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ARTheque - STEF - ENS Cachan | Un problème toujours actuel, La Science et l'Industrie (suite).

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Texte intégral

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Un problème toujours actuel :

LA SCIENCE ET L'INDUSTRIE

NECESSITE D'UN ENSEIGNEMENT

DE LA SCIENCE INDUSTRIELLE On entend encore dire que l'étude des sciences pures suffit pour préparer à la vie industrielle et on cite à l'appui de cette thèse des succès passés incontestables. Le Chatelier, qui connaissait l'in-dustrie a u t a n t que le laboratoire, rappelle qu'il a fallu, en l'occurrence, que le jeune ingénieur ou le jeune technicien apprennent leur métier, à la sortie de l'école, par un séjour prolongé dans les ateliers de l'usine. Si cette solution pouvait à la rigueur se concevoir pour une très grande entre-prise et pour une période économiquement stable, il n'en est pas de même dans la petite et la moyenne industrie et à une époque où le facteur temps est primordial. Le jeune ingénieur, le jeune technicien ou le jeune ouvrier doivent être immédiatement à même de rendre les services que la France attend d'eux et ce d ' a u t a nt plus qu'elle manque de tra-vailleurs. Pour la majorité des affaires industrielles, il faut donc une formation spéciale du personnel précédant son entrée en .service. L'enseignement technique prépare justement les jeunes à la vie industrielle. Il tend à mettre les hommes qui tra-vaillent au développement de la richesse publique : chefs d'industrie, ingénieurs, contremaîtres» ou-vriers, à même de remplir au mieux les fonctions qui leur incombent. Il embrasse donc un nombre très g r a n d d'industries différentes et doit par suite présenter de nombreuses variantes, tandis que l'en-seignement scientifique classique peut être le même pour tous.

Les corps existant dans la nature, les phéno-mènes dont ils sont le siège, sont relativement peu nombreux et par suite la science qui les étudie est relativement limitée. Mais les industries résultant de la combinaison n à n de ces corps et des phéno-mènes divers sont immensément plus nombreuses. D'où une spécialisation nécessaire dans les études industrielles. D'autr e part, les sciences industrielles sont beaucoup plus complexes que les sciences pures. D'où des divisions plus nombreuses dans les sciences industrielles que dans les sciences pures.

L'enseignement des sciences industrielles est donc une nécessité. Il est infiniment complexe,

d'au-tant plus que la grand e industrie est relativement récente. N ' a y a n t pas encore un siècle d'existence, elle n'a pas. atteint un éta t d'organisation stable. Il en est de même pour les méthodes d'enseignement qui la concernent, tandis que l'enseignement des sciences pures a y a n t déjà derrière lui plusieurs siècles d'existence est arrivé à un état stable.

ESSAI DE DEFINITION DE LA SCIENCE INDUSTRIELLE

DELIMITATION DE SON DOMAINE La science industrielle est distincte à la fois de la science pure et de la technologie. Elle est distincte de la science pure non pas dans son essence, car il n'y a qu'une seule science, mais seulement dans le groupement de ses diverses parties. Dans la science pure, on fait abstraction de tous les changements de la matière sauf un seul, celui que l'on étudie. L'industriel, au contraire, combine en vue d'un résultat utile des propriétés des corps, des lois que la science lui a déjà f a i t connaître. La science industrielle, à l'aide des études partielles de la science pure, se charge pré-cisément de ce regroupement des propriétés et des lois, de ce travail de mise au point. Le Chatelier étudie des exemples probants tel celui de l'argile. Le chimiste étudie exclusivement sa composition chimique, abstraction faite des autre s propriétés, telles que : forme cristalline, conductibilité élec-trique ; le physicien examine sa densité, sa fusi-bilité, sa porosité ; le géologue se préoccupe des gisements ; le minéralogiste de la forme cristalline. Au contraire, le céramiste qui emploie l'argile doit envisager à la fois l'ensemble des propriétés de cette matière, se préoccuper du gisement géologique, de la composition chimique dont dépendront les qualités r é f r a c t a i r e s de ses briques ou de sa porce-laine, de la forme cristalline lamellaire, de la finesse dont dépend la plasticité, de la viscosité des pâtes, etc... L'étude des traitements thermiques des aciers, par exemple, nous p e r m e t t r a it des conclusions identiques.

Cette définition de la science industrielle a sug-géré une objection souvent répétée. Mais, dira-t-on, chacun ne peut-il pas faire lui-même ce travail, aller rechercher dans ses études scientifiques géné-rales les lois dont il peut avoir besoin ? Cela est possible dans une certaine mesure... mais des esprits

Ce problème à été maintes fois posé sous l'angle purement philosophique. Inquiets devant les possibilités immenses offertes à 1 homme par la science, des hommes de bonne volonté le posent maintenant sous l'angle des rapports entre la science et la société ou de la science avec le bien-être de l'humanité (voir « ÉCHO », revue internationale n° 2 Septembre 1946, Morgeby house, Baker Street, Londres). Il apparaît que les tenants de la science pour la science sont de plus en plus rares parmi les savants eux-mêmes (Congrès de Londres où les éminents savants mondiaux ont confronté leur opinion). Louis de Broglie lui-même a reconnu qu'il devait abandonner ce point de vue qui jusque-là avait été le sien. La thèse de Michael Polanyi professeur à l'Université de Manchester, selon laquelle : «L'Europe, ne pouvant être sauvée que par l'esprit, notre devoir est de garder notre foi en l'esprit de la science » paraît bien affaiblie par les années qui viennent de s'écouler. •

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supérieurs, partant en petit nombre, sont seuls ca-pables de faire convenablement ce travail de regrou-pement et encore d'une façon incomplète. On pour-rait dire que pour l'enseignement de la géométrie il suffit de connaître les deux axiomes fondamen-taux, chacun devant pouvoir ensuite, par le seul emploi de son intelligence, retrouver tous les théo-rèmes. De petits Pascal le feront peut-être conve-nablement, mais ils resteront toujours une excep-tion. II en va de même pour la science industrielle. Il y a grand intérêt à faire profiter les jeunes gens des travaux de leurs devanciers et à ne pas leur demander de réinventer chacun toute la science. Cette objection nous r a m è ne donc à la nécessité d'un enseignement de la science industrielle. Une seconde raison la justifie d'ailleurs. Au point de vue d'une application industrielle donnée, l'impor-tance de telle ou telle loi n'est pas la même qu'au point de vue général. La science industrielle doit aller rechercher ainsi certaines lois connues mais non enseignées ailleurs et ne figurant dans aucun programme. Dans tous les domaines de la technique les exemples abondent. L'enseignement des sciences industrielles n'est pas non plus un enseignement technologique. Celui-ci se borne à une description des diverses opérations de l'industrie, à celle des appareils, à la composition des m a t i è r e s premières, aux calculs de prix de revient, etc... E n raison de révolution rapide de l'industrie, l'enseignement de la technologie a toujours un certain r e t a r d sur les derniers progrès de la technique industrielle. D'autre part, le nombre des procédés industriels et de leurs variantes est tellement grand qu'il n'est pas possible de les décrire tous, même dans un enseignement très spécialisé. Il serait intéressant et assez aisé de f a i r e un parallèle entre un ensei-g n e m e n t technoloensei-gique de chaque industrie et son enseignement scientifique comme le f a i t Le Cha-telier pour l'industrie céramique par exemple.

LA METHODE

D A N S LES SCIENCES INDUSTRIELLES D a n s les questions pratiques, la méthode est évidemment la méthode scientifique : expérience, observation des f a i t s jouent toujours automatique-ment. Quand il s'agit d'étudier un fait, la recherche systématique des f a c t e u r s est extrêmement impor-t a n impor-t e eimpor-t souvenimpor-t difficile. Ceimpor-timpor-te recherche méimpor-tho- métho-dique importante dans la science pure l'est beau-coup plus encore dans les sciences industrielles, car les lois simples de la nature, les plus générales qu'étudie la science abstraite, ne dépendent le plus souvent que d'un petit nombre de facteurs. L ' é t at d'un gaz, par exemple, dépend de sa pression, de son volume et de sa température . Les phénomènes industriels dépendent à la fois d'un très g r a n d nombre de f a c t e u r s dont l'identification est en gé-néral fort difficile. L'exemple de la tremp e d'un acier permet de s'en rendre compte. Le f a i t brutal aisément accessible et depuis longtemps connu est que certains aciers trempés dans l'eau à p a r t i r d'une t e m p é r a t u re élevée prennent une dureté considérable. Les f a c t e u r s à envisager se rappor-tent à la n a t u r e du métal et au t r a i t e m e n t ther-mique proprement dit. Pour étudier complètement celui-ci, il a fallu connaître, d'une p a r t les t r a n s-formations allotropiques des corps simples, d'autr e p a r t les propriétés des solutions solides, leurs ana-logies et leurs différences avec les solutions liquides.

Les analogies portent sur les conditions d'équilibre, les différences sur le r e t a r d à l'établissement de l'équilibre, fonction lui-même du coefficient de viscosité des corps envisagés, etc...

P a r ailleurs, dans les mesures industrielles, le nombre des variables en présence é t a n t considé-rable, il est nécessaire de s'entourer de précautions si l'on ne veut pas s'exposer à ne rien savoir de la valeur du travail fait. La règle capitale à suivre est de s'astreindre à laisser s y s t é m a t i q u e m e nt inva-riables, dans chaque expérience, tous les f a c t e u r s sauf un seul.

Dans les usines, rappelle Le Chatelier, cette habitude de toucher à la fois à plusieurs variables est encore assez répandue. On espère, en changeant tout à la fois, avoir la chance de tomber plus rapi-dement sur le résultat le plus avantageux. Bien entendu cette espérance ne se réalisa jamais, on dépense une somme considérable de travail pour ne pas aboutir et, ce qui est plus grave encore, pour ne réunir aucun document précis qui puisse être utilisé dans la suite.

Cette habitude tend évidemment de plus en plus à disparaître, surtout dans la grand e industrie où l'influence du laboratoire se f a i t sentir. Cependant, personnellement, il m'est arrivé d'être témoin de faits très caractéristiques de l'état d'esprit signalé précédemment. Un céramiste m ' a p p o r t a un jour, afin que je lui explique les f a i t s provoqués, une soucoupe de porcelaine sur laquelle un caillou avait donné, lors de la cuisson, un bel effet décoratif. Mais l'expérimentateur ne se souvenait p a s des caractéristiques initiales du caillou, qui avait été choisi au hasard, ni des conditions précises de cuisson, ce qui était moins grave. Lors de l'étude de tourbes du Haut-Limousin pour le service des mines, j'eus du mal à obtenir qu'on notât préala-blement tout ce qui concernait l'échantillon étudié : distance au bord de la tourbière, profondeur, dis-tance au fond, n a t u r e du sol, etc., tout ce qui pouvait p e r m e t t r e par la suite d'interpréter les résultats des essais.

Le but des mesures au laboratoire d'usine se rapporte principalement à l'un des cas suivants : diminuer tel déchet de fabrication, diminuer le prix de revient d'un produit donné, améliorer la qualité ou une propriété particulière d'un produit, fabriquer une marchandise déjà livrée par des concurrents, assurer l'interchangeabilité de pièces par une véri-fication précise des cotes, améliorer le rendement d'une machine, réduire au minimum sa consomma-tion... etc.

Le laboratoire industriel a donc un rôle des plus i m p o r t a n ts à jouer. Or on peut bien dire qu'en F r a n c e il n'a pas, en général, tellement bien réussi. C'est sans doute l'une des raisons de notre r e t a r d dans certains domaines techniques. Un enseigne-m e n t rationnel des sciences industrielles enseigne-m e t t r a i t en évidence l'importance du laboratoire d'usine et serait encore pour cette raison facteur de progrès. Il a t t é n u e r a i t en outre la méfiance réciproque du réalisateur pour le théoricien dont la conjonction deviendrait plus efficace dans l'action. Or, selon le mot de Le Chatelier : La pensée ne vaut que dans la mesure où elle tend vers l'action.

J. LIGNON Professeur de Sciences

Ecole Normale Nationale d'Apprentissage Paris.

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