones territoriales optimales » (ATO), dont le périmètre peut correspondre à celui des Provinces, soit l’équivalent des départements français. Depuis 2006, une loi nationale impose d'atteindre un taux de 65% de collecte sélective à partir de 2012. Malgré un retard au niveau de toutes les régions, cet objectif paraît envisageable dans le moyen-terme pour le nord de l’Italie qui a une moyenne entre 40% et 50% de collecte sélective. L’ACV a été commandée à l’Ecole Polytechnique de Milan par CESTEC (maintenant FINLOMBARDA), une agence technique publique au service de la Région Lombardie. Il s’agissait pour la Région à la fois d’être pionnière dans l’usage de l’ACV dans le contexte de l’adoption de la directive cadre de 2008 qui en recommande l’usage, et d’apporter des réponses argumentées à des questions fréquemment posées, comme par exemple : y a-t-il un réel avantage à poursuivre un taux de collecte sélective élevé ? Ou : vaut-il mieux incinérer ou faire un traitement mécano-biologique des déchets résiduels ?

L’ACV a démarré en 2009 et s’est déroulée sur deux ans. Des réunions ont été organisées tous les trois-quatre mois pour définir collectivement les grandes lignes de l’étude. M. Grosso, auteur de l’ACV, indique qu’il y a eu relativement peu d’implication de la Région, le déroulement du projet se caractérisant par une « pleine confiance » de la Région vis-à-vis des experts ACV.

Le but des ACV était dans un premier temps d’effectuer un bilan du système de gestion des déchets de la Lombardie en 2009. Dans un deuxième temps, en étroite collaboration avec un économiste du bureau d’étude ARS, en charge de l’estimation de la quantité de déchets produite en 2020, l’étude a proposé et comparé quatre scénarios pour 2020 :

1 Ce travail s’est appuyé sur une revue de littérature – cf. recension des principaux cas en annexe1 - et des contacts avec une

quinzaine d’experts internationaux.

2 Nous remercions particulièrement Mario Grosso, de l’Ecole polytechnique de Milan pour son aide précieuse dans la préparation et

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- scénario de référence, avec maintien global du schéma technique et mise en conformité avec les objectifs nationaux de collecte sélective (60%) ;

- scénario « 2020 65% » avec objectif de collecte sélective légèrement supérieur et passage à la collecte sélective en porte-à-porte et séparation des flux à la source ;

- scénario « 2020 70% », identique au précédent mais avec un taux de collecte sélective encore supérieur ;

- scénario « 2020 70% multi », variante du précédent avec collecte en mélange de la fraction (verre, plastique et métal) suivie d’un passage en centre de tri.

Dans un troisième temps, l’étude a été déclinée sur quatre provinces de la région présentant des situations hétérogènes sur le plan de la gestion de leurs déchets. Enfin, en raison de nouveaux questionnements soulevés par la Région suite à la remise de l’étude, une seconde ACV a été commanditée en 2012 pour l’étude de sous-scénarios d’optimisation du traitement des déchets résiduels, portant respectivement sur l’incinération ou le Traitement Mécano-Biologique (TMB).

L’ACV a pris en compte cinq des dix grandes catégories d’impacts : acidification, augmentation de l’effet de serre, formation d’ozone photochimique, toxicité humine et demande d’énergie cumulée. Ses résultats ont servi à soutenir les décisions prises dans le plan régional sur deux grands aspects :

- premièrement pour justifier l’augmentation significative du taux de collecte sélective visé, qui doit ainsi passer globalement de 51% en 2009 à un minimum de 67% d’ici 2020, légèrement supérieur aux 65% exigés par la loi nationale italienne (qui fixait en 2006 cet objectif pour 2012), ce qui implique de généraliser la collecte en porte à porte en flux séparés. La pertinence de cette option est à la fois environnementale, et économique : le bureau d’étude ARS a parallèlement démontré que les coûts supplémentaires liés aux moyens mobilisés pour une collecte en porte à porte seraient normalement amortis dans le moyen / long terme par la hausse de la récupération des matériaux recyclables associée.

Comme l’expliquent le représentant de la Région et l’économiste d’ARS, les études économiques et environnementales donnent à la Région l’autorité nécessaire pour demander cette généralisation de la collecte sélective à domicile :

ARS (avec Région) « Dans le plan régional, il y a une évaluation [économique]. Au final, les coûts totaux sont identiques parce que quand vous avez un taux de collecte sélective plus élevé, vous obtiendrez plus de recettes en vendant du papier, du plastique et ainsi de suite. Donc vous avez un coût de collecte plus élevé, mais vous avez plus de recettes donc en moyenne vous avez au le même coût final. Donc l’évaluation était principalement basée sur le fait que du point de vue ACV, l’introduction de plus de collecte en porte à porte pourrait avoir un impact environnemental à un certain niveau. […] Et cette hypothèse est importante pour les municipalités car chaque municipalité doit décider quoi faire, quelle modalité de collecte adopter, lorsqu’ils publient des appels d’offre pour la collecte. Donc beaucoup de municipalités pensent toujours que le système avec un point de collecte et bac [de regroupement] est suffisant : ils sont OK avec ça, ils sont contents avec ça. Mais avec ces nouvelles études, l’ACV et l’évaluation économique montrent aux municipalités : « Regardez. L’impact environnemental et le coût ne sont pas plus importants. Donc faites le ». »

- deuxièmement pour démontrer l’absence de besoin de construction de nouvelles infrastructures de gestion des déchets suite au constat d’une surcapacité actuelle en Lombardie, et justifier l’objectif de donner la priorité aux installations les plus grandes et performantes aux dépens des plus petites dans un contexte global de stabilisation, voire de baisse de la production des déchets.

L’étude a été soumise à enquête publique en août 2013 pendant deux mois lors de la phase obligatoire de présentation publique du plan. Au moment de la réalisation de l’enquête (fin 2013), la Région avait reçu

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toutes les critiques adressées au plan et prévoyait d’y répondre afin de pouvoir valider le plan début 2014. Sur approximativement 90 lettres reçues, trois portent directement sur l’ACV. Aucun acteur ne critique l’objectif régional d’atteindre un taux de collecte sélective de 67% d’ici 2020, l’ACV venant en fait confirmer la pertinence environnementale de l’objectif national. Les remarques sur l’ACV sont décrites comme « très techniques » et issues principalement de gestionnaires de « petites installations », soucieux du devenir de leur installation mais ne remettant pas en cause la cohérence d’ensemble du plan.

2 L’ACV et l’incinérateur de Turin

En 2006, le plan provincial de gestion des déchets (PPGR) annonce la construction de deux incinérateurs dans la province turinoise : un premier incinérateur au sud de la ville de Turin, dans un quartier de la commune de Grugliasco (39 000 habitants) appelé Gerbido, d’une capacité de 421 000 tonnes de déchets incinérés par an, et un second au nord de la ville de Turin, dans la commune de Settimo-Torinese (48 000 habitants), d’une capacité annoncée d’environ 290 000 tonnes. La construction du premier incinérateur à Gerbido est annoncée depuis plusieurs années et apparaît donc sans surprise dans le plan provincial de 2006. Elle est justifiée sur deux plans : premièrement la saturation imminente du centre de stockage utilisé jusqu’alors pour les déchets municipaux résiduels, et deuxièmement les pressions juridiques et réglementaires au niveau national et européen qui poussent vers la diminution maximale du recours à l’option de stockage. Ce premier incinérateur est très soutenu politiquement, et comme l’explique un chercheur de l’Ecole Polytechnique de Turin : « il y a eu beaucoup de discussions sur où devrait se trouver l’incinérateur, mais pas sur si l’incinérateur avait lieu d’être ou pas. Si ? n’était pas une question. La question était où? et de quelle taille? De fait, cet incinérateur a bien été construit.

Conçu pour fonctionner en complément au premier incinérateur, l’incinérateur de Settimo-Torinese devait se charger, selon le plan provincial, de l’élimination des déchets industriels. Avec des arguments similaires à ceux qui ont servi à la justification du premier incinérateur, le deuxième incinérateur a été défendu par les autorités publiques comme « indispensable » pour anticiper « de manière responsable » la gestion future des déchets provinciaux. La construction de ce second incinérateur a fait l’objet d’une contestation menée par un groupe d’associations environnementales et citoyennes mené par la branche régionale de l’association environnementale nationale Legambiente. Selon Legambiente en effet, un système de gestion des déchets avec un taux de collecte sélective (CS) conforme à la loi nationale (65%), et l’introduction d’un traitement mécano-biologique des déchets avant incinération, rendraient la quantité de déchets ménagers résiduels et industriels à incinérer gérable par un seul incinérateur. Invoquant le précédent de 1996, où une ACV avait déjà été réalisée par la Province de Turin pour évaluer de manière générale sa stratégie de gestion des déchets, l’association demande à nouveau « l’arbitrage » fourni par cet outil d’évaluation environnementale. Les autorités de la Province acceptent de financer l’étude, et s’engagent à annuler le projet si elle parvient à démontrer l’absence de nécessité du deuxième incinérateur.

Une « table de concertation » (tavolo di confronto) est organisée le 27 février 2008 pour définir collégialement les termes selon lesquels l’ACV sera menée. Cette « table » réunit : la Province de Turin (commanditaire), la commune de Settimo-Torinese, l’ATO-Rifiuti (agence technique de gestion des déchets), la Région du Piémont, l’association Legambiente (porte-parole principale des opposants de l’incinérateur), des associations locales, et deux chercheurs l’Ecole Polytechnique de Turin. Le projet de construction de l’incinérateur étant à ce stade déjà bien avancé – les autorités publiques prévoyaient le lancement de l’appel à projet au niveau européen pour la fin de l’année 2008 – le temps alloué à l’étude par les autorités fut très réduit, ne laissant finalement guère plus de deux mois de temps de travail effectif aux chercheurs de l’Ecole Polytechnique de Turin à qui elle fut confiée. De fait, pour eux, l’ACV devait être envisagée comme une pré-étude offrant un premier regard sur la situation. Elle devrait normalement être suivie d’une seconde pré-étude, afin de compléter les premiers résultats.

L’ACV devait explorer quatre scénarios :

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- 1B : 52% de recyclage avec TMB

- 2A : 65% de recyclage (en conformité avec la réglementation nationale) sans TMB

- 2B : 65% de recyclage avec TMB (proposition de Legambiente)

La contrainte temporelle a joué un rôle majeur pour la sélection des critères d’évaluation, conduisant en fait les protagonistes à se limiter à deux impacts environnementaux principaux : la contribution à l’augmentation de l’effet de serre, plutôt demandée par l’association Legambiente, et la performance énergétique du système, plutôt demandée par la province du Turin3. Des discussions ont ensuite eu lieu sur la portée de l’évaluation, c’est-à-dire techniquement l’alternative « mid-point » VS « end-point » : le choix s’arrêta sur la première option, pour éviter de devoir introduire des conventions ou hypothèses supplémentaires susceptibles d’influencer le résultat. Une seconde vague de discussions a tourné autour des limites de système et de son élargissement (aux déchets traités en dehors du territoire administratif) afin d’obtenir une meilleure « vue d’ensemble » du système de gestion des déchets.

De courtes réunions, trois à quatre par semaine, ont scandé le déroulement de l’étude. Elles réunissaient comme interlocuteurs principaux le réalisateur de l’étude (Ecole Polytechnique de Turin), des membres de l’association Legambiente, et des techniciens de la Province de Turin. Le processus a été mené par l’Ecole Polytechnique selon une démarche participative : chaque étape devait être validée par tous les participants avant de passer à la suivante, afin de garantir l’acceptation finale des résultats par tous les participants. Une attention particulière a été accordée à la discussion des choix et hypothèses à faire dans les premières étapes : « nous [les ACVistes], explique un chercheur de l’Ecole Polytechnique, savons [que certains choix de départ influencent particulièrement les résultats]. Donc en tant qu’experts ACV, nous disons aux participants : Regardez, voici l’hypothèse qui va avoir une énorme influence sur les résultats, donc passons plus de temps à discuter de ceci ou cela. Nous savons que ça c’est une hypothèse, mais on s’est mis d’accord dessus au début du processus. (…) On dit ce qui est important ». La collecte des données a été répartie entre les participants, et chaque source d’information discutée et validée par tous les participants avant d’être utilisée.

Comme l’explique encore un chercheur :

« La raison [d’avoir choisi une approche participative] était que si nous ne commencions pas comme ça, les participants ne se mettraient jamais d’accord sur les résultats ; ils n’accepteraient jamais les résultats. Donc d’un côté il y aurait eu une discussion sans fin sur quel type de données est nécessaire et qui va les fournir… Donc si vous partagez ceci avec plus de gens, que vous les ramenez régulièrement autour d’une table, cela facilitera le processus. Donc disons que vous êtes censés vous rencontrer dans une semaine ou dix jours, et que les participants sont censés venir avec les données qu’ils ont trouvées et les montrer aux autres : les autres savent à ce moment précis qu’ils peuvent se plaindre ou se taire (rire). […] Et quand vous avez terminé le processus, vous dites aux autres : « voici les résultats. Donc […] nous nous sommes mis d’accord pour commencer ainsi, nous avons collecté l’information d’une façon consensuelle, donc il y a eu une discussion sur les points importants, et voici les résultats ». En ce sens, ça a fonctionné ».

Concrètement, l’étude s’est appuyée en grande partie sur des données de type secondaire, c’est-à-dire obtenues à partir de bases de données publiques s’appuyant sur des moyennes européennes ou nationales, et parfois (mais rarement) régionales. Cela lui a valu d’être critiquée pour être trop théorique et ainsi en trop grand décalage avec la réalité du terrain. Toutefois, le système adopté est décrit comme relativement efficace par les différents protagonistes étant donné les circonstances. La temporalité très réduite et l’enjeu de l’étude pour les divers protagonistes ont certainement contribué à l’avancée de la démarche. Pour le responsable de Legambiente, « on a eu plusieurs réunions tendues. C'était des réunions dans lesquelles

3 A titre exploratoire, la méthode Ecoindicator99, proposée par Legambiente, a été mobilisée pour avoir une évaluation des impacts

locaux et le modèle Life Cycle Costing (LCC), proposée par la Province, a été utilisé pour attribuer un coût financier aux différents scénarios de l’ACV.

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j'avais dit : ok la table [de concertation] elle finit ce soir, parce que si on n’est pas d'accord ce soir, on ne va pas au-delà. Et après il faut trouver des accords ».

Les résultats furent acceptés par les deux parties (Province et Legambiente), mais ils ne lui attribuèrent pas la même signification.

Tableau 1 : Tableau extrait de l’article de Blengini et al. (2012) indiquant les principaux résultats de l’ACV4

Pour l’association environnementale les résultats établissent la supériorité environnementale du scénario « 65% recyclage + TMB » et donc démontrent « clairement » la non-nécessité du second incinérateur. Pour la Province par contre, les conclusions tirées de l’étude sont à relativiser en raison d’une part de ses conditions de réalisation (temps court, incertitudes…), et d’autre part du manque général de « réalisme » de la solution proposée par Legambiente. En particulier, pour les autorités provinciales, le taux de collecte sélective de 65%, bien qu’imposé par la réglementation nationale, serait tout simplement irréaliste, ce que conteste naturellement l’association Legambiente. On voit ainsi que l’ACV déplace la problématique sur le plan social ou plus exactement sociotechnique : peut-on raisonnablement espérer des habitants et du système de valorisation qu’ils atteignent cet objectif ? Des divergences d’interprétation ont également porté sur la pertinence environnementale et économique de l’option TMB. Une nouvelle étude plus approfondie était originalement prévue pour dépasser les limites de la première, mais celle-ci ne vit jamais le jour.

L’ACV n’a pas réussi à faire admettre aux autorités publiques l’absence de nécessité d’un second incinérateur, et le rappel des limites de la démarche (Extrait de la lettre de la Province de Turin donnant sa lecture de l’étude : « La méthodologie ACV est un instrument utile, mais qui a pour autant des limites méthodologiques, et qui exige ainsi beaucoup de prudence pour l’interprétation et l’utilisation des résultats ») lui a permis de se distancier des résultats.

Mais elle a quand même obligé la Province à officiellement envisager une révision du plan provincial de 2006, cf. cet extrait de la lettre de la Province donnant son interprétation de l’étude (cf. Annexe 3) :

« L’étude n’a pas mis en évidence de différences suffisantes entre les scénarios pour considérer impossibles les choix retenus par le plan provincial actuel ; pour autant la Province et l’ATO-R estiment qu’ils devraient, avec un sens de la responsabilité, procéder à l’actualisation du plan provincial. »

Pour Legambiente et l’Ecole Polytechnique, l’ACV a fourni des arguments forts pour remettre en question la construction du second incinérateur : Ecole polytechnique de Turin « [les représentants de la Province] avaient déjà décidé qu’ils voulaient un incinérateur, et il est en construction. Mais je crois qu’ils ont compris qu’ils n’ont pas besoin d’un second. Donc je crois que nous avons influencé la décision dans ce sens. Je ne peux pas être à 100% certain, mais je pense que l’étude était un passage décisif pour dire : nous ne voulons pas d’un second ».

L’Ecole Polytechnique de Turin note par ailleurs un effet d’apprentissage important au niveau de tous les acteurs par rapport aux questions environnementales, soulignant l’apport non négligeable de l’ACV en tant qu’outil pédagogique : l’ACV a par exemple permis de relativiser l’importance environnementale accordée a priori à certaines étapes du processus, et elle a de même contribué à mettre en exergue l’intérêt énergétique du recyclage.

4

On retrouve les critères augmentation de l’effet de serre (GWP-total) et consommation énergétique (GER). NER représente l’énergie non-renouvelable requise et GWP-fossil l’effet de serre causé par la consommation d’énergies fossiles.

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Finalement, dans l’attente de nouvelles études, la construction du second incinérateur a été mise en suspens, même si la Province a fait en sorte de ne fermer aucune porte. L’histoire du second incinérateur n’est donc toujours pas finie, et il est possible qu’avec la mise en fonctionnement du premier incinérateur depuis début 2013, la Province puisse justifier sur la base de l’observation directe le besoin de construction d’un deuxième incinérateur. Il faut cependant noter que les enjeux ont changé depuis 2008, notamment en raison du constat d’une diminution importante du nombre de déchets produits depuis la crise.

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ème

partie – Les ateliers Proddeval – ORDIF

Auteurs : Christophe Beurois, Rémi Barbier, Lynda Aissani, Paul Ward-Perkins

Après avoir rappelé la finalité de ce dispositif, on reviendra sur le déroulement de chacun des trois ateliers avant d’exposer les leçons que nous en avons retirées pour le projet.

Préambule

La question au cœur du programme Proddeval semble a priori une question simple que nous pourrions résumer de la façon suivante : en quoi l’évaluation environnementale relative à la gestion des déchets participe-t-elle à l’aide à la décision ? Les chercheurs qui travaillent sur la question de l’évaluation environnementale et les praticiens de l’ingénierie sociale dédiée à la problématique de la gestion des déchets au sens large savent bien que la réponse à cette question simple mobilise des dimensions complexes qui supposent pour le moins une certaine prudence.

D’une part, les différentes modalités de la réalisation d’une évaluation environnementale et les missions qu’on lui assigne en font un objet loin d’être stabilisé. D’autre part, dès lors qu’on s’attache à réfléchir à la façon dont cet objet va interférer avec un processus démocratique se déroulant dans son cadre habituel de contraintes, on ne peut manquer de s’interroger sur le sens même de la décision. S’agit-il simplement d’apporter des éléments quantitatifs de performances environnementales ? S’agit-il, d’une façon qualitative, de savoir en quoi l’évaluation environnementale a permis de réinterroger les critères de choix, de conforter des options, d’éclairer des enjeux sous un jour nouveau ? En d’autres termes, nous pourrions poser l’hypothèse qu’il existe une graduation des effets de l’évaluation environnementale allant d’une contribution à la qualité globale du processus décisionnel (langage de discussion, rapprochement des acteurs, clarification des hypothèses,…) où l’évaluation resterait un objet à distance mais qui participe à la construction sociale à une contribution plus directe à la décision du maître d’ouvrage qui intègre les résultats à ses critères de choix.

Le projet de recherche Proddeval s’est construit sur les éléments habituels de ce genre d’exercice : analyse bibliographique et terrains d’investigation, en France et à l’étranger. Cette matière est majoritairement recueillie sur des processus achevés pour certains depuis longtemps, pouvant introduire dans la réflexion des biais difficilement traçables. La sensibilité du sujet « déchets » explique pour beaucoup la réticence des acteurs à accepter une observation in vivo de leur processus.

Les ateliers de Proddeval sont une alternative à ces observations in vivo avortées à travers un dispositif à mi-chemin entre des focus group et du mini-public pour mettre en miroir les premiers enseignements de Proddeval avec un panel de parties prenantes.

1. La mise en œuvre de trois ateliers avec des acteurs de l’ORDIF

1.1.

Pourquoi des ateliers de parties prenantes dans le

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Les travaux du programme Proddeval ont balayé un large spectre de cas d’étude (plus d’une trentaine) et quatre ont fait l’objet d’une étude plus approfondie ayant abouti à la rédaction de monographies. L’ensemble de ces cas relevait de projets achevés et, pour certains, depuis longtemps. En d’autres termes, y compris pour ceux ayant fait l’objet d’investigation de terrain et de rencontres avec les différents protagonistes, il n’a pas été possible de réaliser des observations in vivo alors que celles-ci auraient été précieuses pour tester certaines hypothèses posées en début de programme. Il s’agissait notamment de s’attacher à comprendre en quoi le mode de production partagé de l’évaluation environnementale renforçait ou non sa puissance décisionnelle en permettant la reconnaissance par les parties prenantes de la pertinence du choix et des modalités de mesure. Les histoires étaient, de ce point de vue, trop lointaines.

Nous avons bien évidemment tenté de mettre en œuvre des observations in vivo, mais les acteurs de ces territoires potentiels d’expérimentation ont refusé ce qu’ils jugeaient comme une prise de risque dans des processus à fort potentiel de conflit.

Les ateliers d’acteurs mis en place dans le cadre de Proddeval ont donc eu comme objectifs de confronter les premiers enseignements de Proddeval avec des acteurs engagés dans la gestion des déchets afin d’en tester la pertinence.

1.2.

Partenariat avec l’ORDIF et construction du panel d’acteurs

L’ORDIF (Observatoire Régional des Déchets d'Ile de France) travaille depuis des années sur la question de l’évaluation de la gestion des déchets sur le périmètre de la région Ile de France. A côté des questions de performance économique ou d’efficience des systèmes, les questions de l’environnement et de la gouvernance sont également au cœur des réflexions de l’Observatoire. Il regroupe la grande majorité des acteurs franciliens dans le domaine des déchets, toutes catégories confondues, associations, élus et opérateurs. D’une façon naturelle, il a semblé rationnel de rapprocher le programme Proddeval de l’ORDIF pour ces questions de fond et pour pouvoir s’appuyer sur les moyens logistiques et de mobilisation de l’Observatoire.

Le panel d’acteurs a été recruté sur la base du fichier adhérents de l’ORDIF. Un premier appel à manifestation d’intérêt a été lancé au printemps 2013 permettant aux futurs participants de comprendre les objectifs du programme Proddeval et des ateliers partenariaux avec l'ORDIF. Une quinzaine de participants potentiels ont alors fait acte de candidature. Cette première étape a également permis à l’équipe de recherche, d’avoir une vision plus claire des caractéristiques sociales du panel et des ajustements éventuels à rechercher pour le lancement.

Le panel initial comportait 9 membres :

- Karima FERRI, Technicienne Supérieure, SIEVD ;

- François AIME, Direction de la Propreté et de l'Eau, Mairie de Paris ;

- Tatiana RICHARD, Chargée de projet qualité-sécurité-environnement et développement durable, SMITOM CENTRE OUEST SEINE-ET-MARNAIS ;

- Laurent DESNOYERS, Directeur technique, SITOM93

- Fabienne PIOTELAT, Directrice Métiers, Véolia Propreté Ile-de-France ; - Jean Marc van de KERKHOVE, Advice & Consulting

- Alexandra LALET, Chargée de mission gaz à effet de serre, SITA France ; - Lydie VINCENT, Responsable technique, SIETREM de Lagny-sur-Marne ; - Claire BARA, Ingénieur Environnement, SYCTOM

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Ce panel était majoritairement composé de techniciens de syndicats de gestion de déchet (66%) et pour le reste de représentants de prestataires de service. Des représentants associatifs et des élus ont été sollicités mais ils ont décliné avec comme argument que l’objet des travaux est un peu lointain de leur préoccupation ou que le dispositif considéré est trop chronophage.

Les ateliers, soumis aux aléas des agendas des participants, a vu le nombre de participants évoluer (9 participants pour le premier atelier, 6 pour le second et 7 pour le dernier). Il est resté cependant suffisamment varié dans sa composition pour permettre une bonne richesse des échanges et une bonne variabilité des points de vue.

2. Réalisation et résultats des trois ateliers

Le principe général des ateliers s’est construit autour de trois matinées :

- Atelier 1 :

o Présentation de Proddeval et du cadre des ateliers

o Discussion sur les pratiques et usages de l’évaluation environnementale du point de vue des participants

- Atelier 2 :

o Repérage des outils d’aide à la décision mobilisés par les participants en fonction des besoins identifiés dans leur conduite de projet

o présentation succincte des principaux outils d’évaluation environnementale disponibles

o Discussion sur leurs conditions d’optimisation

- Atelier 3 :

o Déroulé collectif d’une ACV « pas à pas » sur un cas théorique permettant une appropriation plus fine de l’outil

o Evaluation par les participants du changement qualitatif de leur perception de l’outil via un questionnaire.

La partie suivante reprend les points saillants de chaque atelier.

2.1.

Atelier 1

L’atelier 1 avait pour vocation de clarifier la question de l’évaluation environnementale du point de vue des participants, en intégrant notamment son lien à la décision, de la mettre en miroir avec les premiers enseignements de Proddeval puis de tenter de construire un processus « normalisé » de conduite de projet de gestion des déchets. Il s’agissait de façon complémentaire de tenter de repérer si et où pouvait intervenir un processus d’évaluation environnementale dans un tel schéma standardisé. Cette partie du travail s’est appuyée sur l’analyse pas à pas d’un cas fictif. En d’autres termes, ce premier exercice avait vocation à construire un socle commun de pratiques avant de se projeter dans les étapes ultérieures sur la question de leur optimisation, notamment au moyen de l’intégration d’une évaluation environnementale. Cette première séquence a également permis d’expliciter ce qu’on entend par évaluation environnementale en balayant rapidement quelques grands modèles (ACV, Bilan GES, Empreinte écologique).Le déroulement de l’atelier a été le suivant.

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Dans un premier temps, le projet Proddeval a été présenté aux participants (Annexe 4). S’en est suivi une discussion sur la place de l’évaluation environnementale (EE) dans la prise de décision déchets, dont il ressort les éléments suivants :

- L’évaluation environnementale est peu exploitée durant la phase de préparation d’un projet. Elle sert plutôt à conforter une décision prise (en amont) ou à ajuster un projet sur des points secondaires. Les décisions (privées et publiques) sont en effet fortement cadrées par d’autres facteurs, dont principalement les opportunités foncières et les contraintes budgétaires.

- L’évaluation environnementale peut encourager la participation (« outillage social ») en réunissant les acteurs et en permettant d’ouvrir la discussion. Elle encourage un dialogue entre les techniciens, les élus, les acteurs économiques et potentiellement les habitants.

- L’évaluation environnementale paraît s’être imposée comme un point de passage obligé, notamment vis-à-vis des parties prenantes, ne serait-ce que pour témoigner du souci de la prise en compte de l’environnement. Cependant, quelques limites sont discutées :

o Une des premières difficultés mentionnées en matière d’évaluation environnementale et en particulier d’ACV est celle de la non-commensurabilité des différentes catégories d’impacts.

o Seconde difficulté, la complexité des résultats obtenus et la quasi impossibilité de les « faire parler » face à un élu ou à un public. Un participant évoque même un « effet repoussoir ». Les résultats d’une évaluation environnementale sont difficilement appréhendables par un habitant lambda dont les préoccupations portent plutôt sur les questions sanitaires et sur les nuisances. Les oppositions citoyennes aux nouvelles constructions touchent parfois davantage au domaine de la justice environnementale (inégale répartition des nuisances et impacts), qu’à celui de la performance environnementale.

o Troisième difficulté, les résultats d’une évaluation environnementale, et donc le choix de filière préconisée, dépendent en grande partie de la manière dont l’évaluation est menée. L’absence de normes pour certains outils (empreinte écologique) contribue à la remise en cause de leur crédibilité. Certains voient même les outils d’évaluation environnementale comme manipulables : « on peut leur faire dire ce qu’on veut ».

Certains participants soulignent que l’évaluation environnementale a aussi le potentiel de fragiliser une décision plutôt que la renforcer. Cela peut être dû en partie à la place importante accordée à la présentation des incertitudes.

2.2.

Atelier 2

L’atelier 2 s’est déroulé en deux parties. Sur la base des acquis de l’atelier 1 et des expériences de chacun, le groupe a d’abord réfléchi sur l’adéquation, en termes de conduite de projet (cf. Annexe 5) :

- entre un certain nombre d’enjeux ou de besoins :

o Obligations réglementaires ;

o Dialogue entre les parties prenantes ;

o Dialogue entre techniciens et élus ;

o Localisation géographique de l’installation ;

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o Prévention du conflit avec les associations et les riverains ;

o Démarche commerciale ;

o Dialogue entre la maîtrise d’ouvrage et l’opérateur ;

o Financement.

- et les outils disponibles :

o Calcul environnemental (ACV, Bilan effet de serre et Empreinte Ecologique) ;

o Retour d’expérience (recours à des experts, visites de sites, benchmarking) ;

o Etudes locales d’impacts (volet sanitaire, faune et flore, bruit, air, odeurs) ;

o Etude technico-économique ;

o Communication ;

o Information ;

o Etude juridique.

Cette première partie a permis de croiser avec les premiers acquis de Proddeval et d’identifier quelles étaient, aux yeux des participants, les conditions nécessaires au renforcement de la place de l’évaluation dans le champ décisionnel.

Les principaux résultats sont les suivants :

- Comme mentionné durant le premier atelier, les premières étapes d’un projet type sont surtout d’ordre technico-économique et juridique. Les décideurs et techniciens ont d’abord tendance à partir d’une opportunité (généralement foncière) pour ensuite clarifier le cadre d’action possible, principalement au niveau des contraintes budgétaires et légales. L’évaluation environnementale joue le plus souvent un rôle secondaire dans un processus de prise de décision (en bonus). De même le calcul environnemental vient plutôt à l’appui d’une décision déjà prise et n’intervient finalement que peu dans l’élaboration et l’aide au choix des scénarios.

- Considérée par certains comme un besoin, et par d’autres comme un outil, la communication apparaît centrale pour le bon déroulement du processus de prise de décision, notamment au niveau de l’implication de toutes les parties prenantes (y compris les habitant). Certains participants soulignent la distinction entre les termes « communication » (politique) et « information » (scientifique).

- Il est mentionné que l’usage ex ante de l’évaluation environnementale pourrait répondre à plusieurs besoins, notamment au niveau de l’inclusion des parties prenantes et l’évitement des conflits. Mais il est aussi admis que, dans la réalité, l’outil n’est que très rarement mobilisé ainsi.

Suite à une présentation succincte de la méthodologie des trois grands outils de calcul environnemental (ACV, Bilan effet de serre et Empreinte Ecologique), le groupe a travaillé sur l’optimisation du processus de déploiement des dispositifs d’évaluation environnementale ex ante, pour les trois dispositifs (calcul environnemental, retour d’expérience et Etude local d’impact précédemment citées) selon les critères suivants (cf. Annexe 6) :

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- Selon quelles modalités ?

- Quelle est la forme attendue des résultats ?

- Quels sont les principaux obstacles ou risques dans le dialogue avec les parties prenantes?

- Quels sont les principaux obstacles à un usage efficace en aide à la décision ? Il en ressort essentiellement les points suivants :

- Dans un déroulement de processus décisionnel idéal, l’évaluation environnementale pourrait intervenir à deux moments : en amont pour un « défrichage » de la situation et en aval pour l’appui d’une décision. Pour l’ACV, la méthode du « screening » (pré-étude) permettrait de répondre au besoin de défrichage ex ante pour un coût financier et temporel réduit.

- La question de la sélection des impacts environnementaux à évaluer a provoqué beaucoup de discussion parmi les participants. Les participants souhaiteraient sortir d’un processus de décision trop cloisonné ou sujet aux effets de mode (« on privilégie l’impact qui fait le une de l’actualité ») et identifient aussi le besoin d’inclure davantage les parties prenantes. Mais en raison de la complexité des enjeux de la gestion des déchets, cette mise en œuvre est souvent problématique. Le besoin de pouvoir communiquer clairement l’information s’avère donc être central. Comme pour toute démarche de vulgarisation, une communication élargie de l’information se fait au risque d’une perte de la pertinence de l’information donnée.

- La place d’une tierce personne dans le processus est évoquée comme souhaitable. Ce tiers pourrait veiller au bon déroulement du processus, et jouer le rôle de relais d’information entre les différentes parties prenantes.

2.3.

Atelier 3

L’atelier 3 a consisté en un focus sur l’ACV en tant qu’outil d’évaluation (calcul) environnementale dédié à la gestion des déchets, intitulé « ACV pas à pas » (cf. Annexe 7). L’atelier a en effet été consacré à une initiation à l’ACV, selon une démarche « pas-à-pas » permettant de présenter les principales étapes de la méthode en associant les participants à une mise en pratique des points méthodologiques évoqués sur un cas concret en gestion de déchets. Il s’agissait de tester in vivo la capacité d’un public non profane à s’emparer de la méthodologie ACV. Pour cela, l’atelier s’est déroulé sous la forme de présentations magistrales des différents points méthodologiques clés de l’ACV et de leur mise en pratique, de manière successive. L’objectif était de voir, grâce à cette formation, si :

- le regard porté sur l’outil changeait ;

- les participants lui accordaient une meilleure confiance ;

- de nouvelles perspectives d’usage dans le champ décisionnel émergeaient.

En d’autres termes, est-ce que l’ouverture de la « boîte noire » de l’ACV aux tiers en renforce le potentiel d’usage en tant qu’aide à la décision ? L’atelier a ainsi permis de susciter des débats, de faire émerger des interrogations et des recommandations :

- Globalement, l’ACV reste perçu comme un outil complexe, à utiliser avec précaution. Il en ressort également que « l’ouverture de la boîte noire » réalisée lors de cet atelier peut avoir pour effet paradoxal de réduire la confiance dans l’outil, en « révélant » aux participants les « coulisses » d’une pratique à base de modélisation et simulation éloignée probablement de la représentation dominante d’une activité scientifique vue comme une démarche rationnelle dans laquelle les étapes

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s’enchaînent d’elles-mêmes, par le seul jeu des raisons et de la « nature des choses » sans faire intervenir le jeu des hypothèses inhérentes à toute modélisation.

- En lien avec ce qui précède, la durée de l’exercice (3h) est suffisamment longue pour mettre en visibilité le poids des conventions et sources d’incertitude du calcul. Mais cette durée est sans doute insuffisante pour montrer le rôle possible de certains garants de qualité, comme le professionnalisme des praticiens, la revue critique finale, l’importance du dialogue continu avec des spécialistes de la technologie étudiée, la connaissance commune des limites et fiabilités respectives des différentes bases de données ou modèles mobilisés dans l’analyse. Mais l’ACV comme toute démarche d’évaluation reste soumise à la critique potentielle de manipulation.

Cet atelier s’est terminé par un questionnaire (disponible en Annexe 8) sur les positions des participants vis-à-vis de l’outil ACV et du format « ACV pas à pas » (cf. tableau 2).

Le nombre de questionnaires traités incite à la prudence quant aux enseignements à en tirer. Pour autant, on peut poser l’hypothèse que le public mobilisé s’inscrit dans une normalité du point de vue de sa sensibilité en termes d’évaluation environnementale en tant que professionnel de la gestion du déchet.

Score

Sans

opinion

1 2 3 4 5

Inciteriez-vous à l’utilisation d’une ACV ou d’un autre outil

d’évaluation environnementale ? 1 2 3 1

L’ACV est-elle adaptée aux besoins d’un processus de

concertation et de décision ? 1 4 2

L’ACV permet-elle d’offrir des résultats fiables pour une

prise de décision ? 1 6

L’ouverture de l’outil réalisée pendant la séance a-t-elle fait

évoluer votre niveau de confiance ? 3 2 2

Tableau 2 : Exemple de résultats du questionnaire pour quatre questions clés (1 : pas du tout d’accord ou moins confiance ; 5 : tout à fait d’accord ou plus confiance)

Quels en sont les principaux enseignements ? Tout d’abord, il ressort que l’antériorité en ACV est hétérogène : la moitié des participants n’avaient jamais rencontré l’ACV dans leur milieu professionnel et même parmi ceux y ayant déjà été confrontés, peu se considéraient familiers de la méthodologie de l’outil. Ensuite, quand on se place dans l’hypothèse de réalisation d’une ACV, tous les acteurs présents estiment qu’ils doivent être impliqués à un degré assez élevé notamment pour le travail de validation des hypothèses de modélisation. Les acteurs sont partagés concernant leurs propres connaissances acquises lors de l’atelier pour ce faire. Ils sont conscients que leurs connaissances sont limitées à l’application de l’ACV au domaine des déchets et que cette ambition nécessite un investissement non négligeable en temps.

Les acteurs recommanderaient l’utilisation d’un outil d’évaluation environnementale et mettent l’accent sur la cohérence entre la complexité de l’outil (ACV vs bilan effet de serre) et la demande.

Les acteurs sont peu convaincus de l’intérêt d’utiliser spécifiquement l’ACV et ses résultats dans un processus de décision et soulignent la nécessité de mettre en perspective le critère environnement par rapport à d’autres critères (économique, technique, social) avec une attention particulière portée à l’interprétation des résultats pour éviter toute manipulation ; ils soulignent également l’implication nécessaire de la maîtrise d’ouvrage via un comité de pilotage.

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Peu d’acteurs ont pu répondre à la question de la nécessité d’apporter des modifications aux modalités de l’insertion et de réalisation de l’ACV dans un processus décisionnel. Deux positions fortes ressortent : la majorité des acteurs étaient sans opinion, une minorité jugeait nécessaire une modification et a apporté une proposition, à savoir une formation préalable des acteurs concernés à l’ACV et la mise en place d’un cahier des charges de la maîtrise d’ouvrage régissant les modalités de déploiement de l’ACV (cf. infra pour une formalisation de ce cahier des charges).

En ce qui concerne l’implication de différents types d’acteurs dans une formation « ACV pas à pas » conçue comme préalable à la participation à un comité de pilotage, les participants sont :

- Favorables à l’implication des élus moyennant leur réceptivité et motivation identifiées comme incertaines en ce qui concerne l’évaluation environnementale ;

- Favorables à l’implication des techniciens moyennant leur disponibilité ;

- Partagés sur l’implication des associations et habitants ; ils notent parfois la difficulté de dialogue avec ce type de parties prenantes. Un participant propose de limiter leur implication au choix des catégories d’impacts à évaluer.

Les participants s’estiment globalement capables de diagnostiquer une bonne ou mauvaise pratique de l’ACV suite à cet atelier « ACV pas à pas ». Une recommandation a été faite de « mettre des garde-fous dans un cahier des charges pour choisir un bureau d’études ».

L’atelier a fait évoluer leur niveau de confiance de manière mitigée : globalement leur niveau de confiance est moyen. Ils notent qu’ils sont d’une part, plus en capacité de diagnostiquer des travers et d’autre part, conscients de la complexité de mise en œuvre de l’ACV. Ces deux constats ne leur permettent pas d’avoir un niveau de confiance élevé. Un participant avance même le rôle essentiel de contrôle de la maîtrise d’ouvrage.

Retour des participants sur la formation « ACV pas à pas » : L’atelier est globalement jugé trop court.

Les participants auraient apprécié de débattre davantage sur certains points. Un participant a proposé un déroulé de l’atelier sur une journée et demi (une demi-journée sur la théorie et une journée sur le cas pratique). La mise en place d’une formation de type « ACV pas à pas » en amont d’un processus décisionnel est recommandée.

L’atelier s’est poursuivi l’après-midi sous forme d’un échange sur les contrats de performance.

2.4.

Eléments de synthèse

Les ateliers ont mobilisé un faible public et les enseignements à en tirer doivent à ce titre être pris avec précaution. Pour autant, ce public peut être considéré de par sa diversité comme relativement représentatif de la communauté technique en capacité de se mobiliser autour de la question de l’évaluation environnementale dédiée à la gestion des déchets.

Malgré une sensibilité certaine des participants à la question de l’évaluation environnementale, cet outil n’est pas rentré dans leur pratique. Paradoxalement, ils considèrent tout à la fois qu’on ne peut plus conduire un projet de gestion de déchets sans tenter de le positionner en termes de performances environnementales mais, dans le même temps, que ce critère n’est pas prioritaire dans un contexte de décision. L’injonction réglementaire et sociétale de prise en compte de l’environnement est bien présente dans les esprits mais la pratique commune s’accommode fort bien de faire, souvent, sans cette objectivation environnementale.

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Pour autant, les travaux de ces ateliers nous invite à proposer des recommandations pratiques pour l’usage de l’évaluation environnementale et de l’ACV en particulier, pour en optimiser la portée dans le champ décisionnel. Ces éléments seront une partie du livrable final.

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ème

partie – La problématique des nuisances odorantes :

approche bibliographique

Auteurs : Rémi Barbier

Pas davantage que l’évaluation environnementale, la question des odeurs n’apparaît centrale dans le processus décisionnel. Rappelons que celui-ci est apparu, dans le cadre de toutes nos enquêtes, comme largement déterminé par les opportunités foncières, les contraintes financières et des préférences a priori. Au regard de la réglementation5, la loi sur l’air et l’utilisation rationnelle de l’énergie du 31 décembre 1996 reconnaît comme pollution à part entière « toute substance susceptible de provoquer des nuisances olfactives excessives », ce qui implique que des prescriptions puissent être imposées au porteur de projet via la réglementation sur les installations classées. Plus précisément, l’arrêté (modifié)

du 02/02/98

«

relatif aux

prélèvements et à la consommation d'eau ainsi qu'aux émissions de toute nature des installations classées pour la

protection de l'environnement soumises à autorisation

», prévoit notamment que « l

es poussières, gaz polluants ou

odeurs sont, dans la mesure du possible, captés à la source et canalisés » (art. 4), et que

« l

'arrêté préfectoral

d'autorisation fixe, le cas échéant, le débit d'odeur des gaz émis à l'atmosphère par l'ensemble des sources odorantes

canalisées, canalisables et diffuses, à ne pas dépasser

»

(art. 29).

Des distances minimales d’implantation par rapport aux habitations peuvent être définies, par exemple 200m pour les installations nouvelles de compostage. Enfin, le porteur de projet doit notamment faire la preuve, dans le volet air de l’étude d’impact, qu’il connaît ses rejets, qu’il a mis en place des mesures préventives, et qu’il maîtrise ses émissions et son process6. Des modélisations du « panache d’odeurs » ou de « l’empreinte olfactive » de l’installation projetée peuvent être réalisées dans ce cadre. La problématique des odeurs est toutefois susceptible de devenir centrale à partir de l’annonce du projet, en tant que motif de contestation lié au respect du cadre de vie, puis, le cas échéant, dans la cohabitation avec les riverains. On se propose d’éclairer ces enjeux à travers une mise en perspective bibliographique. Après avoir cerné la notion d’odeur, nous présenterons la dynamique sociale de formation de la nuisance olfactive à partir du cadre conceptuel des stresseurs environnementaux, puis nous aborderons la gestion de ces nuisances olfactives.

1 Les odeurs et leur perception

Qu’est-ce qu’une odeur ? Jaubert la définit comme « l’interprétation par le cerveau (perception) des signaux fournis par les récepteurs olfactifs lors de leur stimulation par des substances (potentiellement) odorantes » ((Jaubert 2005). L’auteur indique également que, par le jeu de la combinatoire entre la nature des récepteurs et leur distribution sur la muqueuse nasale, cet équipement sensoriel est unique pour chaque individu. Il en résulte qu’avant même que ne se posent des questions relatives à la plus ou moins grande tolérance aux « mauvaises odeurs », les sensibilités olfactives vont être très singulières, qu’il s’agisse par exemple des niveaux limites de reconnaissance7 d’une odeur ou des « notes olfactives » qui seront perçues en priorité dans une odeur donnée.

A cette singularité de l’expérience olfactive se rajoute, nous disent Candau et JeanJean (2006), cette autre caractéristique essentielle de l’odeur qu’est sa « nature profondément subjective » : l’état de conscience produit par une odeur est en effet un événement qui peut être défini comme l’« effet que cela fait » de la

5 Voir notamment http://www.installationsclassees.developpement-durable.gouv.fr/3-Les-odeurs.html 6 Voir http://www.installationsclassees.developpement-durable.gouv.fr/Le-volet-Air.html

Figure

Tableau 2 : Exemple de résultats du questionnaire pour quatre questions clés (1 : pas du  tout d’accord ou moins confiance ;  5 : tout à fait d’accord ou plus confiance)

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