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A quel prix, la réforme ferroviaire dans les États de l'UE ?

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Academic year: 2021

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l’UE ?

Alain Bonnafous

To cite this version:

Alain Bonnafous. A quel prix, la réforme ferroviaire dans les États de l’UE ?. Ville, Rail et Transports,

2013, pp.30-33. �halshs-01094070�

(2)

L

a réforme annoncée de notre système fer-roviaire ne peut être sérieusement analy-sée faute d’être connue dans ses détails, c’est-à-dire là où peut se cacher le diable. Dans l’ordre des choses, ces détails ne pouvaient précéder ceux du quatrième paquet ferroviaire que la Commission vient de présenter, les di-rectives et règlements prévus restant à être approuvés par le Parlement européen et par le Conseil. Il ressort tout de même de cette communication que l’on peut distinguer entre des dispositions hautement probables et d’au-tres dont les contenus sont encore incertains, ne serait-ce que dans les marges de manœu-vre qui seront laissées aux Etats en termes de gouvernance du système.

Dans le probable, on peut placer, qui n’était pas acquise, la mise en œuvre du quatrième pa-quet dans le cadre du mandat de cette Com-mission qui s’achève en février 2014. On peut y placer aussi la mise en concurrence de tous les services voyageurs d’ici à 2019, ainsi que c’est déjà le cas pour les lignes internationales et, bien entendu, pour le fret.

Le principe de séparation de l’infrastructure et des transports, qui est un corollaire du choix de la concurrence, sera également retenu mais avec une part d’incertain que laissent entrevoir les termes exacts de la communication : «

Tou-tefois, lorsque des Etats membres souhaitent maintenir les structures de holding existantes intégrant le gestionnaire de l’infrastructure, la Commission propose d’introduire des mesures de sauvegarde strictes permettant de protéger

l’indépendance du gestionnaire de l’infrastruc-ture, assorties d’un processus de vérification par la Commission afin de garantir la mise en place de conditions de concurrence véritable-ment équitables pour toutes les entreprises ferroviaires. »

Dans quelle mesure sommes-nous prêts à af-fronter le très probable ? Comment le législa-teur arbitrera sur ce qui est encore incertain ?

Le plus probable n’est

pas le moins risqué

Les « Assises du ferroviaire » ont été clôturées il y a un peu plus d’un an avec au moins des positions claires sur l’ouverture à la concur-rence des transports de voyageurs, en parti-culier une opposition de principe des syndicats et de l’Association des régions de France (ARF), manifestement très fière de payer 30 à 40 % plus cher le train-kilomètre que chez nos voisins qui bénéficient pleinement de la stimulation concurrentielle. Cependant, la pers-pective concurrentielle a été admise dans la mesure où chacun savait que chez pratique-ment tous nos partenaires, en particulier ou-tre-Manche et outre-Rhin, cette concurrence est appréciée. Elle s’y pratique même avec des opérateurs français qui y réalisent des perfor-mances notables. Il s’agit donc pour ces par-tenaires (tous acteurs confondus) d’une ba-nale exigence de réciprocité.

La SNCF est-elle prête ou, plus précisément, pourra-t-elle s’y préparer dans les cinq ou six ans qui viennent ? L’argument principal des par-tisans de la solution du holding est devenu le sens officiel de la réforme annoncée par le gouvernement : donnons quelques apaise-ments aux syndicats quant à la reconstitution d’une « grande SNCF » et ils consentiront des efforts de productivité. La haute fonction pu-blique et beaucoup d’élus ont bien reçu cet ar-gument, mais il n’est pas dit que les syndicats l’entendent ainsi. Ils sont évidemment conscients des écarts de productivité, ne se-rait-ce que parce que l’expérience de la libé-ralisation du fret les a clairement révélés. Leur

A quel prix, la réforme ?

Jusqu’où les Etats membres pourront-ils rester maîtres de leur système ferroviaire ? Quelles marges de manœuvre leur laisse le 4epaquet ferroviaire qui vient d’être adopté par la

Commis-sion européenne ? Le spécialiste des transports Alain Bonna-fous développe dans cette tribune les idées, plutôt libérales, qu’il défend.

Par Alain Bonnafous,

professeur émérite de l’université de Lyon, chercheur au Laboratoire d’économie

des transports

Alain Bonnafous :

«Donnons quel-ques apaisements aux syndicats quant à la recons-titution d’une “grande SNCF” et ils consentiront des efforts de pro-ductivité. »

S

P

Pour gérer et entretenir 1 000 km

de voies, il faut 625 agents en RFA,

mais 1 015 en France.

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réponse est bien un effort de convergence mais qui est plus entendu comme un rappro-chement des conditions de travail dont l’es-sentiel du chemin serait imposé aux opérateurs concurrents par quelque convention collective de branche plutôt qu’une remise en cause des pratiques installées chez l’opérateur historique. Celles-là mêmes qui expliquent que pour gérer et entretenir 1 000 km de voies, il faut 625 agents en RFA, mais 1 015 en France ; qui ex-plique encore que le coût d’entretien au kilo-mètre soit le double en France de ce qu’il est en Suisse.

Prenons un autre exemple évoqué lors des As-sises par un haut responsable de la grande maison et qui concerne le fret ferroviaire : on compte 210 jours ouvrés pour les roulants chez les nouveaux entrants contre 150 à 160 offi-ciellement à la SNCF (en réalité entre 110 et 130 selon un syndicaliste cheminot !). Peut-on (ou doit-on) envisager une réduction conven-tionnelle des 210 jours ouvrés pour les nou-veaux entrants alors que c’est à peine la moyenne européenne ? Peut-on imaginer que, de leur côté, les syndicats consentent à effacer des dispositions du décret RH 0077 ? Ce do-cument, vu comme un patrimoine d’acquis so-ciaux, a interdit à l’opérateur historique d’être « dans le marché » pour le fret, en dépit d’un déversement de « cash » de l’ordre de 500

mil-lions d’euros par an depuis dix ans. En dépit aussi d’une tentative de déroger intelligemment à quelques rigidités avec l’opération des « vo-lontaires du fret » de 2008. Pourquoi ceux-là même qui ont promptement saboté cette opé-ration accepteraient-ils de déchirer quelques pages du RH 0077 au prétexte que l’on est, en apparence, revenu à une grande société nationale ?

En réalité, il y a deux scénarios possibles pour l’ouverture à la concurrence des TER et des TET : d’une part, « le scénario de la promesse », qui consisterait à réaliser à l’horizon de cinq à six ans des gains de productivité du travail suf-fisants pour permettre à la SNCF de conserver, comme a su le faire la DB pour les transports régionaux, la plus grande part des prestations contractualisées ; d’autre part, « le scénario de la désillusion », qui ne laisserait au transpor-teur historique que la possibilité de jouer la montre et de récupérer par ses filiales privées quelques-uns des marchés perdus, comme VFLI a su le faire pour le fret.

On compte 210 jours ouvrés pour les

roulants chez les nouveaux entrants

contre 150 à 160 à Fret SNCF.

« Il y a deux scénarios possibles pour l’ouverture à la concurrence des TER et des TET : le “scénario de la promesse” et le “scénario de la désillusion”. » © A rn au d B o u is so u / M E T L-M E D D E

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Un GIU est bien

nécessaire

Des efforts significatifs, autant dire sans pré-cédent, de productivité seraient une bonne sur-prise et peut-être, après tout, le scénario de la promesse sera-t-il tenu. A défaut, on peut considérer que la constitution d’un « gestion-naire d’infrastructure unifié » justifiait une ré-forme en tout état de cause. Il s’agit, certes, d’avoir un dispositif « euro-compatible » au sens de la séparation de la roue et du rail. Il s’agit aussi de répondre aux critiques faites au sys-tème actuel, très clairement exprimées lors des Assises : Est-ce RFF ou son gestionnaire dé-légué qui est responsable de la difficulté à sa-tisfaire la demande de sillons ? De mal gérer les effets d’un incident ? De mal programmer les travaux en regard des impératifs de circu-lation des trains ? etc. Certes, au cas par cas, on peut désigner le « coupable » ou identifier quelque force majeure. L’impression générale reste cependant celle d’un système qui res-ponsabilise mal les acteurs.

Jusqu’ici, RFF gère le réseau dont il est

pro-priétaire, en accointance avec deux entités : d’une part, la Direction de la circulation ferro-viaire (DCF), créée en 2009 comme entité in-dépendante au sein de la SNCF, qui traite les demandes de « sillons » pour le compte et, maintenant, sous l’autorité effective de RFF ; d’autre part, SNCF Infra, qui assure

contrac-tuellement, pour le compte de RFF, l’entretien du réseau. L’efficacité fonctionnelle du système suppose évidemment que ces entités soient regroupées comme elles le sont chez nos prin-cipaux voisins, ce qui fut une conclusion peu contestée des Assises.

Le souci d’efficacité économique a été moins souligné, alors qu’il est peut-être plus détermi-nant encore pour l’avenir de notre système fer-roviaire. L’enjeu fondamental tient au caractère forfaitaire de la prestation « infra » de la SNCF. Le législateur a choisi de la forfaitiser en 1997. Si l’on pose la question de savoir si RFF peut disposer d’une information minimale sur ce que lui coûte tel ou tel segment du réseau, la ré-ponse est non. Si l’on pose la question de savoir si un gros investissement de renouvellement se traduit par une économie de coût de main-tenance sur la ligne concernée (tel qu’il est payé par RFF), la réponse est non. Cela signifie, par exemple, qu’un quelconque calcul de rentabi-lité financière sur cet investissement n’a pour l’heure aucun sens car il n’y a, de facto, aucun retour sur investissement. Cela signifie, plus fondamentalement, qu’aucun effort de produc-tivité du capital ne pourra être efficace aussi longtemps que cette productivité ne sera pas mesurable. Au sein d’un GI unifié, le mécanisme qui révèle la productivité marginale du capital s’imposera de lui-même, non plus pour calculer les conséquences d’un investissement sur la facture que présente la SNCF pour l’entretien et la gestion du réseau, mais pour assurer une ba-nale optimisation des investissements.

Un pas en avant sans

pas en arrière ?

Ainsi donc, pour des raisons évidentes et d’au-tres moins visibles, cette unification des fonc-tions liées à l’infrastructure peut être considé-rée comme un pas en avant, de nature à favoriser l’efficacité du système. Reste à sa-voir si la reconstitution d’une grande entreprise ferroviaire ne mettra pas en cause quelques-uns des progrès patiemment arrachés à la ty-rannie du statu quo et ne provoquera pas quelques pas en arrière. On peut en craindre au moins trois.

Le premier pas en arrière concernerait l’ouver-ture à la concurrence. Pour le fret, cette ou-verture est souvent évoquée comme un échec. Pourtant, après de multiples tâtonnements et quelques égarements condamnés récemment par l’Autorité de la concurrence, le système

L’impression générale reste celle

d’un système qui responsabilise

mal les acteurs.

« Est-ce RFF ou son

gestionnaire délégué qui est responsable de la difficulté à satisfaire la demande de sillons ? » S N C F M é d ia th è qu e -S E B A S T IE N G O D E F R O Y

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français a enfin rejoint le club du redressement ferroviaire en Europe : les opérateurs concur-rents ont certes grignoté une part du marché de la SNCF, mais ils ont aussi contribué, en 2011 et pour les trois premiers trimestres de 2012, au premier redressement significatif de la part du ferroviaire sur le marché du fret en France… depuis 1920 ! La concurrence sera-t-elle pareillement traitée par un réseau rele-vant d’une « grande SNCF », en particulier lorsqu’elle sera étendue aux voyageurs ? Le deuxième pas en arrière que l’on peut crain-dre correspond à un enjeu d’efficacité des fi-nances publiques. La séparation productive de l’infrastructure et du transport est fondée sur un principe de péage qui couvre les coûts de fonc-tionnement et de maintenance du réseau. Un réseau qui ne couvre pas ses coûts est méca-niquement subventionné et cela se traduit de facto par une récupération de ces contribu-tions publiques par les transporteurs, y com-pris les opérateurs étrangers. L’opacité de ces subventions croisées ne favorise évidemment pas le bon usage des fonds publics.

Le principe du coût complet a au contraire le mérite considérable de requérir des subven-tions « en aval », c’est-à-dire au niveau des ser-vices de transport eux-mêmes. La puissance publique sait alors (si elle est normalement in-formée) ce qu’elle finance : l’Etat pour les TET et les régions pour l’offre de TER. Organisés à leur juste coût, les services offerts peuvent se révéler déficitaires plutôt que de paraître équilibrés à la faveur de subventions croisées. Dès lors qu’elle n’est pas capturée par l’opé-rateur historique (hypothèse évidemment far-felue), la puissance publique peut alors déci-der de l’achat du service au prix de ce déficit ou encore de recourir à des alternatives concur-rentes que peuvent proposer (quelle horreur !) d’autres modes ou d’autres opérateurs. D’où une question toute simple relative à ce deuxième gros enjeu : sachant que le taux de couverture du coût du réseau par les péages était de 30 % en 1997 mais dépasse au-jourd’hui 90 %, ira-t-on au bout du chemin au sein d’une « grande SNCF », c’est-à-dire jusqu’à une couverture du coût complet comme au Royaume-Uni ou en RFA ?

Le troisième pas en arrière que l’on peut crain-dre correspond lui aussi à un gros enjeu fi-nancier. Il concerne la maîtrise des horaires par RFF, qui agit depuis peu avec (et non plus « contre ») une DCF placée sous son contrôle : les adaptations des deux dernières années ont été d’une ampleur sans précédent, et les pro-grès dans les cadencements ont été salués par les associations d’usagers ; des marges de manœuvre ont été dégagées là où s’exerce la contrainte de capacité ; au réflexe conditionné de choisir l’investissement en cas de satura-tion s’est substitué celui de reconsidérer les horaires, ce qui est tout de même moins coû-teux. Au sein d’une « grande SNCF », cette op-timisation de l’usage du réseau l’emportera-t-elle sur un froncement de sourcil syndical à l’annonce du moindre changement d’horaire ? On sait que deux modèles se sont opposés pour réaliser la nécessaire unification des fonc-tions de l’infrastructure : celui d’Hubert du Mes-nil avec un RFF élargi et celui de Guillaume Pepy avec une SNCF peu ou prou reconsti-tuée. Sans surprise, le second semble avoir été choisi, encore que les perspectives ne soient pas lumineuses quant au dispositif qui sera re-tenu pour assurer « l’indépendance du ges-tionnaire de l’infrastructure ». Il serait assez pi-quant que, dans le double souci d’un système euro-compatible et d’un système plus efficace, on aboutisse à la syntaxe du premier modèle avec le vocabulaire du second.

On peut évidemment préférer revenir à un mo-nopole réunifié, à son incapacité à améliorer sa productivité et à son obscurité financière. Il n’est qu’à s’en donner les moyens budgétaires. Sources :

- « International whole industry including train operating cost benchmarking ».

http://www.railwaysarchive.co.uk/docu-ments/rvfm-civity-benchmarking-090511.pdf - RFF, DB.

- « Audit sur l’état du réseau ferré national fran-çais », EPFL, septembre 2005.

Commission « Le ferroviaire français au cœur de l’Europe », séance du 12 octobre 2011. - « Deutsche Bahn Competition Report », der-nière édition août 2012.

Alain Bonnafous

EST CHERCHEUR AU LET.

Ira-t-on jusqu’à 100% de taux

de couverture du coût du réseau

par les péages ?

S

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