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Composantes d'un programme d'éducation et de support parental visant la prévention des problèmes de développement des enfants en milieu défavorisé

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COMPOSANTES D'UN PROGRAMME D’EDUCATION ET DE SUPPORT PARENTAL VISANT LA PREVENTION DES PROBLEMES

DE DEVELOPPEMENT DES ENFANTS EN MILIEU DEFAVORISE

LOUISE SIMARD-LAMARCHE

Mémoire présenté pour l'obtention

du grade de maître ès arts (M.A.)

ECOLE DES GRADUES UNIVERSITE LAVAL

FEVRIER 1989

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Résumé

La présente étude se penche sur les problèmes de développement des enfants issus des milieux les plus défavorisés sur le plan socio-économique. Dans le but d’aider à l’élaboration d'un programme d'intervention préventive mieux adapté aux parents,

l'étude vise à identifier les principales composan­ tes d'un tel programme à savoir, les objectifs à poursuivre, les approches, les modalités d'inter­

vention et les stratégies de recrutement à utiliser ainsi que les facteurs reliés à la capacité de rejoindre ces clientèles et d'atteindre les objec­ tifs visés.

L'analyse des résultats des évaluations de programmes implantés en milieu défavorisé amène à conclure qu'une approche individuelle débouchant progressivement sur une intégration des parents dans leur communauté, par une approche de groupe, permet d'entrevoir de meilleurs résultats. L'effi­ cacité de l'intervention est tributaire d'une ac­ tion globale, précoce, intensive et durable.

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L’auteure désire exprimer sa reconnaissance à sa directrice de thèse, Madame Madeleine Baillargeon, Ph.D., professeure titulaire au dépar­ tement de psychopédagogie, dont l'assistance éclai­ rée et constante a permis de mener à terme cette étude.

Des remerciements s'adressent également à Madame Christiane Piché, Ph.D., professeure agrégée à ce même département, pour ses conseils judicieux à l'étape de la prélecture.

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Table des matières

Introduction... 1

Chapitre premier - Objectifs d'intervention en milieu défavorisé... 7

Modèle éducatif... 9

Modèle thérapeutique... 13

Modèle réseau... 15

Modèle écologique... 18

Objectifs à poursuivre en milieu défavorisé... 21

Chapitre II - Modalités d’intervention de groupe... 27

Groupes de discussion... 29

Groupes d’apprentissage... 37

Centres parents-enfants... 51

Groupes d’entraide parentale... 56

Conclusion... 65

Chapitre III - Modalités d’intervention individuelle... 69

Visites à domicile... 71

Programmes en milieu hospitalier... 92

Services d'écoute téléphonique... 94

Interventions de réseau... 97

Conclusion... 106

Chapitre IV - Composantes d’un programme d’intervention préventive en milieu défavorisé...110

0b jectifs... 111

Approches... 113

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Facteursd'efficacité...129 Conclusion...132

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jet d’un intérêt croissant chez les intervenants oeuvrant au niveau de la prévention des problèmes de développement chez les enfants. Ces populations privées d’un revenu suffisant, peu informées, peu scolarisées et cantonnées dans des quar­ tiers démunis de ressources matérielles et sociales (Cliché, 1976; Tremblay, 1987) présentent, en effet, des risques nom­ breux sur le plan de la création d'une relation de qualité avec l'enfant (Colin, 1987; Kornberg et Caplan, 1980), essen­ tielle à son développement (Clarke-Stewart, 1973; Rutter, 1979; Yarrow et al., 1972).

Or, le constat d'une recrudescence des problèmes de développement chez les enfants (Davidson, 1986; Séguin et al., 1984), qui s'observe de façon plus intense dans les milieux socio-économiquement défavorisés, sous forme de trou­ bles d'apprentissage, de psychopatologies, de négligence et d'abus, (Bouchard, 1984; Bourdon et al., 1983; Mayer-Renaud et Berthiaume, 1985), met en évidence les difficultés à rejoindre les clientèles à risque élevé ou à offrir des services qui répondent effectivement à leurs besoins.

Certaines études (Blanchet et Levasseur, 1980; Lazar et Chapman, 1972) démontrent que les programmes d'éducation et de support parental ne rejoignent pas les parents les plus démunis et attribuent cet échec à l'inefficacité des program­ mes à répondre à leurs besoins spécifiques. D'autres (Guay et Lapointe, 1985; Collins et Pancoast, 1976) laissent croire qu'il est possible d'aider ces clientèles à la condition de pénétrer leurs réseaux sociaux personnels. Enfin, certains auteurs (Montreuil et Colin, 1987) affirment avoir trouvé des

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avenues prometteuses qui reposent sur une relation de qualité entre le parent et l’intervenant.

Compte tenu de l'urgence de contrer l'incidence des problèmes de développement chez les enfants par une action préventive auprès des parents (Davidson, 1986) et face à

l'incertitude quant à la façon d'améliorer l'impact de l'in­ tervention auprès des clientèles à risque élevé en milieu défavorisé, il apparaît important de faire le point sur l’ensemble des interventions utilisées jusqu'à maintenant dans ces milieux afin d'identifier celles qui sont les plus efficaces .

Le but de cette étude est donc d'identifier les princi­ pales composantes d'un programme d'intervention préventive qui permet de rejoindre les parents les plus défavorisés sur le plan socio-économique et de répondre adéquatement à leurs besoins. Plus précisément, cette étude vise à définir les objectifs d’intervention à poursuivre, à déterminer les ap­ proches, les modalités d'intervention et les stratégies de recrutement à utiliser et à identifier les facteurs d'effica­ cité qui semblent les plus déterminants. Pour ce faire, l'étude repose sur l'analyse des résultats des recherches évaluatives portant sur les programmes d'intervention auprès de cette clientèle.

Différents courants de pensée quant à l'identification des causes les plus significatives dans la genèse des problèmes parentaux ont donné naissance à différents modèles d'intervention (Davidson, 1986). Ces modèles se distinguent selon qu'ils mettent l'accent sur des déterminants indivi­ duels ou socio-économiques. De ce fait, ils poursuivent des objectifs différents. Le choix du modèle véhiculé dans les programmes joue donc un rôle, déterminant sur l'efficacité de l'intervention puisqu'il détermine les objectifs à poursuivre.

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Pour atteindre ces objectifs, l'intervention auprès des parents peut s’effectuer selon deux approches: l’approche de groupe et l'approche individuelle (Harman et Brim, 198G). Dans l'approche de groupe, l'intervention s'adresse à des parents réunis en groupe. Dans l'approche individuelle, elle se fait par le biais d'une relation d'aide personnalisée entre le parent et l'intervenant.

A l'intérieur de ces deux grandes approches, se retrouve une diversité de modalités d'intervention. Ces modalités d'intervention se différencient selon la façon d'aider les parents. Elles se situent sur un continuum allant d'une action directive et interventionniste à une attitude plus incitative basée sur la confiance dans les capacités des parents à se prendre en charge. De plus, différents interve­ nants sont impliqués dans le processus d'aide aux parents. Ces intervenants sont des professionnels tels des éducateurs et des infirmières, et des non-professionnels en l'occurence des bénévoles et des aidants naturels du milieu (Guay, 1984).

L'efficacité de ces modalités d'intervention dépend, au préalable, de la capacité de rejoindre les parents. A cet égard, il existe deux courants de pensée (Barth et Ash, 1986). Le premier prône l'utilisation d'une approche collec­ tive au niveau des quartiers qui permet d'offrir les services à toutes les familles qui y résident. Le deuxième milite en faveur d'une approche individuelle visant le dépistage et le recrutement des parents jugés spécifiquement à risque.

La recherche d'interventions plus efficaces amène donc à considérer, d'une part, le degré avec lequel elles permettent de rejoindre les parents et, d'autre part, le degré avec lequel elles permettent l'atteinte des objectifs visés.

La définition de ces objectifs fait l'objet du premier chapitre. Pour ce faire, le chapitre présente les objectifs

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poursuivis par les principaux modèles d'intervention et ana­ lyse le niveau de concordance entre ces objectifs et les besoins parentaux à combler chez les clientèles-cibles.

Les deux chapitres suivants traitent des différentes d'intervention. Le chapitre deux

s'inspirent de considère 1 modalités

modalités d'intervention qui Le chapitre trois

porte sur les 1 ' approche de groupe.

d'intervention qui s'inspirent Les programmes qui

individuelle et de es modalités individuelle. utilisent de groupe sont de 1'approche

façon combinée les approches classés selon l'approche pré-dominante.

Les chapitres deux et trois décrivent aussi ces modali­ tés d'intervention. De plus, ils présentent les résultats des études qui ont mesuré, d'une part, le degré avec lequel les programmes rejoignent les clientèles à risque élevé en milieu défavorisé et, d'autre part, le degré avec lequel ils permettent l'atteinte des objectifs.

L'analyse des résultats obtenus par les différents programmes d'intervention sert, à l'intérieur du quatrième chapitre, à identifier les approches, les modalités d'inter­ vention et les stratégies de recrutement les plus susceptibles de rejoindre les parents les plus défavorisés sur le plan socio-économique et d'atteindre les objectifs visés. Cette analyse sert également à faire ressortir les facteurs les plus favorables à la réussite des programmes.

L'étude se limite aux interventions utilisées dans une optique préventive auprès des parents de jeunes enfants (0-5 ans) en milieu socio-économiquement défavorisé. Elle exclut toute forme d'intervention qui s'adresse à des parents qui ont déjà des problèmes avec leur enfant tels les programmes conçus à l'intention des parents abuseurs. De plus, l'étude ne porte pas sur les programmes qui s'adressent à des clien­ tèles ayant des besoins spécifiques comme les parents d'en­

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fants présentant un handicap physique ou mental et les mères-adolescentes .

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Chapitre premier

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cice de leur fonction d'éducation. Elaborés à partir des recherches visant à cerner l'origine des problèmes liés à l'exercice du rôle parental, ces modèles se distinguent en fonction des facteurs de risque, d'ordre individuel ou envi­ ronnemental, sur lesquels ils visent spécifiquement à agir, dégageant ainsi des objectifs différents.

Présentement, quatre modèles orientent plus couramment, mais à des degrés divers, la façon de concevoir l'interven­ tion. Ce sont les modèles éducatif, thérapeutique, réseau et écologique.

Le but du présent chapitre est de définir les objectifs à poursuivre en milieu défavorisé. Pour ce faire, il présen­ te, en premier lieu, pour chacun des quatre modèles d'inter­ vention, les facteurs ou déterminants sur lesquels il tente spécifiquement d'agir, les objectifs d'intervention qui en découlent et la pertinence de son utilisation en milieu défa­ vorisé. En second lieu, il procède à l'analyse de l'ensemble des facteurs de risque prévalents en milieu défavorisé pour en dégager les objectifs que les programmes d'intervention s'adressant à ces clientèles devraient poursuivre.

L'analyse des résultats des évaluations de programmes permettra de valider la pertinence de ces objectifs.

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Modèle éducatif

Déterminants des problèmes parentaux

Le modèle éducatif attribue aux caractéristiques person­ nelles du parent, l’ensemble des problèmes rencontrés dans l'exercice du rôle parental (Bromwich, 1981). Utilisé tradi­ tionnellement pour venir en aide aux parents désireux de parfaire leur formation d'éducateur, ce modèle s'impose, dans les années soixante, comme le moyen le plus efficace d'actua­ liser le potentiel des enfants en milieu défavorisé (Stevens, 1976) .

Axé sur le développement des ressources éducatives des parents, ce modèle se veut le reflet des recherches qui ont souligné l'impact des attitudes, des connaissances et des comportements parentaux dans l'accomplissement efficace des fonctions d'éducation et, de ce fait, sur le niveau de déve­ loppement de l'enfant. Ces recherches, effectuées par B r a d1 e y et al. (1979), Heinicke (1976) et White et Watts (1973, 1978), démontrent que les capacités des parents à organiser un environnement stimulant, à favoriser le déve­ loppement des habiletés de l'enfant par une attitude permis­ sive, une attention soutenue et une réponse immédiate et appropriée à ses besoins et à ses intérêts ainsi qu'une interaction affective et langagière riche et personnelle sont les facteurs les plus favorables à l'épanouissement de l'en­ fant .

Objectif du modèle éducatif

Le modèle éducatif a donc pour objectif d'aider les parents à acquérir les compétences nécessaires à la créa­ tion d'un milieu familial stimulant pour l'enfant. Pour ce faire, l'intervention élaborée en fonction de ce modèle peut servir à répondre à trois types de besoins, soit ceux de

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l'enfant, ceux du parent et ceux de la relation parent-enfant (Broinwich, 1981; Provost et Piché, 1983; Saucier, 1983 ; Hanes, 1985).

A. Besoins de l'enfant

L'éducation au rôle parental peut viser spécifiquement à prévenir ou à remédier aux problèmes de développement chez l'enfant (Hanes, 1 985). Le parent y est alors perçu comme principal intervenant auprès de l'enfant, dans l'apprentis­ sage des habiletés d'ordre cognitif, moteur, langagier, affectif et social, nécessaires à son développement. Pour

l'aider dans ce rôle, l'intervention porte sur le contenu et la façon d'enseigner à l'enfant. Elle montre notamment les façons de transmettre l'information, de favoriser la verbali­ sation, d'utiliser les techniques de renforcement et de rétroaction, d'encourager la réflexion, de stimuler la créa­ tivité et de communiquer une motivation positive. Elle informe également le parent des connaissances relatives aux différentes étapes de développement de l’enfant, des techni­ ques éducatives favorables ainsi que des moyens de créer un environnement physique stimulant. Les connaissances transmises sont généralement tirées de la progression standardisée du développement de l'enfant et sont choisies en

fonction de la clientèle d'âge visée.

B. Besoins du parent

L'éducation au rôle parental peut aussi servir à répondre aux besoins personnels du parent en tant qu'adulte autonome (Saucier, 1983). Dans ce but, elle favorise l'augmentation du sentiment de confiance dans l'exercice du rôle parental et l'acquisition des attributs de la maturité décrits par Anastasiow (1985) comme étant les habiletés cognitives, l'é­

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tablissement d’un système de valeurs, le concept de soi intégré et les habiletés de relation personnelle.

Pour ce faire, l'intervention a pour but de développer les capacités de faire face aux problèmes d'adaptation au rôle parental tels les changements dans la vie du couple, les situations conflictuelles dérivées du choix des attitudes et des valeurs face à l'éducation des enfants, la reconnaissance de l'importance du rôle parental et la conviction de pouvoir y réussir. Elle aide également à la maîtrise des habiletés de résolution de problème soit la façon d'analyser les causes d'un problème, d'entrevoir les solutions possibles, de choi­ sir et d'appliquer la solution la plus appropriée. Elle porte enfin sur l'apprentissage des habiletés de communica­ tion sociale telles l'écoute, le respect des idées et les capacités de verbalisation. Ce type d'intervention postule que le développement des aptitudes personnelles du parent bénéficie indirectement à l'enfant.

C. Besoins de la relation parent-enfant

L'éducation des parents peut enfin adopter une approche plus complexe en mettant l'emphase sur la relation parent- enfant dans le contexte familial (Provost et Piché, 1983). Ce type d'intervention attache une importance équivalente aux besoins des deux partenaires et tient compte, de ce fait, non seulement de la personnalité de l'enfant et de son progrès développemental mais aussi des besoins et du niveau de compé­ tence du parent. L'intervention porte donc sur la dynamique des interactions parent-enfant et les circonstances dans lesquelles elles s'opèrent. Elle aide les parents dans l'ac­ quisition de comportements favorables au maintien d'un sys­ tème de communication et de relation efficace en agissant au niveau du réseau complexe d'émission et de décodage des signaux et du contexte affectif des interactions.

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Le but poursuivi est donc d’augmenter les habiletés des parents à jouer un rôle actif et stimulant dans cette rela­ tion afin d'améliorer la qualité de la réciprocité des comportements et de l'influence mutuelle.

Pertinence du modèle éducatif en milieu défavorisé

L’utilisation du modèle éducatif auprès des parents de milieux défavorisés découle des résultats des recherches por­ tant sur l’exercice du rôle parental dans ces milieux et soulignant la pertinence d'agir au niveau des attitudes, des connaissances et des comportements des parents afin d'aider au développement de l’enfant. Certaines analyses des milieux familiaux en fonction des classes sociales (Hess et Shipman, 1965; Pavenstedt, 1965; Strodtbeck, 1967) démontrent, en effet, que tous les parents ne fournissent pas au même titre les expériences jugées nécessaires au développement optimal de l'enfant. Ces études concluent à l'existence d'une corré­ lation positive entre la pauvreté et les carences dans la qualité de l'environnement familial. Ces carences qui sont associées à des pratiques parentales déviantes sont des va­ riables identifiées par Bee (1978) et Bijou (1981) parmi les causes de retard de développement chez les enfants.

De plus, des études expérimentales où les parents sont placés en situation d'enseignement (Bee et al., 1969; Brophy, 1970; Hess et Shipman, 1967; Olmsted et Jester, 1972; Tulkin et Cohler, 1973) démontrent qu'il est plus probable de retrouver en milieu socio-économiquement défavorisé des pro­ cédés défavorables d’interaction parent-en fant. Ces procédés consistent généralement en l'émission de rétroactions néga­ tives, l'utilisation d'un langage moins élaboré, le recours à des stratégies de contrôle basées sur le statut et les normes et le manque d'attention aux besoins et aux intérêts de l'enfant. Comparativement, un plus grand nombre de mères de classes favorisées sur le plan socio-économique maintiennent

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une relation plus personnalisée et stimulante pour l'enfant. Enfin, les mères de classes défavorisées se caractérisent par une faible estime de soi et un manque de confiance dans leurs capacités personnelles.

Sans toutefois conclure à la répartition des services en fonction des seuls critères socio-économiques, comme le rap­ pellent à juste titre Bee (1978) et Seltzer (1973), ces études font ressortir l’existence d’un besoin d’aide surtout chez les parents de milieux socio-économiquement défavorisés. Le modèle éducatif vise à répondre à ce besoin en agissant au niveau des attitudes, des connaissances et des comportements des parents afin de favoriser le développement du sentiment de confiance et de compétence dans l'exercice du rôle paren­ tal, d'aider à la création d'un milieu familial stimulant et de promouvoir l'établissement d'une relation parent-enfant harmonieuse et enrichissante. Les efforts d'intervention s'adressent surtout aux familles ayant de jeunes enfants, vu l'importance critique des premières années de vie et l'avan­ tage de prévenir les conséquences néfastes du déficit cumula­ tif observé chez les enfants (Ausubel, 1967).

Modèle thérapeutique

Déterminants des problèmes parentaux

A l'instar du modèle éducatif, le modèle thérapeutique attribue les difficultés rencontrées dans l'exercice du rôle parental à des caractéristiques personnelles chez le parent. Il s'en distingue toutefois en portant son action au niveau des problèmes d'ordre psychologique qui empêchent l'actuali­ sation des compétences parentales (Pawl, 1984).

Basé sur l'observation de cas cliniques (Fraiberg et al, 1975; Main et Goldwyn, 1984), ce modèle postule que des troubles intra-psychiques chez le parent peuvent, dans bien

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des cas, s'avérer la cause principale d'une relation pertur­ bée avec l'enfant. Ces troubles seraient la conséquence de

la répression dans l'inconscient des expériences difficiles du vécu du parent en tant qu'enfant, tels les souvenirs d'une enfance maltraitée. Ils constituent souvent, de l'avis de Bourassa et al. (1986), l'élément le plus déterminant dans la capacité du parent à s'attacher à l'enfant.

Objectif du modèle thérapeutique

Le modèle thérapeutique a donc pour objectif d'aider les parents à résoudre les problèmes psychologiques qui nui­ sent à la création d'une relation affective avec l'enfant. Pour ce faire, le modèle préconise une aide thérapeutique.

Le processus d'aide thérapeutique, développé par Fraiberg (Pawl, 1984), est basé sur la compréhension et l'interpréta­ tion des procédés de transfert (les relations transférentiel­ les et contre-transférentielles) qui se retrouvent autant dans la relation parent-enfant que dans la relation parent-intervenant. Ces procédés consistent en la répétition d'une relation humaine passée en assignant inconsciemment aux autres des sentiments et des attitudes associées originelle­ ment à des personnes du passé. L'aide thérapeutique, à

laquelle sont initiés les intervenants, permet ainsi au parent de comprendre les origines de ses sentiments et de ses comportements à l'égard de l'enfant en l'amenant à établir des liens entre ses difficultés présentes de relation et ses expériences passées.

Les tenants de ce modèle reconnaissent que ce type d'in­ tervention est spécifique à une clientèle donnée, soit les parents souffrant de stress émotionnel profond (Bourassa et al., 1986). Ils souscrivent donc à l'importance d'iden­ tifier correctement la nature du problème en cause dans les difficultés d'attachement du parent à l'enfant.

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Dans l’esprit du modèle (Pawl, 1984), l’aide thérapeuti­ que s’accompagne de volets complémentaires centrés sur l'édu­ cation et le support aux parents. Si, dans certains cas, la relation thérapeutique suffit à rétablir le lien d'attache­ ment entre le parent et l'enfant, cette approche doit souvent déboucher sur la considération des autres facteurs qui ris­ quent de compromettre cette relation. Le modèle thérapeuti­ que visant l'équilibre psychologique du parent constitue donc, dans plusieurs cas, selon Bourassa et al., (1 98 6 ), le premier moyen d'intervention indispensable mais il doit s'u­ tiliser le plus souvent en complémentarité avec les autres modèles d'intervention.

Pertinence du modèle thérapeutique en milieu défavorisé

La pertinence du modèle thérapeutique en milieu défavo­ risé découle surtout des résultats des études qui se sont penchées sur la question de l'abus et de la négligence des enfants. Ces études, rapportées par Colin (1987), témoignent du fait qu'il se trouve beaucoup de familles pauvres parmi

les familles maltraitantes. Or, l'auteur indique qu'environ 40?£ des mères impliquées dans des situations d'abus ou de négligence des enfants ont connu elles-mêmes un passé de carences et de frustrations. Le.modèle thérapeutique veut donc fournir à ces mères le support psychologique dont elles pourraient avoir besoin.

Modèle réseau

Déterminants des problèmes parentaux

Contrairement aux modèles éducatif et thérapeutique qui recherchent les causes les plus significatives des difficul­ tés parentales dans le cadre restreint de la famille, le modèle d'intervention de réseau stipule que le facteur cru­

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cial dans le niveau de compétence des parents est la qualité de leur réseau social de support (Garbarino et Stocking, 198G). Ce réseau réfère à l'ensemble des personnes avec lesquelles le parent peut entrer en contact (Gottlieb, 1981), soit les membres de la famille, les amis, les voisins, les compagnons de travail ou les aidants naturels dans la commu­ nauté .

Ce modèle s'inspire des nombreuses études qui attestent d'une relation entre le support social et le bien-être géné­ ral des individus notamment au niveau de la capacité d'adap­ tation aux changements, de la stabilité émotionnelle et de la santé physique. Ces études, rapportées par Mitchell et al. (1982), permettent de vérifier trois types d'effets bénéfi­ ques du support sur l'individu. Le support social peut prévenir l'apparition d'événements stressants, influencer positivement la perception du niveau de stress relié à cer­ tains évènements de la vie tels le veuvage et le chômage et enfin servir d'agent modérateur des effets du stress. Les auteurs mentionnent que les études sont positives quant aux deux premiers types d'effets; mais les résultats sont grande­ ment partagés en ce qui a trait à la capacité du support social de protéger les individus contre les effets du stress.

L'intérêt porté au support social dans la recherche des causes sous-jacentes aux difficultés rencontrées par les parents découle également du constat d'une corrélation posi­ tive entre l'isolement social et de nombreux problèmes fami­ liaux dont celui d'abuser des enfants (Bouchard, 1984; Garbarino et Sherman, 1980) ou d'entretenir, avec l'enfant, des relations empreintes de rejet, de restrictions ou d'indifférence (Unger et Powell, 1980).

Les études qui ont tenté d'identifier les sources d'aide auxquelles les parents réfèrent en situations de crise poin­ tent d'ailleurs vers le soutien informel des membres de la famille, des amis, des voisins ou des compagnons de travail

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même lorsque les services formels sont disponibles et acces­ sibles (Unger et Powell, 1980; Gottlieb, 1981). Le réseau social informel représente, pour les parents, une source précieuse de support émotionnel, d’aide instrumentale, d'in­ formation, de modèle de rôle et de rétroaction nécessaires à l'adoption de comportements parentaux adéquats, tout en ser­ vant d'agent de médiation dans l'utilisation des services formels dans la communauté (Gottlieb, 1978). Les enfants y puisent également des sources de stimulation cognitive et sociale, des modèles de rôle et des opportunités de contacts sociaux diversifiés (Cochran et Brassard, 1979).

Objectifs du modèle réseau

La contribution du modèle réseau dans la création d'un contexte favorable à l'exercice du rôle parental consiste donc à favoriser la création, l'utilisation et le maintien des ressources informelles de support dans l'environnement immédiat des parents (Garbarino et Stocking, 1980).

A cet effet, l'intervention peut viser à renforcer les réseaux personnels des parents, composés des membres de la famille et des amis, à aider au développement de réseaux d'aide dans le voisinage ou de groupes d'entraide entre pairs et à supporter les activités des aidants naturels dans la communauté (Collins et Pancoast, 1976; Gottlieb, 1981; Romeder, 1982).

Les parents devant également recourir à des services formels dans certaines situations de crise, le modèle réseau peut favoriser le recours efficace à ces services (Powell, 1979a). Dans ce but, il aide à l'acquisition des compétences personnelles et sociales nécessaires pour évaluer les besoins de la famille et pour identifier et utiliser les ressources disponibles.

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Pertinence du modèle réseau en milieu défavorisé

L’utilisation du modèle d'intervention de réseau auprès des parents de milieux défavorisés se veut un moyen de remé­ dier à l'isolement social des familles, caractérisé par l'ab­ sence ou la sous-uti1is ation des systèmes de support tant formels qu'informels dans l'environnement. Une étude québé­ coise, citée par Colin (1987), démontre que les mères qui résident dans des quartiers à haut risque d'abus des enfants trouvent peu d'aide dans leur entourage ou sont peu satis­ faites de l'aide reçue. Ces observations corroborent les résultats des études portant sur la question des enfants maltraités et qui démontrent que l'isolement social combiné à la pauvreté sont des indices puissants du niveau de risque élevé des parents (Bouchard, 1984; Mayer-Renaud et Berthiaume, 1985). Les tenants du modèle réseau estiment donc que le fait d'accroître les ressources d'aide dans l'environnement immédiat des familles favorise l'expression adéquate des fonctions de parent.

Modèle écologique

Déterminants des problèmes parentaux

A l'opposé des trois modèles précédents, le modèle éco­ logique vise les deux niveaux d'influence d'ordre individuel et environnemental (Bouchard, 1981). Ce modèle est issu de la théorie des systèmes de Bronfenbrenner (1977) selon laquelle les comportements des individus sont le produit de l'interaction entre ces derniers et l'environnement.

Le modèle écologique considère donc l'ensemble des fac­ teurs de risque présents dans l'environnement et met l'ac­ cent sur leurs interactions. Ces facteurs de risque se retrouvent à l'intérieur de quatre couches systémiques juxta­

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posées, interreliées et interdépendantes: le micro, le méso, l'exo et le macrosystème.

Le microsystème comprend les déterminants déjà identi­ fiés dans les modèles éducatif et thérapeutique puisqu’il fait référence, entre autres, aux caractéristiques personnel­ les, aux habiletés et aux comportements du parent. Les interrelations entre les différents lieux de participation parentale que sont la maison, le quartier, l'école et le milieu de travail, constituent les éléments du mésosystème. Le risque majeur à ce niveau se situe donc, comme le souligne le modèle réseau, dans l'absence d'implication sociale des parents.

Les déterminants identifiés dans les autres couches systémiques de l'environnement sont plus exclusifs au modèle écologique. Ils comprennent, dans 1 'exosystème, les struc­ tures politiques, économiques et éducationnelles qui influen­ cent indirectement la famille. Enfin, les normes culturel­ les, les valeurs et les conduites acceptées par la société représentent les éléments du macrosystème (Bouchard, 1981).

En regard de la multiplicité des facteurs en cause dans le contexte de la relation parent-enfant, peu d'effets attri­ bués à ces facteurs sont validés scientifiquement. Jusqu'à maintenant, des relations ont pu être observées entre des conduites parentales et les conditions économiques des famil­ les, le chômage, ainsi que les réseaux (Bouchard, 1981). Par contre, la littérature consacrée à la relation parent- enfant (Bouchard, 1981; Séguin et al., 1984) met en évidence les multiples éléments pouvant affecter cette relation à chacun des niveaux micro, méso, exo et macrosystémique de l'environnement. Ces études font état des nombreuses recher­ ches qui analysent différents phénomènes tels la violence, la pratique de la punition physique, les changements économi­ ques, les conditions de travail, les types de quartier et les structures familiales, et qui démontrent comment ces phéno­

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mènes peuvent affecter la relation parent-enfant. De l’avis des auteurs, l'ensemble des informations accumulées permet d'appuyer la pertinence du modèle écologique dans l’analyse de cette relation.

Objectifs du modèle écologique

Afin d'aider à l'exercice adéquat du rôle parental, le modèle écologique a donc comme objectif ultime la création d'un contexte global favorable à l'établissement d'une rela­ tion parent-enfant harmonieuse. A cet effet, il tient compte des multiples niveaux d'interaction systémique et considère l'ensemble des champs d'action à la fois individuel, fami­ lial, communautaire, institutionnel, économique et politique (Bouchard, 1987). En conséquence, ce modèle poursuit des objectifs spécifiques multiples qui peuvent être notamment le développement des compétences parentales, le maintien d'un climat familial harmonieux, l'intégration sociale des pa­ rents, l'enrichissement de leurs réseaux de support, la compatibilité entre les exigences du travail et celles du rôle parental et la promotion d'idéologies et de politiques gouvernementales assurant la valorisation de ce rôle et son exercice dans des conditions économiques et des milieux de vie favorables.

Pertinence du modèle écologique en milieu défavorisé

L'adoption d'une perspective écologique dans les efforts d'intervention auprès des parents de milieux défavorisés s'impose, de l'avis des tenants de ce modèle, comme la seule réponse valable aux problèmes inhérents à l'exercice du rôle parental dans un contexte de pauvreté (Bouchard, 1981; Séguin et al., 1984). Dans une analyse des facteurs de disharmonie de la relation parent-enfant, Colin (1987) rappelle que les groupes sociaux les plus défavorisés sur le plan socio­

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économique présentent des risques nombreux autant au niveau personnel chez l'enfant et le parent qu'au niveau de l'envi­ ronnement familial et social. L'auteur mentionne, entre autres, la déficience, chez la mère, quant à la connais­ sance des soins à donner à l'enfant, l'absence de soutien et d'aide et le peu de valorisation du rôle parental. De plus, il présente différentes études qui ont traité du problème des enfants abusés et négligés et qui ont mis en évidence l'im­ pact déterminant des conditions environnementales en milieu de pauvreté sur le comportement des parents. De cette ana­

lyse, l'auteur conclut à l'effet que les caractéristiques individuelles des parents et des enfants les plus vulnérables ne peuvent s'envisager indépendamment des conditions environ­ nementales. Or, le modèle écologique axé sur l'ensemble des éléments micro, méso, exo et macrosystémique de l'environne­ ment social et physique des parents adopte cette perspective d'intervention globale.

Objectifs à poursuivre en milieu défavorisé

Les différents modèles conceptuels de prévention, issus de la recherche des facteurs les plus significatifs dans l'exercice du rôle parental, permettent donc aux intervenants de modeler les services d'aide et de support aux parents en fonction de leurs besoins propres. Qu'il s'agisse d'interve­ nir au niveau des compétences éducatives des parents (le modèle éducatif), de leur état psychologique (le modèle thé­ rapeutique), de la qualité de leurs réseaux sociaux de sup­ port (le modèle réseau) ou de l'ensemble des facteurs de risque présents dans leur environnement (le modèle écologi­ que), l'efficacité de l'intervention demeure en effet tribu­ taire du niveau de concordance entre les objectifs poursuivis par le modèle utilisé et la nature des besoins parentaux à combler.

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Afin d'identifier les objectifs susceptibles de mieux répondre aux besoins des parents les plus défavorisés sur le plan socio-économique, il importe donc d’étudier cette rela­ tion entre les objectifs poursuivis par les différents mo­ dèles et les besoins spécifiques à ces clientèles..

En ce qui a trait aux parents les plus défavorisés sur le plan socio-économique, l’ensemble des informations consi­ dérées jusqu'à maintenant témoigne de l’existence d'une mul­ titude de besoins pouvant expliquer la prépondérance des problèmes de développement chez les enfants. Les études des conditions de vie en milieu de pauvreté (Cliché, 1976; Tremblay, 1987) et celles portant sur les facteurs de risque les plus significatifs dans la perturbation de la relation parent-enfant (Bouchard, 1984; Colin, 1987; Mayer-Renaud et Berthiaume, 1985) pointent en effet vers deux types de fac­ teurs qui ont trait aux caractéristiques personnelles des parents et à celles de leur environnement.

Ainsi, en plus d’un manque au niveau du revenu, les parents à risque élevé se caractérisent par une image de soi négative, un esprit de défaitisme, une faible scolarité, des difficultés potentielles d'attachement à l'enfant et des mo­ dèles parentaux inadéquats. A ces facteurs personnels, s'a­ joutent l'isolement social et le stress des conditions de vie dé favorables.

De plus, il apparaît évident, sur la base des études traitant des relations entre les conduites

évoluent

parentales et le ( Bouchard, 1981 ; milieu dans lequel les parents

Séguin et al., 1984), que ces

environnementaux s'influencent les uns les autres. Si facteurs individuels

les e t

conditions stressantes de pauvreté génèrent et amplifient les carences personnelles des parents, les effets négatifs sont à leur tour intensifiés par l'isolement social et par l'impact des normes et des valeurs véhiculées dans la société. Les caractéristiques individuelles ne peuvent donc s'envisager

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indépendamment du contexte socio-économique. De ce fait, l’intervention préventive auprès de ces clientèles à risque élevé doit adopter une perspective globale permettant d’agir sur l'ensemble des facteurs de risque.

Or, le modèle d’intervention éducative, élaboré à partir des études qui attestent d'une relation significative entre des conduites parentales spécifiques et le niveau de dévelop­ pement de l'enfant (Bee et al., 1982; White et Watts, 1973, 1978), vise à promouvoir l’exercice adéquat du rôle parental par une action dirigée exclusivement au niveau des compéten­ ces personnelles des parents (Bromwich, 1981). Ce modèle conceptuel présente donc le parent comme le seul responsable du développement de l'enfant et ne tient pas compte du contexte dans lequel s'actualisent ces compétences.

Les limites attribuées au modèle éducatif dans la satis­ faction des besoins parentaux en milieu défavorisé s'appli­ quent également au modèle thérapeutique centré sur la résolu­ tion des problèmes intra-psychiques chez le parent (Pawl, 1984). D'ailleurs, les tenants de ce modèle d'intervention (Bourassa et al., 1986) souscrivent à l'importance de tenir compte des autres facteurs d'ordre personnel et social qui peuvent nuire à l'exercice du rôle parental.

Il apparaît évident que l'adoption d’une perspective écologique dans les efforts d'intervention auprès des clien­ tèles à risque élevé s'impose comme la seule réponse valable à la multiplicité des besoins à satisfaire. En effet, cette approche qui représente, en fait, l'intégration des diffé­ rents modèles d'intervention est la seule à percevoir la compétence parentale comme une qualité relative à des condi­ tions du milieu (Séguin et al, 1984). Elle est donc la seule à tenir compte du fait que d'habiter des logements insalubres, cantonnés dans des quartiers de haute densité et démunis de ressources matérielles et sociales augmente le degré de vulnérabilité des familles qui sont déjà affectées

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de façon plus intense par les retombées économiques et so­ ciales des politiques gouvernementales.

Toutefois dans la pratique, la question de savoir quelles conditions environnementales peuvent être modifiées signifi­ cativement par une intervention conçue à l'intention des parents demeure au centre du débat. Powell (1979a) stipule qu'il est illusoire de percevoir l'intervention axée vers les parents comme une panacée à tous les grands problèmes so­ ciaux. D'ailleurs, Bronfenbrenner (1974) rappelle que les familles exercent peu de contrôle sur leurs conditions maté­ rielles de vie. Tout en reconnaissant l'importance d'élabo­ rer des politiques de prévention primaire permettant de s'at­ taquer aux multiples facteurs d'influence, Howze et Kotch (1984) estiment également irréaliste de croire qu'une inter­ vention axée vers les parents réussisse à affecter les événe­ ments globaux de leur vie.

Face à ce dilemme, les protagonistes du modèle réseau préconisent d'aider les parents à composer plus adéquatement avec les événements de leur vie en agissant au niveau de leurs réseaux sociaux de support afin d'exploiter davantage les ressources d'aide disponibles. Par ailleurs, les tenants du modèle écologique proposent de mobiliser les parents et de les sensibiliser à l'importance de l'exercice de leurs droits afin de provoquer ultimement des changements à tous les niveaux systémiques de leur environnement.

Les réserves généralement émises (Olds, 1980) quant à l'utilisation du modèle réseau auprès des clientèles à risque élevé résident dans le fait que le renforcement des réseaux de support peut s'avérer insuffisant à contrer les effets du stress relié à l'exercice du rôle parental et à modifier les comportements parentaux de façon sensible et durable. L'iso­ lement social n'étant qu'un des multiples facteurs de risque dans la genèse des problèmes parentaux, Olds (1980) est d'avis qu'une combinaison de ressources formelles et

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informelles s'avère nécessaire à la prévention de ces problèmes dans les milieux défavorisés.

Quant aux objectifs écologiques qui s'identifient davan­ tage à un projet de société visant une meilleure répartition du pouvoir et des richesses, l'urgence des besoins parentaux à combler dans les milieux à risque élevé appelle à des visées plus limitées et plus réalistes. Toutefois, ce modèle d'intervention permet d'expliquer les problèmes parentaux de façon multifactorielle et souscrit à l'importance d'une ac­ tion simultanée aux niveaux personnel et environnemental. En conséquence, il représente le modèle le plus approprié pour répondre aux besoins multiples des parents à risque élevé.

Cependant, tout en reconnaissant l'importance d'une ac­ tion sociale épousant la cause de la lutte contre la pauvreté et au risque d'ignorer les vrais problèmes, il apparaît légitime de circonscrire les objectifs du modèle écologique dans les limites plus restreintes et plus accessibles de l'environnement immédiat des familles. L'adoption des visées du modèle écologique, dans une perspective de développement communautaire, permet d'agir à la fois sur les facteurs personnels qui nuisent à l’exercice du rôle parental et sur la qualité du milieu de vie immédiat qui a le plus de signi­ fication dans l'exercice quotidien de ce rôle (Landry et Guay, 1987).

Pour des raisons pragmatiques qui privilégient une action au niveau des quartiers plutôt qu'à celui de la société en général, l'opérationnalisation du modèle écologique conduit donc à l'identification de quatre objectifs majeurs qui réfè­ rent aux principaux facteurs de risque d'ordre personnel et environnemental dans la genèse des problèmes parentaux en milieu défavorisé.

Dans le but de favoriser l'exercice adéquat du rôle parental chez les clientèles à risque élevé en milieu défavo­

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risé, l’intervention préventive doit, en premier lieu, s'at­ taquer à accroître les liens d'attachement entre le parent et l'enfant surtout chez les parents ayant connu eux-mêmes un passé de carences. Elle doit, en deuxième lieu, développer les compétences parentales en diffusant l'information appropriée et en apportant une aide dans l'adoption de comportements propices au développement de l'enfant.

Consciente de l'impact des conditions de vie défavorables sur le développement et le maintien des compétences parentales, l'intervention préventive doit, en troisième lieu, tendre à rompre l'isolement social des pa­ rents. A cet effet, elle vise la mobilisation de ressources informelles de support et l'utilisation plus adéquate des services communautaires. Enfin, à défaut de pouvoir modifier

fondamentalement les conditions matérielles de vie des famil­ les, elle doit, dans un quatrième temps, contribuer à dimi­ nuer le stress engendré par ces conditions défavorables. Cet objectif est poursuivi par le biais d'une action au niveau des quartiers afin de développer des réseaux d'entraide et d'offrir des services qui répondent à des besoins concrets et immédiats.

La poursuite de ces objectifs amène à se tourner vers les moyens d'action. Afin d'identifier les modalités d'intervention susceptibles de mieux atteindre ces objectifs, il convient d'analyser, au préalable, les résultats des dif­ férents programmes implantés jusqu'à maintenant en milieu défavorisé. Le chapitre suivant traite de cette question et porte sur les différentes modalités d'intervention de groupe.

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Chapitre II

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tuer selon deux approches, soit l'approche de groupe et l'ap­ proche individuelle. Le présent chapitre porte sur les moda­ lités d'intervention s'inspirant de l'approche de groupe.

Les modalités d'intervention de groupe se différencient selon les objectifs spécifiques qu'elles poursuivent et selon les moyens qu'elles utilisent pour atteindre ces objectifs. Les modalités d'intervention qui sont les plus couramment utilisées et qui sont étudiées dans le présent chapitre sont les groupes de discussion, les groupes d'apprentissage, les centres parents-enfants et les groupes d'entraide parentale.

Le but du présent chapitre est de vérifier l'efficacité de chacune de ces modalités d'intervention à rejoindre les parents de milieux défavorisés et à agir sur les facteurs susceptibles d'influencer l'exercice du rôle parental. Pour ce faire, le chapitre présente, pour chacune des quatre modalités d'intervention retenues, une description des objec­ tifs qu'elle poursuit et des moyens utilisés pour atteindre ces objectifs, les résultats des études qui ont mesuré l'ef­

ficacité des programmes les plus représentatifs à rejoindre les parents et à atteindre les objectifs visés et, enfin, une brève discussion soulignant les résultats les plus significa­ tifs. Les stratégies de recrutement sont mentionnées lors de la présentation des programmes si les informations sont dis­ ponibles. La conclusion du chapitre sert à faire le point sur l'ensemble des modalités d'intervention de groupe.

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Groupes de discussion

Description

Les groupes de discussion sont composés de parents qui se réunissent, sous la direction d’un intervenant, pour partager leurs opinions, leurs sentiments et leurs expériences et pour trouver des solutions aux problèmes reliés à l’exercice du rôle parental (Crow, 1967). Ces groupes sont généralement formés d’une quinzaine de participants qui assistent à des rencontres hebdomadaires échelonnées sur une période d'envi­ ron 12 semaines. Ces rencontres sont dirigées par des professionnels ou des non-professionnels qui reçoivent par­ fois une formation à la dynamique de groupe.

Les groupes de discussion sont axés sur l'éducation au rôle parental et visent à aider les parents dans l'acquisi­ tion d'attitudes, de connaissances et de comportements favo­ rables au développement de l'enfant. Ils véhiculent donc un modèle éducatif d'intervention (Bromwich, 1981) et poursui­ vent des objectifs multiples qui ont trait à la satisfaction des besoins de l'enfant, du parent et de la relation parent- enfant. Généralement, les rencontres portent sur le dévelop­ pement de l'enfant, les problèmes d'adaptation au rôle paren­ tal et la création d'un environnement stimulant.

Les sujets traités lors des rencontres peuvent être déterminés par les intervenants en fonction de la clientèle visée et être présentés sous forme d'un exposé, d'un film ou d'une conférence suivi d'une période de questions-réponses et de discussion. Ces rencontres prennent la forme d'un cours plus ou moins structuré. Le contenu des rencontres peut également être choisi par les participants selon leurs be­ soins et leurs intérêts et donner lieu à des échanges plus informels.

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Dans le but d'augmenter la qualité des pratiques éduca­ tives des parents, les groupes de discussion misent sur la diffusion de l'information et les échanges entre les partici­ pants (Crow, 1967). On postule que le fait de recevoir l'information pertinente, de partager des expériences simi­ laires et d'explorer de nouvelles perspectives contribue à modifier positivement les attitudes, les connaissances et les comportements des parents. L'efficacité de l'intervention repose donc sur la participation verbale active des parents dans les discussions et la recherche de solutions aux problèmes soulevés. Le choix et l'application des solutions à ces problèmes sont toutefois laissés à l'initiative des participants. Mais ces derniers bénéficient du support des pairs dans les démarches entreprises.

Résultats des évaluations de programmes

Dans l'ensemble, les études mesurant l'efficacité des groupes de discussion attestent d'une grande variation dans les résultats obtenus. Certains auteurs (Endres, 1968; Fein, 1972) rapportent un impact positif alors que d'autres obser­ vent des effets mitigés (Lazar et Chapman, 1972) ou concluent à l'inefficacité des programmes (Chilman, 1973).

Endres (1968) fait état d'une expérience fructueuse auprès de 181 parents recrutés en milieu défavorisé. Ces parents participent à huit rencontres hebdomadaires visant à développer des attitudes et des habiletés propices à la création d'une relation harmonieuse avec l'enfant. Les pa­ rents estiment que les rencontres leur permettent de mieux comprendre les raisons du comportement de l'enfant, de fixer des attentes plus réalistes et d'être plus confiants dans leurs capacités personnelles. L'évaluation du programme se base sur les réponses à un questionnaire complété par 136 participants à la fin des rencontres.

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Dans le programme de Fein (1972), parmi les 137 parents contactés dans des milieux défavorisés, 85 assistent sporadi­ quement à six rencontres hebdomadaires. Ces rencontres por­ tent sur le développement de l’enfant et l'organisation de la vie familiale. Au cours d'une entrevue, les participants déclarent avoir vécu une expérience positive. Ils soulignent particulièrement leur satisfaction quant à l'opportunité de rencontrer d'autres parents et d'échanger sur des préoccupa­ tions communes.

Dans le cadre d'une revue de différents programmes dont certains font l'objet d'une évaluation formelle, Lazar et Chapman (1972) observent, pour leur part, une grande varia­ tion au niveau de la clientèle rejointe et de l'impact chez les parents et les enfants. Certaines informations laissent croire que des rencontres structurées portant sur des sujets spécifiques tels le développement cognitif et langagier de l'enfant rejoignent plus de parents que des sessions traitant de l'éducation des enfants en général. Les auteurs estiment qu'il se fait une sélection naturelle des parents lors du recrutement et soulignent le besoin de préciser davantage les caractéristiques spécifiques des participants. Malgré les effets positifs observés chez une certaine clientèle, ils concluent, de leur analyse, que les programmes ne rejoignent pas les parents de façon satisfaisante.

Une étude similaire effectuée par Chilman (1973) met en évidence le fait que les groupes de discussion ne réussissent pas à engendrer des changements significatifs chez les pa­ rents de milieux défavorisés et sont inefficaces à rejoindre les clientèles les plus démunies. L'auteur mentionne l'échec du programme de Belton et Goldberg (1966: voir Chilman, 1973) qui a dû être abandonné après quatre rencontres, n'ayant rejoint que 10% de la c1ientè1 e-cib1 e. Dans le programme de Harrison et Lewis (1967: voir Chilman, 1973), sur les 22 mères rejointes, 13 mères assistent sporadiquement aux rencontres malgré les services de transport et de garde­

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rie offerts et huit mères seulement mentionnent qu’elles tentent d'appliquer les connaissances apprises dans leur relation avec l'enfant. Dans le cas de Fuchs (1968 : voir Chilman, 1973), 28 parents sur une population de 196 (14%) répondent à l'invitation de participer aux groupes. Sur une possibilité de dix rencontres, sept parents assistent à quatre rencontres et plus et semblent bénéficier de l'expé­ rience. Enfin, parmi les 15 mères éligibles au programme de Glickman (1968: voir Chilman, 1973), seulement trois mères maintiennent une assistance régulière et font preuve d'un certain degré d'amélioration au niveau de leurs attitudes face à l'enfant. Dans la grande majorité des cas, les pères sont absents. Généralement, les mères qui participent aux rencontres proviennent de milieux familiaux moins perturbés et sont déjà sensibilisées à l'importance de leur rôle face à l'enfant. Malgré tout, l'auteur mentionne que l'impact de l'intervention est minime.

Les auteurs avancent certaines hypothèses quant aux raisons pouvant expliquer les difficultés rencontrées en milieu défavorisé. Selon Crow (1967), les parents qui tirent bénéfice d'une participation à des groupes de discussion font preuve d'autonomie, d'estime de soi et d'aisance sociale leur permettant de fonctionner avantageusement dans le groupe et de puiser les ressources appropriées à leur situation spéci­ fique. L'auteur précise que le désir de réduire l’anxiété face à l'exercice du rôle parental est la principale motiva­ tion qui amène les parents à se joindre à ces groupes.

Mannino et Conant (1969) rappellent que les conditions familiales et financières des parents rendent difficile l'ac­ cès au programme. Dans une étude effectuée en 1969 auprès de 179 parents de divers milieux socio-économiques inscrits à des groupes de discussion, les auteurs notent que plus de la moitié (57%) des 54 parents qui abandonnent avant la fin donnent comme raisons des problèmes d'organisation, de transport et de garderie. Ces parents proviennent de milieux

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plus défavorisés et déplorent également, en grande majorité (33%), le caractère trop abstrait des rencontres. Les au­ teurs concluent donc à l’importance d'offrir des services de transport et de garderie et de porter une attention particu­ lière aux préoccupations concrètes des parents.

Par contre, de l'avis de Chilman (1973), les efforts déployés pour adapter l'intervention aux caractéristiques spécifiques des parents et les services de transport et de garderie offerts pour faciliter leur participation ont peu d'impact sur les piètres résultats généralement obtenus chez les parents de milieux défavorisés. L'auteur estime que ce type d'intervention de courte durée ne suffit pas à contrer les effets négatifs du contexte de pauvreté. A son avis un programme plus global offrant aux familles des services mul­ tiples peut engendrer de meilleurs résultats.

Après avoir étudié le fonctionnement des groupes de discussion, Auerback (1968: voir Abidin et Carter, 198Ü) suggère, pour sa part, de renforcer l'impact de cette méthode d'intervention par l'utilisation d'une approche combinée où l'échange d'idées s'accompagne d'un volet pratique centré sur l'acquisition d'habiletés spécifiques.

L'étude de Wittes et Radin (1971) démontre, en effet, que les mères issues des classes sociales plus défavorisées tirent meilleur avantage d'une implication dans des activités concrètes permettant un plus haut niveau de participation dans le programme. Cette étude vise à identifier, entre les discussions et les activités structurées, la technique péda­ gogique la plus efficace pour modifier positivement les atti­ tudes et les comportements des parents. Deux groupes expéri­ mentaux composés respectivement de 24 et de 28 mères issues de milieux défavorisés participent à 18 rencontres animées par le même intervenant et véhiculant le même curriculum. Un troisième groupe contrôle est formé de 13 mères de même milieu socio-économique. L'intervention se fait, dans le

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premier groupe, par le biais d'activités structurées telles les jeux de rôle, la pratique des techniques enseignées, les projets artistiques et les exercices à faire avec l'enfant à

la maison et, dans le deuxième groupe, par le biais d'un exposé suivi d'une période de questions-réponses et de discussion. Le curriculum dont le contenu évolue d'un niveau hautement concret à abstrait, porte sur les principes de renforcement et les techniques éducatives applicables dans des tâches quotidiennes avec l'enfant. Le but de l'interven­ tion est d'enseigner aux mères la façon de stimuler le déve­ loppement de l'enfant.

L'impact de l'intervention est mesuré à partir d'un ques­ tionnaire administré au début et à la fin du programme et dont les réponses sont codifiées à l'aide d'instruments de mesure des attitudes (Parental Attitude Research Instrument- PARI) et des comportements des parents (Cognitive Home Envi­ ronment Scale - CHES). Des visites hebdomadaires à domicile servent également à observer les techniques disciplinaires des mères. Les caractéristiques socio-démographiques des participantes sont compilées au début du programme.

Comparés au groupe contrôle, les deux groupes expérimen­ taux enregistrent des gains significatifs (p < .05) au PARI et au CHES et diminuent sensiblement l'usage de la punition. Lorsque les deux groupes expérimentaux sont comparés entre eux, les résultats indiquent des changements identiques sur toutes les mesures et un même taux de présence aux réunions, 50% des mères ayant assisté à au moins neuf rencontres. Tou­ tefois, la comparaison entre les membres les plus actifs dans les deux groupes, c'est-à-dire ceux ayant assisté à au moins 50% des rencontres, ainsi que celle entre les membres les moins actifs (moins de 50%) conduisent à des résultats diffé­ rents.

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Chez les membres les plus actifs, les mères du groupe des exposés-discussions obtiennent des résultats supérieurs aux mères inscrites au groupe d'activités. En ce qui a trait aux membres les moins actifs, les résultats sont inversés. Ce sont les mères qui participent au groupe d'activités qui enregistrent les meilleurs résultats. Or, le contrôle des caractéristiques socio-démographiques des participants permet d'observer que les membres les plus actifs qui réussissent mieux dans le groupe de discussion sont issus d'une classe sociale plus favorisée. Par contre, les membres les moins actifs qui profitent davantage d'une participation à des activités structurées proviennent d'un milieu plus défavori­ sé .

Aucune mesure ne porte sur le fonctionnement interne des groupes. Les auteurs observent toutefois une différence mar­ quée dans la conduite et l'atmosphère des rencontres. Au début du programme, le groupe centré sur les activités at­ teint un plus haut niveau de participation mais l'orientation des rencontres est laissée à la charge de l'animateur et il n'y a que de très rares échanges sur des problèmes plus personnels. Au contraire, les membres du groupe des exposés-discussions jouent un rôle de plus en plus actif dans la planification et la direction des rencontres et orientent les discussions vers la recherche de solutions à des problèmes personnels. Le support et la cohésion développés dans le groupe favorisent l'intégration des mères plus retirées et débouchent sur une implication dans des activités communau­ taires.

Par contre, Wittes et Radin (1971) soulignent l'importance de repenser le fonctionnement de ces groupes afin de rejoindre les clientèles les plus défavorisées. El­ les rappellent qu'aucune méthode, que ce soit les discussions ou les activités, n'engendre un niveau satisfaisant de parti­ cipation, les mères les plus démunies n'étant présentes qu'à moins de 50% des rencontres. De plus, elles mentionnent que

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parmi les 63 mères invitées à participer au programme, les 11 mères ayant refusé proviennent des milieux les plus défavori­ sés .

Discussion

Il faut reconnaître, à prime abord, que les informations permettant de vérifier l'efficacité des groupes de discussion en milieu défavorisé sont très limitées. Les résultats por­ tent en majeure partie sur le degré de satisfaction des parents quant à leur participation aux programmes. Très peu mesurent réellement la modification dans les attitudes et les connaissances et encore moins dans les comportements. Lorsque des effets sont observés, les études ne précisent pas les résultats des analyses statistiques permettant d'arriver à de telles conclusions et aucun suivi à long terme n'en vérifie le maintien. De plus, il est difficile d'attribuer les résultats obtenus à des facteurs plus spécifiques reliés au déroulement des rencontres, peu d'études fournissant de renseignements à ce sujet.

Toutefois, certaines indications laissent croire que les groupes de discussion peuvent contribuer à augmenter le ni­ veau des connaissances, à diminuer l'anxiété face à l'exer­ cice du rôle parental et à améliorer les comportements paren­ taux. Mais ces résultats sont observables chez certaines clientèles issues de milieux moins perturbés et qui sont déjà sensibilisées à l'importance de leur rôle à l'égard de l’en­ fant .

En ce qui a trait aux parents les plus démunis, qu'il est d'ailleurs difficile de rejoindre, les informations indi­ quent qu'ils abandonnent les groupes, assistent peu aux ren­ contres ou en tirent peu bénéfice. Il y a lieu de croire que ces programmes de courte durée sont insuffisants à contrer les effets de la pauvreté. Cependant, il semble qu'une

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approche plus concrète et structurée permettrait de mieux rejoindre ces clientèles et de contribuer à l'exercice plus adéquat du rôle parental.

Groupes d'apprentissage

Contrairement aux groupes de discussion qui visent à modifier les compétences parentales en agissant au niveau des connaissances, les groupes d'apprentissage utilisent la pra­ tique d'activités concrètes pour enseigner aux parents des habiletés spécifiques servant à solutionner un ensemble de problèmes reliés à l'éducation des enfants et à l'organisa­ tion de la vie familiale (Goodson et Hess, 1975; James et Ethridge, 1978; Tableman et al., 1982).

Ces groupes véhiculent un programme de formation structu­ ré basé sur l'implication active des parents dans des activi­ tés d'apprentissage où sont appliquées les connaissances ac­ quises. Ces activités sont des plus diverses et comprennent notamment les jeux de rôle, la démonstration et la pratique des techniques suivies d'une rétroaction et d'un renforce­ ment, la fabrication et l'utilisation d'un matériel éducatif destiné à l'enfant et les exercices à faire à la maison avec compte rendu en groupe.

Les groupes d'apprentissage poursuivent des objectifs variés mais peuvent se regrouper sous trois catégories selon la nature des habiletés parentales qu'ils tentent de dévelop­ per. Ainsi, certains programmes s'adressent aux parents en tant que premiers intervenants au niveau du développement de l'enfant et portent sur l'acquisition d'un répertoire de techniques de stimulation de l'enfant (Goodson et Hess, 1975; Karnes et al., 1970). D'autres mettent l'accent sur le rôle des parents en tant que partenaires dans la relation parent- enfant et visent à enseigner des techniques de communication favorables au maintien de cette relation (James et Ethridge,

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1978) ainsi que des techniques de modification du comporte­ ment de l'enfant (Berkowitz et Graziano, 1972). Enfin, une dernière catégorie réfère aux programmes qui ont pour but d'aider les parents à composer plus efficacement avec les événements de leur vie en favorisant notamment l'acquisition des habiletés permettant de mieux faire face aux situations de stress (Tableman et al, 1982).

Groupes visant l'apprentissage de techniques de stimulation de 1'enfant

A. Description

Certains programmes d'intervention de groupe utilisent les activités d'apprentissage pour enseigner aux parents des techniques éducatives leur permettant de mieux stimuler le développement de l'enfant (Goodson et Hess, 1975; Stevens, 1976). Ces techniques consistent à enseigner des tâches simples qui aident à la maîtrise de concepts spécifiques ordinairement dans un contexte de jeu, à donner une rétroac­ tion immédiate et positive, à utiliser un langage plus élabo­ ré, à encourager la verbalisation et à développer la curiosi­ té chez l'enfant et enfin à répondre à ses besoins en organi­ sant un environnement stimulant approprié à son niveau de développement.

Le contenu des rencontres varie selon le groupe d'âge visé et peut mettre l'accent sur des aspects spécifiques du développement de l'enfant tels le développement sensori- moteur et le langage. Il est véhiculé généralement par le biais d'une séquence prédéterminée d'activités qui servent également à diffuser l'information quant aux principes de développement de l'enfant.- Les rencontres hebdomadaires peuvent s'échelonner sur quelques mois ou une année. Elles sont dirigées par des intervenants professionnels. Ces programmes ont pour but d'aider les parents à prévenir ou à

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combler des retards au niveau des apprentissages de l'enfant. A long terme, ils visent à remédier au problème du rendement scolaire des enfants.

La tentative américaine de briser le cercle de la pauvre­ té par le biais de l'éducation a contribué, dans les années soixante, à la multiplication de ces programmes en milieu défavorisé (Hellmuth, 1968). L'intérêt porté au rôle des parents dans les apprentissages de l'enfant fait alors suite au constat de l'érosion progressive des gains chez les en­

fants inscrits à des programmes compensatoires (White, 1970)., Cet intérêt découle également des conclusions émises en faveur d'une implication parentale, dans les études compa­ rant l’efficacité de différents programmes qui s’adressent soit à l’enfant, soit au parent ou au couple parent-enfant (Bronfenbrenner, 1974; Ka r n e s et al., 1968; Radin, 1972).

B. Résultats des évaluations de programme

Dans ce contexte social axé sur le développement maximal du potentiel de l'enfant, les groupes d'apprentissage conçus à l'intention des parents servent généralement à renforcer et à aider au maintien des acquis chez les enfants déjà impli­ qués dans des interventions d'enrichissement pré-sco1 aire. Les évaluations des programmes visent surtout à mesurer l'im­ pact de l'intervention sur le développement de l'enfant et

vérifient rarement les effets engendrés chez les parents.

Les études de Goodson et Hess (1975) et de Lazar et Chapman (1972) permettent toutefois de conclure indirectement à l'efficacité de l'intervention éducative auprès des pa­ rents. Ces études portent sur une quinzaine de programmes qui ont fait l'objet d'évaluation formelle. Elles attestent de gains supérieurs en développement cognitif et verbal chez les enfants dont les parents participent à l'intervention par rapport à ceux des groupes contrôles dont les parents ne sont

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pas impliqués dans les programmes. Les auteurs rapportent également les résultats de quelques études qui mesurent des changements positifs chez les parents au niveau du langage et de la qualité de l’interaction avec l'enfant.

Les facteurs d’efficacité des programmes s'avèrent diffi­ ciles à identifier. Il semble toutefois qu’un programme structuré impliquant activement les parents dans des activi­ tés spécifiques élaborées en fonction d'objectifs clairement définis, favorise l'atteinte des meilleurs résultats (Goodson et Hess, 1975). En ce qui a trait au maintien des acquis, certaines évaluations rapportées par Lazar et Chapman (1972) font état d'une érosion progressive des gains chez les enfants. Mais des études longitudinales dont celle de Lazar et Darlington (1978), soulignent des effets positifs en ter­ mes d'une diminution du nombre d'enfants inscrits en classes spéciales et d'une participation accrue des parents dans le processus éducatif.

Par contre, Stevens (1976) émet de sérieuses réserves quant à l'efficacité des programmes à rejoindre les parents qui en auraient le plus besoin. Il cite, à l'appui de ses dires, les résultats d'une étude nationale portant sur la participation parentale aux programmes Head Start et qui démontrent que les parents les plus impliqués ont un niveau d'éducation supérieur, ont moins d'enfants et sont plus enga­ gés dans des activités communautaires. Ces parents sont d'ailleurs ceux qui retirent les plus grands bénéfices d'une intervention éducative.

Dans le but de mieux rejoindre les clientèles plus défavorisées, Badger (1968) met sur pied un programme de groupe à composantes multiples. Les rencontres hebdomadaires échelonnées sur une période de deux ans comprennent deux parties distinctes. L'une est centrée sur l'apprentissage de techniques de stimulation de l'enfant sous la direction

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intensive de l'intervenant. L'autre vise à répondre aux besoins personnels des mères et est consacrée à des échanges et à des discussions informelles où l’intervenant agit comme personne-ressource. Des visites à domicile, dont la fréquen­ ce varie selon les besoins, permettent de fournir aux mères le renforcement et la rétroaction nécessaires à l’application des techniques apprises en groupe, dans le contexte spécifi­ que de leur relation avec l’enfant. Le matériel éducatif utilisé lors des rencontres est laissé en permanence dans les familles et les mères sont invitées à emprunter les livres et les jouets mis à leur disposition.

Deux groupes de dix mères recrutées dans des milieux défavorisés participent au programme. L’impact de l’intervention est évalué uniquement au niveau du dévelop­ pement cognitif des enfants. A la fin du programme, les enfants enregistrent une différence significative de 16 points au Stanford-Binet (p < .0005) par rapport à un groupe contrôle composé d’enfants issus d’un même milieu socio-économique (Karnes et al., 1968). Aucun suivi à long terme n’est toutefois assuré.

Aucune mère n’abandonne le programme durant la première année; cinq mères ne peuvent participer à la deuxième session pour des raisons majeures dont leur retour sur le marché du travail. Le taux de présence aux rencontres s’établit en moyenne à 80%.

Selon l’auteur, le suivi personnalisé à domicile expli­ que en grande partie le succès du programme. Le fait de porter une attention particulière au contexte spécifique de la relation parent-enfant permet de guider les mères dans l’adoption d’une approche mieux adaptée à leurs besoins. Le renforcement et la rétroaction immédiates fournis lors des visites représentent également une aide précieuse pour celles qui éprouvent des difficultés à établir une relation positive

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avec l'enfant étant trop anxieuses ou fixant des attentes irréalistes.

Malgré l'implication active des mères dans les activités d’apprentissage, leur attitude dans le cadre des discussions s'avère, au début, empreinte de résistance, de passivité et de défaitisme. Il apparaît primordial d’aider ces mères à développer une opinion positive d'elles-mêmes et à acquérir la conviction de pouvoir contrôler leur vie. L'auteur obser­ ve que les changements d'attitude, chez les mères, se produi­ sent lorsqu'elles réalisent qu'elles sont plus efficaces avec leur enfant suite à l'utilisation des techniques enseignées lors des rencontres. Toutefois, ce n'est qu'au cours de la deuxième année qu'elles manifestent un intérêt pour l'impli­ cation communautaire dont les suggestions, à cet effet, étaient auparavant ignorées.

Les sentiments profonds de défaitisme et de dévalorisa­ tion de soi qui se retrouvent fréquemment chez les mères issues des milieux les plus démunis expliquent également, selon l'auteur, les nombreuses difficultés rencontrées lors du recrutement. Lors d'une première tentative, seulement six mères se joignent au programme. Après de nombreuses visites personnelles, 20 mères acceptent finalement de participer. Parmi ces dernières, trois mères qui manifestent des problèmes psychologiques sérieux assistent très peu aux ren­ contres et leurs enfants enregistrent les gains les plus bas.

Il semble que le problème du recrutement des parents dans des groupes à caractère éducatif est inévitable quel que soit le type d'activité proposé. Ainsi, Nimnitcht et al. (1971) et Rosenfeld (1978) notent également l'absence des mères de milieux défavorisés à des ateliers organisés dans des ludothèques pour enseigner la façon d'utiliser des jouets éducatifs et permettre d'échanger sur des sujets relatifs à

Références

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