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Le soutien social et le trouble de stress post-traumatique chez les anciens combattants canadiens

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Academic year: 2021

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Le soutien social et le trouble de stress post-traumatique chez les anciens combattants canadiens

Mémoire doctoral

Marie-Ève Santerre

Doctorat en psychologie Docteur en psychologie (D.Psy.)

Québec, Canada © Marie-Ève Santerre, 2017

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Le soutien social et le trouble de stress post-traumatique chez les anciens combattants canadiens

Mémoire doctoral

Marie-Ève Santerre

Sous la direction de :

Geneviève Belleville, directrice de recherche Vicky Lavoie, codirectrice de recherche

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ÉSUMÉ DU MÉMOIRE

Au cours des dernières années, les membres des Forces Armées Canadiennes (FAC) ont participé à des missions dangereuses, de longues durées avec de courtes périodes de récupération, ce qui constitue un terrain fertile pour le développement d’un Trouble de Stress Post-Traumatique (TSPT). Bien que ce trouble entraine des répercussions néfastes sur les relations interpersonnelles, il n’existe pas, à ce jour, de consensus quant à la direction de la relation entre la sévérité de la symptomatologie du TSPT et les comportements de soutien positifs ainsi que négatifs, particulièrement chez les Anciens Combattants Canadiens (ACC). Pour y pallier, une étude empirique longitudinale, avec deux temps de mesure, ayant pour objectif d’évaluer la bidirectionnalité de la relation entre la sévérité des symptômes du TSPT et le soutien social a été réalisée auprès de 64 ACC présentant un diagnostic probable de TSPT chronique. Sur le plan transversal, des symptômes sévères du TSPT sont significativement associés à la perception de la fréquence élevée des interactions sociales négatives reçues. Sur le plan longitudinal, les hypothèses ont été infirmées. Bien qu’il existe une corrélation positive entre les interactions sociales négatives et la sévérité des symptômes du TSPT, les comportements de soutien (positifs et négatifs) ne permettent pas de prédire la sévérité des symptômes de ce trouble trois mois plus tard, ces derniers étant mieux expliqués par la sévérité des symptômes au temps 1. De plus, la sévérité des symptômes du TSPT ne permet pas de prédire les comportements de soutien (positifs et négatifs) trois mois plus tard, ceux-ci étant mieux expliqués par les comportements de soutien au temps 1. La cristallisation probable des symptômes du TSPT et des comportements de soutien dans les deux premières années suivant la survenue du trouble, documentée dans les écrits scientifiques de même que la modification possible du sens de la relation à travers le temps peuvent expliquer l’absence d’une relation bidirectionnelle dans cet échantillon.

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Résumé du mémoire ... III Table des matières ... IV Liste des tableaux ... VI Remerciements ... VII

CHAPITRE I ... 1

INTRODUCTION GÉNÉRALE ... 1

1 Contexte politico-militaire ... 1

2 Description du TSPT et des difficultés concomitantes ... 2

2.1 Prévalence ... 4

2.2 Comorbidité ... 6

2.3 Impact sur le fonctionnement ... 7

3 Description du soutien social ... 8

3.1 Distinction entre le soutien social perçu et le soutien social reçu ... 9

3.2 Effet du soutien social sur le TSPT ... 10

3.3 Mécanismes d’action des effets du soutien social sur le TSPT ... 11

3.4 Interactions sociales négatives ... 13

4 Effets de la symptomatologie du TSPT sur le soutien social ... 15

4.1 Mécanismes d’action du TSPT sur le soutien social ... 16

5 Bidirectionnalité de la relation entre le soutien social et le TSPT ... 18

6 Limites des connaissances actuelles ... 21

7 Objectif du mémoire doctoral ... 21

8 Structure du mémoire doctoral ... 22

CHAPITRE II ... 23 ARTICLE EMPIRIQUE ... 23 Résumé ... 25 Introduction ... 26 Méthode ... 31 Résultats ... 35 Discussion ... 40 Références ... 47 CHAPITRE III ... 57 CONCLUSION GÉNÉRALE ... 57

3.1 Résumé sommaire des principaux résultats de l’article empirique ... 58

3.2 Contributions théoriques et cliniques ... 61

3.3 Limites et avenues possibles de recherche dans le futur ... 65

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APPENDICE A ... 80

QUESTIONNAIRE SUR LES SYMPTÔMES POST-TRAUMATIQUES ... 80

« PTSD SYMPTOMS CHECKLIST – VERSION MILITAIRE » ... 80

APPENDICE B ... 84

ÉCHELLE DE SOUTIEN PERÇU – VERSIONS 1 ET 2 ... 84

APPENDICE C ... 89

INVENTAIRE DE DÉPRESSION DE BECK ... 89

APPENDICE D ... 93

QUESTIONNAIRE SUR LA CONSOMMATION D’ALCOOL ... 93

« ALCOHOL USE DISORDER IDENTIFICATION TEST » ... 93

APPENDICE E ... 97

QUESTIONNAIRE SUR LA CONSOMMATION DE DROGUES ... 97

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ISTE DES TABLEAUX CHAPITRE II ARTICLE EMPIRIQUE Tableau 1 ... 52 Données socio-démographiques ... 52 Tableau 2 ... 53

Données cliniques des participants aux temps 1 et 2 ... 53

Tableau 3 ... 54

Corrélations de Pearson entre les variables d’intérêt et les variables possiblement confondantes ... 54

Tableau 4 ... 55

Prédiction de la sévérité des symptômes du TSPT au T2 avec pour variables prédictives les comportements de soutien au T1 ... 55

Tableau 5 ... 56

Prédiction des comportements de soutien au T2 avec pour variable prédictive la sévérité du TSPT au T1 ... 56

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EMERCIEMENTS

La réalisation de ce mémoire doctoral a été possible grâce au soutien de plusieurs personnes importantes pour moi auxquelles je souhaite témoigner toute ma reconnaissance. Tout d'abord, je désire saluer la bravoure de tous les anciens combattants qui ont accepté de partager leurs souvenirs d'évènements douloureux et leurs conséquences sur leur vie actuelle afin de participer à cette étude. Votre ouverture et votre désir d'aider d'autres frères d'armes aux prises avec des blessures de stress opérationnel m'a profondément touchée et motivée à concrétiser ce projet de recherche. Merci également aux gestionnaires et à mes précieux collègues de la clinique TSO, particulièrement Robert, Maxime, Martine et Amélie pour leur aide considérable dans le recrutement.

Je tiens à remercier ma directrice de recherche, Geneviève Belleville pour ta grande confiance en mes capacités à mener à terme ce projet d'envergure. Tous tes précieux conseils et ton sens de la rigueur scientifique m'ont permis d'effectuer un travail de qualité. Merci aussi à Vicky Lavoie, ma codirectrice, pour ta grande disponibilité, pour toutes tes connaissances cliniques et scientifiques sur le monde militaire que tu m'as partagées au cours des dernières années. Ton écoute attentive et tes encouragements ont fait toute la différence à plusieurs moments plus sombres de mon parcours doctoral. J'aimerais également remercier Tamarha Pierce, membre de mon comité d'encadrement, pour ses commentaires constructifs et ses réflexions par rapport à l'avancement de ce mémoire.

Je remercie aussi mes collègues du laboratoire d'Étude de l'Anxiété pour votre soutien et surtout, nos fous rires en pause de rédaction. Un merci très spécial à Pascale, avec qui j'ai eu beaucoup de plaisir à collaborer personnellement pour la cueillette de données. Je souhaite également remercier ma très chère Manon et Andréanne, les bénévoles du laboratoire, pour votre aide dans le recrutement et la saisie des informations recueillies. Vous avez certainement allégé de quelques semaines la réalisation de ce travail.

Merci aussi mes merveilleuses amies dont j'ai eu la chance de faire la connaissance au cours de ce doctorat, Alexandra, Anne-Sophie et Maude. Vous m'avez permis de tenir le coup dans cette grande aventure en créant des moments cocasses, en partageant de si

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nombreux rires, en normalisant mes humeurs et mes tonnes d'inquiétudes. Je tiens aussi à remercier mes amies d'enfance, Marie-Pierre, Virgine, Marie-Claude, Olivia et Arianne pour vos encouragements et tous ses repas partagés. Un merci bien spécial à Mylène et Dominique pour votre appui moral et votre présence dans ma vie.

L'aboutissement de ce parcours doctoral n'aurait pas été possible sans le soutien inconditionnel et la présence du début à la fin de mes parents, ma sœur, Mélissa et mon fils par alliance, Yvérick. Vous avez toujours cru en mes capacités même quand moi-même j'en doutais et vous m'avez encouragé à me dépasser. Maman, je ne peux pas passer sous le silence ta contribution exceptionnelle et si précieuse pour moi dans cette aventure. Merci d'être toujours disponible pour écouter mes états d'âme, pour trouver des solutions à toutes mes mésaventures et pour ton immense générosité à mon égard. Je t'en suis extrêmement reconnaissante. Un merci aussi spécial à Lise, ma marraine d'amour, qui nous a quittée beaucoup trop tôt et qui me manque énormément, pour ton aide significative dans l'accomplissement de ce projet.

Je tiens également à remercier tendrement mon mari, Karl. Tu as su être mon pilier dans cette aventure et tu m'as permis de maintenir le cap jusqu'à la fin. Merci pour l'amour que tu me témoignes à tous les jours, ta confiance inébranlable en mes capacités, ton soutien dans tout ce que j'entreprends et tous les sacrifices que nous avons dus faire au cours des dernières années. Sans toi, je n'y serais pas arrivée… Un merci aussi à notre fils, Zachary, le plus beau cadeau que la vie nous a offert et la réalisation dont je suis la plus fière. Mon petit homme, tu as été ma source de motivation pour terminer mon mémoire. Karl et Zach, merci de rendre ma vie si douce et magique au quotidien. Je vous aime sincèrement.

Pour terminer, je remercie le Fonds de recherche sur la Société et la culture du Québec qui m'a offert un soutien financier ayant contribué à la concrétisation de ce mémoire doctoral.

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CHAPITRE

I

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1 Contexte politico-militaire

Les membres des Forces Armées Canadiennes (FAC) et les Anciens Combattants Canadiens (ACC) représentent une population à haut risque d’être exposée à des évènements traumatisants au cours de leur carrière. En effet, depuis les années 1990, le Canada a considérablement accru sa présence militaire sur la scène internationale en s’engageant auprès des Nations Unies et de ses alliés de l’OTAN (Comité sénatorial permanent de la défense et de la sécurité, 2003). Il est possible de constater cette présence colossale par la participation des FAC à 65 opérations à travers le monde en plus d’interventions à l’intérieur du Canada dans le cadre de désastres majeurs depuis 1989 (Ministère de la Défense nationale, 2000). Les militaires canadiens sont également exposés à des missions dangereuses plus fréquentes, plus longues et disposent de périodes de récupération plus courtes (Anciens Combattants Canada & Ministère de la Défense nationale, 2011). Certaines de ces opérations sont des missions humanitaires et de maintien de la paix, entre autres au Bosnie et en Haïti, alors que d’autres opérations sont des missions de combat, notamment en Afghanistan. Bien que ces missions aient des natures différentes, elles ont toutes été considérées comme des missions particulièrement difficiles sur les plans physique et psychologique par les militaires déployés (Ministère de la Défense nationale, 2000). De plus, entre 2001 et 2014, plus de 40 000 membres des FAC ont été déployés en Afghanistan pour participer aux différentes opérations de combat (Anciens Combattants Canada, 2014; Ministère de la Défense nationale, 2013a) et à la mission de formation et de développement professionnel aux forces de sécurité nationale de l’Afghanistan (Ministère de la Défense nationale, 2013b). En 2006, la Force opérationnelle interarmée du Canada a d’ailleurs réalisé sa plus importante opération de combat en 50 ans d’histoire à Kandahar, en Afghanistan (Anciens Combattants Canada, 2014). Dans ce pays, les membres des FAC se sont retrouvés dans des conditions dangereuses en situation de combat.

Par conséquent, lors de ces déploiements de même que lors des missions visant le maintien de la paix, les membres des FAC ont été fréquemment confrontés à la mort et exposés à des scènes de guerre au cours desquelles ils ont été témoins d’horreur et de

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destruction. L’exposition à de telles scènes peut entrainer des séquelles psychologiques que les autorités politiques et militaires ont nommé les blessures liées au stress opérationnel (Comité sénatorial permanent de la défense et de la sécurité, 2003; Ministère de la Défense nationale, 2013a).

Devant l’ampleur des répercussions néfastes de la carrière militaire sur la santé mentale, le Ministère de la Défense nationale et le Ministère des Anciens Combattants Canada ont annoncé conjointement en 2002 la mise en œuvre d’une stratégie en santé mentale afin d’améliorer et d’augmenter les services offerts aux ACC. Cette stratégie comprend notamment la mise en place de cinq cliniques spécialisées offrant des services en psychiatrie, en psychologie et en service social aux membres actifs des FAC et aux anciens combattants souffrant d’une blessure de stress opérationnel en plus de créer le programme de soutien social aux victimes de stress opérationnel visant entre autres à améliorer la compréhension de ces difficultés chez les ACC et leurs proches (Anciens Combattant Canada, 2002). En 2007, le Conseil du Trésor a donné l’approbation au Ministère des Anciens Combattants Canada pour porter le nombre de cliniques à 10 (Anciens Combattants Canada, 2008). Les traitements dispensés peuvent impliquer plusieurs membres du réseau social dont les partenaires des anciens combattants et leur famille. L’inclusion des membres de l’entourage dans l’offre de service parait d’autant plus importante lorsque l’association largement documentée entre la sévérité des symptômes de stress post-traumatique et les comportements de soutien issus du réseau social est considérée. Les services offerts aux familles se justifient également par les impacts connus du TSPT sur les proches.

Par ailleurs, la nature des relations entre les différentes dimensions du soutien social et les blessures liées au stress opérationnel demeure à documenter. C’est dans cette perspective que le présent projet de recherche s’inscrit.

2 Description du TSPT et des difficultés concomitantes

La Blessure liée au Stress Opérationnel (BSO) est un terme militaire utilisé uniquement par le Canada et par l’OTAN pour désigner les problèmes psychologiques pouvant résulter

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des missions et de la carrière militaire (Ministère de la Défense nationale, 2013a). Ce terme fait référence à toutes les difficultés psychologiques persistantes découlant des fonctions opérationnelles exécutées au cours du service militaire (Anciens Combattants Canada, 2008). La BSO englobe plusieurs problèmes psychologiques et émotionnels, dont le Trouble de Stress Post-Traumatique (TSPT) (Anciens Combattants Canada, 2008). Le TSPT peut se définir comme une réaction extrême à un stress. Selon le DSM-IV-TR (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorder, 4th Edited-Text revised; American Psychiatric Association [APA], 2000), le développement du trouble doit survenir à la suite de l’exposition à un évènement traumatique extrême au cours duquel une personne a craint pour sa vie, sa sécurité ou son intégrité physique de même que pour la vie, la sécurité ou l’intégrité physique d’autrui. Cet évènement doit susciter chez la personne une peur intense, un sentiment d’impuissance ou d’horreur (Critère A selon le DSM-IV-TR). De plus, la personne souffrant d’un TSPT doit présenter un ensemble de symptômes anxieux faisant partie des trois catégories suivantes : (B) la reviviscence (p.ex. revivre de façon persistante l’évènement traumatique par l’entremise de « flashbacks » ou de cauchemars), (C) l’évitement persistant des stimuli associés au traumatisme (p.ex. des pensées, des sentiments ou des activités qui éveillent des souvenirs du traumatisme) et l’émoussement de la réactivité générale, et (D) l’hyperactivation neurovégétative (p.ex. l’irritabilité, l’hypervigilance ou une réaction de sursaut exagérée). Les symptômes perdurent depuis plus d’un mois et entrainent une souffrance cliniquement significative chez la personne et/ou une altération de son fonctionnement. Lorsque des symptômes persistent trois mois ou plus, le TSPT est considéré chronique (APA, 2000). La parution du DSM-5 (APA, 2013) a entrainé des changements dans la définition et les critères diagnostiques du TSPT.

Le DSM-5 (APA, 2013) spécifie la nature de l’évènement traumatique (mort, blessure physique sérieuse, agression sexuelle ou la menace d’un de ces évènements) et les façons d’y être exposé (directement, indirectement ou être témoin). De plus, il n’est plus nécessaire que l’évènement entraine une peur intense, un sentiment d’impuissance ou d’horreur chez l’individu. Le DSM-5 propose également un remaniement des symptômes dans les catégories existantes et l’ajout d’une nouvelle catégorie (altérations persistantes négatives des cognitions et de l’humeur). La distinction entre le TSPT aigu et chronique a

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aussi été retirée. Néanmoins, les différences entre les versions IV-TR et V n’entrainent pas de changement dans l’établissement du diagnostic probable du TSPT chez les participants inclus dans l’étude.

2.1 Prévalence

Le TSPT est un trouble de santé mentale assez répandu au sein de la population générale avec des taux de prévalence variant entre 1,3% et 37,4% (Breslau et al., 1998; Kessler et al., 2005; Kessler, Sonnega, Bromet, Hugues, & Nelson, 1995; Perrin et al., 2014; Van Ameringen, Mancini, Patterson, & Boyle, 2008). La variabilité des taux de prévalence s’explique par l’utilisation de différentes définitions d’un évènement traumatique, de critères diagnostiques divers (DSM-III-R, IV-R), de méthodes d’évaluation variées et par l’étude de différents types de populations. Au Canada, une enquête épidémiologique menée auprès de 2991 Canadiens estime un taux de prévalence à vie de 9,2% pour le TSPT (Van Ameringen et al., 2008). Il semble que ce trouble affecte deux fois plus de femmes que d’hommes et ce, même si le taux d’exposition aux évènements traumatiques est sensiblement le même chez les deux sexes (Kessler et al., 1995; Perrin et al., 2014; Van Ameringen et al., 2008). De plus, la probabilité de développer un TSPT subséquemment à un traumatisme est influencée par la nature, la durée et l’intensité du traumatisme vécu (Ballenger et al., 2000). Ainsi, les traumatismes causés volontairement par les mains de l’homme (agression physique, viol) de même que ceux où la personne est témoin de la mort ou de blessures graves infligées à un tiers sont susceptibles de générer une réponse de stress post-traumatique grave ou prolongée. Le taux de prévalence à vie peut également augmenter lorsqu’une personne est exposée plusieurs fois à des évènements traumatiques passant à un taux de 30 à 40% (Marchand & Brillon, 1999).

Par conséquent, les militaires et les anciens combattants représentent des populations particulièrement à risque de développer un TSPT en raison des évènements auxquels ils ont dû faire face lors des déploiements et à leur fréquence élevée. Une revue critique des écrits scientifiques de Richardson, Frueh et Acierno (2010) a démontré que la prévalence à vie du TSPT relié à des expériences de combat varie entre 6 à 31 % chez les anciens combattants américains. Plus spécifiquement, une étude épidémiologique menée auprès de vétérans du

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Vietnam (National Vietnam Veterans Readjustment Study; Kulka et al., 1990) rapporte que 30,9 % des hommes et 26 % des femmes ayant servi au cours de la guerre du Vietnam ont déjà répondu aux critères du TSPT à un moment ou à un autre depuis la fin de leur service. Des études récentes réalisées auprès de militaires actifs américains ayant participé à des missions de combat en Afghanistan ou en Iraq démontrent que respectivement 11,5 % et 18 % d'entre eux répondraient aux critères du TSPT tels qu'évalués trois à quatre mois après leur retour de mission (Hoge et al., 2004). Après douze mois, ce taux atteindrait 23,7 % chez les militaires ayant servi en Iraq (Thomas et al., 2010). De plus, il semble que la chronicité du trouble soit la norme plutôt que l’exception puisque près du deux tiers des vétérans qui débutent un programme de traitement du TSPT aux Veterans Affairs aux États-Unis ont déjà entrepris d’autres suivis antérieurement pour ce même trouble (Fontana, Rosenheck, Spencer, & Gray, 2007) et que certains anciens combattants américains du Vietnam répondent encore aux critères diagnostiques 10 ans et même 40 ans après la fin de cette guerre (Mamar et al., 2015).

Pour ce qui est des militaires canadiens et des ACC, il existe peu d’études rapportant les taux de prévalence du TSPT. Une enquête de Statistique Canada (2003) menée auprès des membres actifs des FAC estime les taux de prévalence au cours d’une vie du TSPT à 7,2 % pour la force régulière et à 4,7 % pour la réserve. Une étude récente réalisée par le Ministère de la Défense nationale (2013a) avec un échantillon de militaires ayant été déployés en Afghanistan a démontré que 13,2 % d’entre eux ont reçu un diagnostic de BSO. Le TSPT est le trouble le plus courant (8 % de cet échantillon de soldats canadiens). Toutefois, cette étude et l’enquête de Statistique Canada n’ont pas considéré les vétérans canadiens. Étant donné qu’il est reconnu que plusieurs d’entre eux souffrent d’une BSO, ils sont souvent libérés des FAC pour des raisons médicales et n’ont pas été inclus dans les échantillons. Il existe toutefois quelques données démontrant l’importance du TSPT chez les vétérans canadiens. En effet, selon un rapport publié par Anciens Combattants Canada (2008), le nombre de clients de cet organisme gouvernemental avec une BSO a considérablement augmenté en passant de 3 500 à plus de 11 000 en cinq ans. Près de 60 % des ACC avec une BSO ont reçu une décision favorable pour des prestations d’invalidité reliées à un TSPT, ce qui en fait le trouble le plus répandu chez ceux souffrant d’une BSO

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(Anciens Combattants Canada, 2008). Il importe toutefois de mettre de l’avant qu’il est possible que les taux de prévalence soient encore plus importants que ceux estimés étant donné les réticences des militaires et des anciens combattants à dévoiler des symptômes de TSPT par crainte d’avoir l’air faible ou de perdre leur statut. Ainsi, bien que les indices ne permettent pas de conclure sur la prévalence du TSPT chez les vétérans canadiens, il est primordial de s’intéresser aux effets de ce trouble chez les ACC.

2.2 Comorbidité

Selon une étude nationale sur la comorbidité de Kessler et ses collaborateurs (1995), environ 80 % des hommes et des femmes ayant un TSPT auraient au moins un autre trouble psychiatrique concomitant au cours de leur vie. Les psychopathologies ayant les taux de comorbidité les plus élevés sont respectivement la dépression majeure, le trouble de dépendance à l’alcool et les troubles anxieux (Kessler et al, 1995; Van Ameringen et al, 2008).

Chez les anciens combattants américains des missions en Iraq et en Afghanistan, la majorité des vétérans présente au moins un trouble concomitant au TSPT (85 %; Kehle, Reddy, Ferrier-Auerbach, Erbes, Arbisi, & Polusny, 2011; Seal, Metzier, Gima, Bertenthal, Maguen, & Mammar, 2009). Malgré que la présence d’un trouble comorbide peut être un facteur de risque au développement du TSPT à la suite d’un traumatisme, il semble que dans la majorité des cas, il est secondaire au TSPT (Ballenger et al., 2000; Engdahl, Dikel, Eberly, & Blank, 1998; Ginzburg, Ein-Dor, & Solomon, 2000). Il est possible de croire que le portrait clinique des personnes présentant un TSPT avec un ou des troubles concomitants soit différent de celui des individus ayant un TSPT seul. Une étude épidémiologique menée auprès de la population générale a démontré que comparativement aux personnes ayant un TSPT seul, celles souffrant à la fois d’un TSPT et d’un trouble de dépendance à l’alcool présente un TSPT plus sévère, tel qu’indiqué par un plus grand nombre de critères diagnostiques (Blanco et al., 2013). Un faible soutien social des membres de la famille et un plus grand nombre de conflits sont également observés chez les individus souffrant d’un TSPT et d’un trouble de dépendance à l’alcool (Dutton, Adams, Bujarski, Badour, & Feldner, 2014).  Par conséquent, étant donné la comorbidité élevée du TSPT avec le trouble

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dépressif majeur de même qu’avec les troubles reliés à l’utilisation de substances (alcool et drogues), il apparaît essentiel de mesurer et de tenir compte de l’impact potentiel de ces problématiques concomitantes chez les ACC souffrant d’un TSPT.

2.3 Impact sur le fonctionnement

Le TSPT engendre une multitude d’impacts sur le fonctionnement émotionnel, physique, occupationnel et social de l’individu en plus des coûts importants pour la société. Plusieurs études ont démontré que ce trouble est associé à une augmentation de la détresse émotionnelle, à des problèmes occupationnels, à une limitation d'avancement de carrière, à des difficultés conjugales, à des problèmes de santé physique, de même qu’à une grande utilisation des services de santé (Deykin et al., 2001; Green & Kimmerling, 2004; Kessler, 2000; Mendlowicz & Stein, 2000; Nielsen, 2003; Richardson, Long Mary, Pedlar et al., 2008). Certains chercheurs se sont aussi intéressés aux conséquences du TSPT sur le fonctionnement de la nouvelle génération d’anciens combattants. Ils ont observé que les vétérans des missions en Afghanistan et en Iraq souffrant d’un TSPT présentent davantage de symptômes de douleurs chroniques intenses (Tan et al., 2009), d’idéations suicidaires (Lemaire & Graham, 2011) comparativement aux anciens combattants des missions précédentes et ont une diminution significative de la productivité au travail (Adler et al., 2011) de même que de la qualité de vie (Erbes, Westermeyer, Engdahl, & Johnsen, 2007).

Parmi les sphères de répercussions du TSPT, il semble que les relations interpersonnelles soient les plus affectées (Saint-Jean Trudel, 2009). Allen, Roades, Stanley et Markman (2010) ont révélé une association entre les symptômes sévères du TSPT chez les militaires actifs et de faibles niveaux perçus de satisfaction conjugale, de confiance en la viabilité de leur relation amoureuse et d’alliance parentale. Roberts et coll. (1982) ont observé quant à eux, que les anciens combattants du Vietnam présentant un TSPT souffrent davantage de problèmes d’intimité et de socialisation que les anciens combattants n’ayant pas de TSPT. D’autres chercheurs ont noté des difficultés conjugales, des problèmes familiaux et l’adoption fréquente de comportements violents entre les partenaires chez les vétérans souffrant de ce trouble (Jordan et al., 1992; Monson, Taft & Fredman, 2009; Sayers, Farrow, Ross & Oslin, 2009). Une étude récente menée auprès d’anciens

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combattants de missions en Iraq et en Afghanistan ayant un TSPT rapporte également plus de difficultés dans les relations amoureuses et une moins grande cohésion entre les membres de la famille (Tsai, Harpanz-Rotem, Pietrzak, & Southwick, 2012).

En somme, il apparaît évident que le TSPT compromet sérieusement le fonctionnement général des militaires et des ACC qui en souffrent en plus d’affecter leurs relations sociales et, inévitablement, leurs proches. Par conséquent, il importe de s’intéresser aux liens entre ce trouble et le soutien social.

3 Description du soutien social

Il existe plusieurs définitions du concept de soutien social, mais de façon générale, ce concept fait référence aux interactions et aux comportements des proches significatifs d’un individu afin de répondre à ses besoins lorsqu’il doit composer avec un évènement stressant (Cohen & Will, 1985; Wills & Fegan, 2001). Plus spécifiquement, les écrits scientifiques antérieurs ont permis de distinguer deux grandes dimensions au soutien social; le soutien structurel et le soutien fonctionnel. Le soutien structurel réfère notamment au réseau social. Il se définit par la quantité de personnes ressources appartenant au réseau (taille) et la fréquence des interactions avec celles-ci (densité) (Caron & Guay, 2005; Thoits, 1985; Wills & Fegan, 2001).

Le soutien fonctionnel quant à lui, fait référence à la qualité des diverses ressources disponibles lorsqu’un individu perçoit en avoir besoin (Caron & Guay, 2005; Wills & Fegan, 2001). Ces ressources sont offertes par d’autres personnes que des professionnels et elles peuvent prendre la forme de soutien émotionnel, instrumental et informationnel (Cohen, Gottlieb, & Underwood, 2000). Le soutien émotionnel se définit par l’écoute et la compréhension empathique favorisant l’expression des pensées et des émotions en lien avec l’évènement vécu. Les manifestations d’affection, de respect de même que la valorisation et le sentiment d’appartenance font partie de cette forme de soutien. Le soutien instrumental réfère pour sa part aux services et à l’aide matérielle ou financière concrète permettant de diminuer la détresse reliée aux enjeux de la vie quotidienne (p.ex. préparation des repas, paiement des factures, réalisation des tâches ménagères). Pour ce qui est du

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soutien informationnel, il renvoie aux conseils, aux informations et aux rétroactions visant à aider l’individu à voir la situation d’une autre perspective et ainsi faciliter le processus de résolution du problème. Certains auteurs vont aussi ajouter le soutien de camaraderie qui représente le temps passé avec l’individu à faire des activités récréatives dans le but de le distraire de ses préoccupations (Cohen & Wills, 1985; Wills & Fegan, 2001). En somme, les mesures de soutien fonctionnel s’intéressent à la disponibilité des ressources et à la perception de l’individu qu’il en a besoin, alors que les mesures de soutien structurel visent une mesure quantitative des relations sociales. Le présent mémoire s’intéresse uniquement au soutien fonctionnel étant donné que son importance prépondérante sur la santé mentale et le bien-être a largement été documentée (Caron & Guay, 2005).

3.1 Distinction entre le soutien social perçu et le soutien social reçu

Il importe de distinguer deux types de soutien fonctionnel : le soutien reçu et le soutien perçu. Le soutien reçu se définit par des gestes concrets posés par les proches (Dunkel-Schetter & Bennett, 1990). Cutrona et Russel (1990) ont développé un modèle théorique selon lequel il devrait exister un appariement optimal entre les actions de soutien reçues et les besoins de la personne afin d’obtenir un impact favorable du soutien social. Ainsi, il importe que les proches répondent aux besoins spécifiques de l’individu dans la situation stressante. Par exemple, l’allocation du soutien instrumental, notamment le paiement de factures, peut être avantageux dans le cas d’une perte d’emploi, mais moins lors d’un deuil (Lakey & Cohen, 2000). Le soutien perçu quant à lui, fait référence à la perception d’un individu que ses proches vont fournir du soutien en cas de besoin (Dunkel-Schetter & Bennett, 1990). L’effet salutaire du soutien perçu sur la santé mentale dépend de la correspondance entre les besoins de l’individu (Lazarus, 1996) et sa perception du soutien disponible. Bien que la majorité du temps l’aide offerte par les proches est un atout, il peut arriver que celle-ci soit interprétée comme une menace à l’autonomie et à l’estime de soi (Zwicker & DeLongis, 2010). Selon Dunkel-Schetter et Bennett (1990), le soutien social perçu est un meilleur prédicteur de l’ajustement et des conséquences sur la santé que le soutien reçu. Dans le présent mémoire, la perception des comportements de soutien reçus est étudiée.

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3.2 Effet du soutien social sur le TSPT

La relation entre le TSPT et le soutien social a fait l’objet d’un grand nombre d’études empiriques. La majorité de ces études s’est attardée aux effets potentiels du soutien social sur la symptomatologie de ce trouble. Au cours des dernières années, trois méta-analyses ayant recensé des études transversales de même que longitudinales et portant sur les facteurs de risque du TSPT ont d’ailleurs mis de l’avant l’importance de la relation entre le soutien social et le développement de même que le maintien des symptômes de ce trouble avec des conclusions similaires. La méta-analyse de Brewin, Andrews et Valentine (2000) révèle que le manque de soutien social pendant et après un évènement traumatique est le plus grand facteur de risque pour le TSPT (ES = ,40). Les résultats de Ozer, Best, Lipsey et Weiss (2003) abondent dans le même sens en rapportant que le manque de soutien social après l’évènement traumatique est le deuxième facteur le plus important (ES = ,28) après la dissociation au moment de l’évènement traumatique. Ces auteurs ont également observé que cette relation entre le soutien social et le TSPT est plus forte chez les populations militaires que chez les populations civiles. La dernière méta-analyse s’est intéressée spécifiquement aux anciens combattants des conflits récents dont ceux en Afghanistan et en Iraq. Wright, Kelsall, Sim, Clark et Creamer (2013) ont démontré une association négative entre les différentes sources de soutien post-déploiement (soutien des membres de l’unité militaire et soutien social en général) et le TSPT chez cette population.

Plusieurs études empiriques transversales réalisées auprès d’anciens combattants américains de différentes missions indiquent qu’un faible niveau de soutien social est significativement associé à une sévérité élevée des symptômes du TSPT (Barrett & Mizes, 1988; King, King, Fairbank, Keane, & Adams, 1998; Pietrzak, Johnson, Goldstein, Malley, & Southwick, 2009; Solomon, Waysman, & Mikulincer, 1990, Vogt & Tanner, 2007). Plus récemment, deux études menées auprès d’anciens combattants de l’Afghanistan et de l’Iraq ont permis d’observer cette même relation auprès de la nouvelle génération de vétérans de combat (Tsai et al., 2012; Wilcox, 2010). Dans une étude menée par Balderrama-Durbin et ses collaborateurs (2013), il a été observé que le soutien social explique une portion significative (28%) de la variance de la sévérité des symptômes du TSPT six à neuf mois

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après les déploiements en Afghanistan et en Iraq chez des anciens combattants américains. Ainsi, le manque de soutien social pourrait contribuer au développement ou l’exacerbation de la sévérité de symptomatologie du TSPT. Cependant, l’emploi de devis transversal ne permet pas de faire d’inférences causales, ni de déterminer la séquence temporelle entre le soutien social et le TSPT, ce qui constitue une limite importante. Par conséquent, il est possible qu’un faible soutien social soit la cause tout comme la conséquence d’un TSPT chez les vétérans. Il importe donc de vérifier cette association à l’aide d’un devis longitudinal.

Des études longitudinales réalisées auprès de militaires et d’anciens combattants américains de différentes missions ont également observé des relations similaires entre le soutien social et la symptomatologie du TSPT (Han et al., 2014; James, Van Kampen, Miller, & Engdahl, 2013; Polusny, Erbes, Murdoch, Thuras & Rath, 2011). Les auteurs ont démontré un effet protecteur des comportements de soutien sur le TSPT. Chez les vétérans de l’Afghanistan et de l’Iraq, une diminution des interactions sociales positives est associée à une augmentation de la sévérité des symptômes du TSPT (Price, Gros, Strachan, Ruggiero, & Acierno, 2013). Néanmoins, il ne semble pas exister à ce jour d’études longitudinales qui se sont intéressés aux anciens combattants canadiens.

3.3 Mécanismes d’action des effets du soutien social sur le TSPT

Plusieurs explications permettent d’étayer les effets du manque de soutien social sur la santé mentale, dont la symptomatologie du TSPT. Parmi celles-ci, il en ressort deux modèles théoriques principaux expliquant les mécanismes d’action du soutien social. Le modèle des effets directs stipule que le soutien social est une variable fondamentale aux capacités d’adaptation des individus (Caron & Guay, 2005). Il exerce ainsi un effet direct et bénéfique sur leur santé et leur bien-être, indépendamment de la présence ou de l’absence de situation de stress. Selon ce modèle, le fait de vivre des expériences positives régulières et d’entretenir des relations stables avec son réseau social permettrait de développer des affects positifs tout en fournissant une stabilité, un sentiment de sécurité, de maîtrise et de pouvoir contribuant ainsi à procurer un sentiment de bien-être général (Thoits, 1985; Vaux, 1988). Le soutien social favoriserait également la reconnaissance sociale de la valeur

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personnelle d’un individu, ce qui peut contribuer à rehausser l’estime de soi (Lakey & Cassady, 1990). Ces états psychologiques positifs seraient à l’origine de la réduction du sentiment de désespoir (Thoits, 1985), de l’amélioration de la motivation à prendre soin de soi (Cohen & Syme, 1985) de même qu’au renforcement du système immunitaire tout en régularisant le fonctionnement du système endocrinien (Cohen, 1988). De plus, les membres du réseau social peuvent apporter de l’aide financière et matérielle permettant de régler ou d’éviter des expériences négatives souvent propices au développement de troubles psychologiques (Cohen & Wills, 1985). Les membres de l’entourage peuvent également fournir des renseignements et donner des conseils en plus d’agir comme des modèles (Cohen & Syme, 1985; Vaux, 1988). Pour ces raisons, le soutien social aurait un effet bénéfique direct sur les symptômes de TSPT en favorisant notamment un sentiment de contrôle sur la vie et sur les conséquences de l’évènement traumatique.

Le modèle d’atténuation du stress propose quant à lui que le soutien social engendre des effets positifs uniquement dans des situations de stress. Il est considéré comme une variable tampon entre l’évènement stressant et la réponse de stress de même que ses conséquences. Il produirait un effet protecteur contre les répercussions du stress et préviendrait le développement d’une symptomatologie et ce, de différentes façons (Caron & Guay, 2005; Cohen & Wills, 1985). D’une part, le soutien social influencerait positivement la perception d’un individu que les autres peuvent et vont lui fournir les ressources nécessaires en cas de besoin (Caron & Guay). Il est possible de croire que les vétérans dont les membres de l’entourage ont toujours été présents dans le passé lors de situations difficiles vont davantage être convaincus qu’ils peuvent compter sur ceux-ci. Il pourrait aussi renforcer les croyances de l’individu en ses propres capacités à faire face aux évènements stressants en soulignant notamment d’autres expériences antérieures au cours desquelles le vétéran a su s’adapter efficacement. D’autre part, le soutien social pourrait agir sur la réponse émotive et cognitive associée à l’évènement stressant d’un individu (Caron & Guay, 2005). Le modèle étiologique du TSPT de Joseph, Williams et Yule (1997) abonde notamment dans le même sens en considérant le soutien social comme une variable intermédiaire permettant de favoriser l’adaptation au stress. Les proches peuvent aider une personne à réévaluer les conséquences possibles d’un évènement traumatique et à réduire l’importance du stress

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perçu de même que lui fournir des solutions à ses problèmes. Ils peuvent également favoriser l’adoption de cognitions rationnelles et prévenir les réponses comportementales inadaptées. Chez les anciens combattants souffrant d’un TSPT, les proches pourraient entre autres apporter des preuves visant à modifier la croyance fréquente dans cette population que le monde est dangereux, notamment en identifiant des situations où un danger ne s’est pas produit malgré une anticipation. Les membres de l’entourage pourraient également encourager la réduction de la consommation d’alcool, fréquemment utilisée comme stratégie d’évitement chez les vétérans ayant un TSPT. De plus, le soutien social permettrait à un individu d’être moins réactif au stress perçu en favorisant la régulation du système endocrinien (Cohen & Wills, 1985), ce qui favoriserait la réduction des symptômes d’hypervigilance du TSPT. Ainsi, un bon soutien social pourrait protéger les anciens combattants des effets néfastes d’un évènement traumatique.

Le modèle d’atténuation du stress dispose de l’appui empirique le plus exhaustif en plus d’être utilisé pour interpréter la majorité des résultats des études portant sur l’influence bénéfique du soutien social sur la santé mentale des victimes d’un traumatisme, dont les anciens combattants. Néanmoins, ce modèle présente une limite considérable dans l’explication du lien entre le soutien social et le TSPT en ne tenant pas compte des effets des interactions sociales négatives avec les proches (Caron & Guay, 2005) alors que celles-ci ont des assocelles-ciations plus fortes et plus importantes que les interactions positives (Bertera, 2005; Manne, Taylor, Dougherty, & Kemeny, 1997; Rook, 1984).

3.4 Interactions sociales négatives

Les interactions négatives constituent une autre dimension du concept du soutien social qui demeure à ce jour encore peu étudiée. Certains auteurs vont parler de comportements de soutien négatifs ou de stresseurs interpersonnels pour nommer les effets délétères des relations sociales (Coyne & Bolger, 1990). Dans le présent mémoire doctoral, les termes comportements de soutien négatifs et interactions sociales négatives seront utilisés de façon interchangeable. Les interactions sociales négatives font notamment référence à des tentatives infructueuses de soutien, c’est-à-dire que le soutien offert est perçu négativement par l’individu malgré une bonne intention derrière les comportements (Saint-Jean Trudel,

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2009). Par exemple, une conjointe pourrait tenter d’aider son mari vétéran qui a perdu un confrère au combat en tentant de lui remonter le moral alors que le vétéran pourrait percevoir cette aide comme un manque de respect envers sa tristesse et son deuil (Ullman, 1996; Wortman & Lehman, 1985). Par conséquent, la tentative de soutien n’est pas considérée comme un comportement aidant par la personne qui la reçoit. Les interactions négatives peuvent également prendre la forme de conflits, de critiques, de dévalorisation, d’un manque d’empathie, de comportements d’attaque et d’expression de la colère de la part des proches (Rook, 1984). Certains membres de l’entourage peuvent aussi éviter certains sujets de conversation ou la présence de l’individu qui souffre d’un TSPT (Rook, 1984).

Certaines études révèlent que ce type d’interaction contribue à la détresse psychologique et à l’apparition de symptômes dépressifs et anxieux (Bertera, 2005; Manne et al., 1997). Lavoie, Guay, Fikretoglu, Brunet et Boisvert (2008) ont démontré que les comportements de soutien négatifs sont associés positivement et significativement aux difficultés d’adaptation psychologiques chez les militaires canadiens souffrant d’un TSPT. Ullman et Filipas (2001) se sont intéressés à la relation entre les réactions sociales négatives et la sévérité du TSPT chez les victimes d’agression sexuelle. Leurs résultats indiquent que les interactions sociales négatives, particulièrement la stigmatisation à la suite de la révélation de l’agression, sont associées à une sévérité élevée des symptômes du TSPT. Chez les anciens combattants de missions de paix, Dirkzwager, Bramsen et Ploeg (2003) rapportent également un lien similaire entre la présence d’interactions négatives avec les membres de l’entourage et la sévérité du TSPT. Ainsi, ces interactions sont négativement associées à l’adaptation des individus ayant un TSPT à l’évènement traumatique et provoquent un stress supplémentaire, ce qui peut contribuer à maintenir et à exacerber les symptômes de ce trouble (Guay, Billette, & Marchand, 2006).

Les relations interpersonnelles semblent avoir des contributions parfois délétères qui entrent en contradiction avec le modèle d’atténuation du stress (Robinaugh et al., 2011). Conséquemment, il est possible que l’impact du manque de soutien social observé dans les études empiriques n’ayant évalué que les interactions positives de soutien et ayant

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interprété leurs données qu’avec ce modèle réfère davantage à la présence d’interactions négatives qu’à une faible fréquence de comportements de soutien positifs (Coyne & Bolger, 1990; Guay et al., 2006). D’ailleurs, une étude menée auprès de membres actifs de sexe féminin de l’armée américaine a démontré que la présence de conflits interpersonnels contribue davantage à la sévérité de la symptomatologie du TSPT que l’absence de soutien social (Nayback-Beebe, & Yoder ; 2011). Par conséquent, il apparaît primordial d’évaluer à la fois les aspects positifs et négatifs des relations interpersonnelles dans un même échantillon afin de mieux comprendre la relation entre le soutien social et les symptômes du TSPT chez une population spécifique.

4 Effets de la symptomatologie du TSPT sur le soutien social

Bien que la majorité des études empiriques ait tenté d’expliquer la relation entre le TSPT et le soutien social par l’effet du soutien social sur les symptômes de ce trouble, il existe des écrits scientifiques ayant une autre explication. En fait, quelques chercheurs se sont intéressés à l’influence des symptômes du TSPT sur le soutien social. Hanley, Leifker, Blandon et Marshall (2013) ont observé qu’une sévérité élevée du TSPT était associée à une diminution des comportements de soutien chez des couples issus de la population générale dont l’un des membres souffre de ce trouble. Pour ce qui est des anciens combattants, les résultats de Keane, Scott, Chavoya, Lamparski et Fairbank (1985) indiquent un déclin systématique et graduel du soutien social perçu des anciens combattants du Vietnam ayant un TSPT après leur retour de mission de combat alors que le soutien demeure stable pour les anciens combattants n’ayant pas développé de TSPT. Avant d’entrer dans l’armée, ces deux groupes d’anciens combattants présentaient un niveau élevé de soutien social. Solomon et Mikulincer (1990) ont également démontré que des symptômes sévères du TSPT d’anciens combattants israéliens un an après la guerre au Liban en 1982 sont associés à un faible soutien social 12 mois plus tard. Une étude récente comparant des vétérans de l’Iraq et l’Afghanistan souffrant d’un TSPT ou non a montré que les symptômes de ce trouble diminuent la fréquence des comportements de soutien (Brancu et al., 2014). Ainsi, la symptomatologie du TSPT semble créer l’érosion du soutien social à long terme chez les anciens combattants (King, Taft, King, Hammond, & Stone, 2006).

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4.1 Mécanismes d’action du TSPT sur le soutien social

L’impact négatif du TSPT peut s’expliquer par le modèle d’érosion social proposé par King et ses collaborateurs (2006). Selon ce modèle, les symptômes inhérents à ce trouble peuvent mener à la réduction du soutien social. Des chercheurs ont d’ailleurs démontré que les symptômes dysphoriques et d’évitement du TSPT chez les anciens combattants de l’Iraq et de l’Afghanistan sont associés à une diminution de la perception du soutien social post-déploiement (Pietrzak, Goldstein, Malley, Rivers, & Southwick, 2010). De plus, la restriction des affects, l’engourdissement des émotions, le sentiment de détachement par rapport aux autres et la réduction de l’intérêt et de la participation aux activités importantes peuvent faire en sorte que les individus présentant un TSPT sont moins portés à s’engager dans des relations interpersonnelles et ont plus de difficultés à se réintégrer dans la communauté (Solomon & Mikulincer, 1987), diminuant ainsi les occasions de recevoir du soutien. Ces symptômes peuvent également contribuer à diminuer la qualité des relations avec les proches significatifs puisque ces derniers n’arrivent plus à déterminer la façon d’interagir avec la personne ayant un TSPT (Guay et al., 2006). Par exemple, une femme qui ne reçoit plus ou peu de marques d’affection de son conjoint souffrant d’un TSPT peut remettre en question sa relation amoureuse et même y mettre fin.

L’irritabilité, les crises de colère et la propension à la violence sont également des symptômes fréquemment observés chez les anciens combattants ayant un TSPT pouvant créer l’érosion du soutien social. Plusieurs chercheurs soutiennent le fait que la culture militaire et le mode de vie en situation de combat apprennent aux anciens combattants que la violence est une façon de gérer les difficultés (Hendin & Haas, 1984; Solomon & Mikulincer, 1987). Ceux-ci ont par la suite tendance à transposer cette croyance dans leurs relations avec leurs proches en faisant preuve d’hostilité envers ces derniers et en adoptant des comportements agressifs (Jordan et al., 1992; Taft, Vogt, Marshall, Panuzio, & Niles, 2007). De plus, une sévérité élevée des symptômes du TSPT est associée à des comportements de violence verbale, physique et psychologique plus fréquents et sévères (Byrne & Riggs, 1996; Glenn et al., 2002). Il est possible de croire que les proches ressentent de la peur devant ces comportements et cette colère, ce qui peut diminuer la

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fréquence des comportements de soutien et mener à l’isolement. Par ailleurs, l’isolement peut aussi résulter des symptômes d’évitement. Les individus présentant un TSPT cherchent à éviter les conversations portant sur l’évènement traumatique de même que les personnes et les lieux qui l’évoquent (Sutker, Davis, Uddo, & Ditta, 1995). Avec le temps, ils peuvent ainsi refuser le soutien de leurs proches par peur d’aborder des souvenirs reliés à leur traumatisme.

Le modèle d’érosion est cohérent avec les modèles cognitifs du TSPT. Selon ceux-ci, le développement et le maintien des symptômes du TSPT reposent notamment sur la présence d’un sentiment de menace imminent, créé par des croyances négatives et erronées par rapport à l’évènement traumatique et aux conséquences de celui-ci (Ehlers & Clark, 2000; Joseph et al., 1997). À la suite d’un traumatisme, plusieurs anciens combattants développent une perception négative de soi (p.ex. la croyance qu’ils sont responsables de l’évènement traumatique ou qu’ils ont eu ce qu’ils méritaient), des autres (p.ex. la croyance que le monde est dangereux ou qu’il est impossible de faire entièrement confiance à quelqu’un), de même qu’une perception négative de ses symptômes (p.ex. la croyance que l’émoussement des affects est un signe qu’il ne sera jamais plus capable d’entretenir des relations avec les autres) (Ehlers & Clark, 2000). Ces perceptions dysfonctionnelles peuvent l’amener à s’isoler, réduisant ainsi les occasions d’être en contact avec les membres de son entourage et de recevoir de l’aide.

La diminution du soutien social peut également s’expliquer par la présence d’interactions négatives avec les proches. En fait, les individus souffrant d’un TSPT, qui présentent notamment de la colère, de l’irritabilité et des comportements d’évitement, ont tendance à répondre négativement à l’aide offerte par les membres de l’entourage (Guay et al., 2006). Ces réponses négatives sont susceptibles d’augmenter la probabilité d’interactions négatives avec les proches significatifs telles que des critiques, des attaques et un manque d’empathie (Guay et al., 2006). De plus, les individus présentant un TSPT pourraient se sentir incompris ou invalides à la suite des comportements de soutien négatifs émis par les membres de l’entourage, ce qui pourrait contribuer à l’isolement. La répétition

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de ce type d’interaction peut mener à un désengagement du réseau auprès de la victime du traumatisme et à une réduction considérable du soutien social.

Par ailleurs, les interactions négatives peuvent être une façon pour les proches de se protéger des répercussions du TSPT d’un individu sur leur vie. Il a été observé que les membres du réseau social, particulièrement les partenaires des anciens combattants ayant un TSPT, vivent une détresse psychologique importante à la suite de la révélation de certains détails de l’évènement traumatique et de l’impact des symptômes de leur partenaire sur le fonctionnement psychosocial (Jordan et al., 1992; Waysman, Mikulincer, Solomon, & Weisenberg, 1993). Plus la symptomatologie du TSPT du conjoint est sévère, plus les épouses rapportent un épuisement important et des problèmes de santé mentale fréquents (Calhoun, Beckham & Bosworth, 2002; De Brugh, White, Fear, & Iversen, 2011). Cette détresse et cet épuisement peuvent les amener à critiquer, à éviter et à nier les émotions de leur conjoint victime du trauma, contribuant ainsi à expliquer l’exacerbation des interactions négatives rapportées chez certains individus souffrant d’un TSPT.

En résumé, l’ensemble de la symptomatologie du TSPT semble engendrer une tension dans les relations interpersonnelles, particulièrement avec les proches significatifs, créant un terrain fertile aux interactions négatives et à un soutien inadéquat, parfois même inexistant, pour les individus ayant ce trouble (Guay, Billette, Saint-Jean Trudel, Marchand, & Mainguy, 2004; Waysman et al., 1993). Bien que les effets néfastes des symptômes du TSPT sur les comportements de soutien aient été démontrés chez les anciens combattants américains, aucune étude à ce jour ne semble s’être intéressée à cette relation chez les vétérans canadiens.

5 Bidirectionnalité de la relation entre le soutien social et le TSPT

L’absence de consensus quant à la direction de la relation entre le soutien social et les symptômes du TSPT de même que la disparité des résultats obtenus quant à l’explication de ce lien font ressortir la nécessité d’étudier la bidirectionnalité de cette relation. Toutefois, peu de chercheurs se sont intéressés aux deux sens de cette relation dans une même étude. Dans une étude longitudinale menée auprès de victimes d’une inondation

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importante au Mexique, Kaniastry et Norris (2008) ont observé que la direction de la relation entre la sévérité des symptômes du TSPT et le soutien social se modifie dans le temps. Ils ont remarqué qu’entre 6 et 12 mois après le trauma, la présence d’un bon soutien social est associée à une faible sévérité des symptômes du TSPT. Entre 12 et 18 mois après l’inondation, une relation bidirectionnelle entre le soutien social et la sévérité de la symptomatologie du TSPT est observée alors qu’entre 18 à 24 mois après l’évènement traumatique, la sévérité des symptômes du TSPT explique l’absence de soutien social. Néanmoins, cette étude ne s’intéressait pas spécifiquement aux vétérans.

À ce jour, uniquement deux études longitudinales ont évalué la bidirectionnalité de la relation entre le soutien social et la symptomatologie du TSPT chez une population d’anciens combattants. Avec un échantillon de 2 249 anciens combattants de la guerre du Golf de 1990-1991, King et coll. (2006) ont mesuré la sévérité du TSPT et les comportements de soutien (soutien émotionnel et instrumental) 18 à 24 mois après le retour de mission (premier temps de mesure). Ils ont démontré une association négative entre la sévérité des symptômes du TSPT au premier temps de mesure et le soutien social au deuxième temps de mesure, soit cinq ans plus tard. Cependant, le soutien social au premier temps de mesure n’a pas permis de prédire la sévérité du TSPT au deuxième temps de mesure. Bien que ces résultats apportent un éclairage sur la direction de la relation, cette étude présente deux limites méthodologiques importantes. La première est l’utilisation d’instruments de mesure du soutien social différents au premier et au deuxième temps de mesure. Le questionnaire du premier temps de mesure est plus fortement associé au TSPT que celui du deuxième temps de mesure. Ce changement de questionnaire peut avoir biaisé les résultats en faveur de la prédiction de l’effet de la sévérité des symptômes du TSPT sur le soutien social. L’emploi du même questionnaire aux deux temps de mesure permettrait d’éviter ce biais et d’augmenter la validité des conclusions.

La deuxième limite repose sur la composition de l’échantillon qui est constitué uniquement d’anciens combattants américains de la guerre du Golf. Cet échantillon peut ne pas être représentatif des anciens combattants d’autres conflits. Plusieurs cliniciens mentionnent que chacune des missions et chacune des guerres présentent des situations et

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des caractéristiques distinctes, engendrant des répercussions différentes sur les militaires déployés. Ces derniers reviennent au pays avec des traumatismes de nature différente, ce qui peut occasionner des profils symptomatiques particuliers chez ceux qui obtiennent le statut d’anciens combattants (Fontana & Rosenheck, 2008). Afin de pouvoir généraliser les résultats de King et ses collaborateurs (2006), des études portant sur les anciens combattants d’autres conflits apparaissent essentielles.

Une autre étude réalisée auprès d’anciens combattants du Vietnam s’est intéressée à la direction de la relation entre le TSPT et le soutien social de même que les stresseurs interpersonnels (Laffraye, Cavella, Drescher, & Rosen, 2008). À l’intérieur de cette étude, le soutien social faisait entre autres référence au soutien émotionnel et instrumental alors que les stresseurs interpersonnels étaient définis comme des critiques ou des conflits avec les proches. Un devis longitudinal avec deux temps de mesure séparés par un intervalle de six mois et des analyses par cheminement ont été employés afin d’étudier la direction du lien entre le TSPT et le soutien social de différents types de relations interpersonnelles (conjoint, pairs civils et pairs vétérans). Les résultats de cette étude indiquent que des symptômes sévères du TSPT prédisent une érosion du soutien social à long terme uniquement chez les pairs civils alors que le soutien social ne prédit pas la sévérité des symptômes de ce trouble. Les résultats montrent également qu’une sévérité élevée des symptômes du TSPT ne permet pas de prédire les stresseurs interpersonnels. Cette étude présente aussi une limite à la généralisation des résultats aux ACC puisqu’elle porte uniquement sur des anciens combattants américains ayant été déployés lors de la guerre du Vietnam. À ce jour, il existe peu d’études sur les ACC ayant un TSPT, ce qui constitue une lacune importante. Il est possible de supposer que les ACC présentent des caractéristiques différentes qui pourraient influencer la relation entre le soutien social et le TSPT. Par exemple, il a été rapporté que traditionnellement, les militaires canadiens ont été davantage impliqués dans des missions de paix ou en support aux Nations Unis alors que les militaires américains ont participé principalement à des missions de combat (English, 2001). Cette différence dans le type de mission peut influencer l’exposition aux évènements traumatiques, entrainant possiblement des traumatismes de nature différente et des profils symptomatiques différents. De plus, il semble exister des différences culturelles entre le

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Canada et les États-Unis quant à la perception de l’armée qui pourraient exercer un effet distinct sur le soutien social que les anciens combattants reçoivent dans leur entourage. Aux États-Unis, l’engagement dans l’armée constitue une vocation valorisée par la nation américaine alors qu’au Canada, cet engagement est davantage perçu comme un choix personnel, un emploi (English, 2001). Il est ainsi possible de croire que les Américains ont plus de chance d’offrir un soutien et une reconnaissance à ceux qui ont défendu leur nation que les Canadiens. Ainsi, le présent projet de recherche est une opportunité d’en apprendre davantage sur les ACC, pour lesquels il existe peu de données empiriques.

6 Limites des connaissances actuelles

En résumé, les données empiriques existantes sur la relation entre le TSPT et le soutien social ne font pas consensus quant à la direction de cette relation et aux modèles explicatifs de celle-ci. Cette divergence semble entre autres s’expliquer par l’utilisation de devis transversaux, ne permettant pas de déterminer la séquence temporelle. Certains chercheurs ont tenté d’examiner la bidirectionnalité de cette relation, mais leurs études présentent des limites méthodologiques non négligeables. De plus, peu d’études ont tenu compte des interactions négatives dans leur conceptualisation du soutien social alors qu’il a été démontré que les effets des interactions sociales négatives avec les proches sont plus importants que les effets des interactions positives. En outre, à ce jour, aucune étude ne s’est intéressée à la relation entre le TSPT et les comportements de soutien positifs et négatifs chez les anciens combattants canadiens, une population de plus en plus nombreuse. 7 Objectif du mémoire doctoral

Ce mémoire doctoral s’intéresse à combler certaines des limites des connaissances actuelles en ce qui concerne la compréhension de l’association entre la sévérité des symptômes du TSPT et le soutien social chez les anciens combattants souffrant de ce trouble. Il propose plus particulièrement d’évaluer la bidirectionnalité de la relation entre le soutien social et la sévérité des symptômes du TSPT au sein d’un échantillon d’ACC tout en intégrant les interactions sociales positives et négatives. Cet objectif est réalisé à l’aide d’une étude longitudinale menée auprès d’un échantillon clinique de 64 anciens

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combattants recevant des services dans une clinique spécialisée pour des difficultés en lien avec une blessure de stress opérationnel. La sévérité des symptômes du TSPT et la perception de la fréquence des comportements de soutien (positifs et négatifs) reçus sont évalués à deux reprises, séparées par un intervalle de trois mois. Les hypothèses suivantes seront testées. Il est attendu qu’une perception de la fréquence élevée des interactions sociales positives reçues au Temps 1 (T1) prédise une faible sévérité des symptômes du TSPT au Temps 2 (T2). À l’inverse, il est attendu que la perception de la fréquence élevée des interactions sociales négatives reçues au T1 prédise des symptômes plus sévères du TSPT au T2. Il est également attendu que la sévérité élevée de symptômes du TSPT au T1 prédise une perception de la fréquence plus faible des interactions sociales positives reçues au T2 et qu’inversement, des symptômes plus sévères du TSPT au T1 prédisent des interactions sociales négatives reçues plus fréquentes au T2.

8 Structure du mémoire doctoral

  Le présent mémoire est divisé en trois chapitres. L’introduction générale constitue le premier chapitre visant à présenter le contexte théorique justifiant l’élaboration de l’étude incluse dans ce mémoire doctoral. Le deuxième chapitre présente les résultats de l’article empirique visant à examiner la bidirectionnalité de la relation entre la sévérité des symptômes du TSPT et la perception de la fréquence des comportements de soutien reçus (positifs et négatifs) chez les ACC. Enfin, le troisième chapitre, soit la conclusion générale, résume les principaux résultats obtenus en lien avec l’objectif du mémoire. Les implications théoriques et cliniques y sont ensuite discutées.

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CHAPITRE

II

ARTICLE

EMPIRIQUE

Relations longitudinales entre le TSPT et les comportements de soutien chez des anciens combattants canadiens

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R

ÉSUMÉ

La présente étude avait pour objectif d’évaluer la bidirectionnalité de la relation entre la sévérité des symptômes du Trouble de Stress Post-Traumatique (TSPT) et le soutien social chez un groupe de 64 anciens combattants canadiens présentant un diagnostic probable de TSPT chronique. La sévérité des symptômes, de même que la perception de la fréquence des interactions sociales positives et négatives reçues ont été mesurées à deux reprises, séparées par un intervalle de trois mois. Sur le plan transversal, des symptômes sévères du TSPT sont significativement associés à une perception de la fréquence élevée des interactions sociales négatives reçues. Sur le plan longitudinal, bien qu’il existe une corrélation positive entre les interactions sociales négatives et la sévérité des symptômes du TSPT, les comportements de soutien (positifs et négatifs) ne permettent pas de prédire la sévérité des symptômes de ce trouble trois mois plus tard, ces derniers étant mieux expliqués par les comportements de soutien au temps 1. De plus, la sévérité des symptômes du TSPT ne permet pas de prédire les comportements de soutien dans le temps, ceux-ci étant mieux expliqués par la sévérité des symptômes au temps 1. La cristallisation probable des symptômes du TSPT et des comportements de soutien dans les deux premières années suivant la survenue du trouble de même que la modification possible du sens de la relation à travers le temps, pourraient expliquer ces résultats.

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I

NTRODUCTION

Au cours des dernières décennies, la participation des membres des Forces Armées Canadiennes (FAC) aux missions internationales des Nations Unies et des alliés de l’OTAN a considérablement augmenté, les affectations dans les zones de conflits et d’agitation ont été plus fréquentes et plus longues que dans le passé, amplifiant ainsi le risque des militaires de développer un Trouble de Stress Post-Traumatique (TSPT) (Anciens combattants Canada, 2011; Comité sénatorial permanent de la défense et de la sécurité, 2003). Le TSPT est également le trouble le plus répandu chez les Anciens Combattants Canadiens (ACC) recevant des prestations d’invalidité (Anciens Combattants Canada, 2008). Plusieurs chercheurs se sont intéressés aux répercussions néfastes du TSPT sur les relations interpersonnelles (Allen, Roades, Stanley & Markman, 2011; Jordan et al., 1992; Robert et al., 1992; Sayers, Farrow, Ross & Oslin, 2009), et les liens entre ce trouble et le soutien social ont abondamment été démontrés chez les victimes d’évènements traumatiques (Brewin, Andrews, & Valentine, 2000; Guay, Billette, & Marchand, 2006).

La majorité des écrits scientifiques se sont attardés au lien entre le soutien social et le TSPT par le biais des effets potentiels du soutien sur la symptomatologie de ce trouble. Trois méta-analyses récentes ont démontré que le manque de soutien social est l’un des facteurs de risque les plus importants pour le développement et le maintien du TSPT et des symptômes qui y sont associés (Brewin et al., 2000; Ozer, Best, Lipsey, & Weiss, 2003; Wright, Kelsall, Sim, Clark, & Creamer, 2013). La force de cette association est d’ailleurs plus marquée chez les anciens combattants (Ozer et al., 2003) que chez les civils. Plusieurs études transversales réalisées auprès d’anciens combattants américains de différentes missions indiquent qu’un faible soutien social est significativement associé à une sévérité élevée des symptômes du TSPT (Barrett & Mizes, 1988; King, King, Fairbank, Keane, & Adams, 1998; Pietrzak, Jonhson, Goldstein, Malley, & Southwick, 2009; Solomon & Mikulincer, 1990). Une étude menée auprès de militaires canadiens souffrant d’un TSPT montre également que les interactions sociales positives sont négativement associées à l’intensité des symptômes de ce trouble (Lavoie et al., 2008).   Cependant, bien que ces études soutiennent l’existence d’une relation entre le soutien social et le TSPT, l’utilisation

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Tableau 1   Données socio-démographiques  Proportion (%)  n  Sexe  Homme  96,9  62  Femme  3,1  2  Statut conjugal  Célibataire  25  16  En couple/conjoint de fait  36  23  Marié  32,8  21  Séparé/divorcé  6,3  4  Niveau de scolarité  Primaire  4,7  3  Sec

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