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Lutte biologique contre deux pucerons ravageurs en serre (Aphis gossypii et Aulacorthum solani) par l'utilisation des microorganismes du sol

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Academic year: 2021

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Lutte biologique contre deux pucerons ravageurs en

serre (Aphis gossypii et Aulacorthum solani) par

l'utilisation des microorganismes du sol

Mémoire

Mouna Kahia

Maîtrise en biologie végétale - avec mémoire

Maître ès sciences (M. Sc.)

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Lutte biologique contre deux pucerons ravageurs en

serre (Aphis gossypii et Aulacorthum solani) par

l’utilisation des microorganismes du sol

Mémoire

Mouna Kahia

Sous la direction de :

Valérie Fournier, directrice de recherche

Hani Antoun, codirecteur de recherche

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Résumé

Le puceron de la digitale Aulacorthum solani (Kaltenbach) et le puceron du melon Aphis

gossypii (Glover) sont parmi les pucerons les plus nuisibles pour les cultures en serre. La

lutte biologique microbienne pourrait constituer une voie efficace contre ces insectes. La combinaison de différents agents microbiens peut augmenter leur efficacité. Ce travail évalue l’efficacité de Beauveria bassiana ANT-03, Bacillus pumilus PTB180 et B. subtilis PTB185, utilisés individuellement ou mélangés, pour contrôler A. gossypii et A. solani sur concombre et tomate, respectivement. En laboratoire, dix larves L2 de chaque puceron ont été placées dans des plats de Petri contenant une feuille de tomate ou une rondelle de feuille de concombre fixée dans la gélose. Ces larves ont été pulvérisées avec 1 mL de suspensions préparées selon le traitement (Témoin, B. pumilus, B. subtilis, B. bassiana, B. pumilus + B.

subtilis, B. bassiana + B. pumilus, B. bassiana + B. subtilis, B. bassiana + B. pumilus + B. subtilis). Les mêmes traitements utilisés en laboratoire ont été appliqués en serre, mais des

pucerons adultes ont été utilisés. Les résultats des essais en laboratoire et en serre ont révélé qu’en causant la mortalité de A. solani et en affectant la reproduction de A. gossypii, les deux bactéries (B. pumilus PTB180 et B. subtilis PTB185) ont pu démontrer un effet aphicide comparable à celui du produit commercial (Bioceres) contenant le champignon. Lorsqu’utilisé en mélange, aucun effet additif entre les trois microorganismes étudiés n’a été observé. Les essais de suivi de la survie des spores de deux bactéries et du champignon conduits en serre ont démontré qu’ils gardent un niveau de population de 106 CFU/g de feuilles fraîche jusqu’à neuf jours après leur application, même quand ils ont été mélangés. Ainsi, sur plantes, les deux Bacillus n’exposent pas un effet antifongique envers B. bassiana ANT-03.

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Abstract

The foxglove aphid Aulacorthum solani (Kaltenbach) and the melon aphid Aphis gossypii (Glover) are among the most harmful aphids for greenhouse crops. Microbial biological control may be an effective method against these insects. The combination of different microbial agents can increase their efficiency. This work evaluates the efficacy of Beauveria

bassiana ANT-03, Bacillus pumilus PTB180 and B. subtilis PTB185, used individually or in

combination, to control A. gossypii and A. solani on cucumber and tomato, respectively. In the laboratory, ten L2 larvae of each aphid were placed in Petri dishes containing a tomato leaf or a cucumber leaf disc fixed in the agar plate. These larvae were sprayed with 1 mL of suspensions prepared according to the treatment (Control, B. pumilus, B. subtilis, B.

bassiana, B. pumilus + B. subtilis, B. bassiana + B. pumilus, B bassiana +B. subtilis, B. bassiana + B. pumilus + B. subtilis). The same treatments used in the laboratory were applied

in the greenhouse, but adult aphids were used. Laboratory and greenhouse test results revealed that by causing A. solani mortality and by affecting A. gossypii reproduction, both bacteria (B. pumilus PTB180 and B. subtilis PTB185) were able to demonstrate aphicide effect equivalent to that of the commercial product (Bioceres) containing the fungus. When used as a mixture, no additive effect between the three microorganisms studied was observed. Spore survival tests of the two bacteria and the fungus conducted in a greenhouse have shown that they retain a high level of population 106 CFU/ g fresh leaves up to nine days after the application when used alone or as a mixture. Thus, on plants, the two bacilli do not exhibit antifungal effect against B. bassiana ANT-03.

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Table des matières

Résumé ... iii

Abstract ... iv

Table des matières... v

Liste des tableaux ... vii

Liste des figures ... viii

Remerciements ... ix

Avant-propos ... xi

Introduction générale... 1

Chapitre 1 : État des connaissances ... 4

1. Importance de la serriculture au Québec ... 2

2. Les principaux pucerons ravageurs en serre ... 3

2.1 Le puceron de la digitale ... 5

2.2 Le puceron du melon... 6

3. Moyens de lutte actuels contre les pucerons ravageurs en serre ... 7

4. Approche de lutte biologique microbienne ... 12

5. Les champignons entomopathogènes ... 14

6. Le champignon entomopathogène Beauveria bassiana ... 16

6.1 Mode d’action ... 19

6.2 Exemples d’utilisation ... 21

7. Les bactéries Bacillus spp... 23

7.1 Bacillus pumilus ... 25

7.2 Bacillus subtilis ... 26

8. Concept d’additivité et de synergie des agents entomopathogènes ... 28

9. Problématique, objectifs et hypothèses ... 30

Chapitre 2 : Effet insecticide de Bacillus pumilus PTB180 et Bacillus subtilus PTB185 utilisés seuls ou en combinaison avec le champignon Beauveria bassiana ANT-03 contre les pucerons ravageurs en serre Aphis gossypii et Aulacorthum solani ... 32

Résumé ... 33

1. Introduction ... 34

2.1 Matériels biologiques... 37

2.1.1 Matériel végétal ... 37

(6)

2.1.3 Matériel fongique ... 38

2.1.4 Les bactéries ... 38

2.2 Traitements appliqués ... 39

2.3 Essais au laboratoire ... 39

2.3.1 Essai de compatibilité entre le champignon et les deux bactéries ... 39

2.3.2 Puceron de la digitale ... 40

2.3.3 Puceron du melon ... 41

2.4 Essais en serre... 41

2.4.1 Essais avec le puceron de la digitale ... 42

2.4.2 Essais avec le puceron du melon ... 43

2.5 Essais sur la survie des conidies fongiques et bactériennes ... 43

2.6 Analyses statistiques ... 45

3. Résultats ... 47

3.1 Essais de compatibilité entre le champignon et les deux bactéries ... 47

3.2 Essais avec le puceron de la digitale ... 48

3.2.1 Essais de laboratoire ... 48

3.2.2 Essais en serre ... 49

3.3 Essais avec le puceron du melon ... 50

3.3.1 Essais de laboratoire ... 50

3.3.2 Essais en serre ... 51

3.4 Essais sur la survie ... 52

3.4.1 Survie des bactéries ... 52

3.4.2 Survie du champignon ... 54 4. Discussion ... 56 5. Conclusion ... 60 Références ... 61 Conclusion générale ... 65 Bibliographie ... 69 Annexes ... 82

(7)

Liste des tableaux

Tableau 1 : Survie de B. pumilus PTB180 et de B. subtilis PTB185, un jour et neuf jours

après leur application sur les feuilles de tomate suivant différentes combinaisons en fonction des traitements. Dans chaque ligne les moyennes (n= 8) suivies par la même lettre ne sont pas significativement différentes (LSD, α = 0,05). ... 53

Tableau 2 : Survie de B. pumilus PTB180 et B. subtilis PTB185, un jour et neuf jours après

leur application sur les feuilles de concombre suivant différentes combinaisons en fonction des traitements. Dans chaque ligne, les moyennes (n= 8) suivies par la même lettre ne sont pas significativement différentes (LSD, α = 0,05). ... 54

Tableau 3 : Concentration de B. bassiana ANT-03, un jour et neuf jours après son

application sur les feuilles de tomate en présence de B. pumilus PTB180 et de B. subtilis PTB185. Dans chaque ligne les moyennes (n= 64) suivies par la même lettre ne sont pas significativement différentes (LSD, α = 0,05). ... 55

Tableau 4 : Concentration de B. bassiana ANT-03, un jour et neuf jours après leur

application sur les feuilles de concombre en présence de B. pumilus PTB180 et de B.

subtilis PTB185. Dans chaque ligne les moyennes (n= 64) suivies par la même lettre ne

(8)

Liste des figures

Figure 1: Morphologie des colonies de B. pumilus PTB180 (A) et B. subtilis PTB185 (B)

poussé sur milieu NAO (Premier tech, Québec, Canada). ... 45

Figure 2: Effet des souches de B. pumilus PTB180 et B. subtilis PTB185 sur la croissance

radiale moyenne de B. bassiana ANT-03 après 3, 6 et 12 jours d’incubations sur TSA. Les moyennes (n= 6) ayant des lettres en commun ne sont pas significativement différentes (LSD, α = 0,05). ... 48

Figure 3: Mortalité cumulative des larves L2 de A. solani sept jours après l’application de B. pumilus PTB180, B. subtilis PTB185 et du B. bassiana ANT-03, seuls ou en

combinaison sur feuilles de tomate en serre. Les moyennes (résultantes de trois essais indépendants répétés dans le temps, n= 15) ayant des lettres en commun ne sont pas significativement différentes (LSD, α = 0,05). ... 49

Figure 4 : Mortalité cumulative de A. solani neuf jours après l’application de B. Pumilus

PTB180, B. subtilis PTB185 et du Bioceres contenant le B. bassiana ANT-03, seuls ou en combinaison sur plants de tomate en serre. Les moyennes (résultantes de deux essais répétés dans le temps, n= 10) ayant des lettres en commun ne sont pas significativement différentes (LSD, α = 0,05). ... 50

Figure 5 : Mortalité cumulative des larves L2 de A. gossypii sept jours après l’application de B. pumilus PTB180, B. subtilis PTB185 et B. bassiana ANT-03, seuls ou en combinaison

(8 traitements) sur feuilles de concombre in vitro. Les moyennes (résultantes de deux essais indépendants répétés dans le temps, n = 10) ayant des lettres en commun ne sont pas significativement différentes (LSD, α = 0,05)... 51

Figure 6 : Variation du nombre des pucerons (A. gossypii) vivants retrouvés sur trois feuilles

de concombre échantillonnées neuf jours après l’application de B. pumilus PTB180, B.

subtilis PTB185 et du Bioceres contenant le B. bassiana ANT-03, seuls ou en

combinaison (8 traitements) en serre. Les moyennes (résultantes de quatre essais indépendants répétés dans le temps, n= 20) ayant des lettres en commun ne sont pas significativement différentes (LSD, α = 0,05). ... 52

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Remerciements

Pour débuter, je tiens à remercier ma directrice Valérie Fournier ainsi que mon codirecteur Hani Antoun pour m’avoir donné la chance d’embarquer dans cette expérience qu’est la maîtrise. Je suis grandement reconnaissante pour votre aide, votre soutien, vos conseils précieux, votre confiance, vos encouragements et votre disponibilité continue. Merci d’avoir partagé avec moi vos expériences et votre professionnalisme reconnu.

Un merci spécial à Thi Thuy An Nguyen, une professionnelle de recherche, pour ton aide infini, ton appui, tes conseils, tes idées débrouillardes, ta présence et ton écoute.

Ce projet n’aurait pu avoir lieu sans la collaboration, le financement et l’aide de l’équipe de Premier Tech. Plus particulièrement, merci à Rémi Naasz, Catherine Viel et Alain Bélanger pour leur suivi de l’avancement du projet, leurs idées et leurs suggestions. Merci également de nous avoir fourni les deux bactéries, Bacillus pumilus PTB180 et Bacillus subtilis PTB185, tout au long de nos essais, ainsi que pour les informations qu’ils nous ont fournies concernant ces bactéries.

Je suis également reconnaissante à Anatis Bioprotection pour le soutien financier. Merci à toute l’équipe, spécialement, Silivia Todorova et Martin Nadeau pour nous avoir fourni le « Bioceres », produit commercial contenant le champignon Beauveria bassiana ANT-03 et pour leurs commentaires constructifs.

Merci à nos partenaires financiers : le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG) et le Consortium de recherche et innovations en bioprocédés industriels au Québec (CRIBIQ) pour avoir participé dans le financement de ce projet.

J’aimerais aussi exprimer ma reconnaissance à la Mission universitaire de la Tunisie en Amérique du Nord (MUTAN) pour m’avoir donné la chance de pursuivre mes études de deuxième cycle à l’Université Laval et pour leur support financier.

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Un énorme merci à Gaétan Daigle pour son aide et ses conseils aux différentes étapes d’analyses statistiques.

Un grand merci, du fond du cœur à mes collègues de laboratoire : Mathieu Bouchard-Rochette, Elizabeth Demeule, Émilie Maillard, Amélie Gervais, Sabrina Rondeau, Frédéric McCune, Marianne Lamontagne-Drolet, Stéphanie Patenaude, Phanie Bonneau, Mélanie Normandeau Bonneau et Louis Cossus. Merci pour votre temps et les efforts déployés pour réaliser la tâche la plus difficile de mon projet (les décomptes de pucerons), mais surtout, merci pour vos encouragements, votre présence et votre humour. Merci d’avoir été là pour moi, aussi bien dans les bons moments que dans les mauvais. Vous m’avez permis d’apprendre plusieurs choses sur les traditions et les coutumes québécoises. Grâce à vous, je me suis sentie toujours chez moi. Merci également à Olivier Samson-Robert pour ses suggestions dans le cadre des présentations orales réalisées tout long de ce projet.

Je ne pourrais pas passer la section des remerciements sans souligner l’aide indispensable des stagiaires : Jean Bélanger, Victor Brubé, Marine Daniel, Catherine Bolduc, Aurélie Boilard, Thaïs Andro, Guillaume Guengard, Clémence Landreau, Lucie Alexandre et Andréa Duclos pour m’avoir aidé à compter des milliers des pucerons. Sans vous, j’aurai dû passer des jours et des nuits seule à faire mes décomptes.

Je ne pourrais pas passer sous silence le soutien non négligeable de ma famille. Merci à mes parents Ismaïl Kahia et Samra Achour pour leur confiance en moi, leur support dans mes choix et leur amour infini. C’était pénible d’être séparé à des milliers de kilomètres, mais vous avez réussi à me pousser et à être présents quotidiennement. Merci à mes frères et mes sœurs : Leila, Manel, Ibtissem, Zied et Chaker Kahia pour leur support moral même en étant loin.

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Avant-propos

Le chapitre 2 de ce mémoire est présenté sous forme d’un article scientifique en français afin de faciliter la préparation d’une éventuelle publication. Cet article sera traduit ultérieurement en anglais et sera soumis à un journal scientifique. L’article s’intitule : Effet insecticide de deux souches de Bacillus (PTB180 et PTB185) utilisées seules ou en combinaison avec le champignon Beauveria bassiana contre deux pucerons ravageurs en serre (Aphis gossypii et

Aulacorthum solani). Il décrit les principaux résultats obtenus et l’ensemble des travaux

effectués dans le cadre de ce projet de maîtrise. La récolte des données, l’analyse et l’interprétation des résultats ainsi que la rédaction de l’ensemble des textes ont été réalisés par la candidate à la maîtrise.

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Introduction générale

Le Québec se classe en troisième position à l’échelle canadienne, derrière l’Ontario et la Colombie-Britannique, en termes des productions maraichères serricoles (Agriculture et Agroalimentaire Canada, 2016). Cette province détient 7% des superficies occupées par les serres et fournit 4% de volume de la production nationale des légumes de serre (MAPAQ, 2018).

La tomate et le concombre figurent parmi les cultures les plus produites en serre au Québec (Agriculture et Agroalimentaire Canada, 2016). En effet, la tomate demeure la principale culture légumière serricole au Québec avec 63 ha de superficie en 2015, ce qui constitue une hausse de 31% par rapport à 2007 (MAPAQ, 2016). En outre, la production québécoise de cette culture génère annuellement 54 M$ des ventes (Robitaille, 2016). La culture de concombre occupe 11 ha des superficies serricoles québécoises et engendre 5 M$ de revenues (MAPAQ, 2018). De plus la production de cette culture au Québec connait une augmentation durant ces dernières années, surtout avec l’arrivée d’une nouvelle entreprise spécialisé dans les concombres de serre (serres Toundra) (MAPAQ, 2018).

Malgré l’augmentation observée dans la production de ces cultures, elles sont, malheureusement, attaquées par plusieurs maladies et insectes ravageurs. Les pucerons sont considéré comme les insectes les plus nuisibles sur le plan agricole (Blackman & Eastop, 2007). En effet, en plus d’être polyphage, ces insectes piqueurs seceurs de sève sont les vecteurs les plus performants en termes de transmission des viroses (Carmo-Sousa et al., 2016). Pour les cultures en serre, le puceron du melon Aphis gossypii (Glover) (Hemiptera: Aphididae) et le puceron de la digitale Aulacorthum solani (Kaltenbach) (Hemiptera: Aphididae) sont parmi les aphides les plus dommageables (Jandricic et al., 2014). Le puceron du melon est considéré comme le ravageur majeur des Cucurbitacées. Il est capable de causer une réduction du taux de photosynthèse, de la biomasse et de la hauteur chez les plants de concombre (Boivin & Richard, 1994; Hu et al., 2017). Le puceron de la digitale a commencé ,récemment, à être considéré comme un ravageur redoutable des cultures sous serre au Canada (Jandricic, 2013).

(13)

La lutte chimique basée sur l’utilisation des insecticides de synthèse demeure la méthode la plus utilisée contre ces deux espèces d’aphides (Wang et al., 2002). Cependant, à la suite d’une utilisation excessive de ces produits, certains pucerons ont développé une résistance à la majorité de ces derniers. Le puceron de melon est le premier qui a été identifié comme résistant contre un insecticide (Blackman & Eastop, 2007). De plus, plusieurs études ont démontré la résistance de cet aphide à tous les groupes chimiques des pesticides (Matsuura & Nakamura, 2014; Nauen & Denholm, 2005). Pourtant, pour le puceron de la digitale aucun cas de résistance n’a été enregistré en Amérique du Nord (Jandricic, 2013). De plus, ces produits chimiques sont de haut risque pour toutes les composantes de l’environnement, d’où la nécessité de trouver d’autres moyens de lutte plus respectueuses de la nature.

La lutte biologique microbienne basée sur l’utilisation des microorganismes entomopathogènes est une méthode qui peut être efficace et sans risque sur l’environnement et sur la santé humaine. Parmi ces microorganismes figurent les champignons et les bactéries entomopathogènes qui sont d’ailleurs les plus utilisées pour lutter contre certains insectes (Mascarin & Jaronski, 2016). Par exemple le champignon cosmopolite Beauveria bassiana, grâce à la facilité de sa culture en laboratoire, est déjà commercialisé mondialement et a été déjà utilisé efficacement comme alternative aux pesticides chimiques contre plusieurs arthropodes (Shrestha et al., 2015; Wraight & Ramos, 2005). En deuxième exemple, les bactéries de genre Bacillus qui se caractérisent par une abondante production des métabolites secondaires. La bactérie Bacillus thuringiensis (Bt) est l’une des plus (Lacey et al., 2015). Plusieurs études ont démontré une synergie et un effet additif en combinant le Bt avec B.

bassiana ou Metarhizium robertsii (S. P. Wraight & Ramos, 2005, 2017; Yaroslavtseva et

al., 2017). Cependant, quelques cas de résistance de certains insectes à cette bactérie ont été récemment notés (Peralta & Palma, 2017). C’est pourquoi, les dernières études s’intéressaient à trouver d’autres espèces de Bacillus au pouvoir insecticide tels que Bacillus

pumilus et Bacillus subtilis.

L’objectif de cette étude était d’évaluer l’effet de B. Pumilus PTB180, B. subtilis PTB185 et

(14)

sur A. gossypii et A. solani, in vitro et in vivo. Ce projet de recherche avait aussi pour but de déterminer si ces microorganismes peuvent agir en synergie ou si un effet additif peut se produire entre eux. De plus, on visait à tester l’effet de la combinaison de ces trois microorganismes sur la survie de leurs conidies au cours du temps, après leur application sur les feuilles de tomate et de concombre.

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1. Importance de la serriculture au Québec

L’industrie des légumes de serre canadienne est en pleine expansion (Les producteurs en serre du Québec, 2016). En effet, en 2015, la superficie récoltée en légumes de serre au Canada a montré une hausse de 3%, par rapport à l’année précédente, avec une valeur de 14 millions de mètres carrés (Agriculture et Agroalimentaire Canada, 2016). Au Québec, en 2015, on dénombre 685 entreprises serricoles dans deux principaux secteurs, soit la production des fruits et légumes et la production des plantes ornementales (Les producteurs en serre du Québec, 2016). Cette province occupe la troisième position à l’échelle canadienne en termes des recettes monétaires serricoles avec une recette de 265 M$ dont 101 M$ proviennent de la production des légumes en serres. La serriculture maraîchère québécoise occupe 7% des superficies serricoles canadiennes avec 190 entreprises qui ont une production moyenne de 2 432 tonnes métriques en 2015 et qui sont réparties sur 100 ha (MAPAQ, 2016).

La tomate et le concombre sont parmi les principales cultures de légumes de serre au Québec. En effet, la tomate demeure la principale culture légumière serricole au Québec avec 63 ha de superficie (MAPAQ, 2016). En outre, selon les chiffres de 2014, la production québécoise de la tomate de serre arrive en troisième rang après celle de l’Ontario et de la Colombie britannique à raison d’une quantité de 18 032 tonnes qui représente 7% de la production canadienne et qui engendre des revenus de l’ordre de 54 M$ (Robitaille, 2016). Concernant l’exportation québécoise de tomates de serre, elle se fait en faibles quantités (680 tonnes en 2014) et vers une seule destination, les États-Unis. Malgré son importance, la culture de tomates en serre au Québec tend à diminuer durant ces dernières années. Ce recul peut être expliqué par les coûts élevés d’exploitation des serres, notamment les coûts de la main d’œuvre, du combustible et de l’électricité (Robitaille, 2016; SPSQ, 2007). D’un autre part, cette baisse de production s’explique aussi par la faillite d’une grosse entreprise spécialisée dans les tomates de serre (MAPAQ, 2018).

Au Canada, c’est encore l’Ontario la première productrice de concombres de serre, suivie par la Colombie-Britannique, l’Alberta et le Québec. La production de concombres représente 14% de la superficie occupée par les entreprises de légumes de serre québécoises (Groupe Agéco, 2011). En 2015, la production québécoise de concombres de serre a montré

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une hausse de 3,2% par rapport à celle de 2014 à raison d’une quantité de 1649 tonnes (ISQ et MAPAQ, 2016). Les revenus de concombres de serre au Québec sont en augmentation progressive, arrivant à une valeur de 5 M$ en 2015 (ISQ et MAPAQ, 2016).

Sur le plan phytosanitaire, les tomates et les concombres de serre peuvent être attaqués par plusieurs maladies et insectes ravageurs. En effet, les serres mal entretenues fournissent un environnement favorable aux ravageurs (Patterson, 2015).

2. Les principaux pucerons ravageurs en serre

Les pucerons (ou aphides) sont des hémiptères polyphages présents dans les pays du monde entier. Ces insectes se distinguent d’autres hémiptères par leur biologie complexe. En effet, les aphides présentent des cycles de vie variés relativement compliqués. D’ailleurs, selon la littérature, on distingue, en se basant sur leurs comportements, différents types des cycles accomplis par ces ravageurs. Par exemple, on parle d’un cycle de vie hétéroïque si les pucerons alternent d’hôtes et d’un cycle monoïque s’il est accompli sur le même hôte. De plus selon le type de reproduction subi par ces insectes on distingue un cycle holocyclique si l’aphide subit à la fois une reproduction sexuée et une reproduction parthénogénique et un cycle anholocyclique si l’aphide se reproduit exclusivement par parthénogenèse (Blackman & Eastop, 2007). Pour accomplir les différentes étapes de ces cycles de vie compliqués et pour s’échapper aux conditions de stress, ces pucerons présentent plusieurs morphes. En effet, les aphides ont la capacité de produire des morphes ailés pour migrer sur d’autres plantes hôtes lorsqu’il y a surpopulation, une diminution de la qualité nutritive des plantes hôtes, l’attaque des ennemis naturels ou des conditions climatiques défavorables (Blackman & Eastop, 2007). Ainsi, cette capacité de produire des ailes accentue l’importance des aphides comme ravageurs pour le secteur agricole.

Parmi les 4700 espèces de pucerons (Hémiptères : Aphididae) présents dans le monde, seulement 450 espèces ont été trouvées sur des plantes d’intérêt agricole, dont uniquement 100 espèces sont considérées comme des ravageurs d’importance économique (Blackman & Eastop, 2007). En effet, toutes les cultures à travers le monde sont attaquées par au moins une espèce de puceron (Blackman & Eastop, 2007). Les pucerons, insectes piqueurs suceurs, sont considérés comme les ravageurs les plus importants pour les cultures sous serres

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(Jandricic et al., 2014; Yano, 2006). Ils causent des grandes pertes de rendement des plantes cultivées avec une valeur annuelle mondiale estimée à des centaines de millions de dollars (Yu et al., 2014).

Les insectes piqueurs suceurs de sève sont des vecteurs de la majorité des virus pathogènes transmis aux plantes. Les aphides sont, de loin, les vecteurs les plus performants en termes de transmission de viroses, en comparaison avec les autres taxons d’arthropodes (Swenson, 1968). En effet, les pucerons sont les vecteurs de plus de 50% des maladies virales connues en agriculture à l’échelle mondiale (Carmo-Sousa et al., 2016). Les aphides causent des dégâts directs qui résultent de leur alimentation. Ces insectes ont été décrits par Blackman et Eastop (2007) comme « plus qu’une seringue de sève des plantes vivantes » car ils secrètent et injectent une salive toxique dans les tissus végétaux avant de sucer la sève. La ponction de la sève à partir du phloème engendre souvent des symptômes limités à une action toxique sur la plante hôte, se traduisant souvent par une déformation des feuilles et un rabougrissement des nouvelles pousses. Cependant, l’alimentation des aphides à partir du parenchyme cause des dégâts plus importants allant jusqu’à la formation des véritables galles (Blackman & Eastop, 2007). En plus de transmettre les viroses, les pucerons endommagent leurs plantes hôtes d’une autre manière indirecte, soit la production de miellat et de la fumagine (Bevacqua et al., 2016; Blackman & Eastop, 2007; Lange & Bronson, 1981). En effet, quand ils sont nombreux, les pucerons commencent à secréter le miellat d’une façon abondante. Cette substance constitue un milieu très favorable à la croissance des champignons tels que la fumagine (Cladosporium spp.) qui se présente sous forme de poudre noirâtre sur les feuilles et qui entrave la respiration et l’assimilation chlorophyllienne ou qui souille les parties consommables et les rend impropres à la commercialisation en réduisant d’une manière considérable leur valeur marchande (Blackman & Eastop, 2007; Lange & Bronson, 1981).

Selon Jandricic et al. (2014), le puceron vert du pêcher Myzus persicae (Sulzer), le puceron du melon Aphis gossypii (Glover) et le puceron de la digitale, Aulacorthum solani (Kaltenbach), sont les pucerons les plus importants et les plus problématiques en serre en raison des dégâts qu’ils causent. Seulement A. gossypii et A. solani furent testés dans le cadre de cette étude et conséquemment seules ces deux espèces seront décrites dans la suite du

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mémoire.

2.1 Le puceron de la digitale

Originaire de l’Europe, le puceron de la digitale, A. solani (Kaltenbach), est un hémiptère répandu dans le monde entier (Sato et al., 2014). Cet aphide a été récemment considéré comme un ravageur important de cultures sous serres dans le nord-est de l’Amérique, le Canada et le Royaume-Uni (Jandricic, 2013). Ce changement de statut pour ce puceron peut être dû à la réduction de pulvérisation des pesticides dans le cadre de lutte contre les autres organismes nuisibles suite à l’adoption des nouvelles pratiques de lutte antiparasitaire integrée (Sanchez et al., 2007). Il s’attaque à une large gamme de plantes hôtes (Sato et al., 2014), soit 95 différentes espèces appartenant à 25 familles (Blackman & Eastop, 2007; Jandricic et al., 2010). En effet, depuis les années soixante, il a été mentionné comme l’insecte ravageur le plus dommageable dans la culture de la pomme de terre (Wave et al., 1965). En outre, pendant les dernières années, il est passé d’un ravageur occasionnel à un ravageur de première importance pour une multitude de cultures en plein champ ou en serre, notamment la laitue (Jandricic, 2013), le poivron (Sanchez et al., 2007), le soya (Takada et al.2006) et la tomate (Jandricic, 2013). Cet aphide se distingue facilement des autres espèces d’aphides par ses critères morphologiques assez spécifiques, particulièrement, sa grande taille allant de 1,8 à 3 mm pour les femelles aptères et de 2 à 3 mm pour celles ailées, les articulations sombres sur les pattes et les antennes, les tubercules antennaires parallèles et son aspect brillant (Jandricic, 2013). Il a été démontré que ce puceron se développe plus rapidement à une température de 25°C en passant par ses quatre stades larvaires en sept jours (Jandricic et al., 2010). En effet, les populations d’A. solani doublent en deux jours seulement à cette température. Cependant, la fécondité moyenne la plus élevée, soit 74 larves par adulte, est stimulée par les températures les plus basses allant de 10 à 20°C (Jandricic et al., 2010). De plus, plusieurs cultures ornementales sont aussi attaquées par cet aphide. D’ailleurs, il constitue un problème préoccupant pour les producteurs, car il cause des dommages à l’apparence de ces cultures par la production excessive du miellat et le développement de la fumagine (Jandricic et al., 2010). Ce qui explique la faible tolérance de ces cultures à ce puceron par rapport à celle d’autres pucerons. En outre, A. solani secrète des toxines salivaires qui induisent un jaunissement et un enroulement des feuilles ainsi que des nécroses

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tissulaires localisées (Sanchez et al., 2007). Ce puceron est aussi capable de transmettre plus de 45 viroses à ses plantes hôtes (Wave et al., 1965), notamment, les virus de la mosaïque et les virus d’enroulement des feuilles (Jandricic, 2013).

2.2 Le puceron du melon

Le puceron du melon ou puceron du coton, A. gossypii (Glover), est un hémiptère originaire de l’Europe qui est largement répandu dans le monde, il se trouve dans toutes les régions tempérées, tropicales et subtropicales (Blackman & Eastop, 2007; Lu et al., 2015; Satar et al., 2005). C’est un aphide cosmopolite, polyphage qui s’attaque à 300 familles de plantes (Fuller et al., 1999; Rostami et al., 2012), notamment le cotonnier, le concombre, les agrumes et les plantes ornementales (Celini, 2001; Razmjou et al., 2006). Il est considéré comme le ravageur majeur des Cucurbitacées (Razmjou et al., 2006). Du point de vue morphologique, ce puceron est de forme globulaire et mesure 1 à 3 mm de longueur. La coloration des adultes varie du jaune pâle, à des faibles températures, au vert ou presque noir à des températures élevées. Les larves sont pâles. Il se caractérise par des cornicules courtes noires et par des taches sombres sur son abdomen (Boivin & Richard, 1994). C’est surtout à l’automne que ce puceron cause des dommages aux cultures de concombres en serre partout au Canada (Boivin & Richard, 1994). Sur les plants de concombres, les infestations commencent souvent sur les feuilles inférieures et se répandent ensuite sur la totalité de la plante. La dissémination d’A.

gossypii est assurée par les formes ailées qui commencent à apparaître quand les colonies

deviennent très denses ou qui proviennent d’autres plantes hôtes à l’extérieur de la serre, (Boivin & Richard, 1994). Ce puceron est adapté à des températures élevées (Parajulee, 2007). En effet, il a été démontré que sa période de développement varie entre 21 jours à 10°C et 4 jours à 30°C (Zamani et al., 2006). Sur les plants de concombre, les populations de cet aphide peuvent se multiplier de 10 à 12 fois en l’espace d’une semaine (Boivin & Richard, 1994). Dans toutes les zones chaudes du monde, A. gossypii se développe constamment par parthénogenèse (Blackman & Eastop, 2007). Cependant, il a été prouvé que dans les serres de concombre et de chrysanthème de l’Europe occidentale, A. gossypii peut produire des morphes sexuels (Margaritopoulos et al., 2006). Ce puceron possède des associations particulières d’hôtes, par exemple, il a été noté que les pucerons qui étaient sur chrysanthème ne colonisent pas le concombre de serre et vice versa (Blackman & Eastop, 2007; Guldemond

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et al., 1994).

En Amérique du Nord, il a été démontré également que ce puceron possède une phase sexuelle annuelle quand il utilise la rose de Sharon, Hibiscus syriacus L., et le catalpa,

Catalpa bignonioides Walter, comme des hôtes primaires (Blackman & Eastop, 2007;

Margaritopoulos et al., 2006). De plus, A. gossypii serait vecteur de plus de 80 maladies virales chez une large gamme des plantes (Hu et al., 2017; Kersting et al., 1999)dont les plus importants sont le virus de la mosaïque du concombre (CMV) et le virus de la mosaïque de la pastèque (WMV) (Boivin & Richard, 1994). D’autre part, une densité élevée d’A. gossypii peut induire une réduction de la taille et de la biomasse chez la plante hôte (Shannag et al., 1998). De plus, sur concombre, les densités d’A. gossypii peuvent atteindre 2000 pucerons par feuille, ce qui engendre l’affaiblissement et le flétrissement de ces feuilles (Boivin & Richard, 1994).

Afin de réguler les populations de ces pestes et réduire ainsi leurs dommages, plusieurs moyens de lutte ont été développés. De plus, la recherche des nouvelles mesures de contrôle ne cesse jamais d’avancer.

3. Moyens de lutte actuels contre les pucerons ravageurs en serre

Au Canada, comme partout dans le monde, la lutte chimique demeure la pratique dominante pour lutter contre les insectes ravageurs, notamment les pucerons. Selon Blackman et Eastop (2007), à la fin des années 80, les produits systémiques appartenant aux groupes d’organophosphorés et de carbamates ont été en prépondérance sur le marché des aphicides. Les associations d’environnement ont retiré la majorité de ces produits à cause de leur persistance et leur forte toxicité même à l’égard des insectes utiles. A partir de ce moment, les pyréthroïdes ont commencé à prendre la place et à apparaître comme des remplaçants, surtout, des organophosphorés. Cependant, l’absence d’une activité systémique et d’une sélectivité aux insectes ciblés a diminué l’utilisation de ces derniers. Pendant les dix dernières années, ce sont les néonicotinoïdes qui ont envahi le marché des insecticides. Ce nouveau groupe d’insecticides a prouvé une efficacité plus importante contre les ravageurs de par leur nouveau mode d’action, qui consiste à affecter le système nerveux de l’insecte ciblé en induisant sa paralyse et sa mort par la suite (Blackman & Eastop, 2007; Buchholz & Nauen,

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2002). L’imidaclopride est le néonicotinoïde le plus utilisé qui présente une excellente efficacité contre les pucerons et les thrips à travers le monde (Wang et al., 2002). Malgré leur efficacité bien prouvée, ces différents groupes d’insecticides chimiques génèrent de nombreux effets néfastes, aussi bien sur l’environnement que sur la santé humaine (Hayo & Van der Werf, 1997; Pisa et al., 2017; Lexmond et al., 2015; Van der Slujis et al., 2015). En effet, selon Multigner (2005), ces derniers représentent un danger puissant pour l’homme puisqu’ils causent plusieurs maladies notamment, la stérilité, les atteintes neurologiques et le cancer. En ce qui concerne leur effet sur l’environnement, c’est le défaut de ne pas être sélectifs vis-à-vis de leurs cibles qui est à l’origine de l’écotoxicité des insecticides (Hayo & Van der Werf, 1997; Pisa et al., 2017). En effet, de multiples études ont rapporté la nocivité de ces derniers sur la microflore et la microfaune du sol (Datta et al., 2016), sur les insectes pollinisateurs (Tasei, 1996), sur la faune aquatique (DeLorenzo et al., 2001) et sur les oiseaux (Environnement Canada, 2002). De plus, l’utilisation répétée et irrationnelle des insecticides chimiques a contribué au développement et à l’acquisition des résistances chez les insectes ravageurs et notamment les aphides (Kunz & Kemp, 1994; Rongai et al., 1998). Au moins 20 espèces de pucerons ont été identifiées résistantes aux insecticides (Rongai et al., 1998), dont les plus mentionnées sont M. persicae (Sulzer) (Foster et al., 2000; Nauen & Denholm, 2005) et A. gossypii (Glover) (Furk & Hines, 1993). De nombreuses études ont été menées sur ce sujet et ont démontré l’acquisition des résistances par A. gossypii (Glover) aux différents groupes d’insecticides (Herron et al., 2001), surtout sur coton et dans les serres de Cucurbitacées (Blackman & Eastop, 2007), soit aux carbamates (Furk et al., 1980), aux organophosphorés (Gubran et al., 1993), aux pyréthroïdes (Gubran et al., 1993; Wang et al., 2002) et même aux néonicotinoïdes (Nauen & Denholm, 2005; Wang et al., 2002; Pisa et al., 2017; Lexmond et al., 2015; Van der Slujis et al., 2015). Selon Rongai et al. (1998), le Pirimicarbe (un insecticide carbamate) n’a pas seulement perdu son efficacité contre A.

gossypii (Glover), mais il a provoqué aussi une émergence précoce de ses larves ainsi qu’une

augmentation de sa capacité reproductive de 30% par rapport à celle du témoin non traité.

D’après Jandricic (2013), à date, il n’y a aucune référence qui démontre la résistance du puceron de la digitale, A. solani aux insecticides chimiques en Amérique du Nord. Cependant, au Japon, Takada et al. (2006) ont réussi à identifier une moindre résistance à

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l’acéphate (un organophosphoré) chez un seul clone de A. solani parmi les huit clones testés dans leur étude et à l’inverse une susceptibilité de tous ces derniers au fenvalérate (un pyréthroïde).

En effet, plusieurs produits de ce genre ont démontré une bonne efficacité contre les aphides, à savoir, le Kontos (spirotétramate) et l’Endeavor (pymétrozine) qui ont réussi à maintenir nulles les populations d’A. solani quand ils ont été appliqués en serre sur culture de chrysanthème par la stimulation d’une inhibition neurale de l’alimentation chez cet aphide et en conséquence sa mortalité (Tremblay et al., 2017). Cependant, en dépit de cette efficacité ces produits ont démontré une toxicité elevée pour l’homme et les mammifères (Sages pesticides, 2019). Ainsi, malgré la bonne capacité des insecticides à contrôler les populations des pucerons, leur nocivité a poussé les producteurs à chercher d’autres méthodes de lutte plus efficaces et moins dangereuses.

La lutte culturale est également l’une des méthodes alternatives fréquemment appliquées contre les aphides. Elle se base sur l’adoption des pratiques culturales pour éviter l’entrée et la dispersion des ravageurs dans les champs et dans les serres. Parmi les exemples de moyens de lutte culturale contre les pucerons, on retrouve les suivantes: 1) le retrait des mauvaises herbes qui poussent dans les champs et qui sont des sources possibles de virus que les aphides peuvent transmettre aux cultures saines avoisinantes (Blackman & Eastop, 2007); 2) la création de barrières physiques via l’utilisation de cultures de couverture entre les rangées, l’installation de filets protecteurs ou la pose de paillis, comme les paillis de polyéthylène (Blackman & Eastop, 2007; Farias-Lario & Orozco-Santos; 1997); et 3) l’utilisation de cultures intercalaires qui présuppose qu’une hétérogénéité et une diversité des cultures sur une même parcelle favorisent la régulation naturelle des populations des ravageurs par le fait d’accentuer les populations d’ennemis naturels (Gontijo et al., 2017; Karungi et al., 2010).

De plus, la lutte par amélioration génétique se démarque comme étant un moyen efficace de contrôle des arthropodes ravageurs (Yu et al., 2012). En effet, selon Gatehouse et al. (2011), l’établissement et la commercialisation des plantes transgéniques résistantes aux insectes nuisibles ont commencé depuis plus de 20 ans. La plupart de ces plantes expriment des gènes

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provenant de la bactérie Bacillus thuringiensis (Bt) et codant pour les toxines à effet insecticide. Bien que ces plantes étaient résistantes aux Lépidoptères et Coléoptères, elles étaient sensibles aux Hémiptères, notamment les pucerons (Yu et al., 2014). Par conséquent, d’autres stratégies ont été développées pour combattre ces ravageurs. Selon Yu et al. (2014), jusqu’à présent, les gènes de résistance aux pucerons qui ont été transférés aux plantes ciblent principalement le système digestif de ces insectes. La majorité de ces gènes sont des gènes de lectine d’origine végétale. En effet, plus que quatre gènes de lectine végétale (exemples :

Galanthus nivalis agglutinin (GNA), Pinillia ternata agglutinin (PTA), Canavalia ensiformis

lectin (CEL), …etc), récemment conçus, ont démontré leur toxicité aux aphides à la suite de leur introduction dans plusieurs cultures transgéniques (Yu et al., 2012). Cependant, des effets, non désirés, de ces gènes ont été également observés sur le comportement des populations d’ennemis naturels qui peuvent servir comme des agents potentiels de lutte biologique contre les pucerons (Han et al., 2016; Yu et al., 2012).

La séléction variétale basée sur la séléction des plantes hôtes qui possédent certains critéres de résistance est aussi une méthode qui contribue à la gestion des insectes nuisibles dont les pucerons (Boissot et al., 2016; Bi & Toscano, 2006). Cette résistance peut être codée par un ou plusieurs gènes qui peuvent être dominants ou récessifs. Ainsi, cette résistance est considérée comme un trait hériditaire qui est transmissible par des croisements entre des plantes des différents phénotypes ou par la séléction et le transfert des gènes qui codent cette résistance à d’autres plantes hôtes (Biossot et al., 2016). Parmi les gènes de résistance, les plus connus contre les aphides est le gène Vat identifié chez le melon (Cucumis melo) (Boissot et al., 2016; Bi & Toscano, 2006). Ce gène confère à ces plantes une résistance spécifique contre A. gosypii en affectant son potentiel biotique et sa reproduction. En effet, ce gène agit principalement sur l’alimentation de A. gossypii en bloquant les voies d’accès de leurs stylets vers le mésophylle et le phloème (Biossot et al., 2016). De plus, ce gène est le seul qui confère également une résistance des plants de melon aux virus transmis par ce puceron (Schoeny et al., 2017).

La lutte biologique est définie comme étant « l’utilisation d’organismes vivants pour limiter la pullulation et/ou la nocivité des divers ennemis des cultures » (Jourdheuil & Fraval, 1991).

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Ces organismes peuvent être des parasitoïdes, des insectes prédateurs ou des pathogènes comme les virus, les champignons ou les bactéries (Jourdheuil & Fraval, 1991). Trois approches bien distinctes peuvent être appliquées pour cette méthode de lutte : classique, par augmentation et par conservation (Lambert, 2010). L’approche classique vise l’introduction d’un agent entomopathogène exotique dans un nouvel écosystème où survit un ravageur exotique dans le but de supprimer les populations de ce dernier (Cloutier et Cloutier, 1992). La lutte biologique par augmentation consiste à contrôler un ravageur indigène en faisant des lâchers de son ou ses ennemis naturels qui existent naturellement dans le système, mais en faible occurrence ou pas dans le moment optimal qui coïncide avec le pic d'abondance de ce ravageur (Lambert, 2010). La stratégie de conservation vise à conserver les ennemis naturels déjà existants dans le paysage et à améliorer leur occurrence au moyen de gestion de l’habitat et de changement des pratiques culturales (Cloutier et Cloutier; 1992).

Les pucerons sont attaqués par divers groupes d’ennemis naturels dont plusieurs espèces sont même commercialisées et utilisées dans les programmes de lutte contre ces ravageurs, surtout pour les cultures sous serres (Byeon et al., 2011). En effet, comme l’a mentionné Yano (2006), huit parasitoïdes, 15 prédateurs et plusieurs champignons entomopathogènes ont été utilisés contre les aphides en serres. Par ailleurs, selon Boivin et al. (2011), les parasitoïdes sont les ennemis les plus utilisés à cause de leur aptitude à s’attaquer uniquement à certaines espèces de pucerons. Prenons l’exemple de l’hyménoptère, Aphidius colemani Viereck, le parasitoïde le plus connu et le plus employé à l’échelle du monde, qui a réussi à parasiter M.

persicae et A. gossypii (Glover) sur plusieurs cultures en serre en Corée. Cependant, il n’a

pas parasité Macrosiphum euphorbiae Thomas et A. solani (Kaltenbach) sous les mêmes conditions (Byeon et al., 2011). Par opposition aux parasitoïdes, les prédateurs utilisés contre les pucerons sont souvent généralistes. Ils s’attaquent à une multitude d’organismes, ravageurs ou parfois utiles (Byeon et al., 2011). Plusieurs études suggèrent que de nombreuses espèces de coccinelles sont potentiellement efficaces contre les populations d’aphides en serres (Riddick, 2017).

Malgré la réussite de ces auxiliaires (prédateurs et parasitoïdes) à contrôler les pucerons, leur utilisation est limitée par la difficulté et le coût élevé de leur élevage (Lambert, 2010). En

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effet, ces derniers nécessitent un apport en proies vivantes et en plantes hôtes d’une façon constante pour maintenir leurs colonies dans la production de masse commerciale (Riddick, 2017). De plus, dans le cas d’introduction d’auxiliaires exotiques, des problèmes d’acclimatation peuvent apparaître et ainsi l’exigence de demande des permis pour l’importation, l’introduction et l’utilisation des toutes les nouvelles espèces au Canada (Malausa, 2000). Cela rend leur utilisation de plus en plus compliquée (Malausa, 2000). Ainsi, il est nécessaire de poursuivre la recherche pour trouver d’autres moyens de lutte plus efficaces et qui peuvent être moins coûteux comme la lutte biologique microbienne.

4. Approche de lutte biologique microbienne

La lutte biologique microbienne a été définie par Wraight et al. (2016) comme étant l’utilisation des microorganismes vivants, capables de causer des maladies aux organismes pathogènes des cultures, comme des agents de lutte contre ces derniers. En ce qui concerne les insectes ravageurs, de nombreux agents microbiens ont été démontrés comme des moyens entomopathogènes efficaces, notamment les bactéries, les champignons et les virus (Lacey & Shapiro-Ilan, 2008; Mazid et al., 2011). En effet, il y a 150 ans, l’idée d’utilisation de ces derniers a été établie (Ravensberg, 2011). Depuis, il y a plus de 50 microorganismes entomopathogènes qui sont actuellement commercialisés pour être employés surtout dans la lutte biologique augmentative (Lacey et al., 2015). Toutefois, malgré l’important intérêt donné à la production des pesticides microbiens, ils ne représentent que 1 à 2% de tous les pesticides disponibles sur le marché (Lacey et al., 2015). Enfin, les revenus annuels des ventes de ces pesticides représentent seulement le 2,5% de la valeur des ventes des pesticides chimiques avec un montant de 750 millions de dollars en 2008 (Ravensberg, 2011).

C’est en France, en 1938 que le premier bioinsecticide a été produit et commercialisé sous le nom commercial “Sporeine“. Il était élaboré avec des spores de la bactérie B. thuringiensis (Ravensberg, 2011). Cette bactérie est la plus utilisée en lutte biologique microbienne (Bravo et al., 2011; Lacey & Goettel, 1995; Mazid et al., 2011; Tanada, 1959). En outre, en raison de leurs larges gammes d’hôtes (Lépidoptères, Diptères, Coléoptères et acariens), les produits formés des sous espèces de B. thuringiensis représentent 98% des pesticides microbiens bactériens (Lacey et al., 2015). L’utilisation de cette bactérie offre de multiples avantages :

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B. thuringiensis agit d’une façon rapide comparable à celle des insecticides chimiques envers

ses hôtes, se conserve pour une longue durée, possède un processus de formulation, de production et d’application facile et économique et finalement ne constitue pas un risque pour l’environnement (Lacey et al., 2015).

Plusieurs virus sont également disponibles comme agents de lutte biologique microbienne surtout contre les Lépidoptères (Lasa et al., 2007; Wraight et al., 2016b). L’étroite gamme d’hôtes et la résistance extrême aux radiations solaires de ces virus, surtout des baculovirus, favorisent leur utilisation en synergie avec d’autres agents de lutte sensibles à ces radiations, notamment avec B. thuringiensis, pour les protéger et améliorer leur persistance sur les cultures (Wraight et al., 2016b). Pourtant, ces virus pathogènes d’insectes n’ont joué qu’un rôle mineur dans la gestion des ravageurs des cultures en serre puisque seule une minorité de ces ravageurs représentent des cibles potentielles pour ces virus entomopathogènes (Wraight et al., 2016b).

L’utilisation des champignons entomopathogènes comme agents de lutte biologique génère un engouement mondial. En 1994, Feng et al. ont prévu un avancement significatif dans l’industrialisation et la production de ces champignons. Actuellement, avec les nouvelles innovations biotechnologiques, on compte plus de 170 bioinsecticides à base de champignons entomopathogènes destinés à la gestion d’au moins cinq ordres d’insectes et d’acariens ravageurs (Chandler et al., 2011; Wraight et al., 2016b).

Les nématodes, appartenant à la microfaune du sol, agissent en symbiose avec des bactéries pour réussir leur activité insecticide (Wraight et al., 2016b). La majorité des nématodes entomopathogènes appartiennent principalement aux deux familles Steinernematidae et Heterorhabditidae (Lacey et al., 2015; Lacey & Shapiro-Ilan, 2008). Ces derniers sont facilement reproductibles in vitro et in vivo et sont ainsi commercialisables et déjà disponibles sur le marché depuis plus que 25 ans (Lacey et al., 2015). De plus, le nombre d’insectes cibles de ces agents continue à augmenter, et une tendance vers les insectes du sol a été remarquée (Lacey et al., 2015). En effet, ces nématodes ont démontrés récemment être des suppresseurs de multiples insectes foreurs des racines ainsi que des larves d’autres

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insectes passant une période de leur vie dans le sol (Lacey et al., 2015). D’autre part, plusieurs avancements notables sur l’écologie et la biologie de ces nématodes, dans les techniques de leur production et leur application ainsi que dans leurs interactions avec leurs cibles ont été faits. Cependant, des recherches supplémentaires sont exigées pour améliorer l’implication de ces agents dans la lutte biologique.

Au Canada, la recherche et le développement des biopesticides ainsi que leur législation et leur réglementation sont avancés et visent à offrir des produits à faible risque pour la santé humaine et assurant la durabilité agricole et environnementale (Kabaluk et al., 2010). En effet, en 2010, 32 biopesticides microbiens ont été enregistrés au Canada en comparaison avec seulement 13 produits en 2004 (Kabaluk et al., 2010). Les prévisions indiquent que le nombre de ces produits est supposé augmenter dans le futur, suite aux programmes gouvernementaux ayant pour but d’aider les entreprises qui n'arrivent pas à pénétrer le marché canadien. En 2010, 38 entreprises privées canadiennes ont été classifiées comme productrices et/ou distributrices de biopesticides microbiens (Kabaluk et al., 2010). Cependant, les revenus des ventes des biopesticides microbiens canadiens ne représentent que 0,5% de celles des ventes des pesticides.

5. Les champignons entomopathogènes

« Les champignons entomopathogènes sont des eucaryotes avec des noyaux, des organites bien définis et une paroi cellulaire chitineuse » (Sabbahi, 2008). Ils se présentent souvent sous forme d’hyphes et rarement sous forme de cellules individuelles (Sabbahi, 2008). Ces champignons n’occupent pas une position systématique bien définie. Ils sont répartis dans tous les groupes, allant de Phycomycètes aux champignons imparfaits (Ascomycètes et Basidiomycètes ; Ferron, 1978). Cette caractéristique d’appartenance à différents groupes systématiques donne aux champignons entomopathogènes une capacité de se développer sous différentes conditions écologiques et une variabilité dans leurs modes de reproduction (Ferron, 1978). En effet, selon Hajek et Leger (1994), ces champignons sont associés avec des insectes vivants dans divers habitats, y compris la surface du sol et l’eau. Les deux groupes le plus importants sont les Deutéromycètes et les Phycomycètes (Ferron, 1978). La plupart des champignons entomopathogènes qui contribuent à la régulation des pucerons

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appartiennent à l’ordre des Entomophthorales (Blackman & Eastop, 2007). En effet, les vrais champignons sont les plus importants ennemis naturels microbiens des pucerons au champ (Blackman & Eastop, 2007; Meyling & Eilenberg, 2007).

Chez les 500 espèces d’Hyphomycètes, les genres Beauveria, Metarhizium, et Verticillium sont les plus utilisés pour la lutte biologique (Sabbahi, 2008). Une identification correcte de ces genres est impossible sans des détails sur leurs conidiogenèse (Ferron, 1978; Sabbahi, 2008; Samson et al., 1988). La forme et la couleur des spores constituent les premiers indices utilisés pour la taxonomie des champignons (Samson et al., 1988).

Contrairement aux autres microorganismes entomopathogènes tels que les virus et les bactéries, la majorité des champignons entomopathogènes sont capables de pénétrer à travers la cuticule externe de leurs hôtes et d’exploiter leurs ressources sans avoir à être ingérés par ces derniers (Blackman & Eastop, 2007; Ferron, 1978; Hall & Papierok, 1982; Samson et al., 1988). C’est ce qui en fait de très bons candidats dans la lutte biologique contre les pucerons puisqu’ils ont une activité ectopique contrairement aux autres méthodes qui nécessitent une expression ou présence dans le phloème pour être ingérés. De plus, l’ingestion d’un agent de lutte biologique n’est pas évidente puisque les pucerons sont des insectes piqueurs-suceurs. En outre, ces champignons sont capables de produire des épizooties chez les populations de leurs insectes cibles (Jandricic et al., 2014). Ces épizooties réduisent les densités des ravageurs à des niveaux acceptables qui ne nuisent pas aux cultures et garantissent ainsi le potentiel de ces microorganismes à être utilisé comme des agents de lutte efficaces (Lacey & Shapiro-Ilan, 2008).

Les biopesticides fabriqués à base de champignons entomopathogènes et destinés à la lutte biologique contre les insectes ravageurs, ont récemment remplacé les produits chimiques de lutte d’une façon remarquable (Ishii et al., 2015; Mondal et al., 2016; Strasser et al., 2000). En effet, il y a 10 ans, 171 mycoinsecticides et mycoacaricides étaient disponibles sur le marché, dont 52 (environ 30%) destinés à la lutte contre les insectes les plus problématiques en serre, particulièrement les pucerons, les thrips et les aleurodes (Faria & Wraight, 2007). Cependant, présentement seulement 28 mycoinsecticides sont disponibles et les 24 autres produits ne sont plus disponibles ou sont utilisés pour la gestion de ces insectes dans les

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cultures en champs (Wraight et al., 2016a).

Certains champignons entomopathogènes utilisés contre les pucerons sont quasiment impossibles à cultiver in vitro et donc sont extrêmement difficiles à produire en grandes quantités (Blackman & Eastop, 2007). De plus, la lente vitesse d’induction de mortalité, soit de trois à sept jours (Mondal et al., 2016), représente l’obstacle majeur qui limite l’emploi de ces champignons comme bioinsecticides (Ishii et al., 2015; Ortiz-Urquiza et al., 2010).

6. Le champignon entomopathogène Beauveria bassiana

Le champignon Beauveria bassiana est un hyphomycète naturellement présent dans les sols du monde entier (Sabbahi, 2008). C’est l’espèce avec la plus grande distribution géographique au sein du genre Beauveria (Zimmermann, 2007). Il est cosmopolite, ubiquitaire et saprophyte (Ishii et al., 2015; Ortiz-Urquiza et al., 2010; Sabbahi, 2008). Ce champignon est généraliste (Shimazu, 2004) et s’attaque à un large éventail d’insectes ravageurs (Gupta et al., 1999; Saranraj & Jayaparakash, 2017), soit 707 espèces dispersées dans 15 ordres, 149 familles et 521 genres (Zimmermann, 2007), et il a souvent été retrouvé sur des insectes infectés dans les zones tempérées et tropicales (Zimmermann, 2007). Malgré l’identification de Cordyceps bassiana comme le téléomorphe potentiel de B. bassiana (Li et al., 2001), ce mycète est souvent décrit comme mitosporique (Ortiz-Urquiza et al., 2010) qui se multiplie par reproduction asexuée (Sabbahi, 2008; Ziani, 2008) en produisant des spores de coloration blanchâtre à jaunâtre (Saranraj & Jayaparakash, 2017). Ces dernières sont portées par des conidiophores « à base renflée et à extrémité en zigzag » (Ziani, 2008). Les hyphes de cette espèce sont septaux, transparents et de diamètre de 1,5 à 3 µm (Saranraj & Jayaparakash, 2017). Selon les conditions d’aérobie et d’anaérobie, le champignon produit deux types de spores. En effet, en aérobie, il produit des conidies sphériques ou ovales de 1 à 4 µm de diamètre, tandis qu’en anaérobie, B. bassiana produit des blastospores de forme ovale et de diamètre de 2 à 3 µm. Les conidies sont autant infectieuses que les blastospores. (Sabbahi, 2008; Ziani, 2008).

De multiples facteurs biotiques et abiotiques conditionnent le déclenchement du processus d’infection de B. bassiana et la germination des conidies. En effet, une température allant de

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8 à 35°C est favorable pour la germination de ces derniers avec un optimum variant entre 25 et 30°C (Saranraj & Jayaparakash, 2017). Ce champignon est également psychrophile. En effet, au Canada, il a été isolé fréquemment à partir des sols incubés à des températures variant de 8 et 15°C (Bidochka et al., 1998). Selon Lord (2011), une humidité relative ambiante est suffisante pour induire l’infection. Cependant, in vitro, une humidité relative supérieure à 90% est exigée pour la germination (Saranraj & Jayaparakash, 2017).

Comme la majorité des champignons entomopathogènes, le mycète B. bassiana induit des épizooties aux champs, où les spores et les hyphes produits sur les cadavres des insectes infectés se détachent et se dispersent pour infecter, naturellement, le reste de la population d’insectes (Feng, Poprawski, & Khachatourians, 1994). Cependant, contre les pucerons, ce champignon n’a que rarement, ou n'a même jamais, causé des épizooties et ainsi il n’est pas considéré comme un ennemi naturel contre ces ravageurs sous conditions de champ (Blackman & Eastop, 2007). Selon Milner (1997), bien que les pucerons soient les insectes les plus susceptibles aux épizooties causées par les champignons entomopathogènes entomophtorales, ils sont rarement attaqués par l’hyphomycète B. bassiana sous les conditions naturelles. En effet, le processus de sporulation et d’infection de ce champignon nécessite plusieurs jours d’humidité élevée, ce qui est non favorable pour la dispersion et la transmission des spores infectieux. En outre, pour que l’infection puisse se produire, un contact entre les pucerons et les conidies doit se faire, ce qui est un peu difficile à cause de la mobilité réduite des pucerons (Milner, 1997).

Il a été démontré que B. bassiana est un champignon endophyte (Rondot & Reineke, 2018; Sánchez-Rodríguez et al., 2018; Saranraj & Jayaparakash, 2017). Une colonisation endophyte transitoire des feuilles par ce mycète suite à une pulvérisation foliaire augmente son pouvoir insecticide (Jaber & Ownley, 2017). Par exemple, il a été prouvé que le tube germinatif de ce mycète pénètre à la surface des feuilles de maïs (Zea mays) et atteint le xylème pour offrir une protection contre la pyrale du maïs (Saranraj & Jayaparakash, 2017). Il a été démontré que B. bassiana pénètre dans les feuilles de vigne, y survit et réduit les infestations de la cicadelle verte de la vigne (Empoasca vitis) pour une durée de cinq semaines suivant son application (Rondot et Reineke, 2018). De plus, une colonisation

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endophyte des plantes de coton par B. bassiana a impliqué une perturbation de la reproduction d’A. gossypii (Mascarin & Jaronski, 2016). La pénétration de B. bassiana à l’intérieur de la plante peut être aussi induite par injection et par aspersion (Azevedo et al., 2000).

La plupart des champignons entomopathogènes sont facilement productibles en masse et peuvent être mis en suspension avec des milieux aqueux et pulvérisés, c’est pourquoi ils sont commercialisables comme des agents de lutte microbienne contre les insectes (Blackman & Eastop, 2007). Au laboratoire, le mycète B. bassiana peut être facilement cultivé sur des milieux de culture simples (Saranraj & Jayaparakash, 2017). En outre, il peut être produit en masse par plusieurs techniques dont la plus simple est la fermentation diphasique liquide-solide (Feng et al., 1994; Mascarin & Jaronski, 2016; Milner, 1997; Saranraj & Jayaparakash, 2017). La fermentation solide engendre les conidies aériennes sèches et la fermentation liquide génère les blastospores (Feng et al., 1994; Mascarin & Jaronski, 2016; Milner, 1997). Selon l’insecte ciblé, les conidies peuvent être utilisées directement sous forme de granules ou être tamisées et formulées en poudre mouillable ou en huile concentrée (Feng et al., 1994; Mascarin & Jaronski, 2016; Saranraj & Jayaparakash, 2017). Selon Wraight et al. (2016a), le type de formulation affecte l’efficacité de B. bassiana. En effet, ils ont démontré que sa formulation en huile émulsifiable était plus efficace contre le puceron du coton que sa formulation en poudre mouillable. Ils ont expliqué cette amélioration d’efficacité par les fortes attractions qui se produisent entre les formulations d’huiles, les conidies fongiques et la cuticule des insectes. En effet, ils ont suggéré que les huiles se propagent rapidement sur les surfaces hydrophobes de la cuticule en transportant des conidies à des zones protégées sur le corps de l’insecte où les conditions d’humidité peuvent être favorables à l’infection et la germination. De plus, Wraight et al. (2016a) ont proposé que la formulation en huile émulsifiable favorise une plus forte rétention d’inoculum fongique sur les plantes et les insectes.

L’identification de B. bassiana comme agent de lutte biologique contre les insectes remonte à l’année 1835 (Ishii et al., 2015; Khan et al., 2016; Zimmermann, 2007). Les mycoinsecticides produits à la base de B. bassiana sont les plus répandues à l’échelle

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commerciale (33,9%), suivie par ceux à base de Metarhizium anisopliae (33,9%), Isaria

fumosorosea (5,8%) et Beauveria brongniartii (4,1%) (Faria & Wraight, 2007).

À la suite de nombreux tests de sécurité, l’agence américaine de protection de l’environnement des États-Unis (USEPA) considère que les produits à base de B. bassiana sont des produits naturels (Saranraj & Jayaparakash, 2017). En effet, ce champignon a été démontré sans danger pour l’environnement, la santé humaine, les mammifères, les oiseaux et les plantes (Saranraj & Jayaparakash, 2017). De plus, plusieurs expériences ont montré que malgré sa large gamme d’hôtes, ce mycète possède un impact minimal sur les organismes non ciblés (Zimmermann, 2007). Cependant, James et al. (2012) ont démontré que l’abeille domestique Apis millifera est susceptible à trois souches de B. bassiana en conditions de laboratoire.

6.1 Mode d’action

Les champignons affectent les insectes susceptibles par une pénétration directe à travers leurs cuticules (Butt et al., 2016; Sabbahi, 2008; Vega et al., 2009). À la suite de la réussite du contact avec la cuticule, l’unité infectieuse du champignon, la spore, germe et exerce des pressions enzymatiques et mécaniques pour pénétrer via les téguments (Mondal et al., 2016). Le champignon colonise ensuite l’hémocèle et les organes internes de l’insecte et induit sa mort pour pouvoir sporuler ainsi à l’extérieur de l’insecte (Ferron, 1978; Sabbahi, 2008). Le contact et l’attachement des spores à la cuticule sont les étapes prérequises pour la pathogenèse (Samson et al., 1988). Le processus d’infection de B. bassiana s’accomplit en quatre étapes différentes : l’attachement, la germination, la pénétration et la dissémination.

Phase d’adhésion : cette phase dépend de plusieurs facteurs, notamment, les conditions

climatiques, la quantité d’inoculum fongique et la densité des insectes hôtes (Samson et al., 1988). En effet, ce champignon est beaucoup plus efficace si la densité des insectes visés est très élevée (Sabbahi, 2008). L’adhésion est provoquée par le contact souvent passif des spores avec le tégument de l’insecte à l’aide d’agents abiotiques comme l’eau et le vent (Samson et al., 1988 ; Butt et al., 2016; Hajek & Leger, 1994; Sabbahi, 2008). Généralement, l’infection est initiée à travers le tégument de l’insecte hôte (Samson et al., 1988) ; mais les

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