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Continuité biologique et ouvrages soumis à marée : le cas de l'anguille européenne les éléments importants pour évaluer et agir

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Academic year: 2021

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Texte intégral

(1)

HAL Id: hal-02601273

https://hal.inrae.fr/hal-02601273

Submitted on 16 May 2020

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Continuité biologique et ouvrages soumis à marée : le

cas de l’anguille européenne les éléments importants

pour évaluer et agir

C. Rigaud

To cite this version:

C. Rigaud. Continuité biologique et ouvrages soumis à marée : le cas de l’anguille européenne les éléments importants pour évaluer et agir. irstea. 2015, pp.66. �hal-02601273�

(2)

Synthèse de l’atelier thématique du GRISAM

(Groupement d’intérêt scientifique national sur les Poissons migrateurs)

Mars 2015

Continuité biologique

et

Ouvrages soumis à marée

Le cas de l’anguille européenne

(3)

Dans le cadre du Groupement national d’intérêt scientifique sur les poissons

migrateurs amphihalins (GRISAM), un atelier s’est tenu au Forum des Marais

atlantiques à Rochefort (Charente-maritime) en 2013.

La thématique ciblée concernait les modalités d’évaluation et d’amélioration

de la transparence des ouvrages soumis à marée vis-à-vis de l’anguille

L’animation de cet atelier (

voir liste à la page suivante

) a été assurée par :

- Philippe BARAN (Onema - Pôle Eco-hydraulique de Toulouse)

et

- Timothée BESSE (Logrami (Association Migrateurs en Loire)).

Il a permis une synthèse des connaissances acquises et des échanges entre des

acteurs scientifiques et techniques impliqués sur cette thématique dans leur

zone géographique de travail et/ou dans leur champ disciplinaire.

Les quatre parties de ce document reprennent les divers aspects abordés

(

1. D

iversité des ouvrages

,

2. Biologie et comportement des jeunes anguilles

,

3. Modalités techniques pour améliorer la transparence des ouvrages

,

4. Recommandations pour établir un diagnostic et choisir la modalité la plus adaptée

)

.

Sa rédaction s’est appuyée sur les présentations orales et les publications ou

rapports correspondants et a été enrichie par une analyse bibliographique.

Cette rédaction a été réalisée par :

(4)

Liste des participants à l’atelier du GRISAM

sur la transparence des ouvrages soumis à marée.

Associations ou Cellules migrateurs

Timothée BESSE - Association LOGRAMI (Loire Grands Migrateurs)

Vanessa LAURONCE Association MIGADO (Migrateurs Garonne Dordogne) Marine ROUL Association LOGRAMI (Loire Grands Migrateurs)

Eric BUARD Cellule Migrateurs Charente-Seudre /CREA (Centre régional aquacole Poitou-Charentes) François ALBERT Cellule Migrateurs Charente-Seudre - Union régionale des Fédérations de Pêche Audrey POSTIC-PUIVIF Cellule Migrateurs Charente-Seudre - EPTB Charente

Administrations

Delphine MELIN DDTM Charente-Maritime Marie-Noëlle BEVE DDTM Vendée

Bruno Des ROBERT DDTM Loire-Atlantique Aurélie TISSERAND DREAL Pays de Loire Roland MATRAT DREAL Pays de Loire Gilles ADAM DREAL Aquitaine

ONEMA

Pierre STEINBACH DIR Orléans

Pierre Jean ALEM SD Charente-Maritime Bertrand GAETANO SD Loire-Atlantique

Collectivités territoriales

Sylvie FONTENY Conseil général Charente-Maritime

Pôle Ecohydraulique Alain ALRIC Onema Christian RIGAUD Irstea Hilaire DROUINEAU Irstea Nicolas DELIGNE Irstea Philippe BARAN Onema

Forum des Marais

Loïc ANRAS Chargé de mission Biologie

Gilbert MIOSSEC Directeur, analyse des usages

Gestionnaires d’ouvrages

François-Xavier ROBIN Union des Marais de Charente-maritime (UNIMA) Sébastien SIMON Syndicat Centre Medoc

Bureaux d’études ou animateurs d’opérations groupées : Antoine LEGAULT Bureau d’études Fish Pass

Virgil MAZEL Bureau d’études Fish Pass Jérôme TARTARE Bureau d’études Asconit

Correspondants locaux spécialisés

Sophie DER MIKAELIAN Parc naturel Régional du Marais Poitevin Dimitri BOURON Fédération de Pêche de la Vendée

Cathy TAVERNY Fédération de Pêche de la Gironde Nathalie SAUR Parc naturel régional de Brière

(5)

Principaux suivis ayant servi de base aux présentations, synthèses et

échanges au cours de l’atelier du GRISAM

Sites concernés

Responsables des suivis

Type de modalités testées

Estuaire de l’Yser (Belgique)

(12 marées suivies en mars-avril)

Mouton et al, 2012

Suivis par l’INBO (Institut de recherche pour la Nature et la Forêt)

Envois par le fond (vanne décollée)

Estuaires du Couesnon (58 marées suivies, janvier à avril)

Laffaille et al, 2007

Suivis par Fish-Pass et Université de Rennes avec leurs partenaires locaux

Vantelles de fond

Estuaire de la Vilaine

(suivis de la passe depuis 1996, 16 marées sur l’écluse en mars-avril)

Briand et al, 2003 et 2008

Suivis par l’IAV (Institution pour l’aménagement de la Vilaine)

Passe à anguille depuis 1996 et éclusées

Estuaire de la Loire, Brière, Marais breton, marais vendéens

Legault, 1990 ; Mazel et al, 2013

Suivis de Fish-Pass et de Logrami (Loire Grands migrateurs) avec leurs partenaires locaux

Envois massifs, cales, vantelles ou échancrures, éclusages à large échelle (bief inséminateur)

Estuaire de la Sèvre niortaise (suivis de la passe depuis 1984)

Hyacinthe, 2009

Parc Inter-régional du

Marais poitevin Passe à anguille depuis le début des années 80

Estuaire de la Charente

(47 marées suivies de février à avril)

Rigaud et al, 2014

Suivis par le Pôle Eco-hydraulique (Onema-Irstea-Imft) avec partenaires locaux

Ouverture totale et/ou vantelle en fond ou surface et/ou cale sur porte à flot

Estuaire de la Seudre (suivi de la passe depuis 2009)

Rapports annuels de la FD 17

Suivi par la Fédération de pêche et de protection des milieux aquatiques de Charente-Maritime

Passe à anguille depuis

Estuaire de la Gironde

(20 marées suivies de 2010 à 2013, février à avril)

Lauronce et al, 2013

Suivis de MIGADO (Migrateurs Garonne-Dordogne) avec ses partenaires locaux

Suivis depuis 2009 de 3 sites avec raidisseurs sur clapets de fond, cale sur porte à flot ou vantelle de fond. Premiers essais sur vantelle haute

(6)

Résumé

A la demande du Groupe Anguille du GRISAM, un atelier s’est tenu sur la thématique des ouvrages soumis à marée qui peuvent représenter des obstacles significatifs à la libre circulation des jeunes anguilles (A. anguilla).

Le compte-rendu de cet atelier est organisé autour de quatre chapitres.

Les deux premiers présentent les principales caractéristiques de ces ouvrages soumis à marée et les

connaissances biologiques actuelles sur la migration de colonisation de l’anguille.

Le troisième chapitre recense et décrit les modalités techniques actuellement disponibles pour améliorer la

transparence d’un ouvrage soumis à marée avec leurs limites et leurs avantages respectifs ainsi que les contextes

auxquels elles correspondent le mieux. Il s’appuie notamment sur les observations et essais mis en œuvre sur divers sites du littoral en France et en Belgique et présentés au cours de l’atelier.

En quatrième partie, des recommandations sont formulées pour l’organisation concrète d’un diagnostic sur un

ouvrage et de l’évaluation des diverses solutions d’aménagement et/ou de gestion. Les données essentielles à

collecter sont présentées avec notamment la nécessaire prise en compte des contraintes et des usages particuliers à chaque territoire concerné.

Summary

At the request of the Working Group on Eel of the GRISAM, a workshop took place to make a point on the problems that may represent tidal works for the European eel (A. anguilla).

The report is organized in four chapters. The two first ones present the main characteristics of the tidal works all along the French coasts and the main biological knowledge about the upstream migration of the European eel.

Then, the conclusions of the workshop are presented. The third chapter lists and describes the available technical solutions to improve the transparency of a given tidal work, with their respective advantages and limits and the contexts to which they correspond best. It leans on the results obtained on several sites in France and Belgium and presented during the workshop.

Finally, in the fourth part, recommendations are formulated for concrete organization of a diagnosis on a given hydraulic work and for evaluation of the different solutions (physical arrangement and/or management). The essential data to be collected are listed with in particular, the necessary consideration of local constraints and human uses which characterize each territory.

(7)

Quelques mots d’introduction

Se préoccuper de continuité écologique au niveau d’un ouvrage hydraulique, c’est chercher à minimiser ses impacts négatifs sur le fonctionnement du système aquatique concerné et notamment sur la circulation de sa faune.

Cet objectif apparaît dans divers textes réglementaires et documents de planification (Grenelle de l’Environnement et trame bleue, classement des cours d’eau au titre du Code de l’Environnement, Schémas directeurs d’aménagement de de gestion des eaux et leurs déclinaisons dans les SAGE, zones d’actions prioritaires du Plan national Anguille faisant écho au Règlement européen n°1100/2007,….). On pourra utilement consulter le document de l’Onema dédié à cette question (http://www.onema.fr/IMG/pdf/continuite_cours-deau.pdf).

La présence de très nombreux ouvrages soumis à marée dans toutes les zones prioritaires d’action pour l’anguille européenne a mis en lumière cette problématique sur tous nos littoraux métropolitains.

Tous ces ouvrages y ont été édifiés pour maîtriser et le plus souvent bloquer l’intrusion du flot salé ou doux dans les territoires plus ou moins vastes situés en amont. Très souvent gérés ou aménagés sans tenir compte des migrations et des déplacements de la faune aquatique, leur étanchéité imparfaite et leur gestion manuelle régulière débouchaient jadis sur une relative perméabilité, notamment vis-à-vis des anguilles, alors très abondantes.

Aujourd’hui, ces ouvrages ont souvent été modernisés, sont généralement beaucoup plus étanches et sont parfois télé-gérés en s’inscrivant dans une volonté de maîtrise hydraulique de plus en plus affirmée. Ils apparaissent ainsi comme de véritables obstacles potentiels pour les allées et venues de la faune piscicole (Feunteun et al, 1989) et notamment des anguilles. Des diagnostics vont donc être entrepris et en cas de problème, des propositions d’aménagement et/ou de gestion seront élaborées pour améliorer la situation.

L’enjeu est significatif puisque ces très nombreux ouvrages commandent l’accès à des bassins versants plus ou moins vastes et/ou à des marais doux endigués pouvant offrir des habitats de qualité. Selon les sites et notamment l’importance de l’axe concerné, cette problématique de libre circulation peut concerner, outre l’anguille, tout ou

partie des autres espèces migratrices amphihalines présentes en métropole.

Quand ces ouvrages desservent des marais salés ou saumâtres, ils peuvent fortement influer sur les déplacements de l’anguille, mais aussi sur ceux de nombreuses post-larves ou alevins d’espèces estuariennes ou

côtières (sprat, anchois, lieu, sardine, tacaud,…..) fréquentant ces zones pendant leurs premières semaines de vie.

Le parc d’ouvrages soumis à marée est très diversifié tant en termes de types de vannages que de contextes

amont/aval dans lesquels ils s’insèrent. Devant une telle diversité appelant un éventail de réponses techniques

adaptées, il est apparu important et utile de s’appuyer sur le réseau d’acteurs ayant entrepris des essais et suivis dans différentes sites du littoral métropolitain.

Sur cette thématique particulière avec une approche nécessairement différente de celles mises en œuvre sur les ouvrages hydrauliques amont, un atelier du GRISAM s’est tenu à Rochefort avec la participation d’une trentaine d’acteurs scientifiques, techniques et administratifs.

Il en est ressorti une vision partagée des enjeux, des éléments de diagnostic à acquérir et de la palette de solutions techniques envisageables actuellement. Tous ces éléments s’affineront bien sûr dans les années à venir,

mais constituent déjà une base solide à même de contribuer utilement à la démarche opérationnelle qui s’engage.

Le présent compte-rendu présente ces éléments et le lecteur pourra, en fonction de ses centres d’intérêt, s’orienter vers tout ou partie des différents chapitres.

(8)

Les deux premiers chapitres présentent les principales caractéristiques des ouvrages soumis à marée et une

synthèse des connaissances biologiques actuelles sur la migration de colonisation de l’anguille.

Ces éléments permettent de mieux comprendre les angles d’analyse recommandés dans la phase de diagnostic d’un ouvrage soumis à marée pour collecter les éléments nécessaires à une prise de décision adaptée.

Les deux derniers chapitres présentent les conclusions de l’atelier Grisam proprement dit, atelier qui a permis de confronter les résultats des différents suivis mis en œuvre sur plusieurs sites en France et en Belgique.

La troisième partie recense et décrit les modalités techniques actuellement disponibles pour améliorer la transparence d’un ouvrage soumis à marée avec leurs limites et leurs avantages respectifs ainsi que les contextes auxquels elles correspondent le mieux.

En quatrième partie, des recommandations sont formulées en termes d’organisation concrète du diagnostic sur un ouvrage et de l’évaluation des diverses solutions d’aménagement et/ou de gestion. Les données essentielles à collecter sont présentées avec notamment la nécessaire prise en compte des contraintes et des usages particuliers à chaque territoire concerné.

Enfin, une liste de références bibliographiques complète le document pour ceux qui voudraient en savoir encore un peu plus.

Bonne lecture à tous et bonne utilisation de ces informations pour une meilleure prise en

compte des besoins de la faune piscicole circulante, notamment ceux de l’anguille

européenne, au niveau de nos très nombreux ouvrages soumis à marée.

(9)

SOMMAIRE

Chapitre 1

La diversité des contextes et ouvrages soumis à marée

 Les aspects généraux

p. 8

 Des zones littorales et estuariennes souvent aménagées

p.11

 La diversité des ouvrages soumis à marée

p.12

 Impact hydrologique de la présence d’un ouvrage littoral

p.14

A retenir

Chapitre 2

La colonisation des eaux continentales par l’anguille européenne

 Les différents niveaux de recrutement en anguilles d’un bassin versant

p. 17

 La répartition des jeunes anguilles dans un bassin versant

p. 18

 Les comportements des jeunes anguilles en zones soumises à marée

p. 19

 Le franchissement de la limite de marée par certains individus

p. 21

 Impacts des ouvrages soumis à marée sur la migration de colonisation

p. 23

 Comportements observés en aval immédiat des ouvrages et franchissement

p. 26

 Cinétique de franchissement

p. 31

 Efficacité de l’offre de passage

p. 34

 Des retours vers l’aval sur le jusant

p. 35

A retenir

Chapitre 3

Les modalités techniques disponibles pour améliorer la

transparence d’un ouvrage soumis à marée

 Introduction

p. 38

 Arasement

p. 42

 Ouvertures très fréquentes, mais partielles

p. 43

 Ouvertures massives, mais ponctuelles

p. 46

 Eclusées à vocation piscicole

p. 47

 Passes à poissons

p. 48

 Pêches et transferts

p. 50

Chapitre 4

Recommandations pour l’organisation d’une démarche concertée

sur un ouvrage

 Remarques et questions préalables

p. 51

 Quelques pistes pour l’organisation pratique de la démarche

p. 51

 Les différentes phases techniques de la démarche

p. 52

Conclusion générale

p. 60

(10)

Chapitre 1.

La diversité des ouvrages soumis à marée

Les aspects généraux

Zones côtières et estuaires sont soumis à deux marées quotidiennes dont l’amplitude (marnage) varie sur des cycles de 28 jours. En métropole, le maximum est enregistré en Manche avec environ 13 mètres d’amplitude en Baie du Mont Saint Michel par forts coefficients, la moyenne étant plutôt de 4-5 mètres sur la façade atlantique et de 0,40 m en Méditerranée. Pour fixer des ordres de grandeur, 40 % des marées correspondent à des coefficients de marée supérieurs à 80, souvent synonymes de possibilité d’admissions gravitaires dans les zones rétro-littorales.

L’estey du port de Lamena (Gironde, rive gauche) à basse mer et en cours de flot. En arrière-plan, l’estuaire de la Gironde (© Pôle Eco-hydraulique)

(11)

Dans un estuaire ouvert (absence d’ouvrage), la zone soumise à marée se compose :

- d’une partie aval caractérisée par l’intrusion deux fois par jour d’une masse d’eau salée dont le volume augmente jusqu’à l’étale de pleine mer avec l’influence majeure du coefficient de marée, mais aussi du secteur et de l’intensité du vent ainsi que de la pression atmosphérique provoquant des phénomènes de surcote. En remontant la majorité de ces parties tidales salées, le marnage et l’intensité des courants de flot augmentent sous l’influence conjuguée du rétrécissement de l’estuaire (exemple de l’estuaire aval de la Charente en figure 2) et de la remontée du fond.

Partie aval de l’estuaire de la Charente (Image SPOT)

Cette partie « salée » de l’estuaire a une limite amont fluctuante liée au rapport de force variable entre l’onde de marée et le débit fluvial, cette limite étant parfois difficile à repérer du fait d’une stratification haline plus ou moins marquée (rencontre sans réel mélange des masses salées et douces) (Guillaud et Romaña, 1984).

Cette stratification est d’autant plus marquée que le débit fluvial est élevé. Dans les petits tributaires d’un estuaire salé, tributaires souvent de dimensions modestes voyant transiter des volumes d’eau douce assez limités, on observe rarement une stratification marquée et surtout durable (mélange rapide des eaux en zone aval des ouvrages).

Début d’écoulement de l’eau douce au niveau des portes à flot du Port de Lamena (estuaire de la Gironde) © Pôle Ecohydraulique 2011

- d’une partie amont, au-delà de la transition fluctuante précédemment évoquée. Comme en aval, les variations régulières des niveaux d’eau y sont liées aux cycles de marée, mais cette fois sans intrusion d’eau salée. C’est la présence à chaque flot, de la masse d’eau salée dans la partie aval qui contrarie l’écoulement de l’eau douce et qui provoque ainsi une accumulation temporaire de l’eau fluviale dans cette zone amont. Les courants y sont majoritairement dirigés vers l’aval, avec des vitesses variant selon le moment de la marée. Ils peuvent ainsi être très faibles à pleine mer, voire quasiment nuls en zone limite amont.

En absence d’ouvrage dans un estuaire, l’ensemble de ces deux zones successives s’étend jusqu’à la limite de marée dynamique (LMD) sur un linéaire plus ou moins important selon la situation géographique et la configuration de l’estuaire concerné, la période de l’année et la taille du bassin versant amont.

Elles s’étendent ainsi jusqu’à 160 km sur l’estuaire de la Seine (axe de 776 km) ou sur le large estuaire du bassin Gironde-Garonne-Dordogne (axe principal de 680 km). En revanche, elles n’occupent qu’environ 70 km sur l’estuaire étroit de la Loire (pour 1010 km). Sur de plus petits bassins versants, la LMD est bien sûr encore plus proche de la mer (10 à 20 kms par exemple sur le Scorff ou la Seudre pour des linéaires jusqu’aux sources de 70 à 80 km).

Au-delà de la LMD dont la position fluctue au gré des débits fluviaux et de l’intensité de l’onde de marée, on entre dans un domaine (fleuve, rivière) où les courants sont toujours dirigés vers l’aval et cette fois en totale indépendance avec les cycles tidaux.

(12)

Zone soumise à marée Partie fluviale Partie aval Zone de transition Partie amont

-inversion biquotidienne des courants

- confrontation des courants (coin salé, mascaret, brassage et tourbillons)

- courants dominants vers l’aval, intensité en fonction du cycle de marée

- courants toujours vers l’aval, sans lien avec le cycle de marée - intrusion eau salée - présence eau salée - eau douce - eau douce

- variation biquotidienne des niveaux d’eau

- variation biquotidienne des niveaux d’eau

- variation biquotidienne des niveaux d’eau

niveaux d’eau sans lien avec la marée

A mesure de la remontée dans l’estuaire, l’heure de la pleine mer se décale et la courbe de marée se modifie, le flot devenant de plus en plus court. Enfin, les zones tidales amont sont les plus concernées par les phénomènes de bouchon vaseux.

Un autre phénomène intéressant à noter concerne la différence claire en termes d’évolution des courants sur un cycle de marée entre l’axe principal (l’estuaire) et les tributaires latéraux.

La phase de mi-flot se caractérise en effet en estuaire par le courant le plus important du flot alors qu’elle correspond le plus souvent à une phase de courant quasiment nul (équilibre/inversion) sur un tributaire latéral. Si l’ouvrage placé sur ce tributaire est fermé, cette phase à très faible courantologie perdure, mais si l’ouvrage est ouvert, la pleine mer va correspondre à la phase de courant maximal alors qu’en estuaire, c’est l’étale.

Ce phénomène a bien sûr des répercussions à la fois sur la cinétique d’apparition des MES sur les tributaires (arrivée en fin de flot, après l’inversion), mais aussi sur celle des civelles (Rigaud et al, 2014).

 En plus de l’évolution des phénomènes de l’aval vers l’amont au sein d’un même estuaire ou bien entre l’estuaire et ses tributaires, on constate également la grande diversité de situations hydrodynamiques à l’échelle de

l’ensemble des zones littorales et estuariennes métropolitaines.

Chaque situation, à un moment donné sur un site donné, dépend en effet de la localisation géographique de la zone concernée avec notamment son niveau de marnage, la configuration plus ou moins naturelle du site et enfin le rapport de force du moment entre l’onde de marée et le débit fluvial, ce dernier étant lié aux conditions climatiques et aux décisions humaines quant à la gestion des écoulements.

Cette complexité et cette variabilité de fonctionnement avec une étroite imbrication entre terres et eaux ainsi qu’entre eau salée et eau douce, débouchent de manière générale sur une très forte productivité biologique dans ces zones côtières et estuariennes (Mann, 1982 ; Odum, 2000 ; Lefeuvre et al, 2003). Cette productivité est surtout liée à l’existence de surfaces intertidales (vasières, prés salés) exploitées notamment par la faune piscicole qui y trouve des zones privilégiées d’alimentation (Marchand et Elie, 1983 ; Laffaille et al, 1998).

Les différentes zones de l’estuaire de la Seine Source : Groupement d’intérêt public Seine-Aval

Mer

LMD

Zones amont

(13)

Cette grande diversité de situations hydrodynamiques dans ces zones littorales et estuariennes suppose de facto une grande faculté d’adaptation des civelles pour réussir à s’introduire dans les eaux continentales en mobilisant un certain nombre de comportements que nous verrons plus loin.

Des zones estuariennes ou littorales souvent aménagées

Quelques barrages ont été implantés directement en estuaire. Avec des gabarits très différents, on retrouve ainsi (liste non exhaustive) le barrage de Poses dans l’estuaire de la Seine (BV de 79 000 km²), d’Arzal sur la Vilaine (10 000 km²), de Saint-Savinien sur la Charente (9 800 km²), des Enfreneaux sur la Sèvre niortaise (3 650 km²), de la Caserne sur le Couesnon (1 100 km²), du Collet sur le Falleron (900 km²), de Ribérou sur la Seudre (850 km²), de Méan sur le Brivet (environ 500 km²).

En bordure d’estuaires, de deltas et de zones côtières, on trouve également de nombreux territoires endigués,

gérés soit en eau salée, soit en eau douce avec dans ce dernier cas, un lien avec des bassins versants plus ou moins étendus. A l’origine, toutes ces zones de faible altitude étaient soumises à la marée et donc, au gré de leur topographie et de la distance à la mer, y apparaissait toute une mosaïque d’habitats librement et régulièrement accessibles à la faune piscicole marine et notamment à l’anguille.

Ces endiguements et les nombreux vannages associés ont été mis en place pour soustraire ces territoires à l’effet de la marée ou en tous cas pour le maîtriser (Verger, 2005). Avec des objectifs variés (développement agricole, aquacole ou salicole, développement urbain ou touristique,….) ce sont ainsi plus de 2 500 km² qui ont été endigués entre Loire et Bassin d’Arcachon, plus de 90 % d’entre eux étant aujourd’hui gérés en eau douce.

Sur le seul bassin de la Loire, ce sont 90 ouvrages à la mer qui ont été recensés aux exutoires de ces zones humides rétro-littorales, 35 étant classés en liste 2 et 19 au titre de la Trame bleue (Grenelle Environnement) (Communication de Logrami à l’atelier). Sur les rives de l’estuaire de Gironde, ce sont 99 ouvrages soumis à marée qui ont été recensés, soit environ un ouvrage tous les 4 kilomètres de rive (Albert et al, 2008).

Localisation des ouvrages latéraux soumis à marée dans les 2/3 aval

du système fluvio-estuarien

(14)

Avec des linéaires de canaux et fossés variant entre 40 et 250 mètres par hectare auxquels viennent s’ajouter des petits plans d’eau dans les zones d’origine salicole, les surfaces en eau représentent dans les marais en amont de ces ouvrages soumis à marée, entre 2 % et 70 % du territoire selon les sites. Ces marais sont gérés à l’aide de nombreux ouvrages, souvent de petit gabarit (Anras et Chastaing, 2005).

En marais salés, ce sont ainsi des centaines d’ouvrages individuels qui ont été implantés pour gérer les mouvements d’eau au sein des diverses structures (fossés à poissons, réservoirs, claires, bassins aquacoles, salines, plans d’eau de chasse, réserves naturelles,….voir notamment GOUTX-Van de Maele, 1986) avec un ratio moyen d’un ouvrage de prise d’eau pour 0,5 ha d’eau dans beaucoup de zones sauf pour les grands réservoirs arcachonnais (une grosse prise d’eau pour 5-6 ha).

Vue aérienne de marais en Seudre (chenal et fossés) © Cemagref 1987

Chenaux et prés salés à marée haute dans le Bassin d’Arcachon. Prise d’eau d’un marais endigué © Irstea 2012

 Un parc très diversifié d’ouvrages soumis à marée

Chaque ouvrage soumis à marée est une combinaison particulière d’un plus ou moins grand nombre d’éléments de base parmi lesquels on peut citer (voir quelques exemples dans les photos jointes) :

- les portes battantes, portes à flot ou d’èbe,

- les vannes crémaillère ou guillotines composées d’un ou de deux blocs, vannes motorisées ou non, - les vannes secteurs,

- les clapets mobiles sur verrins hydrauliques,

- les seuils submersibles (dérase), fixes ou amovibles,

- les passages busés, plus ou moins longs (parfois plus d’une centaine de mètres), avec ou sans coude, - les vantelles (ouvertures obturables ou non, situées au fond ou à mi-hauteur, insérées dans une porte à flot

ou une vanne),

- les clapets sur axe horizontal masquant des orifices permanents de lâcher d’eau, - les moines et écluses piscicoles (avec un nombre variable de glissières),

(15)

Quelques exemples d’ouvrages ou d’éléments d’ouvrages soumis à marée

Barrage-usine marémotrice de la Rance (admission d’eau à

marée montante) © EDF-Bruno Conty

Prise de marais salé (buse + glissière extérieure)

Moulin des Loges, Marennes (17) © Irstea

Ecluse du Domaine salé de Certes (Gironde). Vidange et

entretien du chenal aval © Irstea

Ouvrage collectif à la mer - Ecluse du Grand-Pont Beauvoir sur Mer –Vendée © Le Pape C. Logrami

Ouvrage de Charras (portes à flot doublées en amont de

vannes à double vantelles) - Charente © Unima

Barrage Saint Félix à Nantes (l’une des portes levantes est la

vanne aval de l’écluse de navigation).

Confluence Erdre-Loire ©Val d’Erdre

Clapet mobile + seuil fixe

Saint-Savinien sur la Charente © Irstea Ecluse de Biard–Charente© Cellule Charente MigrateursVanne levante – deux blocs

Ouvrage composite (deux clapets en RD + 2 vannes mono-bloc

amont + 2 portes à flot aval en RG)

Isle Saint Georges- Saucats (Gironde) © Irstea

Ouvrage composite (2 vannes levantes + 3 clapets) Chenal du Milieu-Saint Julien de Beychevelle (Gironde) © Migado

(16)

Buse pont-cadre à l’exutoire de la Virgule (Bretagne

Sud-Cornouaille) © Guichard S. /Ouesco 2012

Ecluse de navigation de Saint-Savinien (Charente) © Irstea Bordeaux

Portes à flot équipées de vantelles, hautes ou basses © Migado

Série de portes à flot plus clapets de fond doublée d’une ligne de vannes murales © Migado

 Impact hydrologique de la présence d’un ouvrage littoral

L’implantation d’un ouvrage en zone soumise à marée fait apparaître un élément physique pouvant influer sur la confrontation des masses d’eau. Ainsi, les clapets classiques sur axe horizontal se ferment très rapidement sous l’effet à la fois de leur poids et de la pression de l’eau qui s’y rajoute au cours du flot. Pour les portes à flot (axe vertical), c’est l’établissement d’un courant vers l’amont qui provoque cette fermeture. Cette dernière peut donc être significativement retardée dans certaines configurations (vanne amont fermée ou très peu ouverte notamment).

Figure : Exemple d’enregistrement des niveaux d’eau en aval (courbe bleue) et en amont (courbe verte) d’un ouvrage avec portes à flot. Fermeture des portes se produisant 5 à 10 minutes après l’inversion du courant. Hausse régulière du niveau amont due à l’accumulation du débit fluvial pendant toute la phase de fermeture. Extrait des travaux de MIGADO sur la Gironde (Albert et al, 2008)

(17)

Au-delà de leurs particularités physiques, c’est surtout leur gestion qui définit le niveau effectif d’influence de ces ouvrages, notamment avec la gestion de l’écoulement des eaux provenant de l’amont. On peut ainsi observer soit des phases de lâchers très intenses, pouvant être précédées par des phases de stockage (actions de baccage ciblant le dévasement des biefs amont et du chenal aval), soit des phases volontaires de rétention, soit des gestions particulières des premiers biefs (recherche d’un niveau stable ou bien baisse significative en début de jusant pour créer une pente hydraulique sur l’axe amont).

La mise en place de ces ouvrages répond toujours à un (ou plusieurs) objectif(s) majeur(s) qui a (ont) pesé sur le choix du type de vannage et sur la gestion mise en œuvre. Ceci étant, ces objectifs initiaux peuvent évoluer de manière significative au fil du temps sur le territoire concerné, ce qui peut déboucher soit sur une évolution notable de la gestion de l’ouvrage, soit même dans certains cas, sur sa possible remise en cause. Il sera donc important de

bien identifier les objectifs de gestion sur le territoire amont et sur les contraintes qui leur sont associées.

Figure : Porte à flot avec vantelle de Lamena (Médoc, Gironde)

en début de jusant à gauche et à mi-jusant à droite (© Irstea)

Pour des zones amont fonctionnant en eau salée, les ouvrages de prise d’eau ne devraient pas poser de

problèmes majeurs ni sur le plan hydrologique, ni sur le plan de la continuité. Cependant, la gestion effectivement mise en œuvre sur l’ouvrage (fréquence plus ou moins élevée et régulière des entrées et des sorties d’eau, type de gestion des niveaux d’eau, existence ou pas de phases d’évacuation pour l’entretien du chenal aval,…..) influe fortement sur la qualité générale à la fois de l’eau et des milieux aquatiques au sein du plan d’eau amont et du chenal aval ainsi que sur le niveau de transparence de l’ouvrage (Massé et Rigaud, 1998 ; Anras et al, 2004).

Lorsque l’ouvrage soumis à marée situé en zone tidale salée commande l’accès à un territoire géré en eau douce, il ne crée qu’assez rarement en phase hivernale et printanière, une frontière brutale entre l’eau salée et l’eau

douce et ceci pour plusieurs raisons. L’écoulement le plus souvent observé au jusant à cette saison, crée en effet dans la zone aval plus ou moins proche, un passage progressif de l’eau salée à l’eau douce (effet piston avec brassage des masses d’eau ou maintien d’un volume doux entre l’onde salée et l’ouvrage).

Ces ouvrages situés aux exutoires de territoires gérés en eau douce ne créent pas non plus de frontière brutale et permanente entre une zone aval soumise à marée et un bief d’amont nullement influencé par le rythme tidal. En effet, avec des courants très majoritairement dirigés vers l’aval et des variations de niveaux totalement liés au cycle de la marée (phases d’accumulation du débit fluvial sur tout ou partie du flot), le bief d’amont présente des caractéristiques fort comparables à celles observées dans la partie amont d’un estuaire en l’absence d’ouvrage (cf description précédente).

En revanche, ce type d’obstacle implanté dans la zone aval d’un estuaire ou d’un littoral côtier, limite

physiquement la propagation de l’onde salée vers l’amont et donc l’extension des parties aval, salées et de transition, décrites précédemment dans le cas d’un estuaire ouvert.

(18)

A retenir

Pour chaque ouvrage diagnostiqué, il sera important de bien repérer son positionnement par rapport aux différentes zones de l’estuaire ou du littoral qui lui correspond, en prenant bien sûr en compte leurs variations saisonnières de fonctionnement.

Les éléments caractérisant ce contexte aval (niveaux de salinité, marnages, fréquence des surcotes, niveaux de turbidité, durées du flot,….) influeront en effet sur le choix ultérieur de la modalité technique d’aménagement ou de gestion pour améliorer sa transparence.

Aux différents types d’ouvrages implantés dans des situations variées sur les littoraux

côtiers ou estuariens va également correspondre une grande diversité de contraintes liées aux environnements et usages des territoires amont concernés.

Tous ces éléments (zone aval, zone amont, ouvrage) devront donc être pris en compte lors de l’évaluation et du diagnostic portés sur ces ouvrages soumis à marée.

(19)

Chapitre 2

. Colonisation des eaux continentales par l’anguille européenne.

Comportements observés dans les zones soumises à marée

Différentes synthèses des connaissances sur toute ou partie de la phase de colonisation sont déjà disponibles (Elie et Rochard, 1994 ;Ibbotson, 2002 ; Feunteun et al, 2003 ; Adam et al, 2008 ; Harrisson et al, 2014). Dans le cadre de ce travail ciblant le franchissement des ouvrages littoraux, les points qui y apparaissaient importants à prendre en compte ont été identifiés.

Nous y avons ajouté quelques nouveaux éléments, notamment ceux ayant trait aux comportements des civelles

en aval des ouvrages au cours d’une marée. Ils ont été présentés et débattus au cours de l’atelier GRISAM par les

équipes ayant mis en œuvre des suivis biologiques au niveau de différents sites littoraux.

 Les différents niveaux de recrutement en anguilles d’un bassin versant

Actuellement, la très grande majorité des éléments scientifiques disponibles plaide pour l’existence d’une seule population d’anguilles européennes avec une seule zone de reproduction en Atlantique nord-ouest (Mer des Sargasses) et une vaste zone continentale de répartition et de croissance (zone en rouge sur la carte jointe).

60 45 30 15 0 60 45 30 15 0 90 75 60 45 30 15 0 15 30 45 135 120 105 90 75 60 45 30 15 0 15 30 45 60

Aire de répartition continentale Aire de répartition océanique des larves par classe de longueurs en millimètre 15 25 10 45 >60 >60 >60 pas de larves

Figure 1 : Aire de répartition de l ’anguille européenne adaptée de Germain (1927) pour l ’aire continentale et Schmidt (1922) pour la répartition des larves. 60 45 30 15 0 60 45 30 15 0 90 75 60 45 30 15 0 15 30 45 135 120 105 90 75 60 45 30 15 0 15 30 45 60

Aire de répartition continentale Aire de répartition océanique des larves par classe de longueurs en millimètre 15 25 10 45 >60 >60 >60 pas de larves

Figure 1 : Aire de répartition de l ’anguille européenne adaptée de Germain (1927) pour l ’aire continentale et Schmidt (1922) pour la répartition des larves.

Chaque année, l’ordre de grandeur de la quantité de larves, puis de civelles issues de la phase de reproduction résulte de l’état général du stock d’anguilles européennes (Dekker, 2000a) et des conditions océaniques de reproduction puis de migration des larves (Knights, 2003; Bonhommeau et al, 2008).

Au sein de la zone de répartition de l’espèce, la localisation de chaque bassin versant ainsi que ses grandes caractéristiques (notamment débit et qualité d’eau au moment de l’arrivée des jeunes recrues) influent sur la quantité de jeunes individus qui y pénètre pour constituer le recrutement total du bassin concerné.

Mortalité naturelle, sédentarisation de certains individus en estuaire et en zones humides rétro-littorales, prélèvements par pêche et autres mortalités d’origine anthropique (Briand et al, 2003 et 2005) déterminent ensuite la fraction de ce potentiel initial qui sort de la zone d’influence de la marée pour constituer le recrutement fluvial du

bassin versant.

Le niveau de transparence des ouvrages soumis à marée va influer fortement sur l’intensité de ce recrutement fluvial sur les axes sur lesquels ils sont implantés par rapport au potentiel se présentant en aval.

(20)

 La répartition des anguilles dans un bassin versant

Le groupe d’individus franchissant la limite de marée dynamique (LMD) voit s’offrir à lui une grande diversité d’habitats potentiels situés à différentes altitudes et distances de l’estuaire, habitats plus ou moins accessibles selon le nombre et la transparence des ouvrages hydrauliques fragmentant les fleuves et rivières du bassin.

Jusqu’au début des années 80, la très grande majorité des publications (Deelder, 1958 ; Tesch, 1977) présentait la colonisation du domaine fluvial comme le comportement ultra-dominant. La présence significative d’anguilles observées en eau salée ou saumâtre était alors assimilée soit à du passage (estuaire, lagunes), soit à du piégeage dans certaines zones (fossés à poissons des marais salés endigués notamment).

Depuis, de nouveaux outils, notamment l’analyse microchimique des pièces osseuses, ont permis de révéler l’existence de parcours uniquement marins ou d’entrées en eau douce suivies rapidement de retours en eaux salées (Daverat et al, 2006). Ces éléments, complétés par l’analyse des structures de taille observées dans les bassins versants, ont fait émerger l’hypothèse d’une progression des individus par diffusion à partir de l’estuaire. Des repositionnements réguliers non exclusivement orientés vers l’amont, notamment en réponse à des niveaux de densité trop élevés par rapport aux abris et ressources disponibles (Ibbotson et al, 2002) débouchent alors sur des maxima de densité toujours observés en zone aval des bassins et un niveau de pénétration dans ces bassins très lié à l’effectif franchissant la limite de marée (faible effectif initial = faible progression).

Le maintien d’un niveau significatif d’anguilles en migration observé assez haut dans les bassins versants en dépit de l’effondrement du recrutement (a minima chute d’un facteur 100 depuis le début des années 80) et donc en dépit de la non saturation flagrante des sites aval, plaide cependant pour une hypothèse intermédiaire.

On pourrait ainsi admettre la coexistence d’un positionnement des anguilles dans le bassin versant lié à la compétition pour les abris et les ressources trophiques, mais aussi à un comportement d’advection (nage active vers l’amont) d’un groupe clairement migrant surtout pendant les premières années de vie continentale et ce, quelles que soient les conditions en aval.

Il ressort donc l’existence d’une diversité de parcours, observée dès l’entrée dans l’estuaire et peut-être liée à la diversité des profils physiologiques et des capacités physiques des individus Il apparaît aussi que les plus fortes probabilités de migrer concernent surtout les petites tailles avec des effectifs importants, en zone littorale notamment (Edeline et al, 2004, 2006 et 2007 ; Feunteun et al, 2003 ; Bureau du Colombier et al, 2009 ; Imbert et al, 2010).

La transparence plus ou moins grande des ouvrages présents dans ces zones aval pèse fortement sur la dynamique ultérieure de colonisation du bassin amont. Il s’agit donc d’améliorer de manière significative cette transparence au moyen d’actions adaptées d’aménagement et/ou de gestion pour que s’expriment les comportements des individus attirés par la zone amont et pour que les retards de progression pris en zone aval avec toutes les surmortalités qu’ils induisent, soient minimisés.

 Comportements des jeunes individus en zones soumises à marée

Remarques préalables

La connaissance du comportement des anguilles de moins de 10 cm en zone estuarienne ou littorale et en zone proche de la limite de marée dynamique repose pour le moment sur un petit nombre d’outils d’observation (tamis travaillant en pleine eau, engins passifs offrant des abris potentiels en phase de repos, dispositifs de franchissement d’ouvrages avec piégeage et comptage). Ces outils ne permettent d’accéder qu’à une partie des comportements dans les milieux profonds estuariens et littoraux et il est clair par exemple que les déplacements proches du fond

(21)

o Comportements des premiers stades de pigmentation

Le stade civelle fait la transition entre le dernier stade larvaire (photo) et l’anguille jaune (pigmentation complète

et viscères non visibles). Cette transition commence par la métamorphose de la larve en une civelle totalement transparente (VA) avec modification de forme, perte significative de poids et de taille et arrêt de la prise alimentaire.

Une classification a été établie pour décrire toute la phase de pigmentation progressive qui suit (Elie et al, 1982).

Les premiers stades pigmentaires (VA et surtout VB) sont observés toute l’année en estuaire, mais leur présence

massive est associée à une période limitée, différente selon les sites (Elie et Rochard, 1994). Leur arrivée se fait par « vagues » en lien avec les fortes marées sur les littoraux océaniques, les périodes avec coefficients croissants correspondant à une pénétration de plus en plus profonde et importante dans les estuaires. De manière générale, la taille et l’embonpoint des civelles diminuent sur chaque site entre le début et la fin de la saison majeure d’arrivée (Desaunay et Guerrault, 1997).

Tableau : Périodes des maxima d'abondance de civelles (d’après Elie et Rochard, 1994)

Stades très peu pigmentés (VA-VB). © Ouest-France Photo extraite de Lecomte-Finiger et al, 2004.

Région antérieure d’une larve leptocéphale d’anguille européenne

(22)

La vitesse de pigmentation de ces civelles dépend surtout de la température de l’eau et de la salinité (Briand et al, 2005). Ainsi, en phase hivernale, dans une eau à 8-12 °C et 20 %ode salinité, le stade VB ne dure que 8 jours. Il est

encore plus éphémère dans une eau très dessalée voire douce. Le stade VB signe donc toujours une entrée très

récente dans la zone où il est observé.

Ces civelles nouvellement arrivées sont confrontées à une grande diversité de situations en zone côtière et estuarienne (conditions thermiques, conditions de courant) avec l’obligation de s’y adapter. Leur intrusion puis leur

progression en zone continentale soumise à marée sont synonymes de contact rapide avec l’eau douce notamment à la faveur des panaches sortant de l’estuaire, puis des tributaires latéraux rencontrés. De plus, même sur les grands estuaires français, la limite de salure (1 g de sel par litre) apparaît très tôt (à 35 km de la mer sur la Loire et à 75 km sur la Gironde), presque toujours à la moitié de la zone soumise à marée.

Ces premiers stades très peu pigmentés (glass-eels des anglo-saxons) correspondent à des animaux à jeun avec des capacités physiques limitées par rapport aux conditions de courant qu’ils rencontrent. Leurs allées et venues sont donc très dépendantes du déplacement des masses d’eau, avec une migration vers la surface (la civelle lève) au cours du flot (Elie et Rochard, 1994).

Dans toute la zone soumise à marée, leur progression vers l’amont est surtout liée au transport tidal sélectif (Mc Cleave et Klechner, 1982 ; Gascuel, 1986 ; Mc Cleave et Wippelhauser, 1987) qui voit certains individus profiter efficacement les courants de flot au moins sur les phases de coefficients croissants (progression moyenne vers l’amont évaluée à 3,5 - 4 km par jour dans l’estuaire de la Gironde (Beaulaton et Castelnaud, 2005)). Cette utilisation

efficace du flot par certains individus avec une résultante favorable entre les distances parcourues au flot et au

jusant et une bonne synchronisation avec les courants de marée (Bolliet et al, 2007 et 2008), les amène rapidement

en limite amont de la zone soumise à marée, ce comportement pouvant être lié à certains profils physiologiques et

énergétiques (Bureau du Colombier et al, 2009).

Mais cela n’exclue pas une certaine autonomie dans leur positionnement puisque de nombreuses observations révèlent par exemple l’attrait que constituent des appels d’eau douce ou dessalée (Lecomte-Finiger et Razouls, 1981 ; Crivelli et al, 2008). De même, un petit pourcentage d’individus est capable de progresser un peu plus vite que la masse d’eau et se présente donc en aval des ouvrages soumis à marée légèrement avant l’arrivée effective de l’onde de flot (Gascuel, 1986).

Des retours significatifs vers l’aval, au moins au début du jusant, sont également observés et sont d’ailleurs

souvent exploités par les pêcheries. Ils traduisent le maintien en pleine eau d’individus jusqu’à un certain niveau de courant dirigé vers l’aval (Beaulaton et Castelnaud, 2005 ; Prouzet et al, 2009). Selon différentes données expérimentales et observations in situ, ce seuil se situerait aux alentours de 0,25-0,30 m/s en pleine eau. Au-delà, les individus doivent se mettre à l’abri dans un substrat favorable (Lecomte-Finiger et Prodon, 1979) ou en zone rivulaire pour ne pas se retrouver rejetés en aval, comme observé en Gironde (Cantrelle, 1984) et en Sèvre niortaise (Gascuel, 1986) lors d’opérations de marquage de masse.

Nous noterons enfin l’observation assez fréquente de comportements d’escalade de ces civelles peu pigmentées sur des passes à brosses en zone tidale (Bertignac, 1984 ; Rigaud et al, 1988 ; White et Knights, 1997 ; Briand et al, 2003 ; Crivelli et al, 2008 ; Hyacinthe, 2009 ; suivis en cours sur la Seudre et le Canal du Porge en Gironde par les Fédérations de pêche de Gironde et de Charente-Maritime).

De tels phénomènes d’escalade peuvent même apparaître très tôt dans la saison (dès novembre) mais seulement

à la faveur de périodes thermiques favorables (températures d’air supérieures à 11°C). Bertignac (1984) note cependant une proportion plus faible de ces premiers stades pigmentaires dans les passages sur les rampes par rapport à leur niveau de présence juste en aval de l’obstacle.

Au final, en période hivernale, lorsque la température de l’eau est inférieure à 10-11 °C, les individus qui se présentent en aval des ouvrages soumis à marée, sont majoritairement des civelles peu pigmentées dont les déplacements sont surtout liés aux mouvements des masses d’eau.

En l’absence d’ouvrage, les individus les plus performants et synchrones avec le rythme des marées se retrouvent vite en eau douce et dans la partie amont de la zone soumise à marée. Les ouvrages implantés dans les zones soumises à marée viennent en général fortement perturber ces comportements et cette progression.

(23)

o

Reprise de l’alimentation et changement de comportement

Pour chaque individu, la reprise de l’alimentation intervient en cours de pigmentation, le plus fréquemment au

stade VIA2, parfois plus tôt (Bardonnet et Riera, 2005). A partir des travaux de Briand et al. (2005), on peut évaluer le

temps nécessaire en estuaire et en période hivernale, pour passer du stade VB (arrivée dans l’estuaire, stade très peu pigmenté, pas d’alimentation) à ce stade VIA2 (pigmentation significative, reprise de l’alimentation).

Avec 20 points de salinité, cette phase est évaluée à 25 jours à 12°C et à 50 jours à 8°C. En eau douce, pour la même gamme de température, cette durée est plus courte et comprise entre 15 et 30 jours. La reprise alimentaire

intervient donc le plus souvent entre 3 et 7 semaines après l’entrée de l’individu en estuaire en période hivernale.

Les stades suivants, notamment le stade VIA4, peuvent en revanche durer plusieurs mois jusqu’à la pigmentation

complète de l’individu (White et Knights, 1997).

Ces stades pigmentaires plus évolués, toujours englobés sous le terme français « civelle » sont dénommés d’une manière différente par les anglo-saxons (le terme « elver » prend le relais de « glass-eel »). Au-delà de la pigmentation plus marquée des individus, cette distinction anglo-saxonne est aussi liée à l’observation d’un

changement de comportement. En effet, la reprise d’alimentation alliée à une reprise de croissance correspond à un

comportement plus benthique et de plus en plus autonome de la jeune anguille la mettant plus ou moins hors de

portée des engins de capture en pleine eau.

Cet abandon du comportement pélagique est bien sûr un moment important dans le parcours des jeunes anguilles qui peut intervenir dans toutes les zones de l’estuaire et qui concerne au final tous les types d’individus (ceux à progression rapide vers l’amont de l’estuaire comme ceux qui restent plus en aval).

Pour les individus arrivés en septembre sur le littoral atlantique, cette bascule peut intervenir dès début novembre. Après un arrêt de croissance hivernal, ce sont ces individus qui parviennent à des tailles de 8 à 12 cm en juin en estuaire de Vilaine et qui, au moins pour partie (mortalités diverses), participent à la migration printanière vers le bassin versant via les passes-pièges locales (Briand et al, 2003) en absence d’admissions plus précoces en amont de l’ouvrage.

 Le franchissement de la limite de marée par certains individus

o

Comportements

Au-delà de la limite de marée dynamique (LMD), la nage à contre-courant devient impérative pour continuer à progresser vers l’amont. La capacité physique à progresser sur une longue distance à contre-courant apparaît dès la zone soumise à marée sur les phases de jusant et donc très tôt dans la vie continentale de certaines jeunes anguilles, mais elle augmente bien sûr avec leur croissance. Pour les civelles, cette nage à contre-courant sur de longues distances concerne surtout des individus présentant une forte activité thyroïdienne et de forts coefficients de condition (embonpoint) (Edeline et al, 2006).

Stades VIA0 à VIA2 - mise en place de la pigmentation dorsale © Aubert S. Fédération de Pêche Gironde

(24)

Différents auteurs ont évalué les performances face au courant des civelles et des très jeunes anguilles jaunes de différentes espèces en conditions expérimentales soit sur une durée longue (nage soutenable sur plus d’une heure), soit en condition de sprint sur quelques secondes (Barbin et Krueger, 1993 ; McCleave, 1980 ; Mitchell, 1995 ; Sorensen, 1951 ; Tsukamoto et al, 1975 ; Videler et Wardle, 1991).

Leur capacité de nage soutenable se situe dans la moyenne des espèces piscicoles avec des vitesses maximales de courant contraire correspondant à 3 - 4 longueurs de corps par seconde. En revanche, de piètres performances sont enregistrées en sprint sur 10-15 secondes (maxi de 7,5 à 8,5 longueurs de corps par seconde). Rapportées à la longueur moyenne des individus testés, ces résultats correspondent à des vitesses maximales de courant de

0,25-0,30 m/s pour une nage soutenable et de 0,50-0,60 m/s pour un sprint court.

Face à ce type de contraintes, les individus peuvent s’adapter en utilisant notamment la couche limite dont Chow (1959) a évalué l’épaisseur en chenal expérimental (2 cm pour un courant de 0,10 m/s, 1 cm pour 0,40 m/s). Il a montré également une relation stable entre la vitesse au fond et celle en surface (rapport ½) ou celle enregistrée à mi-profondeur (rapport 2/3).

Une autre stratégie de progression pour ces jeunes anguilles consiste à utiliser les zones rivulaires (végétation, branchages, blocs, ….) moins exposées au courant contraire et pouvant offrir des zones d’abris temporaires. La formation de cordons (Cairn, 1941, in Cantrelle, 1984), observés en rivière mais aussi dès l’estuaire fluvial le long des berges sur certaines phases de jusant, constitue également une stratégie collective synonyme d’économie d’énergie face au courant. Mais, si des cordons massifs (plusieurs mètres de large sur plusieurs centaines de mètres) étaient régulièrement observés il y a encore 40 ans, leur quasi disparition liée à la forte baisse du recrutement, ne doit pas être sans conséquence sur la dynamique de la colonisation (plus de difficultés de progression, plus grande sensibilité à la prédation,…).

o

Facteurs environnementaux impliqués

Le déclenchement des mouvements migratoires massifs en amont de la LMD apparaît très lié à la température, au débit fluvial (appel d’eau) et aux coefficients de marée (Tongiorgi et al, 1986 ; Martin, 1995 ; White et Knights, 1997a ; Crivelli et al, 2008 ; Arribas et al, 2012 ; Welsh et Liller, 2013, Harrison et al, 2014).

Pour la température, des suivis sur divers sites européens ne révèlent aucun passage significatif tant que la température de l’eau d’appel n’atteint pas une valeur seuil (6 à 9°C). Les auteurs observant ce déclenchement sur des barrages équipés de rampes annoncent même des seuils plus élevés (11 à 15°C), ce décalage étant sans doute lié au fait que l’animal sort de l’eau pour progresser sur la rampe, l’écart de température entre l’eau et l’air entrant alors en ligne de compte (Linton et al, 2007).

o Intensité du phénomène

Tous les relevés sur les passes estuariennes ou proches des limites de marée (Moriarty, 1986, Legault, 1994, Briand et al, 2003) révèlent la très grande rareté des anguilles de plus de 10 cm (en moyenne 2 à 3 % des passages observés). La grande majorité des franchissements par escalade sur ces ouvrages littoraux ou estuariens est observée entre avril et juin, mais des montées plus précoces ont aussi été observées lors de phases thermiques favorables. Pour les anguilles de plus grande taille, les passages s’échelonnent plus régulièrement d’avril à octobre.

Les franchissements par admissions d’eau en saison hivernale (Laffaille et al, 2007 ; Mouton et al, 2011) sur les ouvrages littoraux ne changent en rien à ce constat et renforcent même la prédominance des civelles, seules actives dans les périodes de basses températures (moins de 12°C).

Fig. : Civelles pigmentées et très petites anguilles jaunes en reptation verticale sur une paroi bétonnée, en utilisant la frange humide liée à la lame déversante © Cemagref

(25)

En rapportant le nombre de migrants observés sur des passes-pièges à la surface du bassin en amont du point de comptage, Legault (1992) a proposé le calcul d’indices de passage ou de recrutement. Les indices estuariens sont les plus élevés, mais révèlent également une forte variabilité interannuelle et inter-sites (tableau). L’évolution de l’état général de l’espèce, la position de chaque estuaire au sein de l’aire de répartition, l’impact plus ou moins significatif de la pêcherie aval ainsi qu’une probabilité significative de passage direct en cas d’ouverture de l’ouvrage lors des années à forte hydrologie hivernale, sont pour beaucoup dans cette variabilité.

Tab. : Nombre de migrants comptabilisés sur des passes littorales rapporté au nombre de km² de BV amont

Années Auteurs Bassin versant Indice

(Nb migrants/km² amont)

1975-1984 Vollestad et Jonsson Imsa (Suède) 30 à 380

1992 Legault (Fish Pass) Arguenon (Bretagne nord) 530

1996-2008 Briand (IAV) Vilaine (Bretagne sud) 3 à 250

2000-2002 Der Mikaelian (Parc Marais poitevin) Sèvre niortaise 60 à 120 2009-2013 Laharanne (FDAAPPMA 33) BV des lacs médocains 75 à 1 000

2010-2013 Rouet (FDAAPPMA 17) Seudre 140 à 500

o Impacts des ouvrages soumis à marée sur la migration de colonisation

La gestion des ouvrages soumis à marée est souvent à l’origine de blocages plus ou moins longs des jeunes anguilles, blocages synonymes de prédation (oiseaux, poissons carnassiers), de cannibalisme ou de pathologies (ichtyophtyriose par exemple) associées aux fortes densités d’individus et enfin de prélèvements importants par pêche sur les premiers mois de l’année.

Ces blocages compromettent également toute la dynamique de colonisation de l’amont en retardant plus ou moins longuement la progression des migrants attirés par l’amont qui ne disposent au final que d’un créneau de quelques semaines favorables pour progresser chaque année.

o

Evolution de la turbidité et de la salinité observées au niveau de ces ouvrages

Un certain nombre de campagnes d’observation ont intégré l’observation de la turbidité et de la salinité (dans le cas de sites très en aval). Lorsque les valeurs de ces éléments sont élevées, ils doivent en effet être pris en compte pour concevoir des modalités de gestion ou d’aménagement compatibles avec les usages amont.

On rappellera ici la diversité des phénomènes observés dans la confrontation des deux masses d’eau, celle venant de l’estuaire lors du flot et celle provenant du territoire amont. Notamment le rapport de force entre ces masses d’eau va beaucoup influer. Dans un petit chenal peu profond au débouché d’un petit territoire amont, l’onde de marée provenant d’un estuaire important va rapidement progresser jusqu’à l’ouvrage avec une quasi-absence de stratification. Ce n’est plus le cas dans un chenal profond et large, au débouché d’un territoire amont plus vaste. Certains niveaux de débit fluvial peuvent en effet se solder par un retard important dans la progression de l’onde de marée et l’apparition d’une nette stratification (sel et/ou MES) plus ou moins durable sur le flot.

(26)

o En lien avec l’évolution des courants observés le plus souvent dans les petits tributaires au cours d’un cycle de marée, l’arrivée significative des MES (matières en suspension) liées à l’onde de marée en aval des premiers ouvrages intervient, après l’inversion, dans la dernière partie du flot (1 h 00 à 1 h 30 avant la pleine mer).

C’est le cas par exemple pour les suivis 2010 en Gironde (voir graphe, Lauronce et al, 2013) qui illustrent bien aussi la variabilité saisonnière du phénomène. Ainsi, cette année-là, des niveaux significatifs de MES sont observés à pleine mer en mars et avril alors qu’ils étaient beaucoup plus modérés en phase hivernale pour des coefficients de marée similaires.

Extrait des travaux de Migado (Lauronce et al, 2013) sur le premier ouvrage d’un tributaire en rive gauche de l’estuaire de la Gironde

C’est aussi le constat réalisé sur l’ouvrage charentais de Charras (chenal de 20 mètres de large, ouvrage à 500 m de l’estuaire de la Charente) avec l’enregistrement en continu de la hauteur d’eau aval (courbe bleue) et de la turbidité sur plusieurs flots successifs (exemple du 6 au 8 mars 2012, Rigaud et al, 2014). Dans cet exemple, le niveau de turbidité (courbe orange) augmente au fil des 5 marées suivies, la hausse des MES étant centrée sur la pleine mer (traits verticaux) avec une arrivée tardive.

(27)

Idem lors de trois marées de 2010 suivies sur ce site par mesures manuelles toutes les 20 minutes.

2010

Toujours sur Charras, l’exemple de l’une des trois marées précédentes (celle du 23 mars) suivie par sondes permet aussi de constater la grande similitude d’évolution de la turbidité et la conductivité, au fond du chenal devant l’ouvrage.

Les suivis en rive droite de l’estuaire de Gironde par Migado (Lauronce et al, 2013) sur le même ouvrage tantôt avec des admissions en vantelle basse, tantôt en vantelle haute, ne révèlent pas de lien significatif entre le niveau de turbidité observé dans l’eau admise et la modalité d’admission. Avec un niveau maximal de turbidité de 400-500 NTU observée dans l’eau admise, ces teneurs peuvent en effet être enregistrées soit lors d’envois en surface sur certaines marées, soit lors d’envois par le fond sur d’autres flots.

Les suivis charentais (Rigaud et al, 2014) vont dans le même sens. Ainsi, à titre d’exemple, le suivi du 9 mars 2011 sur Charras révèle une nette stratification en aval de l’ouvrage, mais le suivi de la turbidité de l’eau admise par surverse révèle une turbidité du même ordre de grandeur que celle observée au fond du chenal.

Sur ce site et cette marée, la couche d’eau en surface est donc peu importante par rapport à celle de la masse d’eau salée et dans ce chenal de gabarit modeste (environ 15 m), la surverse provoque, au moins au voisinage de la vanne, une remontée d’eau de fond avec brassage.

Figure

Figure : Exemple d’enregistrement des niveaux d’eau en aval (courbe bleue) et en amont (courbe verte) d’un ouvrage avec  portes  à  flot
Figure : Porte à flot avec vantelle de Lamena (Médoc, Gironde)   en début de jusant à gauche et à mi-jusant à droite  (©  Irstea)
Figure 1 : Aire de répartition de l ’anguille européenne adaptée de Germain (1927) pour l ’aire continentale et Schmidt (1922) pour la répartition  des larves.604530150 6045301590756045301500153045135120105907560453015015304560
Tableau : Périodes des maxima d'abondance de civelles (d’après Elie et Rochard, 1994) Stades très peu pigmentés (VA-VB)
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