• Aucun résultat trouvé

Retravailler après un accident grave

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Retravailler après un accident grave"

Copied!
4
0
0

Texte intégral

(1)

Une reprise de travail

nécessaire mais complexe

Après un accident grave, le patient reçoit généralement les soins médi-caux nécessaires avant d’être orienté vers des établissements ou services sanitaires de Médecine Physique Réadaptation (MPR) pour une réédu-cation et préparer la réinsertion sociale, quotidienne et profession-nelle. Les personnes accueillies dans ces établissements ou services sont principalement des hommes (78 %). Plus de la moitié des accidentés ont entre 30 et 49 ans (59 %), un quart ont moins de 30 ans et autant 50 ans et

plus. Au moment de l’accident, ils étaient en pleine activité : 85 % avaient un emploi, la plupart à durée indéter-minée. L’enjeu professionnel est donc de taille, d’autant que retrouver cet emploi n’est pas acquis.

Les individus touchés sont en effet majoritairement des ouvriers et des personnes peu diplômées. Près de la moitié, 48 %, occupent des postes d’ouvriers, soit deux fois plus souvent que l’ensemble des actifs (24 %), du fait du poids des accidents du travail qui surviennent plus souvent dans le BTP et l’industrie. 40 % ont le BEP ou le CAP, 20 % ont un niveau inférieur. Leur remplacement dans l’entreprise

C e n t r e d e R e c h e r c h e p o u r l ’ É t u d e e t l ’ O b s e r v a t i o n d e s C o n d i t i o n s d e V i e

ISSN 0295-9976 N° 214 – septembre 2008

Retravailler après un accident grave

Anne Loones

Trois ans après, un accidenté sur deux occupe un emploi

Situation professionnelle des individus trois ans après l’accident grave en %

Source : CRÉDOC, FFSA, 2007.

0 20 40 60 80 100 Après Avant Arrêt maladie Études-formation Recherche d'emploi Inactivité Travaille 85 50 26 10 11 7 2 7 1 1

Chaque année, 52 000 personnes sont vic-times d’un accident du travail entraînant une incapacité permanente et 40 000 sont gra-vement blessées dans un accident de la route. Une longue phase de soins et de rééducation commence alors, avec en inter-rogation la question de la reprise du travail. Certains établissements de soins tels ceux adhérents à l’association COMETE France l’abordent rapidement, d’autres moins vite, laissant se faire « un travail de deuil » après le choc.

L’enquête commanditée au CRÉDOC par la Fédération Française des Sociétés d’Assurances (FFSA) auprès de 400 per-sonnes sorties de centres de rééducation vise à mieux connaître la trajectoire profes-sionnelle après l’accident.

Les résultats montrent que si une grande majorité des accidentés travaillait avant, la moitié seulement occupe un emploi trois ans après l’accident. Les séquelles physiques, intellectuelles, mais aussi psychologiques sont des freins très forts à la reprise d’acti-vité. Les indemnités financières versées en compensation du handicap peuvent aussi, d’une manière involontairement perverse, freiner la personne dans son projet profes-sionnel en jouant un rôle de substitut de salaire.

(2)

C e n t r e d e R e c h e r c h e p o u r l ’ É t u d e e t l ’ O b s e r v a t i o n d e s C o n d i t i o n s d e V i e C e n t r e d e R e c h e r c h e p o u r l ’ É t u d e e t l ’ O b s e r v a t i o n d e s C o n d i t i o n s d e V i e

peut a priori ne pas poser de pro-blèmes ; beaucoup de ces personnes se retrouvent ainsi au chômage. De plus, les deux-tiers des accidentés graves souffrent de déficiences d’ori-gine traumatique (amputations, poly-traumatismes) avec un pouvoir de récupération variable ; 22 % ont eu des atteintes cérébrales et 15 % sont tétra ou paraplégiques. Ces deux dernières déficiences, en réduisant la motricité ou les capacités intellectuelles, remet-tent fortement en cause la vie profes-sionnelle. Enfin, l’accident crée des difficultés psychologiques : 79 % des personnes se sentent limitées dans la nature du travail qu’elles peuvent réa-liser, 61 % dans la quantité de travail, 43 % dans leurs déplacements sur leur lieu de travail et 32 % dans leurs déplacements entre leur domicile et leur lieu d’exercice.

Un accidenté

sur deux retravaille

Trois ans après l’accident, la moitié des individus a repris un travail, un quart est en invalidité, un sur dix recherche un emploi. L’inactivité et le chômage se développent alors qu’ils étaient quasiment inexistants avant l’accident. Ce constat avait déjà été fait lors d’une précédente étude du CRÉDOC (2003) sur les individus

pas-sés par des établissements de réédu-cation. 80 % avaient un emploi avant les soins et seuls 40 % travaillaient au moment de l’enquête.

En outre, reprendre le travail ne signi-fie pas reprendre le même travail. Les conditions changent dans quatre cas sur dix. 59 % de ceux qui retravaillent occupent le même poste dans les mêmes conditions, 16 % bénéficient d’un aménagement de poste, 14 % d’un aménagement du temps du tra-vail et 11 % ont changé de poste.

Les facteurs

de la reprise d’activité

Contrairement aux résultats des ana-lyses classiques sur l’insertion profes-sionnelle, l’étude du CRÉDOC montre que le profil sociodémographique n’a que peu d’impact sur la reprise du tra-vail. Les femmes retravaillent autant que les hommes et la reprise d’activité concerne toutes les tranches d’âges jusqu’à 55 ans. (Le champ de l’étude ne dépassait pas ce seuil).

Retravailler est d’autant plus difficile que les facultés intellectuelles ou motricielles sont touchées. 28 % des personnes souffrant d’atteintes médullaires (atteintes à la moelle épi-nière entraînant des paralysies des membres supérieurs et/ou inférieurs) retravaillent et 41 % de celles ayant des atteintes cérébrales.

Outre le physique, le psychisme influence la reprise d’activité. Un quart des personnes déclarant avoir beau-coup de mal à vivre avec leur handicap et à réorganiser leur vie sociale et quoti-dienne retravaille. Et pourtant, le travail a un effet bénéfique sur le psychisme : pour les personnes qui ont repris une activité, la prévalence des difficultés psychologiques baisse avec le temps. La place donnée par le travail modifie la vision de la personne sur son rôle dans la société et son projet de vie.

Les accidentés : des hommes, entre 30 et 49 ans, peu diplômés, ouvriers dans le BTP

Principales caractéristiques des individus enquêtés, en %

Source : CRÉDOC, FFSA, 2007.

Huit accidentés sur dix se sentent limités dans le travail qu’ils peuvent réaliser

Nature de la limitation déclarée par les enquêtés, en %

Source : CRÉDOC, FFSA, 2007.

0 10 20 30 40 50 60 70 80 Actifs occupés Accidentés Contremaîtres, agents de maîtrise BTP Ouvriers qualifiés Niveau BEP-CAP 30-49 ans Hommes 78 53 59 27 40 26 38 16 12 6 10 23 0 10 20 30 40 50 60 70 80 Déplacements domicile-travail Déplacements

sur le lieu de travail Quantité de travail Nature du travail 79 61 43 32

(3)

Les indemnités financières visant à compenser les conséquences du han-dicap semblent également freiner la mobilisation de la personne autour d’un projet professionnel. 69 % des accidentés qui perçoivent une pension d’invalidité et 59 % de celles ayant une rente d’accident du travail ne tra-vaillent pas. Cela peut se comprendre, dans la mesure où ces aides sont ver-sées à des individus ayant des incapa-cités graves. Ils hésitent à reprendre un emploi qui diminuerait ou suppri-merait leurs droits puisque les indem-nités sont versées sous conditions de ressources. L’indemnisation par les compagnies d’assurance a le même

effet lorsque les sommes accordées ont un montant suffisamment élevé pour compenser la perte d’un revenu. A contrario, certains aménagements proposés par l’entreprise facilitent la

réinsertion : 68 % des personnes qui ont bénéficié d’un aménagement de poste retravaillent ainsi que 71 % des bénéficiaires d’un temps partiel. Maintenir la personne dans l’entre-prise semble donc un atout, le salarié ayant plus de chances de voir son handicap pris en compte.

Enfin, le profil du poste avant l’acci-dent a aussi un impact : les contre-maîtres et cadres retravaillent plus souvent (82 %) ainsi que les salariés du public ou du para-public (75 %). Le secteur d’activité n’a, en revanche, pas d’influence.

Ces facteurs sont évidemment liés entre eux : par exemple, les personnes souffrant d’atteintes médullaires (à la moelle épinière) ont plus de chances d’avoir des difficultés psychologiques mais aussi de bénéficier d’un aména-gement de poste. Si on raisonne

C e n t r e d e R e c h e r c h e p o u r l ’ É t u d e e t l ’ O b s e r v a t i o n d e s C o n d i t i o n s d e V i e C e n t r e d e R e c h e r c h e p o u r l ’ É t u d e e t l ’ O b s e r v a t i o n d e s C o n d i t i o n s d e V i e

Les personnes souffrant de difficultés psychologiques ou d’atteintes médullaires retravaillent moins souvent

Probabilité de retravailler après un accident grave selon quelques caractéristiques des individus en %

Source : CRÉDOC, FFSA, 2007.

Six accidentés sur dix gardent les mêmes conditions d’emploi

Réponse à la question : Avez-vous repris le même travail que celui que vous occupiez avant l’accident ? en %

Source : CRÉDOC, FFSA, 2007.

Oui, mais sur un autre poste (reclassement interne), 11 % Oui, avec des aménagements

dans les horaires ou le rythme de travail, 14 %

Oui, avec des aménagements de poste, 16 %

Oui,

dans les mêmes conditions, 59 %

0 20 40 60 80 100

Fortes difficultés à vivre avec son handicap Fortes difficultés à réorganiser sa vie quotidienne Fortes difficultés à réorganiser sa vie sociale Atteintes médullaires A une pension d'invalidité A une rente AT Atteintes cérébrales Ensemble Traumatismes A bénéficié d'un aménagement de poste A bénéficié d'un temps partiel

Contremaître, cadres 82 71 68 58 50 41 41 31 28 27 25 23

L’enquête du CRÉDOC

400 patients âgés de 16 à 55 ans et sortis d’un établissement ou service sanitaire de Médecine Physique Réadaptation en 2003 ou 2004 ont été interrogés par télé-phone en mars 2007. Ils avaient tous été victimes d’un accident de la route, du tra-vail ou de la vie privée (loisirs, domes-tique). Ces patients étaient répartis sur 14 établissements ou services : 7 appartenant au réseau COMETE France et 7 n’en fai-sant pas partie.

L’échantillon des patients suivis par des actions COMETE France est représentatif de cette population en terme de sexe, âge, type de déficience et situation profession-nelle avant l’accident.

L’autre échantillon, qui servait d’échan-tillon témoin pour mesurer l’effet des actions COMETE France, a été constitué de telle sorte qu’il soit semblable à celui des patients suivis par des actions COMETE France sur les mêmes variables.

(4)

« toutes choses égales par ailleurs » (à âge égal et déficience identique) les deux principaux freins à la reprise d’activité sont la perception d’une indemnité financière de type pension d’invalidité, ou rente d’accident du tra-vail, et le type de déficiences.

L’impact du suivi

des patients

Il existe dans les centres de rééduca-tion différents types de suivi des acci-dentés. Certaines équipes sont dotées d’ergonomes et de conseillers en emploi, comme celles du réseau Comète France. Leur but est de mobi-liser le patient, dès la phase de soins, sur son enjeu professionnel, de l’infor-mer et de l’aider à mobiliser les moyens qui vont permettre une reprise du travail. Une précédente étude menée en 2003 montrait déjà que les patients qui bénéficiaient d’un suivi par ces équipes avaient deux fois plus de chances de retravailler. L’étude de 2007 confirme ce résultat et montre que ce bénéfice profite

principalement aux patients souffrant d’atteintes médullaires ou cérébrales, les deux déficiences qui posent le plus d’obstacles à la reprise d’acti-vité. Près de la moitié des patients souffrant de ces séquelles retra-vaillent après l’accident lorsqu’ils ont bénéficié d’un tel suivi. Un quart de ceux qui n’ont pas eu ce suivi retra-vaillent et quatre sur dix sont en inva-lidité sans chercher d’emploi.

Travailler et se soigner

Après l’accident, les trois-quarts des accidentés bénéficient d’un suivi régu-lier auprès de professionnels de santé : spécialistes, généralistes ou encore masseurs-kinésithérapeutes. Les personnes qui retravaillent sont moins consommatrices de prestations médicales et paramédicales : 59 % voient leur médecin traitant tous les trimestres contre 79 % de celles qui ne retravaillent pas. Cet effet est valable à type de déficience égale. Retravailler permet d’être et de se sentir en meilleure santé après l’accident. Q

Réalisation La Souris : 01 45 21 09 61 www .lasouris.org CRÉDOC

Consommation et Modes de Vie

O

Publication du Centre de recherche pour l’étude et l’observation

des conditions de vie O

Directeur de la publication : Robert Rochefort

O

Rédacteur en chef : Yvon Rendu O

Relations publiques

Tél. : 01 40 77 85 01

relat-presse@crédoc.fr O

Diffusion par abonnement uniquement 30,49 euros par an Environ 10 numéros

O

142, rue du Chevaleret, 75013 Paris O Commission paritaire n° 2193 AD/PC/DC O www.crédoc.fr C e n t r e d e R e c h e r c h e p o u r l ’ É t u d e e t l ’ O b s e r v a t i o n d e s C o n d i t i o n s d e V i e C e n t r e d e R e c h e r c h e p o u r l ’ É t u d e e t l ’ O b s e r v a t i o n d e s C o n d i t i o n s d e V i e

Pour

en savoir plus

OLa réinsertion sociale et professionnelle des personnes sortant d’établissements ou de services sanitaires de Médecine Physique Réadaptation FFSA, 2007, col-lection des rapports CRÉDOC n° 250, juin 2007.

OLe devenir professionnel des personnes suivies par les sites Comète France, AGE-FIPH & Comète France, 2003.

Le suivi des accidentés double les chances de retravailler

Source : CRÉDOC, FFSA, 2007.

0 10 20 30 40 50

Patients non suivis par Comète France Patients suivis par Comète France

Arrêt de travail En formation professionnelle En invalidité mais souhaite travailler Recherche d’un emploi En invalidité sans chercher d’emploi Travaille 47 14 13 12 10 4 8 4 13 11 39 25

Références

Documents relatifs

Lorsque le salarié en arrêt pour accident de travail ou maladie professionnelle n'a pas pu prendre ses congés payés annuels sur l'année prévue par la loi ou la convention

L’article 41 du décret 85-603 du 10 juin 1985 modifié prévoit que le comité procède à une enquête à l’occasion de chaque accident de service ou à chaque maladie

Así, volver al trabajo forma parte de una trayectoria que se inicia antes del alejamiento del lugar de trabajo y que se prolonga en un proceso de reinserción profesional

Précisez l’activité générale (le type de travail) qu’effectuait la victime ou la tâche (au sens large) qu’elle accomplissait lorsque l’accident s’est produit (p.

A remplir par l’exploitant de l’établissement pour tout accident grave survenu au sein de l’établissement 1 et à envoyer dans les 48 heures au service déconcentré chargé

Tout accident grave, intéressant même un tiers, survenu dans le cadre d'un établissement ou d'un centre de placement de vacances, doit être signalé par les moyens les plus rapides à

accident de droit commun (accident de circulation) accident du travail proprement dit.. cette maladie est reconnue comme une maladie professionnelle car le métier de secrétariat

Le profil des troubles exécutifs (cognitifs et comportementaux) post-AVC a été spécifié dans l’étude multicentrique du Groupe de réflexion pour l’évaluation des