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Nécrologie : Vincenzo Ussani (1870-1952)

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Academic year: 2021

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Vincenzo Ussani s'est éteint à Rome le i février 1952 . Il était né l'année même où l'Italie, Rome ayant été occupée, réalisait son unité . Il fut un des hommes qui ont contribué à faire entrer le jeune État dans l'histoire européenne en dépassant ce que l a tradition d'un enseignement essentiellement humaniste pouvai t avoir de rhétorique sans pour autant la briser dans ce qu'ell e avait et a encore de vital . Sa carrière de professeur touj ours sévère envers soi-même et envers les autres qui le conduisit d u Lycée de Tivoli à la chaire de Littérature latine de l'Universit é de Rome, a suivi et marqué, à travers la vie d'un homme, et l a naissance et le développement de toute une discipline, l'affir-mation et la consolidation de la nouvelle culture italienne et , au sein de celle-ci, de la philologie classique et de toute la scienc e de l'antiquité, qui constitue un aspect réellement importan t de ces quatre-vingts ans d'heureuse histoire unitaire .

S'il fallait caractériser en une formule sa personnalité et so n activité dans le cadre de la philologie italienne et européenne , je dirais que la caractéristique essentielle d'Ussani fut l'équilibre , un équilibre singulier de facultés et de qualités, qu'il n'est pas facile de trouver réunies . Chercheur patient et tenace, capable , lorsque c'était nécessaire, d'assumer et de déployer de délicate s missions administratives, auteur de vers italiens et latins, d e savoureuses proses latines, dont la pureté ne devient jamai s conventionalisme cicéronien, écrivain d'un italien même tro p pur et élégant, il est en même temps éditeur exemplaire, pour l e

Corpus de Vienne, d'un texte comme celui d'Hégésippe (1 vol .) , auteur d'une « Histoire de la littérature latine aux époques de la république et d'Auguste » — qui obtint le VII e prix international Vallauri et qui constituait à l'époque de sa première édition , 1929, une authentique nouveauté —, auteur d'un commentaire

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sur Horace lyrique qui ne le cède en rien à celui de Kiessling -Heinze, d'un commentaire sur Horace (csatire «> qui le dépass e pour sa finesse, sa perspicacité et la nouveauté de sa conception . Philologue attentif, minutieux, précis, tel qu'il se révèle dan s de nombreux articles et notes — dont je voudrais rappele r celle sur le Pervigiliur Vei Bris, publiée dans les Mélange s Paul Thomas (Bruges, 1930), qui est une de ses études les plu s parfaites — Ussani a touj ours eu de nombreuses cordes à so n arc : il les a toujours touchées d'une main habile et sûre .

Commentateur des XVeet XVIe livres des Annales, il compt e parmi les plus intelligents et les plus perspicaces ; traducteur et critique de Lucain, dans ses multiples aspects, y compris celu i de la fortune, éditeur du De i'editu de Rutilius Narnatianus, du XIV e livre des Epistulae seniles de Pétrarque, il fut, par l'ac-croissement et l'approfondissement de son intérêt pour la litté-rature latine prémédiévale et médiévale, un des rares qui e n réagissant — sans pour autant lui fermer entièrement son âme — contre le charme exclusif de la littérature de l'époque de l a république et d'Auguste, considérée même uniquement e n fonction de la littérature grecque, comprit ce que signifie pour l'histoire de l'Europe et pour notre vie actuelle, la littérature d e l'Empire . Il fut donc équilibré jusqu'en ceci : qu'il nous a laissé une histoire des lettres latines jusqu'à Auguste et, pour la périod e suivante, plus qu'une ébauche que nous regrettons de ne pas voir développée dans un second volume .

Le fait est qu'il y avait en Vincenzo Ussani un amour pour l'antique, pour les belles fantaisies des antiques, l'admiration pou r Rome et sa littérature, sa langue, défendues et ressenties avec u n esprit d'italien, de latin, éloigné de tout provincialisme mesquin et de tout nationalisme, qui n'en était pas pour autant moin s conscient et tenace à vouloir rétablir des équilibres troublés , éventuellement par des idola d'origine différente ; à côté de cela, il y avait en lui, toujours latent, affleurant souvent, un intérê t profond pour les origines et l'histoire du christianisme, pour l e milieu dans lequel il naquit et grandit : cette largesse d'horizo n n'était donc pas uniquement un fait de culture, mais de

la

sympathie pour les problèmes et les écrivains, dont son espri t se nourrit et se fortifia, même en dehors des études, dans l a vie et les peines de la vie .

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Quand il dut quitter sa chaire de Rome, en 1940, parce qu'i l était atteint par la limite d'âge, ses élèves et ses amis publièren t un recueil de ses travaux mineurs, intitulé « Scritti di filologia e umanità » (Naples, Ricciardi, 1940) . Celui qui parcourt c e volume peut y trouver la confirmation de ce qui est dit ci -dessus : il peut se rendre compte de la complexité et de l'étendu e de l'humanisme d'Ussani qui, tout en partant du modèle idéa l et formel de Cicéron, le renouvelle et le dépasse en y infusant , avec l'expérience chrétienne, la culture moderne . Dans les dernières années de sa vie, il préparait, avec une quarantain e de collaborateurs, un « Guide pour l'étude de la civilisatio n romaine antique » dont la publication est imminente et qui témoigne de la haute et complexe conception qu'il avait d e l'antiquité romaine, tandis que dans la préface, interrompu e quelques heures avant l'accident qui devait le conduire a u tombeau, montre ce que signifient pour lui les études d'huma-niste et quelle conscience de chrétien et d'européen se cachai t sous son caractère ferme d'italien .

FRANCESCO ARNALDI .

Le décès de Vincenzo Ussani enlève à l'Union académique u n homme qui, dès les débuts de cette société, ne cessa de prendr e une part brillante et importante à ses activités . Il y était le représentant le plus autorisé des académies italiennes et, comm e tel, il fut l'initiateur de la participation italienne aux diverse s entreprises de l'U . A . I . ; si l'Italie a apporté à l'Union une colla-boration efficace et généreuse, le mérite en revient en majeur e partie à Ussani . Le jeune Comité du Dictionnaire du Latin médié -val surtout a profité de ses encouragements et de ses conseils : il s'était formé une idée claire du but à atteindre et il s'entendai t à énoncer avec la même clarté et la même décision la méthode à suivre et les règles à l'usage des dépouilleurs de textes . Pendan t les discussions préparatoires concernant les fins de cette revue , ses conseils étaient dictés par la précision et la prévoyance et

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empreints de maturité : au cours de son quart de siècle d'existence , la revue ne s'est pour ainsi dire pas départie de la voie tracée pa r Ussani . Ce fut lui qui proposa son nom, Archivum Latinitatis Medii Aevi, ALMA, et l'adoption de ce titre lui procura un e grande joie . Il continua de collaborer et de s'intéresser aux travaux jusqu'à sa mort . Il se réjouit de la publication dans cette revue du Lexicon Im5eriectum italien ; cette contribution témoigne d'ailleurs de l'excellence, de la solidité et du succès d e ses conceptions de la participation italienne et de l'enthou-siasme qu'il sut faire naître chez les réalisateurs . Mais son acti-vité ne s'est pas bornée à cette oeuvre lexicographique . Lui, plu s que tout autre, se dévoua à la tache de faire aboutir les initia-tives du Professeur Michalski et de Georges Lacombe concer-nant le Corpus Philosophorum Medii Aevi ; grâce à ses efforts la grande oeuvre de Lacombe fut agréée par la Presse Vatican e et publiée de façon digne de l'Union académique et de l'éminen t savant qui consacra à son élaboration sa vie trop courte . On saura gré à Ussani de ce service discret, parmi tant d'autre s semblables .

J'ai eu le bonheur d'être en relations étroites avec lui pendan t la période entre les deux guerres, non seulement au sein d e l'Union académique, mais aussi dans le Comité international de s Sciences historiques . Là aussi, bien que placé en dehors de son terrain d'élection, la philologie classique, il se montra membr e zélé et administrateur compétent, et il ne passa jamais inaperçu . Sans doute, à certains moments, entre 1930 et 1940, la tensio n émotive était grande et les sentiments nationaux se faisaient jour sans ménagements ni douceur ; Ussani faisait alors preuve d'un patriotisme incendiaire et à la fois de courage et de tenacité . Mais ces explosions ne parvenaient pas à ébranler son amitié ; il était capable de lutter en faveur d'une cause tout en restan t loyal envers les hommes . Pendant la dernière guerre ces vertus de courage et de loyauté trouvèrent à s'exprimer dans de s circonstances extrêmement pénibles et même dangereuses pou r lui : l'Italie étant en pleine effervescence guerrière, il publia dans l'Osservatore Romano

un

long article en affectueux hommage à

trois de ses compagnons et amis, alors comptés parmi les ennemi s de son pays : le Polonais Michalski, l'Américain Lacombe et

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il Scozzese, Baxter . Ces pages arrivèrent par une voie clandestin e jusqu'au seul survivant des trois qui avaient longtemps travaill é avec lui à Bruxelles, La Haye, Varsovie, Vienne, Venise et ail -leurs, à élaborer le nouveau Du Cange, le Corpus Philosophorum ,

l'Archivum Latinitatis Medii Aevi et quantité d'autres entre -prises . Au dernier survivant des quatre amis incombe aujour-d'hui le devoir et la tâche de saluer Vincenzo Ussani enver s lequel lui-même, autant que les oeuvres citées, a contracté, au cours de ces jours de début et de formation, une lourde dette . Les promoteurs et les travailleurs des premières heures peuven t être oubliés ; ils vivront dans l'oeuvre accomplie et indestructible .

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