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L'agitation verbale : moyen de communication dans la démence?

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UL

¿WOG

L'AGITATION VERBALE : MOYEN DE COMMUNICATION DANS LA DÉMENCE ?

Mémoire présenté

à la Faculté des études supérieures de 1'Université Laval

pour 1'obtention

du grade de maître en psychologie (M.Ps.)

Ecole de psychologie

FACULTÉ DES SCIENCES SOCIALES UNIVERSITÉ LAVAL

DECEMBRE 2000

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Résumé

L1 agitation verbale (AV) renvoie à des comportements verbaux ou vocaux répétitifs, dérangeants ou non appropriés au contexte. Les connaissances actuelles suggèrent que 1 'AV soit un moyen d1 expression chez les gens ne disposant pas des compétences langagières nécessaires à une communication efficace. Afin de vérifier cette hypothèse, cinquante-neuf participants âgés sont répartis en deux groupes : l'un ayant des habiletés langagières préservées (HLP), l'autre ayant des habiletés langagières altérées (HLA). Les résultats montrent que le groupe HLA présente une plus grande fréquence d'AV que le groupe HLP et qu'il manifeste un registre plus étendu de comportements verbaux agités. Les résultats sont interprétés en fonction de la détérioration du langage occasionnée par la démence. l-Philippe Landreville, Ph.D. Directeur de maîtrise Evelyne Matteau Candidate à la maîtrise

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AVANT-PROPOS

Voici enfin le moment où ce projet, périlleux mais combien gratifiant qu'est la maîtrise, est presque chose du passé. Ce projet m'aura, d'une part, donné de belles occasions de «cogiter» intellectuellement avec une panoplie de gens, de travailler en collaboration avec des soignants dévoués à leurs patients, mais aussi de réaliser à quel point je suis choyée d'être entourée de personnes aussi extraordinaires. Je m'en voudrais de ne pas prendre le temps de les remercier.

Merci d'abord à mon directeur de maîtrise, Philippe Landreville, pour m'avoir guidée sur le chemin des «scientifiques» par tes questions et commentaires tout au long de la réalisation de mon mémoire. Merci aussi à Louis Lap1ante, mon superviseur de stage, pour m'avoir laissée bénéficier de tes connaissances et de ta grande disponibilité, ton immense générosité. Je tiens aussi à remercier mes ami(e)s qui m'ont soutenue et aidée soient Mylène, Mélanie-Alexandra, Frédéric, Marie-Eve, Hans, Sébastien, Catherine, Geneviève, Christine, etc. de même que celui qui m'accompagne amoureusement depuis plus d'un an, Charles-Alexandre. Merci à ma mère, mon père et ma «p'tite» soeur. Vous m'avez toujours encouragée à aller au bout de mes rêves et surtout, vous avez toujours été là.

Finalement, ce mémoire m'aura permis de côtoyer ces aînés qui sont directement confrontés aux conséquences ingrates de la

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maladie d'Alzheimer. Quoique nous puissions en penser, ils ont encore beaucoup à offrir et ont un infini besoin de notre affection. À moi, ils m'auront donné une leçon d'humilité.

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TABLE DES MATIERES iii 11 v Page titre Résumé AVANT-PROPOS

TABLE DES MATIERES _________________ CHAPITRE I Introduction générale

1.1 Introduction 8

1.2 Démence : définition et statistiques 9 1.3 Sphère comportementale de la démence 10 1.4 Définition de 1'agitation verbale 12

1.5 Prevalence 15 1.6 Impact 18 1.7 Facteurs associés 20 1.8 Modèles explicatifs 2 2 1.9 Détérioration du langage 2 5 1.10 Problématique 28 1.11 But de 11 étude 28 1.12 Méthodoloaie 29 .31 .3 2 .33 .34 .41 .41

CHAPITRE II Agitation verbale : moyen de communication dans la démence? (article)

2.1 Page titre ________________________________ 2.2 Résumé _____________________________________ 2.3 Abstract _____________________________________ 2.4 Introduction 2.5 Méthode __ Participants 2.5.1

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2.5.2 Instruments de mesure _______________ 43 2.5.3 Procédure ______________________________ 46 2.6 Résultats ________________________________________ 47 2.6.1 Caractéristiques des participants _____48 2.6.2 Variables confondantes _______________ 4 8 2.6.3 Variable principale 49 2.7 Discussion ___________________________________ 51 2.8 Références 58 2.9 Note d ’ auteurs ___________________________________ 66 2.10 Tableau 1 ________________________________________ 67 2.11 Titre de la figure 1 68 2.12 Figure 1 ________________________________________ 6 9 2.13 Tableau 2 ________________________________________ 70 CHAPITRE III Conclusion générale

3.1 Conclusion ___________________________________ 72 3.2 Résultats ________________________________________ 72 3.3 Forces et limites de l'étude _____________________ 72 3.4 Implications et recherches futures________________ 74 Bibliographie _____________________________________________ 77

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1.1 Introduction

La démence est une réalité à laquelle nombre de personnes âgées et leur entourage immédiat sont confrontés.

Parallèlement à d'importantes atteintes sur le plan cognitif et fonctionnel, les individus qui souffrent de démence peuvent aussi manifester certains désordres du comportement. Ces perturbations comportementales se présentent souvent sous la forme d'agitation verbale, allant d'un simple monologue à des cris persistants. Compte tenu de sa prévalence et de son impact sur la personne agitée elle-même et le milieu dans lequel elle évolue, une bonne compréhension de 1'agitation verbale s'avère essentielle. Ce premier chapitre présente 1'agitation verbale comme un moyen de communication chez les personnes atteintes de démence. Il sera d'abord question d'une description générale de la problématique de la démence, de la définition de 1'agitation verbale et de sa prévalence, de son impact, des facteurs qui sont associés à sa manifestation et des différents modèles explicatifs existants. La détérioration du langage survenant au cours du processus démentiel sera

ensuite présentée. La formulation des objectifs de la présente étude, de sa pertinence et de la méthodologie employée

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1.2 Démence : définition et statistiques

La démence est décrite comme une perturbation acquise et d'aggravation progressive des fonctions intellectuelles

provenant d'un dysfonctionnement cérébral (Cummings & Benson, 1983). Selon la quatrième édition du Diagnostic and

Statistical Manual of Mental Disorders (DSM-IV; American Psychiatric Association, 1994), la présence d'atteintes

mnésiques et d'au moins une autre perturbation cognitive telles 1'aphasie, 1'apraxie, 1'agnosie ou une perturbation des

fonctions exécutives est nécessaire à 1'établissement du diagnostic de démence. De plus, les déficits cognitifs

présentés par 1'individu doivent affecter significativement son fonctionnement social ou professionnel.

La maladie d'Alzheimer est sans doute la cause la plus fréquente et la plus connue des démences, bien qu'elle soit souvent associée à d'autres conditions médicales telles que les troubles vasculaires et la maladie de Parkinson (Azuma &

Bayles, 1997; Habib & Poncet, 1998). Au Canada, 316 500

personnes âgés de plus de 65 ans sont atteintes de la maladie d'Alzheimer ou de démences apparentées. Avec le vieillissement attendu de la population, on estime que la maladie d'Alzheimer pourrait toucher jusqu'à 750 000 personnes en 2031 (Groupe de travail et de l'étude sur la santé et le vieillissement au

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d'autres pays. Par exemple, aux États-Unis, plus de 65% des personnes âgées résidant en hébergement ont des atteintes cognitives dont la principale origine est la maladie

d'Alzheimer. Plus précisément, 10% (3.5 millions) de personnes âgées de 65 ans et plus souffrent de cette maladie. Il est aussi prévu que ce nombre grimpera à 14 millions d'ici 2040

(Evans, & al., 1989). Dans ces circonstances, la charge

économique associée au traitement et à la gestion des démences apparaît particulièrement importante : 3, 9 milliards de dollars dépensés annuellement au Canada (Ernst & Hay, 1994) et plus de 100 milliards aux États-Unis (Ostbye & Crosse, 1994). Vue 1 ' ampleur des conséquences économiques et sociales qu'elle

entraîne, une attention particulière doit être portée à l'étude de tous les aspects de la démence.

1.3 Sphère comportementale de la démence

Les recherches effectuées sur la démence portent

majoritairement sur les altérations cognitives qui en découlent (Zaudig, 1996) . Cependant, Gilley, Wilson, Bennet et Fox

(1991) considèrent que la sphère comportementale de la démence est tout aussi déterminante. Le DSM-IV (American Psychiatrie Association, 1994) propose d'ailleurs la mention Avec

perturbation du comportement pour indiquer la manifestation de comportements perturbateurs cliniquement significatifs. Aucune

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fournie.

Reisberg et al. (1986) rapportent plusieurs désordres associés à la démence qui viennent affecter le comportement dans son ensemble. Ils les regroupent en sept catégories

symptomatiques : a) les idées délirantes et paranoïdes, b) les hallucinations (visuelles ou auditives), c) les désordres de 1'activité (errance, activité sans but), d) les perturbations du rythme circadien, e) les troubles affectifs (symptômes dépressifs), f) 1' anxiété et les phobies ainsi que, g)

1'agressivité (verbale ou physique). Selon les auteurs, ces symptômes comportementaux surviennent de façon isolée ou combinée alors que leur apparition est influencée par des facteurs inhérents à 1'évolution de la démence tels un niveau de conscience plus ou moins élevé ou une détérioration

progressive des fonctions cognitives.

Malgré le fait que divers types de perturbations

comportementales puissent être présentes à chacun des stades d'évolution de la maladie (Reisberg, Franssen, Sclan, Kluger, & Ferris, 1989), aucune nomenclature claire ne fait encore

consensus. D'aucuns parlent de «comportements perturbateurs», de «comportements excessifs» ou de «comportements

dysfonctionnels». Une telle situation entraîne une grande variabilité dans les résultats de recherche et rend ardue toute

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comparaison entre les études. La nécessité d'une définition opérationnelle pouvant rendre compte des nombreuses

connaissances et observations sur le phénomène devient importante. Cohen-Mansfield et ses collègues (1986) ont proposé le terme «agitation» pour désigner une activité motrice, verbale ou vocale non appropriée ne résultant pas directement des besoins ou de la confusion de la personne agitée. Comme leurs travaux ont montré que certains

comportements semblent découler d׳ un état ou d'un sentiment privé, propre à 1'individu agité, ils ont révisé le concept d'agitation en évitant toute référence aux besoins sous-jacents aux comportements agités. Pour eux, un comportement agité est caractérisé par sa nature agressive à 1'endroit de soi-même ou des autres, par sa fréquence anormale ou par le contexte dans lequel il s'inscrit. Ils ont aussi identifié trois syndromes de 1'agitation soient les comportements physiques agressifs, physiques non agressifs et verbaux agités (Cohen-Mansfield, Marx, & Rosenthal, 1989).

1.4 Définition de l'agitation verbale

Les comportements d'agitation verbale sont souvent

identifiés comme étant parmi les plus problématiques par les aidants naturels et les soignants oeuvrant auprès de personnes âgées (Teresi, & al., 1997; Whall, Gillis, Yankou, Booth, &

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Beel-Bates, 1992). L'agitation verbale fait référence à

plusieurs activités vocales telles les requêtes répétées, les persévérations, le langage abusif, les cris et les grognements

(Cariaga, Burgio, Flynn, & Martin, 1991; Cohen-Mansfield,

Werner, & Marx, 1990). Elle peut aussi être différenciée selon qu'elle est de nature non agressive ou agressive. La majorité des vocalisations seraient de nature non agressive et

incluraient les complaintes, les demandes d'attention constantes, le négativisme ainsi que les phrases, mots ou bruits répétés (Cohen-Mansfield, Werner, Watson, & Basis,

1995). L'agitation verbale agressive serait, quant à elle, une réponse généralement limitée dans le temps face à une menace subjective telle le bain, ou 1'habillement (Rosby, Beck, & Heacock, 1992). Elle comprendrait, entre autres, les cris et les blasphèmes (Cohen-Mansfield, & al., 1995). On peut

également distinguer parmi les personnes sévèrement agitées celles qui présentent une activité vocale à prépondérance

verbale (les «parleurs») et celles chez qui cette activité est non verbale (les «erreurs») (Sloane, Davidson, Knight, Tangen, & Mitchell, 1999) .

Certains auteurs ont tenté d'opérationnaliser leur définition de 1'agitation verbale. Ainsi, Ryan, Tainsh, Kolodny, Lendrum et Fisher (1988) la définissent comme un patron comportemental aigu ou chronique, s'exprimant de façon

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continue ou intermittente, avec ou sans but apparent et pouvant varier dans son intensité, son contenu et son degré dérangeant. Conséquemment à cette définition, ils suggèrent de classifier le comportement verbal agité dans l'une ou l'autre des six catégories suivantes : 1) persévérant et sans but, 2) en réponse à 1'environnement, 3) en attente d'une réponse de l'environnement, 4) du type «moulin à paroles», 5) originant d'un état de surdité, et 6) autres.

Cohen-Mansfield, Marx et Rosenthal (1989) définissent plutôt 1'agitation verbale comme des comportements verbaux ou vocaux qui sont, aux yeux d'un observateur, répétitifs,

dérangeants ou non appropriés aux circonstances dans lesquelles ils se manifestent. Sur la base de leur expérience clinique, ces auteurs ont élaboré une typologie de 1'agitation verbale permettant de recueillir davantage d'informations que celle suggérée par Ryan et al. (1988). Cette typologie qualifie 1'agitation verbale sous quatre aspects soient a) le type de vocalisations, b) sa raison d'être et son contenu, c) sa

fréquence et, d) 1'importance du dérangement occasionné (Cohen- Mansfield & Werner, 1997). Cette typologie fournirait, selon les auteurs, une meilleure description du comportement et mènerait à une stratégie d'intervention plus appropriée.

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1.5 Prévalence

La plupart des études évaluant la prévalence de

1'agitation verbale en communauté incluent des personnes âgées ayant des atteintes cognitives ou un diagnostic de démence. Les taux de prévalence rapportés sont différents selon le type de comportement mesuré. Les cris apparaissent ainsi comme le comportement le moins fréquent avec un taux de prevalence de 6%

(Baumgarten, Becker, & Gauthier, 1990) alors que les demandes ou questions répétées atteignent un taux oscillant entre 72% et 83% (Baumgarten, & al., 1990; Molloy, Mcllroy, Guyatt, & Lever, 1991). Plusieurs autres comportements verbaux agités, tels les pleurs, les discours accusateurs ou hostiles, ont un taux de prevalence au-dessus de 30% (Baumgarten, & al., 1990; Devanand, & al. 1992; Hamel, & al. 1990; Molloy, & al., 1991).

La situation décrite dans les établissements d'hébergement est quelque peu semblable, la prévalence de 1'agitation verbale y apparaissant aussi variable. Trois méthodes employées dans les études ressortent principalement. Premièrement, les

comportements verbaux agités peuvent être considérés dans leur ensemble. Ce faisant, les taux de prévalence varie de 10% à 30%. Les taux les moins élevés sont rapportés respectivement par deux groupes d'auteurs qui notent que 11% des personnes incluses dans leur échantillon manifestaient des vocalisations interférant avec les soins ou dérangeaient fréquemment les

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autres patients, le personnel ou les visiteurs (Cariaga, & al., 1991; Friedman, Gryfe, Tal, & Freedman, 1992). De leur côté, Hallberg, Norberg et Erikson (1990a) mettent en évidence un taux de prévalence de 15% en considérant tout comportement vocal manifesté par 264 personnes résidant sur les unités de soins d'un hôpital psycho-gériatrique. Ryan et al. (1988) trouvent le taux de prévalence le plus important (30%) chez 1036 résidents de deux établissements de soins prolongés. Leur définition renvoyait à tout patron de comportements vocaux

chroniques et persistants.

Deuxièmement, les comportements verbaux agités peuvent être considérés séparément. Ainsi, Cohen-Mansfield, Werner et Marx (1990) ont étudié à quel point les 408 bénéficiaires d'une résidence peuvent exhiber des cris. Les résultats révèlent que 25% d'entre eux criaient de quatre à cinq fois par semaine. De la même façon, Drachmen et al. (1992) ainsi que Ray, Taylor, Lichtenstein et Meador (1992) ont noté que 33% de leurs

participants manifestaient ce même comportement. Les discours incohérents comptent aussi parmi les comportements verbaux agités les plus répandus puisqu' ils se produisent dans une proportion variant de 20% à 49% selon les études (Ray, & al., 1992; Rovner, Kafonek, Filipp, Lucas, & Folstein, 1986). Des taux de prévalence considérables sont aussi rapportés pour d'autres manifestations verbales telles les demandes

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d/ attention, les argumentations ou menaces (Drachmen, & al., 1992; Ray, & al., 1992; Rovner, & al., 1986).

Finalement, les comportements d'agitation verbale peuvent être étudiés en comparaison avec d'autres types d'agitation. Patel et Hope (1992) ont voulu ainsi déterminer les types et les taux de prevalence des comportements agressifs chez une population de six unités psycho-gériatriques. Ils ont

découvert que les comportements verbaux agressifs sont, dans leur ensemble, plus répandus que les comportements physiques agressifs. Cette prépondérance de 1'agitation verbale est aussi mise en relief par Bélanger (1993) qui a mené une recherche dans quatre centres d'hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) de la ville de Québec auprès de 489 résidents. Les taux de prévalence rapportés sont de 59,1% contre 44,6% pour 1'agitation physique. L'agitation verbale était manifestée deux fois plus souvent sans agressivité

qu'avec agressivité (55% contre 27,2%). L'étude de Beauchesne et al. (1997), effectuée auprès de 2913 résidents âgés, vient corroborer cette dernière observation en indiquant que la prévalence de 1'agitation verbale non agressive est plus de deux fois supérieure à celle de 1'agitation verbale agressive.

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1.6 Impact

L'importance du phénomène comporte des conséquences non négligeables. En communauté, la manifestation d'agitation verbale est reconnue comme étant un problème majeur pour la personne âgée démente ou non et ceux qui en prennent soin

(Cohen-Mansfield, & al., 1995). Elle compte même parmi les principales raisons conduisant un aidant naturel à

institutionnaliser la personne âgée agitée (Teresi, & al, 1997). Pour la personne âgée vivant en hébergement, les

comportements verbaux agités ont un impact sur la qualité et la quantité de ses relations interpersonnelles en éloignant d'elle les autres résidents qui la trouvent désagréable et en espaçant les visites des membres de sa famille (Rosby, & al·., 1992).

Ils peuvent aussi être préjudiciables à la qualité des soins qui lui sont dispensés en incitant les membres du personnel à éviter la personne agitée, à restreindre le temps accordé à ses soins ou à demander d'être affectés à d'autres résidents

(Rosby, & al., 1992). La manifestation d'agitation verbale peut aussi provoquer 1'utilisation excessive de contentions physiques et de traitements pharmacologiques (Cohen-Mansfield, Werner, & Marx, 1990) .

Les comportements verbaux agités ont aussi des conséquences économiques non négligeables en menant à

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personnel soignant (Chrisman, Tabar, Whall, & Booth, 1991). C'est donc dire qu'ils représentent une source de détresse

importante pour les professionnels de la santé. Étant donné la forte prévalence et le caractère agressant de 1'agitation

verbale, beaucoup de pression repose sur le personnel qui doit tenter de réprimer ces comportements indésirables.

Malheureusement, ces derniers résistent aux interventions mises en place et sont donc très difficiles à gérer (Kolanowski,

1999). Conséquemment, 1'agression verbale et les cris ressortent parmi les comportements les plus dérangeants en CHSLD (Whall, Gillis, Yankou, Booth, & Beel-Bates, 1992).

Hallberg et Norberg (1990) ont voulu explorer les

sentiments du personnel face à ce type de comportements. Les soignants décrivent 1'expérience de prodiguer des soins à une personne démente agitée verbalement comme étant souvent

frustrante et exigeant énormément de patience. Certains

avouent même qu'ils s'obligent parfois à passer outre les cris ou les demandes répétitives en faisant la sourde oreille. Même, si ignorer un résident présentant de 1'agitation verbale est une situation extrême, voire rare, elle est tout au moins inquiétante pour le bien-être de nos aînés. Elle l'est

d'autant plus que plusieurs auteurs, sur la base des facteurs associés à la présentation de 1'agitation verbale, tendent à concevoir sa manifestation comme une réponse naturelle

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besoin insatisfait, de 1'inconfort, de la douleur (Algase, & al., 1996; Cohen-Mansfield, Marx, & Werner, 1992; Edberg, Sandgren, & Hallberg, 1995; Hallberg, Edberg, Nordmark, Johnsson, & Norberg, 1993).

1.7 Facteurs associés

Plusieurs études, pour la plupart corrélationnelles, se sont attardées à dégager les facteurs associés à la

manifestation de !,agitation verbale. Ainsi, les comportements verbaux agités sont plus fréquents chez les femmes (Cohen-

Mansfield, Marx, & Werner, 1992; Jackson, & al., 1989) et chez les personnes ayant un degré de dépendance fonctionnelle élevée pour !,accomplissement des activités de la vie quotidienne

(AVQ) (Cariaga, & al., 1991; Cohen-Mansfield, Werner, & Marx, 1990; Jackson & al., 1989; Hallberg, Norberg, & Erikson,

1990a). De plus, les personnes souffrant de plusieurs maladies physiques et donc, ressentant probablement de la douleur ou de 1'inconfort, sont davantage enclines à manifester de

!,agitation verbale (Cohen-Mansfield, Werner, & Marx, 1990; Cohen-Mansfield & Werner, 1997). La présence de troubles du sommeil et de dépression sont aussi des facteurs importants à considérer (Cariaga, & al., 1991; Cohen-Mansfield, Marx, & Werner, 1992).

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Par ailleurs, différents auteurs ont exploré la relation existant entre la manifestation d׳ agitation verbale et la présence de déficits cognitifs. Cette relation demeure toutefois inconsistante. Ainsi, Näsman, Bucht, Eriksson et Sandman (1993), dans une étude menée auprès de 1350 résidents d'établissements de soins de longue durée de Suède, n'ont pas trouvé de lien significatif entre les comportements verbaux agités et la présence de démence. La proportion de gens

atteints de démence dans 1'échantillon n'est pas mentionné. De même, Cohen-Mansfield et Werner (1998), ont observé 1'évolution des comportements verbaux agités sur deux ans chez 104

participants fréquentant des centres de jour. Soixante-dix pourcent d'entre eux étaient atteints de démence. Ils ont observé que la fréquence d'agitation verbale non agressive est relativement constante dans le temps contrairement à la

fréquence de 1'agitation verbale agressive qui devient plus importante. Cependant, les auteurs émettent la réserve qu'une étude longitudinale s'étalant sur deux années n'est

probablement pas suffisante pour observer des changements significatifs au niveau de la détérioration cognitive et conséquemment, de la fréquence d'agitation verbale.

D'autres études ont cependant révélé des résultats

contraires en établissant que 1'agitation verbale se retrouve chez les personnes ayant davantage d'atteintes cognitives

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comparativement aux autres résidents des lieux d'hébergement (Burgio, Scilley, Hardin, Hsu & Yancey, 1996; Cariaga, & al., 1991; Jackson, & al. 1989). Ainsi, Burgio et al. (1996) ont conclu qu'une plus grande fréquence et une plus longue durée de manifestation de 1'agitation verbale sont corrélées à un

fonctionnement cognitif particulièrement affaissé.

La difficulté d'établir une relation claire entre

1 ' agitation verbale et le fonctionnement cognitif relève peut- être du fait qu'elle soit davantage curvilinéaire que linéaire. En effet, Cohen-Mansfield, Marx et Rosenthal (1990) notent que la fréquence de comportements verbaux agités non agressifs est plus élevée en présence d'atteintes cognitives modérées, i.e. chez les gens obtenant un score moyen de trois sur sept à la version modifiée du Brief Cognitive Rating Scale (BCRS). La fréquence diminuerait alors en fonction d'un score plus élevé ou plus bas que trois. De plus, la force de la relation entre 1 ' agitation verbale et le fonctionnement cognitif peut aussi dépendre du type de comportements observés. Ainsi, Cohen- Mansfield, Werner et Marx (1990) ont rapporté que certains comportements verbaux agités (tels les cris) sont liés à la présence de déficits cognitifs alors que d'autres le sont moins

(tels les plaintes et les demandes d'attention). Dans le dernier cas, des habiletés langagières relativement préservées

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sont nécessaires à leur manifestation, ce qui correspond à un meilleur fonctionnement cognitif.

1.8 Modèles explicatifs

Plusieurs modèles ont été proposés afin d'expliquer le phénomène (Cohen-Mansfield & Werner, 1997). Le premier modèle avance que 1'agitation verbale découle de dommages

neurologiques associés à la maladie d'Alzheimer ou autres causes de la démence. Ces changements organiques,

lorsqu'affectant les régions frontales ou sous-corticales du cerveau, provoqueraient une certaine désinhibition ou

activeraient 1'action de crier (Appel, Kertesz, & Fisman, 1982; Botez, 1996). La théorie de 1'apprentissage opérant a aussi été mise de l'avant. Selon cette théorie, les comportements verbaux agités sont renforcés à la moindre attention reçue. La réaction, positive ou négative, de 1'entourage immédiat face à ces comportements agirait comme un renforçateur puissant.

Quelques études sur la gestion des vocalisations excessives rapportent d'ailleurs !'utilisation d'une méthode

d'intervention de nature comportementale (Birchmore & Claque, 1983; Christie & Ferguson, 1988).

Selon un troisième modèle, les comportements verbaux agités sont le résultat d'une privation sensorielle et d'une isolation sociale. Cette situation serait tributaire de

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1'inhabilité grandissante de la personne démente à interagir avec son environnement de même que du style de vie souvent monotone des milieux d'hébergement. En ce sens, Cohen- Mansfield et Werner (1997) notent que le fait de crier est

souvent relié à celui d'être seul et à un manque d'activités structurées. La manifestation d'agitation verbale servirait alors un but d'auto-stimulation. En accord avec cette

hypothèse, la présence d'une stimulation sensorielle, telle la musique, semble diminuer la manifestation de désordres du

comportement et en particulier, la manifestation des

vocalisations excessives (Birchmore & Claque, 1983; Goddaer & Abraham, 1994).

Un quatrième modèle d'importance est celui élaboré par Algase et ses collaborateurs (1996) qui croient que les

comportements d'agitation découlent d'une volonté d'atteindre un but ou d'exprimer un besoin. D'un point de vue objectif, les comportements d'agitation apparaissent souvent dérangeants, non appropriés voire même dysfonctionnels. Néanmoins, il se peut que l'agitation constitue la réponse la plus sensée et la plus intégrée pouvant être donnée par la personne démente en tenant compte de la préservation limitée de sa personnalité, de ses habiletés antérieures ainsi que des contraintes, des défis ou supports imposés par 1'environnement. Selon ce rationnel, les vocalisations excessives traduisent une difficulté de plus

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en plus marquée à bien exprimer un état immédiat, un besoin ou même une crainte et sont exacerbées chez les gens rendus

inhabiles à communiquer (Algase, & al., 1996; Cohen-Mansfield, Marx, & Werner, 1992; Cohen-MansfieId & Werner, 1997). Par exemple, en présence de conditions physiques désagréables comme lors d'un bain trop chaud, les cris serviraient à attirer

1'attention sur 1'inconfort de la situation. Ce modèle apparaît particulièrement intéressant dans la mesure où les comportements verbaux agités deviennent significatifs. Selon cette perspective, le caractère plutôt inadéquat de 1'agitation verbale en tant que moyen de communication peut être interprété à la lumière de la détérioration du langage survenant au cours du processus démentiel.

1.9 Détérioration du langage

Le langage est l'un des quatre domaines cognitifs à

considérer dans 1'établissement d'un diagnostic de démence, la mémoire devant nécessairement être déficitaire (American

Psychiatrie Association, 1994). Bien que les troubles du langage ne soient pas d'emblée présents, ils comptent souvent parmi les indices précurseurs de ce processus pathologique

dégénératif (Emery, 1986; Hart, 1988). Cependant, les déficits langagiers observés dans la démence de type Alzheimer ne sont pas entièrement identiques à ceux présents dans les démences

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vasculaires. En effet, dans ce dernier cas, ils reflètent davantage 1'hétérogénéité fonctionnelle des régions cérébrales touchées (Botez, 1996). Les changements linguistiques

survenant au cours de la démence de type Alzheimer suivent, quant à eux, un patron de détérioration un peu plus homogène

(Cardebat, Démonet, Fuel, Nespoulous, & Rascol, 1991). Leur fréquence dépend de la sévérité de la démence, allant de 36% à 100% pour les cas légers et sévères, respectivement (Faber- Langendoen, & al., 1988). Les prochains paragraphes décrivent brièvement les désordres pouvant affecter les sphères réceptive et expressive du langage dans la démence de type Alzheimer.

Au niveau de la sphère réceptive, la compréhension verbale auditive d'items impliquant des niveaux d'abstraction élevés

(inférences, comparatifs, relations causales) devient

rapidement problématique (Appell, & al., 1982). En ce sens, la personne démente a beaucoup de mal à saisir les pointes

d'humour ou de sarcasme, les analogies et les anecdotes (Lee, 1991). Toutefois, la compréhension auditive d'items concrets

(commandes et questions simples) s'avère généralement maintenue jusqu'à un stade modérément avancé de la maladie (Cardebat, & al., 1991). Il en est de même pour la capacité de lire des mots à voix haute (Hart, Smith, & Swash, 1986). Par contre, la signification du matériel écrit n'est pas d'emblée comprise. Cette dissociation entre la lecture à voix haute et la

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compréhension en lecture pourrait apparaître assez tôt dans le processus démentiel (Hart, 1988).

Au niveau de la sphère expressive, la relative

préservation des habiletés phonologiques et syntaxiques jusqu'à un stade avancé de la maladie, en opposition à des déficits d'ordre sémantique, demeure un trait propre à la détérioration du langage dans la démence de type Alzheimer. Le manque du mot

(ou anomie), défini comme une difficulté à trouver le mot juste, compte parmi ces déficits sémantiques (Martin & Fedio, 1983) et apparaît vraisemblablement dès le début de la maladie

(Appell, & al., 1982; Bayles, Tomoeda, & Trosset, 1992; Hier, Hagenlocker, & Shindler, 1985). Cette anomie se traduit par le remplacement des mots propres par des termes généraux ou des périphrases. La fluence verbale est aussi réduite rendant par

le fait même le discours de la personne démente de moins en moins dense et spontané (Azuma & Bayles, 1997). Quant à

Γ' expression écrite, elle devient aussi perturbée et peut même être un bon indicateur de la sévérité de l'état démentiel

(Horner, Heyman, Dawson, & Rogers, 1988).

Même si les présentations des déficits et leur sévérité tendent à différer d'un individu à un autre, les personnes

souffrant de démence perdent éventuellement la plupart de leurs facultés langagières. Seules peuvent persister certaines

(28)

ou de politesse). Leur discours se réduit ultimement à des phénomènes d'écholalie et de persévération syllabique (Appell & al.,1982).

1.10 Problématique

Bien que de nombreuses études se soient attardées au lien entre 1'agitation verbale et 1' altération cognitive chez des individus souffrant de démence, aucune d'entre elles n'a évalué de façon spécifique la relation entre 1'agitation verbale et les déficits langagiers. L'existence d'une telle relation n'est encore qu'une hypothèse à ce jour (Algase, & al., 1996 ; Cariaga, & al., 1991 ; Cohen-Mansfield, Werner, & Marx, 1990 ; Cohen-Mansfield & Werner, 1997; Hallberg, & al., 1993;

Ragneskog, Gerdner, Josefsson, & Kihlgren, 1998). Malgré cela, la croyance voulant que 1'agitation verbale soit le reflet

d'une volonté d'expression chez les personnes atteintes de démence apparaît acceptée et véhiculée d'emblée, tant dans la littérature sur le sujet que dans nos milieux d'hébergement.

1.11 But de l'étude

L'objectif de la présente étude est d'explorer s'il existe un lien entre la détérioration du langage et la manifestation d'agitation verbale. Plus particulièrement, cette recherche vise à vérifier si un groupe de personnes âgées atteintes de

(29)

démence et présentant des atteintes langagières sévères

manifestent davantage d'agitation verbale qu'un autre groupe de personnes âgées atteintes de démence ayant des habiletés

langagières relativement préservées.

1.12 Méthodologie

Le premier chapitre du mémoire consiste en une

introduction aux différents concepts relatifs au domaine

d'étude. La pertinence et les objectifs de la recherche sont aussi abordés. Le deuxième chapitre est présenté sous forme d'article scientifique et représente le corps du mémoire. L' article décrit la problématique en jeu, les objectifs de

l'étude, la méthode employée de même que les résultats obtenus. La discussion de ces résultats fait ensuite office de

conclusion à 1'article. Finalement, la dernière partie du mémoire résume les principales étapes de la recherche de même que ses limites et propose des directions à suivre pour les recherches à venir.

(30)

L'agitation verbale : moyen de communication dans la démence?

(31)

L1 agitation verbale :

moyen de communication dans la démence?

Evelyne Matteau, BA. 1 Philippe Landreville, Ph.D. 1

Louis Laplante, Ph.D. 2

1. École de psychologie, Université Laval, Cité Universitaire, Québec, G1K 7P4. Téléphone : (418) 656-2131

(poste 3024) . Télécopieur : (418) 656-3646.

Courrier électronique : philippe.landreville@psy.ulaval.ca.

2. Clinique Roy-Rousseau, Centre hospitalier Robert-Giffard, 2601 Chemin de la Canardière, Beauport, Québec, G1J 2G3. Téléphone : (418) 663-5000 (poste 4104) . Télécopieur : (418) 666-9416.

Mots clés : agitation verbale, démence, langage, personnes âgées.

(32)

Résumé

L'agitation verbale (AV) est souvent identifiée comme un phénomène particulièrement problématique dans les milieux d'hébergement pour personnes âgées. L 'AV renvoie à des comportements verbaux ou vocaux répétitifs, dérangeants ou non appropriés au contexte. Les connaissances actuelles suggèrent que l'AV soit un moyen d'expression chez les gens ne disposant pas des compétences langagières nécessaires à une communication efficace. Afin de vérifier cette hypothèse, cinquante-neuf participants sont recrutés dans six centres d'hébergement et sont répartis en deux groupes : l'un ayant des habiletés langagières préservées (HLP), l'autre ayant des habiletés langagières altérées (HLA). Les groupes sont comparés sur la fréquence de manifestation d'AV. Les résultats montrent que le groupe HLA présente une plus grande fréquence d'AV que le groupe HLP et qu'il manifeste un registre plus étendu de comportements verbaux agités. Les résultats sont interprétés en fonction de la détérioration du langage occasionnée par la démence.

(33)

Abstract

Verbal agitation (VA) constitutes a real problem in geriatric nursing homes. VA refers to verbal or vocal behaviors that are either repetitive, disruptive or socially inappropriate to the situations in which they are manifested. Current knowledge suggests that VA could be seen as a way to communicate with others among people who suffer from language limitations. In an attempt to verify this hypothesis, fifty- nine participants are recruited from six different nursing homes to form two groups : one gathering people with preserved language skills (PLS) and the other gathering people with altered language skills (ALS). They are compared on the frequency of verbally disruptive behaviors. Results show that ALS present verbal agitation at a higher frequency than PLS. They also present a wider range of verbally disruptive behaviors. Results are interpreted in function of impaired communication in dementia.

(34)

Introduction

La démence constitue le désordre neurologique affectant le plus la population âgée (Daly, 1999). Bien qu'un état

démentiel soit attribuable à différentes conditions médicales (troubles vasculaires, maladie de Parkinson), la maladie

d'Alzheimer demeure la cause la plus répandue. Au Canada, elle affecte au moins 1% des individus âgés de 65 à 74 ans et près de 26% des individus âgés de plus de 85 ans. Nonobstant l'âge, elle touche deux fois plus de femmes que d'hommes (Groupe de Travail de 1'Étude sur la Santé et le Vieillissement au Canada, 1994) . Cliniquement, la démence de type Alzheimer (DTA) est caractérisée par une dégradation massive des capacités

mnésiques et d'au moins une autre fonction cognitive telle 1'attention, le langage, les gnosies, les praxies, et les habiletés dites «exécutives». Par le fait même, cet

affaissement des ressources intellectuelles vient entraver significativement la réalisation des activités de la vie quotidienne (American Psychiatrie Association, 1994).

Toutefois, les atteintes s'étendent bien au-delà des

fonctions cérébrales supérieures. En effet, des changements au niveau de la personnalité et du comportement surviennent tout au cours du processus démentiel (Reisberg, Franssen, Sclan, Kluger, & Ferris, 1989) et sous diverses formes. Errance, anxiété, dépression, délire, méfiance, hallucinations et agitation sont autant de symptômes comportementaux de la démence (Gilley, Wilson, Bennett, Bernard, & Fox, 1991;

(35)

agités ou agressifs apparaît particulièrement déterminante dans la gestion de la démence puisqu'ils incitent les aidants

naturels à institutionnaliser le patient (Schulz, O'Brien, Bookwala, & Fleissner, 1995). Ils peuvent être verbaux ou physiques, agressifs ou non agressifs (Cohen-Mansfield, Werner, Watson, & Basis, 1995).

L'agitation verbale (AV) renvoie particulièrement à des comportements verbaux ou vocaux qui sont répétitifs,

dérangeants ou non appropriés aux circonstances dans lesquelles ils sont commis (Cohen-Mansfield, Marx, & Rosenthal, 1989).

L'AV peut prendre différentes formes telles que les plaintes et questions répétées, les demandes constantes d'attention, les cris, les sacres et les grognements (Cohen-Mansfield & Werner, 1994), et elle peut être de nature agressive ou non agressive

(Cohen-Mansfield, & al., 1995). Une distinction peut aussi être formulée selon que 1'activité vocale est à prépondérance verbale ou non verbale (Sloane, Davidson, Knight, Tangen, & Mitchell, 1999) .

La prevalence de l'AV est considérable bien

qu'inconsistante d'une recherche à l'autre. La disparité des définitions, des méthodes employées de même que des populations étudiées expliquent cette variabilité des résultats et limite les comparaisons possibles entre les études (Lai, 1999). Chez les personnes âgées vivant en communauté, les taux de

prévalence diffèrent selon le type de comportement mesuré.

Parmi les plus répandus se retrouvent les cris, les pleurs, les discours accusateurs ou hostiles et les demandes ou questions

(36)

répétées dans une proportion variant de 6% à 83% (Baumgarten, Becker, & Gauthier, 199 0; Devanand, & al., 1992 ; Hamel, & al.,

1990; Molloy, Mcllroy, Guyatt, & Lever, 1991). Dans les

établissements d'hébergement, les taux de prévalence rapportés varient en fonction de la méthode utilisée. Ainsi, les

comportements verbaux agités peuvent être étudiés dans leur ensemble, de façon indépendante ou en comparaison avec d1 autres types d1 agitation. D'une façon ou d'une autre, les

comportements verbaux agités apparaissent plus répandus que les comportements physiques agités et leur prévalence oscille entre 10% et 60% (Bélanger, 1993 ; Beauchesne, & al., 1997; Cariaga, Burgio, Flynn, & Martin, 1991; Cohen-Mansfield, Werner, & Marx, 1990; Friedman, Gryfe, Tal, & Freedman, 1992 ; Hallberg,

Norberg, & Erikson, 1990a; Ryan, Tainsh, Kolodny, Lendrum, & Fisher, 1988) .

La manifestation d'AV comporte d'importantes conséquences psychologiques, sociales et économiques. Ainsi, elle menace la qualité des relations interpersonnelles de la personne agitée de même que la qualité des soins qui lui sont offerts (Rosby, Beck, & Heacock,1992). Elle contribue aussi à augmenter

1'anxiété et 11 agitation chez les autres résidents vivant à proximité de la personne agitée verbalement (White, Kaas, & Richie, 1996) . Ultimement, l'AV conduit à 11 absentéisme et même à 1'épuisement professionnel du personnel soignant en milieu d1 hébergement qui éprouvent une grande difficulté à

gérer les comportements verbaux agités (Chrisman, Tabar, Whall, & Booth, 1991).

(37)

De multiples recherches ont été menées afin d1 identifier les variables associées à l'AV. Cependant, la plupart d'entre elles sont de nature corrélationnelle et ne permettent donc pas d'inférence causale. Il en ressort néanmoins que le portrait- type de la personne âgée manifestant de l'AV est une femme ayant un degré de dépendance fonctionnelle élevé pour

1'accomplissement des activités de la vie quotidienne (AVQ) et souffrant de plusieurs maladies physiques, de troubles du

sommeil ou de dépression (Cariaga, & al., 1991 ; Cohen-

Mansfield, Marx, & Werner, 1992 ; Cohen-Mansfield, Werner, & Marx, 1990 ; Jackson & al., 1989 ; Hallberg, Norberg, &

Erikson, 1990a).

De nombreux modèles théoriques ont également été avancés afin d'apporter une compréhension du phénomène (Cohen-Mansfield & Werner, 1997). Le premier propose que l'AV découle de

dommages neurologiques associés à la maladie d'Alzheimer ou autres démences qui induisent une certaine désinhibition ou activent 1'action de crier (Appel, Kertesz, & Fisman, 1982; Botez, 1996). Le deuxième modèle repose sur la théorie de 1'apprentissage opérant. Selon cette théorie, les

comportements verbaux agités se trouvent renforcés à la moindre attention reçue, qu'elle soit de nature positive ou négative. Un troisième modèle stipule que les comportements verbaux agités sont le résultat d'une privation sensorielle et d'un isolement social. Cette situation dépendrait, d'une part, de 1'inhabilité croissante de la personne démente à interagir avec son environnement et, d'autre part, du style de vie souvent

(38)

monotone des milieux d1 hébergement (Cohen-Mansfield & Werner, 1997).

Un quatrième modèle d1 importance est celui élaboré par Algase et ses collaborateurs (1996) - qui se veut une intégration de 1'ensemble des connaissances empiriques et cliniques portant sur les comportements d'agitation. L'objectif poursuivi par les auteurs est de procurer un cadre aux recherches futures en permettant de mieux identifier et contrôler les facteurs

pertinents à l'étude du phénomène. Selon ce modèle, l'AV

constitue la réponse la plus sensée et la plus intégrée pouvant être donnée par la personne démente en tenant compte de la

préservation limitée de sa personnalité et de ses habiletés antérieures ainsi que des contraintes, des défis ou supports imposés par 1'environnement. Même si certains comportements comme les cris, les questions ou les demandes d'attentions répétées peuvent parfois sembler dysfonctionnels et interférer avec les routines de soins, ils constitueraient un moyen

d'expression, en particulier chez les gens rendus inhabiles à communiquer (Algase, & al., 1996). De ce point de vue, les comportements verbaux agités deviennent significatifs et peuvent être interprétés à la lumière de la détérioration du langage survenant au cours du processus démentiel.

Parallèlement à un déficit de la mémoire, les troubles du langage apparaissent souvent comme symptômes précurseurs de la DTA et deviennent plus fréquents au fur et à mesure que la maladie progresse (Caramelli, Mansur, Nitrini, 1998 ; Hart, 1988). Alors que les désordres langagiers présents dans les

(39)

démences vasculaires reflètent davantage 1'hétérogénéité fonctionnelle des régions cérébrales touchées (Botez, 1996), les changements linguistiques survenant au cours de la DTA suivent, quant à eux, un patron de détérioration un peu plus homogène. Trois phases évolutives peuvent généralement être dégagées (Bayles, 1994 ; Cardebat, Démonet, Fuel, Nespoulous, & Rascol, 1991 ; Hart, 1988). En début d'évolution, le langage est surtout marqué par des manques du mot (anomie) se

traduisant par !'utilisation de termes généraux et imprécis. La compréhension orale d'informations nouvelles ou de

situations exigeant une capacité d1 abstraction élevée (humour, ironie, analogie) s'avère quelque peu touchée de même que la compréhension écrite et 1'écriture. Les aspects phonétiques, phonémiques et syntaxiques du langage sont, quant à eux,

préservés de même que les capacités de répétition et de lecture à voix haute. À un stade plus avancé, la production du

discours apparaît fragmentée indiquant une atteinte plus importante des capacités sémantiques et syntaxiques. Le problème d'anomie devient beaucoup plus évident alors que 1'écriture et la compréhension orale et écrite se dégradent. En fin d'évolution, toutes les fonctions linguistiques sont affectées avec en avant-plan, une pauvreté de 1'expression orale marquée et de sévères problèmes de compréhension. L'altération de la fonction langagière occasionnée par la démence pourrait donc vraisemblablement avoir une incidence dans 1'apparition de comportements verbaux agités en rendant ardue la moindre tentative de verbalisation, d'interaction avec

(40)

1'entourage (Algase, & al., 1996). Les efforts de

communication déployés sembleraient alors non appropriés et pourraient, aux yeux d'un observateur, être perçus comme de 1'agitation verbale.

Bien que de nombreuses études se soient attardées aux liens existant entre l'AV et 1'altération cognitive chez des individus souffrant de démence, aucune d'entre elles n'évalue de façon spécifique la relation entre l'AV et les déficits langagiers. L'existence d'une telle relation, bien que

véhiculée abondamment dans la littérature, n'est encore qu'une hypothèse avancée par certains groupes d'auteurs (Algase, & al., 1996 ; Cariaga, & al., 1991 ; Cohen-Mansfield, Werner, & Marx, 1990 ; Cohen-MansfieId & Werner, 1997; Hallberg, Edberg, Nordmark, Johnsson, & Norberg, 1993; Ragneskog, Gardner,

Josefsson, & Kihlgren, 1998). De plus, Beck et Vogelpohl (1999) déplorent que trop de chercheurs élaborent des moyens d'intervention sans considérer la ou les causes sous-jacentes au comportement ciblé par ces interventions. Selon ces

auteurs, les assises théoriques sur lesquelles repose la

compréhension du phénomène de l'AV gagneraient à être étayées davantage. De leur côté, Algase et al. (1996) recommandent d'examiner les relations entre les habiletés langagières et certains types de vocalisations, tout en contrôlant les facteurs environnementaux jugés importants. La mise en évidence d'une relation entre des déficits au niveau de la communication et la manifestation d'AV revêt une importance clinique considérable parce qu'elle suggérerait que de tels

(41)

comportements, en apparence aléatoires, servent une fonction, une intention particulière. Si tel est le cas, il nous

faudrait alors considérer que les personnes atteintes de démence présentent des comportements verbaux agités dans

1'intention de nous dire quelque chose, de nous manifester un besoin, un désir, une souffrance émotionnelle ou physique bien réelle.

L'objectif principal de la présente étude est d'explorer les liens existant entre la détérioration du langage et la

manifestation d'AV. Plus particulièrement, elle vise à étudier s'il existe une différence entre les personnes âgées atteintes de démence et vivant en milieu d'hébergement ayant des

habiletés langagières relativement adéquates et celles dont les habiletés langagières sont très affectées quant à la fréquence de 1'agitation verbale et quant au nombre de comportements distincts manifestés. Les différences pouvant exister entre ces deux groupes en fonction de la fréquence de manifestation de chacun des comportements verbaux agités étudiés seront aussi explorées.

Méthode Participants

Le recrutement des participants s'est effectué auprès de six centres d'hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) de la région de Québec (n=2) et de la Mauricie (n=4). Afin d'être inclus dans l'étude, les participants devaient répondre aux critères suivants : a) avoir un diagnostic principal de

(42)

démence (Alzheimer, vasculaire ou mixte) inscrit au dossier médical ; b) résider depuis plus de trois mois au lieu

d1 hébergement actuel ; et c) être capable de vocalisations. Les sujets ont été sélectionnés selon qu'ils avaient, d'après 1'opinion des membres du personnel, des habiletés langagières préservées (HLP) ou des habiletés langagières altérées (HLA). La description du groupe HLP référait à tout individu capable de s'exprimer par des propos cohérents, de tenir une

conversation ou de comprendre les consignes qui lui sont

données. La description du groupe HLA référait, quant à elle, à tout individu ayant un manque du mot évident, tenant des propos plus ou moins cohérents et sans rapport au contexte,

inventant parfois de nouveaux mots et pouvant avoir un vocabulaire limité et certains troubles d'élocution.

L'assignation aux groupes a été validée par une évaluation psychométrique du langage pour tous les participants. Le

groupe HLP était finalement constitué des participants ayant échoué quatre sous-tests ou moins au «Functional Linguistic Communication Inventory» (FLCI ; Bayles & Tomoeda, 1994) alors que le groupe HLA était formé de ceux ayant échoué six sous- tests ou plus au même test. Le critère d'échec a été déterminé en tenant compte des résultats obtenus aux différents sous- tests par les sujets de l'étude originale de normalisation du FLCI. Ainsi, le score-limite a été fixé à 60% pour chacun des sous-tests puisqu'il semble bien distinguer, d'un point de vue clinique, les personnes ayant des atteintes légères à modérées

(43)

des personnes ayant des atteintes modérément sévères à très sévères.

Au départ, 87 participants ont été sélectionnés. De ceux- ci, 20 ont été exclus de l'étude à cause a) d'un accident

vasculaire cérébral survenu entre 1'évaluation du langage et de 1'agitation verbale (n=l), b) d'une surdité ou d'une cécité trop avancée (n=4), c) du non consentement du mandataire légal

(11=5) , d) de la non collaboration du participant (n=6) , et e) d'une incapacité à lire et à écrire (11=3) . Un autre

participant a été retiré en raison d'un score d'AV se démarquant de façon extrême comparativement à la moyenne

obtenue par son groupe. Les personnes ayant réussi/échoué cinq sous - tests au FLCI ont, elles aussi, été éliminées (11=7) . Au total, 59 participants ont été retenus, soient 29 (8 hommes et 21 femmes) pour le groupe HLP et 30 (6 hommes et 24 femmes) pour le groupe HLA.

Instruments de mesure

Habiletés langagières. L'évaluation psychométrique de la fonction langagière s'est effectuée au moyen d'une version française du FLCI. Le FLCI a été élaboré afin d'évaluer les effets d'un processus démentiel modérément avancé sur la communication fonctionnelle. L'instrument évalue 10

composantes du langage par le biais d'un même nombre de sous- tests : a) Salutation et identification (SI), b) Questions à réponses (QR), c) Écriture (E), d) Compréhension de signes et Association d1objets-à-images (CS/AOI), e) Lecture de mots et

(44)

commandes verbales (ECV), h) Pantomimes (P), i) Gestes (G), et j) Conversation (C). Le FLCI possède une bonne validité de critère et sa fidélité test-retest a été démontrée (Bayles & Tomoeda, 1994).

Agitation verbale. La fréquence de manifestation de l'AV a été évaluée au moyen de 1'Inventaire d'Agitation de Cohen- Mansfield (IACM ; Deslauriers, Landreville, Dicaire, &

Verreault sous presse), la version française du «Cohen- Mansfield Agitation Inventory» (Cohen-Mansfield, Marx, & Rosenthal, 1989). L1IACM comprend 29 items cotés sur une échelle de type Likert mesurant la fréquence de chacun des comportements présentés. L'échelle varie de 1- ne manifeste, jamais le comportement à 7- manifeste le comportement en

moyenne plusieurs fois par heure. Pour les besoins de l'étude, les huit items concernant spécifiquement 1'agitation verbale ont été considérés, soient les blasphèmes, les complaintes, les demandes constantes d'attention, le négativisme, les questions ou phrases répétées, les cris, les bruits étranges et les

avances sexuelles verbales. Le score peut donc varier de 8 à 56. La sélection des items découle d'une étude menée par Cohen-Mansfield, Marx et Rosenthal (1989) dans laquelle des analyses factorielles ont dégagé trois solides facteurs soient les comportements agressifs, les comportements physiques non agressifs et 1'agitation verbale. Les qualités psychométriques de la version française ont été démontrées (Deslauriers, & al., sous presse).

(45)

Sévérité de la démence. Le degré de sévérité de la démence a été évalué au moyen de 1'Échelle d'Évaluation des Démences de Reisberg (EEDR ; Bélanger, 1993), la version

française du «Functional Assessment Staging» (Reisberg, Ferris, & Fransson, 1985) . L'échelle comporte sept niveaux

représentant le niveau d'atteinte fonctionnelle associée à la détérioration cognitive, le premier décrivant un fonctionnement normal et le septième indiquant un état démentiel profond. La fidélité inter-juges du FAST et sa validité ont été établies

(Reisberg, & al., 1985).

Incapacité. Le degré d'incapacité dans les activités de la vie quotidienne (AVQ) a été vérifié par le Système de Mesure de 1'Autonomie Fonctionnelle (SMAF ; Hébert, Carrier, &

Bilodeau, 1988). Cet instrument mesure les incapacités pour cinq aspects dont les AVQ. Les activités évaluées sont se

nourrir, se laver, s'habiller, entretenir sa personne, utiliser les toilettes, et les fonctions vésicale et intestinale.

L'échelle de mesure s'étale sur quatre niveaux allant de 0- autonome à 3־- dépendant. Hébert et al. (1988) ont confirmé la validité concomitante et de construit de 1'instrument.

Desrosiers, Bravo, Hébert, et Dubuc (1995) rapportent un accord inter-juges satisfaisant pour la sous-échelle AVQ.

Dépression. La présence d'un diagnostic de dépression a été déterminée en consultant le dossier médical de chacun des participants. De plus, en complément à cette information, le nombre de fois que chacun des participants a pleuré et/ou

(46)

exprimé de sérieux sentiments de tristesse au cours de la dernière semaine a été recueilli auprès du personnel soignant.

Troubles du sommeil. Cette variable a également été déterminée en consultant le dossier médical de chacun des

participants. En complément à cette information, le nombre de fois que chacun des participants a pris beaucoup de temps à s'endormir et/ou est resté(e) éveillé(e) pendant la nuit et/ou s1 est réveillé(e) à une heure très matinale au cours de la dernière semaine a aussi été recueilli auprès du personnel soignant.

Douleur. La présence de douleur ou d'une souffrance

physique a été évaluée en considérant deux facteurs indiqués au dossier médical soient le nombre de diagnostics physiques

autres que celui de démence et la prise quotidienne d'un analgésique.

Procédure

Le consentement verbal et écrit a d'abord été sollicité auprès du représentant légal de chacun des participants. Le consentement regardait principalement 1'évaluation des

habiletés langagières du participant ciblé, le questionnement des membres du personnel impliqué dans son plan de traitement et de soins ainsi que la consultation de son dossier médical. Suite à cet accord, différentes informations ont été

recueillies à partir du dossier médical soient l'âge, le sexe, la scolarité, la date d'admission au lieu d'hébergement actuel, la présence d'un diagnostic de dépression ou de troubles du sommeil, le nombre de diagnostics physiques (autres que celui

(47)

de démence) et la prise quotidienne d'un analgésique.

L1 évaluation du langage a ensuite été effectuée par le premier auteur (E.M.), évaluation qui durait environ 30 minutes. Les participants étaient alors assignés à l'un des deux groupes expérimentaux ou retirés selon les critères mentionnés

précédemment. Deux membres ou plus du personnel soignant de jour (infirmier auxiliaire ou préposé aux bénéficiaires) qui connaissaient le mieux chacun des bénéficiaires ciblés ont été désignés pour compléter conjointement 1'IACM, 1'EEDR et le SMAF. Ils ont ensuite été rencontrés afin que leur soient expliqués en détails chacun des questionnaires. Une feuille présentant des descriptions et des exemples pour tous les items de 1'IACM était fournie. Le personnel soignant a eu une

semaine pour compléter les trois questionnaires.

Résultats

Toutes les analyses ont été effectuées par le biais du logiciel SPSS, version 10.0, pour Windows. D'abord, les

caractéristiques des participants en fonction des deux groupes à l'étude sont examinées. Ensuite, dans le but de contrôler 1'influence possible de variables confondantes sur les

résultats, différents tests statistiques sont effectués sur les variables jugées pertinentes. Des analyses de covariance sont alors calculées pour la fréquence de manifestation d'AV et le nombre total de comportements verbaux agités présentés.

(48)

manifestation de chacun des comportements verbaux agités considérés sont explorées.

Caractéristiques des participants

Le tableau 1 résume les caractéristiques des participants selon le groupe d1 appartenance.

Insérer tableau 1 ici

Chacun des groupes de la présente étude présentait un patron de performance bien distinct au test évaluant le

langage. La figure 1 montre le résultat moyen obtenu par les deux groupes pour chacun des sous-tests du FLCI. Un test t pour échantillons indépendants confirme que les deux groupes diffèrent quant au score total moyen obtenu au FLCI (L(57)= 12,68, p<.0001).

Insérer figure 1 ici

Variables confondantes

Dans le but de déterminer si les deux groupes à l’étude étaient équivalents au niveau des variables confondantes, plusieurs tests statistiques ont été menés (alpha = .05).

Étant donné la taille inégale des groupes, !'utilisation d'un test non paramétrique a été privilégiée, d'autant plus lorsque l'une ou l'autre des conditions requises aux tests

paramétriques n'étaient pas rencontrées (distribution normale, homogénéité des variances).

(49)

Ainsi, le Mann-Whitney U a été calculé pour le nombre de diagnostics physiques, le nombre de symptômes reliés à la dépression et aux troubles du sommeil, la sévérité de la démence de même que pour le degré d1 incapacité fonctionnelle. Les résultats ont révélé que le groupe HLP présente

significativement plus de diagnostics physiques que le groupe HLA (11= 291.5, p< .0001) et que ce dernier se situe

généralement à un stade plus avancé de la démence sur 1'échelle de Reisberg que le groupe HLP (11= 195.5, p< .0001) . Le degré d1 incapacité pour les AVQ du groupe HLA est aussi apparu plus élevé que le groupe HLP (11= 204, p< .0001) . Le nombre de symptômes associés à la dépression et aux troubles du sommeil était similaire pour les deux groupes. Finalement, 11 analyse du Chi-Carré a permis de s'assurer que les groupes ne

différaient pas significativement pour le sexe, la présence d'un diagnostic de dépression et de troubles du sommeil au dossier médical ainsi que pour la consommation d'analgésiques. Variable principale

Le tableau 2 présente les moyennes et les écarts-types obtenus au IACM pour les deux groupes à l'étude.

Insérer tableau 2 ici

En premier lieu, une analyse de covariance a été effectuée en incluant les variables qui ont montré une différence

significative entre les groupes soient le degré de

(50)

nombre de diagnostics physiques. Les résultats de cette ANCOVA, présentés au tableau 2, démontrent que le groupe HLA présente des comportements verbaux agités à une fréquence

significativement plus grande que le groupe HLP.

Afin de voir s1 il existe aussi une différence entre les groupes quant au nombre de comportements verbaux agités

manifestés, une seconde analyse de covariance incluant les mêmes covariables a été calculée. Il apparaît que le groupe HLA présente aussi un nombre significativement plus grand de comportements d1 agitation verbale que le groupe HLP.

En dernier lieu, dans un but purement exploratoire, les différences pouvant exister entre les groupes quant à la

fréquence de manifestation de chacun des comportements verbaux agités évalués ont été explorées. Les résultats obtenus par le biais du Mann-Whitney U montrent que les membres du groupe HLA crient (H= 291, p< .01), se plaignent (U= 321, p< .05) et

répètent des phrases/questions (H= 289, p< .05) à une plus grande fréquence que le groupe HLP alors que les différences quant aux comportements «sacrer/agresser verbalement» (11= 330.5, p< .07) et «émettre des bruits étranges» (11= 356, p<

.09) approchent du seuil de signification. Cependant, lorsque soumis à une analyse de covariance incluant les mêmes

covariables que les précédentes analyses, seules les différences pour les comportements «répétition de

phrases/questions» (E(1,59)= 10.337, p< .005) et «se plaindre» (E(1,59)= 2.58, p< .05) demeurent significatives.

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Discussion

Les résultats de la présente étude suggèrent qu'une altération sévère du langage est associée à une plus grande fréquence d1 AV de même qu'à une manifestation d'un registre plus étendu de comportements verbaux agités. En dépit du fait que plusieurs auteurs tendent à considérer 1'AV comme un moyen d'expression, aucune autre recherche n'avait, à notre

connaissance, évalué spécifiquement la relation existant entre la détérioration du langage dans la démence et la manifestation d'AV. Il apparaît alors difficile de comparer nos résultats à ceux issus de recherches similaires. Néanmoins, nos résultats sont en lien avec les conclusions de différents auteurs qui citent les difficultés de communication comme étant reliées à la présence de comportements verbaux agités (Cohen-Mans field, Marx, & Werner, 1992 ; Hallberg, & al., 1993 ; Ragneskog, & al., 1998) . Un parallèle peut aussi être fait entre les présentes observations et celles de Cohen-Mansfield, Marx, & Werner, (1992). En effet, ces auteurs ont démontré que les cris étaient associés à un fonctionnement cognitif

particulièrement affaissé, résultats qui concordent aussi avec le fait que les membres du groupe HLA crient plus souvent que ceux du groupe HLP.

La présente étude vient soutenir le modèle proposé par Algase et al. (1996). Selon ces derniers, différents facteurs prédisposeraient un individu à manifester de 1'AV. Parmi ceux-

ci se trouvent entre autres, la personnalité antérieure et les fonctions compromises par l'état démentiel telles le rythme

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circadien et la cognition (mémoire, attention, langage). Parallèlement, la présence de facteurs dits précipitants viendraient provoquer la manifestation d1AV. Il s'agit ici d1 aspects plus fluctuants dans le temps appartenant à l'état physiologique (la faim, la douleur, la perturbation du

sommeil), à l'état psychologique (des sentiments tristes), à 1 ' environnement physique (le bruit, la température ambiante) ou à 1'environnement social (la stabilité du personnel soignant, les relations avec les autres bénéficiaires).

Selon ce modèle, les vocalisations excessives présentées par une personne atteinte de démence pourraient traduire une difficulté sans cesse grandissante à communiquer. Par exemple, alors qu'elle parvient péniblement à manifester adéquatement un besoin insatisfait, ses multiples tentatives à exprimer ce

besoin résulteraient vite en des questions ou des demandes répétées. De la même façon, la perte de 1'habileté à produire des phrases cohérentes pour exprimer un sentiment ou pour

interagir avec son voisin provoquerait de la frustration et entraînerait des vocalisations d'un volume particulièrement élevé comme les cris (Cohen-Mansfield, Werner, & Marx, 1990) . L'expérience de déficits langagiers constituerait ici un facteur prédisposant à l'AV et la présence d'un besoin non comblé ou d'une volonté d'interaction, un facteur précipitant.

Étant donné que la présente étude a été réalisée auprès de personnes âgées vivant en centre d'hébergement et de soins de longue durée, les résultats comportent des implications non négligeables pour la gestion de l'AV. En prenant conscience

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que les comportements verbaux agités sont possiblement

fonctionnels et intentionnels, ils deviennent significatifs et donc potentiellement utiles pour les membres du personnel.

Même s'ils ne sont pas toujours compréhensibles en soi, ils peuvent signaler un inconfort ou un sentiment de détresse, par exemple. La manifestation d'AV devrait d'emblée inciter les soignants à en rechercher 1'élément déclencheur et à corriger la situation. Il ne faudrait donc pas ignorer l'AV mais bien y porter attention (Cohen-Mansfield, Marx, & Werner, 1992) .

Selon Algase et al. (1996), 1'exploration de facteurs prédisposants peut conduire à 1'élaboration de profils dits «à risque». Tenant compte que la grande majorité des personnes âgées atteintes d'un syndrome démentiel connaîtront ultimement une détérioration massive de leurs habiletés langagières, cette population pourrait donc être vue comme potentiellement à

risque de manifester de l'AV. Considérant cela, le

développement de programmes de traitement qui amélioreraient ou viendraient suppléer aux difficultés de communication s'avère nécessaire. Même si les effets thérapeutiques ne sont que de courte durée, ils permettront tout de même aux personnes

atteintes de conserver plus longtemps certaines habiletés et rendront leurs tentatives de communication moins frustrantes et plus renforçantes. La gestion des comportements d'AV s'en

trouverait facilitée par le fait même. Déjà, quelques études démontrent des résultats satisfaisants (Bourgeois, Burgio, Schulz, Beach, & Palmer, 1997 ; Praderas & MacDonald, 1986). L'utilisation d'une planche sur laquelle se retrouvent des

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dessins significatifs pour la personne âgée vivant en milieu d1 hébergement et pouvant se généraliser à plusieurs situations s'est révélée d'une grande utilité à celle-ci pour exprimer ses besoins (Bourgeois, 1990a). Des thérapies comportementales appliquant un programme de renforcement sont parvenues à augmenter le nombre de tentatives adéquates d'interaction au détriment des autres (Spayd & Smyer, 1988) . Cependant, tenant compte du prix de ces interventions et du contexte actuel de travail dans les établissements de santé, il importe de

maximiser la généralisation et le maintien des effets

thérapeutiques. Les stratégies mises sur pied devraient donc viser particulièrement les habiletés à la communication

fonctionnelles, i.e., celles directement impliquées dans le quotidien, et inclure des renforçateurs à même 11 environnement du patient (Bourgeois, 1991) .

La présente étude visait à répondre à plusieurs lacunes observées dans les recherches menées antérieurement (Lai,

1999). D'abord, le processus de sélection et d'assignation aux deux groupes est bien connu et contrôlé par 11 expérimentateur venant assurer une certaine validité interne à l'étude. Ce

faisant, il est aussi possible d'exercer un meilleur contrôle statistique sur les variables confondantes rapportées dans la littérature (Cook & Campbell, 1979). Le nombre adéquat de participants augmente parallèlement la puissance des analyses effectuées (Kirk, 1995). Par ailleurs, 1'échantillon est

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