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Dynamique des activités humaines en mer côtière. Application à la mer d'Iroise

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Academic year: 2021

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HAL Id: tel-00010788

https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00010788

Submitted on 26 Oct 2005

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Dynamique des activités humaines en mer côtière.

Application à la mer d’Iroise

Matthieu Le Tixerant

To cite this version:

Matthieu Le Tixerant. Dynamique des activités humaines en mer côtière. Application à la mer d’Iroise. Géographie. Université de Bretagne occidentale - Brest, 2004. Français. �tel-00010788�

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UNIVERSITÉ DE BRETAGNE OCCIDENTALE

INSTITUT UNIVERSITAIRE EUROPEEN DE LA MER

Laboratoire Géomer (LETG UMR 6554 CNRS)

THESE

Discipline : Géographie Présentée par :

Matthieu Le Tixerant

DYNAMIQUE DES ACTIVITES HUMAINES

EN MER COTIERE

APPLICATION A LA MER D’IROISE

Sous la direction de :

François Cuq? et Françoise Gourmelon (Géomer LETG UMR 6554 CNRS)

Soutenue le 4 juin 2004 devant la commission d’examen composée de :

Jean BONCOEUR Jean Pierre CORLAY

Marie Christine CORMIER-SALEM Guy FONTENELLE

Françoise GOURMELON Gérard VERON

Professeur à l’Université de Bretagne Occidentale Professeur émérite à l’Université de Nantes Directrice de recherche à l’IRD

Professeur à l’ENSAR

Chargée de recherche au CNRS (HDR) Chercheur à l’Ifremer

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UNIVERSITÉ DE BRETAGNE OCCIDENTALE

INSTITUT UNIVERSITAIRE EUROPEEN DE LA MER

Laboratoire Géomer (LETG UMR 6554 CNRS)

THESE

Discipline : Géographie Présentée par :

Matthieu Le Tixerant

DYNAMIQUE DES ACTIVITES HUMAINES

EN MER COTIERE

APPLICATION A LA MER D’IROISE

Sous la direction de :

François Cuq

? et Françoise Gourmelon (Géomer UMR 6554 CNRS)

Iwan Le Berre, tuteur (Géomer UMR 6554 CNRS)

Gérard Véron, tuteur (LRH Ifremer Brest)

Cette thèse a fait l’objet d’une convention de collaboration entre le laboratoire Géomer (LETG UMR 6554 CNRS) et le Laboratoire des Ressources Halieutiques de l’Ifremer (Centre de Brest).

Référence : CONTRAT N° 01 / 2 210 600 Y

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Remerciements

Ces remerciements ne peuvent que débuter par un hommage à François Cuq qui, de part ses qualités humaines et de chercheur, avait su me communiquer l’enthousiasme et l’énergie pour me lancer dans cette aventure. Françoise Gourmelon a bien voulu reprendre la direction de cette thèse malgré des circonstances difficiles aussi bien du point de vue psychologique que pratique. Je lui en suis très reconnaissant et l’en remercie également tout particulièrement.

Ce travail de recherche n’aurait pu se faire sans le soutien de l’équipe du laboratoire Géomer. Je tiens à remercier plus particulièrement : Jaqueline Giraudet pour son aide à la réalisation de la majorité des schémas et des cartes de cette thèse, ainsi que Mathias Rouan, musicien dans l’âme, mais sans qui le développement informatique de la méthode n’aurait pu se faire. De même, je dois remercier mes « aînés » : Cyril Tissot, qui s’est comporté comme un véritable frère franc-comtois et Iwan Le Berre, qui est décidément un grand « coach ».

Je tiens également à remercier chaleureusement Gérard Véron du LRH de l’Ifremer qui s’est toujours montré attentif et disponible pour m’aider à avancer dans mon travail. Doivent également être remerciés à l’Ifremer : Daniel Latruite, Pierre Arzel, Michael Drogou, Sylvain Bermell, Spyros Fifa, Claude Augris et Michel Paillard.

Que soient également remerciés la mission pour le parc national marin d’Iroise, le Comité Local des Pêches d’Audierne, les Affaires Maritimes de Douarnenez, la Direction Départementale de l’Equipement et la Préfecture maritime (sémaphores et CROSS-Corsen). Enfin, il y a ceux et celles qui m’ont accompagné et soutenu durant cette belle vie de thésard : la famille bien sûr, qui même éloignée, a su me faire parvenir des vibrations positives et chaleureuses, et, les ami(e)s et compagnons de route de mes différents périples finistériens....

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INTRODUCTION 4

PREMIERE PARTIE : CADRE GENERAL DE RECHERCHE 7

1 L’ESPACE DE REFERENCE 7

1-1 LITTORAL ET ZONE COTIERE 7

1-2 BANDE COTIERE 9

1-3 MER COTIERE 12

2 LES ACTIVITES HUMAINES EN MER COTIERE 15

2-1 LES NOTIONS D’USAGE ET D’ACTIVITE 15

2-2 DE NOMBREUSES ACTIVITES DANS UN MILIEU FRAGILE 17

2-2-1 Les impacts sur le milieu 17

2-2-2 Les conflits 19

3 LA GESTION INTEGREE DE LA ZONE COTIERE 22

3-1 LE CONCEPT DE GESTION INTEGREE DE LA ZONE COTIERE 23

3-1-1 Le cadre théorique : la démarche systémique 23

3-1-2 Application du principe d’intégration au système « zone côtière » 24 3-1-3 Définition de la Gestion Intégrée des Zones Côtières (GIZC) 25

3-2 UNE VOLONTE POLITIQUE GENERALE 25

3-2-1 Au niveau international 25

3-2-2 Au niveau européen 26

3-2-3 Au niveau national 28

3-3 LES DIFFICULTES DE MISE EN ŒUVRE PRATIQUE DE LA GIZC 31

3-4 LA NECESSAIRE PRISE EN COMPTE DES USAGES 32

4 MODELISATION DU DEROULEMENT DES ACTIVITES HUMAINES EN MER COTIERE 34

4-1 DEFINITIONS 34

4-2 LES PRINCIPALES APPROCHES DE MODELISATION 35

4-2-1 L’approche géosystémique 35

4-2-2 L’approche économiste 36

4-3 LA MODELISATION MULTI-AGENTS 38

4-4 LES SYSTEMES D’INFORMATION GEOGRAPHIQUE (SIG) 43

4-5 LES SIG COTIERS 46

4-5-1 Principaux intérêts 47

4-5-3 L’information de référence en zone côtière 48

4-5-5 Applications 52

4-6 LE COUPLAGE MODELES / SIG 54

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DEUXIEME PARTIE : APPROCHE METHODOLOGIQUE 59

1 LA PLATE-FORME DE MODELISATION DAHU 59

1-1 LES PRINCIPES FONDATEURS 60

1-1-1 Placer l’Homme au cœur du système 60

1-1-2 Favoriser une approche globale 61

1-1-3 Favoriser une approche déterministe 63

1-2 LA DEMARCHE CONCEPTUELLE 64

1-2-1 Une étape indispensable 64

1-2-2 Principales caractéristiques 65

1-3 LA PHASE DE SIMULATION 68

1-4 UNE PLATE-FORME GENERIQUE BASEE SUR DES MODULES DISTINCTS 70 2 LA DEMARCHE CONCEPTUELLE (MODULE ACTIVITES MARINES) 74

2-1 TYPOLOGIE DES ACTIVITES HUMAINES EN MER COTIERE 75

2-2 LES FILTRES SPATIO-TEMPORELS 77

2-2-1 Le filtre « contraintes environnementales » 77

2-2-2 Le filtre «contraintes réglementaires » 78

2-2-3 Le filtre « contraintes socio-économiques » 79

2-4 LE TERRITOIRE DE PRATIQUE POTENTIELLE 80

2-5 LE CALENDRIER DE PRATIQUE POTENTIELLE 83

2-6 LES STATISTIQUES 86

3 LE SIMULATEUR (MODULE ACTIVITES MARINES) 87 3-1 PREPARATION DES DONNEES D’ENTREE (PRE-PROCESSEUR) 89

3-2 SIMULATION (PROCESSEUR) 90

3-3 EXPLOITATION DES RESULTATS AU SEIN D’UN SIG (POST-PROCESSEUR) 91

4 CONCLUSION 93

TROISIEME PARTIE : APPLICATIONS EN MER D’IROISE 95

1 CONTEXTE GENERAL 95

1-1 UN ECOSYSTEME EXCEPTIONNEL FORTEMENT ANTHROPISE 96

1-2 LA NECESSITE D’UNE GESTION INTEGREE 100

1-2-1 Des autorités compétentes multiples 100

1-2-2 Les mesures de protection du milieu 102

1-2-3 Un projet de Parc National Marin 104

1-3 UN CONTEXTE SCIENTIFIQUE PORTEUR 106

1-3-1 L’Observatoire du Domaine Côtier 107

1-3-2 L’étude sur les activités humaines en mer d’Iroise (CEDEM / Ifremer) 107

(7)

2 DEMARCHE CONCEPTUELLE 111

2-1 INVENTAIRE ET SELECTION D’ACTIVITES 111

2-3 LA PECHE PROFESSIONNELLE 113

2-3-1 Le cadre juridique 113

2-3-2 Les informations existantes : des difficultés statistiques 117

2-3-3 Fiches de synthèse 122

2-4 LA NAVIGATION MARITIME 149

2-4-1 Le cadre juridique 149

2-4-2 Les informations existantes 151

2-4-3 Fiche de synthèse 153

2-5 LES EXTRACTIONS DE MATERIAUX 155

2-5-1 Le cadre juridique 155

2-5-2 Fiches de synthèse 155

3 QUELQUES EXEMPLES DE SIMULATION 159

3-1 ILLUSTRATION DU DEROULEMENT D’ACTIVITES 159

3-2 SCENARIOS « EVENEMENTIELS » 165 3-2-1 Naufrage 165 3-2-2 Eoliennes en mer 168 4 VALIDATION 173 5 CONCLUSION 174 CONCLUSION GENERALE 175 BIBLIOGRAPHIE 179

TABLE DES FIGURES 194

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INTRODUCTION

La singularité de la zone côtière par rapport aux espaces continentaux tient à sa position unique à l’interface entre l’atmosphère, la terre et l’océan. Cette situation est à l’origine de systèmes complexes et diversifiés, généralement très productifs, qui présentent un attrait important pour les sociétés humaines. Ainsi la mer côtière, frange marine de la zone côtière, est la partie des océans la plus exploitée par l’Homme. Actuellement, elle est le siège d’une multitude d’activités : navigation commerciale, pêches professionnelles, extraction de matériaux, forages off-shore, aménagement de récifs artificiels ou d’éoliennes en mer, aquaculture marine, rejets en mer, activités de loisir (tourisme, nautisme, pêche de loisir)… Ces activités interagissent plus ou moins fortement avec le milieu et peuvent avoir des impacts importants sur le fonctionnement et la qualité du système côtier en exploitant ses ressources biologiques et minérales, en engendrant des pollutions accidentelles ou chroniques liées à un trafic maritime croissant, en y installant des infrastructures parfois lourdes et en entraînant une surfréquentation de certains sites. L’augmentation des pressions exercées sur la mer côtière provoque également des interactions fonctionnelles entre les différentes activités humaines présentes, qui peuvent devenir plus où moins conflictuelles. La mer côtière est donc un espace de plus en plus convoité, où s’exerce une multitude d’intérêts, de contraintes et d’interdépendances qui rendent sa définition complexe et sa compréhension ardue (Catanzano & Thebaud, 1995).

Dans ce contexte, l’analyse des interactions Homme/milieu et entre les différentes activités humaines apparaît comme un des objectifs majeurs de la recherche pour l’aide au développement durable des sociétés littorales (Dronkers & Vries, 1999). Dans cette perspective, il est indispensable de se concentrer sur les modes d’utilisation et d’exploitation du milieu par l’Homme et notamment sur le déroulement des activités humaines dans l’espace et dans le temps (Holligan, 1994 ; Weber, 1995). Cette approche spatio-temporelle est le préalable indispensable à l’évaluation de l’influence de l’Homme sur l’évolution des écosystèmes et à l’accès à une information permettant une vision globale du déroulement des activités humaines en mer côtière.

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Dans ce cadre, le milieu marin pose des problèmes spécifiques. Sur cet espace ouvert, traditionnellement considéré comme «un espace de liberté », il est particulièrement délicat de comprendre la façon dont s’exercent les activités humaines, soumises à des contraintes naturelles fortes. Il ne peut s’établir de limites physiques fixes permettant d’attribuer un espace à une activité, et différentes activités peuvent coexister sur une même zone au même moment. La prise en compte de la dimension temporelle en est d’autant plus importante. Par ailleurs, il existe très peu d’informations structurées décrivant les activités marines de façon détaillée et permettant une vision globale de leur déroulement. Les statistiques disponibles sont souvent trop agrégées et donc inadaptées à l’objectif poursuivi et elles ne sont pas toujours reliées à des espaces géographiques et à des périodes de pratique. L’évaluation de l’impact sur le milieu est alors difficile à établir. Le milieu marin est donc un espace que l’on peut qualifier de « flou » : la compréhension des phénomènes liés aux activités humaines en est d’autant plus complexe.

La démarche proposée, en plaçant l’Homme au cœur du système, s’inscrit dans les concepts de « développement durable » et de « gestion intégrée » proposés au début des années 1970, et qui ont acquis leur vrai légitimité en 1992 lors de la conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement. Mais, alors que la réflexion sur le concept de gestion intégrée est bien avancée et reconnue au niveau international, les méthodologies nécessaires à sa mise en œuvre sont encore en développement (Bartlett, 1999). Au niveau décisionnel, il est aujourd’hui communément admis que l’une des conditions essentielles est l’accès à une information pertinente et présentée de façon synthétique (Commission Européenne, 1999b ; UNESCO, 1997).

Dans ce domaine, le développement remarquable de la géomatique a notamment eu pour effet la diffusion d’approches de modélisation aptes à répondre à ces besoins. En effet, si l’on se réfère à l’expérience internationale, il apparaît que les principales avancées concernant la prise en compte simultanée des conditions écologiques et humaines de la zone côtière se sont fortement appuyées sur des outils scientifiques et techniques fédérateurs tels que les Systèmes d’Information Géographique (SIG) (Cuq, 2000). Ils permettent notamment d’établir un lien tangible entre les différents compartiments des systèmes étudiés en favorisant une approche pluridisciplinaire indispensable. Dans un contexte de gestion intégrée des zones côtières, l’apport des SIG est aujourd’hui indiscutable. La démarche scientifique tire profit de l’analyse systémique pluridisciplinaire rendue possible et celle du gestionnaire exploite les capacités de gestion des données notamment par la valorisation cartographique (Gourmelon, 2002). De plus, le développement actuel du couplage modèles / SIG permet de faire évoluer les Systèmes d’Information Géographique, encore trop souvent statiques dans leurs fonctions actuelles, vers des outils dynamiques de représentation, d’analyse et d’aide à la décision.

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Cette thèse s’inscrit dans le programme scientifique de l’UMR 6554 Littoral

Environnement Télédétection Géomatique (LETG) qui concerne l’analyse et la

compréhension de la dynamique des systèmes complexes à l’interface entre Nature et Société, avec la zone côtière comme territoire d’étude privilégié. Plus particulièrement, ce travail est une contribution aux recherches menées sur les littoraux et les dynamiques territoriales de la mer côtière ainsi que sur les conditions de sa gestion intégrée.

Ce document s’appuie sur trois parties principales :

En première partie, sont exposés le cadre général de recherche et les concepts de « mer côtière » et de « gestion intégrée des zones côtières ». La démarche de modélisation des activités humaines est présentée ainsi que l’intérêt du couplage modèles / SIG.

En deuxième partie, est présentée la méthodologie développée dans le cadre de la plate-forme de modélisation DAHU (Dynamique des Activités HUmaines) (Cuq, 2001) qui repose sur la transcription d’une réalité complexe en un modèle vraisemblable permettant la description du déroulement d’activités humaines dans l’espace et dans le temps et leur impact sur le milieu. Le module spécifiquement dédié aux activités marines (DAHU-MAM), développé dans le cadre de cette recherche, est présenté.

La troisième partie est consacrée aux applications. La zone d’étude retenue est la mer d’Iroise qui constitue un cas concret pertinent de par les multiples activités potentiellement conflictuelles qui s’y déroulent. Après un inventaire des différentes activités présentes sur la zone, la méthode est appliquée à trois activités de type professionnel : la pêche, l’extraction de matériaux, la navigation maritime. Afin d’illustrer les apports potentiels de la plate-forme de modélisation DAHU et plus particulièrement du simulateur DAHU-MAM à la gestion intégrée de la zone côtière finistérienne, plusieurs scénarios de simulation sont proposés.

Enfin, la conclusion introduit diverses perspectives de recherche tant conceptuelles que thématiques, envisagées dans un cadre pluridisciplinaire.

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PREMIERE PARTIE : CADRE GENERAL DE

RECHERCHE

1 L’ESPACE DE REFERENCE

L’espace côtier est une notion difficile à appréhender (Curtil, 2001), comme l’illustre le vocabulaire particulièrement varié qui tente de le qualifier. Les termes de littoral, zone côtière, bande côtière et mer côtière sont couramment et parfois indifféremment utilisés alors qu’ils ne recouvrent pas forcément les mêmes espaces géographiques.

1-1 Littoral et zone côtière

Il est aujourd’hui communément admis que l’espace côtier englobe les territoires d’influence des milieux terrestres et marins (figure 1) (Bird, 1969 ; Carter, 1988 ; Holligan & De Boois, 1993 ; Thomas, 1972). Les termes de « zone côtière » ou « littoral » sont employés indistinctement. Cependant le terme « littoral » est plus souvent utilisé lorsque l’espace s’assimile à un linéaire (définition restreinte) alors que le terme de « zone côtière », plus englobant, fait plutôt référence à une surface (définition large). Cette zone peut s’assimiler à un système au sein duquel les facteurs de changement agissent sur des sous-systèmes naturels et anthropiques interconnectés, conduisant à des interactions négatives ou positives d’ordre environnemental, social, culturel ou économique (Fabbri, 1998).

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Une fois admis le principe de la nécessaire association terre-mer au sein de l’espace côtier, la délimitation de l’étendue des zones d’influence de la terre sur la mer, et réciproquement, est particulièrement délicate et peut varier considérablement selon les approches et points de vue considérés. D’après l’OCDE, il s’agit d’une zone dont la géométrie varie en fonction de l’objectif de gestion qui est poursuivi : « On s’accorde à reconnaître que le terme « côtier » véhicule la notion d’interface terre/mer. Cet interface s’étend selon deux axes : l’un parallèle au rivage (axe littoral), l’autre perpendiculaire au rivage (axe terre / mer). La définition de l’axe terre/mer donne lieu à de nombreux débats. Par exemple, vers l’intérieur des terres, la zone côtière peut s’étendre à des bassins hydrographiques entiers ou simplement à la bande de terre située en bordure immédiate de la mer. Vers le large, elle peut s’étendre jusqu’à la limite du plateau continental ou à la zone économique exclusive d’un pays (…). Les limites de la zone côtière dépendent donc de l’objectif visé. Cette zone sera plus ou moins étendue vers le large ou vers l’intérieur des terres suivant le problème scientifique à résoudre et/ou l’objectif de gestion » (OCDE, 1993b).

L’objectif poursuivi par les organismes compétents sur la zone côtière consiste à définir un espace de gestion (Guichard, 1974). Dans la pratique, les décideurs sélectionnent généralement le cadre spatial le plus simple à gérer, à savoir les frontières administratives, alors que le plus souvent elles ne correspondent pas aux limites des systèmes naturels ou sociaux (Commission Européenne, 1999a). La Commission Européenne utilise le terme plus englobant de zone côtière qui est définie comme « une bande terrestre et marine dont la largeur varie en fonction de la configuration du milieu et des besoins d’aménagement » (Commission Européenne, 1995).

En ce qui concerne la frange marine de la zone côtière, deux principales approches permettent de la caractériser :

- une approche juridique qui fixe quelques limites de référence et notamment une « bande côtière »,

- une approche géographique, basée sur l’étude des usages du territoire, qui aboutit aux prémices d’un concept à géométrie variable, la « mer côtière ».

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1-2 Bande côtière

Littoral et « mer côtière » ne sont devenus que très récemment objet de droit (Becet & Le Morvan, 1991). La Convention des Nations Unies sur le droit de la mer1 du 10/12/1982 (en vigueur depuis le 16 novembre 1994) ne reconnaît que les eaux intérieures, la mer territoriale, la zone contiguë, la zone économique exclusive (ZEE) et la haute mer (figure 2) (Lucchini & Voelckel, 2000).

Figure 2. Les espaces maritimes de la Convention des Nations Unies sur le droit de la Mer (Beurier, 2002).

D’après cette convention, il est tentant de choisir la limite de la mer territoriale comme limite de la zone côtière en mer. Il est vrai que, replacée dans le cadre communautaire, et en considération de l’activité de pêche, le législateur confond souvent la mer côtière et les eaux territoriales. D’après Curtil (Curtil, 2001), « les caractères généraux du régime communautaire de la pêche ne plaident pas a priori pour la reconnaissance d’une spécificité de la pêche s’exerçant le long des côtes de l’Etat membre. La politique de conservation et de gestion des ressources de pêche conduit, en principe, à la fixation de « règles communes » sur une zone couvrant la totalité des eaux relevant de la souveraineté ou de la juridiction des Etats membres auxquelles ont « également » accès tous les navires battant pavillon d’un Etat de la Communauté Européenne. Cette politique a donc pour vocation de supprimer toute spécificité nationale. Pourtant, par certaines dispositions particulières, la Communauté Européenne tend, et de façon durable, à préciser au sein de l’espace maritime, le principe d’une « bande côtière » délimitée à l’intérieur de laquelle l’Etat membre se voit réinvesti de prérogatives déterminantes en matière de pêche ».

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Ce sont précisément ces dispositions du droit communautaire qui suggèrent aujourd’hui l’existence d’un régime juridique spécifique de la pêche s’exerçant dans une « bande côtière » située le long des côtes de chaque Etat membre. Et il n’est pas surprenant que cette bande côtière ait un lien avec l’espace maritime placé sous la juridiction nationale impliquant l’exercice de la souveraineté de l’Etat, c’est-à-dire la mer territoriale (Curtil, 1998). La France notamment a mis en œuvre ce régime dérogatoire spécifique pour l’ensemble de ses eaux territoriales soumises à l’application du droit communautaire de la pêche.

D’après la Commission Européenne, « il est courant, dans le domaine halieutique, de limiter la zone côtière aux eaux territoriales (…) sans pour autant que cette limite corresponde à une unité biologique ou de gestion bien individualisée ». La dénomination de « bande côtière » semble être alors la plus adaptée puisque l’espace marin concerné est constitué d’une bande de largeur constante (12 milles)2 par rapport soit à la côte, ou soit aux lignes de base. Il est alors possible de lui conférer un caractère opérationnel en fixant des limites précises (figure 3).

Limite intérieure. Dans le droit français, l’exercice de la pêche maritime est défini par l’article 1er du décret du 9 janvier 1852 comme « la capture des animaux et la récolte des végétaux marins, en mer et dans la partie des fleuves, rivières, étangs et canaux où les eaux sont salées ». En zone estuarienne, c'est donc la limite de salure des eaux qui constitue la limite amont de la zone de pêche maritime, et la limite aval de la zone de pêche fluviale. Cette limite est fixée par décret. Le premier obstacle à la navigation des bâtiments de mer, également déterminé par décret, constitue la limite amont de la navigation maritime (limite transversale de la mer). Il peut arriver que ce premier obstacle (pont, digue, port…) soit situé en amont de la limite de salure. Dans la zone « mixte » (navigation maritime et pêche fluviale), comprise dans ce cas, entre ces deux limites, les marins pêcheurs sont autorisés à exercer leur activité sous la seule réserve d'obtenir une licence de pêche fluviale (figure 3).

Limite extérieure. Le mode de calcul de l’extension de la bande côtière est identique à celui qui permet de délimiter les eaux territoriales de l’Etat. Celles-ci représentent l’espace maritime d’une largeur maximale de 12 milles, calculée à partir d’une ligne de référence qui est normalement la laisse de basse mer mais qui peut être une «ligne de base droite» dans des portions de côtes très découpées, ou comportant un chapelet d'îles3. En deçà de ces lignes de base, l’espace maritime qualifié d'eaux intérieures, qui comprend les baies, les rades et les ports, est inclus dans le territoire de l'Etat.

2

1 mille = 1852 mètres

3

La ligne de fermeture des baies et des estuaires sert également de ligne de base droite, sous réserve que sa longueur n’excède pas 24 milles (un décret du 19 octobre 1967 définit «les lignes de base droites et les lignes de fermeture des baies servant à la détermination des lignes de base à partir desquelles est mesurée la largeur des eaux territoriales»).

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Figure 3. Représentation schématique des limites réglementaires de référence de la bande côtière.

Compte tenu de ces éléments, il pourrait donc être tentant d’assimiler « bande côtière » et « mer côtière ». Mais cette option n’est pas complètement satisfaisante dans le cadre de cette étude, car si la notion « d’eaux territoriales » est bien un concept juridique qui délimite l'espace côtier selon un tracé géométrique, elle ne tient ni compte des lois naturelles qui régissent les phénomènes écologiques ni de la réalité des zones de pratique des activités humaines. Une approche géographique, relative aux activités, montre les limites d’une délimitation trop arbitraire de la mer côtière.

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1-3 Mer côtière

La méthodologie présentée dans le cadre de cette thèse s’applique à un espace marin que l’on a qualifié de « mer côtière ».Pourtant ce concept est ambigu et ne fait pas l’objet d’une définition précise et reconnue. Pourquoi donc privilégier le terme de « mer côtière » ?

La mer côtière constitue un concept émergeant en géographie qui caractérise un « objet

géographique en construction » (Corlay, 2002). Elle fait référence à un espace maritime

bordant les côtes et constitue donc la frange marine de la zone côtière. Mais si cette notion revient souvent dans l’analyse et l’aménagement des littoraux et de leur marge marine, la mer côtière ne possède pas de limites précises, uniques et homogènes. Cette notion géographique n’est paradoxalement pas délimitée.

En fait, les approches et conceptions varient en fonction des disciplines (droit, économie, sociologie, biologie…) et selon les usages que l’on entend prendre en considération. Suivant la région ou la discipline considérée, l’étendue de la mer côtière est variable. Par exemple, en chimie marine, les limites de la mer côtière peuvent être assimilées aux limites d’influence des eaux fluviales ou aux limites du plateau continental (Waeles, 2003). Ce qui ne correspond pas forcément à la vision et à l’appréhension de la mer côtière d’un patron pêcheur pratiquant une pêche côtière artisanale très localisée.

L’approche géographique se veut fonctionnelle et vise à cerner la notion de « mer côtière » en s’intéressant aux usages anthropiques du territoire. Cette référence au territoire, à l’espace socialisé, renvoie implicitement à la distinction entre plusieurs types d’utilisation des mers côtières. Sa proximité avec la terre en fait le support de nombreuses activités spécifiquement côtières telles que des activités côtières « par nature »(baignade, aquaculture, loisirs nautiques…) et des activités côtières du point de vue juridique (pêche et navigation côtière qui conduisent toutes les deux à des limites très imprécises quant à l’étendue de la mer côtière… (cf encadré ci-après)). La mer côtière est aussi le passage obligé de l’ensemble des activités océaniques (navigation maritime, pêche hauturière…) et peut être utilisée comme réceptacle des rejets telluriques et de la pollution venant du large.

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La notion administrative de pêche côtière (Pennanguer et al., 2001).

Près de 80 % des activités de la flotte de pêche française s’exercent dans les eaux proches du littoral (Bolopion et al., 2000). Il n’existe pas de définition simple de la pêche côtière. En France, trois titres de navigation peuvent être utilisés pour qualifier la pêche côtière.

- Est réputée petite pêche (PP) la navigation de pêche pratiquée par tout navire ne s’absentant du port que pour une durée inférieure ou égale à 24 heures.

- Est réputée pêche côtière (PC) la navigation de pêche pratiquée par tout navire ne s’absentant du port que pour une durée inférieure ou égale à 96 heures, mais supérieure à 24 heures.

- Est réputée conchyliculture-petite pêche (CPP) la navigation pratiquée par des embarcations ne s’absentant du port que pour une durée inférieure ou égale à 24 heures, affectée à la pêche et à l’exploitation de parcelles concédées sur le Domaine Public Maritime4.

En matière d’aide au renouvellement et à la modernisation de la flotte, sont considérés comme relevant de la flotte de pêche côtière les navires armés à la pêche dont la longueur hors tout est inférieure à :

- 16 mètres lorsqu’ils sont immatriculés dans les ports des régions littorales de la Manche, de la mer du Nord et de l’Atlantique ;

- 18 mètres lorsqu’ils sont immatriculés dans les ports des régions littorales de la Méditerranée ;

- 12 mètres lorsqu’ils sont immatriculés dans les ports des régions de l’outre-mer. Deux définitions administratives de la pêche côtière coexistent donc et sont fondées sur des critères différents (et pas nécessairement convergents) : la première définition se réfère à la longueur des marées, la seconde fait appel à la longueur des navires. Aucune de ces deux définitions ne fait référence au paramètre spatial de l’activité. Il est donc impossible d’établir une correspondance simple entre ces définitions administratives et une zone où se déroulerait la pêche côtière.

A chaque usage, à chaque approche scientifique, à chaque problématique spécifique, correspondent des échelles spatio-temporelles et des niveaux d’analyse privilégiés et, donc, autant de définitions pertinentes de la mer côtière (Cormier-Salem, 2001). La mer côtière serait donc la surface et le volume où s’exercent des activités attachées à la côte proche et où se diffusent durablement et profondément des influences terrestres de nature diverse (Guillaume, 2002).

4

D’après la loi n° 63-1178 relative au domaine public maritime (JORF du 29 novembre 1963, http://www.legifrance.gouv.fr), sont incorporés, sous réserve des droits des tiers, au domaine public maritime :

(18)

L’approche géographique se distingue donc de l’approche juridique à prétention universaliste. Il est vrai que, si la limite des 12 milles correspond bien à une zone juridiquement définie, elle constitue rarement une frontière délimitant les pratiques. De nombreuses activités peuvent se dérouler aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur de la bande côtière. Les limites de la mer côtière sont donc floues, instables, variables et dépendent du territoire considéré. D’après Trouillet (Trouillet, 2003), la mer côtière possède une structuration spatiale complexe qu’il convient de décrypter : « l’analyse de cet ensemble territorial passe d’abord par une lecture cartographique des usages et des caractéristiques du milieu (…). Il s’agit de cartographier les zones d’activités susceptibles de participer à la structuration de l’ensemble territorial. C’est par un repérage de leurs combinaisons, que l’on pourra à l’aide d’une modélisation graphique, décrypter des éléments de la structuration de la mer côtière ».

Il y aurait donc une véritable « géodiversité » des mers côtières qui suppose des échelles d’analyse variées et des mesures de gestion adaptées (Brigand, 2001).

L’objectif de cette thèse est de proposer une méthodologie générique et transposable visant à décrire le déroulement d’activités humaines sur un site donné. Le choix de la zone d’étude pertinente ou de l’espace de gestion cohérent doit pouvoir être opéré avec un certain degré de souplesse suivant les objectifs poursuivis, les caractéristiques du milieu, les usages, les données disponibles... Il serait donc réducteur de limiter les possibilités d’analyse par une ligne virtuelle préalablement fixée. Le terme associé à la méthodologie proposée doit donc refléter un espace à géométrie variable suivant la région et la problématique posées. Ce qui correspond bien à la notion de « mer côtière » qui résiste finalement à toute tentative d’enfermement géographique (Becet & Le Morvan, 1991).

(19)

2 LES ACTIVITES HUMAINES EN MER COTIERE

2-1 Les notions d’usage et d’activité

Les termes « usage5 » et « activité humaine » sont couramment et souvent utilisés indifféremment dans la littérature traitant de la gestion intégrée des zones côtières. Pourtant, ils recouvrent des notions différentes.

Selon Brunet (Brunet et al., 1993), le terme usage comporte deux sens :

- « Les principaux usages de l’espace, qui fondent les espaces géographiques, sont l’appropriation, l’exploitation, l’habitation, la communication et la gestion. »

- « L’importance de la complexité des pratiques spatiales a amené les sociétés à établir très tôt des usages du territoire, des lois d’usage et des droits d’usage qui ont longtemps été appliqués dans les sociétés agraires et pastorales. »

Les deux définitions ont en commun le fait qu’un usage apparaît comme « la manifestation spatiale d’une fonction » (Corlay, 2001). Il constitue un mode d’utilisation du territoire qui génère un espace résultant d’un projet d’exploitation et/ou de gestion des ressources du milieu. Par exemple, l’exploitation des ressources minérales est un des usages de la mer côtière. De même que l’instauration de zones dédiées à la conservation peut être considérée comme tel.

A chaque usage du territoire6 correspond un ensemble d’activités humaines. D’après George & Verger, le terme « activité » désigne « les formes de participation à la production et d’impulsion de la production, activités professionnelles d’une population active, activités agricoles, industrielles, commerciales, culturelles d’une ville ou d’une région » (George & Verger, 2000). Il s’agit avant tout d’activités économiques qui visent à satisfaire les besoins par la production et l’échange de biens et de services7. Appliqué à la mer côtière, il nous semble cohérent d’adopter une définition plus large qui peut concerner également des activités non productives de biens et de service (activités de loisir). Les exemples d’activités humaines en mer côtière sont nombreux. Dans le cas de l’usage « exploitation des ressources vivantes », les activités de pêche côtière comptent parmi les exemples les plus significatifs.

5

Nous nous intéressons uniquement aux usages anthropiques du milieu.

6

Le territoire est défini comme un espace géographique qualifié par une appartenance juridique ou par une spécificité naturelle ou culturelle impliquant la reconnaissance de limites (George & Verger, 2000). Selon Brunet (Brunet, 1992) le territoire correspond à un espace géographique « approprié, avec sentiment ou conscience de son appropriation ». Il résulte de la projection, sur

(20)

Les activités humaines peuvent être elles-mêmes divisées en sous-activités (figure 4). Le terme de « sous-activité » désigne une partie d’un groupe d’activité possédant des caractéristiques communes.

Figure 4. Structuration hiérarchique : usage / activités / sous-activités.

La notion de « métier »

Dans l’activité de pêche, le métier est considéré comme une sous-activité qui correspond à « la mise en œuvre d’un engin de pêche sur une ou plusieurs espèces cibles dans une zone et pendant une période donnée » (Talidec et al., 1999).

Les métiers sont donc des sous-activités de l’activité de pêche, elle même partie intégrante de l’usage « exploitation des ressources vivantes ». Par exemple, l’activité de pêche au filet se compose de différents métiers dont le filet grandes mailles à crustacés, le filet grandes mailles à poissons, le filet petites mailles...

Au sein de cette hiérarchie, usage / activité / sous-activité (métier), il est possible d’aller plus loin en faisant intervenir la notion de « pratique8 ». La pratique dépend directement de l’individu ou éventuellement d’un groupement d’individu exerçant une activité. Elle est propre à une personne et fait référence à une manière habituelle d’agir9. Ainsi, au sein d’un groupe de pêcheurs pratiquant le même métier, les pratiques de pêche seront différentes selon les patrons-pêcheurs.

8

A distinguer de la « mise en pratique » d’une activité

9

(21)

2-2 De nombreuses activités dans un milieu fragile

A l’interface entre la terre et la mer, la zone côtière est très convoitée et l’exploitation des ressources et des espaces ne cesse de s’y développer. Comme le souligne l’Organisation des Nations Unies10, plus de la moitié de la population mondiale vit à moins de 60 km d’une côte, et cette proportion pourrait atteindre les trois quarts en 2020. Progressivement, le nombre d’usages et d’usagers a donc tendance à augmenter. Si certaines activités traditionnelles sont devenues marginales, comme par exemple la récolte du sel sur les marais salants, d’autres se sont maintenues ou ont augmenté à l’image des activités de loisirs (Brigand, 2001). Le « besoin de littoral », qui s’exprime par une forte concurrence entre les activités, conduit à une partition inévitable de l’espace qui se spécialise et se compartimente selon les types d’usages. Ces besoins vont croissants, tant pour les activités portuaires et industrielles que pour les activités de pêche et aquacoles et, de plus en plus, pour le tourisme et les activités de loisirs (Commission Européenne, 1999a). Ainsi, les formes et l’intensité d’occupation et d’exploitation des espaces côtiers se sont multipliées au cours des trente dernières années (Catanzano & Thebaud, 1995).

La frange marine de la zone côtière n’échappe pas à cette tendance. Du fait de sa position privilégiée, la mer côtière a toujours été le siège de nombreuses activités humaines. Dans le cas de la pêche, alors que la mer couvre 73 % de la surface du globe, plus de 90 % de la pêche mondiale s’effectue dans les eaux côtières (profondeur inférieure à 200 mètres) dont la superficie ne dépasse pas 7 % de l’étendue totale des mers (Mauvais, 1997). La mer côtière apparaît actuellement comme un front pionnier où la demande sociale en espaces et en ressources de toute nature croît au fil du temps ; elle représente un milieu en voie de socialisation rapide sous l’effet de la multiplication des usages (Corlay, 2001). L’utilisation de la mer côtière, qui s’est extraordinairement développée depuis trente ans, tend même à devenir permanente (Trouillet, 2003) et les empreintes matérielles se banalisent (aquaculture, éoliennes, aménagements portuaires, forages, rejets en mer….).

Les différentes formes d’occupation de l’espace et d’exploitation du milieu par l’Homme créent un jeu complexe d’interactions menant à des conflits entre usagers et à la dégradation de l’environnement.

2-2-1 Les impacts sur le milieu

La dégradation des milieux littoraux est une conséquence des pressions anthropiques de plus en plus considérables qui s’exercent sur la frange côtière. Pourtant, le développement économique de cette zone dépend étroitement de sa qualité : celle des eaux comme celle des fonds, des écosystèmes et des paysages (Mauvais, 1997)…

(22)

Ainsi, dans les années 1990, les principaux problèmes environnementaux engendrés par la pression anthropique sur le littoral atlantique ont été identifiés (Mauvais & Goarnisson, 1997) (tableau 1).

Critères de qualité

du milieu Exemples de perturbations dues aux activités humaines

Rejets agricoles

Les rejets d’origine agricole sont susceptibles d’entraîner une eutrophisation marine côtière via la production d’une biomasse algale excessive entraînant des conséquences néfastes pour

l’environnement : déséquilibre au point de vue de la

biodiversité, et hypoxie qui résulte de la dégradation de cet excès de matière organique… (Ménesguen, 2001).

Rejets urbains

Dans les stations balnéaires, où la population peut être multipliée par dix pendant les mois d’été, les stations sont souvent incapables de faire face aux exigences sanitaires. La qualité des eaux de baignade s’en ressent inévitablement (Miossec, 1998c).

Qualité de l’eau

Rejets portuaires

Dans les ports de plaisance, outre les conditions sanitaires qui n’y sont pas toujours excellentes, des pollutions par le plomb accompagnent l’usage de peintures protégeant la coque des bateaux contre algues et coquillages…(Troadec & Le Goff, 1997).

Etat de la ressource vivante

Avec la densification des échanges maritimes, l’introduction d’espèces nouvelles dans l’écosystème voit sa fréquence augmenter. La crépidule, par exemple, prolifère en de nombreux secteurs du littoral de la Manche et de l’Atlantique et peut avoir un impact fort sur les activités de conchyliculture et de pêche côtière par les modifications qu’elle engendre sur le milieu (Chauvaud et al., 2003).

Etat de la ressource

non-vivante

Les aménagements portuaires ou de protection contre la mer, situés au niveau du trait de côte peuvent entraîner des impacts importants sur la qualité et la dynamique sédimentaire des estrans en accentuant l’érosion côtière en certains points du littoral (Paskoff, 1995).

Etat du paysage

L’intensification de l’urbanisation littorale, et notamment la dissémination du bâti le long de la côte, peut entraîner une dégradation des paysages côtiers (phénomènes de mitage, dégradation des dunes, comblement des marais…) (DATAR, 1993).

(23)

2-2-2 Les conflits

Si la mer côtière est d’abord le lieu de prédilection de la petite pêche professionnelle et des cultures marines, de nouvelles activités s’y développent actuellement. Ces activités peuvent être concurrentielles et entraîner des conflits d’usage. Comme le montre la figure 5, les conflits potentiels en zone côtière sont nombreux et divers.

Figure 5. Interactions entre activités humaines en zone côtière méditerranéenne (Vallega A., 1992)

(24)

Les différents types de conflits liés au déroulement de ces activités sur un espace côtier restreint peuvent être synthétisés comme suit (tableau 2).

Source du conflit Exemple de conflit engendré

Gestion sectorielle Pratique de deux activités concurrentielles autorisée sur une même zone pendant une même période

Usages poursuivant des

objectif différents Exploitation de la ressource / Protection de la ressource Concurrence autour de

l’exploitation d’une même ressource

Pêche professionnelle / Pêche de loisir Mammifères marins / Pêche professionnelle

Interactions spatio-temporelles

Arts dormants / Arts traînants

Activité d’extraction de matériaux / Pêche professionnelle Tableau 2. Typologie des conflits en mer côtière (Johnson & Pollnac, 1989).

En France, dans le cadre de la loi d’orientation sur la pêche maritime et les cultures marines votée en 199711, plusieurs rapports ont été réalisés sur les activités en mer côtière. Le plus récent date de 1999 et concerne l’exercice de la pêche dans la zone côtière française (Bolopion et al., 2000). Il souligne le caractère structurant de la pêche côtière dans l’économie locale et soutient donc le principe de son maintien en tant qu’activité économique à part entière. A cet égard, il fait apparaître les divers conflits d’usage et préconise de les régler, dans le cadre d’une politique de gestion intégrée fondée sur la concertation et l’implication des acteurs. Dans le prolongement de ce rapport, le Comité interministériel de la mer du 27 juin 2000 a décidé de confier à un parlementaire une mission d’étude afin de proposer des outils visant à mieux maîtriser ces conflits d’usage (Dupilet, 2000). Elle montre que la pêche professionnelle, longtemps prépondérante voire exclusive est actuellement confrontée à des activités concurrentes (tableau 3). Par exemple, les ressources halieutiques côtières peuvent être exploitées par une pêche de plaisance et sportive en plein essor (Duchene, 2003). La pêche professionnelle peut être également affectée par l’augmentation des zones d’extraction de granulats et l’exploitation du maërl ou le développement de câbles sous-marins de télécommunication (Sarazin & Monbrison, 2002).

11

(25)

Autres activités Principaux risques de conflit

Extraction des granulats

Concurrence en termes d’occupation de l’espace.

Incidence des extractions sur la qualité du milieu (turbidité) et sur les ressources halieutiques (poissons plats, coquille Saint-Jacques).

Eoliennes en mer

Concurrence en termes d’occupation de l’espace.

Les impacts des éoliennes sur le milieu marin (faune) sont encore très peu connus.

Rejet des matériaux de dragage

Atteinte à la qualité du milieu (turbidité, contamination) et donc aux ressources halieutiques.

Câbles sous-marins

Occupation de l’espace qui interdit les activités halieutiques mettant en œuvre des engins opérant sur le fond ou à proximité du fond.

Espaces protégés Contraintes éventuelles pour les activités halieutiques.

Plaisance Cohabitations dans les ports.

Concurrence dans l’exercice de la pêche.

Aquaculture

Concurrence en termes d’occupation de l’espace.

Concurrence pour l’exercice de certaines pêches très proches du littoral et/ou estuariennes.

Concurrence pour l’accès au marché.

Pêche professionnelle

Circulation maritime

Concurrence en termes d’occupation de l’espace dans les zones à fort trafic (dispositif de séparation du trafic).

Respect de règles de circulation (sens de la navigation) par les pêcheurs.

Utilisation de filets de subsurface dans une voie de circulation.

Tableau 3. Tableau récapitulatif des principaux conflits significatifs entre la pêche professionnelle et les autres activités de la mer côtière (Dupilet, 2000).

Ainsi, outre les impacts que peuvent avoir les activités humaines sur la qualité de l’environnement côtier, elles peuvent également générer des conflits préjudiciables au développement harmonieux des sociétés littorales. La compréhension de ces différentes interactions est particulièrement complexe et implique des modes de gestion adaptés.

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3 LA GESTION INTEGREE DE LA ZONE COTIERE

La prise de conscience du rôle de l’Homme dans la dégradation de certains milieux réaffirme actuellement l’intérêt des concepts de « développement durable » et de « gestion intégrée » proposés au début des années 1970 par la Convention de Ramsar et

l’US Coastal Zone Management Act.

Sur le plan international, le développement durable (ou soutenable) a acquis sa vrai légitimité lors de la Conférence des Nations Unies sur l’Environnement et le Développement qui s’est tenue en 1992 à Rio de Janeiro. Le développement est durable s’il est conçu de manière à assurer la pérennité du bénéfice pour les générations futures (extrait du « rapport Bruntland »)12. Il vise à favoriser un état d’harmonie entre les êtres humains et entre l’Homme et la nature et désigne un processus de développement qui met l’accent sur le fait que l’utilisation des ressources doit s’inscrire dans une perspective à la fois de durabilité écologique, de viabilité économique et d’équité sociale à long terme. Ce concept ne doit donc pas être perçu uniquement en terme de préservation des milieux mais doit privilégier la recherche d’une co-viabilité à long-terme des écosystèmes et des modes de vie dont ils sont les supports (Weber, 1995). Cela implique une approche intégrée qui doit réconcilier les trois dimensions sociétale, économique et environnementale (figure 6).

Figure 6. Triptyque du développement durable (Rouxel & Rist, 2000).

12

(27)

3-1 Le Concept de gestion intégrée de la zone côtière

Concernant la zone côtière, la gestion intégrée est fondée sur le fait que l’interdépendance étroite des activités et des ressources rend les approches sectorielles insuffisantes dans un contexte où la pression humaine ne cesse d’augmenter. Pour fournir des réponses à la hauteur de la complexité des problèmes, il importe d’adopter une démarche qui permette de mettre en relation les ressources côtières, leurs usages et les impacts des activités sur l’environnement, l’économie et la société (Minster et al., 2002).

3-1-1 Le cadre théorique : la démarche systémique

La notion d’intégration pénètre de plus en plus le discours scientifique et le champ d’action de nombreuses disciplines, surtout dans le domaine de l’analyse spatiale à objectif environnemental ou territorial (Corlay, 1998). L’intégration appliquée à l’analyse et à la gestion du territoire se substitue à une approche restée trop longtemps sectorielle pour privilégier au contraire une vision globale mettant en valeur l’interdépendance entre les différents éléments du système. Cette approche s’inspire directement des principes fondamentaux de la démarche systémique. A la fin des années 1970, la science des systèmes se développe (Durand, 1979 ; Le Moigne, 1978 ; Walliser, 1977). Un système possède les propriétés suivantes (Poussin, 1987) :

- l’organisation, définie par l’agencement des relations entre les éléments qui

composent le système ;

- la totalité, c’est-à-dire qu’un système est plus que la somme des éléments constitutifs

du système (holisme) ;

- l’interaction entre ses éléments, qui dépasse les relations du type cause-effet ;

- la complexité, qu’il est nécessaire de conserver même si nous sommes incapables

d’en saisir toute la richesse.

La théorie des systèmes a donc pour objet la modélisation des phénomènes complexes en mettant l'accent sur les relations entre les divers composants d'un tout (Brunet et al., 1993 ; Small & Witherick, 1989). La systémique considère qu’un système est composé d’un ensemble de sous-systèmes plus ou moins interdépendants, ce qui implique que toute modification d’un sous-système ou toute impulsion de son environnement (un événement) se transmet, en général, à l’ensemble des sous-systèmes à partir de son point d’origine (Heylighen, 1992 ; Popper, 1981).

Le comportement du système global est donc moins dépendant des propriétés intrinsèques des sous-systèmes que de leur réseau de liaison (Prelaz-Droux, 1995). Un système s’assimile donc à une unité non séparable constituée de composantes en interaction.

(28)

L’analyse systémique est souvent considérée comme un outil pour l’action. Mais ses exigences de clarté dans la définition des objectifs et la présentation des hypothèses de travail en font aussi un instrument de connaissance scientifique. En privilégiant l’étude des interactions, la systémique est par essence non disciplinaire ou plutôt trans-disciplinaire. L’analyse d’un système se situe donc souvent à l’interface de plusieurs disciplines, surtout lorsque l’objet d’étude est le territoire.

3-1-2 Application du principe d’intégration au système « zone côtière »

Plus encore peut-être que les politiques strictement « terrestres », les politiques conduites en zone côtière nécessitent à tous les points de vue une approche intégrée de gestion. L’intégration recouvre différents aspects dont les trois principaux sont présentés dans le tableau 4.

Type d’intégration Conséquences

Intégration sectorielle

Mise en cohérence des différentes politiques sectorielles / Favoriser les approches pluridisciplinaires et la coopération entre scientifiques et gestionnaires.

Intégration verticale Mise en cohérence des politiques locales, régionales, nationales et internationales.

Intégration spatiale

Favoriser les approches territoriales et l’intégration terre-mer : la gestion des zones côtières ne peut plus se faire en considérant séparément chaque côté de l’interface terre-mer.

Tableau 4. Les différents types d’intégration et leurs conséquences (Cicin-Sain & Knetch, 1998).

(29)

3-1-3 Définition de la Gestion Intégrée des Zones Côtières (GIZC)

La mise en œuvre de cette approche intégrée a donc conduit à proposer un processus de Gestion Intégrée de la Zone Côtière (GIZC). Il implique une manière de penser le territoire et d’agir sur lui en favorisant un développement harmonieux et reposant sur le maintien d’un équilibre dynamique à long terme entre les ressources du milieu et leur usage par les sociétés humaines. Parmi les nombreuses définitions proposées pour qualifier la gestion intégrée de la zone côtière, nous retiendrons la suivante : « Processus dynamique qui réunit gouvernements et sociétés, sciences et décideurs, intérêts publics et privés en vue de la protection et du développement des systèmes côtiers. La GIZC vise à optimiser les choix à long terme privilégiant un usage raisonné des ressources » (Cicin-Sain & Knetch, 1998).

Pour aboutir, ce processus doit s’appuyer sur une volonté politique claire et affirmée.

3-2 Une volonté politique générale

L’émergence des préoccupations environnementales constatée à l’échelle planétaire depuis le début des années 1970 s’est traduit, à des degrés divers et sous des formes variées, par une volonté politique aussi bien au niveau international que national en faveur d’une gestion intégrée des zones côtières dans un objectif de développement durable.

3-2-1 Au niveau international

Plusieurs pays ont déjà pris des initiatives dans le sens d’une GIZC. Les pays anglo-saxons, et particulièrement les Etats-Unis, ont été les premiers à systématiser l’approche participative qui caractérise l’ensemble du processus de GIZC (cf encadré ci-après).

Le Coastal Zone Management Act

Le Congrès américain a défini, à partir de 1972, un ensemble d’objectifs allant dans le sens d’un développement durable de sa zone côtière. Les Etats ont été chargés de proposer des programmes de gestion visant à :

- une utilisation raisonnée des ressources naturelles,

- accorder une attention particulière aux valeurs écologiques, culturelles, historiques, esthétiques comme aux besoins de développement économique,

- préparer des plans de gestion spécifiques aux zones à risques (inondations…), - développer la participation de tous : citoyens, autorités compétentes, professionnels, - encourager la coordination des divers acteurs et autorités compétentes dans un

même objectif de gestion.

Ce programme qui a concerné 99% du littoral des Etats-Unis est relayé depuis 1990 par d’autres programmes, concernant des espaces d’intérêt majeur ou plus spécifiquement la

(30)

Mais l’élan est principalement donné par la Conférence des Nations Unies sur l'Environnement et le Développement (Rio de Janeiro, 1992). Parmi les nombreux documents produits, le chapitre 17 de l’agenda 21 concerne la protection des océans et de toutes les mers, y compris les mers fermées et semi-fermées, et les zones côtières. Le but affiché est la protection, l’usage rationnel et la préservation de la ressource vivante dans une perspective d’exploitation durable. L’un des thèmes de ce chapitre concerne en particulier la gestion intégrée et le développement durable des zones côtières et marines, y compris de la zone économique exclusive. Les principales recommandations sont les suivantes :

- « intégrer dans les processus décisionnels toutes les parties en cause, de manière à promouvoir la compatibilité et l'équilibre entre les différentes politiques et actions de gestion ;

- recenser les utilisations actuelles et prévues des zones côtières et leurs interactions ; - concentrer l'attention sur des questions bien précises relatives à la gestion des côtes ; - prendre les mesures préventives et les précautions voulues dans la planification et

l'exécution des projets, y compris l'évaluation préalable et l'observation systématique des incidences de grands projets ;

- promouvoir l'élaboration et l'application de méthodes pour mieux comprendre l’impact des activités humaines sur le milieu (pollution, érosion marine, perte des ressources, destruction d'habitats…) ;

- permettre, dans la mesure du possible, aux particuliers, aux groupes et aux organismes intéressés d'accéder à l'information pertinente et offrir des possibilités de consultation et de participation à la planification et à la prise de décisions aux niveaux appropriés ».

En adhérant, les Etats côtiers proclament leur attachement à une gestion intégrée et à la mise en valeur durable des zones côtières et de l'environnement marin relevant de leur juridiction nationale. Néanmoins L’Agenda 21 est avant tout un document politique qui a pour ambition de susciter le débat. Il pose des principes plus qu’il ne propose de solutions précises pour les mettre en vigueur. De nombreuses organisations internationales (UNESCO, Commission Océanographie Intergouvernementale…) se sont engagées à promouvoir les principes de précaution et de développement durable que sous-tend cet engagement.

3-2-2 Au niveau européen

Un programme de démonstration sur l’Aménagement Intégré des Zones Côtières (AIZC) a été initié en 1996 (Commission Européenne, 1999a). Il s’articulait autour de 35 projets locaux ou régionaux possédant un objectif d’AIZC, d’une série d’analyses thématiques et de travaux de recherche, complétés par des rencontres régulières avec un groupe composé d’experts nationaux et de représentants des administrations locales, des partenaires socio-économiques et d’ONG, et de multiples contacts avec d’autres opérateurs extérieurs.

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Le programme de démonstration visait à évaluer l’hypothèse selon laquelle la dégradation permanente et la gestion inadéquate de nombreuses zones côtières européennes sont imputables à des problèmes liés à :

- une information incomplète ou inadéquate, tant en ce qui concerne l’état des zones côtières que l’impact des activités humaines ;

- une concertation insuffisante entre les différents niveaux et secteurs administratifs, et leurs actions respectives ;

- une participation et une consultation insuffisantes des acteurs concernés.

Ce programme a abouti à une proposition de recommandation (mai 2002) de la Commission Européenne sur la mise en œuvre de la Gestion Intégrée des Zones Côtières (GIZC), à destination du Conseil et Parlement européens. Cette recommandation invite les Etats membres, dans le cadre de la stratégie européenne de développement durable et du sixième programme d’action communautaire pour l’environnement, à suivre les principes d’une gestion intégrée des zones côtières, c’est-à-dire :

- une perspective globale élargie (thématique et géographique) qui tienne compte de l’interdépendance et de la disparité des systèmes naturels et des activités humaines qui influent sur les zones côtières ;

- une perspective à long terme qui tienne compte du principe de précaution et des besoins des générations actuelles et futures ;

- une gestion adaptative13 (Holling, 1978) mise en place dans le cadre d’un processus graduel qui permette des ajustements en fonction de l’évolution des problèmes et des connaissances ;

- la prise en compte des spécificités locales et de la grande diversité des zones côtières européennes de façon à répondre à leurs besoins concrets par des solutions spécifiques et des mesures souples ;

- la mise à profit des processus naturels et le respect de la capacité d’absorption des écosystèmes, ce qui rendra les activités humaines plus respectueuses de l’environnement, plus responsables sur le plan social et plus saines économiquement à long terme ;

- l’association de toutes les parties intéressées (partenaires économiques et sociaux, organisations représentants les résidents, ONG…) au processus de gestion, par exemple au moyen d’accords et sur la base de responsabilités partagées ;

- le soutien et la participation des instances administratives compétentes au niveau national, régional et local, entre lesquelles des liens adéquats devraient être établis ou maintenus en vue d’améliorer la coordination des différentes politiques existantes ; - l’utilisation conjointe de plusieurs instruments visant à favoriser la cohérence entre les

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3-2-3 Au niveau national

Depuis la fin des années 1960, c’est l’Etat qui définit le cadre d’une politique de gestion du littoral (Bonnot, 1995 ; Minster et al., 2002 ; Miossec, 1998a). En novembre 1973, le gouvernement français publie un rapport (rapport Piquard) qui constitue une première prise de conscience de la nécessité d’une gestion intégrée du littoral français. Il fait de nombreuses propositions dont la mise en œuvre des Schémas d’Aptitude et d’Utilisation de la Mer (SAUM).

• Les Schémas d’Aptitude et d’Utilisation de la Mer (SAUM)

Les SAUM sont nés de la volonté de planifier les utilisations du littoral, et du constat de l’inadaptation des documents d’urbanisme existants à légiférer l’aménagement en milieu marin (Le Dizet, 1985). Dès 1973, quatre SAUM expérimentaux étaient initiés : la rade de Brest, le golfe du Morbihan, les pertuis Charentais et la rade de Hyère. Quatre autres étaient lancés avant l’achèvement des premiers : le bassin d’Arcachon (1975), la côte picarde (1976), estuaire de la Seine (1976), la baie de Saint-Brieuc (1978). Leurs objectifs visaient à valoriser les aptitudes du milieu en recherchant la plus grande comptabilité entre les diverses activités existantes, et à définir des zones d’utilisation privilégiées pour chaque activité (Baclet & Le Roy, 1980). Il s’agissait donc de planifier les activités de l’espace maritime et du littoral afin de résoudre ou d’éviter les conflits, tout en protégeant les milieux (Le Berre, 1999). Mais les SAUM n’ont jamais été mis en place de façon officielle et ont été remplacés par les SMVM.

• Les Schémas de Mise en Valeur de la MER (SMVM)

Les SMVM ont été institués par la loi du 7 janvier 1983, complétée par l'article 18 de la loi littoral du 3 janvier 1986. Leur contenu et la procédure de leur élaboration ont été précisés par un décret du 5 décembre 1986. Ils sont élaborés sous l'autorité du préfet (de la région ou du département, selon le périmètre) et ils sont approuvés par décrets en Conseil d'Etat.

Les SMVM constituent des outils privilégiés de gestion intégrée du littoral comme le rappelle la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire du 25 juin 1999. Ces schémas ont pour vocation d'harmoniser les différentes utilisations de la mer et du littoral, grâce notamment à une approche mer-terre (Lannuzel, 1997). La préservation des espaces à haute valeur patrimoniale et le développement des activités liées à la mer sont parmi les éléments déterminants de ces schémas14.

14

L’article 3 du décret du 5/12/1986 montre que le SMVM porte sur la mer et le milieu marin plus que sur la terre

(33)

En définissant les conditions de la compatibilité entre les différents usages de l'espace maritime et littoral, les SMVM doivent assurer la cohérence de la protection et de l'aménagement sur des territoires qui constituent des unités géographiques de gestion pertinentes. En principe, le SMVM doit faire l’objet d’une concertation qui permet de le présenter comme un véritable essai de gestion des conflits d’usage de l’espace littoral et marin.

L'expérience de ces dix dernières années montre un bilan mitigé. Onze schémas ont été annoncés à ce jour15 parmi lesquels :

- un schéma a été approuvé le 20 avril 1995 (étang de Thau ; (Hérault)) ;

- deux schémas sont en phase d'élaboration : le littoral charentais (Charente-Maritime) et le bassin d'Arcachon (Gironde) ;

- sept schémas sont en projet : le golfe de Saint-Tropez (Var), la Camargue (Bouches du Rhône), le Trégor-Goëlo, (Côtes-d'Armor), la baie de Saint-Brieuc (Côtes-d'Armor), la rade de Lorient (Morbihan), la baie de Lannion (Côtes-d'Armor), le golfe du Morbihan (Morbihan) ;

- le schéma de la baie de Bourgneuf (Loire-Atlantique-Vendée) est actuellement en phase d'attente.

A l’heure actuelle, seul le SMVM de l’étang de Thau possède donc un caractère officiel. Les autres ont plus de difficultés à aboutir, tant les désaccords semblent forts entre les différents protagonistes (Miossec, 1998b ; Pinot, 1998).

• Les contrats de Baie

Lorsque l’objectif est la reconquête de la qualité des eaux, c’est de plus en plus souvent l’échelle du bassin versant qui est retenue. C’est dans cette optique qu’en France, un nouvel outil a été créé en 1991 par le biais d’une circulaire (du 13 mai 1991) : le contrat de Baie. Il se définit comme un programme d’actions qui vise au maintien de la qualité des eaux littorales dans un souci de préservation des écosystèmes côtiers mais également de développement des activités économiques. Cet outil de gestion concerne donc moins directement les usages de la mer côtière que dans le SMVM.

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En France, une Commission Environnement Littoral (CEL) a été instituée par le CIADT (Comité Interministériel d’Aménagement du Territoire) en février 2001. Sa mission était de mener une réflexion sur un certain nombre de sites et d’émettre des recommandations d’amélioration pour l’aménagement et la protection du littoral en France. La CEL a choisi de mener son travail en l’appuyant sur le concept de gestion intégrée des zones côtières (GIZC). D’après la CEL, « la GIZC est un processus dynamique, continu et itératif destiné à promouvoir le développement durable des zones côtières. L’intégration porte sur les objectifs, les nombreux instruments requis pour les réaliser, les domaines d’action (secteurs et niveaux administratifs), ainsi que les espaces terrestres et marins. La GIZC est pluridisciplinaire par essence. Elle relève à la fois des dimensions environnementales, économiques et sociales. Elle couvre l’ensemble du cycle décisionnel comprenant la collecte d’informations, la planification, la prise de décisions, la gestion et le suivi de la mise en œuvre sur un territoire donné. Cette élaboration stratégique met en œuvre la démocratie participative, incluant tous les acteurs, d’un bout à l’autre du processus ».

De manière générale, la Commission Environnement Littoral (CEL) constate que, « à l’œuvre depuis plusieurs années, les initiatives de gestion intégrée comme les SMVM ou les contrats de baie, restent encore largement expérimentales, rares étant les plans d’action aboutis et mis en œuvre. Si la négociation et le lien contractuel entre acteurs sont désormais posés comme des méthodes appropriées, l’initiative reste souvent prérogative de l’Etat parce que nombre de textes ont été créés dans ce sens, mais aussi par manque de connaissance et de pratique de la part des acteurs locaux ». L’Etat, soucieux d’une meilleure prise en compte de la qualité de l’environnement, se heurte aux intérêts divergents des milieux socio-professionnels qui trouvent un appui dans le monde politique local (Miossec, 1998a).

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3-3 Les difficultés de mise en œuvre pratique de la GIZC

Si l’intérêt du concept de gestion intégrée des zones côtières est désormais admis universellement par tous les acteurs concernés, il apparaît que les méthodes et outils nécessaires à sa mise en application sont encore en phase de développement (UNESCO, 2001).

Dans le cadre de programmes scientifiques internationaux, des manuels et guides méthodologiques d’aide à la mise en œuvre de la gestion intégrée de la zone côtière ont été publiés (Clark, 1995 ; UNEP, 1995 ; UNESCO, 1997 ; UNESCO, 2001). Ils décrivent les aspects généraux et les processus de GIZC en insistant sur le rôle de l’opérateur de la GIZC qui doit être à la fois animateur et stratège, en pratiquant la synthèse, la présentation claire d’informations complexe, en contribuant à résoudre les conflits, à élaborer, gérer et évaluer des programmes interdisciplinaires, d’information et d’éducation, et en facilitant la participation du publique (UNESCO, 2001). Comme le montre la figure 7, l’information est un point-clé du processus de GIZC. Pour une gestion optimale et pérenne de l’information nécessaire aux décideurs, il faut des outils adaptés, regroupés sous l’appellation de Système d’Information (SI).

Figure 7. Enchaînement des étapes de planification de la GIZC (Salm et al., 2000).

Sur le plan de la recherche, on constate une réelle difficulté à développer l’ouverture thématique nécessaire, en particulier en ce qui concerne le lien entre les sciences du milieu et les sciences sociales (Barnouin & Chardy, 1998), alors que les recherches sur les milieux littoraux doivent prendre en compte la complexité de l’ensemble des composantes des systèmes côtiers et s’effectuer suivant une approche scientifique et méthodologique pluridisciplinaire (Cuq et al., 2002b).

Figure

Figure 1. Cadre spatial de la zone côtière (Corlay, 2001).
Figure 2. Les espaces maritimes de la Convention des Nations Unies sur le droit de la  Mer (Beurier, 2002)
Figure 3. Représentation schématique des limites réglementaires de référence de la  bande côtière
Tableau 3. Tableau récapitulatif des principaux conflits significatifs entre la pêche  professionnelle et les autres activités de la mer côtière (Dupilet, 2000)
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Références

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