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LES ANALYSES DU CHANGEMENT ORGANISATIONNEL: QUELQUES QUESTIONS THEORIQUES, METHODOLOGIQUES ET EPISTEMOLOGIQUES

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ORGANISATIONNEL: QUELQUES QUESTIONS

THEORIQUES, METHODOLOGIQUES ET

EPISTEMOLOGIQUES

Karim Ben Kahla

To cite this version:

Karim Ben Kahla. LES ANALYSES DU CHANGEMENT ORGANISATIONNEL: QUELQUES

QUESTIONS THEORIQUES, METHODOLOGIQUES ET EPISTEMOLOGIQUES. La flexibilité: condition de survie?, Mar 1999, Tunis, Tunisie. �halshs-03088460�

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LES ANALYSES DU CHANGEMENT ORGANISATIONNEL

QUELQUES QUESTIONS THEORIQUES, METHODOLOGIQUES ET EPISTEMOLOGIQUES

Karim Ben Kahla

article présenté au colloque « La flexibilité: condition de survie? » organisé par l’ISCAE, Tunis,

10-11 mars, 1999.

«Lorsque Socrate trouve, en raison de sa bonne santé ou de sa maladie, le vin amer ou doux, faut-il dire que le vin a changé, que Socrate a changé, ou encore ni l’un ni l’autre»

Ce travail essaye de passer en revue la littérature concernant le changement de et dans les organisations. Nous proposons pour cela une typologie des analyses et relevons les questions fondamentales qui structurent chacun des axes ainsi développés. En fait, il serait impossible de dresser un panorama complet des recherches sur ce thème tellement les paradigmes différents et les écrits prolifèrent renvoyant à chaque fois à des conceptions différentes des organisations et des approches que l’on peut avoir de celles-ci. Nous avons donc décidé de faire un certain nombre de choix qui devraient nous simplifier cette mise en ordre d’une littérature foisonnante :

- tout d’abord, nous nous intéressons au champ particulier des théories des organisations;

- ensuite, nous ne retiendrons dans cette analyse que la littérature qui nous a semblé être la plus importante et la plus significative;

- enfin, on s’intéressera moins à exposer les détails de la littérature que les antinomies récurrentes, les questions et apories sous-jacente à celle-ci et aux dynamiques du changement.

Cette revue des «théories» dominantes et majeures du changement organisationnel permettra dans un deuxième temps d’aborder le volet de l’organisation et de la gestion du changement. Ces deux premières parties mettront ainsi l’accent sur la dialectique de l’organisation et du changement et nous permettront de dégager les dualités et les pôles théoriques qui nous paraissent structurer les analyses du changement organisationnel.

Enfin, nous aboutirons à une réflexion méthodologique et épistémologique sur les difficultés de ces analyses et sur les voies qui restent à explorer.

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I. LECHANGEMENTDEETDANSLESORGANISATIONS

Les analyses du changement de et dans les organisations peuvent être regroupées autour de huit thèmes: les acteurs du changement; les objets du changement; les origines et sources du changement; les niveaux de celui-ci; les formes du changement; les moteurs et logique du changement; les étapes, stades et épisodes du changement et, enfin, les finalités et fonctions du changement.

I.1- Les acteurs du changement

Les analyses du changement et les théories des organisations ont souvent posé la question des relations entre les acteurs et le ou les systèmes. Cette problématique classique a été abordée soit en privilégiant un pôle au dépend de l’autre, soit en essayant de relever les marges de liberté des acteurs, les stratégies d’exploitation de ceux-ci par ces mêmes acteurs ou, dans d’autres cas, en relevant les opérations de construction ou de structuration mutuelles entre acteurs et systèmes ou structures. Même si les acteurs du changement sont souvent anonymes, diffus et difficilement identifiables, il n’en demeure pas moins que trois groupes d’acteurs dominent la littérature:

- les ingénieurs ou techniciens des structures et des stratégies qui sont souvent des experts-consultants internes ou externes jouant le rôle de préparateur et/ou de «facilitateur» du changement;

- les héros et leader du changement (souvent révolutionnaire ou présenté comme tel) qui se présentent comme des constructeurs de sens et des innovateurs;

- enfin, et par contraste avec ces deux figures «gagnantes», on trouve les « victimes » du changement qui représentent des individus et/ou des organisations soumises à l’environnement.

Les théories de la décision et les théories de l’action ont également pensé cette relation complexe entre acteur individuel ou collectif et système construit ou instruit.

Dans le domaine de la gestion, on a souvent reproché aux analyses les confusions faites entre l’entreprise et son dirigeant.

Les théories du leadership ont mis l’accent sur la psychologie du dirigeant, sur l’émergence du leadership et sur le profil de l’innovateur1. D’autres théories de la

motivation mettent également en relation les facteurs individuels avec la cohésion ou l’éclatement de l’acteur ou des acteurs collectifs. Les figures du leader, de l’entrepreneur et

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du médiateur ont ainsi fait l’objet de plusieurs écrits. Enfin, le rôle de l’acteur individuel ou collectif comme initiateur ou comme suiveur du changement a également été analysé en relation aux régimes de justification ou d’argumentation de celui-ci. L’acteur du changement est un rhéteur et est tout aussi engagé dans des régimes d’argumentation qu’il l’est dans ceux de l’action.

II. 2 – Les objets du changement

Plusieurs travaux traitent du « sur quoi et sur qui porte le changement ? ».

Les « objets » que l’on gère (que l’on change) afin de changer (d’autres objets) sont, en premier lieu les acteurs de l’organisation ou de son environnement. Au-delà de ces facteurs humains, les « objets » du changement peuvent être soit matériels soit idéels.

Les objets matériels portent généralement sur les structures et les contextes d’action (exemple passer d’une structure pyramidale à une structure en réseau) ou sur les processus (exemple: passer de la standardisation à la flexibilité).

Pour leur part, les objets idéels du changement relèvent généralement des orientations stratégiques des individus ou des organisations, de la culture (exemple passer d’une culture basée sur le contrôle à une culture valorisant la confiance) et/ou de la connaissance (exemple les dynamiques entre connaissances tacites et explicites).

Il va sans dire que les changements des aspects idéels sont intimement liés à ceux des aspects matériels et que les uns peuvent préparer ou découler des autres.

II 3 - Les origines du changement

Les recherches peuvent être regroupées autour de trois axes dominants:

- le premier groupe met l’accent sur les forces exogènes et sur l’impact de l’environnement. Il s’agit essentiellement du courant de l’écologie des organisations d’inspiration lamarckienne ou darwinienne avec un déterminisme environnemental plus ou moins fort (Hannan et Freeman, 1977) et des approches institutionnalistes (Aldrich, 1993, Scott, 1995) qui, contrairement au courant précédant, mettent l’accent sur les dimensions culturelles, symboliques et imaginaires des organisations. L’institutionnalisation des organisations présupposerait alors certains mécanismes d’isomorphisme (Oliver, 1988).

- Le deuxième groupe s’intéresse aux forces endogènes et met en avant le rôle des interactions entre composantes de l’organisation dans le changement. Les analyses ont alors souvent porté soit sur les relations fonctionnelles (ou dysfonctionnelles) entre la totalité (du système) et les parties ou composantes de celui-ci

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(Gouldner, 1959) soit sur les mouvements de contradiction et/ ou de renforcement de forces et/ ou d’impératifs qui finissent par constituer des configurations plus ou moins stables (Miller, 1987; Mintzberg, 1990). Le premier groupe de recherches analyse les relations totalités/parties en mettant l’accent sur le fait que le système existe en fonction de l’intégration de ses parties (de sa cohérence) alors que les unités tendent à bénéficier et à préserver un minimum d’autonomie fonctionnelle. Pour leur part, les recherches configurationnelles interprètent le changement comme un résultat d’un manque de cohérence des choix organisationnels.

- Le troisième groupe remet en cause la distinction interne/externe et s’interroge sur la notion de frontière de l’organisation et sur les opérations de définition, redéfinition et construction de l’organisation et de ses changements. L’élément pertinent de l’analyse devient alors non pas l’unité, ou l’organisation, mais le réseau d’interdépendances (Quinn et Cameron, 1988: 46).

II.4 - Les niveaux du changement

La littérature organisationnelle est traversée par des analyses portant sur le niveau de la tâche, de l’acteur, celui du groupe, celui de l’entreprise, celui du groupe d’entreprises (approches sectorielles, stratégiques ou configurationnelles), celui des populations et enfin, celui du changement en lui-même (on s’interroge alors sur les possibilités et les conditions d’un changement du changement).

Les analyses du changement au niveau de l’entreprise ont mis l’accent sur les évolutions de l’organisation, ceux de la stratégie, ou encore celui d’un niveau plus général et plus générique: les configurations.

A leur tour les changements de l’organisation peuvent concerner sa culture, sa structure, ses systèmes et/ou les personnes. Pour sa part, le changement de la stratégie peut porter sur la vision, le portefeuille d’activités, le positionnement stratégique, les programmes et/ou les ressources (Mintzberg et Westley, 1995)

Ces configurations ont été présentées comme des construits résultants de l’imbrication de trois niveaux de structure: l’infrastructure technologique, la socio-structure relationnelle et politique et la superstructure des cultures et des valeurs (Fombrum, Desreumaux, 1995). La question devient alors d’analyser les processus d’imbrication, de structuration et d’évolution de ces différents niveaux. L’approche structurationniste de Giddens (1987) présente l’une des analyses les plus discutées de ces imbrications.

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II.5- Les formes de changement

Plusieurs auteurs distinguent entre un changement du type 1 qui serait reproducteur et évolutionnaire et un changement du type 2 qui serait transformateur ou révolutionnaire (Watzlawick 1981 et Miller et Friesen, 1984 ont été les auteurs les plus cités dans cette perspective).

Selon Tushman et Romanelli (1985), la vie des organisations est caractérisée par de longues périodes stables de convergence, où le changement est restreint à des ajustements incrémentaux qui consolident les orientations stratégiques déjà choisies suivies par des changements révolutionnaires dans des périodes courtes et peu fréquentes appelées réorientations.

Alors que les adaptations/évolutions2 graduelles semblent correspondre à des

environnements évoluant de façon prévisible, les changements radicaux (révolution/ajustement)3 ont reçu plusieurs explications. Dans certains cas, des ajustements

marginaux successifs seraient susceptibles de conduire à la transformation radicale du système lui-même. En effet, soit les ajustements partiels et incrémentaux des sous unités conduisent à une refonte de l’ensemble de l’organisation, soit ces ajustements sont à l’origine d’une perte progressive et continue d’alignement de l’organisation d’avec son environnement. Dans cette deuxième situation, les managers risquent d’être incapables de percevoir la dérive stratégique de l’organisation tant que celle-ci n’a pas conduit à un état de crise et ce n’est que lorsqu’un tel état est atteint que le changement radical devient nécessaire. Enfin, les forces perturbatrices internes ou externes peuvent faire évoluer le système si loin de ses paramètres d’équilibre initiaux que leur rétablissement devient improbable. A cet instant, un changement infime - qui, normalement, ne provoquerait pas de transformation majeure - entraîne le système vers une nouvelle configuration (Vandangeon-Dermez, 1998). Ainsi, plus les composantes d’une organisation seraient fortement interdépendantes, plus celle-ci résisterait aux changements et plus on aurait du mal à identifier un élément isolé responsable de la réussite ou de l’échec de celle-ci (Miller et Friesen, 1984) et plus le changement sera alors retardé jusqu’à ce que le coût de non-restructuration devienne suffisamment élevé pour justifier un grand mouvement touchant à un grand nombre d’éléments à la fois4: c’est le changement quantique.

2La théorie de la contingence structurelle privilégie les adaptations, l’écologie des organisations, l’évolution, les théories de l’acteur, l’ajustement.

3Révolution peut signifier que tout change en même temps mais aussi et surtout qu’un ou quelques éléments très importants changent rapidement.

4Coût de non restructuration ou de manque d’adaptation de la situation actuelle coût de changement de la situation actuelle (pertes des avantages de la situation actuelle) + coûts d’accès à la nouvelle situation

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Par ailleurs, impliquant la modification de plusieurs éléments à la fois, le changement quantique est généralement coûteux. Il s’ensuit qu’en vue de minimiser la période de transition, d’éviter au plus vite les coûts supportés à cause de l’inadaptation de l’ancienne configuration et de bénéficier des avantages de celle nouvelle, ce type de changement devrait être rare et rapide. Ainsi, le changement quantique au début, à toutes les chances d’être dramatique et donc révolutionnaire.

Mise à part la situation de crise profonde, trois circonstances paraissent particulièrement favorables à ce changement révolutionnaire (que l’on pourrait qualifier de changement du changement) (Gersick, 1991):

- le «vieillissement» du système. En effet, avec le temps, les systèmes humains tendent à dépasser les «structures profondes» qui gouvernaient leur action. Celles-ci peuvent avoir été influencées par l’inexpérience des innovateurs (entrepreneurs), leur empressement à s’engager (un sens démesuré de l’entrepreneuriat ou un optimisme excessif), ainsi que par des attentes déplacées. Cette «structure profonde» peut également se révéler caduc du fait de la réalisation des objectifs auxquelles elle était destinée, ou du fait de son inaptitude à faire face à de nouvelles exigences.

- L’arrivée d’une forte personnalité externe telle qu’un nouveau dirigeant ou un nouveau consultant. Cette personnalité apporte une nouvelle vision des choses et une charge psychologique et émotionnelle susceptible de réconforter les membres du système en crise et de leur faciliter l’acceptation d’un changement de la «structure profonde».

- l’arrivée du système à des «bornes» temporelles importantes qui constituent des points focaux où on a tendance à faire le bilan de ce qui a été fait et de ce qui reste à faire. C’est ainsi, par exemple, que les remises en cause tendent à être plus vigoureuses au début et à la fin d’un projet.

Certaines questions mériteraient davantage de recherches: les révolutions seraient-elles plus « rentables » que les simples évolutions ? Y aurait-il des situations ou des contextes organisationnels ou environnementaux associés à un type de changement plutôt qu’à un autre ? Les types de changements se combinent-ils ? Se suivent-ils ? Etc.

II.6- Les moteurs et logiques de changement

Pour Aristote, le changement peut avoir quatre causes: matérielle (l’airain pour la statue), formelle (la notion définissant la chose), efficiente (le père pour l’enfant), finale (la santé pour la promenade) (Popelard et Vernant, 1997).

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Les moteurs du changement peuvent se situer à l’intérieur ou à l’extérieur de l’organisation et être plus ou moins maîtrisé par les acteurs internes ou externes de celle-ci. Généralement, les moteurs renvoient à l’existence d’un déséquilibre, d’incertitude(s), de tension(s) ou de la recherche d’un ou de plusieurs avantages. Miller (1987) parle d’impératifs (environnement, structure, leadership et stratégie) dont la dynamique expliquerait le changement.

Il propose alors de classer les organisations selon leur impératif dominant, avant de procéder à des recherches plus approfondies sur les relations entre stratégie, structure, environnement et personnalité du dirigeant.

Pour leur part Van de ven et Poole (1995) dégagent quatre familles de moteurs du changement selon que celui-ci est prescrit ou construit, qu’il porte sur un élément isolé ou sur plusieurs (avec donc le risque de conflits): le cycle de vie (croissance organique); l’évolution (survie compétitive); dialectique (opposition, conflit); téléologie (coopération volontaire).

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Famille Cycle de vie. (Croissance organique). Comte; Spencer; Piaget... Evolution. (Survie compétitive) Lamarck; Darwin; Mendel... Dialectique. (Opposition, conflit) Hegel; Marx; Freud...

Téléologie. (Coopération volontaire) Mead; Weber; Simon... Logique Programme immanent; séquence nécessaire, ordonnée; d’adaptation conformiste, unitaire Sélection naturelle au

sein d’une population. Forces contradictoires:thèse, antithèse, synthèse. Le pouvoir relatif d’une antithèse peut mobiliser une entité organisationnelle à un degré suffisant pour remettre en cause la thèse ou l’état courant et préparer une synthèse.

Etat final attendu; construction sociale des buts en fonction des actions passées; équifinalité

(différentes façon d’atteindre un objectif).

Progression

d’événement Linéaireirréversible; et séquence d’étapes prescrites (passage d’un point de départ à un point d’arrivée). Séquence répétitive, cumulative et probabilistique de variation, sélection, et rétention d’événements au sein d’entités dans une population donnée.

Séquence récurrente, discontinue de confrontation, conflit et synthèse entre des valeurs et événements contradictoires. Séquence/cycle récurrent, discontinu de formulation d’objectifs, mise en oeuvre, évaluation et adaptation/modificati on des objectifs basé sur ce qui a été appris et sur les états finaux désirés.. Force

génératrice Programme(code) naturel, logique ou institutionnel prescrit les contenus spécifiques des étapes. Pénurie, rareté et compétition;. On peut prévoir la probabilité de changement des caractéristiques démographiques de la population occupant une niche. Conflit et confrontation entre des entités, forces opposées, intérêts ou classes. « Enactment» construction sociale volontaire des membres de l’entité. consensus sur les moyens;

coopération/symbiose .

conditions

d’expérience Une entité subit lechangement mais maintient son identité. Elle passe au travers d’étapes distinguables en forme ou fonction. Une population d’entités existant ensemble (dans une situation physique ou sociale avec des ressources limitées). Des mécanismes identifiables existent pour la variation, sélection et rétention des entités dans la population.

Au moins deux entités existent (chacune ayant sa propre identité) qui s’oppose ou est en contradiction avec l’autre. Individu ou groupe agissant comme entité unie s’engageant dans une action volontaire afin de construire socialement et de partager

cognitivement un état final ou objectif.

Deux pistes de recherches nous paraissent appeler une meilleure exploration : les complémentarités/oppositions des différents moteurs et l’articulation/combinaison de ceux-ci (moteurs opérants à différents niveaux de l’organisation et dans différents contextes; équilibre relatif entre les différents moteurs et possibilités de combiner ceux-ci).

I.7- Les étapes, stades, séquences et épisodes du changement

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relèvent généralement d’une conception déterministe de la vie des organisations. Deux grandes tendances traversent la réflexion concernant ceux-ci.

La première découle du courant du développement organisationnel. C’est ainsi, par exemple, que Dussault (1993) récence plus d’une cinquantaine de modèles de développement des entreprises5. Ces modèles présentent généralement trois à cinq stades

d’évolution qui peuvent ou non être marqués par des crises administratives ou organisationnelles et focalisent soit sur les caractéristiques des entrepreneurs soit sur le rôle des crises. Les recherches de Chandler (1972) de Rumelt (1974) et d’Ansoff (1968) sur l’articulation des changements de stratégies et des changements de structure peuvent être rattachées à ce premier courant de réflexion. Ces modèles présentent plusieurs inconvénients que nous résumons dans le tableau suivant :

 confusion entre l’évolution des organisations et celle des êtres humains voire même celle des produits;

 linéarité des modèles: le développement d’une entreprise ne correspond pas toujours à une progression continue;

 absence d’informations concernant la période de transition entre les stades;

 faible vérification empirique des modèles;

 non réalisme de certains modèles;

 absence de consensus sur les caractéristiques et le nombre de stades de développement: certains considèrent la croissance comme un stade à part entière, d’autres la considèrent comme le passage d’un stade à l’autre, de même on trouve des modèles à trois, quatre, cinq voir même dix stades (même si la majorité présentent entre trois et cinq stades);

 la nature et l’étendue descriptives des stades varient d’un modèle à l’autre;

 manque d’homogénéité et d’universalité entre les modèles;

 certains modèles ignorent certains stades;

 peu de modèles qui parlent de la phase de pré-démarrage;

 toutes les entreprises ne passent pas nécessairement par tous les stades et dans l’ordre défini;

 absence de consensus sur les variables qui reflètent le développement d’une entreprise (chiffre d’affaire, taille, effectif, complexité des agencements, Etc.);

 difficulté de mettre en évidence les seuils critiques de passage d’une étape à l’autre;

 les modèles proposés sont souvent le résultat d’une analyse rétrospective de l’évolution: le passé ne détermine pas toujours le future (sauf à céder à une forme d’évolutionnisme);

 toutes les entreprises ne rencontrent pas toutes les crises de façon successive et ordonnée. Celles-ci peuvent être évitées, combinées, répétées, Etc.

Le deuxième courant s’intéresse aux processus concrets du changement au sein des organisations et des populations. Le modèle le plus récurrent est celui de la variation, sélection, rétention ou de la cristallisation, decristallisation, recristallisation ( ). Certains auteurs ont tenté d’amender ce schéma en proposant d’autres formes de séquences. C’est ainsi que le modèle de Weick (1979) se présente de la façon suivante (Stacey, 1993):

5Parmi les modèles les plus connus citons ceux des théoriciens du cycle de vie de l’organisation et celui de Greiner (1972)

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changement écologique + mise en scène + sélection + rétention

(+, - ) + (+, - )

- le changement écologique: concerne le changement dans les marchés ou dans l’environnement général;

- La mise en scène des actions des individus de l’organisation6: les acteurs de

l’organisation se basent sur leur perception de l’environnement et peuvent influencer les caractéristiques de celui-ci. L’organisation «invente» un environnement et le met en oeuvre. La réalité à laquelle l’organisation répond est socialement construite.

- La rétention: concerne la mémoire partagée par les acteurs de l’organisation permettant d’entamer ou de freiner une action. La rétention et la mémoire de l’organisation seraient les équivalents de la culture de celle-ci;

- la sélection: concerne le processus par lequel les acteurs se concentrent uniquement sur certaines significations ou certaines perceptions de leurs propres actions ainsi que des actions des autres intervenants. Les prophéties auto-réalisatrices peuvent se manifester par des cercles vertueux ou vicieux. Les managers s’engagent dans certaines actions, constatent le résultat de leurs actions , comprennent ce qu’ils ont fait et s’engagent dans d’autres activités en réponse à ces compréhensions et ces représentations. Les acteurs créeraient donc une signification pour ce qu’ils fonts de façon rétrospective.

Pour sa part, Vandangeon-Derumez (1998) considère que le changement prescrit est caractérisé par le fait que la «rétention», résultant de la mise en oeuvre du projet de changement est suivie d’une activité de «sélection» afin de ne pas perdre le cadre de cohérence initial. Ce n’est que par la suite que la «variation» vient relancer une dynamique plus autonome permettant d’éviter de conduire l’organisation vers un nouvel état d’inertie relative. Dans un processus de changement «construit», l’activité de «variation», résultant de la mise en oeuvre du projet de changement, est suivie d’une activité de «sélection». Celle-ci permet de formaliser la nouvelle vision et de capitaliser les expériences vécues (activité de «rétention»).

Vandangeon-Derumez (1998) présente trois phases de changement:

Phase Activités. Dimensions. Dimensions. Identification d’un stimulus opportunité problème.

6Le terme mise en scène est utilisé à la place de celui d’action pour indiquer que les personnes dans l’organisation ne font pas qu’anticiper, réagir ou s’adapter à ce que les acteurs de l’environnent font objectivement.

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Recherche d’information. étude prospective. audit. Maturation Sensibilisation à l’idée du

changement. annonce. implication Mise en mouvement de

l’organisation. contrôlée. non contrôlée. Définition des grands axes

du changement. vision/cadreorganisationnel. démarche. Finalisation du projet de

changement. projet formalisé. projet peu formalisé. Communication du projet

de changement. annonce interaction Mise en oeuvre du projet brutale progressive Génération de nouvelles

idées. induite autonomie

Développement

d’initiatives. par la hiérarchie par la base Déracinement Evaluation/sélection. cadrée non-cadrée Suivi de la mise en oeuvre. hiérarchique interhiérarchique Formation. axée sur les outils axées sur la réflexion Accompagnement du

changement. ponctuel structurel Evaluation-bilan des

actions engagées directive interactive Mise en cohérence des

activités. de foisonnement. d’accompagnement Enracinement Correction des actions

engagées. réorientation. ajustement Changement durable. implantation d’un cadre de

travail stable formalisation dela vision

Les recherches devraient donc porter davantage sur les caractéristiques des différentes phases mais également sur l’articulation de ces phases et de ces étapes : y a t il un ordre dominant ou une séquence idéale de changement? La réussite d’un projet de changement dépend-elle de la réussite de l’ensemble des étapes? Etc.

I.8- Les finalités/fonctions du changement:

Plusieurs approches considèrent le changement comme l’une des missions des dirigeants. Le dirigeant performant serait celui qui serait capable de changer les choses dans le «bon sens». Le changement serait donc une manifestation de compétence et de pouvoir. Cette conception est la plus dominante et sert notamment à convaincre les dirigeants actuels et futurs (encours de formation) de l’utilité de la réflexion sur le changement organisationnel.

Deux courants traversent la littérature: soit le changement est conçu de façon technocratique afin d’améliorer ou de (ré) former un système donné; soit ce changement est abordé à partir d’une approche politique et critique dont la finalité consiste moins à réformer le système pris en compte qu’à le changer de façon plus ou moins radicale.

La conception technocratique et fonctionnaliste du changement considère celui-ci comme étant un processus de construction d’une certaine cohérence organisationnelle

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(interne ou externe, intrinsèque ou extrinsèque) ou, alternativement, comme étant lui-même le produit de la dynamique de la cohérence organisationnelle. Dans le premier cas, on se concentre sur la notion de convergence, dans le deuxième, la notion mise en avant est celle de co-évolution.

Pour sa part, la conception politique du changement fait appel à la sociologie des conflits et à différentes formes d’interactionnisme. Elle considère que la littérature managériale est non seulement non-critique (ou a-critique) mais encore anti-critique. Cette conception politique ou critique du changement vise l’émancipation, l’autonomie et la responsabilisation des individus. Les valeurs et le sens, généralement présentés comme pré-requis ou résultats d’un bon changement, ne seraient que des transfigurations et des voiles jetés sur des rapports de pouvoir et de force. Le changement serait à la fois la preuve et le résultat d’une domination que la littérature managériale (notamment celle portant sur le changement) ne fait que conforter et occulter.

II. L’ORGANISATIONDUCHANGEMENT

L’organisation et la gestion du changement sont intimement liées aux différentes conceptions de celui-ci. Toute action organisée présuppose une dialogique du changement et de l’organisation.

Organisation Changement

Figure 1: dialogique organisation/ changement

Il s’agit ici de relever certains des thèmes fondamentaux concernant la gestion du changement. Schématiquement, la littérature relevant de ce volet part d’un a priori volontariste et est le plus souvent prescriptive. Des versions plus ou mois contextualités et relativisées du « one best way » continuent à alimenter une littérature fort abondante qu’il serait difficile de synthétiser. Notons néanmoins, qu’une grande partie de cette littérature considère que le « non changement », le refus, ou la résistance au changement constituent une sorte d’anomalie, un danger, une faiblesse ou, dans d’autres cas, et faute de mieux, un refuge provisoire, un stade que le leader est supposé remettre en cause.

Pour Bayard et Delobel (1997), la gestion du changement peut focaliser soit sur la tâche ou la mission, soit sur les individus et les facteurs humains:

Priorité à la mission, l’institution du point de vue

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Conception cybernétique de la transformation organisationnelle: changement de l’organisation. Prééminence idéologique des objectifs de l’organisation, le but est de maintenir un système de pouvoirs et les bases de la hiérarchie, la transformation est décidée, planifiée, l’individu est appelé à s’adapter aux situations nouvelles, les conséquences humaines et sociales sont des output non désirés du processus d’innovation.

Conception auto-organisée du changement: changement organisationnel.

Prééminence idéologique est donnée aux considérations humaines et sociales, le but est d‘accepter une remise en cause éventuelle des rôles et des statuts, de reconsidérer les structures hiérarchiques, la négociation est essentielle, le management est centré sur les buts et attentes des acteurs concernés par la transformation

Deux approches des organisations et du changement (Bayard et Delobel, 1997) La littérature concernant cette organisation du changement nous semble comporter cinq thèmes récurrents: l’apprentissage et le désapprentissage du changement, les routines organisationnelles; les résistances au changement et l’inertie; les outils du changement et, enfin, la recherche-action.

II.1- L’apprentissage et le désapprentissage du changement

Ce thème recouvre le management des connaissances et des contextes de l’innovation au sein des organisations. Plusieurs questions pourraient être développées afin de mieux comprendre ces phénomènes:

- peut-on et comment gérer l’apprentissage? Comment articuler apprentissage et désapprentissage?

- comment articuler innovation et apprentissage, exploration et exploitation? Quels sont les mécanismes et les étapes de l’apprentissage?

- comment combiner apprentissage individuel et apprentissage collectif? Comment se combinent ou s’affrontent différents apprentissages à différents niveaux d’une organisation?

II.2- les routines organisationnelles

Celles-ci sont pensées au niveau organisationnel mais également au niveau individuel (modèles mentaux et discursifs). Les routines permettent d’accélérer certains processus (notamment de remémoration), de se spécialiser dans certaines activités, de sécuriser (par les certitudes qu’elles apportent) et/ou de coordonner les actions. Il n’en demeure pas moins que cette unité de base de l’activité organisationnelle reste souvent méconnue:

- quelles distinctions peut-on faire entre routinisation, programmation et spécialisation?

- comment combiner routinisation et innovation?

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de quel moment peut-on affirmer qu’une routine est devenue dysfonctionnelle?

- quels relations doit-on établir entre routinisation des actions, des représentations et des rationalisations?

- comment l’acteur s’approprie-t-il les routines et qu’elle est sa marge de liberté par rapport à celles-ci?

- comment articuler routines au niveau individuel et routines au niveau organisationnel?

II.3- les résistances au changement et l’inertie organisationnelle

Ces deux derniers points peuvent être abordés à trois niveaux: les causes des résistances ou de l’inertie, les conséquences de celles-ci et les solutions ou « remèdes » proposés.

La résistance au changement peut être plus ou moins active et plus ou moins consciente. Elle peut avoir pour origine des contraintes structurelles trop fortes ou paradoxales; une incompréhension de la part des acteurs d’injonctions ambiguës, ambivalentes ou incertaines; d’un sentiment d’injustice face aux changements imposés et/ou d’un manque de motivation des acteurs à supposer que ces acteurs soient conscients du besoin de changement. Ceux-ci compareraient alors le coût du statu quo au coût du changement et peuvent ou non décider d’adhérer à celui-ci en fonction de leur estimation de ces mêmes coûts pour les autres groupes de l’entreprise.

Carnal (1990) affirme que, face à un changement, il y a généralement déclenchement d’un processus en cinq étapes:

- étape 1: on renie l’importance, l’utilité ou la pertinence du changement; - étape 2: l’individu essaye de défendre son territoire;

- étape 3: on écarte la vision passée et on commence à voir que le changement est à la fois inévitable et/ou nécessaire;

- étape 4: on essaye de s’adapter au changement; - étape 5: on internalise le changement.

L’élaboration d’un système d’information performant, l’écoute et la communication permettraient d’accélérer ce processus. De même, la tolérance à l’ambiguïté par les acteurs permettrait de mettre en place des systèmes organisationnels plus flexibles et plus flous (Airaudi, 1998; Perret, 1998) permettant d’articuler la structure fonctionnelle du système

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avec sa structure profonde (Gersick, 1991). C’est cette structure profonde qui fixe des frontières durables pour la rationalité, les représentations et les significations (Bonami et al, 1993).

Alors que la résistance aux changements relève du niveau de l’acteur ou du niveau du groupe, l’inertie concerne le niveau de l’entreprise. Plusieurs contraintes pèsent sur l’adaptation organisationnelle (Haveman, 1992; Desreumaux, 1994):

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Contraintes «internes» Contraintes «externes» - investissements dans des immobilisations, équipements et

personnel spécialisé; investissements et coûts enfouis sous forme d’investissements initiaux de toute nature (affectifs ou économiques),

- limites des informations internes reçues par les décideurs; information traitée par la structure interne et tendance du système d’information à perpétuer les mêmes représentations de la réalité: n’étant pas informé sur son manque d’information, l’ignorance s’ignore elle-même et l’organisation en vient, sans s’en douter, à se couper de sa réalité,

- contraintes politiques internes en faveur des intérêts investis;

- l’histoire organisationnelle qui justifie les actions passées et empêche de considérer des alternatives

- résistances au changement et aux réallocations des ressources

- coûts du changement de procédures,

- institutionnalisation des buts (afin de répondre aux besoins de fiabilité et de prévisibilité des différents groupes d’intérêts),

- forte interdépendance et complémentarité entre les composantes d’une organisation, (un changement touchant à quelques éléments risque de provoquer une absence de cohérence d’autant plus coûteuses, qu’il est difficile de déterminer avec certitude quelle partie ou processus sont responsables du succès ou de l’échec de l’organisation.) - existence de ressources en réserve (slack-resources) (permettant de différer le changement),

- planification ou programmation trop rigide des opérations (souci élevé de rationalisation domination d’un groupe chargé de la planification),

- barrières légales, fiscales et économiques à l’entrée dans de nouvelles aires d’activité;

- contraintes sur l’information externe recueillie par les décideurs;

- considérations de légitimité;

- problème de la rationalité collective et de l’équilibre général

- fragmentation de la coalition politique et de ses objectifs,

- neutralisation mutuelle des différents groupes d’intérêts,

- domination d’un groupe qui n’a pas intérêt à ce que les choses changent, - état du marché et des barrières aux redéploiements,

- barrières à l’entrée ou à la sortie, - contraintes de légitimité ou d’institutionnalisation que l’environnement impose;

- sélection environnementale favorisant les entreprises capables de se stabiliser et de routiniser leurs actions,

- accords et engagements pris et que l’on ne peut remettre en cause; Etc.

L’inertie a été analysée en termes d’interactions entre des variables organisationnelles (Miller, 1990, Labourdette, 1992), de systèmes sous ou sur-organisés (Harlé et Jouanneault, 1983), de degré de couplage entre groupes (Weick, 1979) et de cercles vicieux bureaucratiques (Crozier et Friedberg, 1977). Ces analyses ont montré que l’inertie peut avoir un rôle fonctionnel, qu’elle peut dans certains cas être utile et qu’il s’agit le plus souvent d’un problème de changement du changement (changement à boucle double) et non de changement à boucle simple.

II.5- les outils de mise en oeuvre du changement

Il s’agit des outils susceptibles de gérer aussi bien les apprentissages, les routines, les résistances que l’inertie.

Plusieurs techniques et modes se sont développées autour de l’objectif d’une gestion efficace du changement. Souvent inspirées du management japonais, ces techniques constituent ce que l’on pourrait appeler la famille des « ing »: reingeneering, benchmarking, coaching, downsizing, Etc.

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Afin que ces outils ne se réduisent pas à un ensemble de recettes éludant ou étouffant toute forme de conflit ou prétendant le canaliser en tant que source d’«énergie positive», il faudrait éviter de les considérer comme des systèmes fermés, indépendants de l’organisation. Il y aurait en effet une co-construction de l’organisation et des outils (David, 1998). Cette dialectique organisation-outils conduit à des exigences paradoxales puisque les quatre éléments déjà cités (apprentissage, routines, résistance, inertie) peuvent se renforcer mutuellement ou être indépendants les uns des autres et que, faute d’une progression linéaire, on est souvent obligé d’avoir recours et des grilles de lectures privilégiant le fonctionnement spiralé et dialectisé.

II.6- la recherche-action

Le dernier thème générique relevant de la gestion du changement, pose de façon beaucoup plus directe la question de l’implication du chercheur dans cette gestion.

Il s’agit ici des différentes formes de recherche action qui relève chacune d’une conception différente de la réalité organisationnelle et sociale et de la relation que le chercheur peut et doit avoir ou construire avec son terrain.

Quatre types de recherche-action peuvent être proposés : la recherche expérimentale, diagnostic, critique et appréciative.

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Expérimentale Diagnostic Critique Appréciative Inspiration Positivisme Interactionnisme Théorie critique7 Constructivisme Nature de la

réalité Donnéedécomposable, répétitive

Construite, par les acteurs, systémique et ouverte au changement Expression d’une structure sociopolitique aliénante Construite, imaginée

Problème Défini a priori Défini en situation dans l’interaction est une co-élaboration du collectif de recherche

Défini en situation comme l’expression de mécanismes

fondamentaux dont les agents ne sont pas tout à fait conscients Non défini, seules les « images » fortes ou positives sont recherchées Contexte de

l’intervention Contrôlé par lechercheur, artificiel La situation naturelle redéfinie dans l’interaction. Contexte en partie négocié au sein du collectif de recherche La société. La recherche est exposée aux déterminations sociales Contrôle, le langage, les images du groupe Rapport du chercheur à son objet Extériorité, séparation (positivisme) Interaction dynamique entre savoirs et pratiques Solidarité du chercheur et de son « terrain » (co-détermination structurelle, objectif de rompre ensemble d’avec le réseau idéologique aliénant) Interaction dynamique, optimiste Démarche

épistémologique Traduction d’unethéorie en un dispositif adéquat permettant de tester la théorie de départ Elaboration spiralée de la théorie et des contenus empiriques Dévoilement Elaboration spiralée sélective

Visée théorique Développement,

mise à l’épreuve Génération, mise àl’épreuve Développement,illustration Progrèsreprésentationsdes Type de

connaissance Explicative,prédictive Explicative,prédictive Interprétative,émancipatrice Interprétative,sélective, manipulatrice Modèle Newton Darwin Freud Watzlawick

Typologie des recherches-action (à partir de Koenig, 1998)

La recherche-action appréciative constitue une tentative de manager la culture du et pour le changement. Elle repose sur l’hypothèse que c’est en changeant les images, les représentations et les discours que l’on change la réalité. Le rôle du chercheur consisterait alors à « fouiller », à mettre en avant et à dégager les images et les discours « positifs », qui vont dans le « bon sens », dans la direction du changement prôné (Bushe, 1998). On met en avant les meilleurs intentions des individus et leurs aspirations les plus nobles tout en laissant de coté voire en occultant les éléments « négatifs ». La mission du chercheur consistera alors à créer une situations ou les acteurs partageront les mêmes « rêves » à partir d’images significatives et fortes. Les prophéties auto-réalisatrices permettent de

7La théorie critique se caractérise par une épistémologie qui dialectise le rapport entre théorie et pratique par une visée révolutionnaire.

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penser qu’il est possible de créer un changement en accordant plus d’attention à ce que l’on préfère plutôt qu’en accordant de l’attention aux problèmes et aux difficultés. L’amplification par le chercheur de ces points positifs passe par le dialogue optimiste.

III. LES DIMENSIONS STRUCTURANTES DES ANALYSES DU CHANGEMENT ORGANISATIONNEL

Les analyses descriptives et typologiques du changement de et dans les organisations ainsi que celles normatives de l’organisation et de la gestion des changements nous semblent être structurées par certaines dualités fondamentales: volontarisme / déterminisme; changement construit / prescrit; changement simple / complexe.

III.1- Le débat volontarisme/ déterminisme

Ce débat structure une grande partie des recherches en théorie des organisations (Astley et Van de ven, 1983; Mbengué, 1998; Guilhon, 1998). Alors que certains considèrent que le volontarisme et le déterminisme s’opposent, sont mutuellement exclusifs et prennent partie plus ou moins ouvertement pour l’une de ces conceptions de l’action des organisations (Astley et Van de ven, 1983), d’autres auteurs sont plus nuancés et relativisent la ligne de démarcation entre volontarisme et déterminisme. C’est ainsi, par exemple, que selon Hrebiniack et Joyce (1985) ces deux conceptions de l’action ne constituent pas deux alternatives contradictoires, mais deux dimensions indépendantes qui peuvent donc se combiner et se superposer. Pour leur part, Quinn et Cameron (1988) considèrent que le déterminisme et le volontarisme dépendent eux-mêmes de différentes contingences (exemple de l’étape du cycle de vie de l’entreprise). De même, en affirmant affirme que c’est l’entreprise qui enacte sont environnement, Weick (1979) renvoi aux déterminations, co-évolutions et co-naissances d’une organisation caractérisée par un « volontarisme déterminé » ou encore un « déterminisme volontaire ». Enfin, Perret et Ramantsoa (1996) présentent un modèle de « démarcation/appui » qui met l’accent sur la nature duale du changement. L’idée principale est que si le changement ne se décrète pas, le décret reste une dimension essentielle de celui-ci (Dion, 1994).

La combinaison du volontarisme et du déterminisme relève soit de la complexité des micro-interactions qui se cristallisent en des orientations relativement nettes à un niveau plus général, soit de la logique politique, voire même politicienne du recours à la justification et de la recherche de l’alibi. Le choix ou la détermination (environnementale) relèveraient alors du pouvoir et du jeu des démonstrations de forces et/ou de faiblesses. Dans le premier cas de figure, il s’agirait de (dé)montrer sa capacité (et son pouvoir) à

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imposer sa propre volonté. L’acteur (le dirigeant) serait alors le héros du changement. Dans le deuxième cas de figure, le déterminisme permettrait d’invoquer son impuissance afin de justifier des actions contestées. Ainsi, au-delà de l’affirmation que l’environnement est une construction d’acteurs, il s’agira de montrer que tous les acteurs ne disposent pas des mêmes ressources pour construire celui-ci et, surtout, qu’ils ne disposent pas des mêmes ressources pour imposer leurs propres constructions. L’impuissance et le déterminisme seraient donc l’un des registres discursifs stratégiques des puissants, de ceux dont la volonté s’impose aux autres et qui monopolisent alors les débats autour du volontarisme et du déterminisme.

III.2- Changement prescrit / construit

Les recherches positivistes et structuro-fonctionnalistes s’attachent à analyser un changement prescrit existant en tant qu’objet de recherche concret, indépendant et décomposable. Ces recherches postulent qu’il est possible d’avoir une vision claire de l’avenir de l’organisation, qu’il suffit de mettre en oeuvre une certaine rationalité (limitée, procédurale ou substantive) afin de minimiser les incertitudes et, dans le meilleur des cas, d’aboutir à une certaine planification (et « applanification ») de l’avenir de l’entreprise. Ce changement prescrit peut être soit volontariste (on met alors l’accent sur la main visible du dirigeant), soit imposé par une main invisible, une force transcendante pouvant être l’expression de contraintes concurrentielles ou de déterminations propres à l’entreprise lui imposant des « lois », « un destin » du changement. Deux dérives véhiculant une conception organiciste et déterministe de l’organisation menacent cette approche du changement: l’évolutionnisme et l’historicisme.

L’évolutionnisme s’inspire de la biologie et met l’accent sur des états et des étapes irréversibles par lesquels les organisations passeraient.

Pour sa part, l’historicisme recherche des lois universelles du changement permettant ainsi la prévision.

Ces déterminismes considèrent que l’histoire a une logique immanente qui détermine la trajectoire et le résultat du développement social.

Pour sa part, le changement construit relève des conceptions constructivistes des organisations. La littérature comporte trois variantes de ce constructivisme.

- Un constructivisme que l’on pourrait qualifier d’interactionniste révélant et relevant des interactions entre acteurs et entre acteurs et structures (il s’agit alors

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d’un constructivisme structurationniste au sens de Piaget).

Contrairement à la conception du changement prescrit, ces acteurs n’ont pas une vision claire de l’avenir et mettent en oeuvre des interactions caractérisées par le flou et l’ambiguïté. Ceux-ci permettent de maintenir des zones potentielles de liberté et de pouvoir. Les modes de structurations des champs d’action et de connaissance des acteurs permettent la co-construction et la co-diffusion du changement;

- Un constructivisme que l’on pourrait qualifier d’interprétatif ou de cognitif mettant en action les effets des positions et des prédispositions des acteurs (Friedberg, 1993) mais, également, des chercheurs qui construisent le changement à partir de processus cognitifs plus ou moins conscients et aboutissent à une co-naissance de celui-ci et du savoir y affairant. L’« invention de la réalité » passe alors par des processus de « simplification », « remplissage » (maquillage) et « interaction » (Reger et Huff, 1993);

- Un constructivisme que l’on pourrait qualifier de discursif et qui met l’accent sur le rôle des conversations, des récits et de la communication dans la construction de la réalité organisationnelle. Le changement résulterait des liens qui s’établissent entre différents discours et différents jeux de langage en changeant ce qui est en train être décrit (Ford, 1998). La description n’est plus qu’une simple transcription, elle est également création. L’ordre (et le désordre) de la rationalisation prend alors le pas sur celui de la rationalité et la structure du réel se dédouble d’une « toile », d’un réseau de conversations. Il devient alors important de relever les modes de construction des discours, les « routines narratives » (Christian et Boudes, 1998) et les structures des récits fondateurs de la communication et de réfléchir ainsi à nos propres modes de construction du réel. C’est un peut cette stratégie qui sera mise en œuvre dans les recherches sur la différance derridiènne relevant du courant post-moderne de déconstruction des récits. La dialogique au sens de Bakhtine et la théorie de l’agir communicationnel de Habermas constituent les oeuvres majeures de ce constructivisme discursif plus ou moins critique.

Signalons, enfin, que la construction du changement présuppose une participation plus ou moins ouverte et plus ou moins volontaire des acteurs. Il s’agirait alors d’analyser les conditions concrètes, les contraintes et les limites de cette participation.

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III.3- Changement simple / complexe

C’est par leur conception de l’unité et du changement que les théories de la complexité diffèrent des théories plus classiques de l’écologie des organisations ou des théories de la contingence.

Adaptation par «choix» Adaptation par sélection

compétitive Approche alternative

liens de cause à effet clairs et distincts ; prévisibilité. ( variables, construits, participants, etc.; identifiables même si c’est partiellement ).

liens de cause à effet clairs et distincts . prévisibilité. ( variables, construits, participants, etc.; identifiables mais de façon partielle).

liens de cause à effet circulaires, et trop nombreux menant à des résultats imprévus.

les résultats à long terme sont voulus par la coalition dominante.

les résultats à long terme sont déterminés par sélection compétitive: par l’environnement et l’inertie de l’organisation.

les résultats à long terme émergent à la fois de l’auto-organisation spontanée et de la sélection compétitive: partiellement émergeants et partiellement intentionnels.

les organisations cherchent intentionnellement un équilibre adaptatif, un processus transformationnel.

les organisations sont sélectionnées selon des critères d’adaptation équilibrée; processus évolutionnaire.

les organisations sont des systèmes non équilibrés avec des dynamiques désordonnées

le désordre vient de

l’extérieur. le désordre vient de l’extérieur. le désordre n’est pas simplement lerésultat de l’inertie, de l’incompétence ou de l’ignorance mais est une propriété vitale et fondamentale des systèmes créatif. feed-back négatif qui

gouverne le système (l’organisation individuelle).

feed-back négatif guide le système (les populations d’organisations).

systèmes non linéaires complexes ayant des feed-back négatifs et positifs; auto-organisation spontanée et destruction créative.

Tableau : Le problème de l’adaptation dans les théories «classiques » et dans les théories de la complexité (Stacey, 1995).

Les théories de la complexité reposent sur un certain nombre de principes dont, notamment (Morin, 1991):

- le principe dialogique: toute unité est constituée de dualités, de termes à la fois complémentaires et opposés (l’ordre et le désordre, la vie et la mort, la différenciation et l’intégration, etc.).

- le principe de récusions organisationnelles ou d’auto-organisation: l’effet produit sa cause. Il s’agit d’une boucle de feed-back généralisée et qui aboutit à une causalité complexe où c’est moins la direction de la causalité qui compte que l’auto-organisation de l’unité duale (l’acteur produit le système qui l’a produit, la règle produit le comportement qui l’a reproduit, l’idée produit l’action qui l’a produit, etc.).

- le principe « hologrammatique »: les parties sont dans le tout et vice versa. La totalité et les parties ne peuvent se concevoir indépendamment (la cellule compose l’individu mais l’individu se retrouve dans la cellule; l’individu est une partie de

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l’organisation mais l’organisation est une partie de l’individu; l’organisation est une partie de la société mais la société est dans l’organisation, etc.).

IV. LES ANALYSES DU CHANGEMENT ORGANISATIONNEL: QUELQUES DIFFICULTÉSMÉTHODOLOGIQUES

Les analyses du changement organisationnel font face à un certain nombre de difficultés méthodologiques dont, notamment, celles qui concernent la construction de l’objet de recherche et les interactions chercheurs/acteurs; les approches diachroniques ou synchroniques que les chercheurs devraient privilégier et, enfin, la difficulté de prise en compte de la temporalité du changement ou encore ce que nous allons qualifier de « la recherche du temps vécu ».

IV.1- La construction de l’«objet» de recherche

Cette construction passe le plus souvent par une hypothèse plus ou moins implicite: «toute chose est égale par ailleurs». En effet, c’est au prix de ce reniement du changement que le chercheur peut mobiliser des méthodes autour d’un ou de plusieurs objets afin d’espérer aboutir à des conclusions relativement stables et contextualisées.

La construction de l’objet de recherche fait face à plusieurs difficultés dont notamment:

 les changements que celui-ci subit;

 la pureté des classifications et des distinctions;

 le degré de distanciation de l’analyse et l’articulation des niveaux d’analyse (local/global, particulier/général, etc.);

 l’impact de l’échelle du temps et de la granularité sur la perception des discontinuités;

 les différences de sensibilité à l’écoulement du temps des différents éléments intégrés dans les analyses (il faudrait comparer du processus ou des variables dont les sensibilités seraient proches);

 les boucles de feed-back et les décalages entre actions et réactions;

 le compromis entre généralité, simplicité et précision (Weick, 1979)

 l’accès aux entreprises en cas de crise (c’est en ces périodes que l’étude du changement serait la plus pertinente);

 le décalage entre actions et discours et, plus fondamentalement, entre intentions, motivations, actions (intentionnelles ou non intentionnelles), les rationalisations de l’action, les conséquences intentionnelles ou non de celles-ci et les rationalisations de ces conséquences par les acteurs (Giddens, 1987).

IV.2 – Approches diachroniques ou synchroniques

Dans le domaine des méthodes, tout comme dans celui des théories, il n’y a pas de « one best way »: toute recherche est, d’une façon ou d’une autre, et plus ou moins

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manifestement, « opportuniste » et « éclectique ». La préférence pour les méthodes qualitatives ou quantitatives, diachroniques ou synchroniques ne peut donc être absolue.

Synchronie Diachronie

- favorise une conception cohérente et stable de l’organisation;

- certaines variables peuvent être considérées comme plus ou moins stables à court terme (routinisées); - identifier s’il y a eu des changements;

- identifier le moment du changement (lorsqu’il y a dysfonctionnement);

- identifier la direction du changement (évolution vers l’équilibre);

- favorisée par les conceptions fonctionnalistes et structuralistes des organisations.

- favorise une vision hétérogène et permet de saisir les ambivalences et paradoxes;

- vocation dynamique et généalogique; - identifier les variables les plus importantes; - risque élevé de prophéties auto-réalisatrices; - comprendre comment les changements ont lieu; - temps construit par le chercheur et dépendant du protocole de recherche plutôt que temporalité propre à l’entreprise;

- favorisée par les conceptions dialectiques, historiques et interprétatives des organisations.

Le choix d’une approche dépend du problème posé, du niveau de la recherche, du contexte, des moyens et des finalités de celle-ci, etc.

Selon Tort (1989) il y aurait même une alternance entre périodes ou dominerait l’interprétation systématique (synchronique) et périodes ou dominerait l’interprétation généalogique (diachronique).

Pour Granger (1960) la science est dans un premier temps naïvement diachronique, elle décrit et explique les phénomènes comme déroulements temporels. Dans un second moment, elle passe à la description synchronique purement et simplement statique: la science se débarrasse de l’élément idéologique inhérent à toute vision historique mais elle rejette en même temps ce par quoi le fait humain peut faire l’objet d’une praxis rationnelle. Le troisième et dernier moment consiste en un retour à la diachronie par le biais d’une élaboration difficile de concepts statiques antérieurement développés. La visée scientifique fondamentale de l’explication par des modèles est alors conservée. Si l’on peut penser que les sciences des organisations ont dépassé le premier stade, il nous semble qu’elles ne sont pas encore tout à fait à celui troisième.

IV.3 – La recherche du «temps vécu»

Si les savoirs prétendument universels et transversaux ont comme logique d’essayer d’éliminer ou du moins de maîtriser le temps, les savoirs plus modestement relatifs construisent une temporalité artificielle limitée tant par la précarité des phénomènes, de la mémoire et de la cognition, que par les possibilités restreintes d’accéder au « réel » ou de construire celui-ci. Le temps n’est pas une variable neutre. Au-delà du fait qu’il soit un construit social, il s’agit d’un enjeu. La connaissance, l’action, l’organisation et la stratégie sont des tentatives de maîtriser le temps, d’imposer sa propre temporalité ou d’installer un « présent permanent » (Borella, 1990). Le dirigeant est celui qui « synchronise les

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différentes pendules » et fait passer de la chronométrie à la chronologie en fixant des bornes et des repères qui font que l’histoire soit autre chose qu’un cafouillage, un véritable récit à épisodes. C’est ainsi, par exemple, que Mintzberg (1987) affirme que la stratégie consiste en une tentative de gérer la stabilité et non pas le changement.

Le temps, ressource rare dans toute organisation « bien » gérée, acheté ou vendu, investi ou perdu, reste absent de la plupart des recherches sur le changement. Le temps implique et comporte, bien évidemment, une dimension financière. Celle-ci est d’autant plus difficile à évaluer que le temps est également un élément de renforcement du sentiment d’appartenance et qu’il est indissociable du contrôle d’autrui (Busino, 1993). En effet, le contrôle et le « quadrillage » disciplinaire de l’espace-temps constituent un des piliers de la modernité bureaucratique. Ce quadrillage correspond à deux fonctions: en premier lieu il permet d’éviter la formation de grands groupes qui pourraient favoriser le développement d’une volonté indépendante ou d’une opposition; en second lieu, il permet de manipuler directement les activités des personnes et ce faisant d’éviter l’imprécision et l’indétermination qui accompagnent souvent des rencontres plus fortuites. Selon Foucault, il se créerait alors un « espace analytique » dans lequel il serait possible de surveiller, d’évaluer, de mesurer, de rationaliser les qualités des personnes qui s’y trouvent (Giddens, 1987).

Toute recherche se doit de faire face au problème de l’intégration du « temps vécu » et d’échapper aux conceptions simplistes ou linéarisantes de celui-ci en réfléchissant aux moyens de prendre en compte ses fonctions économiques, politiques, symboliques, culturelles et psychologiques.

V. LES ANALYSES DU CHANGEMENT ORGANISATIONNEL: QUELQUES REPÈRES ÉPISTÉMOLOGIQUES

On peut se demander si les théories du changement changent de façon récursive le changement, si elles justifient le statu quo ou si elles n’ont aucun impact sur le cours réel des choses.

Au-delà de la recherche d’une épistémologie autre que celle positiviste, le problème du changement soulève des apories de fond: Comment penser le changement à partir de notions ou de concepts dont la signification serait fixe ou stabilisée? Comment penser l’être et le devenant? Comment comprendre ou maîtriser un changement lui-même en perpétuel changement?

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concernent moins le mouvement, la dynamique et l’action que la volonté plus ou moins explicite de stabiliser des représentations, des explications ou des compréhensions de tenter de construire des « zones de certitude », des « îlots d’ordre ».

En fait, tout changement implique une relation à soi et à l’autre. Relation à soi qui assure le maintien de ce qui change car s’il devenait radicalement différent, radicalement autre, ce « soi » ne changerait plus (car il n’existerait plus). Relation à autre chose: le changement serait donc un rapport à soi de ce qui change par rapport à tout ce qui ne change pas.

En tant que tel, le changement est source d’anxiété et cela explique peut être le besoin de penser celui-ci comme une étape entre deux états stables, un épisode enserré entre un début et une fin.

C’est justement cette conception qui est la plus remise en cause par les approches post modernes qui proposent de sortir des approches de l’être à celles du devenant.

Pour certains tenants de ce courant, notre vocabulaire, en dissociant les noms des verbes, les états des actions, ne refléterait pas suffisamment les tensions et les dynamiques du réel, on propose alors des notions tel que « organisaction », « observacteur », « réflaction » et « glocal » afin de mettre l’accent sur la complexité du réel et sur les continuités, les tensions et les relations dialogiques qui unissent les couples et les pôles permettant de l’analyser.

Une autre voie a explorer consisterait à repenser le rôle du chercheur. Malheureusement le courant post-moderne risque de voiler une sorte de démission, un scepticisme voire même le nihilisme. Au-delà de l’inertie des organisations, c’est le risque d’une forme d’inertie des idées qui guette les recherches sur le changement.

La conception constructiviste du changement par le chercheur ou, du moins l’observateur (qui est ainsi observacteur) permet d’envisager un nouveau rôle pour le chercheur : celui de partenaire du changement. Pour sa part, la conception complexe nous invite non seulement à relativiser les objets, phénomènes et concepts par rapport au temps et à l’espace mais, également, à prendre ce temps et cet espace eux-mêmes comme des concepts relatifs.

Rao et Pasmore (1989) (cités dans Thiétart et coll, 1999) montrent que les études portant sur les organisations peuvent être conçues soit comme un savoir instrumental, un outil et un moyen, soit comme un dialogue entre chercheurs (Kuhn, 1983). Les théories qui

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se veulent opératoires confrontent donc la théorie aux faits et risquent alors de dévier vers l’hyperempirisme, d’un autre côté, si on conçoit les études sur l’organisation comme des dialogues entre chercheurs et que le progrès passe par la confrontation des théories issues de ces études, on risque alors de considérer la connaissance comme le produit d’une communauté d’interprétations et, tout en se dispersant entre des pôles divergents d’interprétation, de privilégier la théorie au dépend de son aspect opératoire (Thiétart et coll, 1999, p 27). En fait, ni la théorie ni la réalité n’existent en tant que tels, il n’y a que des discours et des échos de discours qui se confrontent, s’opposent se complètent et « disent » la théorie ou la pratique. Cela conduit à l’élaboration d’une méthodologie configurationnelle. Le chercheur devient ici médiateur/animateur d’un débat entre tous ceux qui sont susceptibles de « faire » la théorie. Il s’agit d’une méthodologie configurationnelle ou en essaye de « prendre » « tout en en même temps », de confronter plusieurs discours et présentations de la réalité. Cette « totalité » est à la fois qualitative et quantitative, elle relève d’une phénoménologie de la connaissance plutôt que d’une conception analytique de celle-ci. La méthodologie configurationnelle concerne la démarche, la dynamique de la recherche plutôt qu’une état fini, une «totalité» figée.

experts/spécialistes

théorie et chercheurs chercheur acteurs/dirigeants

autres acteurs concernés par la question de recherche

La méthodologie configurationnelle.

Enfin, on peut s’interroger sur les modes même de connaissance du changement, sur notre logique et notre façon d’accéder à la « vérité » de celui-ci.

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Il s’agit ici de réfléchir à la logique et d’analyser en quoi une logique qui serait Trialectique pourrait, en tant que logique des processus, compléter ou remplacer la dialectique et la logique formelle qui seraient des logiques du temps ou de l’espace.

Figure

Figure 1: dialogique organisation/ changement
illustration Progrès des
Tableau : Le problème de l’adaptation dans les théories «classiques » et dans les théories de la complexité (Stacey, 1995).

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