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Analyse des facteurs de la non fréquentation des centres d'alphabétisation par les femmes malinké en milieu rural du Mali [sic] : étude du cas de Golobilaji

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(1)

THESE PRESENTEE

A L'ECOLE DES GRADUES DE L'UNIVERSITE LAVAL

POUR L'OBTENTION

DU GRADE DE MAÎTRE ES ARTS (M.A.)

PAR IBRAHIMA SOW BACHELIER ES ARTS DE L 'UNIVERSITE LAVAL

ANALYSE DES FACTEURS DE LA NON FREQUENTATION DES CENTRES D'ALPHABETISATION PAR LES FEMMES MALINKE EN MILIEU RURAL DU MAILI. ETUDE DU CAS DE GOLOBILAJI

MARS 1985 l 3 5 . 5 " U L r n s

S

73

/

(2)

(Tout tKAvojJL que ¿'homme. accompZtX, ÂJL tj tAouve ¿e bonhe.uA. )

Hadj Amadou SOW

À ¿a mémo-Oie. de ce v-itux ¿age pzul que. {¡ut mon pèJie., je dédie ce. ViavoJJL.

Je ¿e dédte égaZejment à £eu ma meAe., à me,6 &sieAeJ> et ¿oe.uAA,

a ma emme. eX à meA e,nfiant6.

Ce üiavatZ u t au^i-i dédié à ¿a mémoire de Papa Sij

(3)

Au moment de mettre ces pages entre les mains de nos lecteurs, notre propos sera de dire que nous n'avons voulu ni nous li v re r à une sorte de compilation de tout ce qui a été dit sur le thème traité «L'alphabétisation des femmes» ni rédiger un livre à caractère académique. Notre but est tout autre. Il est en quelque sorte de

fournir un soutien, une aide, une maigre contribution à l'élimination de l'analphabétisme dans le monde et plus particulièrement dans notre pays, où plus de 80% de la population est analphabète. La lutte contre

l'analphabétisme est l 'a f fa ir e de tout le monde. Elle concerne toutes les couches sociales au niveau du Tiers-Monde.

Nous avons essayé dans ces quelques pages de présenter les problèmes clés, ceux qui, à notre avis, bloquent depuis une décennie notre lutte contre l'analphabétisme. Nous sommes parti de l'idée

qu'alphabétiser la masse rurale n'est pas chose facile surtout quand il s'agit de la femme rurale.

Cependant, il nous a été impossible de déterminer tous les

facteurs qui bloquent ou ont bloqué l'alphabétisation des femmes. Dans la mesure où - et cela compte tenu de nos moyens et de notre

(4)

pertinents.

Cette recherche donc est une réponse à un besoin pressant qui se fait de plus en plus sentir de nos jours. Il s'agit d'un besoin

d'information exprimé par la Direction Nationale de l'Alphabétisation et de la Linguistique Appliquée (DNAFLA).

A

ce t i t r e , elle s ' i n s c r i t dans un programme de politique de lutte contre l'analphabétisme au Mali.

Il n'y a pas de doute que la recherche des causes et conséquences des abandons et même de la non fréquentation des centres d'alphabéti­ sation par les femmes demeure primordiale et doit constituer une étape privilégiée visant à améliorer l' e ff ic a c it é du système d'alphabétisation fonctionnelle.

Nous remercierons donc le Projet Ouest Africain (POA) qui, grâce à son apport financier, a permis la concrétisation de cette recherche.

Nous remercions aussi tous les professeurs du Département d'administration et politique scolaires de l'Université Laval; la DNAFLA; le personnel de l'offic e de Développement Intégré des Produits Arachidiers et Céréaliers (ODIPAC) de Kita ainsi que toute la population du village de Golobilaji (Kita) pour la collaboration qu'elle nous a apportée dans la réalisation de cette recherche.

(5)

multiples occupations, n'ont ménagé aucun effort pour diriger cette recherche et apporter leur concours précieux.

A

N'Golo Coulibaly, chercheur à la DNAFLA, dont les conseils, les encouragements, l'e sp rit de collaboration, d'aide et de critique ont été d'un grand intérêt dans l'aboutissement de ce travail; qu'il trouve ici toute notre reconnaissance. Et à Fodé Coumaré, Ibrahima Traoré, tous à la Planification de l'Education du Mali, nous disons merci.

Enfin, nous témoignons toute notre gratitude à notre femme pour sa longue patience.

(6)

A.O.F. Afrique Occidentale Française C.A.A. Centre d'Apprentissage Agricole CAR Centre d'Animation Rural

C.D.C Centre de Développement Communautaire C .F .I . Centre de Formation Intensive

C.M.D.T. Compagnie Malienne de Développement du Textile COP Centre d'Orientation Pratique

DNAFLA Direction Nationale de 1'Alphabétion Fonctionnelle et de la Linguistique Appliquée

DNFAR Direction Nationale de la Formation et d'Animation Rurale

O.A.C.V. Opération Arachide et Culture Vivrière

ODIPAC Office de Développement Intégré des Produits Arachidiers et Céréaliers

PAM Produit Alimentaire Mondial P.O.A. Projet Ouest Africain

MEN Ministère de l'Education Nationale

(7)

Avant-Propos ... ii Les Abréviations ... v CHAPITRE I ... 1 Postion du problème ... 1 Énoncé du problème ... 9 Pertinence du sujet ... 10

CHAPITRE I I : Revue de la littérature ... 13

2.1 Organisation du travail au sein de la famille ... 13

2.2 Rôle de la femme rurale africaine ... 16

2.2.1 Rôle famil ial ... 16

2.2.1.1 La femme en tant que mère ... 16

2.2.1.2 La femme, mère et éducatrice des enfants ... 17

2.2.1.3 La femme et les tâches domestiques ... 19

2.2.1.3.1 La femme à la cuisine ... 19 2.2.1.3.2 Le puisage de l'eau ... 20 2.2.1.3.3 Le ramassage du bois ... 21 2.3 Rôle productif... 22 2.3.1 Travaux champêtres ... 23 2.3.2 Elevage et pêche ... 25 2.3.3 Commerce ... 25 CHAPITRE I I I : Méthodologie ... 31 3.1 L'approche méthodologique ... 31

3.2 Description et justification des variables ... 34

3.2.1 Variable indépendante ... 34

3.2.1.1 Temps disponible ... 34

3.2.2 Variable dépendante ... 35

3.2.2.1 La non fréquentation des centres ... 35

3.2.3 Variables de contrôle ... 36

3.2.3.1 Rapport d'autorité ... 36

(8)

3.3 Choix du mil ieu ... 40

3.4 Les instruments et la cueillette de données ... 43

3.5 La démarche suivie ... 44

3.5.1 Impossibilité d'isoler l'interviewée ... 46

3.5.2 La présence du guide ... 46

3.5.3 Impossibilité d'empêcher le contact de 1 'interviewée avec les compagnes du village ... 46

3.5.4 Refus total d'être interviewée ... 47

3.5.5 Le refus catégorique de se soumettre à l'interview .. 48

3.6 Période d'enquête ... 48

3.7 L'échantillon ... 48

CHAPITRE IV: Résultats et Analyse ... 50

4.1 Caractéristiques du village de Golobilaji ... 50

4.1.1 Santé ... 52

4.1.2 Ecole ... 52

4.2 L'alphabétisation fonctionnelle à Golobilaji ... 53

4.2.1 Impact de l'alphabétisation au niveau du village . . . . 54

4.3 Résultats et analyse ... 57 4.4 Considérations générales ... 97 CONCLUSION ... 101 REFERENCES ... 104 BIBLIOGRAPHIE ... 108 ANNEXES ... 113

(9)

POSITION DU PROBLEME

L'école, en tant qu'institution importée en Afrique noire, avait pour objectif de départ de satisfaire les besoins immédiats de la

colonisation. La formation avait comme objectif premier une «transfor­ mation» de l'homme indigène, c'est-à-dire créer l'homme africain à

l'image du colonisateur. Revi, Gouverneur de l'Afrique Occidentale française (A.O.F.) disait:

Le devoir colonial et les nécessités politiques et économiques imposent à notre oeuvre d'éducation une double tâche; il s'agit d'une part de former des cadres indigènes qui sont destinés à devenir nos auxiliaires dans tous les domaines et d'assurer l'ascension d'une éli t e soigneusement choisie;

il s'agit d'autre part d'éduquer la masse pour la rapprocher de nous et transformer son genre de vie . . . Au point de vue économique enfin, il s'agit de

préparer les producteurs et les consommateurs de demai n . . . (1)

Pour atteindre ces objectifs, il f a l l a i t passer par Les références se trouvent à la page 104.

(10)

l'école institut d'éducation et de formation. On voyait ainsi la société africaine se transformer et tendre vers ce qu'on a appelé la «modernisation».

Mais l'école n'avait-elle pas trouvé une société africaine bien organisée? L'éducation traditionnelle bien structurée tendait-elle aussi à former l'homme idéal africain à savoir: l'homme fort, coura­ geux, travailleur, respectueux des us et coutumes propres à son milieu. N'ayant pas respecté les principes d'éducation et de formation propres à l'Afrique noire, l'école a été l' in sti g atr ic e d'une transformation

apportant un nouveau mode de vie tout différent de celui vécu depuis des millénaires par les sociétés africaines.

Aux heures de l'indépendance politique, les responsables a f r i ­ cains, conscients non seulement de la balkanisation du continent noir mais aussi de l ' e f f e t que la colonisation avait eu sur l'homme africain, essayèrent d'apporter un nouveau changement. Il f a l l a i t conserver les acquis positifs de la colonisation tout en valorisant la tradition. Le moyen le plus sûr pour atteindre cet objectif fut d'entreprendre une réforme de l'enseignement. «La plupart des nouveaux gouvernements avaient alors annoncé leur ferme intention de décoloniser leur culture, en particulier par le moyen privilégié de la réforme de l'enseignement.»

Dès lors, l'Afrique vit deux mondes: le monde dit «moderne»

compte tenu de l'évolution et des progrès scientifiques et le monde dit «traditionnel» propre à l'Afrique elle-même.

(11)

Dans l'évolution de ce progrès scientifique, l'accent a été mis non seulement sur le contenu des programmes mais aussi sur la formation visant une rentabilité économique. Cependant, la formation entreprise se heurte à de nombreuses difficultés qui freinent son évolution. Parmi ces dif fi cu lt és, il faut retenir l'analphabétisme, fléau très répandu dans le Tiers-Monde. A ce sujet, Ester Boserup (1975:27) écrivait: «L'analphabétisme représente toutefois un sérieux handicap - sinon une barrière absolue - lorsqu'il s'agit de participer à la modernisation d'activités traditionnelles». Et l'Unesco (1976:135) dans son évalua­ tion critique fa is a it remarquer que: «L'analphabétisme des adultes, c'est tout d'abord, la non participation de groupes entiers à la vie de la communauté . . . l'analphabétisme n'est que la manifestation sur le plan éducatif d'un ensemble complexe de facteurs . . . qui a exclu de l'évolution environnante des groupes entiers ...»

L'analphabétisme considéré comme étant un des obstacles au progrès socio-économique d'un pays, l'Unesco et les pays africains décidèrent d'emprunter une nouvelle voie. Il fut alors question de

l'alphabétisation fonctionnelle définie par l'Unesco en ces termes: «Par 'alphabétisation fonctionnelle' il faut entendre toute opération d'alphabétisation conçue comme une composante de projet de développement économique et social.» (3)

Rappelons ici le concept d'alphabétisation fonctionnelle selon la Conférence de Téhéran (1965, Rapport fina l, p. 32):

. . . L'alphabétisation doit comporter un enseignement qui permette à l'analphabète dépassé par l'évolution actuelle et producteur insuffisant, de s'intégrer

(12)

socialement et économiquement dans un monde nouveau où les progrès techniques et scientifiques exigent de plus en plus de connaissances et de spécialisation.

( . . . ) L'alphabétisation ne devrait pas être considérée comme une fin en soi mais comme un moyen indispensable au développement en général et harmonieux des masses analphabètes.

Malgré les efforts entrepris pour vaincre l'analphabétisme et pour aider les pays sahéliens à satisfaire aux nécessités préalables de

formation, la majorité de la population adulte et des enfants reste dans l'analphabétisme. «Le taux mondial de l'analphabétisme a pu être ramené entre 1970 et 1980 de 32,9% à 28,6%. Mais si dans l'ensemble, le

pourcentage des analphabètes a baissé, leur nombre absolu continue

d'augmenter du fa it de la croissance démographique. En 1970, i l y avait 760 millions d'analphabètes dans le monde; il y en a 824 millions

aujourd'hui . .. » (4) Cet analphabétisme est beaucoup plus remarquable surtout au niveau de la population féminine. Sur une population de plus de 800 millions d ' i l l e t t r é s , les femmes représentent 60% dont la grande partie se trouveraient en milieu rural.

Cependant, la formation entreprise à tous les niveaux ne touche qu'une partie de la société à savoir les hommes. Les femmes, quant à e lle s , ne reçoivent souvent que la formation traditionnelle et familiale pour accomplir des tâches. Sont peu nombreuses les femmes africaines qui bénéficient de la formation agricole ou sanitaire. AGRIPR0M0, revue féminine, éc rit: «En Afrique en général: 30% des enfants scolarisés sont des f i l l e s ; 90% des femmes ne savent pas l i r e et écrire; plus de 60% des i l l e t t r é s sont des femmes; moins de 30% des mamans ne reçoivent pas une formation en matière de nutrition, d'hygiène et de puéricul­ ture.» (5)

(13)

Dans le cas du Mali, le dernier recensement de 1976 fait ressortir que la population féminine est de 3 271 185 et que 83,25% de cette

population est rurale. En outre, le rapport de recensement nous montre que 2 315 423 femmes n'ont jamais fréquenté l'école et 87% de cette même population est rurale. L'âge des recensées est de 6 ans et plus. En ne retenant que le groupe d'âges 12 ans et plus, la population est de 1 915 747.

On voit donc à partir de ces données que le nombre de femmes qui fréquentent ou ont fréquenté l'école est très minime voire même insigni­ fiant.

Sur le plan de l'alphabétisation, cette même population féminine reste de très loin la plus défavorisée. Très peu d'initiatives dans le domaine de la formation des femmes ont vu le jour et les expériences entreprises dans ce sens ne semblent pas répondre aux attentes réelles des femmes. En effet, les programmes conçus aux cours de ces expé­ riences étaient beaucoup plus axés sur les occupations masculines et au niveau des centres d'alphabétisation les brochures confectionnées

étaient inadaptées aux besoins des femmes rurales en particulier et de toutes les femmes d'une manière générale. «Les brochures en question (des centres féminins) du moins, celles de la deuxième phase, qui doivent faire ressortir la 'fonctionnalité' de l'alphabétisation des femmes, ne semblent toujours pas très adaptées aux besoins des femmes rurales.» (DNAFLA, 1978:125)

(14)

- Les Centres d'Animation Rurale (CAR): l' object if de ces centres est d'assurer la formation des jeunes paysans; il s'agit de leur inculquer des connaissances sur les techniques nouvelles en

agriculture, en élevage et en gestion pour favoriser leur intégra­ tion au milieu rural et élever leur niveau de vie.

- Les Centres de Développement Communautaire (C.D.C.): il est à rappeler que le Développement Communautaire au Mali est conçu comme étant une technique qui vise à la promotion d'une vie meilleure pour toute communauté avec la participation active de tous ses membres. Les Centres de Développement Communautaire (C.D.C.) ont pour objectif de permettre aux jeunes d'accéder à un métier pour participer au développement de leur terr itoire.

Les programmes de tous ces centres (CAR, C.D.C.) adaptés aux préoccupations des masses rurales, s'efforcent de vulgariser certaines méthodes modernes de production agricole et de soin de santé. (Berthé, Adama, 1980:43)

Il semblerait que la Direction Nationale de la Formation et l'Animation Rurale (DNFAR) qui regroupe les C.A.A., CAR, COP, et qui a pour objectif la promotion multilatérale en milieu rural même, par sa section féminine, a entrepris des actions envers les femmes rurales. L ' Essor éc rit: «Parallèlement des actions diffuses sont menées par la section féminine de la Division et technique vers les groupements de femmes rurales désireuses d'améliorer leurs conditions de vie en prati­ quant des activités rémunératrices telles la teinture, la couture, la

(15)

fabrication du savon, la maroquinerie, la vannerie, le jardinage, e t c ...» (6)

Cependant, au niveau de ces centres où des actions de formation ont été entreprises, l'alphabétisation reste presqu1inexistante.

Dans les secteurs de développement où l'alphabétisation est une partie intégrante des opérations, le taux de participation des femmes est très faible. Le tableau statistique de 1979 f a i t ressortir le faible pourcentage des femmes inscrites dans les centres

d'alphabétisation de l'ensemble des différentes opérations de développe­ ment. Par exemple, dans la zone encadrée par la C.M.D.T. (Compagnie Malienne pour le Développement du Textile) sur 8 691 auditeurs qui

suivent les cours d'alphabétisation, 2 ,2n représentent les femmes. Dans la zone arachidière ODIPAC (7), 5,79% des auditeurs sont des femmes sur un total de 26 961. Il faut noter que ce sont là les deux plus grandes opérations de développement rural du Mali ou l'action d'alphabétisation a été la plus pressante. Dans les autres secteurs, les femmes sont totalement ou presqu' ignorées.

D'autre part, le rapport final présenté par la section évaluation et planification de la DNAFLA avait déjà fa it état de cette faible participation des femmes dans les cours d'alphabétisation:

La proportion des femmes et jeunes f i l l e s parmi l'auditoire (des centres d'alphabétisation fonction­ nelle) a doublé de 1975 à 1977. mais reste encore très faible 8% de l'inscription totale. En 1576, le tiers des auditrices principalement des femmes mariées (âge moyen: 26 ans) participaient à des centres féminins, qui étaient situés pour la plupart en v i l l e et ne

(16)

marchaient pas très bien. Les deux t i è r s , principa­ lement des jeunes f i l l e s (âge moyen: 15 ans) étaient inscrits à des centres mixtes en campagne (9% des centres étaient mixtes en 1976, 12% en 1977). (8)

Il semblerait donc que la non participation des femmes aux a c t i­ vités d'alphabétisation s'explique par leur peu de disponibilité. La femme malienne assume de grandes responsabilités au sein de la famille, du village. Soumise à des contraintes sociales, elle joue un rôle important et les attentes de la société envers elle sont énormes. Ses obligations envers toute la communauté sont définies, non seulement par les us et coutumes mais aussi par les différentes religions. C'est ainsi que pour répondre d'une manière adéquate aux normes et aspirations de toute la communauté, la femme malienne en général et la femme malinké en particulier doit accomplir toutes les tâches qui sont à la fois

sociales, culturelles et économiques.

Et le temps consacré à l'accomplissement de ces tâches est si grand que l'on est en droit de se demander si les femmes malinké dispo­ sent de temps libre. A cet effet, Jacqueline Chabaud (1970:115) en parlant des difficultés de participation des femmes aux activités éducatives écrit : « . . . surchargées de besognes domestiques et de

travaux agricoles ou commerciaux, les femmes disposent de moins de temps que les hommes pour suivre des cours. Qu'elles prennent ce temps sur celui qu'elles consacrent à leurs travaux et il en résulte pour elles un manque à gagner immédiat.»

Il nous est donc possible de penser que les responsabilités familiales, sociales et économiques qui sont assumées par les femmes

(17)

maliennes en général et les femmes malinké en particulier sont à la source de la non participation aux activités d'alphabétisation.

Enonce du problème

Le but de notre étude est surtout d'identifier, à partir des propos des femmes, les facteurs explicatifs de leur non participation aux activités d'alphabétisation fonctionnelle.

Il s'agit donc pour nous d'une étude exploratoire. Nous savons déjà, à partir des études et recherches faites, que l'hypothèse retenue à savoir: - la surcharge de l'emploi du temps des femmes leur laisse peu de temps disponible pour se consacrer à une quelconque formation - a été vérifiée.

Notre étude, dans le cadre du Mali, ira plus loin. Non seulement, elle fera ressortir ce facteur clé, mais aussi, elle cherchera d'autres facteurs qui pourront expliquer davantage la non participation des femmes aux activités d'alphabétisation.

A partir d'une étude de cas portant sur les femmes malinké d'un village malien, la cueillette des données fera ressortir tous les facteurs expliquant leur non disponibilité à participer aux cours d'alphabétisation.

Cette étude portera non seulement sur le temps disponible mais aussi et surtout l'analyse de quelques facteurs pertinents pouvant

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influencer la participation des femmes aux activités d'alphabétisation. Ces facteurs pourront être:

- les occupations de la femme; - l'autorité au sein de la famille;

- l'attitude des femmes vis-à-vis des programmes d'alphabétisation; - la religion et/ou la coutume;

- etc.

PERTINENCE DU SUJET

La réforme de l'enseignement entreprise au Mali en 1962 avait pour objectif premier «Faire un enseignement de masse et de qualité, adapté aux besoins et aux réalités du Mali.» Pour atteindre cet objectif, le Ministère de l'Education Nationale (MEN) fut chargé d'éliminer l' a n a l­ phabétisme. L'action entreprise ne devrait être qu'un instrument de l'éducation populaire. Afin de toucher toute la population adulte, il fut entrepris une alphabétisation des producteurs: paysans, ouvriers.

De 1968 à 1982, le nombre de centres d'alphabétisation s'élève à plus de 2 500 et plus de 38 000 auditeurs y sont in scr its. Un centre a pour effectif 25 à 40 auditeurs. A en croire le nombre des pa rtic i­ pants, on penserait à une représentativité égale des deux sexes (féminins et masculins). Il n'en est rien, car 5,8% seulement des femmes suivent des cours et dans des centres mixtes.

Aucune étude entreprise du côté de l'alphabétisation des femmes n'a donné une réponse satisfaisante et le problème demeure aussi aigu en

(19)

1982 que dans le passé. Une étude systématique et approfondie de la question semble urgente compte tenu des investissements considérables du gouvernement et de la société et compte tenu du fait que la population féminine qui représente plus de 50% de la population totale est mise à l'écart du développement de la société.

Il est utile de rappeler ici que l'économie malienne qui est essentiellement agro-pastorale repose en grande partie sur la force des paysans: 80% de la population vi t de l'agriculture, de l'élevage et de la pêche. Parmi cette population, celle qui est du sexe féminin est considérable. Et cette population féminine contribue largement à la production du pays. La stratégie du développement entreprise au Mali est de tenter d'élever la productivité des individus dans le secteur agro-pastoral. L'un des moyens ut il is és est l'alphabétisation fonction­ nelle de ces mêmes producteurs. Cependant, ce qu'on pourrait reprocher à cette action entreprise depuis une décennie dans le pays est surtout son manque de politique d'innovation orientée vers la participation des femmes à l'alphabétisation. De toutes les innovations entreprises dans le sens d'une formation, la participation des femmes est beaucoup moins considérée.

Il serait donc nécessaire à notre avis de s'interroger sur les facteurs de la non participation des femmes à l'action d'alphabétisation fonctionnel le.

Cette étude nous paraît donc pertinente car comme les hommes, les femmes participent au développement et ont autant besoin de formation

(20)

pour améliorer leur condition socio-économique.

Le rôle joué par les femmes dans le développement socio-économique est très déterminant. A ce t i t r e , la femme recevra une formation

adaptée aux réalités mouvantes du milieu socio-économique et socio-culturel et surtout aux techniques que requiert l'évolution moderne.

Responsable au même titre que l'homme, la femme sera «éduquée» au même ti t re que lui et pas seulement dans des secteurs d'économie ména­ gère, d'hygiène et de puériculture.

(21)

REVUE DE LA LITTERATURE

Des études portant sur l'évolution de la condition des femmes ont été entreprises depuis 1960. Ces études ont surtout porté sur le rôle des femmes dans le développement: économique, social, politique,

culturel.

La revue de la littérature couvrira l'organisation du travail au sein de la famille sous deux (2) aspects importants de la femme: rôle familial et rôle productif. Mais auparavant une mise au point de l'organisation du travail au sein de la famille africaine s'avère nécessai re.

2.1 Organisation du travail

L'organisation du travail s'observe au niveau de la famille qui constitue une unité de production et de consommation. Le chef d'exploi­ tation est le chef de famille. Il s'occupe de la gestion des ressources

(22)

de la famille. Partout au Mali, le travail se différencie en fonction des sexes. La différence est plus ou moins marquée selon chaque région.

On distingue les travaux champêtres et les travaux domestiques, lesquels comprennent les travaux ménagers relatifs à la cuisine, à la lessive, au nettoyage de la cour et aux soins à apporter aux enfants, et les travaux de construction et d'entretien des maisons. Dans le milieu pastoral, les travaux sont beaucoup plus orientés vers l'entretien des animaux et des enclos.

A part les travaux de construction réservés uniquement aux hommes, les autres travaux sont effectués par tous les membres de la famille. H. Sidibé dans une étude faite sur les Dogons du Mali écrit:

A part les travaux de construction, les femmes dogons font tous les travaux. Elles s'occupent des champs comme les hommes et s'adonnent aux lourdes tâches ménagères dont le battage du mil qui, avec la recherche du bois de chauffage

(cuisine) et le transport de l'eau, constituent les pires travaux auxquels elles font face. Elles participent à toutes les tâches agricoles, de même que le jardinage. Dans certains villages, elles entretiennent leurs propres parcelles (dans toute la région de Sanga). Ailleurs comme à

Dourou elles ne possèdent pas des parcelles indivi­ duelles.» (9)

Edith, Hellmuth Bergmann et Jean-Jacques Schul dans «Liste de questions sur le rôle des femmes dans les projets de développement agricole» font remarquer que l'homme et la femme ne contribuent pas à forces égales à certaines opérations culturales:

En général, l'homme abat la forêt, conduit les machines ou les animaux de t r a i t , laboure; la femme s'occupe des pépinières, des semis et

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plan-tation et souvent, de la tr aite, des soins aux

animaux de basse-cour, de la protection des cultures (gardiennage contre oiseaux et insects, (d'habitude avec les enfants) et de la récolte manuelle des produits délicats tels que cotton et légumes.» (10)

Même si ce constat démontre qu'il y a séparation de travail en fonction du sexe, elle n'est évidente qu'au niveau des travaux ménagers (faire la cuisine, le pilage, le puisage . . . ) dans certaines régions (Marguerite Dupire: 1970). Dans d'autres régions, les femmes n'étant pas autorisées à trav aille r hors de la maison, s'occupent seulement du foyer. Voici ce que nous en disent Edith Hellmuth Bergmann et J . - J . Schul :

Dans certains cas, hommes et femmes contribuent aux activités normalement attribuées à l'autre sexe sans contrainte. Dans d'autres, la séparation peut rester totale. Ainsi, dans quelques régions, les femmes ne sont pas autorisées à trav aille r hors de la maison pour des raisons religieuses et tous les travaux des champs sont exécutés par les hommes. Dans d'autres, enfin, tout le travail manuel des champs est confié aux femmes pendant que l'homme travaille hors de l'exploitation, ou se contente de conduire les machines.» (11)

Mais Achola 0. Pala (1979:107 à 111) (12) dresse un tableau

donnant un aperçu de la division du travail selon le sexe et l'âge dans les sociétés précoloniales africaines. L'exemple cité par l'auteur est celui du Kenya. L'étude du tableau fait ressortir que les femmes

Kenyennes ont leur emploi du temps beaucoup plus chargé que ceux des hommes.

Bocar N'Diayé dans son étude Groupes ethniques au Mali (13) fait remarquer que chez les Maures, les femmes de condition noble ne

(24)

s'occupent de rien mais elles laissent leurs femmes esclaves faire les travaux ménagers.

Les différences dans les organisations de travail des peuples africains se retrouvent grosso modo chez les ethnies maliennes.

2.2 R51e de la femme rurale-africaine

D'après la littérature, on peut diviser le rôle de la femme en général et de la femme rurale en particulier en deux (2) grandes catégo­ ries:

2.2.1 Rôle familial

2.2.1.1 La femme en tant que mère: procréatrice

Le rôle procréateur qu'on attribue à la femme à travers diffé­ rentes sociétés a été l'objet d'études importantes. En effet, d'émi- nents chercheurs qu'ils soient éducateurs, sociologues, anthropologues, font ressortir dans leurs études que la plus grande qualité d'une femme c'est la fécondité. Dans les sociétés africaines, le manque d'enfants peut constituter une source de tension entre mari et femme. Abdou Moumouni affirme:

La vie du ménage africain (monogamique ou poly- gamique) est dans une large mesure conditionnée, sinon déterminée par la possibilité où l'impos­ s i b i l i t é d'avoir des enfants, on divorce pour se remarier et avoir des enfants; la femme qui n'a pas d'enfants est mal vue et elle-même déploie tous les moyens, dépense toute sa fortune en consultations, soins et traitements divers, auprès des guérisseurs ou de marabouts, dans le but de pouvoir enfin en avoir. (14)

(25)

Achola 0. Pala fait remarquer que: «Le fait d'avoir des enfants confé­ rait à la femme un statut dans la communauté et légitimait ses droits sur la terre et sur le bétail.» (15) Clignet, R. (1962:141) fait

ressortir que: «La fécondité apparaît être une valeur essentielle de la femme. La richesse du droit en la matière, la complexité des rites et des cures pour éviter la s t é r i l i t é en témoignent.» (16)

Le même auteur constate après avoir interviewé un échantillon des femmes (p.213) de la Côté d'ivoire que «ces femmes voient dans le fait d'avoir des enfants un avantage essentiel du mariage.»

F. N'Sougan Agblemaguon dans son étude sur les femmes togolaises (1962) f a it remarquer que la femme est perçue par les sociétés a f r i ­ caines comme épouse. Et le devoir que ces sociétés incombent à l'épouse est d'être bonne mère qui donnerait beaucoup d'enfants à la communauté. L'auteur souligne en outre:

. . . pour le mari, la question était de savoir dans quelle mesure elle pourrait contribuer à accroître le nombre de ses enfants (prestige) et le cas échéant, sa richesse. Par conséquent, dans les sociétés africaines traditionnelles, pour des raisons différentes, la femme est d'abord perçue comme épouse; c'est pourquoi en Afrique, l'accent primordial est mis sur la vertu par excellence de l'épouse, à savoir la fécondité. (17)

2.2.1.2 La femme, mère et éducatrice des enfants

Des recherches menées jusqu'à présent, il ressort que les femmes africaines assument la plus grande part des responsabilités dans l'édu­ cation et le soin des enfants pendant leurs premières années d'exis­ tence.

(26)

Achola, 0. Pala et Madina Ly (1979), Marguerite Dupire (1970), Denise Pauline (1960), Y.F. Vincent (1966), Boubou Hama (1968) pour ne citer que ceux-ci, montrent dans leurs études que dès sa naissance, l'éducation de l'enfant ( f i l l e ou garçon) est laissée au soin de la mère. Jusqu'à l'âge de six (6) ans, cette éducation ne varie presque pas selon les sexes.

Guy Belloncle (18) fait remarquer que les soins à donner aux enfants est la tâche primordiale qui revient essentiellement à la mère. Pour ce même auteur cette tâche est divisée en trois parties:

- la toilette - la maladie - la nourriture

Elle (tâche) constitue une lourde charge pour la mère surtout si elle a trois ou quatre enfants à bas âge.

M. Gessain (1964:258) écrit: «C'est en tant que mère que la femme coniagui assume son rôle essentiel. Excellente mère, elle tisse avec ses enfants, garçons et f i l l e s , des liens très tendres et solides . . .

A

partir de la naissance et pendant plusieurs années, mère et enfant vivent dans une atmosphère de grande tendresse. Le bébé ne quitte sa mère ni de jour ni de nuit.» (19)

On voit ainsi que la naissance d'un enfant et son éducation occupe une grande place dans le rôle que doit jouer la femme africaine au sein de sa société. Avoir un enfant est le bien le plus précieux qu'une

(27)

femme africaine réclame car comme le souligne Javeau Claude (1972:631): «La femme éducatrice vit par procuration au travers de ses enfants comme au travers de son mari, quand elle ne vit pas dans l'éducation la simple répétition d'activités lassantes et vides de sens réel, simplement

inscrites parmi les autres activités du foyer.» (20)

2.2.1.3 La femme et les tâches domestiques

En observant les femmes dans leur travail quotidien, on peut faire une constatation. En effet, si l'emploi du temps peut différer selon les régions et surtout selon les saisons et les ethnies, on retrouve partout les mêmes occupations principales. Yvonne Mignot Lefebvre fait remarquer: «Les tâches ménagères classiques leur (femmes) incombent également: nettoyage de la concession, préparation des repas, vais­ selle , lessive, e t c .. .» (21)

2.2.1.3.1 La femme à la cuisine

Faire la cuisine et donner à manger à tous les membres de la famille est la tâche qui incombe à toute épouse.

Des recherches effectuées par Sophie Ferchiou (22) font ressortir que la cuisine ne se limite pas à la confection des plats, elle couvre toutes les étapes de la transformation des produits alimentaires, allant du produit agricole brut au produit comestible élaboré.

Guy Belloncle (23) fa it ressortir dans son étude menée au Niger que faire la cuisine requiert pour la femme rurale un effort physique. En effet, la nourriture au Niger comme au Mali est à base de céréa

(28)

(mil, riz . . . ) , céréales que les femmes ont la lourde charge de

transformer en pilant. Le pilage des céréales est une action durement ressentie. Il n'est pas rare de voir que pour les trois repas de la journée, les femmes passent le plus c l a i r de leur temps à piler. A cette action, toutes les femmes y participent si elles sont plusieurs dans une famille qui souvent allègent le travail. Mais ceci est très rare étant donné que les autres femmes sont appelées à remplir d'autres fonctions.

2.2.1.3.2 Le puisage de 1'eau Ni ci Nelson écrit:

Dans toutes les sociétés urbaines et rurales, c'est aux femmes qu'incombe la responsabilité de la 'reproduction de la famille' (au sens biologique et sociologique) dont l'approvision­ nement en eau est un facteur fondamental: il

faut de l'eau pour boire, pour cuire les aliments, pour assurer la propreté des personnes, des

vêtements et des logements, afin que la famille puisse subsister en bonne santé. (24)

A partir de ce constat, on pourrait affirmer que le puisage d'eau ou plus précisément la recherche de l'eau est le travail qui vient immédiatement après la préparation du repas. Pour cuire, faire la lessive, se laver, boire, il faut de l'eau, élément indispensable à la vie. Et dans les pays sahéliens où la sécheresse sévit, le problème devient crucial. L'eau très d i f f i c i l e à trouver est considérée comme une fortune qu'on amasse chaque jour à voir seulement chaque femme faire des va-et-vient entre le puits ou la source et la maison. Très souvent, les femmes doivent parcourir deux à trois kilomètres pour se procurer l'eau qui d'ailleurs n'est pas de bonne qualité. Et en saison sèche

(29)

plus particulièrement, les puits, les sources et les mares se tarissent rendant encore plus d i f f i c i l e la recherche de l'eau. C'est plus de la moitié de leur temps que les femmes doivent consacrer à la recherche d'eau (DNAFLA, rapport d'enquête, juin 1980).

2.2.1.3.3 Le ramassage du bois

Dans le milieu rural, cuisiner ne va pas sans le bois. Et ramas­ ser du bois est comme chercher de l'eau. Cette tâche demande aussi un effort considérable. En effet, le bois se fa it de plus en plus rare autour des villages. Les femmes doivent consacrer le plus souvent une journée entière à la corvée de bois. Parcourir cinq à dix kilomètres pour apporter un fagot de bois sur la tête est chose qu'on rencontre très souvent dans tous les villages maliens. Cette corvée de bois se f a it d'ailleurs sentir dans presque tous les pays du Sahel. (25) Guy Belloncle l ' a souligné: «Il faut avoir vu ces f i l e s de femmes revenant à la tombée de la nuit de ces corvées de bois, pour imaginer la con­ trainte que cela représente.»

Ces travaux demandent un effort physique considérable pour la femme rurale. Et Yvonne Mignot Lefebvre l'affirme à son tour: «Cepen­ dant, à la différence des femmes des pays riches, elles doivent fournir, pour les accomplir, un temps et un effort physique considérables.

L'énergie dépensée à la recherche du combustible et de l'eau, à piler le mil pour le repas est important.» (26)

Et Sophie Ferchiou conclut: «Tous ces travaux 'ménagers' prennent une place importante dans la production familiale, non seulement du fait

(30)

de leur variété, mais aussi de leur complexité et du temps que la femme doit y consacrer . . . » (27)

Cependant, la femme au Mali, aussi bien que partout en Afrique, n'est pas seulement maîtresse de la maison et mère. Elle est aussi productrice (agriculture, élevage, artisanat, commerce, et c.).

2.3 Rôle productif

D'après de récentes recherches effectuées, la production vivrière en Afrique serait assurée par plus de 80% des femmes.

Dans la revue: Le mercure des Femmes on peut l i r e : «Dans les pays moins développés, la grande majorité de la main d'oeuvre féminine se trouve encore dans 1'agriculture (par exemple 90% dans certains pays d'Afrique).» (28)

Constantina Safi1ios-Rohschi1d (déc. 1980) fait ressortir dans son article (29) l'importance du rôle productif des femmes. Elle pousse son analyse en faisant remarquer qu'en Afrique subsaharienne, les femmes jouent un rôle essentiel dans la culture de tous les produits agricoles qu'il s'agisse de cultures vivrières de base ou de produits destinés à la vente.

Donc en plus des travaux ménagers les femmes s'occupent de travaux champêtres, d'élevage et de commerce.

(31)

2.3.1 Travaux champêtres

Puisque l ' a c t i v i t é traditionnelle en milieu rural est surtout agricole et en plus de cultiver le champ familial, les femmes rurales entretiennent des champs personnels (espaces qui leur sont allouées) où elles cultivent des produits entrant dans la consommation familiale (A.B. Diop, 1970:223). Dans certains endroits où le problème d'eau se pcse moins, les femmes rurales font du jardinage.

Mignot Lefèbvre Yvonne écr it à ce propos:

L'inventaire de toutes les tâches accomplies par les femmes permet d'apprécier, en particulier, leur rôle dans la production agricole: comme les hommes, elles participent aux travaux des champs, aux

cultures industrielles et surtout vivrières. Elles débroussent, sèment, sarclent, récoltent, trans­ portent et stockent le mil, le coton ou l'arachide, avec un matériel agricole rudimentaire (houe,

hilaire . . . ) . De plus, elles ont la complète res­ ponsabilité des jardins de case, c'est-à-dire, des produits maraîchers indispensables à la préparation des plats traditionnels et qui constituent un apport nutritionnel important, surtout en période de

soudure. (30)

Sylvie Girard dans Les femmes dans le développement international, vient confirmer les dires de Mignot en ces termes: «Les femmes sont le principal agent producteur de la consommation familiale. Dans beaucoup de pays «en voie de développement» les femmes cultivent leurs propres lopins de terre et récoltent suffisamment de produits pour nourrir la famille et quelques fois pour le marché.» (31)

Madina Ly (Unesco 1979) f a it une description des femmes au champ montrant ainsi la lourdeur de cette tâche. «Un petit pagne attaché

(32)

-ver les champs. Cinq jours par semaine, elles cultivaient les champs familiaux; le reste du temps elles le passaient dans leurs champs individuels ou 1logodiougouforo' . . . » (32)

On voit qu'au niveau de l'agriculture, les femmes rurales ont un rôle important à jouer. Non seulement elles aident leur mari, mais elles entretiennent leurs propres lopins de terre où elles cultivent mil, r i z , maïs, tubercules, fonio, arachides, e t c . . . Ainsi donc en période de culture, les femmes accordent plus de leur temps aux travaux champêtres.

Cependant, il est important de noter (comme d'ailleurs plusieurs chercheurs l'ont souligné) que les produits des petits champs (champ, jardin) de la femme lui appartiennent, mais elle les u t ilise pour

l'entretien du ménage: préparation des plats, habillement et soins des enfants, e t c . ..

D'autres études menées (DNAFLA: 1979) font ressortir qu'en plus des travaux champêtres, les femmes rurales s'occupent aussi de la cueillette et du ramassage des fru its. Ces produits sont localement transformés pour être aussi ut il isés dans la consommation familiale: fabrication de beurre, de savon, d'aromatisant de sauce, e t c .. .

Mais les produits champêtres, les produits de cueillettes sont-ils utilisés uniquement dans la consommation familiale? Cette question sera abordée lorsque nous toucherons le domaine commercial.

(33)

2.3.2 Elevage, pêche et artisanat

Dans le domaine de l'élevage ou de la pêche, on ne possède que très peu de données. Tout ce qu'on peut retenir c'est la pratique de l'élevage du petit bétail, de la volaille effectuée par une minorité des femmes.

Quant à la pêche, elle n'est pratiquée qu'occasionnellement dans les mares ou les marigots (M. Ly, 1979, DNAFLA, 1979).

Dans d'autres régions (régions lacustres), la pêche devient une activité principale des femmes. Ces femmes passent la majorité de la journée à pêcher et surtout à sécher et/ou fumer le poisson (B. N'Diayé, 1970).

En plus de ces activités, il ressort des études menées en Afrique Occidentale, que l'artisanat aussi occupe une large place sinon une importante place dans l'emploi du temps des femmes. Il est à noter que plusieurs activités artisanales se repartissent selon les ethnies et surtout les classes sociales (Bokar N'Diayé, 1970; Brenda Gael

McSweency, 1980).

2.3.3 Commerce

Le commerce représente également une part importante de l'emploi du temps de la femme rurale. Et c'est sur les marchés hebdomadaires ou journaliers que les femmes vendent ce qu'elles ont produit (produits des champs, des jardins, de cueillette, de pêche, e t c . . . ) produits dont la quantité dépasse la consommation familiale.

(34)

Comme les produits, le fonds recueilli sur la vente du surplus sert à résoudre des problèmes financiers de la famille. Une récente étude faite par la DNAFLA dans un village rural malien fa it ressortir l'in té rêt de ce commerce.

Mais la femme de Koula ne pense pas seulement à nourrir la famille. Ses produits cultivés ou de cueillette sont aussi vendus sur le marché local pour subvenir à d'autres besoins (habiller les enfants par exemple). Les fonds obtenus lui appartiennent à part entière. Le mari n'en reçoit rien et n'en réclame que lorsque le besoin se f a it vraiment sentir ( s ' i l n'arrive pas à s'acquitter pleinement de ses taxes). (33)

D'autres études démontrent aussi que certaines femmes ont le commerce comme activité principale. Néanmoins, même si cette activité prédomine, elle vient en deuxième position après les activités ména­ gères.

Ce rôle commercial que joue la femme, la met dans une position de moins grande dépendance par rapport au mari: tout ce qu'elle gagne lui appartient.

F. N'Sougan A. Confirme par ces mots:

Ainsi la femme du «commis», qui attend «l'argent du mois» de son mari, est plus dépendante de celui-ci que la revendeuse qui non seulement peut se passer de cet argent, mais peut aider son mari à sortir d'un embarras financier passager. D'une manière générale, cette indépendance de la femme est entièrement tolérée par le mari: l'intéressée peut se rendre à un marché lointain, s'absenter toute la journée . . . (34)

(35)

Voilà les principales activités des femmes rurales en Afrique telles que nous le montre la revue des études et des recherches.

L'ensemble de ces activités constitue le travail au foyer dont le terme a été défini par plusieurs auteurs comme étant «des activités utiles accomplies au foyer en vue de produire les biens et les services qui permettent à la famille de fonctionner en tant que famille» (Monique Proulx, 1978).

Mais quel temps les femmes consacrent-elles à chacune des acti-vités?

Brenda Gael McSweency (1979) dans une enquête menée en Haute-Volta fait remarquer que les femmes consacrent plus de temps à des activités domestiques: «Examination of the data reveals that this sample of women averaged over twice as much time on the production-supply-distribution (including food-processing) tasks as did men and twice as much time on these acti vit ie s as on the household tasks of cooking, cleaning, and washing, in addition to child care.» (35)

A partir d'une comparaison entre le travail des femmes et celui des hommes, Brenda conclut que les femmes passaient plus d'heures à trav ail le r que leur mari.

Szalaï (1975) part des données multinationales pour démontrer que les femmes possèdent peu de temps libre par jour par rapport aux hommes.

(36)

Le temps libre des femmes ménagères ne dépasse guère quatre (4) heures par semaine. Il établit en outre que: «Le temps li bre, irrégulier et réduit mis à la disposition des femmes employées et les contraintes qui assaillent les femmes ménagères sont deux facteurs majeures expliquant la non-participation des femmes à la vie c i v i l e , aux entraînements professionnels et à 11éducation.» (35)

Jean Stoctzel (1948:55) avait mis l'accent sur le temps consacré aux différentes activités des femmes. Son étude portant sur le bud­ get-temps de la femme dans les agglomérations urbaines de Paris montre que:

Les travaux les plus absorbants sont d'abord: le ménage, près de deux (2) heures par jour, puis la cuisine d'une part, et la couture

d'autre part, un peu plus d'une heure et demie. Viennent ensuite les courses pour le r a v i t a i l ­ lement, trois quarts g'heure environ, et la

va is s e lle , un peu plus d'une demi-heure. La lessive ne prend pas moins d'une cemi-heure par jour en moyenne. Enfin, les courses les plus variées, autres que le marché, le repassage. (37)

Plusieurs chercheurs font remarquer que chez les populations rurales aussi bien qu'urbaines, le travail ménager accompli par les femmes est sensiblement le même. Cependant, la curée mise pour effec­ tuer certains travaux est plus longue selon les périodes (saisons). Mais c'est surtout le travail qui consiste aux seins donnés aux enfants qui semble beaucoup plus long (selon oue les enfants sont nombreux et de bas âge).

Jacqueline Chabaud (1970) en parlant de l'éducation et de la

(37)

s'opposent à la participation des femmes à des cours de formation. Selon Chabaud, la difficulté principale est surtout due au fait que les femmes sont trop surchargées de besognes domestiques et de travaux agricoles ou commerciaux. Cette surcharge fa it que les femmes disposent de moins de temps que les hommes pour suivre des cours. L'auteur écrit: «Quelles prennent ce temps (temps consacré au cours) sur celui qu'elles consa­ crent à leurs travaux et il en résulte pour elles un manque à gagner immédiat.» (38)

Pour Rachida Souza (1978:8), les femmes béninoises consacrent plus de 2/3 de leur temps à l'agriculture et le reste au commerce et aux tâches domestiques. L'emploi du temps de ses femmes béninoises dépasse douze (12) heures de travail et comporte de longs et pénibles déplace­ ments pour la recherche de l'eau et du combustible.

M. Guilbert, N. Lowit et J. Creusen (1965) dans une étude portant sur le budget-temps en France, ont fa it ressortir un certain cumul

d'occupations chez les femmes françaises. En divisant le budget-temps en trois parties - la première étant le temps passé au l i t , la deuxième le temps d'activités professionnelles, de transport et d'activités

domestiques et la troisième (temps libre) qui comprend toutes les autres occupations - les auteurs sont arrivés à la conclusion suivante:

Le pourcentage du temps d'activités ménagères cumulé avec des activités concernant les enfants sur le temps total d'activités ména­ gères est de 19% pour les femmes et de 10% pour les hommes. Il porte sur des temps beaucoup plus importants pour les femmes que pour les hommes. Il faut aussi remarquer que pour les femmes surtout, ces cumuls sont particulièrement fréquents à certaines heures de la journée. (39)

(38)

On voit donc que partout (en Afrique aussi bien qu'en Europe) ce sont les femmes qui ont toujours la charge la plus importante et cela quelle que soit la catégorie. Le temps alloué à chaque catégorie est non seulement grand mais aussi très important.

Les informations recueillies dans diverses études et les observa­ tions faites sur les terrains démontrent avec certitude la lourdeur de l'occupation journalière de la femme rurale en Afrique.

L'horaire quotidien de la femme est très chargé, comportant à la fois des travaux à la maison et les travaux à l'extérieur (travaux champêtres, activités commerciales et artisanales, e t c . . . ) . Dans

certaines régions les femmes restent entièrement occupées et cela toute la journée et en toutes saisons.

La femme malienne comme toutes les autres femmes africaines n'échappe pas à ce fa it . Elle joue le même rôle et la lourdeur de son occupation est évidente car les travaux se répètent régulièrement tous

les jours.

L'étude tient compte des variables significatives soulignées dans la revue de littérature. Sans se limiter à ce ll e s - c i, elle prend en considération d'autres variables qui sont propres au milieu social des femmes.

(39)

METHODOLOGIE

La revue de la littérature nous a montré l'importance du rôle joué par les femmes au sein de leur société. En outre, elle nous a permis de nous rendre compte aussi de l'e ffo r t fourni pour l'accomplissement de leurs tâches, effort qui, selon plusieurs auteurs, semblerait être un des facteurs qui empêche les femmes de recevoir une formation adéquate dans leur domaine.

A partir de ce constat, nous pouvons dors et déjà formuler notre question de la façon suivante: Qu'est-ce qui explique réellement la faible participation ou même la non participation des femmes malinké aux activités d'alphabétisation fonctionnelle?

3.1 Approche

L'objectif de cette étude, il a été déjà dit , est d'examiner les facteurs explicatifs de la non fréquentation et/ou de l'abandon des

(40)

centres d'alphabétisation fonctionnelle par les femmes du Mali. Une telle étude suppose une large enquête qui porterait non seulement sur le comportement des femmes, mais aussi sur les faits socio-culturels. Pour pouvoir répondre à cette exigence, il est possible d 'u t ilise r des

méthodes de type expérimental: pré-test, post-test au niveau d'un groupe expérimental et d'un groupe de contrôle. Cependant, selon certains auteurs entre autre C. S e ll t iz et al. (1977:222), «plusieurs aspects du comportement humain ne se prêtent pas à l'expérimentation en laboratoire: délinquance au sein des gangs de quartier, l'influence de la famille sur la façon de voter aux élections nationales, les activités de sectes occultes et les coutumes de tribus primitives.»

C'est pourquoi dans le cadre de cette étude, nous avons eu recours à l'enquête d'opinion, visant à faire apparaître l'ensemble colle ct if des attitudes. Pour ce faire, nous avons util is é la technique d'entre­ vue. M. A. Tremblay écrit:

L'entrevue est une technique d'observation qui comporte l ' u t ilis a t io n des questions plus ou moins directes, adressées à un informateur

rencontré fortuitement ou choisi en fonction de critères préalablements établis. Le but en est de r e c u e illir des données essentielles sur une question, d'analyser l'informateur comme repré­

sentant d'un milieu particulier, ou de connaître sa personnalité, sa mentalité, sa conduite. (40)

Le choix de cette technique est surtout motivé par l'impossibilité d 'u t ilis e r d'autres instruments auprès de notre population composée presqu'entièrement d'analphabètes. Nous ne sommes pas sans savoir que répondre à un questionnaire exige le plus souvent une certaine forma­ tion. L'avantage de l'interview est sa rentabilité et surtout sa

(41)

souplesse. Magloire Chancy Adeleine n'a pas manqué de le souligner en écrivant: «Dans le cas des analphabètes, la souplesse qui caractérise la technique de l'interview est particulièrement rentable. On peut s'assurer d'une bonne interprétation des questions. On peut u t i l i s e r diverses stratégies pour relancer la conversation au moment où elle semble épuisée et obtenir le maximum d'information à l'aide de questions indirectes.» (41)

Cette technique d'entrevue nécessite une analyse de contenu car c'est elle qui permettra d'inventorier toute la gamme de réponses

obtenues. Mais qu'est-ce qu'une analyse de contenu? Plusieurs défini­ tions ont été données par plusieurs auteurs. Nous ne retiendrons ici que celle de Nicole Gagnon (1977): «L'analyse de contenu ne consiste pas à trouver le contenu d'un texte mais à construite la signification sociologique du texte i . e . sa réponse aux questions que lui pose le sociologue.» (42)

A cet effet, on pourrait retrouver diverses formes d'analyse de contenu car elle varie selon les thèmes étudiés et les questionnaires. Celle qui nous intéresse, l'analyse de contenu des entrevues «demande de la part du chercheur une certaine rigueur intellectuelle et surtout une grande imagination». (Yao Assogba, 1980:76). Nous savons qu'il n'est pas facile à partir des interviews de consigner des réponses valables.

Pour ne pas faire fausse route, nous nous sommes proposés, pour un premier départ, d'enregistrer intégralement au moyen d'un magnétophone tous les propos des interviewés. Nous savons et plusieurs auteurs entre

(42)

autre V. Isambert Jamati (1976:78) ont souligné que «la manière de consigner les résultats est parfaitement simple lorsqu'en vue d'un dépouillement mécanographique, on demande à 1'enquêtée de choisir entre plusieurs items préparés à l'avance, ou lorsque toutes les questions posées sont des questions strictement 'fermées': au moment même de l'interview, i l suffit d'indiquer d'un signe la réponse choisie.» Mais dans le cas précis de cette étude, les questions sont des questions «ouvertes», susceptibles d'obtenir des commentaires sur chaque thème abordé.

3.2 Description et justification des variables

Notre étude, qui est une tentative d'analyse des facteurs influen­ çant la non fréquentation et/ou l'abandon de centre d'alphabétisation par les femmes rurales, considère un certain nombre de variables dont les principales sembleraient être:

3.2.1 Variable indépendante

3.2.1.1 Temps disponible

D'après des études récentes (1970-1978), la surcharge des horaires de travail des femmes est, semble-t-il, évidente. Les femmes sont mère, épouse et participent à plein temps à tous les travaux qui sont à la fois sociale, économique et culturel. Des auteurs tels que Yvonne Lefebvre (1978), Sophie Ferchiou (162), Claude Meillassoux (1975) pour ne citer que ceux-ci, ont démontré dans leurs recherches que les budgets mettent en évidence l'importance de la contribution des femmes à la vie socio-économique du groupe familial.

Figure

Tableau  récapitulatif  des  variables  de  l'étude

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