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Apprentissage de séquences dans les paradigmes de Hebb et de temps de réaction sériel : un processus similaire?

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Academic year: 2021

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Apprentissage de séquences dans les paradigmes

de Hebb et de temps de réaction sériel : Un

processus similaire?

Mémoire

Marie Charlotte Noireau

Maîtrise en psychologie

Maître ès arts (M.A.)

Québec, Canada

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Apprentissage de séquences dans les paradigmes de

Hebb et de temps de réaction sériel : Un processus

similaire?

Mémoire

Marie Charlotte Noireau

Sous la direction de :

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Résumé

Qu’elle soit naturelle ou artificielle, la sériation des informations est omniprésente. Aussi, l’ordre sériel est une problématique fondamentale chez l’humain (Lashley, 1951). Nos activités sérielles des plus basiques aux plus spécifiques reposent sur notre faculté de maintien permanent de suites ordonnées d’informations en mémoire ou apprentissage de séquences, un thème central en psychologie qui reste toutefois abordé de façon cloisonnée au travers des paradigmes expérimentaux de Hebb (Hebb, 1961) et de temps de réaction sériel (TRS) (Nissen & Bullemer, 1987). Jusque-là, les études ont montré que le traitement répété de l’ordre, en mémoire sérielle dans le premier cas et perceptivo-moteur dans le deuxième, bénéficie à son apprentissage. La présente étude questionne la similitude du mécanisme sous-tendant l’apprentissage de séquences observé dans les deux paradigmes. Les deux pans de la littérature sont rapprochés afin de savoir si l’apprentissage de séquences résulte d’un processus de mémorisation sollicitant à la fois l’encodage et la récupération de l’ordre sériel. Les résultats montrent que les performances perceptivo-motrices et de reconstruction spatiale s’améliorent au cours des répétitions dans une tâche hybride originale combinant les tâches de TRS et de reconstruction sérielle et où la procédure de répétition de Hebb est appliquée. Pour la première fois il est montré que les modes procéduraux et hebbien opèrent durant l’apprentissage de séquences lequel semble émerger d’un processus hybride de mémorisation à long terme selon lequel l’encodage sensorimoteur de l’ordre spatial pourrait bénéficier à sa récupération en mémoire. L’apport de la méthodologie hybride est majeur puisqu’il permet de réunir deux domaines d’étude de l’apprentissage de séquences aux apparences distinctes tout en approfondissant sa compréhension. Les résultats sont discutés au regard des théories sur la mémoire de l’ordre et des modèles de l’apprentissage de séquences.

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Table des matières

Résumé ... iii

Liste des Tableaux ... v

Liste des Figures ... vi

Dédicaces ... Erreur ! Signet non défini. Remerciements ... viii

Apprentissage de séquences dans les paradigmes de Hebb et de temps de réaction sériel : Un processus similaire? ... 1

Apprentissage de l’ordre : Deux paradigmes porteurs mais insuffisants ... 1

Effet de répétition dans les paradigmes de Hebb et de TRS ... 2

Robustesse et transcendance de l’apprentissage de séquences ... 4

Divergences quant aux caractéristiques de la répétition... 6

Traitement de l’ordre sériel et nature de la tâche ... 7

Apprentissage de l’ordre : Deux modes, hebbien et procédural, indépendants? ... 11

Mémoire et apprentissage de l’ordre : Approches théoriques ... 11

Représentation et niveaux de traitement de l’ordre : Perception et production ... 11

Modélisation de la mémoire de l’ordre et apprentissage de séquences ... 13

Conclusion : Vers une théorie unifiée de l’apprentissage de séquences ... 16

Apprentissage de l’ordre et nécessité d’un paradigme hybride ... 16

Méthode ... 19

Participants ... 19

Matériel ... 19

Procédure ... 20

Résultats ... 23

Proportion de reconstruction correcte ... 23

Temps de réaction ... 25

Conscience de la répétition ... 27

Discussion ... 31

Effet de répétition, encodage et récupération de l’ordre durant l’apprentissage ... 31

Apprentissage hybride et bénéfices potentiels ... 33

Mise en évidence d’un apprentissage hybride avantageux ... 34

Inscription sensorimotrice de l’ordre en mémoire au service de son extraction ... 35

Mémoire humaine, du système au vide : Place de l’apprentissage hybride ... 39

Apprentissage hybride et unification des théories de la mémoire ... 39

L’apprentissage hybride au regard des neurosciences : Amygdale et hippocampe ... 41

Apprentissage hybride et théories de la mémoire : Conclusions ... 44

Conclusions, limites et ouvertures... 46

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Liste des Tableaux

Tableau 1. Caractéristiques contextuelles de l’apprentissage de séquences hebbien et procédural ... 10 Tableau 2. Encodage et récupération de l’ordre dans les paradigmes de Hebb, de temps de

réaction sériel (TRS) et dans un paradigme hybride ... 10

0

Tableau 3. Résultats de l'analyse de variance effectuée sur la proportion de reconstruction correcte ... 25 Tableau 4. Résultats de l'analyse de variance effectuée sur le temps de réaction médian ... 27 Tableau 5. Fréquence des participants selon le groupe et la conscience de la répétition ... 28 Tableau 6. Résultats des analyses de variance effectuées sur la proportion de reconstruction correcte et sur le temps de réaction médian selon la conscience de la répétition ... 30

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Liste des Figures

Figure 1. Représentation schématique de la tâche TRS. ... 20 Figure 2. Représentation schématique de la tâche de reconstruction. ... 21

1

Figure 3. Représentation schématique de la tâche hybride. ... 22 Figure 4. Proportion de reconstruction correcte en fonction du bloc d'essais (1 à 3), de la séquence présentée (répétée, non répétée) et de la position sérielle (1 à 7) pour les groupes Reconstruction (panneaux A) et Hybride (panneaux B). Les barres d’erreur représentent l'erreur standard

moyenne. ... 24 Figure 5. Moyenne du temps de réaction médian (ms) en fonction du bloc d’essais (1-3), de la séquence présentée (répétée, non répétée) et du groupe (TRS, Hybride). Les barres d’erreur représentent l'erreur standard moyenne. ... 26

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À Marie-Françoise,

À mon oncle Michel,

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Remerciements

Mes remerciements vont en tout premier lieu à Sébastien Tremblay pour avoir combiné supervision et liberté durant cette recherche, pour avoir impulsé et suivi les orientations de ma réflexion sur ce beau thème qu’est l’apprentissage de l’ordre. Un grand merci pour ta tolérance, ta disponibilité et ton ouverture. Mes excuses pour n’avoir certainement pas perçu tous tes conseils et ton aide à leurs justes valeurs. Je remercie aussi François Vachon et Jean Saint-Aubin pour leurs judicieuses suggestions et leur disponibilité durant le déroulement de cette étude. Merci à vous trois pour votre patience envers ce parcours déroutant.

Je remercie Danny pour son aide dans la programmation de la tâche et, de façon plus générale, les équipes des laboratoires Co-DOT et Attention & Cognition, du 00 et du 11 au FAS pour leur accueil et leur aide quelle qu’elle fut tout au long de ce parcours. Une attention particulière à mes compagnons de voyage du 092, Anaït et Mark, et à Cindy pour sa précieuse aide dans la dernière ligne droite. Merci aussi à Lyne Roberge pour ce souriant accueil au sortir de l’ascenseur, et à Stéphanie Hamel et Simon Grondin pour toute leur aide dans la gestion administrative de ce cheminement quelque peu mouvementé. Finalement, je remercie le laboratoire Co-DOT pour m’avoir permis de mener cette étude dans d’excellentes conditions matérielles.

Concernant mes proches et ami(e)s non cité(e)s ci-après et dans l’attente de vous remercier en direct autour d’un verre, merci pour votre soutien. Merci Maman pour tes encouragements; la course du petit vélo est trop effrénée, quant à la solution à ce fatiguant « sans fin » je me demande si elle existe. Merci Guillaume pour tes conseils d’aîné et ces « discussions », j’ai finalement trouvé ce que je dois chercher. 2L2… Je te remerciE du fond du cœur, en rythme, +...

Jean-Luc, un Grand Merci à vous pour vos justes conseils et pour votre aide chaleureuse. Ce vent-là m’a vidée et remplie à la fois.

Merci à toi Papa pour cette surprise. Félicitations! De toutes ma préférée, chaque jour présente.

À vous tous qui m’avez accompagnée durant cette étape,

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Apprentissage de séquences dans les paradigmes de Hebb et de temps de réaction sériel : Un processus similaire?

Diverses activités impliquant l’enchaînement de tâches ordonnées et souvent répétitives (p. ex., marcher, parler, etc.) sont basées sur l’arrangement sériel d’éléments. Aussi, la sériation des informations est omniprésente et engage nos fonctions cognitives et comportementales. L’ordre sériel est fondamental chez l’humain (Lashley, 1951). Par exemple, le langage est une activité sérielle qui repose sur le souvenir de suites de mots et sollicite les représentations mentales et les habiletés motrices. En psychologie expérimentale, la capacité à repérer des séries d’informations et à les mémoriser afin de les reproduire est un thème central largement étudié à partir de la tâche de rappel sériel immédiat. Cette dernière permet de comprendre la mémoire sérielle ou la conservation temporaire de l’ordre. Or, les activités sérielles reposent sur le maintien permanent de l’ordre en mémoire, autrement dit sur l’apprentissage à long terme de suites ordonnées d’informations ou apprentissage de séquences. Cette thématique a reçu moins d’attention au cours du XXème siècle (Hebb, 1961) mais un regain d’intérêt s’est opéré au début du XXIème siècle sur les mécanismes responsables de l’effet de répétition de Hebb, un phénomène empirique démontrant l’apprentissage cumulatif de l’ordre sériel basé sur la sollicitation répétée de la mémoire sérielle (p. ex., voir Cumming, Page, & Norris, 2003). En parallèle, une autre forme d’apprentissage de séquences est démontrée dans le domaine procédural au travers de la tâche de temps de réaction sériel (TRS) (p. ex., Nissen & Bullemer, 1987), sans que la mémoire sérielle ne soit sollicitée explicitement.

Les paradigmes de Hebb et de TRS démontrent séparément l’avantage de la répétition incidente de l’ordre sur sa stabilisation en mémoire. Contrairement aux essais non répétés, les performances s’améliorent au cours des répétitions (c.-à-d., augmentation du rappel, diminution du temps de réaction). Deux formes d’apprentissage sont observées (voir Seger, 1994), hebbien et procédural, dans des tâches de nature différente (c.-à-d., de mémoire sérielle et perceptivo-motrice) et l’influence des mécanismes perceptivo-moteurs sur l’apprentissage hebbien reste floue. La présente étude propose d’engager un rapprochement des deux paradigmes pour répondre à la question suivante : L’apprentissage de séquences résulte-t-il d’un même processus joignant les mécanismes d’encodage et de récupération de l’ordre sériel? Pour ce faire, une tâche hybride, cognitivo-comportementale, combinant les tâches de Hebb et de TRS est développée. Les résultats observés permettront d’apporter une piste de réflexion pour une modélisation plus parcimonieuse de la mémoire permanente de l’ordre.

Apprentissage de l’ordre : Deux paradigmes porteurs mais insuffisants

La répétition des informations est essentielle à leur conservation en mémoire. À la fin du XIXème siècle, Hermann Ebbinghaus, le pionnier de l’étude expérimentale de la mémoire humaine, montre que la répétition permet de lutter contre l’oubli (voir Roediger, 1990). Malgré les critiques qui lui ont été adressées, sa méthodologie impulsera les futures études en psychologie, entre autres

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sur la mémoire et l’apprentissage de l’ordre. L’examen de l’effet de répétition sur l’apprentissage de séquences trouve aussi ses origines en psychobiologie. Les réflexions de K. S. Lashley, étudiant de J. B. Watson, sur le comportement sériel, dépasseront le courant du béhaviorisme strict mais ne seront publiées qu’en 1951 (Lashley, 1951). La publication de leur formalisation sous le nom de « théorie générale de l’apprentissage » sera devancée par D. O. Hebb (Hebb, 1949) qui, douze ans plus tard, tentera de vérifier ses hypothèses en utilisant la tâche de rappel sériel communément utilisée en psychologie pour étudier la mémoire temporaire (Hebb, 1961). Par la suite, plusieurs chercheurs reprendront le paradigme de Hebb pour examiner les mécanismes sous-tendant l’effet de répétition sur l’apprentissage de séquences (voir Page & Norris, 2009b). Parallèlement, le paradigme TRS permettra d’étudier l’apprentissage implicite basé cette fois sur la répétition d’expériences perceptivo-motrices (voir Abrahamse, Jiménez, Verwey, & Clegg, 2010). Malgré la ressemblance des phénomènes empiriques issus de ces deux contextes expérimentaux, des divergences existent quant à certaines de leurs propriétés. La répétition d’un ordre particulier est manipulée à l’insu des participants durant les tâches de rappel sériel et de TRS mais l’interprétation des résultats relatifs à l’apprentissage de l’ordre pourrait être limitée au contexte empirique d’appui. Les résultats observés à partir de ces deux tâches ne permettent pas de savoir si l’apprentissage de séquences est réellement issu de deux processus distincts de traitement de l’ordre. La méthodologie employée jusque-là bénéficie à la compréhension des rôles de l’encodage et de la récupération de l’ordre dans des contextes spécifiques d’apprentissage mais contraint l’examen de leur implication conjointe ce pourquoi une approche hybride est proposée dans cette étude.

Effet de répétition dans les paradigmes de Hebb et de TRS

L’étude de Hebb (1961) est motivée par ses hypothèses antérieures sur la base physiologique de l’apprentissage (Hebb, 1949; voir aussi Lashley, 1951). La règle de Hebb stipule que lorsque deux neurones qui, excités simultanément, déchargent ensembles, une connexion synaptique s’établit entre eux (voir « synapse de Hebb »), la coopération entre différentes synapses résultant en une « assemblée cellulaire » (Hebb, 1949). Théoriquement, l’expérience avec un ordre particulier induirait une activité électrique à court terme dans les assemblées cellulaires existantes qui reflèterait sa conservation temporaire en mémoire. Cette trace serait transférée en mémoire permanente si l’expérience est répétée. Selon la « théorie générale de l’apprentissage » (Hebb, 1949), la mémorisation à long terme d’une série d’événements serait un processus cumulatif émergeant du renforcement des modifications synaptiques, conditionnelle à l’exposition répétée à l’ordre et serait contrainte par la présence de bruit. Or l’apprentissage de séquences a lieu malgré les expériences avec des séries interférentes durant la tâche de Hebb, une tâche de mémoire sérielle durant laquelle l’ordre des séries est manipulé à l’insu du participant (Hebb, 1961).

Le paradigme initial de Hebb propose une tâche de rappel sériel immédiat audio-verbale. Une série de neuf chiffres est présentée au participant qui a pour objectif de la mémoriser afin de

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rappeler oralement tous les chiffres dans leur ordre exact d’apparition après un bref délai (Hebb, 1961). Durant l’entraînement et sans que le participant ne soit au courant, une série se répète (c.-à-d., ordre identique des chiffres à chaque répétition) à fréquence régulière, tous les trois essais, tandis que les autres séries sont aléatoires (c.-à-d., ordre aléatoire des chiffres à chaque essai non répété). Hebb observe que la précision du rappel augmente dès la deuxième répétition et ne cesse de s’améliorer progressivement au cours des essais répétés (8) et ce, malgré la présence de séquences interférentes (16) pour lesquelles les performances reflètent un effet général de la pratique (Hebb, 1961). Connu sous le nom d’effet de répétition de Hebb (ERH), ce phénomène contredisant les prédictions initiales de Hebb (Hebb, 1949) est fondamental pour la mémoire et l’apprentissage. Malgré la présence de bruit, l’exposition répétée à un ordre a un effet cumulatif sur son apprentissage et entraînerait une modification structurale relativement permanente de sa trace en mémoire (Hebb, 1961). La présence de séquences aléatoires n’empêche pas l’amélioration du rappel de l’ordre au cours de ses répétitions ce qui reflète la stabilisation progressive de sa représentation en mémoire permanente (Hebb, 1961). Ce phénomène se retrouve pour l’apprentissage moteur treize années plus tard (Pew, 1974).

L’apprentissage de séquences est aussi étudié au travers du paradigme de TRS, apprécié en psychologie pour l’étude de l’apprentissage implicite et de la mémoire procédurale. C’est à partir de ce paradigme que Nissen et Bullemer (1987) découvrirent un phénomène ressemblant à l’ERH. Ces chercheurs examinaient l’influence de l’attention sur l’apprentissage au cours d’une tâche perceptivo-motrice réalisée simultanément avec une tâche de comptage. Plus important pour la présente recherche, leur paradigme permet de constater une autre forme d’apprentissage de l’ordre. Une tâche de TRS visuo-spatiale à quatre choix est utilisée. Le but du participant est de détecter une cible, un astérisque, présentée sur un écran d’ordinateur et d’y réagir le plus rapidement possible en appuyant sur la touche correspondant à sa position spatiale. Plusieurs cibles sont présentées et varient selon quatre positions horizontales, chacune d’elles étant appariée à une des quatre touches du clavier1. Le temps de réaction (TR), ou temps mis pour appuyer sur la touche dès l’apparition de la cible, est mesuré. L’ordre d’apparition des cibles est manipulé à l’insu du participant. Un pattern de dix cibles (p. ex., DBCACBDCBA, chaque lettre représentant une position spatiale) se répète continuellement au cours de huit blocs d’essais dans la condition répétée (c.-à-d., position spatiale des cibles identique; 80 répétitions au total) contrairement à la condition aléatoire (c.-à-d., positions spatiales des cibles aléatoires; 80 ordres aléatoires). Les résultats montrent que les performances s’améliorent monotonement pour le pattern répété. Le TR médian, calculé pour chaque bloc, diminue davantage dans la condition répétée (164 ms, 50%) que dans la condition non répétée (32 ms) (Nissen & Bullemer, 1987). Ces résultats attestent de l’apprentissage du pattern répété qui serait sous-tendu par la mémoire procédurale, laquelle

1 La touche A correspond à la position la plus à gauche, la touche B à la deuxième position en partant de la

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permettrait la conservation à long terme des chaînes de réponses ou des connexions stimulus-réponse (voir Tulving, 1985).

Pour conclure, la redondance d’une série d’items, verbaux et spatiaux dans les paradigmes initiaux de Hebb (1961) et de Nissen et Bullemer (1987) respectivement, bénéficie à son apprentissage. Les tâches de Hebb et de TRS sont deux outils de laboratoire opérationnels pour étudier l’apprentissage de l’ordre et pertinents puisque proches des situations réelles (Abrahamse et al., 2010; Page & Norris, 2009a). Par exemple, Page et Norris (2009a) considèrent l’ERH comme un analogue de laboratoire à l’apprentissage du langage. Toutefois, ces deux modes d’apprentissage, hebbien et procédural, sont-ils réellement indépendants ou fonctionnent-ils conjointement? Le cloisonnement des deux approches expérimentales ne biaise-t-il pas l’interprétation des résultats, ces derniers ne reflétant qu’une partie de la réalité de l’apprentissage de séquences? Depuis ces deux études pionnières, le nombre de travaux utilisant les tâches de Hebb et de TRS n’a cessé de croître pour examiner la mémoire sérielle et l’apprentissage implicite mais l’intérêt de ces deux paradigmes pour la compréhension des mécanismes sous-tendant l’apprentissage de l’ordre reste relativement récent et surtout, jusqu’à présent, l’apprentissage de séquences est étudié séparément au travers de ces deux approches expérimentales. La présente étude vise le rapprochement de ces deux paradigmes expérimentaux pour tenter de soulever un probable mode hybride d’apprentissage de l’ordre sériel.

Robustesse et transcendance de l’apprentissage de séquences

Quel que soit le contexte, hebbien ou procédural, la redondance de l’ordre produit un effet bénéfique et robuste sur son apprentissage. L’avantage de la répétition d’une séquence sur sa conservation permanente en mémoire est un phénomène commun aux deux paradigmes et qui a été reproduit à maintes reprises à partir de celui de Hebb (p. ex., Couture & Tremblay, 2006; Cunningham, Healy, & Williams, 1984; Fendrich, Healy, & Bourne, 1991; Hitch, Flude, & Burgess, 2009; Horton, Hay, & Smyth, 2008; McKelvie, 1987; Melton, 1963; Page, Cumming, Norris, McNeil, & Hitch, 2013; Tremblay & Saint-Aubin, 2009) et de celui de TRS (p. ex., Cohen, Ivry & Keele, 1990; Curran & Keele, 1993; Deroost & Soetens, 2006; Destrebecqz & Cleeremans, 2001; Howard, Mutter, & Howard, 1992; Kim, Johnson, Gillepsie, & Seidler, 2014; Remillard, 2003; Stadler, 1995; Willingham, Nissen, & Bullemer, 1989). La répétition se produisant à l’insu des participants, les résultats attestent d’un effet de répétition qui résulte en un apprentissage dit implicite dans les paradigmes de Hebb et de TRS (Seger, 1994). D’autres propriétés ressemblantes de l’apprentissage de séquences sont observées entre les deux paradigmes. Entre autres, l’effet de répétition se produit pour des stimuli de nature variée exposés selon diverses modalités et pour des séquences de longueurs variables.

La plupart des études réalisées dans le paradigme de Hebb présentent des stimuli verbaux, majoritairement des chiffres de un à neuf comme dans la recherche initiale de Hebb (p. ex., Bower

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& Winzenz 1969; Hebb, 1961; Hitch et al., 2009; McKelvie, 1987; Melton, 1963; Weitz, O'Shea, Zook, & Needham, 2011), mais aussi des lettres (p. ex., Cunningham et al., 1984; Hitch, Fastame, & Flude, 2005), des mots (p. ex., Page et al., 2013; Sechler & Watkins, 1991). Par contre, peu de travaux ont utilisé une présentation auditive des stimuli suivie d’une réponse orale (p. ex., Baddeley & Warrington, 1970; McKelvie, 1987). Les stimuli sont essentiellement présentés selon la modalité visuelle et la réponse requise est motrice et généralement manuelle (p. ex., Cumming et al., 2003; Fendrich et al., 1991; Horton et al., 2008; Page et al., 2006; Weitz et al., 2011; Winzenz, 1972). Dans ce paradigme, l’apprentissage de séquences a longtemps été considéré comme étant un processus dépendant de la mémoire sérielle verbale, orientant les propositions de modèles formels sur la base du fonctionnement de la boucle phonologique de la mémoire de travail (voir Page & Norris, 2009b). Mais l’ERH ne se limite pas qu’aux stimuli verbaux et s’étend à des séquences de nature variée ce qui remet en question ce postulat. Par exemple, l’ERH a récemment été retrouvé avec du matériel olfactif (Johnson, Cauchi, & Miles, 2013), des séquences d’images (Page, Cumming, Norris, Hitch, & McNeil, 2006) et de visages (Horton et al., 2008) et pour des séquences spatiales (p. ex., Couture & Tremblay, 2006; Gagnon, Bédard, & Turcotte, 2005; Guérard, Saint-Aubin, Boucher, & Tremblay, 2011; Tremblay & Saint-Saint-Aubin, 2009; Turcotte, Gagnon, & Poirier, 2005). Couture et Tremblay (2006) ont montré pour la première fois que l’ERH transcende la nature du matériel à apprendre et ce, à partir d’une variante de la tâche de Hebb durant laquelle les participants mémorisaient des séries de sept positions spatiales matérialisées par des points présentés visuellement à l’écran d’un ordinateur afin de reconstruire leur ordre après un bref délai. Les résultats de leur étude montrent que la reconstruction de l’ordre spatial est de plus en plus précise au cours des répétitions, dès le début de l’entraînement et pour toutes les positions sérielles, comparativement à l’amélioration peu prononcée aux essais aléatoires (Couture & Tremblay, 2006). Cette étude est d’un intérêt précieux pour la compréhension des mécanismes à l’œuvre durant l’apprentissage de l’ordre. En démontrant les caractéristiques similaires de l’apprentissage de séquences verbales et spatiales, elle est une première étape dans la légitimation de la nécessité de reconsidérer de façon plus parcimonieuse la modélisation de l’apprentissage de l’ordre proposée jusque-là. La représentation stabilisée en mémoire à long terme (MLT) au cours des répétitions ne serait pas forcément d’ordre phonologique.

Contrairement au paradigme de Hebb, la quasi-totalité des études réalisées dans le paradigme de TRS présente des stimuli spatiaux, généralement des astérisques variant sur le plan horizontal selon quatre positions (p. ex., Curran & Keele, 1993; Howard et al., 1992; Perruchet & Amorim, 1992; Nissen & Bullemer, 1987; Stadler, 1995; Willingham et al., 1989; Willingham, Wells, Farrell, & Stemwedel, 2000) mais aussi des points (p. ex., Deroost, Zeeuws, & Soetens, 2006; Deroost & Soetens, 2006; Destrebecqz & Cleeremans, 2001). De la même manière que le mode hebbien, l’apprentissage dans le paradigme de TRS transcende la nature de l’ordre répété et, bien que peu de travaux présentent des stimuli verbaux (p. ex., Hartman, Koptman, & Nissen, 1989; Westwater, McDowall, Siegert, Mossman, & Abernethy, 1998), se retrouve aussi dans ce domaine

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ainsi que pour des stimuli tactiles (p. ex., Abrahamse, Lubbe, & Verwey, 2008; Kim et al., 2014). Par exemple, l’étude de Kim et de ses collaborateurs (2014) montre que l’apprentissage du pattern répété se produit quelle que soit la nature des stimuli, visuelle ou tactile. La réponse requise est principalement manuelle dans la tâche de TRS comme dans la tâche de Hebb mais l’apprentissage de la séquence répétée se produit aussi lorsque la réponse est orale (Goschke & Bolte, 2007; Hartman et al., 1989) ou oculaire (p. ex., Kinder, Rolfs, & Kliegl, 2008).

Outre ces similitudes, l’effet de répétition est observé pour des séquences répétées de longueurs variables dans les deux contextes. Dans le paradigme de Hebb, la longueur de la séquence varie entre quatre (p. ex., Johnson et al., 2013) et douze items (p. ex., Hitch et al., 2009; Winzenz, 1972) mais les séquences comprennent généralement sept (p. ex., Couture & Tremblay, 2006, Expérience 2; Page et al., 2013) ou neuf items (p. ex., Bower & Winzenz, 1969; Hebb, 1961; McKelvie, 1987; Schwartz & Bryden, 1971; Weitz et al., 2011). Dans le paradigme de TRS, le pattern répété comprend entre cinq (p. ex., Keele, Jennings, Jones, Caulton, & Cohen, 1995) et 24 items (p. ex., Koch & Hoffman, 2000) mais il est composé de dix items dans la plupart des études (p. ex., Abrahamse et al., 2008; Nissen & Bullemer, 1987). Aussi, un seul ordre est répété généralement mais l’apprentissage simultané de plusieurs ordres est une propriété commune aux deux modes d’apprentissage, procédural (p. ex., Stephan, Meier, Orosz, Cattapan-Ludewig, & Kaelin-Lang, 2009) et hebbien (Page et al., 2013; Saint-Aubin, Guérard, Fiset, & Losier, 2015).

Pour conclure, la redondance de l’ordre, quelle que soit sa nature, a un effet robuste sur son apprentissage. Les paradigmes de Hebb et de TRS permettent de montrer que le rappel immédiat d’une série répétée et la production motrice d’un pattern redondant conduisent à sa stabilisation à long terme mais selon la tâche, l’accent est mis sur des processus distincts de traitement de l’ordre. Il semble indispensable de repenser l’approche méthodologique de l’étude de l’apprentissage de séquences pour tenter d’en avoir une compréhension plus globale.

Divergences quant aux caractéristiques de la répétition

Plusieurs différences méthodologiques existent entre les paradigmes de Hebb et de TRS dont les aspects qualitatif et quantitatif de la répétition (p. ex., chevauchement et longueur des chaînes). La longueur de la séquence est généralement plus élevée dans le second. Le nombre possible d’éléments de l’ensemble est équivalent au nombre d’items que comprend la séquence à rappeler dans le paradigme de Hebb (p. ex., neuf éléments sont tirés aléatoirement parmi un ensemble de neuf possibilités) tandis que le nombre d’items par séquence est supérieur au nombre d’éléments de l’ensemble d’où ces items sont extraits dans le paradigme de TRS (p. ex., dix éléments sont tirés aléatoirement parmi quatre possibilités). Aucun item n’est répété au sein d’une même séquence dans le premier, chacun d’eux occupant une position sérielle différente, alors que dans le deuxième, le même élément se répète une à trois fois, autrement dit un même item peut occuper des positions sérielles différentes dans une même série. Dans le paradigme de TRS, les

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deux types de patterns, répété et non répété, sont construits à partir d’un même ensemble de positions spatiales ce qui ne semble pas perturber l’apprentissage du pattern redondant tandis que la similitude entre la séquence répétée et les séquences non répétées réduirait l’apprentissage hebbien dans le domaine verbal (p. ex., Melton, 1963; Page et al., 2013; mais voir Saint-Louis, Hughes, Saint-Aubin, & Tremblay, 2017). Dans le domaine spatial, l’ERH se produit lorsque l’ordre et la position spatiale des items varient mais aussi lorsque seul l’ordre est manipulé et donc que la série répétée et les séries non répétées se chevauchent, partagent des positions spatiales similaires (p. ex., Couture & Tremblay, 2006).

Une autre différence est que l’apprentissage de séquences est observé pour un nombre plus élevé d’expositions au signal dans le paradigme de TRS que dans le paradigme de Hebb, dix fois plus élevé dans l’étude de Nissen et Bullemer (1987) que dans l’étude de Hebb (1961) par exemple. Moins d’expositions à la séquence répétée semble nécessaire pour l’apprentissage hebbien. Finalement, la procédure de répétition de Hebb diffère fortement de celle retrouvée dans le paradigme de TRS qui s’apparente à une pratique bloquée. La répétition est distribuée régulièrement durant la tâche de Hebb. Elle se produit tous les trois (p. ex., Bower & Winzenz, 1969; Cumming et al., 2003; Hebb, 1961; McKelvie, 1987) ou quatre essais (p. ex., Couture & Tremblay, 2006; Guérard et al., 2011), tandis que deux ou trois ordres aléatoires bruitent le signal. L’étude de Melton (1963) montre que l’ERH est aboli lorsque plus de cinq séries non répétées sont présentées entre deux répétitions (mais voir Page et al., 2013, et Saint-Louis et al., 2017). Dans le paradigme de TRS, le même pattern se répète continuellement au cours de plusieurs blocs d’essais, les séquences s’enchaînent les unes à la suite des autres sans que leur début ni leur fin ne soient marqués. La diminution du TR plus importante dans la condition répétée que dans la condition aléatoire (p. ex., Nissen & Bullemer, 1987; Perruchet & Amorim, 1992), ou son augmentation soudaine lors du passage à un bloc aléatoire (p. ex., Hartman et al., 1989; Willingham, 1999), sont deux index permettant d’attester de l’apprentissage du pattern répété. Ce dernier se retrouve aussi lorsque la répétition se produit une fois sur deux tel que l’a démontré Stadler (1993) dans une étude où il tentait pour la première fois l’application de la procédure de répétition de Hebb dans le paradigme de TRS.

Pour conclure, les différences méthodologiques présentées précédemment contraignent l’analyse de la relation entre les deux types d’apprentissage de séquences, hebbien et procédural. Plus important, la nature de la tâche proposée dans les deux paradigmes fait l’objet d’une autre différence majeure.

Traitement de l’ordre sériel et nature de la tâche

Les tâches de Hebb et de TRS font partie des tâches de nature implicite utilisées en psychologie pour étudier la mémoire et l’apprentissage implicites respectivement (Seger, 1994). Tout se passe comme si l’apprentissage de l’ordre observé au travers de ces deux tâches était

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sous-tendu par deux mécanismes différents, de mémoire temporaire dans le premier cas et perceptivo-moteur dans le deuxième. L’état actuel de la littérature sur l’apprentissage de l’ordre ne permet pas de connaître la relation entre les opérations mnésiques et perceptives. Le rapprochement des tâches de Hebb et de TRS s’avère propice dans ce cadre mais requiert le dépassement d’une différence majeure inhérente aux tâches expérimentales elles-mêmes, à savoir la sollicitation de processus distincts de traitement de l’ordre (voir Tableau 1).

La tâche de Hebb est une tâche de mémoire temporaire, plus précisément de rappel sériel immédiat, qui implique la rétention d’un ordre durant sa présentation puis sa restitution après un bref délai. Les instructions fournies au participant insistent sur la précision de son rappel. Elles sollicitent explicitement le maintien temporaire de l’ordre en mémoire puis sa récupération pour pouvoir le reproduire avec exactitude. L’objectif du participant est donc de se souvenir de la série qui lui est présentée et de la restituer le plus précisément possible. L’apprentissage de l’ordre répété est évalué à partir de la précision de son rappel, laquelle reflète la qualité de sa récupération. Dans cette tâche, le participant est exposé à tous les items de la séquence avant le rappel mais le traitement perceptif de l’ordre n’est pas évalué. Les items sont présentés individuellement à une fréquence d’un item par seconde généralement dont la répartition on / off diffère légèrement selon que les items sont verbaux ou spatiaux, les seconds étant présentés plus longtemps (c.-à-d., 500/500 ms et 700/300 ms respectivement). Le rappel est généralement libre, l’identité de l’item et sa position sérielle étant toutes deux à restituer (p. ex., Cunningham et al., 1984; Hebb, 1961; McKelvie, 1987; Melton, 1963), mais peut prendre la forme d’une tâche de reconstruction où l’identité de l’item étant indicée, seul l’ordre est à reproduire (p. ex., Couture & Tremblay, 2006; Guérard et al., 2011; Johnson et al., 2013; Page et al., 2006; Parmentier, Maybery, Huitson, & Jones, 2008). Contrairement à la tâche de Hebb, le rappel de l’ordre n’est pas requis dans la tâche de TRS. Celle-ci sollicite son encodage et repose sur les processus perceptivo-moteurs. Le but est de réagir le plus rapidement possible à chaque item pris individuellement alors que les séquences s’enchaînent continuellement les unes à la suite des autres. Le début et la fin de la séquence ne sont pas délimités et le séquençage des cibles n’est pas indiqué dans les consignes, ces dernières insistant sur la rapidité de la réaction au stimulus spatial. L’objectif du participant est de détecter une cible visuelle présentée sur un écran d’ordinateur et d’appuyer sur la touche correspond à sa position spatiale le plus rapidement possible, le TR reflétant la durée du traitement sensoriel de la stimulation. Le traitement perceptif est ici le moteur de l’apprentissage de l’ordre. Chaque cible est disponible jusqu’à la réponse du participant, cette dernière déclenchant l’apparition de la cible suivante après 500 ms généralement (p. ex., Hoffmann & Koch, 1997; Mayr, 1996; Nissen & Bullemer, 1987).

Dans la tâche de TRS, l’accent est mis sur le processus d’encodage tandis que dans la tâche de Hebb il est mis sur le processus de récupération (voir Tableau 2). Cette différence est source de questionnements quant à l’interprétation de l’effet de répétition sur l’apprentissage de séquences et la relation des processus d’encodage et de récupération pour la mémorisation

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permanente de l’ordre. Aussi, selon la tâche, l’attention est portée sur la position spatiale de la cible (c.-à-d., TRS) ou à la fois sur l’identité de l’item et sa position sérielle (c.-à-d., Hebb). Les détails épisodiques de l’ordre sont disponibles dans la tâche de Hebb (c.-à-d., contexte spatio-temporel explicite) alors que seules ses composantes spatiales le sont dans la tâche de TRS (c.-à-d., contexte spatial explicite). Bien que considéré comme instrumental dans la tâche de Hebb, l’encodage de l’ordre spatial pourrait influencer les performances au rappel. Pour examiner cette possibilité, ces dernières devraient être analysées au regard des performances perceptivo-motrices réalisées en amont. Finalement, l’ordre est manipulé à l’insu du participant et l’apprentissage a lieu bien que les participants n’aient pas conscience de la répétition dans les paradigmes de TRS (p. ex., Nissen & Bullemer, 1987) et de Hebb (p. ex., Hebb, 1961). Toutefois, l’examen de ce dernier critère montre que l’influence de la conscience sur l’apprentissage de séquences diffère entre les deux paradigmes. La conscience de la répétition permettrait un meilleur apprentissage du pattern répété dans le paradigme de TRS (p. ex., Curran & Keele, 1993; Mayr, 1996; Willingham et al., 1989) tandis que l’apprentissage hebbien en serait indépendant (p. ex., Couture & Tremblay, 2006; Hebb, 1961; McKelvie, 1987; mais voir Guérard et al., 2011).

Les connaissances actuelles sur l’apprentissage de séquences sont donc fragmentées. La redondance d’un pattern particulier influence son encodage dans le paradigme de TRS, sa récupération dans le paradigme de Hebb, laissant supposer deux modes d’apprentissage, hebbien basé sur la récupération de l’ordre en mémoire et procédural basé sur son encodage. Plusieurs questions restent à élucider : Ces deux modes sont-t-ils réellement indépendants? Quelle influence la combinaison des opérations d’encodage et de récupération de l’ordre a-t-elle sur l’apprentissage de séquences spatiales? Malgré les apports respectifs de ces deux domaines d’études, aucun des deux ne permet d’établir que l’effet de répétition est isolé soit sur la phase d’encodage soit sur la phase de récupération de l’ordre, ou qu’il est combiné sur les deux. L’examen séparé de l’effet de répétition sur ces deux modes d’apprentissage contraint la compréhension de la mémoire de l’ordre et de l’apprentissage de séquences, et ne correspond pas à la réalité des activités sérielles pour lesquelles les aspects cognitifs (p. ex., se souvenir d’une série d’informations) et comportementaux (p. ex., produire une séquence musculaire) interagissent. Afin que l’examen du rôle conjoint de l’encodage et de la récupération durant l’apprentissage de séquences soit rendu possible, les consignes fournies au participant pour réaliser la tâche devraient nécessairement solliciter chacun de ces deux processus (voir aussi Neath & Surprenant, 2003).

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Tableau 1

Caractéristiques contextuelles de l’apprentissage de séquences hebbien et procédural

Apprentissage HEBBIEN (dominante cognitive)

PROCÉDURAL (dominante comportementale)

Tâche

Reconstruction sérielle immédiate (variante de la tâche de Hebb)

 Mémoire sérielle

Temps de réaction sériel  Perceptivo-motrice

Instructions

Mémoriser la série d’items spatiaux (points) présentée puis

reconstruire son ordre le plus précisément possible.

Détecter une cible dans l’espace et y réagir le plus rapidement possible

en appuyant sur la touche correspondant à sa position

spatiale.

Séquençage Explicite Non explicite

Traitement

perceptif Instrumental Objet

Rappel Requis Non requis

Répétition Incidente Incidente

Exposition à la répétition - Bruitée + Bloquée Traitement de

l’ordre Récupération Encodage

Tableau 2

Encodage et récupération de l’ordre dans les paradigmes de Hebb, de temps de réaction sériel (TRS) et dans un paradigme hybride

Paradigme

Mécanisme Hebb TRS Hybride

Encodage ? X X

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Apprentissage de l’ordre : Deux modes, hebbien et procédural, indépendants?

Pour conclure cette section, l’amélioration des performances aux essais répétés (c.-à-d., augmentation du rappel et diminution du TR dans les tâches de Hebb et de TRS respectivement) comparativement aux essais non répétés constitue la signature empirique de l’apprentissage de l’ordre redondant. En revanche, ce phénomène reste observé distinctement au travers de deux protocoles expérimentaux qui, malgré leurs avantages (c.-à-d., simplicité, potentiel et pertinence), sont insuffisants pour comprendre le rôle conjoint des mécanismes sous-tendant l’apprentissage de séquences, dans le domaine spatial par exemple. Les interprétations issues des travaux réalisés à partir de ces deux paradigmes sont larges, contradictoires sur certains points, et surtout pourraient n’être que parcellaires et ne refléter qu’une partie de la réalité probable. Une des questions qui reste en suspend au terme de cette section est la suivante : L’apprentissage hebbien et l’apprentissage procédural sont-ils réellement indépendants ou procèdent-ils d’un mécanisme commun de mémorisation de l’ordre sériel combinant les processus d’encodage et de récupération? Les paradigmes de Hebb et de TRS devraient être rapprochés, plus particulièrement la tâche proposée devrait permettre d’examiner conjointement le rôle des mécanismes d’encodage et de récupération de l’ordre afin de tendre vers un modèle unifié de l’apprentissage de séquences.

Mémoire et apprentissage de l’ordre : Approches théoriques

Cette section vise à présenter les conceptions théoriques de l’apprentissage de séquences dans les paradigmes de Hebb et de TRS. D’une part, trois grandes formes d’apprentissage (perceptif, moteur, perceptivo-moteur) font l’objet de débats dans ces deux pans de la littérature. Déterminer la nature des représentations acquises constitue un défi encore non résolu. D’autre part, le cadre théorique des travaux réalisés dans le paradigme de Hebb est principalement basé sur des modèles formels de mémoire sérielle, associatifs (de chaining et positionnel) et ordinaux, qui divergent selon le mécanisme de codage de l’ordre, tandis que celui des travaux réalisés avec le paradigme de TRS repose sur des modèles plus généraux d’apprentissage implicite controversés selon le niveau d’abstraction de la représentation qu’ils impliquent et le mécanisme qui le sous-tend (fragmentation, réseau neuronal).

Représentation et niveaux de traitement de l’ordre : Perception et production

La nature des représentations acquises durant l’apprentissage de séquences fait l’objet de controverses autant pour les études basées sur le paradigme de Hebb que celles utilisant le paradigme de TRS. Une question reste en suspend, à savoir est-ce que l’apprentissage de séquences résulte de la mise en place d’une trace perceptive ou motrice de l’ordre en mémoire permanente? Deux hypothèses principales se retrouvent de façon similaire dans les débats théoriques (voir Abrahamse et al., 2010; Guérard et al., 2011). Globalement, deux formes d’apprentissage sont envisagées, l’une dépendante du traitement au niveau du stimulus, l’autre

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dépendante du traitement au niveau de la réponse. Pour une de ces hypothèses, l’apprentissage de séquences relèverait de l’étape d’encodage de la série de stimuli et résulterait en une représentation perceptive de l’ordre dans les paradigmes de Hebb (p. ex., Bower & Winzenz, 1969; Hebb 1961; O’Shea & Clegg, 2006) et de TRS (p. ex., Howard et al., 1992; Remillard, 2003, 2009). Cette hypothèse postule que l’apprentissage de séquences est perceptif, basé sur l’association inter-stimuli, ou apprentissage S-S. Plus précisément, le traitement de l’ordre serait dirigé par les caractéristiques perceptives des stimuli et la répétition de ces dernières renforcerait leurs associations résultant en un apprentissage cumulatif (Hebb, 1961). Ce type d’apprentissage mènerait à la stabilisation d’une trace perceptive de l’ordre redondant en mémoire par le biais d’une sollicitation répétée des opérations d’encodage relatives aux caractéristiques perceptives de cet ordre, rendant alors possible son apprentissage par sa seule observation (p. ex., Howard et al., 1992; Kalm & Norris, 2016). Tout au moins, la représentation perceptive de l’ordre pourrait être apprise indépendamment de la réponse motrice (p. ex., Mayr, 1996; Fendrich et al., 1991).

Selon l’autre hypothèse, l’apprentissage de séquences dépendrait de l’étape de production de la série de réponses dans les paradigmes de Hebb (p. ex., Cohen & Johansson, 1967; Couture, Lafond & Tremblay, 2008) et de TRS (p. ex., Hoffmann & Koch, 1997; Nattkemper & Prinz, 1997; Rüsseler & Rösler, 2000; Verwey & Clegg, 2005; Willingham, 1999; Willingham et al., 2000) et résulterait en une représentation motrice de l’ordre. L’apprentissage de séquences est ici moteur, reposant sur l’association entre les réponses motrices, ou apprentissage R-R. Il s’agit du modèle hypothétique dominant dans le paradigme de TRS et qui est appuyé par les résultats en neuropsychologie (p. ex., Bischoff-Grethe, Goedert, Willingham, & Grafton, 2004) et dans le domaine clinique (Doyon, 2008). Le traitement de l’ordre serait dirigé par les caractéristiques sensorimotrices des réponses aux stimuli, la répétition de celles-ci conduisant à un renforcement de leurs associations. Dans ce cas, l’apprentissage de séquences serait rendu possible grâce à la mémoire procédurale, cette dernière recouvrant l’ensemble des procédures sensorimotrices automatisées et réutilisées de façon inconsciente (Curran & Keele, 1993). Cette forme d’apprentissage mènerait à la stabilisation d’une trace motrice de l’ordre redondant grâce à la sollicitation répétée des procédures motrices relatives à cet ordre. Ici, la production de l’ordre est essentielle. Le rappel de la série est nécessaire pour son apprentissage dans le paradigme de Hebb (p. ex., Cohen & Johansson, 1967; Cunningham et al., 1984). Aussi, l’ERH classique, l’amélioration du rappel correct au cours des répétitions, s’étend aux erreurs. En effet, Couture, Lafond et Tremblay (2008) montrent un ERH des réponses erronées sur l’apprentissage ce qui renforce l’importance du rôle du rappel pour l’apprentissage de séquences. De même que dans le paradigme de TRS (p. ex., Stadler, 1993), la production de l’ordre serait essentielle pour sa mémorisation à long terme et résulterait en un apprentissage des séries de réponses répétitives, que ces dernières soient correctes ou erronées.

Jusque-là tout se passe comme si l’apprentissage de séquences dépendait soit uniquement des processus d’encodage sollicités lors de l’étape de perception de l’ordre soit uniquement des

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processus moteurs impliqués lors de sa production. Une troisième hypothèse envisage que la répétition des deux séquences, de stimuli et de réponses, contribue au transfert de la trace temporaire de l’ordre en mémoire permanente. Autrement dit, le traitement perceptif de l’ordre lors de l’exposition à la séquence ainsi que celui réalisé lors de sa production contribuent à sa stabilisation en mémoire. Le traitement de la série d’éléments opère aux niveaux perceptif et moteur et résulterait en un apprentissage parallèle (p. ex., Fendrich et al., 1991; Deroost & Soetens, 2006). Par exemple, l’étude de Deroost et Soetens (2006) menée dans le paradigme de TRS et inspirée des travaux de Mayr (1996), montre que les apprentissages perceptif et moteur peuvent avoir lieu indépendamment. Pour ces chercheurs, la perception de l’ordre et sa production influencent parallèlement l’apprentissage de séquences (voir aussi Abrahamse et al., 2008; Gheysen, Gevers, De Schutter, Van Waelvelde, & Fias, 2009). Plusieurs preuves empiriques appuient aussi l’hypothèse du rôle conjoint des opérations d’encodage de l’ordre et de sa production. Par exemple, les résultats observés par Oberauer et Mayer (2009) amènent une nuance à l’hypothèse selon laquelle la production de l’ordre lors du rappel est indispensable à son apprentissage. Leur étude montre que le rappel n’est pas la condition nécessaire pour que l’apprentissage de séquences ait lieu, celui-ci se produisant lorsque le rappel explicite de l’ordre n’est pas requis, mais y contribue de façon additive en renforçant l’ERH (Oberauer & Mayer, 2009). Pour conclure, le concept de dual-trace proposé par Estes (1997) va en quelque sorte dans le sens de cette dernière hypothèse. Deux traces mnésiques résulteraient de l’exposition à un stimulus, l’une basée sur ses caractéristiques perceptives (stimulus trace) et l’autre sur la réponse qui lui est apportée (response trace ou reaction trace). Les deux traces simultanément présentes en mémoire entreraient en compétition lors du rappel et le rapport de force entre les deux déterminerait la réponse fournie. Dans le cadre de l’apprentissage de séquences, ce concept serait utile pour expliquer comment les deux traces contribuent à la stabilisation de l’ordre en mémoire permanente aux cours de l’exposition répétée à l’ordre. Plusieurs modèles ont été proposés pour expliquer l’apprentissage de séquences dont certains sont une source d’intérêt théorique potentiellement avantageuse pour la présente étude.

Modélisation de la mémoire de l’ordre et apprentissage de séquences

Plusieurs modèles ont été élaborés depuis la fin du XXème siècle pour formaliser le fonctionnement menant à la conservation de la représentation de l’ordre en mémoire. Le cadre théorique des travaux réalisés dans le paradigme de Hebb est principalement basé sur une conception hiérarchique de l’ordre en mémoire et sur les modèles formels issus des théories de la mémoire de l’ordre tenant compte de son phénomène fondamental, les effets de positions sérielles (c.-à-d., primauté et récence). La conception positionnelle domine avec le postulat selon lequel le rappel de l’ordre est influencé par la position des items dans la série, l’apprentissage de séquences dépendant alors des positions sérielles (p., ex., Burgess & Hitch, 1999). Trois types de modèles,

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ordinal, de chaînage et positionnel, sont proposés selon le codage hypothétique de l’item (c.-à-d., gradient d’activation, associations item-item et position-item). L’ERH est communément expliqué par le Primacy Model (Page & Norris, 1998), le modèle de Burgess et Hitch (1999), le Start-End Model (Henson, 1998), le Feature Model (Nairne, 1990; Neath, 1999) et le modèle OSCAR (Brown, Preece & Hulme, 2000), non exhaustifs mais présentant plusieurs avantages. Certains d’entre eux pertinents pour cette étude sont présentés ici.

Les approches théoriques de l’apprentissage hebbien se sont appuyées sur le mécanisme associatif des modèles de chaînage dans lesquels chaque élément est stocké et récupéré à partir d’une chaîne de liens entre deux items et dont le premier sert de point d’ancrage pour le rappel du second (chaînage simple; mais voir le chaînage composé; Power-Set Model de Murdock, 1995). Avec la répétition, les associations entre les paires d’items se renforcent ce qui expliquerait l’augmentation du rappel. Ce mécanisme reste limité pour deux raisons. Lorsque le même item est répété, celui-ci sert de point d’ancrage dans différentes paires ce qui contraint le rappel correct. De plus, une erreur entraîne la rupture de la chaîne et une succession d’autres erreurs bloquant l’apprentissage de séquences. Malgré tout, la composante associative du chaînage est transversale aux modèles de rappel sériel et se retrouve notamment dans les modèles positionnels qui, plutôt que des associations item-item, postulent que la mémoire de l’ordre repose sur les associations position-item. Ici, chaque item est récupéré à partir d’un indice positionnel, pouvant être un marqueur de début (Burgess & Hitch, 1999) ou de fin de séquence (Henson, 1998), ou un ensemble d’oscillateurs internes permettant de contextualiser la position des items (Brown et al., 2000). Par exemple, Burgess et Hitch (1999, 2006) postulent que la représentation de l’ordre résulte de l’encodage positionnel d’un item selon son contexte. Une étiquette positionnelle est attribuée à chaque item à partir d’un vecteur positionnel de contexte lequel serait responsable de l’apprentissage hebbien. Lors de la présentation, l’association entre chaque item et la représentation abstraite de sa position serait activée. La répétition renforcerait cette association tandis que le bruit entre deux répétitions le diminuerait. Ce modèle ne prend pas en compte le rôle de la production de la réponse mais sa composante vectorielle contexte-item étend son potentiel du domaine verbal au domaine spatial.

D’autres modèles positionnels ont été proposés comme le SIMPLE model (Scale-Invariant Memory, Perception and LErning model; voir Brown, Neath, & Chater, 2007; voir aussi Kelley, Neath, & Surprenant, 2013) où l’ordre est codé selon la dimension temporelle. Le rappel d’un item est déterminé par sa localisation, la distance temporelle entre les moments de sa présentation et de son rappel (c.-à-d., indice de récupération), autrement dit sa discrimination perceptive relative au temps. Par contre, l’explication de l’ERH est contrainte par la présence de traces multiples en mémoire. Le signal de contexte temporel est avantageux et utilisé dans le modèle OSCAR (OSCillator-based Associative Recall model; Brown et al., 2000). Selon ce modèle, le système procède d’une dynamique intrinsèque basée sur un ensemble d’oscillateurs endogènes dont la modification des sorties mène à une modification du contexte d’apprentissage au cours du temps et

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permet une représentation temporelle de l’ordre à plusieurs niveaux (c.-à-d., série complète et sous groupes) et de façon simultanée. La mémoire de l’ordre dépend d’un signal contextuel d’apprentissage différent pour chaque série d’items. Globalement, chaque item est associé à un signal de contexte temporel durant l’encodage et le rétablissement de son contexte d’apprentissage permet sa récupération. Plus spécifiquement, la combinaison d’oscillateurs permet la mise en place d’un contexte d’apprentissage dynamique lequel est rétabli pour rappeler l’ordre. Autrement dit, les états successifs de ce contexte sont générés et chacun est utilisé comme indice de rappel de l’item avec lequel il a été associé durant l’encodage. L’apprentissage d’une série d’items est rendu possible par les associations entre les vecteurs représentant chaque item et ceux représentant le contexte d’apprentissage au moment de leur présentation. En résulte un ensemble d’associations item-contexte bidirectionnelles avantageuses permettant la récupération d’un item à partir de son contexte d’apprentissage mais aussi de ce dernier à partir de la représentation de l’item. Le modèle OSCAR rend compte de différents phénomènes de la mémoire sérielle dont la mémorisation permanente de l’ordre sériel. Aussi, son avantage tient à la dynamique oscillatoire interne qui, lorsque liée à des événements sériels externes, permet l’émergence de séquences comportementales. Il reste un modèle positionnel qui, avec l’apport d’ajustements, pourrait expliquer l’ERH. Par exemple, la notion d’activation proposée dans les modèles ordinaux et permettant d’expliquer le rappel ordonné pourrait s’avérer particulièrement utile.

Le codage de l’ordre selon le gradient d’activation associé à l’item est une alternative des modèles ordinaux (Hitch et al., 2005; Page & Norris, 1998) au regard du codage positionnel. Le Primacy Model (Page & Norris, 1998, 2009a,b) postule que chaque item de la série présente un gradient d’activation lequel détermine la sélection de l’item à rappeler. La probabilité de rappeler un item correctement est d’autant plus forte que son niveau d’activation est élevé. Ce dernier décroît selon la position de l’item dans la série. Ainsi, le premier item est un point d’ancrage pour le rappel de la séquence puisqu’il possède la plus forte activation. Une fois rappelé, l’item est supprimé et l’item suivant qui a la plus forte activation est sélectionné puis rappelé. Récemment, les chercheurs ont proposé que chaque nouvelle séquence soit associée à un nouveau groupe cohérent d’items (chunk). La répétition d’une séquence renforcerait sa représentation et favoriserait son rappel en entraînant l’activation régulière du même groupe. Ce mécanisme permettrait de prédire l’apprentissage cumulatif dans le paradigme de Hebb (Page & Norris, 2009a,b). Aussi, le marquage du début de la série par le premier item (voir aussi Burgess & Hitch, 1999) expliquerait la disparition de l’ERH lorsque les premiers items de la séquence répétée sont changés à chaque répétition (Schwartz & Bryden, 1971). La structure de la série présentée est déterminante dans le Primacy Model (Page & Norris, 1998) et dans le modèle de Burgess et Hitch (1999). La similitude de l’indice pour deux items différents crée une confusion et la consolidation de l’ordre est rendue difficile par la modification de la représentation à chaque essai. Au contraire, le modèle OSCAR présente l’avantage d’un mécanisme de sériation basé sur une dynamique intrinsèque permettant un

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fonctionnement autonome du système. La correspondance d’une séquence externe et de son pattern d’oscillations interne pourrait contribuer à la stabilisation de l’ordre dans le modèle OSCAR.

Pour finir, les modèles de réseaux neuronaux (neural-network models) et de fragmentation (fragment-based models) sont deux grandes catégories de modèles d’actualité dans le paradigme de TRS. Globalement, l’apprentissage implicite résulterait d’un mécanisme d’amorçage complexe et dépendrait de l’expérience continue dans la tâche (Cleeremans, Destrebecqz, & Boyer, 1998). Plus particulièrement, le modèle de réseau récurrent simple (simple-recurrent-network model) d’Elman (1990) a été appliqué à la tâche de TRS (Cleeremans & McClelland, 1991). Il s’agit d’un modèle de rétro-propagation selon lequel des connexions récurrentes se forment au cours de l’apprentissage entre les unités cache (hidden units) et de contexte (context units). Le modèle est de plus en plus sensible au contexte temporel des items successifs. Grâce aux représentations internes développées avec l’expérience dans la tâche, ce mécanisme permettrait d’extraire la structure temporelle des items. Aussi, l’extraction de la structure temporelle redondante mènerait à une diminution progressive du TR qui reflèterait l’apprentissage de la séquence. Plus précisément, la répétition permettrait l’enrichissement progressif des unités ce qui favoriserait la prédiction des événements (Cleeremans & McClelland, 1991). La dimension temporelle de l’item est essentielle comme dans certains modèles positionnels (p. ex., Brown et al., 2000; Burgess & Hitch, 1999) mais aucun mécanisme permettant la représentation de l’ordre n’est inclu.

Conclusion : Vers une théorie unifiée de l’apprentissage de séquences

Perception et production de l’ordre reposent sur sa représentation en mémoire mais la nature de celle-ci reste à déterminer. La perspective d’une représentation sensori-motrice devrait être davantage étudiée notamment au travers d’une tâche de mémoire sérielle où l’étape d’encodage serait prise en considération. Aussi, la conception unidimensionnelle de la formation et de la stabilisation de la représentation de l’ordre en mémoire dans le paradigme de TRS reste éloignée des modèles de rappel sériel d’appui dans le paradigme de Hebb. Dans le cas où l’apprentissage de séquences observé distinctement dans les paradigmes de Hebb et de TRS relève d’un même mécanisme, un rapprochement de ces approches théoriques devrait s’opérer pour tendre vers une théorie unifiée. Par exemple, si l’extraction de la structure temporelle de l’ordre durant son encodage bénéficie à sa récupération en mémoire alors les composantes temporelle et contextuelle pourraient être mises en relation pour une modélisation plus parcimonieuse de l’apprentissage de séquences.

Apprentissage de l’ordre et nécessité d’un paradigme hybride

Quel que soit le paradigme expérimental d’appui pour étudier l’apprentissage de séquences, Hebb ou TRS, un phénomène ressemblant est constaté : la répétition de l’ordre se produisant à l’insu des participants bénéficie à son apprentissage. Une question se pose alors :

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Ces deux modes d’apprentissage de l’ordre, hebbien et procédural, reflètent-ils deux pans d’une même réalité? Autrement dit, sont-ils réellement indépendants ou procèdent-ils d’un mécanisme similaire de mémorisation de l’ordre sériel? Les études menées séparément à partir de ces deux paradigmes ne permettent pas de répondre à cette question. En effet, les tâches de Hebb et de TRS sollicitent des processus distincts de traitement de l’ordre. La première met l’accent sur la récupération de l’ordre répété en mémoire tandis que la deuxième repose sur l’encodage de la série redondante. La présente étude vise à engager une réconciliation des deux paradigmes à partir d’une approche hybride de l’apprentissage de séquences combinant les particularités méthodologiques des protocoles de Hebb et de TRS. Les résultats apporteront une piste de réflexion quant au rapprochement des approches théoriques de l’apprentissage de séquences.

L’objectif de cette recherche est de vérifier l’hypothèse selon laquelle un même processus de mémorisation est responsable de l’apprentissage de séquences dans les domaines cognitif et comportemental au travers de l’examen de l’influence de la répétition selon la nature de la tâche. L’argument majeur en faveur de cette hypothèse est que la redondance de l’ordre influence son encodage et sa récupération. Un effet de répétition robuste se retrouve dans les deux paradigmes quelle que soit la nature des informations à apprendre, notamment dans le domaine spatial. Les performances de mémoire sérielle (Couture & Tremblay, 2006; Hebb, 1961) et perceptivo-motrices (Nissen & Bullemer, 1987) s’améliorent progressivement aux essais répétés comparativement aux essais aléatoires. De plus, l’étude de Stadler (1993) montre un effet de répétition dans une tâche de TRS où une séquence est répétée, non pas de façon bloquée comme cela est typiquement le cas, mais régulièrement, une fois sur deux. Le deuxième argument relève des activités visuo-motrices durant la tâche de Hebb. Par exemple, l’étude de Saint-Aubin, Tremblay et Jalbert (2007) montre que les mouvements oculaires effectués durant l’encodage de l’ordre contribuent aux performances de mémoire immédiate sans les déterminer. Dans le paradigme de TRS, plusieurs chercheurs montrent l’apprentissage de séquences oculomotrices (p. ex., Albouy & coll., 2006; Kinder et al., 2008) mais ce dernier n’est pas vérifié par une tâche de rappel sériel. Dans un premier temps, il s’agira de vérifier la présence de l’effet de répétition dans une tâche de nature hybride. De plus, dans le cas où un mécanisme identique relevant de la fusion des traitements de l’ordre à l’encodage et à la récupération sous-tend l’apprentissage de séquences, nous nous attendons à une amélioration plus prononcée des performances au cours des répétitions dans la tâche hybride, mettant l’accent à la fois sur les phases de codage et de décodage de l’ordre répété, comparativement à une tâche de Hebb classique. Dans le cas contraire, l’inscription sensorimotrice de l’ordre répété ne devrait pas influencer l’ampleur de l’effet de Hebb. La signature de la mémoire sérielle devrait être conservée, autrement dit les effets de positions sérielles (c.-à-d., primauté et récence) devraient être observés dans cette tâche.

Afin de tester ces hypothèses, la présente étude est menée dans le domaine spatial. La tâche de points, une version visuo-spatiale de la tâche de rappel sériel immédiat verbal (voir Jones, Farrand, Stuart, & Morris, 1995) est utilisée. Cette tâche est avantageuse puisqu’elle ne permet pas

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la mise en place de stratégies facilitant la mémorisation de l’ordre (c.-à-d., recodage verbal, configurations; pour une discussion de ses avantages comparativement à la tâche des blocs de Corsi, voir Couture & Tremblay, 2006). Plus important, cette étude propose une tâche hybride impliquant à la fois les processus d’encodage et de récupération de l’ordre. Plus précisément, une tâche de TRS donnant accès au traitement perceptivo-moteur des informations sérielles visuo-spatiales est implémentée à la tâche de reconstruction sérielle, une variante de la tâche de Hebb originale où seule la mémoire de l’ordre est testée (voir Couture & Tremblay, 2006). Aussi, l’ERH est une puissante démonstration de l’apprentissage de séquences et se retrouve dans le domaine spatial. Il constitue un cadre empirique pertinent pour la présente étude c’est pourquoi la procédure de répétition de Hebb est appliquée, autrement dit un ordre particulier se répète régulièrement au cours des essais expérimentaux. En définitive, l’effet de répétition est comparé dans trois tâches : une tâche de reconstruction sérielle, ou de mémoire immédiate (c.-à-d., à dominante cognitive et mettant l’accent sur la récupération de l’ordre), une tâche de TRS, ou perceptivo-motrice (c.-à-d., à dominante comportementale et mettant l’accent sur l’encodage de l’ordre), et une tâche hybride, ou perceptivo-motrice et de mémoire immédiate (c.-à-d., cognitivo-comportementale sollicitant à la fois l’encodage de l’ordre et sa récupération). L’hypothèse principale de cette étude est qu’un effet de répétition de Hebb et une amélioration des performances perceptivo-motrices se retrouvent conjointement en contexte hybride d’apprentissage (c.-à-d., amélioration de la reconstruction et diminution du TR plus prononcées au cours des répétitions du même ordre comparativement aux essais non répétés). L’avantage d’un tel contexte pourrait se traduire par l’accentuation de l’ERH sous l’influence du traitement perceptivo-moteur de l’ordre répété réalisé en amont de sa récupération en mémoire.

Figure

Figure 1. Représentation schématique de la tâche TRS.
Figure 2. Représentation schématique de la tâche de reconstruction.
Figure 3. Représentation schématique de la tâche hybride.
Figure 4. Proportion de reconstruction correcte en fonction du bloc d'essais (1 à 3), de la séquence  présentée (répétée, non répétée) et de la position sérielle (1 à 7) pour les groupes Reconstruction  (panneaux  A)  et  Hybride  (panneaux  B)
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