Notes bibliographiques 91
L
ES SCIENCES POUR L'
INGENIEUR- H
ISTOIRE DU RENDEZ-VOUS DES
S
CIENCES ET DE LAS
OCIETE.
G. RAMUNNI
1Joël LEBEAUME
Publié à l'occasion des 20 ans des Sciences pour l'Ingénieur (SPI), ce livre retrace la genèse de ce département du CNRS institué le 3 novembre 1975. L'auteur reconstitue cette histoire à partir des discours rétrospectifs de la plupart des acteurs et de l'analyse des revues internes au CNRS. L'institutionnalisation est présentée en relation avec le contexte à la fois politique de la structuration de la recherche et scientifique relatif à la conception de la recherche ainsi que dans la dimension internationale de cette préoccupation.
Les projets des SPI se dessinent à partir du milieu des années 1950 en raison surtout de la crise qui rend caduque la vision héritée du XIXè siècle sur le progrès, sur le développement linéaire de la science et sur l'interdépendance directe entre science et technique. Le modèle interactionniste entre science et technique s'oppose en ce sens au modèle linéaire présentant d'une façon statique la recherche fondamentale en amont de la recherche appliquée.
a) caractérisation
Les SPI se caractérisent par leurs relations fortes avec l'industrie. « L'objet d'investigation des équipes de recherche SPI est le système technique dans toute sa généralité. On aurait pu l'appeler le département des sciences de la technique et de la technologie pour mieux souligner que le point essentiel qui le distingue est l'investigation à partir et sur des objets fabriqués par l'homme ». (p. 9). Mais les SPI sont un domaine de recherche. « En effet, il ne s'agit pas du tout de trouver une astuce pour contourner une difficulté, mais de chercher la solution à un problème,
1 RAMUNNI, G. (1995). Les sciences pour l'ingénieur - Histoire du rendez-vous des Sciences et de la
92 Didactique des disciplines techniques 1995-1996
qui en même temps, conduise à modifier les connaissances de base des phénomènes en jeu et aide par conséquent à résoudre des problèmes analogues » (p. 143).
« Ainsi les recherches SPI veulent, par la transformation du savoir scientifique, contribuer à changer l'ensemble du système technique. Le chercheur SPI dialogue avec deux interlocuteurs : les chercheurs de type universitaire et ceux qui, au sein des entreprises, se consacrent plus à ce qui était appelé autrefois, recherche appliquée. A ces deux pôles, (…) un troisième s'ajoute : les chercheurs en sciences de l'homme et de la société » (p. 10).
Elles sont ainsi des sciences intermédiaires entre les sciences de l'analyse (sciences qui permettent d'accroître le savoir de l'homme, de mieux analyser les problèmes qui se posent à lui, de mieux connaître la matière, la vie, la pensée) et les sciences d'action (ce secteur recouvre la science que l'on appelait appliquée, mais aussi la médecine, la conquête de la lune ou la bombe atomique) c'est à dire entre recherche fondamentale et recherche appliquée2. Les sciences pour l'ingénieur s'individualisent alors.
b) désignation
L'histoire des SPI révèle des hésitations dans leur désignation :
∗ hésitation entre sciences pour l'ingénieur et sciences de l'ingénieur (1975) ;
∗ hésitation entre sciences physiques pour l'ingénieur et sciences pour l'ingénieur. (1980-1991).
Avec le colloque organisé par le Ministère de la Recherche et de l'Industrie en 1982, les Sciences Physiques pour l'Ingénieur se définissent comme les « sciences de la conception et de l'invention ». Chaque objectif scientifique et technique regroupe des opérations de recherche variées ayant en commun deux caractères marquants :
∗ une « unité scientifique relativement forte qui est la garantie d'une recherche fondamentale de qualité » ;
∗ la perspective d'une certaine classe d'applications techniques.
A cette date, les SPI sont : « la science des artefacts, la science des objets et des systèmes où s'associent connaissance de la nature et intervention du génie humain, en vue de résoudre, par des moyens abstraits ou concrets, des problèmes nés, même de manière indirecte et lointaine, de préoccupations fonctionnelles ». Mais à cette dimension est fondamentalement liée la prise en compte de la dimension humaine.
En 1991, l'arrêté fixant la composition du Comité national conserve le sigle SPI et on passe de Sciences physiques Pour l'Ingénieur à Sciences
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Pour l'Ingénieur. La volonté de l'ensemble de la communauté à garder le sigle tranche sans appel le débat entre « sciences pour » et « sciences de ».
c) évolution
- 1973-1975 : période d'installation (la question se stabilise du point de vue de l'organisation et du financement de la recherche) il y a alors les SPI pour la chimie, pour la physique, etc.
- 1980-1982 : période de réorganisation et de reconnaissance.
- 1991 : arrêté fixant la nouvelle composition du Comité national (5 février 1991).
De lecture facile et très documentée, cette histoire informe sur les faits qui ont contribué à l'évolution interne de ce secteur de la recherche. Il permet de mieux situer les SPI par rapport aux génies techniques bien que la question ne soit pas réellement abordée. En outre, il ouvre quelques axes de réflexion sur les ruptures qu'imposent l'insertion et la légitimation de recherches situées à l'intersection des disciplines académiques.
