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Tales from within. Exposition du langage et de la méthodologie derrière la composition et l'arrangement d'une suite pour grand orchestre de jazz

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Academic year: 2021

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TALES FROM WITHIN

Exposition du langage et de la méthodologie derrière la composition et l’arrangement d’une suite pour grand orchestre de jazz

JEAN-NICOLAS TROTTIER Interprétation Jazz, École de musique Schulich Université McGill Montréal, Québec, Canada Mai 2019 A paper submitted to McGill University in partial fulfillment of the requirements of the degree of D.Mus. Performance Studies © Jean-Nicolas Trottier 2019

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À mon collègue, mentor et ami, Joe Sullivan

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Table des matières

RÉSUMÉ ... 5 ABSTRACT ... 5 REMERCIEMENTS ... 6 LEXIQUE ... 7 INTRODUCTION ... 10 1ÈRE PARTIE : TALES FROM WITHIN, PRÉSENTATION ET CONCEPTS GÉNÉRAUX ... 13 1.1 UNE SUITE EN CINQ MOUVEMENTS ET DEUX INTERLUDES ... 14 2ÈME PARTIE : LES TECHNIQUES DE COMPOSITION ... 18 2.1 APPROCHE HARMONIQUE ... 18 2.1.1 STRUCTURE ET STABILITÉ DES ACCORDS À 4 ET 5 SONS ... 21 2.1.2 LES SYSTÈMES TONALS RELATIFS À UN CENTRE TONAL ... 23 2.2 LES SYSTÈMES TONALS RÉGULIERS ... 25 2.2.1 LES SYSTÈMES TONALS MÉLODIQUES ... 25 2.2.2 LES SYSTÈMES TONALS HARMONIQUES ... 26 2.2.3 LES SYSTÈMES TONALS SYMÉTRIQUES ... 28 2.3 LES SYSTÈMES HYBRIDES ... 29 2.4 LES FAMILLES DE FONCTIONS D’UN CENTRE TONAL ... 30 2.4.1 LA FONCTION TONIQUE (T) ... 31 2.4.2 LA FONCTION DOMINANTE (D) ... 33 2.4.3 LA FONCTION SOUS-DOMINANTE (SD) ... 38 2.5 LES TYPES DE MOUVEMENTS HARMONIQUES ... 44 2.5.1 LES RÉSOLUTIONS ... 47 2.5.2 LES ANTI-RÉSOLUTIONS ... 50 2.5.3 LES MOUVEMENTS NEUTRES ... 52 2.5.4 LA DEMI-CADENCE ... 53 2.6 APPROCHE MÉLODIQUE ... 54 2.6.1 LE MOTIF ET SES PARAMÈTRES ... 54 2.6.1.1 L’ADDITION ET/OU LA SOUSTRACTION DE NOTES COMME VARIATION DU MOTIF ... 56 2.6.2 LA COMBINAISON DE MOTIFS ... 57 2.7 LE PHRASÉ MÉLODIQUE ... 58 3ème PARTIE : ARRANGEMENT ... 61 3.1 INSTRUMENTATION ... 61 3.2 TECHNIQUES D’HARMONISATION ... 62 3.2.1 LES TECHNIQUES D’HARMONISATION À DEUX VOIX (DENSITÉ 2) ... 63 3.2.2 TECHNIQUES D’HARMONISATION À TROIS VOIX (DENSITÉ 3) ... 67 3.2.3 TECHNIQUES D’HARMONISATION À QUATRE VOIX (DENSITÉ 4) ... 72 3.2.4 TECHNIQUES D’HARMONISATION À CINQ VOIX (DENSITÉ 5) ... 75

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3.2.5 LA TECHNIQUE MIXTE À QUATRE ET CINQ VOIX ... 83 3.3 TECHNIQUES D’HARMONISATION À SIX VOIX OU PLUS ET TECHNIQUES D’HARMONISATION EN TUTTI ... 85 3.3.1 HARMONISATION EN TUTTI HOMOPHONIQUE ... 85 3.3.2 HARMONISATION EN TUTTI POLYPHONIQUE ... 90 3.4 ORCHESTRATION ... 97 3.4.1 ÉCRITURE SECTIONNELLE ET INTERSECTIONNELLE POUR LES VENTS ... 97 3.4.2 ÉCRITURE POUR LA SECTION RYTHMIQUE ... 99 3.4.3 ÉCRITURE POUR LA VOIX ... 100 4. RÉFLEXION ET CONCLUSION ... 101 BIBLIOGRAPHIE SUGGÉRÉE ... 108 ANNEXE A ... 109 EXEMPLE D’ANALYSE COMPOSITIONNELLE : TALES FROM WITHIN (PARTIE 2 : MOTIONS) ... 109 ANNEXE B ... 111 EXEMPLE D’ANALYSE D’ARRANGEMENT : TALES FROM WITHIN (PARTIE 2 : MOTIONS) ... 111 ANNEXE C ... 114 COMPOSITIONS ... 114 ANNEXE D ... 129 PARTITION COMPLÈTE ... 129

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RÉSUMÉ

L’écriture pour grand ensemble jazz, ou bigband, a toujours été une discipline qui me fascine, m’inspire et me passionne. En effet, j’éprouve un immense plaisir à écouter, jouer et bien sûr écrire pour ce type d’ensemble. Par contre, il n’est pas toujours facile de déterminer avec exactitude la ou les méthodes employées par le/la compositeur(trice) derrière le travail, étant donné que (1), plusieurs d’entre elles peuvent être utilisées simultanément tout au long de la composition et de l’arrangement d’une pièce musicale et (2), que dans plusieurs cas, le/la compositeur(trice) lui/elle-même n’écrit pas en ayant comme premier moteur l’analyse, mais plutôt l’intuition ou l’improvisation. Le but du présent ouvrage est d’exposer la technique et méthodologie derrière la composition et l’arrangement de Tales From Within, une suite en 5 mouvements pour grand orchestre de jazz.

ABSTRACT

Large jazz ensemble writing has always been fascinating and inspiring to me. In fact, I love to play, listen and, of course, write for that type and size of band. Though it is not always easy for the listener (and also for the composer himself…) to determine the methodology behind such task since (1), more than one technique could be used simultaneously throughout the piece and (2), in many cases, the composer might write using intuition and improvisation more than a conscious analytical approach. The goal of this paper is to expose the technique and methodology behind the composition and arrangement of Tales From Within, a five-movement suite written for large jazz ensemble. In order to do so, the composition and arranging techniques will be discussed using examples from the suite itself.

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REMERCIEMENTS

J’aimerais tout d’abord remercier Prof. Rémi Bolduc, Prof. Joe Sullivan, Dre. Isabelle Cossette et Prof. Lena Weman Ericsson pour vos conseils, votre ouverture d’esprit et votre compréhension tout au long des quatre années où j’ai complété mes études doctorales. Je crois que je n’aurais pas pu avoir un meilleur comité ! Merci à tous mes amis musiciens qui ont participé, de près ou de loin, à la création de la suite soit : Jocelyn Couture, Lex French, David Carbonneau, Nicolas Boulay, Benjamin Cordeau, Dominic Rossi, Pascal Martin, Samuel Blais, Benjamin Deschamps, Annie Dominique, David Bellemare, Alex Francoeur, Julien Fillion, David Martin, Taylor Donaldson, Thomas Morelli-Bernard, Jean-Sébastien Vachon, Sébastien Pellerin, Jonathan Cayer, Kenny Bibace, Nicolas Ferron, Alain Bourgeois et Mireille Boily. Ça me fait chaud au cœur de voir que vous vous intéressez toujours à ma musique après toutes ces années. Merci beaucoup pour votre temps, votre talent et votre musicalité. Un merci très spécial à tous les étudiants de mes cours d’arrangement et de composition. Merci de m’avoir aidé à réfléchir et à organiser le sujet de façon la plus compréhensible possible (en tout cas, je l’espère !). Aussi, merci d’avoir fait preuve d’indulgence et de compréhension, et ce, tout au long de mon parcours doctoral. Vous êtes, tout un chacun, mes meilleurs professeurs. Merci à Yves Trottier, Claudine Désilets, Dominique Trottier et Marie-Claude Trottier pour le support et l’amour que vous me donnez, et ce, sans compter. Finalement, merci à mes deux femmes, Andréanne et Margo pour tout, tout, tout… tout. Je vous aime !

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LEXIQUE

Backgrounds (bkgs.) : Musique composée et destinée à être jouée en arrière-plan d’un solo improvisé Centre Tonal : Note commune, ou relation entre tous systèmes tonals Cluster : Disposition de deux ou plusieurs voix à l’intérieur d’un intervalle maximal d’une seconde majeure entre chacune d’elle Charge rythmique : Niveau d’activité rythmique (passif, semi-actif ou actif) d’une ou plusieurs mélodies jouées simultanément Densité : Nombre de voix différentes d’une harmonisation Double-lead : Note de la mélodie doublée à l’octave inférieure Drop-2 : La deuxième voix à partir de la note la plus haute est placée une octave plus bas que sa position d’origine Drop-2+4 : La deuxième et la quatrième voix à partir de la note la plus haute est placée une octave plus bas que sa position d’origine Drop-3 : La troisième voix à partir de la note la plus haute est placée une octave plus bas que sa position d’origine Gamme heptatonique : Gamme à sept notes basée sur la forme 1-2-3-4-5-6-7 Gamme hexatonique : Gamme à six notes basée sur la forme 1-2-3-4-5-6 Gamme horizontale : Gamme où certaines extensions sont dissonantes à l’accord qui lui est relatif, donc contient des notes ornementales Gamme octotonique : Gamme à huit notes 1-2-2-3-4-5-6-7 ou 1-2-3-4-4-5-6-7 Gamme pentatonique : Gamme à cinq notes basée sur la forme 1-2-3-5-6 ou 1-3-4-5-7 Gamme verticale : Gamme où toutes les extensions sont consonantes à l’accord qui lui est relatif, donc sans notes ornementales Harmonisation : Note(s) placée(s) au-dessus ou en dessous d’une mélodie ou d’une note de la mélodie, de manière à la colorer

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Harmonisation complète : Harmonisation contenant les notes guides de l’accord Harmonisation en bloc : Harmonisation homophonique à deux voix ou plus d’une mélodie Harmonisation homophonique : Harmonisation d’une mélodie par une ou plusieurs voix ayant un rythme similaire à la mélodie principale Harmonisation intersectionnelle : Utilisation d’instruments provenant de sections différentes en combinaison pour jouer et/ou harmoniser une mélodie donnée Harmonisation polyphonique : Harmonisation d’une mélodie par une ou plusieurs mélodies secondaires ayant un rythme différent de la mélodie principale Harmonisation sectionnelle : Utilisation d’instruments provenant d’une même section pour harmoniser une mélodie Mode : Gamme commençant sur un autre degré que la fondamentale (gamme renversée) Mouvement plagal : Mouvement fonctionnel sous-dominant (SD) vers tonique (T) ou sous-dominant (SD) vers sous-dominant (SD) Notes guides : Notes qui définissent la qualité d’un accord. Généralement la tierce et la septième ou leurs substituts Origine d’un accord : Provenance d’un mode et/ou système tonal particulier d’un accord Position fermée : Toutes les voix d’une harmonisation sont à l’intérieur d’une octave à partir de la note la plus haute Position fondamentale : Disposition des voix dans une harmonisation qui place la fondamentale de l’accord à la note la plus grave Progression d’accord : Mouvement d’un accord vers le suivant Section instrumentale : Instruments provenant de la même famille (par exemple : les trompettes, trombones ou saxophones) Structure d’accord : Notes et extensions qui constituent un accord Structure d’une harmonisation : Notes et intervalles qui constituent une harmonisation

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9 Système harmonique : Système tonal où la structure est constituée de secondes mineures, majeures, et augmentées Système mélodique : Système tonal où la structure est constituée uniquement de secondes mineures ou majeures Système tonal hybride : Système tonal où la distance entre trois notes consécutives est inférieure à l’intervalle d’une tierce mineure Système tonal régulier : Système tonal où la distance entre trois notes consécutives est supérieure ou égale à un intervalle d’une tierce mineure Système tonal symétrique : Système tonal qui est constitué d’intervalles similaires et répétitifs Tonicisation : Résolution d’un accord dominant vers un accord X de manière à le rendre de fonction tonique Tonicisation faible : Cadence impliquant un mouvement fonctionnel dominant vers tonique (D-T), dominant vers tonique temporaire (dominante secondaire) ou dominant vers dominant (D-D) où le sens de résolution n’est pas respecté ou si l’accord de fonction dominante ne contient pas le triton tonal dans ses cinq premières notes Tonicisation forte : Cadence impliquant un mouvement fonctionnel dominant vers tonique (D-T), dominant vers tonique temporaire (dominante secondaire) ou dominant (D-D), un mouvement de basse V-I ou bII-I et où le sens de résolution est respecté Tonicisation moyenne : Cadence impliquant un mouvement fonctionnel dominant vers tonique (D-T) ou dominant (D-D) où une substitution a lieu et où le sens de résolution est respecté Two-feel : Mode de jeu où la contrebasse joue deux blanches par mesure en 4/4 Walking bass : Mode de jeu où la contrebasse joue sur tous les temps (par exemple, quatre noires par mesure en 4/4)

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INTRODUCTION

Depuis le début de mon parcours musical, l’intérêt pour la composition et l’arrangement a toujours été présent. En effet, dès mes débuts dans le milieu, je composais et arrangeais des pièces pour différents types d’ensembles, et ce, sans trop savoir comment m’y prendre. Pendant plusieurs années, j’ai tenté de découvrir, par écoute active et l’approche « essais et erreurs », la méthodologie ou la technique qui se cache derrière la composition et l’arrangement de musique pour grand ensemble jazz que je trouvais, et que je trouve toujours aujourd’hui, fascinant. C’est lorsque j’ai commencé à enseigner que j’ai ressenti le besoin de synthétiser et d’organiser l’information amassée au fil des ans par expérience, par « essais et erreurs ». J’ai aussi consulté certains ouvrages comme The Complete Arranger de Sammy Nestico (1993), Inside the Score de Rayburn Wright (1982), Arranged by Nelson Riddle de Nelson Riddle (1985), Principles of Orchestration de Rimsky-Korsakov (1964) et The Study of Orchestration de Simon Adler (1989) du côté de l’arrangement et de l’orchestration ; Modal Jazz Composition de Ron Miller (1996), Fundamentals of Musical Composition de Schoenberg (1967), The Craft of Musical Composition de Hindemith (1941) et The Technique of My Musical Langage de Messiaen (1956) du côté de la composition, et ce, dans le but premier de m’assurer d’une cohérence au niveau de mon enseignement et de pouvoir avoir accès à un support visuel afin que les étudiants aient plus de ressources disponibles pour leur apprentissage. Par contre, l’analyse que je fais de

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11 compositions et d’arrangements se fait rarement à l’aide de livre ou de partitions, mais plutôt par écoute active. Je présente ici le fruit de mes réflexions sur la technique du langage musical et la méthodologie utilisée lors de la composition et l’arrangement de Tales From Within, une suite pour grand ensemble jazz en cinq mouvements. Pour y arriver, j’ai décidé de, tout d’abord, composer la suite pour ensuite, porter une réflexion sur la méthode. Je crois qu’il est très important de comprendre que la pièce n’a pas été composée par ou pour l’analyse. En effet, j’ai tenté d’écrire de la façon la plus naturelle possible, en gardant l’approche par instinct et par improvisation, dans le but d’atteindre une esthétique musicale particulière. Il est évident que l’analyse et la théorie font partie intégrante de ma technique, que ce soit conscient ou non, mais comme j’écris plus haut, j’ai tenté de mettre la « musique » à l’avant-plan. J’aimerais préciser que le cœur de cette recherche est la composition et l’arrangement de la pièce comme telle. Selon moi, la meilleure façon de comprendre le langage musical qu’un artiste déploie lors de la composition d’une œuvre est de se plonger dans son univers, et d’essayer de comprendre son cheminement. Alors, pourquoi ne pas le faire avec sa propre musique ? Ici, j’inclus en annexe, comme référence, la partition maîtresse au complet. Étant donné la vocation pédagogique du présent ouvrage, j’ai senti le besoin d’exposer par écrit les concepts et considérations générales qui sont derrière ma technique et ce, même si, selon moi, l’œuvre parle d’elle-même. Ces concepts sont, en quelque sorte, la façon dont j’ai composé et arrangé la suite.

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Ce papier est présenté en quatre sections. Dans la première partie, les concepts généraux derrière la composition de la suite seront brièvement présentés. La deuxième partie de l’ouvrage exposera les considérations générales qui ont gouverné mes choix harmoniques et mélodiques dans le but d’atteindre l’esthétique musicale désirée, tandis que la troisième partie mettra en lumière les techniques générales d’orchestration et d’harmonisation utilisées pour en faire l’arrangement. En conclusion, la quatrième partie présente une réflexion sur le processus compositionnel et sur les influences musicales qui ont fait surface tout au long de l’œuvre.

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ÈRE

PARTIE : TALES FROM WITHIN, PRÉSENTATION ET CONCEPTS

GÉNÉRAUX

LE LYRISME, voilà le caractère premier que j’ai voulu donner à cette suite pour grand ensemble jazz. Tout au long du processus de composition, j’ai mis l’emphase sur les mélodies faciles à jouer et à chanter, et ce, sur des progressions harmoniques généralement stables, mettant en valeur des mouvements de basse également lyrique. Le résultat est en grande partie consonant et relativement facile d’écoute et de compréhension. On pourrait qualifier l’œuvre comme étant destiné au « grand public », sans toutefois, selon moi, tomber dans la facilité en mettant de côté recherche et sophistication. La composition de la suite a débuté par une approche harmonique. En fait, celle-ci en est l’élément unificateur. En effet, les cinq progressions d’accords sur lesquelles les thèmes des différents mouvements ont été bâtis ont été composées dans la même journée, pour être peaufinées par la suite. Ce faisant, je crois m’être assuré d’une homogénéité, sans avoir le sentiment de répétition. S’en sont suivi la composition des thèmes et l’arrangement de ces compositions pour grand orchestre de jazz. Un des mouvements de basse les plus utilisés est celui en tierce, qui est normalement considéré comme faible. Tout au long de la composition, j’explore différentes options impliquant des résolutions, anti-résolutions, mouvements neutres et demi-cadences, question de renforcer ou non cette sonorité caractéristique. Le mouvement ascendant, considéré comme faible dans certains cas, mais ayant un effet d’élévation, est aussi utilisé, créant un mouvement vers l’avant ou « forward motion ». Ces deux types de

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mouvements de basse sont balancés par des mouvements forts, bien évidemment, mais sont, à mon sens, prédominants. Du côté mélodique, tout dépendant des parties de la suite, certains concepts ont aussi été mis de l’avant. Étant donné que ceux-ci varient d’un mouvement à l’autre, ils seront discutés plus bas. L’approche générale est celle du développement de motif certes, mais d’abord et avant tout, celle de l’intuition et de l’improvisation comme moteur premier. 1.1 UNE SUITE EN CINQ MOUVEMENTS ET DEUX INTERLUDES 1er mouvement : CHORALE Mouvement à tempo modéré et aux croches égales mettant en vedette le saxophone baryton. Au départ, ce mouvement se voulait comme une courte introduction pour la suite, mais s’est développé au fur et à mesure de l’arrangement. Basé sur une mélodie courte harmonisée de manière homophonique, le mouvement se déploie lentement vers une forme de solo complexe ayant pour concept harmonique la progression avec substitution par fonction unique unisystémique et pour concept rythmique, l’addition. La métrique évolue tout au long du solo. 2ème mouvement : MOTIONS Mouvement en 4/4 à tempo modéré/rapide aux croches égales ayant comme solistes le piano et le 2ème saxophoniste alto. L’harmonie de la pièce est de type fonctionnel modulant et dont le concept général est celui du mouvement et de l’arrêt de mouvement. L’esthétique de cette

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15 partie se veut jazz moderne, par contre basé sur les fonctions harmoniques traditionnelles et ayant une mélodie de type lyrique. INTERLUDE 1 Pièce transitoire mettant en vedette la batterie qui utilise la mélodie principale du mouvement CHORALE comme matériel de base. Le thème est tout d’abord exposé à l’unisson, pour être ensuite transposé et harmonisé de façon à en augmenter la densité et ce, plus on avance dans le morceau. La rythmique de la mélodie est libre et dirigée, bien que basée sur des noires, tandis que le solo de batterie est hors tempo. 3ème mouvement : PARADOX Mouvement en 3/4 à tempo rapide aux croches égales mettant à l’avant-plan le 1er saxophoniste alto. Le cœur de la composition de ce mouvement réside dans la présence simultanée de deux éléments à caractères opposés. Par exemple, le mouvement en tierce est le concept harmonique principal utilisé dans cette composition. Considéré comme mouvement faible, celui-ci est renforci harmoniquement par des résolutions. L’inverse est aussi vrai, la présence de mouvements forts affaiblis harmoniquement. La mélodie principale du mouvement est aussi de type paradoxal, où l’activité et la passivité rythmique se côtoient ainsi que l’utilisation simultanée des registres haut et bas.

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INTERLUDE 2 Seconde pièce transitoire lente où la mélodie est, cette fois-ci, inspirée du thème de CHORALE et orchestrée pour 4 trombones et voix a capella. L’harmonisation est en majeure partie homophonique, par contre, la technique à quarte voix en position fondamentale avec ornementation est aussi utilisée pour générer du mouvement. L’harmonie est aussi inspirée de celle présente dans les autres mouvements de la suite, pour en assurer une cohérence. 4ème mouvement : LINKS Mouvement lent en 4/4, ce morceau met en vedette la trompette et la guitare. Ici, le concept principal derrière la composition en est un mélodique. En effet, la connexion entre les accords est assurée par note commune et ce, pratiquement tout au long du thème. L’intervalle de 5te est une caractéristique structurelle dominante du motif de base, qui est ensuite développé et combiné. L’harmonie chromatique est supportée par ces connexions consonantes, lui donnant un caractère mélancolique. La forme traditionnelle de l’arrangement (introduction, thème, solo, « backgrounds », tutti et finale) participe aussi à l’adoucissement du chromatisme et des multiples modulations en rendant la direction du mouvement plus prévisible. 5ème mouvement : DUALITY Mouvement final de la suite, DUALITY se veut très énergique. Mettant en valeur le 1er saxophoniste ténor, le morceau a pour concept général le contraste entre deux éléments qui peuvent être considérés comme opposés et/ou complémentaires. Par exemple la variation de

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17 « time-feel » entre 3/2 (soit 3/2, 6/4 ou la mise d’emphase sur la polyrythmie 4 contre 3) et 2/2 ; entre les croches égales et « swing » ; entre le « two-feel » et le « walking bass » ; entre la passivité et l’activité rythmique de mélodies ou entre l’utilisation des différentes sections de l’orchestre et des registres. La forme aussi est dualiste, où les progressions d’accords fonctionnelles sont entrecoupées de boucles dominantes chromatiques.

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ÈME

PARTIE : LES TECHNIQUES DE COMPOSITION

La composition d’une pièce pour grand ensemble jazz peut se faire de plusieurs façons. Par exemple, un compositeur peut mettre de l’avant l’approche texturale, minimaliste, l’écriture sérielle, les formes complexes, l’utilisation d’éléments provenant de la musique électro-acoustique etc. Dans le cas de cette suite, j’ai opté pour l’approche plus traditionnelle de l’écriture pour bigband, soit la composition d’une mélodie de type lyrique sur une progression d’accord généralement fonctionnelle qui est organisée de manière formelle (ABAC, AABA ect), que j’ai ensuite arrangée pour grand ensemble. Voici alors les concepts de base que je mets à l’avant-plan lorsque j’écris ce type de composition, en lien avec l’approche harmonique et l’approche mélodique qui en constituent le langage musical.

2.1 APPROCHE HARMONIQUE

Du côté harmonique, je considère que les concepts derrière la composition sont en lien direct avec la musique composée par Wayne Shorter, George Russel et, plus récemment, Joe Sullivan, pour ne nommer que ceux-là. Au fil des ans, ils se sont développés et personnalisés par l’extrapolation des concepts fonctionnels traditionnels couramment utilisés dans la musique tonale occidentale (par exemple, les différents types de cadences, de mouvements fonctionnels

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19 ou les retards de résolutions, etc.) et ce, dû à la haute densité du langage harmonique utilisé tout au long de la suite, et dans ma musique en général (densité 5, 6 ou 7 au lieu de 3 ou 4). Dans les prochaines pages, j’expose en détail les lignes directrices de ces concepts quant aux différents types de progressions harmoniques ; aux niveaux de stabilité des différentes structures d’accords ; aux différents systèmes tonals qui sont en relation avec un centre tonal X et d’où les modes et accords sont originaires ; aux différentes familles de fonctions, leurs « conditions fonctionnelles » et leurs tendances de résolution respectives et aux différents mouvements harmoniques (résolutions, anti-résolutions, mouvements neutres et demi-cadences) que j’utilise tout au long de la suite. Premièrement, je considère que ce langage harmonique est basé sur certaines prémisses : 1. La tendance de résolution d’un accord vers l’autre est dans la direction lydienne du centre tonal (vers le mode stable le plus brillant [dans la direction des dièses] c.-à-d. le mode lydien pour le système mélodique majeur, le mode lydien dominant pour le système mélodique mineur, le mode lydien #9 pour le système harmonique mineur et le mode lydien b3 pour le système harmonique majeur) 2. Une structure d’accord implique une gamme verticale, et ce, peu importe si toutes les notes y sont présentes 3. Un accord en position fondamentale est plus stable qu’un accord renversé. Un renversement est présent lorsqu’une extension est à une distance de ½ ton d’une note de la triade base, excluant la fondamentale (3-5)

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4. Un mode en position fondamentale est plus stable qu’un mode renversé 5. À niveau de stabilité égale, un accord qui contient un triton entre la 5te et la 9ème est moins stable qu’un accord qui n’en contient pas 6. Une 5te diminuée (b5) est moins stable qu’une 5te augmentée (#5) 7. Étant donné la nature heptatonique des systèmes tonals, toutes les gammes et modes peuvent avoir un minimum de 2 notes communes (à l’exception des systèmes hexatoniques) 8. La résolution par tonicisation (ou cadence authentique) soit, d’un accord de fonction dominante vers un accord de fonction tonique ou dominante, est la plus forte, viennent ensuite la résolution par origine (par brillance) et finalement la résolution par stabilisation 9. La fonction d’un accord est déterminée par le fait qu’il réponde aux « conditions fonctionnelles » 10. La triade augmentée du V du centre tonal contenue dans la triade de base d’un accord l’emporte fonctionnellement sur la présence du centre tonal dans la gamme verticale 11. La résolution du triton tonal crée une tonicisation plus forte s’il est compris entre la 3ce

et la 7ème, vient ensuite entre la tonique et la 5te, et finalement entre la 5te et la 9ème

Ceci étant dit, le langage harmonique utilisé pour la composition des différents mouvements de la suite peut être, selon moi, divisé en trois grandes catégories soit :

1. L’harmonie fonctionnelle non modulante (où la majorité des accords font partie d’un centre tonal unique)

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21 2. L’harmonie fonctionnelle modulante (où les accords modulent d’un centre tonal vers l’autre, tout en laissant le temps à l’oreille de les déterminer) 3. L’harmonie chromatique (où la composition harmonique est basée sur les principes de tensions et résolutions, sans nécessairement prendre en compte les centres tonals d’origine, ou si les modulations sont trop fréquentes et/ou trop rapides pour que l’oreille puisse déterminer de quel centre tonal il s’agit) Habituellement, le choix de l’une ou l’autre des techniques de composition se fait de façon consciente et ce, avant de commencer à composer. Par contre, étant donné que le premier moteur de l’approche compositionnel est l’improvisation, si le besoin de changement se fait sentir, je ne me restreins jamais à l’une ou l’autre des techniques, qui peuvent en fait faire conjointement partie d’une seule et même pièce. 2.1.1 STRUCTURE ET STABILITÉ DES ACCORDS À 4 ET 5 SONS Pour bien comprendre ce concept harmonique, je crois qu’il est important de considérer les différentes structures d’accords utilisés ainsi que leur niveau de stabilité respectif. Selon moi, la stabilité d’un accord dépend de la consonance des intervalles qui le construit, soit entre la tonique et la 5te ou la 3ce et la 7ème (ou la 6te dans le cas d’une substitution de la 7ème) et entre la 5te et la 9ème dans le cas d’un accord à cinq sons. Plus il contient d’intervalles dissonants, plus l’accord comme tel est dissonant, donc instable, et tend à se résoudre à un accord moins

dissonant, donc plus stable. Étant donné que je considère qu’un accord en position fondamentale est plus stable qu’un accord renversé, à niveau de stabilité égal, le premier

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l’emporte sur le second. Je peux aussi créer des sous-catégories étant donné que la 5te diminuée est plus dissonante que la 5te augmentée. Je divise les structures d’accords à quatre sons en position fondamentale en quatre catégories de niveau de stabilité : A) Stables : (5te juste, intervalle de 5te juste entre 3 et 7), par exemple : XMaj7, X6, X-7, XMaj7(#9), X-7(#11) B) Semi-stables : (5te juste, intervalle de 5te altérée 3 et 7), par exemple : X-6, X-Maj7, X-Maj7 (#11), X13 (#11), X13 (b9) C) Semi-instables : (5te altérée, intervalle de 5te juste entre 3 et 7), par exemple : X-7 (b5), XMaj7 (#5) D) Instables : (5te altérée, intervalle de 5te altérée entre 3 et 7), par exemple : X7alt, X9(#5), Xo7 Je considère que, dans le cas d’accords à cinq sons, une sous-catégorie peut s’ajouter selon la distance entre la 5te de l’accord et sa 9ème. Selon moi, pour deux accords provenant du même

niveau de stabilité, celui dont l’intervalle entre la 5te et la 9ème est juste l’emporte sur celui dont

l’intervalle entre la 5te et la 9ème est altéré. Par exemple, CMaj9 est plus stable que C9sus, étant

donné que C9sus est un renversement, et C9sus est plus stable que C7sus(b9), étant donné que, dans un premier cas, la distance entre G et D est d’une 5te juste, tandis que dans le 2ème, G et Db forme un triton.

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23 2.1.2 LES SYSTÈMES TONALS RELATIFS À UN CENTRE TONAL Dans le cas où l’harmonie de la musique que je compose est tonale ou modulante, ce qui est le cas pour Tales From Within, une note devient généralement plus importante que les autres, étant donné sa répétition d’accord en accord. Je considère donc cette note comme étant le centre tonal de la pièce. Par exemple, si une pièce est en F, la note F va faire partie de la grande majorité des gammes verticales relatives aux accords constituant l’harmonie (sauf dans le cas des accords de fonction dominante, qui seront discutés plus bas), et probablement placé en fondamentale d’accords stables aux endroits opportuns pour en assurer la prédominance (comme dans le cas d’accords de fonction tonique, qui seront aussi discutés plus bas). Le centre tonal comporte différents systèmes tonals qui lui sont relatifs par la présence même de la note qui le définit. Par exemple, si le centre tonal est C, tous les systèmes tonals qui contiennent la note C sont en relation entre eux, et appartiennent donc à ce centre tonal. Chaque système tonal est lui-même constitué de modes (ou renversements) et où le nombre est défini par le nombre de notes qui le constitue (à l’exception des systèmes tonals symétriques, qui contiennent généralement que deux modes). 2.1.2.1 MODES EN POSITION FONDAMENTALE STABLES ET INSTABLES Selon moi, le concept de stabilité et d’instabilité peut s’appliquer, non seulement aux structures d’accords, mais aussi aux gammes et modes. En effet, je considère les modes en position fondamentale stable comme étant ceux où (1) l’intervalle entre la tonique et la 2de, la 3ce et la 4te, ainsi qu’entre la 5te et la 6te est plus grand qu’un demi-ton (2) où la 5te est juste et (3) où

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le triton tonal est absent (où la distance entre la 11ème et la 7ème est autre qu’un triton). Quant à eux, les modes en position fondamentale instable sont ceux où l’intervalle entre la 3ce et la 4te ainsi que la 5te et la 6te est plus grand qu’un demi-ton, mais (1) dont l’intervalle entre la tonique et la seconde est d’un demi-ton, (2) où la 5te est altérée (diminuée ou augmenté) ou (3) que le triton tonal soit présent entre la 7ème et la 11ème. Dû à leur grande stabilité, les modes en position fondamentale stable sont généralement considérés comme modes de résolution des systèmes auxquels ils appartiennent, et, du même coup, comme gammes verticales des accords en position fondamentale qui en sont issus. À l’inverse, à cause de l’instabilité de leur structure, les modes renversés tendent à dénaturer la fonction de ces dits accords. Par exemple, le mode en position fondamentale qui définit un accord de EMaj7 est E lydien (E-F#-G#-A#-B-C#-D#). Le fait d’utiliser le mode de E ionien (E-F#-G#-A-B-C#-D#) comme gamme verticale dénature sa fonction en créant un renversement (AMaj7/E au lieu de EMaj7). Les modes renversés sont donc utilisés comme gammes horizontales potentielles, lorsqu’elles sont supportées par la structure d’accord, bien entendu.

(25)

25

2.2 LES SYSTÈMES TONALS RÉGULIERS

2.2.1 LES SYSTÈMES TONALS MÉLODIQUES Les systèmes tonals mélodiques asymétriques (heptatonique) relatifs au centre tonal sont construits uniquement d’une succession d’intervalles de secondes mineures et majeures. Le troisième degré, bémolisé ou non, fait la distinction entre ces deux systèmes : les systèmes mélodiques majeur et mineur. En effet, toutes les autres notes présentes dans ces systèmes sont communes à ces derniers. Pour en faciliter la compréhension, voici un résumé des modes et structures dont ces systèmes sont constitués. Tableau 1 : Le système mélodique majeur et ses modes relatifs:

MODE STRUCTURE POSITION

IONIEN 1-2-3-4-5-6-7 RENVERSEMENT DORIEN 1-2-b3-4-5-6-b7 FONDAMENTALE (Stable) PHRYGIEN 1-b2-b3-4-5-b6-b7 RENVERSEMENT LYDIEN 1-2-3-#4-5-6-7 FONDAMENTALE (Stable) MIXOLYDIEN 1-2-3-4-5-6-b7 RENVERSEMENT ÉOLIEN 1-2-b3-4-5-b6-b7 RENVERSEMENT LOCRIEN 1-b2-b3-4-b5-b6-b7 FONDAMENTALE (Instable) En observant la structure des modes nommés ci-haut, il est possible de conclure que les gammes verticales relatives (ou modes en position fondamentale stable) sont les modes lydien et dorien. Ces derniers sont donc les modes de résolutions. Leurs accords à 7 sons stables respectifs sont XMaj13(#11) et X-13. Un troisième mode en position fondamentale est présent (locrien), instable par contre. Les deux gammes pentatoniques caractéristiques sont (1) la gamme pentatonique lydienne (1-3-#4-5-7) et locrienne (1-b3-4-b5-b7).

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Tableau 2 : Le système mélodique mineur et ses modes relatifs

MODE STRUCTURE POSITION

IONIEN b3 1-2-b3-4-5-6-7 FONDAMENTALE (Instable) PRYGIEN NAT.6 1-b2-b3-4-5-6-b7 FONDAMANTALE (Instable) LYDIEN AUGMENTÉ 1-2-3-#4-#5-6-7 RENVERSEMENT LYDIEN DOMINANT 1-2-3-#4-5-6-b7 FONDAMENTALE (Stable) MIXOLYDIEN b6 1-2-3-4-5-b6-b7 RENVERSEMENT LOCRIEN NAT.9 1-2-b3-4-b5-b6-b7 FONDAMENTALE (Instable) ALTÉRÉE (super locrien) 1-b2-b3-b4-b5-b6-b7 RENSERSEMENT Ici, je considère qu’un seul mode est en position fondamentale stable, soit lydien dominant, ce qui en fait donc le mode de résolution (gamme verticale) et ayant comme accord à sept sons stable X13(#11). Trois modes en position fondamentale instable sont présents : Ionien b3, Phrygien nat.6 et Locrien nat.9. Les deux gammes pentatoniques caractéristiques sont (1) la gamme pentatonique lydienne dominante (1-3-#4-5-b7) et lydienne augmentée (1-3-#4-#5-7). 2.2.2 LES SYSTÈMES TONALS HARMONIQUES Contrairement aux systèmes tonals mélodiques, les systèmes tonals harmoniques relatifs au centre tonal sont construits d’une succession d’intervalles comprenant les secondes mineures, majeures et augmentées. Ici aussi, le troisième degré en est la note caractéristique, et différencie les deux systèmes tonals harmoniques asymétriques (heptatonique) : les systèmes harmoniques majeur et mineur. Comme dans le cas des systèmes mélodiques, toutes les autres

(27)

27 notes contenues dans ces systèmes sont communes. Voici, en résumé, les modes qui les constituent. Tableau 3 : Le système harmonique majeur et ses modes relatifs :

MODE STRUCTURE POSITION

IONIEN b6 (mineur mélodique) 1-2-3-4-5-b6-7 RENVERSEMENT DORIEN b5 1-2-b3-4-b5-6-b7 FONDAMENTALE (Instable) PHRYGIEN b4 1-b2-b3-b4-5-b6-b7 RENVERSEMENT LYDIEN b3 1-2-b3-#4-5-6-7 FONDAMENTALE (Stable) MIXOLYDIEN b2 1-b2-3-4-5-6-b7 RENVERSEMENT LYDIEN AUGMENTÉ #9 1-#2-3-#4-#5-6-7 RENVERSEMENT LOCRIEN bb7 1-b2-b3-4-b5-b6-bb7 FONDAMENTALE (Instable) On peut conclure qu’un seul mode est en position fondamentale stable : lydien b3. Ce mode de résolution est défini par l’accord X-Maj13(#11). Deux autres modes sont en position fondamentale instable, soit (1) dorien b5 et (2) locrien bb7. La gamme pentatonique caractéristique est lydienne b3 (1-b3-#4-5-7). Tableau 4 : Le système harmonique mineur et ses modes relatifs :

MODE STRUCTURE POSITION

ÉOLIEN NAT.7 (mineur harmonique) 1-2-b3-4-5-b6-7 RENVERSEMENT LOCRIEN NAT.6 1-b2-b3-4-b5-6-b7 FONDAMENTALE (instable) IONIEN #5 1-2-3-4-#5-6-7 RENVERSEMENT DORIEN #11 1-2-3-#4-5-6-b7 FONDAMENTALE (Stable) PHRYGIEN NAT.3 1-b2-3-4-5-b6-b7 RENVERSEMENT LYDIEN #9 1-#2-3-#4-5-6-7 FONDAMENTALE (Stable)

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SUPER LOCRIEN bb7 1-b2-b3-b4-b5-b6-bb7 RENVERSEMENT Pour le système harmonique mineur, deux modes sont en position fondamentale : lydien #9 et dorien #11. Ces deux modes de résolutions ont pour accord respectif XMaj13(#11 #9) et X-13(#11). Un mode en position fondamentale instable est aussi présent, soit locrien nat.6, tandis que les gammes pentatoniques caractéristiques sont dorienne #11 (1-b3-#4-5-b7) et ionienne #5 (1-3-4-#5-7). 2.2.3 LES SYSTÈMES TONALS SYMÉTRIQUES Les systèmes symétriques sont constitués d’intervalles (ou de combinaisons de deux intervalles) similaires qui, en les additionnant, couvrent l’octave (ou divise l’octave en parties égales). Dû à cette construction, le nombre de modes différents qui peuvent être extraits des systèmes sont restreints à un dans le cas du système par ton, et deux dans le cas du système augmenté et du système diminué. Selon moi, ces systèmes sont instables, soit à cause de l’absence de mode en position fondamentale stable (comme dans le cas de la gamme par ton et augmentée, où tous les modes contiennent une 5te altérée), soit au haut niveau de dissonance qu’ils contiennent (comme dans le cas du système diminué qui contient quatre intervalles de seconde mineure et quatre intervalles de triton dans sa constitution). Je crois que cette instabilité fait en sorte que la fonction des accords qui en résulte est en grande partie dominante. Selon leur construction, ceux-ci ont plus tendance à se rapprocher du système mélodique ou harmonique. Par exemple, étant donné que la gamme par ton (constituée uniquement de secondes majeures) et la gamme diminuée (constituée uniquement d’intervalle de secondes mineures et secondes majeures) partagent la même structure que les systèmes mélodiques, elles vont avoir une sonorité similaire. Dans le cas de la gamme augmentée, qui est bâtie sur

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29 l’alternance entre une seconde augmentée et une seconde mineure, sa sonorité se rapproche des systèmes harmoniques.

2.3 LES SYSTÈMES HYBRIDES

J’appelle « systèmes hybrides » ceux qui sont construit en combinant certains tétracordes des systèmes tonals entre eux de manière à obtenir une structure où trois notes consécutives forment un intervalle d’une seconde majeure. Par exemple, en combinant le premier tétracorde de C lydien (C-D-E-F#) avec le premier tétracorde de G phrygien (G-Ab-Bb-C) on obtient le mode hybride C-D-E-F#-G-Ab-Bb-C. Les exemples de systèmes hybrides les plus connus sont le système double harmonique majeur, double harmonique mineur et certains des modes à transposition limitée de Messiaen. Étant donné que je n’ai pas utilisé ces systèmes dans la composition de la suite, je ne m’attarderai pas sur le sujet. Un total de 215 gammes et modes (en considérant les variantes de la gamme par ton comme étant une seule et même gamme, et en ne considérant pas les systèmes hybrides non plus) contiennent le centre tonal. Ce nombre quand même élevé d’origine d’accords relatifs au centre tonal n’est cependant pas sans impact sur la sonorité de la progression d’accord comme telle. En effet, si le contexte (ou la majorité des accords contenus dans la progression) provient d’un système en particulier, l’emprunt d’accords à un autre système peut s’avérer problématique. Dans mon cas, pour assurer un changement entre les systèmes qui soit plaisant à l’oreille, j’utilise souvent des accords pivots instables, provenant de systèmes symétriques

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entre autres. L’effet de résolution par stabilisation est souvent assez fort pour couvrir le changement de sonorité dû à la variation de système tonal.

2.4 LES FAMILLES DE FONCTIONS D’UN CENTRE TONAL

Si la musique composée est organisée par systèmes tonals qui sont regroupés ensemble par une note commune, les accords qui leurs sont relatifs vont avoir une fonction spécifique. Les fonctions des accords vont varier selon les conditions qu’elles remplissent. Globalement, on peut regrouper les fonctions en trois grandes familles distinctes : les accords de fonction tonique, sous-dominante et dominante. Il est à noter que, vu la haute densité de l’harmonie (qui inclus aussi les extensions comme étant définitives aux structures d’accords) et dû au fait que le centre tonal inclut 4 systèmes tonals heptatoniques asymétriques et 3 systèmes symétriques (c.-à-d. par exemple qu’une pièce n’est pas seulement dans la tonalité de D majeur, ou D mineur, mais bien en D « global et total »), les familles de fonctions vont englober beaucoup plus d’accords que dans l’harmonie généralement utilisée dans la musique jazz plus traditionnelle, où la progression est souvent strictement bâtie sur le système mélodique majeur, avec quelques emprunts au système mélodique mineur ici et là. J’ai donc développé le concept de « conditions fonctionnelles » qui aide à distinguer le rapport que les accords et les gammes ont entre eux et avec le centre tonal respectif. C’est ce concept que je présente dans les prochaines lignes.

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31 2.4.1 LA FONCTION TONIQUE (T) Dans le langage harmonique utilisé tout au long de la suite, les accords de fonctions toniques sont généralement utilisés comme accords de résolution et servent à établir une tonalité, soit temporaire, soit comme centre tonal. Ces accords doivent donc être assez stables de structure pour créer une sensation d’arrêt. Si on se réfère à ce qui est mentionné ci-haut, ces structures d’accords sont généralement de catégorie A ou B. La substitution de l’accord de tonique est possible, par contre le compositeur doit être conscient de l’effet que cela procure à la progression. En harmonie plus traditionnelle, il n’est pas rare de remarquer la présence de substituts de tonique lors de « turnaround », où l’accord de tonique est utilisé comme accord de passage. La substitution de l’accord de tonique crée généralement un effet de surprise et de continuité. La même chose peut se produire si la structure de l’accord de tonique est instable. Je considère que certaines conditions fonctionnelles doivent être respectées pour qu’un accord soit de fonction tonique : 1. L’accord doit provenir d’un mode en position fondamentale stable pour être tonicisé adéquatement. Il est par contre possible d’utiliser un accord de tonique instable si l’effet désiré est non conclusif, au même titre que dans le cas d’une substitution 2. L’accord doit contenir le centre tonal dans sa gamme verticale 3. L’accord doit contenir la 3ce du centre tonal (soit majeur ou mineur) dans ses cinq premières notes (1-3-5-7-9) 4. L’accord ne doit pas contenir la sous-dominante (ou la sous-dominante relative également) dans ses cinq premières notes (1-3-5-7-9)

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5. Pour les systèmes contenant une 6te et 7ème majeures (les systèmes tonals mélodiques), la sous-dominante ne doit pas faire partie de la gamme verticale 6. L’accord doit être assez stable pour être tonicisé (la 5te de l’accord doit être juste). Une exception peut être faite dans le cas de l’accord locrien Nat.9 provenant du système mineur mélodique traité comme accord de passage Il est important de noter ici que mon langage harmonique est basé sur des accords de densité 5, 6 ou 7, donc sur les notes impliquées dans les gammes verticales. Par exemple, pour un centre tonal de D, l’accord de tonique de structure Maj7 provenant du système mélodique majeur est d’origine lydienne (qui est un mode en position fondamentale stable) et non d’origine ionienne (qui est un mode renversé). Voici, ci-dessous, un résumé des accords de fonction tonique stables en position fondamentale classés par origine. Tableau 5 : Les accords de fonction tonique stables en position fondamentale SYSTÈME D’ORIGINE FONCTIONS ET STRUCTURES MÉLODIQUE MAJEUR IMaj7, VI-7, bIIIMaj7, I-7 MÉLODIQUE MINEUR I13(#11) HARMONIQUE MAJEUR I-Maj7(#11) HARMONIQUE MINEUR IMaj7(#9), VI-7(#11), I-7(#11), bIIIMaj7(#9) DIMINUÉ ½ TON - TON I7(b9), bIII7(b9), #IV7(b9), VI7(b9) Ci-dessus, les systèmes d’origine dans la colonne de gauche et les fonctions et structures d’accords en position fondamentale dans la colonne de droite. Il est à noter que ces accords peuvent être renversés (substitués) sans toutefois que leur rôle fonctionnel soit dénaturé. Par contre, dans ce cas, le niveau de stabilité de la structure d’accord comme telle variera.

(33)

33 2.4.2 LA FONCTION DOMINANTE (D) Je me sers principalement des accords de fonction dominante pour créer du mouvement, et ce, à cause de leur dissonance et de leur instabilité. Il est possible de les résoudre ou non, tout dépendant de l’effet que l’on veut donner à la progression. Comme pour les accords de fonction tonique, je crois que certaines conditions doivent être respectées pour qu’un accord soit considéré de fonction dominante : 1. L’accord doit contenir le triton tonal dans ses cinq premières notes (1-3-5-7-9), ou contenir la triade augmentée du V dans ses trois premières notes (1-3-5). L’exemple de cette condition est bien présent dans le jazz traditionnel où la triade augmentée du V est suffisamment instable pour créer une tonicisation forte d’un accord de tonique (V+ vers I) 2. L’accord doit contenir le triton tonal dans sa gamme verticale s’il provient d’un système heptatonique où une des deux notes qui le constituent si son système d’origine est hexatonique 3. L’accord doit contenir le V du centre tonal dans sa gamme verticale 4. L’accord ne doit pas contenir le centre tonal dans sa gamme verticale. Comme mentionné ci-haut, le langage harmonique utilisé pour la composition de la suite est basé sur les gammes verticales en positions fondamentales (où toutes les extensions sont consonantes à l’accord). Selon moi, en plus de la résolution du triton tonal ou de la triade augmentée du V, l’effet d’une tonicisation provient du mouvement d’un accord

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qui ne fait pas partie du centre tonal vers un accord qui en fait partie. Le principe s’applique aussi aux dominantes secondaires Les accords dominants peuvent provenir de cinq différentes origines et celles-ci dépendent des extensions, altérées ou non, qu’ils contiennent. En voici un résumé, pour en faciliter la compréhension. Tableau 6 : Les accords dominants qui contiennent le triton tonal entre 3 et 7 ou 5 et 9

EXTENSIONS ORIGINE FORME DE BASE SUBSTITUTS

5te juste (et/ou 13ème majeure) et 9ème majeure Lydien dominant V13(#11) bII7alt 5te juste (et/ou 13ème majeure) et 9ème altérée (b9 et/ou #9) Diminué ½ton-ton V13(b9) bVII13(b9), bII13(b9), III13(b9) 5te altérée (#5 ou b13) et 9ème majeure

Par-ton V+9(#11) bII+9(#11)

bIII+9(#11) 5te altéré (#5 ou b13)

et 9ème altérée (b9

et/ou #9)

Altérée V7alt bII13(#11)

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35 Tableau 7 : Les accords de substitution qui ne contiennent pas le triton tonal entre 3 et 7 ou 5 et 9, mais contiennent la triade augmentée du V dans ses trois premières notes (1-3-5)

STRUCTURE D’ACCORD ORIGINE FORME DE BASE SUBSTITUT(S)

X7alt Altérée V7alt VII7alt

X+Maj7(#9) Augmenté V+Maj7(#9) VII+Maj7(#9),

bIII+Maj7(#9) X+9(#11) Par-ton V+9(#11) VII+9(#11) On remarque ici que je ne considère pas bIII7alt comme substitut de V7alt. Comme stipulé dans les conditions fonctionnelles énumérées plus haut, pour qu’un accord soit considéré de fonction dominante, il doit contenir le triton tonal dans sa gamme verticale si cet accord provient d’un système tonal heptatonique. Par exemple, pour un centre tonal de E, le triton tonal (D# et A) ne fait pas partie de la gamme verticale de G7alt (G-Ab-Bb-B-Db-Eb-F) donc G7alt ne peut être considéré comme étant de fonction dominante par rapport à ce centre tonal. Dans le cas de G+Maj7(#9), il provient du système symétrique augmenté, qui est hexatonique. Il répond alors à la condition fonctionnelle et peut donc être considéré comme étant de fonction dominante. 2.4.2.1 LES TENDANCES DE RÉSOLUTIONS MAJEUR/MINEUR DES ACCORDS DOMINANTS Selon moi, les tendances de résolution des accords de fonction dominante dépendent des extensions que ceux-ci contiennent. Plus les extensions qui font partie de la destination (soit majeure ou mineure) sont présents dans la structure, plus l’accord dominant aura tendance à s’y résoudre. Je nomme ce phénomène « résolution annoncée ». Lors d’une cadence D-T, si le sens de résolution est respecté, la destination sera tonicisée fortement. Dans le cas contraire, la cadence authentique (D-T) a toujours lieu, par contre très affaiblie par le mouvement assombrissant. Remarquez que tous les accords de fonction dominante peuvent aussi se résoudre par mouvement éclaircissant, et ce, sans affecter la force de la tonicisation. Par exemple, dans l’harmonie jazz traditionnelle, il est fréquent de voir des accords dominants qui ont comme résolution annoncée un accord mineur, se résoudre à une destination majeure (V7alt vers IMaj7). L’inverse (V13 vers I-7) est beaucoup plus rare.

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Tableau 8 : Les structures d’accord dominants et leurs résolutions annoncées

STRUCTURE D’ACCORD

(sans substitution) EXTENSIONS RÉSOLUTION ANNONCÉE (vers I)

V13(#11) 5te juste, 9ème naturelle majeur

V13(b9) 5te juste, 9ème altérée majeur et mineur

V+9(#11) 5te altérée, 9ème naturelle mineur et majeur

V7alt

V+Maj7(#9) 5te altérée, 9

ème altérée mineur Ici, les structures d’accords indiqués sont sans substitution (forme de base), donc impliquent le V en basse. Pour la liste des substitutions possibles pour chacune de ces structures, veuillez vous référer aux tableaux 6 et 7. Notez que la résolution annoncée demeurera la même, et ce, même si une substitution a lieu (par exemple, V13(#11) et bII7alt ont une résolution annoncée majeure, tandis que V7alt, bIII+Maj7(#9), VII7alt et bII13(#11) ont une résolution annoncée mineure). Le même principe peut s’appliquer dans le cas d’une substitution de l’accord de résolution (ou de fonction tonique). Par exemple G13 à une résolution annoncée vers un accord de C majeur, ou d’une de ses substitutions qui proviennent de la zone majeure (ou d’un mode de résolution ayant comme 3ce E) de ce centre tonal. Donc, si G13 se résout à A-7, D7sus, B7sus(b9), E-7(b6) ou Gmaj7sus par exemple, le sens de la résolution sera respecté. Pour les structures d’accords qui ont deux sens de résolution annoncés, celui énoncé en premier est le plus fort, étant donné qu’une des extensions le caractérisant est la 3ce de la destination, qui est déterminante de la qualité (majeure ou mineure) de cette même destination. Par exemple, pour un accord de F7 dans un centre tonal de Bb. L’accord de F13(b9) contient comme extensions caractéristiques un Gb (b9), Ab (#9), C (5) et D (13). Le D est est donc la 3ce majeure de la destination, tandis que Gb et Ab font partie de la zone mineure de celle-ci. Je considère donc que F13(b9) peut avoir deux résolutions annoncées, en ayant une tendance plus forte vers Bb majeur. Le même phénomène est observable pour l’accord +9(#11). Pour un accord F+9(#11), les extensions caractéristiques sont G (9), et Db (#5). Db est la 3ce mineure de la destination, tandis que G peut faire partie de la zone majeure de celle-ci, et de la zone mineure également. À cause de ce phénomène, je considère que F+9(#11) à une tendance de résolution beaucoup plus forte vers la destination mineure que majeure. Il est à noter que le #11 fait partie de toutes les structures d’accords dominants, donc n’est pas une extension caractéristique. 2.4.2.2 LES DOMINANTES SECONDAIRES ET LES DOMINANTES MODULANTES Je considère la dominante secondaire comme un accord de fonction dominante qui tonicise temporairement un accord ou une zone qui fait partie du centre tonal et qui est différent de celui-ci. À l’inverse, les dominantes modulantes sont des accords de fonction dominante où leur résolution annoncée ne fait pas partie du centre tonal (donc, annonce une modulation ou un changement de centre tonal). Il est à noter que les principes de résolution restent valables dans le cas de ces accords, où le mode mixte peut être présent.

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37 Il est, par exemple, possible de moduler d’un centre tonal vers un autre, car deux gammes verticales peuvent ne pas avoir le centre tonal en commun. Il est aussi possible de ne pas pouvoir analyser un accord X de manière fonctionnelle directe par rapport à un centre tonal en particulier, étant donné que celui-ci n’en fait pas partie. Ces cas s’appliquent généralement aux accords de structure dominante qui ont comme destination une fonction tonique qui ne fait pas partie du centre tonal, donc ne peuvent pas être considérés comme une dominante secondaire. Prenons comme progression d’accord B7alt vers AbMaj7, pour un centre tonal de Ab. B7alt ne contient pas le centre tonal dans sa gamme verticale, ni le triton tonal dans cette même gamme verticale (celui-ci étant G et Db) ce qui dénature sa fonction. On peut alors analyser cet accord comme en étant soit un accord dominant modulant ou une dominante secondaire, tout dépendant de sa résolution. Il est bien évident que le mode mixte (majeur/mineur) peut entrer en ligne de compte ici (comme lorsque B7alt se résout à EMaj7, dans ce cas SD par rapport à Ab). Donc, si la résolution de la progression globale (et la mélodie, bien entendu) est vers Ab majeur, on serait en présence du mouvement assombrissant, donc anti-résolution par rapport au centre tonal. Dans le cas de Ab mineur, on pourrait analyser cette progression comme dominante secondaire au bVI. Dans tous les cas, si le mode mixte n’est pas en cause, B7alt tend à se résoudre soit à E mineur, qui ne fait pas partie du centre tonal de Ab, soit à Bb majeur, qui ne contient pas le centre tonal non plus.

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Une façon d’analyser cet accord serait, en fait, de faire un lien entre le centre tonal de Bb et celui de Ab. En effet, Bb et Ab ont plusieurs modes communs dans le système mélodique majeur (Bb mixolydien (ou Ab lydien), Bb dorien (Ab Ionien), Bb éolien (Ab mixolydien), Bb phrygien (Ab dorien) et Bb locrien (Ab éolien)), mais aussi dans les autres systèmes tonals. Le fait que B7alt se résout à Ab dans un centre tonal de Ab est donc une dominante secondaire vers la zone mixolydienne de Bb (accord emprunté à Ab lydien) et ce, étant donné que Bb7sus est en fait AbMaj7/Bb. Si sa résolution avait été vers BbMaj7, on aurait été en présence d’une modulation, même chose du côté de E-7, étant donné que BbMaj7 et E-7 ne contiennent pas le centre tonal dans leur gamme verticale respective. 2.4.3 LA FONCTION SOUS-DOMINANTE (SD) Les structures d’accords de fonction SD proviennent généralement de catégories stables à semi-instables, ou A, B et C, sans toutefois exclure la catégorie D. Dans ce cas, j’ai tendance à les utiliser comme accords de passage instables ou comme des préparations de cadences (SD vers D). Encore ici, je crois que certaines conditions fonctionnelles doivent être respectées pour qu’un accord soit considéré de fonction sous-dominante : 1. Il doit contenir le centre tonal dans la gamme verticale 2. Il doit contenir la sous-dominante (ou la sous-dominante relative) dans ses cinq premières notes (1-3-5-7-9) 3. Il ne contient pas le triton tonal dans ses 5 premières notes (1-3-5-7-9)

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39 4. Il doit contenir la sous-dominante du centre tonal (4ème degré) dans sa gamme verticale

Les accords de fonction sous-dominante ont différentes utilités, dépendamment de leur position dans un contexte harmonique. Ils peuvent : • Créer une cadence plagale (ou mouvement plagal) s’ils sont suivis d’un accord de fonction tonique (SD-T) • Préparer une cadence (ou demi-cadence) s’ils précèdent un accord de fonction dominante (SD-D) • Être utilisé comme accord de passage (en résolution ou non) si précédé ou suivi d’un autre accord de fonction SD (SD-SD) • Créer une prolongation de tonique si placé après un accord de fonction tonique (T-SD) • Créer un retard de résolution ou une cadence évitée s’ils sont placés après un accord de fonction dominante. (D-SD) 2.4.3.1 LES ACCORDS DE FONCTION SOUS-DOMINANTE ORIGINAIRES DU SYSTÈME MÉLODIQUE MAJEUR Les accords de fonctions sous-dominante provenant du système mélodique majeur sont les plus nombreux, étant donné la présence de modes en position fondamentale stable (ou gamme verticale). En effet, la possibilité de renverser ces modes sans générer trop d’instabilité augmente les possibilités de substitution. Selon mon concept, les accords SD proviennent des modes autres que ceux de résolution (donc excluant le mode lydien, qui est le mode de résolution majeur, et dorien qui est le mode de résolution mineur).

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2.4.3.2 LES ACCORDS DE FONCTION SOUS-DOMINANTE EN POSITION FONDAMENTALE ET LEURS RENVERSEMENTS Comme mentionné plus haut, les accords en position fondamentale proviennent de gammes verticales stables (mode lydien et dorien). Le fait que ces modes aient le centre tonal lui-même comme accord en position fondamentale stable (accords de fonction tonique) les place en position de modes de résolutions. Selon moi, tous les accords dérivés de ces modes sont un renversement de l’accord de fonction tonique, donc non sous-dominante. Une exception peut être faite dans le cas de l’accord de IV13sus, provenant du mode dorien. Le fait que le IVème degré soit placé en basse donne l’illusion d’un mouvement plagal (de IV vers I) même s’il est réellement un renversement du I (par exemple, pour un centre tonal de F, l’accord de Bb7sus peut se traduire par l’accord de F-7/Bb). Sa tendance de résolution est par contre du côté majeur du système, en rapport mineur/majeur. Le fait de le résoudre à un accord de F-7 serait digne d’une résolution par stabilisation, qui sera discutée plus bas. Tableau 9 : Les modes contenant des accords de fonction sous-dominante. Lydien Xmaj13(#11) Ionien

Xmaj13sus Mixolydien X13sus Dorien X-13 Éolien X-9(b6) Phrygien X7sus(b9) Locrien X-7(b5)

Ionien IV I V II VI III N/A

Mixolydien bVII IV I V II VI III

Éolien bVI bIII bVII IV I V II

Phrygien bII bVI bIII bVII IV I V

Locrien bV bII bVI bIII bVII IV I

Position Xmaj7(#11)

(PF, stable) (2e RENV.) Xmaj7/ 5 (4Xmaj7/ 9 ème RENV) (PF, stable) X-7 (2X-7/5 e renv) (4èmeX-7/9 renv.) (PF, inst.) X-7(b5)

Les modes d’origines organisés du plus brillant au plus sombre (de haut en bas) dans la colonne de gauche et les structures d’accords dans la rangée du haut.)

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41 2.4.3.3 LES ACCORDS DE FONCTION SOUS-DOMINANTE ORIGINAIRES DU SYSTÈME MÉLODIQUE MINEUR Les accords répondant aux conditions fonctionnelles énumérées plus haut et faisant partie du système mélodique mineur sont les suivants : • IV13(#11) • bVII13(#11) • bVI13(#11) • bIII13(#11) Je suis d’avis que les renversements de ces accords qui sont, à la base, plus instables sont plus difficilement utilisables dans une progression d’accord plus commune. C’est pourquoi je me limite généralement aux positions fondamentales stables lorsque j’utilise les accords de fonction sous-dominante mais de structure dominante. La composition de cette suite-ci n’en fait pas exception. Par contre comme mentionné plus haut, il n’est pas impossible de s’en servir. Ces renversements doivent toujours respecter les conditions fonctionnelles, et ne pas empiéter sur celles des accords de fonction dominante. Dans ce cas, l’oreille percevra l’accord comme étant de fonction dominante, et non sous-dominante. Pour ma part, j’aime bien parfois utiliser les substituts du triton de ces accords, et cela surtout lors de désir de mouvement dans une progression d’accord. Par exemple, la substitution du triton du IV13(#11) est le VII7alt, qui contient la triade augmentée du V dans sa triade de base. Je considère donc l’accord de VII7alt comme accord de fonction dominante par condition.

(42)

Les substitutions du triton des accords dominants de fonction sous-dominante sont les suivants : • III7alt • II7alt • VI7alt 2.4.3.4 LES ACCORDS DE FONCTION SOUS-DOMINANTE ORIGINAIRES DU SYSTÈME HARMONIQUE MINEUR Les accords répondant aux conditions énumérées plus haut et faisant partie du système harmonique mineur sont les suivants : • bVIMaj7(#9) et IV-7(#11) • bIIMaj7(#9) et bVII-7(#11) • IVMaj7(#9), et II-7(#11) • bVMaj7(#9) et bIII-7(#11) Une fois de plus, la nature instable des systèmes harmoniques me pousse à utiliser les accords en position fondamentale qui proviennent des gammes verticales stables. 2.4.3.5 LES ACCORDS DE FONCTION SOUS-DOMINANTE ORIGINAIRES DU SYSTÈME HARMONIQUE MAJEUR Les accords répondant aux conditions énumérées plus haut et faisant partie du système harmonique majeur sont les suivants :

(43)

43 • bIII-Maj7(#11) • IV-Maj7(#11) • bV-Maj7(#11) • bVII-Maj7(#11) Bien que j’apprécie la sonorité de ces accords, j’ai plus tendance à les utiliser dans leur fonction tonique que sous-dominante, étant donné leur grande stabilité. Si j’ai à m’en servir comme SD, ce sera principalement en prolongation de tonique. 2.4.3.5 LES ACCORDS DE FONCTION SOUS-DOMINANTE ORIGINAIRES DES SYSTÈMES SYMÉTRIQUES Pour ce qui est des systèmes symétriques, seuls le système diminué et le système augmenté sont en mesure de produire des accords qui remplissent les conditions pour avoir une fonction sous-dominante. En effet, la construction du système par ton rend impossible la présence du centre tonal et de la sous-dominante (4ème degré). Il est bon de noter que, selon moi, la

dissonance et l’instabilité de ces systèmes rendent plus difficile l’utilisation de ces accords au cours d’une progression d’accords plus traditionnelle. Dans mon cas, j’utilise ces accords en grande partie en retard de résolution ou en prolongation de tonique. Pour le système diminué : • IV13(b9) et/ou VIo7 • bVI13(b9) et/ou Io7

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• VII13(b9) et/ou bIIIo7 • II13(b9) et/ou bVo7 Pour le système augmenté : • IV+Maj7(#9) • VI+Maj7(#9) • bII+Maj7(#9)

2.5 LES TYPES DE MOUVEMENTS HARMONIQUES

Je suis d’avis que, étant donné que la majorité des systèmes asymétriques sont heptatoniques et que le système chromatique contient 12 notes différentes, il est impossible de ne pas pouvoir faire de rapport harmonique entre deux gammes. En effet, en comparant deux gammes ou modes provenant de n’importe quel système heptatonique, un minimum de deux notes communes est présent. L’exception serait l’emploi unique de mode hexatonique pour construire la progression harmonique, où il est possible d’avoir deux différentes gammes qui ne partagent aucune note commune. Ce constat me force à croire que, si la progression d’accords n’est pas strictement issue de systèmes tonals hexatoniques, toutes les progressions d’accords qui en résulteront seront analysable par mouvements fonctionnels.

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45 Je définis ces différents mouvements fonctionnels comme suit : • Progression d’accords fonctionnelle sans substitution : une progression d’accords qui implique un mouvement entre les différentes familles de fonction (par exemple D-7 G13 CMaj7 ou D7sus D7(b9) GMaj7) Exemple 1 : Voici un exemple tiré de MOTIONS mesures 5 – 8 • Progression d’accords avec substitution par fonction unique unisystémique : une progression d’accords qui n’implique pas de changement entre les familles de fonctions et dont les accords de substitution proviennent d’un seul et même système tonal Exemple 2 : Ci-dessous, un exemple de progression avec substitution par fonction unique (tonique dans ce cas) unisystémique (mélodique majeur) tiré de la section de solo de CHORALE.

(46)

• Progression d’accords avec substitution par fonction unique intersystémique : une progression d’accords qui n’implique pas de changement entre les familles de fonctions et dont les accords de substitution proviennent de 2 ou plusieurs systèmes tonals différents Exemple 3 : Ci-dessous, un exemple de progression avec substitution par fonction unique (dominante dans ce cas) intersystémique (provenant des systèmes symétriques diminués et par ton) provenant de MOTIONS. Ici, F9(#5) est substitut de C#9(#5), D9(#5) est substitut de Bb9(#5), B9(#5) est substitut de G9(#5) et Ab7alt est substitut de E7(#5). On peut donc simplifier la progression comme ceci : C#7(#9) C#9(#5) Bb7(#9) Bb9(#5) G7(#9) G9(#5) E7(#9) E7(#5), et où Bb7(#9), G7(#9) et E7(#9) sont aussi des substituts de C#7(#9). • La pédale : La pédale a pour effet de créer un frein dans le rythme harmonique, dû à l’absence de mouvement de basse. Il est possible de créer l’illusion d’arrêt, car la note de basse est commune, mais les fonctions continuent à changer (exemple C7sus(b9) vers C7alt vers C-(b6)). Cet arrêt peut être accentué si les fonctions ne changent pas, mais si l’origine des fonctions change. Dans le cas de substitution intersystémique, seule

(47)

47 la stabilité gère le mouvement, il est donc beaucoup plus rare de la rencontrer étant donné sa faiblesse. Exemple 4 : Voici un exemple tiré de CHORALE, mesures 96 à 99 Je divise les possibilités de « mouvements émotifs » que deux accords consécutifs peuvent avoir entre eux en quatre grandes catégories : (1) une résolution (R) (2) une anti-résolution (A) (3) un mouvement neutre (N) ou (4) une demi-cadence (DC). Il est à noter qu’il est toujours possible de « camoufler » une résolution ou une anti-résolution en utilisant des paramètres qui font partie des mouvements opposés. Par exemple, si le centre tonal est G, il est possible de camoufler une résolution par une déstabilisation de l’accord de résolution (D7alt vers G-7 devient D7alt vers C7sus) ou vice versa. 2.5.1 LES RÉSOLUTIONS Pour la composition de la suite, j’ai utilisé trois types de résolution (R) possible entre deux accords consécutifs que je définis comme étant : 1. La tonicisation (équivalent à la cadence authentique parfaite ou imparfaite), où un accord de fonction dominante se résout vers un accord de fonction tonique, un accord qui peut être considéré comme tonique temporaire (comme dans le cas de la résolution

& ’ ’ ’ ’

pedale

A

b

-11

’ ’ ’ ’

D

b

-7

/A

b

’ ’ ’ ’

A

b

7sus(

b

9)

’ ’ ’ ’

D

maj7

/A

b

&

53

&

61

&

69

&

77

&

85

&

93

3 EXEMPLE D'HARMONIE

Figure

Tableau 1 : Le système mélodique majeur et ses modes relatifs:
Tableau 2 : Le système mélodique mineur et ses modes relatifs
Tableau 4 : Le système harmonique mineur et ses modes relatifs :
Tableau 5 : Les accords de fonction tonique stables en position fondamentale
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