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Le regime de l'arbitrage dans les litiges de consommation en droit français /

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LE REGIME DE L'ARBITRAGE DANS LES LITIGES DE CONSOMMATION EN DROIT FRANCAIS

PAR

RAÏA A NDREEVA ANDROVA

Juin 2004

A thesis submitted to Mc Gill University, in partial fulfillment of the requirements of the degree of Master of Laws from the Institute of Comparative Law

FACULTÉ DE DROIT - INSTITUT DE DROIT COMPARÉ McGILL UNIVERSITY, MONTRÉAL

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RÉSUMÉ/ ABSTRACT

Le droit français a longtemps été marqué par une hostilité à l'égard de l'arbitrage qui se manifestait par une prohibition légale de principe de la clause compromissoire à l'article 2061 du Code civil. Suite à une réforme intervenue en 2001, l'ancien principe d'invalidité est devenu l'exception et dorénavant la clause compromissoire bénéficie d'un régime de faveur. La réfonne a néanmoins laissé des incertitudes notamment en matière de litiges de consommation. Or l'arbitrage constitue un mode extrajudiciaire de règlement des litiges particulièrement adapté aux différends du droit de la consommation. Nous nous proposons dans cette étude d'éclaircir certaines des interrogations suscitées dans c e domaine ainsi que de démontrer que par le biais d'une solution de compromis, l'inopposabilité de la clause compromissoire à l'égard du consommateur, le droit [Tançais non sèulement réconciliera ses dispositions internes mais également se rapprochera des autres systèmes juridiques.

• For sorne time now, Article 2061 of the French Civil Code had laid down the general principle that arbitration clauses were invalid. In 200 1, an amendment to Article 2061 reversed the concept, so that the former principle became the exception and the law was made to favour arbitration. While the refonn was a progressive step, it did leave sorne ambiguity especially concerning the consumer disputes. Arbitration is indeed a very cOllvenient alternative dispute resolution method in this arena. The purpose of this thesis is to address sorne of the issues related to consumer disputes. It seeks to demonstrate that by adopting the concept of "inefficiency" of the arbitration clause, whose sanction depends on the will of the consumer, French law will not only reconcile its domestic provisions but also be in accordance with the other judicial systems .

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REMERCIEMENTS

Le début de la rédaction de ce mémoire a été marqué par un tragique événement qui a causé le décès du Professeur Philippe Fouchard en janvier 2004. Les écrits de Monsieur Fouchard ont toujours constitué une inspiration pour moi et je souhaiterais rendre hommage à cet homme exceptionnel et à ce professeur remarquable.

Ses qualités incontestables notamment en matière d'arbitrage commercial international et ses articles et commentaires ont contribué à ma réflexion en matière d'arbitrage dans les litiges de consommation. Je voudrais par conséquent remercier Monsieur Fouchard d'avoir été une source d'inspiration et une référence constante pendant toutes mes études et notamment lors de la rédaction de ce mémoire.

Je voudrais également remercier très chaleureusement le Professeur Fabien Gélinas pour m'avoir guidée tout au long de la rédaction de ce mémoire. Mes recherches et développements ont été grandement enrichis suite à ses judicieuses remarques et ses

• questions pertinentes. Merci d'avoir stimulé mes réflexions juridiques!

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Table des matières

RÉSUMÉ/ABSTRACT ... II

INTRODUCTION ... 1

CHAPITRE 1 - Le régime de l'arbitrage dans les litiges i2ternes de consommation: pour l'inopposabilité de la clause compromissoire ... 8

Section 1 L'arbitrabilité reconnue des litiges internes du droit de la consommation ... 9

A. La notion d'arbitrabilité en droit français ... 10

B. L'obstacle de l'article.2059 du Code civil et le concept de droits disponibles ... Il C. L'intervention de l'ordre public et l'article 2060 du Code civil.. ... 14

D. L'opportunité de l'arbitrage dans les litiges de consommation ... 20

1. Les avantages de l'arbitrage en matière de droit de la consommation ... 21

2. La reconnaissance de l'arbitrage en matière de litiges de consommation en droit comparé 24 Section Il Une nullité de la clause compromissoire inadaptée dans les litiges internes de consommation ... 26

A. La nullité de la clause compromissoire sous l'empire de l'ancien article 2061 du Code civil 26 1. L'origine de la nullité de la clause compromissoire: l'arrêt Cie L'Alliance c. Prunier de la Cour de cassation ... 27

2. La contradiction entre l'article 2061 du Code civil et l'article L.132-1 du Code de la consommation: la nullité automatique ou le caractère éventuellement abusif? ... 29

3. Les incertitudes jurisprudentielles du régime de la nullité de la clause compromissoire .... 31

B. La nullité de la clause compromissoire dans le nouvel article 2061 du Code civil: les incertitudes non résolues par la réforme ... 33

1. La genèse tâtonnante du nouvel article 2061 du Code civil ... 33

2. Les zones d'ombres et incertitudes de la nouvelle rédaction de l'article 2061 du Code civil 35 C. Une solution de compromis en faveur du consommateur: l'inopposabilité ou l'inefficacité de la clause compromissoire dans les contrats internes de consommation ... 43

1. Une solution inspirée du droit du travail ... 44

2. L'efficacité des clauses attributives de juridiction ... 46

3. La protection du consommateur par la solution de l'inopposabilité de la clause compromissoire ... 48

CHAPITRE 11- Le régime de l'arbitrage dans les litiges transfrontières de consommation: pour l'adoption d'un système précis d'arbitrage ... 52

Section 1 Un régime jurisprudentiel trop libéral de validité de l'arbitrage en matière de litiges transfrontières de consommation ... 54

A. La licéité de principe de l'arbitrage dans les litiges transfrontières de consommation ... 54

1. La jurisprudence Jaguar ou la consécration de l'arbitrage en matière de droit de la consommation ... 55

2. La portée incertaine du nouvel article 2061 du Code civil.. ... 60

B. Une solution plus adaptée: l'inopposabilité de la clause compromissoire ... 65

Section II L'adoption d'un système précis d'arbitrage volontaire en matière de litiges transfrontières de consommation ... 70

A. Les enseignements du droit comparé ... 72

1. Le système d'arbitrage institutionnalisé en Espagne et au PortugaL ... 72

2. L'arbitrage sectoriel dans les autres pays européens ... 76

3. L'essor de l'arbitrage dans les litiges de consommation aux Etats-Unis et au Canada ... 78

4. L'expérience de l'arbitrage en ligne ... 79

5. Les initiatives de l'Union européenne en matière d'arbitrage dans les litiges de consommation ... 82

B. Les caractéristiques d'une procédure spécifique d'arbitrage des litiges de consommation .... 88

1. Les caractères indispensables de la procédure spécifique d'arbitrage des litiges de consomn1ation ... 89

(8)

2. La nécessité d'une sentence effective ... 91

3. L'intervention d'un organisme ou association spécialisée ... 92

CONCLUSION ... 94

BIBLIOGRAPHIE ... 96

Articles et textes de droit français ... 104

Textes de droit communautaire ... 104

(9)

Liste des principales abréviations ABRÉVIATION

iAAA

American Arbitration Association

1F=============9P=================================9'

1 Am.Jour.Int.Law

I~b.lnt'I.

tUII.CiV. Icass. civ. Ilcass. corn.

IIC .

l'

.CIV.

§.

~A.

Supp . f·SUPP.2d §::az.pal. [Infra VC.P. VO.C.E. ruriS-CI.

§.J.

American Journal ofInternational Law IIArbitration International

I

~U~letin

des arrêts de la Cour de cassation, Chambres

. cIvIles

1 Cour de cassation. Chambre civile (Arrêt de la)

1 Cour de cassation. Chambre commerciale (Arrêt de la)

IIcode civil français

1 Cour de justice des Communautés eu:opéennes

J§ecueil

~alloz

Sirey _ _

1 Droit et pratique du commerce international

/lFederal Arbitration Act Ifederal Supplement

IFederal Supplement (Second Series) /lGazette du Palais .

1 Journal de droit international (Clunet)

=oJ

La Semaine Juridique (Jurisc1asseur périodique)

..

J~umal officiel~e

la

R~UbliqUe

:ançaise

~

Journal officiel des communautés européennes IIJ urisc1asseur

1 Librairie Générale de droit et de jurisprudence

]

1

J

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1

J

(10)

.,

ABRÉVIATION

NCPC [Nouveau Code de procédure civile

IODR

.-.

II~nline

Dispute Resolution

J

. .

---IOP.Cit.

_ 110

ans l'ouvrage cité

J

I~UAM

1

) Presse Universitaire d'Aix-Marseille

~ép.minis. Réponse ministérielle

Rev. arb. Revue de l'arbitrage

1 Rev.euro.dr.conso. IRevue euroeéenne du droit de la consommation

I~C~IP _

Revue critique de droit international privé

!~I

1 Revue du droit des affaires internationales 1

J

ETDCiv JIRevue trimestrielle de droit civil

1

~TDCom ~evue trimestrielle de droit commercial

S . Sirey

-•

Supra Ci-dessus

(11)

INTRODUCTION

L'accès à la justice est considéré comme un des droits fondamentaux de la défense et de la protection des consommateurs. En effet, le consommateur moyen est une personne sans connaissances juridiques précises. Face à un professionnel armé de moyens financiers et juridiques pour assurer sa défense, le consommateur hésitera

à agir en justice parce qu'il existe très fréquemment une disproportion de montant entre 1 e dommage subi et 1 es frais 1 iés à 1 a défense des es droits devant 1 e juge judiciaire.

A ces raisons économiques s'ajoutent, d'une part, le motif de la lenteur de la justice, conséquence d'un encombrement des tribunaux et, d'autre part, des raisons psychologiques. « La difficulté de savoir à qui s'adresser, la complexité de la

procédure, l'ésotérisme du langage juridique, l'architecture des palais de justice, jusqu'à la robe des magistrats et des avocats, tout cela fait naître chez le simple citoyen le sentiment que la justice est un monde à part Ozl il vaut mieux ne pas s'aventurer» 1 •

Afin d'éviter ces difficultés d'accès à la justice étatique, le recours à des modes extrajudiciaires de règlement des litiges a été envisagé non seulement au niveau national mais également au niveau communautaire2•

La définition adaptée par les institutions européennes de ces voies extrajudiciaires est la suivante: « procédures qui, indépendamment de leur dénominatioll, mènent

1 Calais-Auloy et Steinmetz, Droit de la COlIsolll11lalio11l. Dalloz, 4" éd., n0429.

(12)

à un règlement du litige par l'intervention d'une tierce personne qui propose ou impose une solution

>l

Cette définition englobe le recours à l'arbitrage, ce qui est heureux puisque ce mode de règlement des litiges offre aux justiciables une solution définitive et obligatoire du différend mais plus flexible et plus rapide que celle rendue par un juge étatique. Par ailleurs, en matière internationale, l'arbitrage permet d'éviter les problèmes de conflits de juridictions.

L'arbitrage en matière de litiges de consommation s'est développé dans de nombreux pays. La situation de la France paraît en revanche bien isolée dans la communauté internationale.

En effet, la France est qualifiée par certains auteurs d'un îlot de résistance à l'arbitrage dans le domaine des contrats de consommation4, et ceci en comparaison

avec ses voisins européens où ce mode extrajudiciaire de règlement des litiges est non seulement reconnu mais également parfois rendu obligatoire. L'isolement du système français est encore plus flagrant au niveau mondial puisque des pays comme les Etats-Unis ont consacré depuis longtemps l'arbitrage en matière de droit de la consommations.

Cette hostilité du droit français a pour origine une jurisprudence de la Cour de cassation en date du 10 juillet 18436• L'arrêt Cie L'alliance c. Prunier marque pour

la majorité de la doctrine la naissance du droit de la consommation et en même temps la prohibition de la clause compromissoire. Le fondement de cette décision se trouve dans la nécessité de protéger le consommateur contre le professionnel et

3 Recommandation du 30 mars 1998 de la Commission concernant les principes applicables aux organes

responsables pour la résolution extrajudiciaire des litiges de consommation (98/257/CE, JOCE L 115 du 17 avril 1998, p.31).

4 A.M. De Matos, Les contrats transfrontières conclus par les consommateurs ail sein de l'Union

européenne. PUAM, 2001, p.509 .

5 Mac Conagle, « Arbitration of consumer disputes », The Arbitration Journal, 27 juin 1972, p.65-84.

(13)

de ne pas pennettre à celui-ci de faire de ttarbitrage « une nouvelle arme du fort contre le faible, du spécialiste contre le profane »7. Ainsi, au nom d'un ordre public de protection de la partie faible, le consommateur, le droit français va interdire les clauses que le professionnel est susceptible de prévoir dans ses conditions générales qualifiées de contrat d'adhésion par excellence.

En effet, le consommateur est généralement défini comme étant la personne physique ou morale de droit privé qui se procure ou qui utilise des biens ou des services pour un usage non professionnels. Lorsqu'il conclut un contrat de vente ou de services, le consommateur entre en relation avec un professionnel qui lui, au contraire, agit dans le cadre de son activité commerciale quotidienne et qui est a

priori beaucoup mieux informé de ses droits et obligations. Afin de remédier à ce . déséquilibre contractuel, le juge français est intervenu pour garantir une protection du consommateur lors de la conclusion des contrats de consommation. L'adoption d'une clause compromissoire lors de la conclusion du contrat contreviendrait ainsi, selon la jurisprudence française, au droit à un recours effectif devant le juge étatique, ayant pour conséquence présumée de priver le consommateur du choix de saisir la juridiction compétente en vertu des règles de conflits de juridiction.

Il convient néanmoins de préciser que l'interdiction de recourir à l'arbitrage par le biais d'une clause compromissoire, c'est-à-dire « la convention par laquelle les parties à un cOlltrat s'engagent à soumettre à l'arbitrage les litiges qui pourraient naître relativement à ce contrat »9, n'a pas été étendue au compromis permettant de prévoir le recours à l'arbitrage une fois le litige né10• Dans son arrêt du 10 juillet

1843, la Haute juridiction française a consacré la distinction entre les deux procédés en autorisant la conclusion d'un compromis en matière de contrats de

7 Ch. Jarrosson, « La clause compronùssioire », Rev.arb., 1992, p.261. 8 Calais-Auloy et Steinmetz, op.cil., 4" ed., n03.

9 Article 1442 du NCPC .

\0 Article 1447 du NCPC prévoit que: « le compromis est la convention par/aquel/e les parties à III/litige

(14)

consommation. Il est en effet admis que la renonciation à un droit déjà né, celui de saisir une juridiction étatique, est parfaitement valable.

Toutefois, la conclusion d'un compromis alors que les parties sont en plein désaccord et en pleine « guerre» judiciaire reste une hypothèse rare et ceci particulièrement en matière de contrats de consommation. En effet, les consommateurs, lors de litiges les opposant à leurs cocontractants, ont souvent l'impression d'être dominés par les professionnels et de ne pas posséder les mêmes armes juridiques ni les mêmes moyens financiers pour assurer l,~ur défense. En signant un compromis, ils ont le sentiment d'un échec face à un homme d'affaires rompu aux rouages du commerce. Ainsi, l'interdiction de la clause compromissoire a eu pour conséquence d'entraîner la disparition de l'arbitrage de manière générale dans ce domaine .

La prohibition de la clause compromissoire est restée longtemps jurisprudentielle et ce n'est qu'en 1972 que le législateur a introduit l'article 2061 du Code civil qui disposait: « La clause compromissoire est Ilulle s 'il n'est disposé autrement par la loi ».

En matière de droit de la consommation un seul texte particulier, l'article L.132-1 du Code de la consommation, permet de sanctionner les clauses abusives insérées dans les contrats conclus avec les consommateurs. La clause compromissoire figure à la liste des clauses éventuellement abusives annexée au Code de la consommation. Cette clause peut donc être qualifiée d'abusive par le juge si elle remplit les conditions de la loi. La doctrine majoritaire a constaté la contradiction entre, d'une part, la prohibition sans condition de l'article 2061 du Code civil et, d'autre part, 1 e caractère éventuellement abusif e n fonction des circonstances de fait selon l'article L.132-1 du Code de la consommation .

(15)

Par ailleurs, ces deux textes n'ont pas été déclarés explicitement applicables à l'arbitrage international et la Cour de cassation a adopté, contrairement à sa position stricte en matière interne, une position très favorable à la clause compromissoire dans les contrats de consommation transfrontières.

Les incertitudes du régime de la clause compromissoire dans les contrats de consommation ont été soulignées par des auteurs particulièrement autorisésll. Une

réforme a donc été souhaitée pour modifier l'article 2061 du Code civil et préciser le sort de la clause compromissoire dans les contrats de consommation.

La réforme de l'article 2061 du Code civil est intervenue le 15 mai 2001 et le nouvel article dispose désormais que: « Sous réserve des dispositions législatives particulières, la clause compromissoire est valable dans les colllrats conclus à

raison d'une activité professionnelle ». La formulation a peut-être le mérite d'être succincte et générale mais la doctrine majoritaire a jugé cette réfonne mitigée et insuffisante notamment en ce qui concerne l'arbitrage des litiges de consommation. En effet, la notion d'activité professionnelle n'est pas explicitée, l'expression « dispositiolls législatives particulières» et son application en faveur ou en défaveur de la validité des clauses est incertaine. Enfin l'incertitude sur l'application deI 'article 2061 du Code civil en matière internationale 1 aisse des zones d'ombres en ce qui concerne les litiges de consommation transfrontières.

Par ailleurs, l'intervention des Communautés européennes dans ce domaine est également empreinte d'hésitations et d'incertitudes puisque la directive sur les clauses abusives de 199312 a été suivie par un Livre vert sur l'accès des consommateurs à 1 a justice et 1 e règlement des 1 itiges de consommation dans 1 e marché unique en 1993 et une Résolution du Parlement sur la promotion du recours à l'arbitrage pour le règlement des conflits d'ordre juridique13. La

Il Ph. Fouchard, « Clauses abusives en matière d'arbitrage », Rev.arb., 1995, p.147 ; Jarrosson Ch., op.cit.,

f:.

259 .

2 Directive du Conseil n093/l3 du 5 avril 1993.

(16)

contradiction d'objectifs dans ces différents instruments a été soulignée par la doctrine majoritaire.

Cet état du droit français a fait dire au professeur Philippe Fouchard encore récemment: « les rapports entre l'arbitrage et les contrats de consommation -qu'ils soient internes, internationaux ou européens - méritent d'être éclaircis et

1 14 repenses» .

Les incertitudes du droit français et sa position isolée non seulement au sein de l'Union européenne mais également dans le monde entier quant à sa résistance à l'admission de l'arbitrage dans les contrats de consommation expliquent l'intérêt de cette étude consacrée au régime de l'arbitrage dans les litiges de consommation .

Nous nous proposons donc d'exposer l'état du droit français en matière interne et internationale afin de relever les lacunes et incertitudes et de proposer des solutions conciliatrices à la fois des intérêts des parties et de l'objectif du législateur français et européen.

Ainsi en remplacement de la nullité de la clause compromissoire dans les contrats internes de consommation, nous proposons la solution de l'inopposabilité, qui est, d'une part, une solution protectrice des intérêts des consommateurs et, d'autre part, une solution plus souple et dépendant des circonstances de fait (Chapitre 1).

Par ailleurs, la validité inconditionnelle de cette clause en matière de contrats transfrontières nous paraît injustifiée au regard de l'objectif de protection de la partie faible. La solution de l'inopposabilité pourrait également trouver application en matière internationale, d'autant plus qu'elle a été consacrée en matière de droit

(17)

du travail. Enfin, en s'inspirant des exemples étrangers et des tentatives au niveau européen, nous envisagerons la possibilité d'élaborer un système précis d'arbitrage prenant en compte les spécificités du droit de la consommation (Chapitre 2) .

14 Ph. Fouchard, obs. sous Rép.min. relative à 1'application de 1'article 2061 du Code civil en matière

(18)

CHAPITRE 1- Le régime de l'arbitrage dans les litiges internes de

consommation: pour l'inopposabilité de la clause compromissoire

Le recours à l'arbitrage en matière de droit de la consommation se heurte en France à deux difficultés: d'une part, l'arbitrabilité de la matière et, d'autre part, la nullité de la clause compromissoire.

L'arbitrabilité des litiges du droit de la consommation a souvent été occultée par la nullité de la clause compromissoire prévue à l'article 2061 du Code civil. Il s'agit pourtant d'un problème distinct régi par les articles 2059 et 2060 du Code civil. Nous démontrerons l'arbitrabilité des litiges du droit de la consommation en matière interne, arbitrabilité qui est, par ailleurs, justifiée par l'opportunité de l'arbitrage en ce domaine (Section 1).

Néanmoins, du fait du régime de nullité de la clause compromissoire dans les contrats internes de consommation, l'arbitrage en cette matière n'a pas connu de développement. La France est restée ainsi isolée dans sa position hostile à l'arbitrage des litiges de consommation. Il s'agit d'une solution stricte à laquelle il nous paraît préfémble de substituer la solution de l'inopposabilité ou inefficacité de la clause compromissoire (Section II) .

(19)

Section 1 L'arbitrabilité reconnue des litiges internes du droit de la consommation

L'arbitrage interne régi par le droit français est un arbitrage dont la procédure, comme le litige qui en est l'objet, appartiennent à l'ordre interne et ne présentent aucun élément d'extranéité. Ce type d'arbitrage se définit par opposition à l'arbitrage international qui, selon l'article 1492 du NCPC, «met enjeu/es intérêts du commerce international ». Cette définition a été précisée par la jurisprudence. Un arbitrage est international lorsqu'il porte sur une opération économique litigieuse réalisant un transfert de biens, de services ou de fonds à travers les frontières. Des éléments tels que la nationalité des parties, la loi applicable au contrat ou à l'arbitrage, ainsi que le lieu de l'arbitrage sont en revanche indifférentsl5• En application de cette définition, l'arbitrage interne est relatif à une

opération purement interne n'entraînant aucun flux et reflux au-delà des frontières .

Un litige interne de consommation interviendra ainsi entre un consommateur français et un professionnel français ou bien entre des parties de nationalités distinctes sans qu'il y ait pour autant mouvement de biens, de services ou de fonds à travers les frontières. Le droit français accepte-t-ill'arbitrabilité d'un tel litige?

La question de 1 'arbitrabilité est régie en droit français par les articles 2059 et 2060 du Code civil. Si le premier article constitue un véritable obstacle à l'arbitrabilité des litiges du droit de la consommation (B), la deuxième disposition, très critiquée en doctrine, ne s'oppose pas à la soumission des litiges en droit de la consommation à l'arbitrage (C). Toutefois, ces deux articles pernlettent in fine la possibilité de recourir à l'arbitrage en matière de litiges de consommation et cette possibilité est renforcée par l'opportunité de ce mode de règlement des litiges en cette matière (D). Avant de s'intéresser à ces qifférents points, il convient de définir la notion d'arbitrabilité en droit français (A) .

(20)

A. La notion d'arbitrabilité en droit français

La convention d'arbitrage a pour objet le règlement juridictionnel d'un litige par une juridiction non étatique mais privée16. Pour être valable, cette convention doit non seulement avoir été conclue par des parties ayant donné un consentement sain et éclairé mais également porter sur un objet licite. La matière, objet de l'arbitrage doit être susceptible d'être tranchée par l'arbitre, ce que l'on appelle l'arbitrabilité objective ou ratione materiae du litige en cause17•

Un auteur a défini l'arbitrabilité par référence au concept de l'application de la liberté contractuelle au traitement du contentieux 18. Ainsi, la notion d'arbitrabilité traduirait la possibilité pour les parties à un contrat de soumettre une question ou un litige au pouvoir juridictionnel des arbitres .

L'arbitrabilité objective d'une question relèverait d'un examen abstrait de l'objet du litige sans qu'il y ait besoin de considérer la solution de fond dans le cas d'espèce. Il s'agirait donc d'une question d'admissibilité de la convention d'arbitrage et non de sa formation (en opposition avec la question de la validité de la convention)19.

Par conséquent, il faudra savoir si le droit de la consommation constitue une matière que les parties peuvent soumettre au pouvoir juridictionnel de l'arbitre.

16 P. Ancel, Juris-CI. Proc. Civ., Fasc. 1024, nOI à 5.

17 Fouchard, Gaillard, Goldman, « Traité de l'arbitrage commercial international », Litec, 1996, nOS32 et s. 18 P. Level, « L'arbitrabilité », Rev.arb., 1992, p. 214 .

19 N. Coipel-Cordonnier, Les conventions d'arbitrage et d'élection de for el/ droit il/tematiol/al privé,

(21)

La question de l'arbitrabilité est régie en droit français par deux textes du Code civil au regard desquels il convient d'analyser l'arbitrabilité du droit de la consommation.

B. L'obstacle de l'article 2059 du Code civil et le concept de droits disponibles

L'article 2059 du Code civil reprend les termes de l'ancien article 1003 du NCPC en disposant que: « Toutes personnes peuvent compromettre sur les droits dont elles ont la libre disposition ».

Pour la majorité de la doctrine, la notion de « disponibilité des droits» suffit à elle seule à définir l'arbitrabilité, l'article 2060 du Code civil étant inutile et équivoque2o •

Toutefois, nous sommes pleinement d'accord avec M. Ancel qui fait la distinction entre les deux dispositions du Code civil et note que: «l'article 2059 est appelé à

jouer lorsque le législateur confère des droits dont il interdit la libre disposition dalls l'illtérêt privé de leur titlliaire »21.

En effet, un droit est disponible lorsqu'il est sous la totale maîtrise de son titulaire et au contraire indisponible lorsque la loi, dans un souci de protection interdit à l'individu de renoncer à ses droits parce qu'elle craint qu'il ne soit pas en mesure de juger pleinement de ses intérêts.

20 P. Level, op.cit., p.219 ; Ph. Fouchard, « Vers une réforme du droit français de l'arbitrage? - Quelques

questions et suggestions », Rev.arb., 1992, p.199-208 ; B. Oppetit, « L'arbitrage en matière de brevets d'invention après la loi du 13 juillet 1978 », Rev.arb., 1979, p.88.

(22)

Si l'on transpose ce raisonnement au droit de la consommation, le souci de protection du consommateur, partie faible, conduit à exclure la convention d'arbitrage, dans la mesure où « la renonciation aux garanties qu'offre le tribunal étatique est assimilée traditionnellement à la renonciation au droit lui-même »22.

Toutefois, l'effet de l'ordre public de protection a un caractère temporaire puisqu'il existe des « droits indisponibles à l'état de droit éventuel et dispollible à l'état de droit né et actuel »23. Ainsi, les individus retrouvent la libre disposition de leurs droits une fois ceux-ci acquis et peuvent renoncer à la garantie juridictionnelle du tribunal étatique au profit de l'arbitrage.

Par conséquent, les litiges mettant en jeu les règles protectrices du droit de la consommation deviennent arbitrables à partir du 'moment où le consommateur retrouve la libre disposition de ses droits. La question sera donc de déterminer à partir de quel moment le principe protecteur du consommateur n'est plus enjeu .

Les rapports de consommation sont marqués par de nombreuses règles d'ordre public de protection telles que les dispositions relatives aux clauses illicites ou imposées, les délais de réflexion obligatoire, la faculté de se repentir ou bien encore le formalisme contractuel. Ces différentes règles interviennent lors de la formation du contrat soit au moment de l'acquisition des droits. Il est donc évident que les droits du consommateur seront indisponibles lors de la conclusion du contrat de consommation, ce qui exclut la possibilité de prévoir une clause compromissoire. « Seules SOllt donc interdites les renonciations anticipées qui porteraient atteinte au principe même de la protection voulue par la loi »24.

22 P. Ance!, op.cit., nO 74 . 23 P. Leve!, op.cit., p.222.

(23)

Afin de détenniner le moment où le consommateur retrouve la libre disposition de ses droits, un auteur propose de distinguer selon le moment de naissance d'un droit, soit au moment de la fonnation du contrat, soit au fur et à mesure de l'exécution25• Dans la première hypothèse, le consommateur pourra renoncer à son droit aussitôt le contrat conclu, ce qui est le cas en matière de renonciation au droit au renouvellement du bail commercial.

Dans le second cas, le droit est acquis au fur et à mesure de l'exécution du contrat, la renonciation devenant possible uniquement quand le droit devient exigible (un exemple peut être trouvé dans la possibilité de renoncer au salaire une fois son échéance acquise).

Une dernière hypothèse a été mise en lumière par un auteur dans le domaine des relations de travail. En effet, le compromis d'arbitrage est rendu possible en cette matière uniquement postérieurement à la rupture du contrat de travail26 •

En matière de litiges de consommation, ce sont les deux premières hypothèses qui sont applicables. Ainsi par exemple, la loi autorise le consommateur à renoncer à la garantie des vices cachés de la chose vendue une fois le vice constaté et la garantie devenue exigible. Le compromis d'arbitrage est par conséquent autorisé en matière de litiges de consommation.

L'arbitrabilité du droit de la consommation a ainsi été reconnue dès le premier arrêt de la Cour de cassation en cette matière, l'arrêt Cie L'Alliance c. Prunier du 10 juillet 184327• La Haute juridiction française a opéré la distinction entre clause

compromissoire et compromis en jugeant valable ce dernier dans un litige opposant un assuré à sa compagnie d'assurance.

25 Malaurie, note sous Poitiers, 18 décembre 1953, D., 1954,519.

26 G. Couturier, La confirmation des actes nil/S, L.G.DJ, 1972, p.255 et s .

27 Casso civ., 10 juillet 1843, S., 1843.1.561, note Devilleneuve; Rev.arb., 1992, p.399 avec les concl. de l'avocat général Hello.

(24)

La Cour a donc accepté l' arbitrabilité de la matière en décidant que: « l'obligation de nommer des arbitres lors du compromis a pour but d'éviter les incidents et les procès sur la composition d'un tribunal arbitral, et principalement de mettre les citoyens en garde contre leur propre irréflexion, qui les porterait à souscrire avec trop de légèreté et d'imprévoyance à des arbitrages futurs, sans être certains d'avoir pour juges volontaires des personnes capables et dignes de leur confiance ».

L'article 2059 du Code civil ne constitue donc pas un obstacle à l'arbitrabilité des litiges du droit de la consommation à partir du moment où le consommateur retrouve la disposition de ses droits protégés par l'ordre public de protection.

L'article 2060 du Code civil ne constitue pas non plus un obstacle à cette arbitrabilité .

C. L'intervention de l'ordre public et l'article 2060 du Code civil

L'article 2060 du Code civil dispose: « on ne peut compromettre sur les questions d'état et de capacité des personnes, sur celles relatives au divorce et à la séparation de corps ou sur les constatations intéressant les collectivités publiques et les établissements publics et pllls g élléralemellt d ails tOlites 1 es matières q IIi illtéressellt l'ordre public ».

Selon certains auteurs, l'article 2060 dl,~ Code civil ne constitue qu'un prolongement de l'article 2059 du Code civil puisqu'il énumère les matières non arbitrables du fait du caractère indisponible des droits en question. Ces auteurs dénoncent le caractère inutile de cette disposition, sa rédaction maladroite et équivoque et appellent de leurs vœux sa suppression pure et simple28 •

28 P. Leve!, op.cit., p.233 ; Ph. Fouchard, op.cit., Rev.arb., 1992, p.l99-208 ; B. Oppetit, op.cit., Rev.arb., 1979, p.88.

(25)

Toutefois, s'il est vrai que les deux articles du Code civil définissent les contours de l'inarbitrabilité de certaines matières, l'inarbitrabilité objective, c'est p lus par référence à la notion d'ordre public que celle d'indisponibilité des droits. Il s'agit en effet dans les deux cas de faire dépendre l'arbitrabilité d'un litige du lien de la matière avec l'ordre public.

Il convient par conséquent de s'interroger sur la notion d'ordre public et de son application en matière de droit de la consommation.

La notion d'ordre public a un caractère extrêmement imprécis. Généralement, la doctrine distingue l'ordre public de direction de l'ordre public de protection, le premier s'imposant à tous les acteurs économiques et entraînant un régime de nullité absolue, le second intéressant les parties réputées faibles qu'il protège face aux cocontractants. L'ordre public englobe l'ensemble de règles dont l'application est rendue impérative pour des raisons d'organisation sociale et économique, voire politique.

En matière d'arbitrage, il convient de souligner tout d'abord que l'ordre public qui intervient au niveau de la convention d'arbitrage n'est pas le même que celui qui intervient au niveau du contrôle de la sentence arbitrale. M. Ancel qualifie le premier d'ordre public juridictionnel29• Cet auteur, pour différencier les deux

modes d'intervention de l'ordre public, parle d'un ordre public restreint lorsqu'il s'agit de se prononcer sur l'arbitrabilité du litige. « Ce n'est pas l'ensemble des règles d'ordre public qui doive"t être ici prises en considération mais L1ne partie de ces règles, jugées trop importantes, soit pour l'organisation sociale, soit pour les droitsfondamentaux des parties à l'arbitrage »30 .

29 p, Ancel, op.cit., n09. JO P. Ancel, op.cit., nOl7.

(26)

L'idée de M. Ancel à laquelle nous adhérons entièrement consiste à opposer un ordre public restreint (ordre public de direction ou bien de protection) à un ordre public général. L'ordre public restreint concerne l'arbitrabilité du litige et dictera la possibilité ou non de prévoir l'intervention d'un arbitre. Lorsque cet ordre public restreint est concerné, l'arbitre ne pourra que déclarer son incompétence du fait de l'inarbitrabilité du litige.

Au contraire l'ordre public général n'empêchera pas l'arbitre de se prononcer sur la question. Il pourra constater la violation des règles de cet ordre public général et seule cette violation pourrait entraîner la nullité de la clause compromissoire. Ce qui interdit le recours à l'arbitrage n'est pas le lien du litige avec l'ordre public général, mais l'existence d'une violation de cet ordre public général.

Les deux ordres public restreint et général n'ont pas la même signification et le même contenu. L'ordre public restreint a un domaine limité qui exclut de manière automatique certaines matières du recours à l'arbitrage, on parlera de litiges inarbitrables par nature ou pel' se. Le second ordre public englobe l'ensemble des règles d'ordre public de fond applicables aux litiges. Dans ce second cas, le litige sera arbitrable mais en cas de violation des règles d'ordre public, l'arbitre constatera la violation et éventuellement la nullité de la clause compromissoire.

Cette distinction entre ces deux modes d'intervention de l'ordre public a été systématisée par Motulsky qui a écrit: « Le compromis est contraire à l'ordre public, soit parce qu'il soumet à l'arbitrage un litige dont la nature le soustrait à l'emprise de la justice privée (divorce, faillite) soit parce qu'il porte sur un différend dont la nature le rend en principe accessible à l'arbitrage mais dont l'objet e st cl e p al' ses m odaUtés, en contradiction avec l'ordre public (exécution d'une vente à prix illicite) »31 •

(27)

Il résulte de ces observations que lorsque nous sommes dans une matière soustraite par nature à l'arbitrage, l'arbitre doit se dessaisir immédiatement, sans examiner le fond du litige, dès lors qu'il constate le lien entre la matière et cet ordre public restreint. L'arbitre opère dans cette hypothèse un « contrôle abstrait» sur l'objet du litige32• Il ne se prononce pas sur la réponse du litige mais uniquement sur la possibilité ou non d'examiner la question33•

Au contraire, si c'est la violation de l'ordre public général constatée lors d'un examen du fond du litige qui justifie l'exclusion de l'arbitrage, l'arbitre ne peut se dessaisir qu'après avoir constaté cette violation des règles d'ordre public général.

Après avoir exposé cette notion d'ordre public, il convient de s'interroger sur la place du droit de la consommation au sein de l'ordre public. Les dispositions du droit de la consommation relèvent généralement de l'ordre public de protection et ont pour objectif de protéger la partie faible dans les contrats de consommation . Toutefois, les règles du droit de la consommation relèvent-elles de cet ordre public restreint caractérisé par M. Ancel et rendent-elles la matière inarbitrable par nature?

Les matières explicitement inarbitrables énumérées dans l'article 2060 du Code civil concernent les litiges en matière d'état et de capacité et les litiges intéressant les personnes publiques. En effet, certaines matières apparaissent inarbitrables en soi, sans qu'une explication juridique rationnelle puisse être démontrée. Il s'agit des matières relatives à l'état des personnes (naissance, divorce, mariage, adoption), à leur capacité (incapacités physiques ou morales), à l'organisation publique d'un Etat (personnes et établissements publics), à la situation économique des entreprises (procédures collectives, matières fiscales). Ces différents domaines échappent à l'arbitrage du fait de leur lien avec cet ordre public restreint et du fait également de la faible présence de l'autonomie de volonté en ces matières .

32 N. Coipel-Cordonnier, op.cit., p.222.

(28)

Au contraire, le droit de la consommation, malgré ses liens étroits avec un ordre public de protection, relève essentiellement de la sphère de la volonté d'autonomie des parties. En effet, les consommateurs et les professionnels concluent des contrats de vente 0 u de services et ainsi constituent des cocontractants ayant en

principe librement donné leur consentement. Les consommateurs sont généralement qualifiés de partie faible au contrat, mais ils ne sont pas pour autant des incapables majeurs qui requièrent une surprotection.

Nous pensons que le régime du droit de la consommation doit par conséquent être rapproché du celui établi en matière de droit de la concurrence. Dans ces deux domaines, il s'agit de faire intervenir un ordre public de protection afin d'assurer un équilibre dans les droits et obligations des parties. Toutefois, il s'agit d'un ordre public général dont l'arbitre peut connaître.

Les litiges relevant du domaine du droit de la concurrence n'ont pas été considérés comme inarbitrables par nature. A la suite d'une longue évolution de la jurisprudence française34 en matière de litiges du droit de la concurrence, les juges ont décidé que «l'ordre public n'est pas de nature à interdire a priori la juridiction arbitrale de connaître d 'lm litige de nature contractuelle ou délictllelle

à propos duquel des règles impératives sont invoquées »35.

Cette conception extensive de l'ordre public en matière d'arbitrage remonte à la jurisprudence Tissot de la Cour de cassation du 28 novembre 195036 et a été confirmée à plusieurs reprises par la suite37•

34 P. Mayer, op.cit., p.211 ; E. Loquin, « L'ordre public et l'arbitrage de droit interne français », RTDCom,

1996, p.450.

35 Paris, 20 janvier 1989, Société Phocéenne de Dépôts, Rev.arb., 1989, p.280, note Idot L. 36 Cass.com., 28 novembre 1950, Tissot c. Nef!, D. 1951, p.170.

(29)

L'interdiction de compromettre dans les matières d'ordre public «ne signifie pas et

n'a jamais signifié ... que tout litige relatif à une convention ou une opération soumise à certains égards à une réglementation présentant un caractère d'ordre public se trouverait de cefait soustrait à tout arbitrage »38.

Par conséquent, la seule mise en cause des règles d'ordre public de protection du droit de la concurrence ne peut constituer un fondement pour l'inarbitrabilité du litige. L'arbitre examinera la demande tenant à la nullité du contrat ou de l'une de ses clauses au regard des règles impératives en jeu et constatera le caractère illicite ou non des dispositions. Toutefois, en matière interne, l'arbitre ne pourra sanctionner la violation de la règle impérative. Sa compétence est limitée «à

l'appréciation de / 'incidence de l'ordre public au regard de sa propre investiture, sans prononcer la sanction des v!olatiolls qu'il viendrait à constater »39. Cette

position a été critiquée en doctrine notamment par M. Mayer qui écrit: «il est

franchement curieux qu'ayant fait le plus difficile, constater l'illicite, l'arbitre ne puisse aller jusqu'au bout et prononcer la nullité »40. D'autres auteurs lui

reprochent de compliquer la tâche du justiciable qui devra aller devant le juge étatique, alors que la sentence arbitrale pourra de toute façon être contrôlée par le juge a posteriori dans le cadre du recours en annulation41•

Le droit de la concurrence ne constitue donc pas une matière inarbitrable pel' se42 telle que le divorce ou la filiation, mais il s'agit d'une matière patrimoniale sensible qui sera contrôlée au seul titre du respect de l'ordre public général au niveau de la sentence.

38 Paris, 15 juin 1956, Jep, 1956, II, 9419, note Motu1sky. 39 Paris, 20 janvier 1989, précité.

40 P. Mayer, op.cit., p.212.

41 E. Loquin, « L'arbitrage des litiges du droit de la consonmlation », Vers 1/11 Code européen de la

consommation. Bruylant, Bruxelles, 1998, p.364.

(30)

Le droit de la consommation peut être rapproché du droit de la concurrence puisque les deux matières sont relatives à des domaines sensibles dans lesquels le législateur et la jurisprudence sont intervenus au nom de l'ordre public de protection ou de direction afin de garantir une protection à une partie économiquement plus faible que le cocontractant. La matière du droit de la consommation demeure contractuelle et son traitement en matière d'arbitrabilité devrait suivre le régime du droit de la concurrence.

Par conséquent, et malgré l'absence de jurisprudence explicite en ce domaine, le droit de la consommation ne constitue pas une matière inarbitrable per s e. Il ne relève pas du domaine de l'ordre public restreint et J'arbitre pourra se prononcer sur la violation des règles du droit de la consommation.

Par ailleurs, nous constatons une tendance du droit français à étendre le domaine des matières arbitrables43 •

Le droit de la consommation devrait faire partie de cette tendance et ceci se justifie en pratique par les avantages de ce mode extrajudiciaire de règlement des litiges et son opportunité en cette matière.

D. L'opportunité de l'arbitrage dans les litiges de consommation

Afin d'apprécier l'opportunité et l'intérêt de permettre le recours à l'arbitrage dans les litiges de consommation, il convient d'examiner les avantages de l'arbitrage dans ce domaine (1), avant de s'intéresser au droit comparé et au recours de ce mode de règlement des litiges dans les autres pays (2) .

43 Paris, 16 février 1989, A/mira, Rev.arb., 1989, p.712, note Idot; Cass.lre Civ., 5 février 1991, Rev.arb.,

(31)

1. Les avantages de l'arbitrage en matière de droit de la consommation

Certains auteurs ont soutenu que l'arbitrage en matière de litiges de consommation serait inadapté pour deux raisons principales: la prétendue indifférence des arbitres

à la protection des consommateurs et le coût élevé de la procédure d'arbitrage.

Ainsi selon certains, l'arbitrage étant une justice privée, les arbitres privilégieraient la force obligatoire du contrat sur la protection de la partie faible et ainsi ne prendraient pas en compte les intérêts du consommateur.

Cette vision n'a pas été vérifiée dans les faits puisque les arbitres sont des juges dont les décisions doivent être rendues endroit et sont sous le contrôle du juge étatique de l'annulation. Par ailleurs, ce sont les parties qui choisissent les arbitres librement et en matière de droit de la consommation, les associations de consommateurs pourraient fournir des listes d'arbitres impartiaux et indépendants . Quant aux arbitres investis des pouvoirs d'amiables compositeurs, il est peu probable que le sens de l'équité dicte aux arbitres de privilégier la partie forte.

De même, l'arbitrage est souvent perçu comme une justice réservée aux plus riches dans le domaine du droit des affaires où il s'est développé en premier. Il est vrai que l'arbitrage requiert des moyens financiers du fait des honoraires et des frais des arbitres, coûts que se partagent généralement les parties. Toutefois, doit-on conclure qu' «en matière de litige de la consommation, le jeu n' ell vaut pas la chandelle »44? M. Jarrosson écrit encore: « il est très rare de trouver en pratique des clauses compromissoires dans les conditions générales de vellte des professionnels s'adressant aux consommateurs, alors qu 'i! est fréquent d

JI

trouver des c lauses a ttributives de juridiction, encore que celles-ci soient prohibées p ar l'article 48 NCPC, ce qui montre que la prohibition n'est pas dissuasive. Ce qui fait la différence, c'est que les premières coûtent, les autres non » .

(32)

Nous ne partageons pas le point de vue de cet auteur parce que le constat d'un coût élevé est fondé en ce qui concerne les arbitrages commerciaux à l'échelle internationale, étant donné la complexité des dossiers et la nécessité de recourir à des expertises. Les litiges de consommation constituent en revanche le plus souvent des « petits litiges)} qui peuvent être réglés en un minimum de temps et dont le coût devant des juges étatiques peut se révéler bien plus important que celui de la procédure d'arbitrage.

M. Loquin cite ainsi comme exemple pertinent l'arbitrage de qualité en matière commerciale, arbitrage qui se limite à des litiges portant sur le seul examen de la qualité d'une marchandise et dont l'issue peut être très rapide et peu coûteuse45•

Par ailleurs, en matière de droit de la consommation, les coûts pourraient être réduits grâce à la création d'institutions spécialisées qui établiraient des tarifs des honoraires et frais d'arbitres rendant l'arbitrage accessible aux consommateurs46 •

Ces deux critiques mises à part, les auteurs reconnaissent volontiers les avantages à recourir à l'arbitrage en matière de litiges de consommation. D'ailleurs, la multiplication en France des procédures de médiation et de conciliation47 témoigne de l'intérêt pour les consommateurs de recourir à des voies extrajudiciaires de règlement de leurs différends avec les professionnels.

La rapidité de la justice arbitrale est sans aucun doute un de ses avantages majeurs. En comparaison avec les délais très longs et imprévisibles de la justice étatique, la procédure arbitrale présente une sécurité non négligeable puisque 1 a durée dei a procédure d'arbitrage sera souvent fixée dans la convention d'arbitrage. Ce sont les parties qui ont en effet la maîtrise de la durée de la procédure et de la possibilité de proroger ou non cette durée.

45 E. Loquin, op.cit., p.377 .

46 A.M. De Matos, op.cit., p.500 ; E. Loquin, op.cit., p.377. 47 Calais-Auloy et Steinmetz, op.cit., n0433.

(33)

Par ailleurs, 1 a sentence présente un caractère définitif

e

t 1 a révision au fond de cette décision est interdite, ce qui évite l'allongement des délais avec un second degré de juridiction.

Le choix d es arbitres par 1 es parties constitue un a utre avantage de ce mode de règlement des litiges. Les arbitres peuvent être choisis non seulement en raison de leurs compétences techniques ou juridiques dans la matière, objet du litige, mais également en raison de leur appartenance au milieu professionnel auquel est liée l'une des parties. En matière de litiges de consommation, une composition tripartite du tribunal arbitral assurerait l'impartialité et la juste représentation des intérêts de chacune des parties. Toutefois, cette composition tripartite demeure très théorique puisqu'en pratique l'arbitrage sera mené par un seul arbitre pour des raisons financières. Les associations de consommateurs 0 u des c entres paritaires d'arbitrage pourraient constituer un cadre idéal pour proposer aux consommateurs des listes d'arbitres compétents et sûrs .

Enfin, le caractère lénifiant de l'arbitrage que caractérise son objectif d'atténuer le différend, de l'apaiser, est particulièrement bien adapté au droit de la consommation. Pour Motulsky, l'arbitrage «représente Ull pas de plus vers

l'harmonisation des intérêts sociaux qui apparaît comme 1I1lejustice lénifiante »48.

L'arbitrage contribue en effet au rapprochement des parties, à l'apaisement de leurs différends et à la recherche d'une solution négociée et donc acceptable pour les deux points de vue. Dans les litiges de consommation, la nécessité de parvenir à une solution conciliatrice des intérêts antagonistes est d'autant plus importante que les relations entre les parties doivent être maintenues. Les consommateurs satisfaits de la solution de l'arbitre auront tendance à ne pas délaisser le professionnel et ses produits et surtout cette atmosphère contribuera à la préservation de relations saines entre consommateurs et professionnels et entre les mouvements consuméristes et les organisations professionnelles .

(34)

Ces arguments en faveur de l'arbitrage en matière de litiges de la consommation sont illustrés dans les faits puisque de nombreux systèmes juridiques ont depuis longtemps adopté ce mode extrajudiciaire de règlement des différends.

2. La reconnaissance de l'arbitrage en matière de litiges de consommation en droit comparé

Aux États-Unis, l'arbitrage en matière de droit de la consommation a été instauré depuis de nombreuses années et accepté par les acteurs économiques et les consommateurs49• Ce mode de règlement des litiges a notamment connu un

développement important en matière de ventes d'automobiles50• L'arbitrabilité de

ces litiges a été admise et la Cour suprême des Etats-Unis autorise les parties à

contester la validité d'une convention d'arbitrage uniquement sur le fondement du droit commun des contrats et les notions de «fraude, pression ou abus de

puissance dominante ». De nombreux arrêts illustrent la faveur de principe du juge américain à l'égard des clauses d'arbitrage en matière de droit de la consommationsl .

Au Canada, l'arbitrage a également prospéré non seulement dans le domaine des automobiles notamment par la création du Programme d'arbitrage pour les véhicules automobiles du Canada (PAVAC)s2, mais également en matière bancaire et d'assurances. La question de l'arbitrabilité du droit de la consommation a reçu une solution comparable à celle des juridictions françaises puisque la Cour

49 Mac Conagle, « Arbitration of consumer disputes», The Arbitration Journal. juin 1972, p.65-84; Adams,

« Consumer complaint arbitration, the corporate view », The Arbitration Journal, décembre 1988, p.4l.

so R. Widdows, « Consumer arbitration as a dispute resolution mechanism in customer-seller disputes over automobile purchase », The Arbitration Journal, mars 1987, p.17 ; Adams, « Florida '5 motor vehicle

arbitration board, a two year review », The Arbitration Journal, mars 1992, p.36.

SI J-B. Racine, op.cit., n0118; J-T. Mc Laughlin, «Arbitrability: CurrentTrends in the United States»,

Arb.lnt'l., 1996, p.l23 .

S2 S. Raymond-Bougie, « L'arbitrage des différends en droit de la consommation », Thesis McGiIJ

(35)

suprême du Canada a décidé que l'arbitre pouvait connaître des questions relevant de l'ordre public et notamment des litiges de consommations3•

En Europe, à côté deI 'arbitrage volontaire que 1 es parties choisissent et qui est favorisé au Luxembourg, en Belgique et aux Pays-Bas, un système d'arbitrage institutionnel, c'est-à-dire légalement prévu en matière de droit de la consommation, existe en Espagne et au Portugal. L'arbitrabilité des litiges de consommation a donc été largement admise dans ces pays, ce que nous allons constater dans la seconde partie de cette études4.

Comme nous l'avons précédemment exposé, la matière du droit de la consommation constitue bien une matière arbitrable en droit interne français. Cette solution est justif!ée en pratique par les avantages du recours à ce mode extrajudiciaire de règlement des litiges dans ce domaine .

Par conséquent, la nullité de la clause compromissoire que consacre le droit français nous paraît une solution trop sévère et inadaptée aux besoins et intérêts des consommateurs et des professionnels .

53 Despllteallx c. Editions Chouette (1987) inc., 2003 CSC 17.

(36)

Section II Une nullité de la clause compromissoire inadaptée dans les litiges internes de consommation

La nullité de la clause compromissoire que prévoit le droit français est inadaptée aux litiges internes de consommation. Le régime de cette sanction est imprécis, contradictoire et crée une incertitude, non seulement sous l'empire de l'ancien article 2061 du Code civil (A), mais également à la suite de la réforme de cette disposition (B). Au contraire, la solution de l'inopposabilité ou inefficacité de la clause compromissoire, telle qu'établie dans d'autres domaines du droit, constitue une solution de compromis en faveur de la partie protégée (C).

A. La nullité de la clause compromissoire sous l'empire de l'ancien article 2061 du Code civil

L'article 2061 du Code civil avait été introduit par la loi du 5 juillet 1972 et disposait que: « La clause compromissoire est nulle s'il Il 'est disposé autrement

par la loi ». Il s'agissait par conséquent d'une prohibition de principe de la clause compromissoire, ce qui signifiait que seul le législateur pouvait autoriser de manière spéciale cette clause. Ainsi par une loi du 31 décembre 1925, le législateur avait autorisé la clause compromissoire entre commerçants pour les contestations visées à l'article 631 du Code de commerce.

En matière de litiges internes de consommation, l'article 1.132-1 du Code de la consommation prohibe les clauses abusives dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs: Parmi ces clauses abusives, dont une liste est annexée au Code de la consommation, figure la clause compromissoire. Toutefois, cette clause ne sera déclarée abusive qu'à certaines conditions appréciées par 1 e juge et sa nullité ne sera pas automatique contrairement à la nullité de principe prévue par l'article 2061 du Code civil.

(37)

La difficulté de conciliation de ces deux dispositions contradictoires a été dénoncée en doctrine (2). Par ailleurs, 1 es incertitudes relatives au régime deI an ullité de l'ancien article 2061 du Code civil ont également fait l'objet de vives critiques (3).

Avant d'exposer les incohérences du système de nullité de la clause compromissoire sous l'empire de l'ancien article 2061 du Code civil, il convient d'expliquer l'origine de l'hostilité ùu droit français à l'égard de la clause compromissoire et son fondement (1).

l. L'origine de la nullité de la clause compromissoire: l'arrêt Cie L'Alliance c. Prunier de la Cour de cassation

La prohibition de la clause compromissoire a une origine prétorienne puisque c'est la jurisprudence qui a établi cette nullité de principe dans l'arrêt Cie L'Alliance c. Prunier du 10 juillet 184355 •

Les faits de l'espèce concernaient un assuré, Monsieur Prunier, et son assureur, la

Cie L'Alliance, qui s'opposaient à propos du règlement d'une indemnité

d'assurance incendie. Le contrat d'assurance comportait une clause prévoyant le règlement des litiges par voie d'arbitrage au siège de la compagnie d'assurance.

La Cour de cassation a déclaré la clause nulle pour les motifs suivants:

« Si l'on validait dans le cas d'assurances contre l'incendie la simple ... clause compromissoire, il faudrait reconnaître et consacrer sa validité dans tous les contrats lors desquels on aurait consenti, ell cas d'ine.xécution ou de difficultés dans l'exécution, se soumettre à des arbitres nOIl désigllés ; cette stiplliatioll

devielldrait ell q"elqlle sorte ballale et de pllr style; l'exceptioll de droit CO",,,,""

serait la règle, et 1'011 serait privé des garamies qlle présentent les tribllnallx ..

(38)

... l'obligation de nommer des arbitres lors du compromis a pour but d'éviter les incidents et les procès sur la composition d'un tribunal arbitral, et principalement de mettre les citoyens en garde contre leur propre irréflexion, qui les porterait à

souscrire avec trop de légèreté et d'imprévoyance à des arbitrages futurs, sans être certaills d'avoir pour juges volOlltaires des persolllles capables et dignes de leur cOllfiallce ... (la compagnie) dont le siège principal est à Paris et qui étend ses opérations sur toute la France, veut, à l'aide de l'art. 15 de la police, forcer les assurés, quel que soit leur domicile, quelque considérable ou léger que soit le dommage éprouvé, de constituer à Paris, où peut-être le plus grand nombre n'ont aucune relatioll d'affaires, et ne connaissent même personne, loin du lieu oû les sinistres se sont effectués ... ».

Le fondement de la prohibition de la clause compronllSSOlre a donc été dès l'origine la volonté de protéger les parties faibles de la généralisation de ce type de clause dans les contrats d'adhésions6• La nullité de la clause compromissoire a donc été forgée lors d'un litige interne opposant un professionnel, la compagnie d'assurance, à un consommateur, un individu assuré. La justification même de la prohibition a été la protection du consommateur contre le professionnel.

Toutefois, même si ce fondement de la nullité de la clause compromissoire paraît justifié, il n'en demeure que le régime de cette nullité est incertain et en contradiction avec ce fondement de protection d'une partie réputée faible au contrat.

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