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Directives anticipées : vécu et représentations des patients en phase palliative

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Academic year: 2021

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HAL Id: dumas-01754769

https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-01754769

Submitted on 6 Jun 2018

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patients en phase palliative

Charlotte Giordani

To cite this version:

Charlotte Giordani. Directives anticipées : vécu et représentations des patients en phase palliative. Sciences du Vivant [q-bio]. 2016. �dumas-01754769�

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THÈSE D'EXERCICE / UNIVERSITÉ DE RENNES 1

sous le sceau de l’Université Bretagne Loire

Thèse en vue du

DIPLÔME D'ÉTAT DE DOCTEUR EN MÉDECINE

présentée par

Charlotte Gordiani

Née le 19 novembre 1989 à Tassin-La-Demi-Lune

Directives

anticipées : vécu et

représentations des

patients en phase

palliative.

Thèse soutenue à Rennes le 11 octobre 2016

Devant le jury composé de :

Monsieur le Professeur Patrick JEGO

PU-PH / Président du Jury

Monsieur le Professeur Claude ECOFFEY

PU-PH / Assesseur

Madame le Professeur Sandrine HUGE

PU-PH associée / Assesseur

Monsieur le Docteur Vincent Morel

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(4)

Remerciements

A Monsieur le Professeur Jego, vous me faites l’honneur de présider cette

thèse. Je vous remercie de l'intérêt que vous avez bien voulu porter à mon travail et de votre disponibilité. Je vous prie de trouver ici l’expression de ma sincère reconnaissance.

A Monsieur le Professeur Ecoffey, je vous remercie d'avoir accepté de juger

ce travail. Je vous prie de trouver ici l’expression de ma sincère gratitude et de mon profond respect.

A Madame le Professeur Hugé, pour avoir accepté d’être membre de ce jury et

avoir pris le temps d’apprécier ce travail. Je vous prie d’accepter ma respectueuse considération.

A mon Directeur de Thèse, Monsieur le Docteur Vincent Morel : pour m’avoir

fait l’honneur d’accepter de diriger et d’encadrer cette thèse. Pour votre présence, votre disponibilité et vos critiques constructives.

Au Docteur Géraldine Texier, pour m’avoir épaulée et dirigée lors de la

construction de mon sujet. Merci pour vos précieux conseils.

A tous les patients rencontrés grâce à cette thèse : merci pour votre

disponibilité, votre gentillesse, votre intelligence. J’ai appris énormément à vos côtés, j’espère que ce travail de thèse sera à la hauteur de vos réflexions.

(5)

Liste des abréviations

ADMD Association pour le Droit de Mourir Dans la Dignité DA Directives Anticipées

EMASP Equipe Mobile d’Accompagnement et de Soins Palliatifs FHF Fédération Hospitalière de France

HHS Health and Human Service

IGAS Inspection Générale des Affaires Sociales INED Institut National d’Etudes Démographiques MMS(E) Mini Mental State Evaluation

MT Médecin Traitant

PC Personne de Confiance USP Unité de Soins Palliatifs

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Table des matières

I. Résumé ... 1

II. Introduction ... 1

III. Matériels et méthodes ... 3

A. Recherche bibliographique ... 3

B. Choix du type d’enquête ... 3

C. Recrutement des patients ... 4

D. Analyse thématique ... 4

E. Consentement et éthique ... 4

IV. Résultats ... 5

A. Patients ayant participé à l’étude et entretiens ... 5

B. Vécu et représentations des patients ... 6

1. Définition ... 6

a. Affirmer sa volonté ... 6

b. Exprimer plusieurs types de décisions ... 6

c. Anticiper la perte des capacités de communication... 7

d. Une étape avant la mort ... 7

e. Un lien récurrent avec l’euthanasie ... 7

2. Connaissances sur les directives anticipées ... 8

a. Evocation de la Loi Léonetti ... 8

b. Confusion autour des modifications de la nouvelle Loi ... 8

c. Un lien avec la personne de confiance ... 9

d. Les DA sont promues par les médias et les équipes de soins palliatifs.. 9

3. Motivations ... 9 a. Le patient lui-même ... 9 b. La maladie ... 10 c. Les proches ... 10 d. Le corps médical ... 11 e. Motivations extérieures ... 11 4. Contexte rédactionnel : ... 12

a. Des dates de rédaction variables ... 12

b. Nécessité d’un initiateur ... 12

c. L’importance de trouver le bon moment ... 12

d. Des difficultés pour rédiger ... 13

e. L’information reçue ... 13

f. L’aide apportée ... 14

5. Place du médecin traitant ... 14

a. Chaque généraliste connaît l’existence des DA … ... 14

b. … mais ne délivre pas d’information complémentaire ... 15

c. Le médecin traitant n’a pas un rôle majeur dans l’aide à la rédaction .. 15

d. Les patients expliquent les difficultés rencontrées par le généraliste ... 16

6. Ressenti ... 16

a. Des sentiments contradictoires ... 16

b. Certains prérequis sont nécessaires à la rédaction ... 17

c. De nombreux doutes sur l’impact des DA ... 17

(7)

V. Discussion ... 20

A. Forces et faiblesses de l’étude ... 20

1. Les apports de cette étude ... 20

2. Limites et biais ... 20

B. Discussion des résultats ... 21

1. Vécu et représentations des patients concernant les directives anticipées ... 21

a. Définition et motivations ... 21

b. Connaissances ... 24

c. Contexte ... 25

d. Ressenti ... 25

2. La place du médecin traitant ... 26

a. Une nouvelle loi qui place le généraliste au cœur du dispositif ... 26

b. Selon nos patients, le généraliste est quasiment absent du dispositif .. 27

c. De nombreux obstacles pour le médecin généraliste ... 27

3. Les perspectives apportées par cette thèse : organiser les dispositifs d’aide à la rédaction des directives anticipées ... 29

VI. Conclusion ... 31

A. Pourquoi aussi peu de patients choisissent-ils d’utiliser le dispositif des directives anticipées ? ... 31

B. Selon les patients, quel est la place du médecin traitant dans ce dispositif ? 32 Références bibliographiques ... 33

Annexes ... 36

Annexe 1 : Loi n° 2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie - Article 8 ... 36

Annexe 2 : Décret n° 2016-1067 du 3 août 2016 relatif aux directives anticipées prévues par la loi n° 2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie ... 37

Annexe 3 : ... 41

Décret n° 2016-1066 du 3 août 2016 modifiant le code de déontologie médicale et relatif aux procédures collégiales et au recours à la sédation profonde et continue jusqu'au décès prévus par la loi n° 2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie ... 41

Annexe 4 : Guide d’entretien... 44

(8)

I. Résumé

Contexte : Les directives anticipées (DA) de la loi Léonetti, modifiées par la Loi

n°2016-87, permettent au patient d’exprimer ses souhaits et d’anticiper les décisions sur sa fin de vie concernant les situations où il ne pourrait s’exprimer. Mais elles sont peu appliquées : 2.5% des personnes décédées en avaient rédigées en 2012 malgré leur intérêt démontré.

Méthode : Nous avons réalisé une enquête qualitative par entretiens semi-dirigés

auprès de 6 patients en phase palliative ayant rédigé leurs DA, pour comprendre cette sous-utilisation et la place du généraliste dans le dispositif.

Résultats : Aucun patient ne connaissait correctement la loi. Les patients les ont

écrites pour affirmer leur autonomie, refuser l’acharnement thérapeutique et exprimer leurs peurs concernant leur fin de vie. Ils ont souvent eu besoin d’un initiateur

extérieur pour débuter et les accompagner dans la démarche. Les proches étaient une source majeure de motivation et de soutien. Malgré un ressenti positif

(soulagement, cheminement), ils doutaient de leur efficacité. Le médecin traitant était quasiment absent du dispositif : au mieux il conservait une copie des DA.

Conclusion : Les DA sont un outil de dialogue favorisant le cheminement des

patients atteints d’une maladie incurable. Il faut renforcer les dispositifs d’information et de formation des professionnels de santé et du public. La discussion doit être initiée par des équipes de soins palliatifs en présence d’un proche. Trop de difficultés freinent actuellement l’implication première du généraliste, auquel on ne doit pas imposer une énième contrainte administrative, au risque de perdre l’intérêt des DA.

(9)

II. Introduction

Le dispositif des Directives Anticipées (DA) est inscrit dans le Code de la Santé Publique depuis la loi Léonetti du 22 avril 2005 [1]. Ces directives anticipées viennent d’être modifiées par la loi n°2016-87 du 2 février 2016, créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie [2].

Elles permettent à chaque personne majeure d’exprimer, par anticipation, ses volontés relatives à sa fin de vie, concernant une prise de décision intéressant la poursuite, la limitation, l’arrêt ou le refus de traitements ou d’actes médicaux, dans le cas où elle se trouverait dans l’incapacité d’exprimer sa volonté. Ces directives sont révocables à tout moment.

Dorénavant, elles « s’imposent aux médecins pour toute décision d’investigation, d’intervention ou de traitement, sauf en cas d’urgence vitale ou si elles apparaissent manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale. » [1]

Par ailleurs leur efficacité n’est plus à prouver. Il est démontré que les DA, lorsqu’elles sont bien rédigées, ont un intérêt réel dans la prise en charge des patients en fin de vie avec notamment un gain en matière de qualité de vie : les patients ayant rédigé leurs DA reçoivent moins de nutrition artificielle, effectuent moins d’aller-retour entre le domicile et l’hôpital et décèdent plus souvent à domicile [3]. En outre, elles peuvent permettre d’apporter du soulagement et de la sérénité aux patients atteints de pathologies incurables [4].

Il est également prouvé que les DA impactent clairement les décisions des

médecins concernant la prise en charge de la fin de vie : une étude INED de 2010 [5]

rapporte que lorsqu’elles existent, elles ont été un élément important pour 72 % des décisions médicales de fin de vie. Cet impact décisionnel est majoré si les DA sont en accord avec l’avis de la personne de confiance [6].

Pour le médecin, elles l’aident à tisser un lien de confiance fort avec le patient [7 ;14] et le sécurisent dans la prise de décision [14].

Toutefois, malgré un développement important des soins palliatifs en France depuis la Loi Léonetti, elles sont encore peu utilisées par les patients. En effet, selon un rapport INED de 2010, uniquement 2,5% des personnes décédées en avaient

rédigées [5]. De même, une enquête multicentrique réalisée en 2010, l’enquête

DemandE [9] établit que sur les 782 patients interrogés, pourtant tous en phase terminale d’une pathologie chronique, moins de 2% avaient rédigé des directives anticipées.

Néanmoins, certains pays ont réussi le pari d’un développement beaucoup plus large des DA. Aux Etats-Unis par exemple, où l’instauration des DA est plus ancienne, un rapport de la HHS (Health and Human Service) de 2008 présente des taux de DA entre 18 et 36% selon les études [10]. De même, au Canada, on retrouve un taux entre 47 % dans une étude datant de 2010 [11] parmi la population générale, et de 19% chez les personnes âgées [12].

En Europe, l’Allemagne se distingue avec un taux de DA allant de 12% dans la population générale [15] à 26% [16], voire 31% [17] dans des groupes sélectionnés.

(10)

hypothèse avancée est que les patients ne font pas confiance aux médecins, rendant ce dispositif inutile : « Les médecins seront de toute façon les seuls décideurs » expliquent des patients dans une étude menée par le Centre Ethique Cochin en 2012 [13]. C’est pourquoi la loi a été modifiée en ce sens, rendant les DA dorénavant

opposables aux décisions médicales.

On retrouve aussi dans plusieurs études, le problème du manque cruel d’information envers la population et les médecins sur le dispositif [14 ;18], comme l’explique le rapport Sicard [19] : « Les directives anticipées sont dans la Loi Léonetti mais n’ont aucune publicité, aucune obligation, et demeurent totalement en suspens dans l’univers médical, au contraire des autres dispositions prises dans d’autres pays d’Europe. »

Ensuite, l’essence même des DA est un frein à leur utilisation. En effet, on peut supposer qu’aborder le sujet de leur mort avec les patients est une étape difficile, qui peut être violente et ne pas leur apporter le bénéfice escompté [14;20].

Enfin, même si les patients surmontent leur peur d’évoquer leur mort, la rédaction des DA peut être difficile sur le plan médical et législatif et aboutir in fine à un document qui ne serait pas exploitable par les médecins [14]. Pour changer cela, le nouveau texte de loi prévoit notamment que « le médecin traitant informe ses patients de la possibilité et des conditions de rédaction des directives anticipées ».

Pour mieux comprendre ce faible taux d’utilisation des DA, nous nous sommes intéressés au cœur du sujet : les patients en phase palliative ayant rédigé des

directives anticipées. En effet, peu d’études en France se sont penchées sur le vécu

des patients, atteints de pathologies chroniques et incurables, et qui ont choisi de rédiger leurs directives anticipées. Nous voulons trouver les réponses aux obstacles des DA en analysant le vécu et les représentations des patients qui sont déjà passés par cette étape.

Nous allons donc explorer, par une étude analytique observationnelle, le vécu des patients en phase palliative concernant la rédaction de leurs directives anticipées selon deux axes. Premièrement nous chercherons à comprendre quels sont les besoins,

les motivations, l’information délivrée et le ressenti de ces patients lors de la

rédaction. Dans un second temps, nous évaluerons le rôle et l’impact des médecins

généralistes dans la rédaction de ces DA ; ces derniers étant, par le biais de cette

(11)

III. Matériels et méthodes

A. Recherche bibliographique

La recherche documentaire a été réalisée avec la base de données Pubmed®. Des thèses universitaires de confrères ont également été consultées via le catalogue SUDOC. Les mots clés utilisés pour ces recherches étaient : « Advances directives », « palliative care » et « patients ». Ces recherches ont ensuite été complétées par des rapports de missions gouvernementales disponibles sur le site internet <santé.gouv.fr.>

Ces documents ont été référencés et organisés à l’aide du logiciel Zotéro®.

B. Choix du type d’enquête

Nous avons réalisé une étude qualitative, observationnelle, prospective, multicentrique.

L’objectif de ce travail de recherche était de comprendre quel était le vécu, l’expérience et les représentations des patients ayant rédigé leurs DA. L’objectif secondaire était d’analyser la place du médecin généraliste dans cette rédaction, place supposée comme primordiale au vu du rôle majeur du médecin traitant dans la vie de famille et au regard des modifications apportées à la Loi Léonetti.

Nous cherchions donc à recueillir des opinions, des réactions, des représentations ; c’est pourquoi il a été réalisé une analyse qualitative. Celle-ci est définie par Paillé et Mucchielli [8] comme « une démarche discursive de reformulation, d’explicitation ou de théorisation de témoignages, d’expériences ou de phénomènes. Son résultat n’est, dans son essence, ni une proportion ni une quantité, c’est une qualité, une dimension, une extension, une conceptualisation de l’objet. » Contrairement à la méthode quantitative, dont l’objectif est de tester des hypothèses, la recherche qualitative est une méthode inductive, dont l’objectif est de créer des hypothèses à partir d’éléments complexes, difficiles à mesurer.

Nous avons inclus des patients majeurs, ayant déjà rédigé leurs DA et dont la

prise en charge était palliative. Les critères d’exclusion étaient une altération trop

importante de l’état général (Karnofsky <30 %), une incapacité à s’exprimer de

façon audible et la présence de troubles cognitifs avancés (MMS<20).

Nous avons réalisé des entretiens semi-dirigés qui permettaient au chercheur d’orienter l’entretien par des questions ouvertes puis de laisser le patient développer les idées sur le sujet. Le guide d’entretien a été réalisé en amont (annexe 3), à l’aide d’articles issus de la bibliographie et des conseils du Directeur de Thèse. Il n’a pas pu être préalablement évalué auprès des patients, faute de recrutement suffisant.

Ce guide a été construit en cinq parties : dans la première partie nous avons recueilli les caractéristiques de chaque patient, puis nous avons abordé dans une deuxième partie les connaissances des patients autour des DA. Ensuite nous avons exploré le contexte de rédaction dans un troisième axe, puis nous avons discuté de la

(12)

place du médecin traitant dans la quatrième partie. Et pour finir nous avons questionné les patients sur leur ressenti pendant et à la suite de la rédaction des DA.

C. Recrutement des patients

Le recrutement s’est fait en contactant par mail et par téléphone les différents médecins des Unités de Soins Palliatifs (USP) et des Equipes Mobiles de Soins Palliatifs (EMSP) de l’Ile et Vilaine et du Morbihan. Après avoir obtenu l’accord de leurs patients correspondants aux critères d’inclusion, ils nous ont transmis leurs coordonnées.

Après une description téléphonique brève du travail de thèse, nous avons rencontré les patients à leur domicile où a été réalisé, avant l’entretien, un questionnaire MMS. Une brochure d’information et une feuille de consentement leur ont été remises et signées.

Le recrutement a été réalisé jusqu’à saturation des données.

D. Analyse thématique

Le recueil de données s’est fait à l’aide d’un enregistrement vocal complété par des notes écrites, puis a été entièrement retranscrit par informatique.

Nous avons ensuite choisi une méthode d’analyse thématique pour l’analyse du corpus, selon la méthode définie par Paillé et Mucchielli [8]. Pour cela nous avons d’abord étudié ensemble les trois premiers entretiens en effectuant un relevé linéaire

de thèmes. Chaque thème a été associé à un extrait de verbatim lui correspondant.

De plus, un intervenant extérieur a aussi réalisé ce travail de relevé de thèmes sur ces trois premiers entretiens.

Ensuite ce relevé de thème a été analysé et a permis de caractériser plusieurs

ensembles thématiques saillants (ensembles de thèmes qui ressortent de l’analyse

en fonction d’un certain type de caractérisation, par exemple sous forme de récurrence, de divergence, d’oppositions, etc.). Puis ces ensembles thématiques ont été regroupés sous forme d’axes thématiques.

A la suite de cela, nous avons analysé les entretiens suivants en fonction de ces axes thématiques, permettant de dégager des regroupements thématiques pour arriver à la finalité attendue : l’arbre thématique. Cet arbre thématique représente les résultats de notre travail.

E. Consentement et éthique

Nous avons préalablement obtenu le consentement du comité d’éthique du CHU de Rennes pour la réalisation de cette étude.

Des fiches d’information ont été remises à chaque patient puis ils ont tous signé une feuille de consentement.

(13)

IV. Résultats

A. Patients ayant participé à l’étude et entretiens

10 patients ayant rédigé des directives anticipées ont été portés à notre connaissance.

1 patient a dû être exclu car son état général s’était trop dégradé au moment de l’entretien, 2 patients ont été exclus car ils présentaient des problèmes majeurs de communication et 1 patient a été exclu car il a refusé l’enregistrement de l’entretien.

Au total donc, 6 entretiens ont été réalisés. Les caractéristiques des patients interviewés sont explicitées dans le tableau 1.

La saturation des données a été obtenue au 6ème entretien, mais n’a pas pu

être vérifiée par manque de patients répondant aux critères d’inclusion.

Les entretiens se sont déroulés de février à juillet 2016. La durée des entretiens était comprise entre 59 minutes et 120 minutes, pour une durée médiane de 85 minutes.

Tableau 1 : Caractéristiques des patients

Caractéristiques Nombre de patients Age Entre 54 et 64 ans Entre 65 et 74 ans Entre 75 et 91 ans 3 0 3 Sexe Femme Homme 2 4 Statut Marital Marié Divorcé Veuf 1 2 3 Enfant Unique Plusieurs 1 5 Mode de vie Domicile EMASP HAD Aides autre EHPAD Hospitalisation USP 4 2 1 1 1 1 Pathologie Cancer SLA SEP et apparentés Insuffisance cardiaque 2 1 1 2

Date de rédaction des DA

< 1an 1 à 3 ans 3 à 10 ans > 10 ans 1 2 2 1

(14)

B. Vécu et représentations des patients

1.

Définition

Notre première interrogation était de savoir ce que représentaient les DA pour les patients et comment ils les définissaient.

a. Affirmer sa volonté

Les DA sont tout d’abord un outil de prise de décision pour les patients. Elles leur permettent d’affirmer leur volonté en ce qui concerne leur maladie. Ils se rejoignent pratiquement tous sur ce caractère décisionnel, voire d’autorité. « Cela me

fait penser à ma recherche de liberté à disposer de moi-même. I1P1 » ; « Directives : donner un ordre. I4P2 ». De plus, certains patients ramènent les DA à l’expression

de leurs dernières volontés, en étendant le champ strictement législatif des DA à

une approche plus globale de leur mort (testament, modalités autour de l’enterrement, etc.) : « C’est presque les dernières volontés. I2P2 ».

b. Exprimer plusieurs types de décisions

Selon les patients, les DA servent à guider les médecins concernant plusieurs

types de décisions, que l’on a classées ainsi : demander une limitation de soin, refuser l’acharnement thérapeutique, introduire un traitement (parfois sédation ou

réanimation), décider de continuer à vivre ou de s’arrêter.

Tout d’abord, les DA servent à affirmer leur volonté de ne pas initier un

traitement qui serait synonyme d’obstination déraisonnable : « Je ne souhaite pas

de massage cardiaque et de ventilation artificielle. […] Si je suis dans le coma, on arrête le défibrillateur. I2P3 » ; « Je ne veux pas être quelqu’un que l’on nourrit avec une sonde et qui dit simplement oui/non, et qu’on continue à me tourner sur le côté, et que je ne puisse plus donner mon avis… Là je dis clairement je préfère qu’on me laisse clairement sur la table. I4P3 »

D’autre part, la majorité des patients (4 patients, 7 verbatim) évoque

spontanément le refus de l’acharnement thérapeutique dans leur définition des

DA : « C’est un écrit qui confirme les opinions que j’ai concernant ma fin de vie, dans

lequel j’exprime le souhait que les médecins ne pratiquent pas sur moi d’acharnement thérapeutique. I1P1 » ; « Pas d’acharnement thérapeutique. I6P2 »

Ils définissent l’acharnement thérapeutique ainsi : « C’est quelqu’un de très

malade, et pour qui on refuse d’appliquer ce qu’il avait demandé verbalement ou écrit … C’est s’acharner sur quelqu’un dont on sait que la fin arrive… et que l’on veut maintenir en vie le plus longtemps possible. I5P2 »

(15)

Mais pour certains patients, les DA ont aussi vocation à exprimer une demande

de mise en place d’un traitement, notamment une assistance respiratoire ou une

nutrition artificielle. « Ils vont bien voir que je veux aller à la trachéotomie et que je

veux bien une gastrostomie. I5P2 ». Certains demandent même des soins de

réanimation : « « J’aimerais néanmoins bénéficier de soins en réanimation si mon

état clinique le nécessitait, I4DA ». Ce type de demandes revient fréquemment, chez

la moitié des personnes interrogées.

Parfois cette introduction de traitement est une demande spécifique de mise en

place d’une sédation : « Et donc au cas où cela commencera à griller, je suis dans le

groupe des gens qui seront traités par le sommeil si le besoin s’en faisait sentir. Autrement dit, si j’ai des douleurs d’ordre psy ou physiques, et bien ce que j’ai écrit dans cette demande de mise en sommeil anticipé, appelons-ça comme vous voudrez, on en tiendra compte, et on me mettra dans un état de sédation. I3P3 ».

On peut remarquer que certains patients demandent à la fois la mise en place d’un

traitement et la limitation d’autres traitements : « Ils vont bien voir que je veux aller

à la trachéotomie et que je veux une gastrostomie ; je ne veux pas que l’on s’acharne sur moi I5 ».

Enfin, pour certaines personnes interrogées, il s’agit de décider de continuer

à vivre ou de s’arrêter : « Si je souhaite continuer à vivre et de quelle façon I4P2 » ;

« Les DA c’est que l’on ne me fasse pas vivre plus longtemps que cela ne vaut I6P1 ».

c. Anticiper la perte des capacités de communication

Comme autre axe de définition, les patients parlent du risque d’évolution

délétère de leur maladie. Ainsi, les DA sont d’abord une anticipation sur ce qui

pourrait potentiellement arriver : « Anticiper : prévoir avant ce que je souhaite. I4P2 » ;

« Ca veut dire qu’on anticipe au cas où il viendrait quelque chose. I5P2 »

Les patients expriment quasiment tous (sauf un patient) que les DA interviennent dans

le cas où ils perdraient la capacité de s’exprimer : « C’était le fait de décider ce

qu’il se passe éventuellement après un gros accident cardiaque, avec perte de connaissance I2P2. » ou en cas d’apparition de troubles cognitifs « C’est dire précisément ce que l’on souhaite en fin de vie quand on a encore toute sa tête I4P3. ».

d. Une étape avant la mort

Enfin, la moitié des patients aborde le sujet de la mort, parfois de façon détournée, dans la définition des DA : « C’est-à-dire juste avant le crash I2P2 » ;

« Avoir réfléchi à l’au-delà I3P3 ».

Certains abordent cette peur de la mort, qui semble inscrite dans la rédaction des DA

« La mort cela fait peur, on ne sait pas ce qu’il y a derrière I2P2 ».

e. Un lien récurrent avec l’euthanasie

Pour finir, sur les 6 patients interrogés, 4 ont spontanément évoqué l’euthanasie dans leur définition des DA : « Bon on ne peut pas m’achever … Vous me parlez

(16)

d’euthanasie ? Oui, oui. I6P1 » ; « Oui, je parle de l’euthanasie qui n’est pas très loin, mais il reste encore un petit bout de chemin. I3P3 »

2.

Connaissances sur les directives anticipées

Nous avons exploré les connaissances des patients autour des grands principes de la Loi Léonetti et de la nouvelle Loi du 2 février 2016.

a. Evocation de la Loi Léonetti

Tout d’abord nous avons cherché à savoir si les patients avaient entendu parler de la Loi Léonetti : ce fut le cas pour la totalité des patients : « En France les médecins

sont bridés par la législation : la loi Léonetti. I1P2 «, « Bon, la Loi Léonetti je l’ai lue. I3P3 ».

Par contre concernant la Loi du 2 février 2016, seuls 2 patients en avaient entendu

parler : « Savez-vous s’il y a eu des changements ? Oui, il y a des avancées mais on

ne va pas jusqu’à l’euthanasie. I6P2 ».

b. Confusion autour des modifications de la nouvelle Loi

A propos de la validité des DA, quatre patients nous parlent de l’ancien

renouvellement à 3 ans. Mais trois de ces patients ne sont pas au courant de l’abrogation de la durée de validité des DA : « Non c’est un document valable 3 ans

que je renouvelle systématiquent. I3P3 », « Je les ai reconfirmés assez récemment car le délai était dépassé. I1P3 ». Seul un patient connait la suppression de ce

délai : « Quand je l’ai fait c’était valable 3 ans mais maintenant ça a changé. I5P2 »

Une autre réforme de la loi du 2 février 2016 est que dorénavant les DA

s’imposent aux médecins. Cependant, les réponses des patients à ce sujet sont

encore assez confuses. En effet, les 2 seuls patients qui savent qu’une nouvelle Loi a été réalisée, ne savent pas répondre à cette question : « [I] Le médecin a-t-il

l’obligation de respecter ce que vous avez écrit ? [P] Ben euh … oui ? Fin non, j’en sais rien. Je sais pas ! I6P2 », « Moi j’ai pas du tout du tout de connaissance de ce qu’ils vont en faire. I5P2 ».

De plus, seul un patient pense effectivement que les DA sont imposables : « En

principe ce que j’ai écrit atteste ma demande […] si je suis dans le coma on arrête le défibrillateur, c’est noté dedans, c’est logique quoi. I2P3 », mais ce patient avait

clairement expliqué qu’il ne connaissait pas la Loi du 2 février 2016 : « Non je ne

connais pas d’autres choses sur le plan juridique ou légal. I2P3 »

Enfin pour la moitié des patients rencontrés, les DA ne s’imposent pas aux

médecins : « Non ils n’ont pas d’obligation. […] Elles ne sont pas imposées aux

(17)

c. Un lien avec la personne de confiance

Par ailleurs, concernant le dispositif des DA, il est intéressant de noter que la moitié des patients évoquent la personne de confiance lorsqu’on leur demande d’expliquer ce que sont les DA sur le plan législatif : « Ce sont mes deux filles qui sont

dans le coup et qui ont contre signé le papier. I3P3 », « Mon fils c’est ma personne de confiance. I5P4 ».

d. Les DA sont promues par les médias et les équipes de soins palliatifs

Pour terminer, nous nous sommes intéressés à l’origine première de la

connaissance du patient sur les DA, avant qu’une information complémentaire ne soit

délivrée par un professionnel de santé.

La moitié des patients a découvert la notion de directives anticipées par les médias,

la télévision notamment : « Ils en parlaient à la TV et dans les médias, et Mme Bachelot

aussi je crois. I2P3 », « Tout simplement par les voies de presse et en cherchant un peu. I3P3 ». Pour le reste, ce sont des professionnels de santé qui les ont informés

de l’existence des DA et ce dans un contexte de maladie. Ces professionnels étaient des équipes de soins palliatifs : « J’ai découvert cela par le Dr H. [médecin USP], je

ne connaissais pas du tout avant. I4P2 », une infirmière de l’APF : « Par une infirmière de l’APF, je n’en avais jamais entendu parler avant. I5P2 », mais jamais le

médecin traitant.

3.

Motivations

a. Le patient lui-même

La principale motivation pour la rédaction des DA reste l’histoire personnelle

du patient.

Tout d’abord certains patients expriment la nécessité de pouvoir garder le contrôle sur eux-mêmes, ce qui leur est permis grâce aux DA : « Cela me fait penser à ma

recherche de liberté de vouloir disposer de moi-même. I1P1 » ; « Parce que j’en avais envie, je voulais disposer de moi-même jusqu’au bout, comme j’ai toujours fait. I3P1 ».

Ensuite, la notion d’histoire personnelle est importante : certains ont vécu le

décès d’un proche dans des circonstances qui leur ont parues difficiles, voire

inacceptables. Ainsi, deux patients nous parlent de leurs proches : « Il y a eu quand

même la maladie de mon épouse, et je peux vous dire que ça n’a pas compté pour rien. Elle avait 46 ans, j’en avais 45 … ce n’est pas facile à avaler du tout … Et elle a souffert, et j’en ai été témoin pendant plusieurs mois. I3P4 », « J’ai eu des amis très proches par exemple qui ont été atteints d’AVC et je les ai vu diminués par la maladie. I1P2 ».

(18)

s’expriment au travers des DA : « Non je pensais à la mort et je voulais que les choses

soient claires, c’est comme ça. I6P3 »

b. La maladie

Une autre motivation est bien-sûr la maladie elle-même. Pour certains c’est

l’évolution récente et inquiétante qui les a encouragés à se lancer dans les DA : « Le

mot dégénératif pour moi a été déclencheur pour faire les DA : comme il n’y a pas de marche arrière possible…I5P4 ».

Concernant leur maladie, on retrouve un leitmotiv quasiment commun à tous les patients (5 patients, 9 verbatim) : la peur de souffrir (souffrance psychologique et/ou physique) : « Mais surtout si je l’ai fait, c’est surtout du point de vue douleur…

car je l’ai fait tellement, tellement … je refuse de souffrir… I2P5 », « Eviter de souffrir le martyre … ne plus supporter la douleur physique. Oui le plus important c’est de communiquer et de ne pas souffrir… NE PAS SOUFFRIR. I4P4 ».

Mais à l’inverse, pour une patiente ce n’est pas sa maladie qui a motivé la rédaction. En effet, elle a écrit ses DA il y a plusieurs années, bien avant d’apprendre

l’existence de son cancer : « Mais pourquoi j’ai écrit ça au mois de mars 2014 … je

ne sais pas. Vous connaissiez l’existence de votre cancer ? Non ! Le cancer penses-tu … c’est un poisson d’avril … j’ai passé mon scanner le 1er avril 2016 et c’est là qu’on

a su que c’était un cancer. I6P3 »

Pour un autre, la réflexion autour des DA s’est faite longtemps avant l’apparition de la maladie, mais c’est l’annonce du diagnostic qui a motivé la rédaction quasi immédiate : « Oh oui il y a bien longtemps que ça mûrissait comme vous dites … avant

d’apprendre que j’avais une maladie grave. I3P3 […] J’ai mis du temps à écrire les premières. Non pas en me disant cela va attirer tous les corbeaux … non simple négligence … mais quand cela m’est tombé dessus je me suis dit hop là … il faut que je fasse quelque chose et tout de suite je les ai écrites dans la foulée. I3P7 »

c. Les proches

La moitié des patients exprime que les proches sont une source de motivation importante. Tout d’abord ils désirent limiter la souffrance de leur entourage grâce aux DA, qui leur éviteraient de prendre des décisions ou de se poser des questions trop difficiles : « Ça permet d’enlever une charge pour la famille qui je pense doit être

énorme. I4P3 », « Etre un légume ce n’est pas acceptable pour personne … c’est une tristesse pour les gens qui viennent vous voir. […] Oui, bien sûr, je pense à la famille. I2P4 ». Un patient au travers de ses DA, tient à décharger ses proches de toute

responsabilité : « Bien entendu, en la matière, je dégage formellement la

responsabilité de ceux (familles, proches, médecins) qui respectent cette volonté et je dénie à quiconque le droit de les mettre en cause dans ce cadre d’intervention ».

D’autre part, deux patients expliquent qu’ils sont inquiets du fait que leur décès pourrait être à l’origine de conflits au sein de leur famille. Ainsi, grâce aux DA et au dialogue qui en découle, ils peuvent anticiper les problèmes de succession : « Cela

veut dire que quand même, dès le moment où vous réfléchissez à la question, les interrogations, les bagarres, tout ce qui peut précéder une disparition ont été

(19)

évoquées, au moins une fois. Ce qui permet peut-être de dégager une certaine réflexion, au moins une réflexion, de la part de ceux qui vont hériter au sens large du terme. I3P8 »

De même pour deux patients, cela permet d’exprimer leurs souhaits concernant certains aspects de l’organisation de leurs funérailles : « Je ne veux pas de fleurs,

qui viendra retirer les fleurs quand elles seront aussi mortes que moi ? » a écrit le

patient 6 dans ses DA ; « Toutes les dépenses liées à ma situation personnelle sont à

financer à partir de 3 comptes bancaires, mes filles ont procuration » a rédigé le patient

3.

d. Le corps médical

Un autre but des DA est de donner des directives au corps médical, plus particulièrement aux médecins. Quatre patients expriment de manière forte le refus

de l’acharnement thérapeutique (5 verbatim) : « Pour me mettre à l’abri des

acharnements médicaux. I1P2 », « Si je tombe par terre et que je suis dans le coma c’est fini, ce n’est pas la peine. Ça ne sert à rien de me maintenir en vie. I2P4 »

A contrario, certains demandent aux médecins la mise en place d’un traitement. Deux patients font des demandes de sédation dans leurs DA : « Que si je suis dans

un état pathologique incurable et que je suis dans des souffrances intolérables, je puisse bénéficier d’une sédation terminale. DA patient 3 », « Je demande à ce que les soins et les traitements privilégient mon confort, et si je présente une souffrance réfractaire, je demande à être endormi. DA patient 2 ». Un patient va même jusqu’à

demander l’euthanasie (formulaire ADMD) : « Que s’il n’existe aucun espoir de retour

à une vie consciente et autonome, que l’on me procure une mort rapide et douce. Patient 1 ».

Pour deux patients, cette demande de traitement va même jusqu’à une peur d’un

« délaissement thérapeutique ». Un patient insiste pour recevoir des soins de réanimation : « En fait quand je suis allée à M. [NB : Unité de Soins Palliatifs], une

nouvelle interne est arrivée et m’a dit que si se reposait le même problème de me rendormir etc. - je sortais de réanimation - elle m’a dit qu’on n’essaierait pas de me réanimer. Et là le choc a été terrible. I4P2 », il est donc écrit dans ses DA : « J’aimerais néanmoins bénéficier de soins en réanimation si mon état clinique le nécessitait pour les raisons qui suivent […] ». Pour un autre, c’est une demande de trachéotomie « Et si on peut me trachéotomiser il faut absolument le faire car je l’ai demandé. I5P3 ».

Enfin pour un patient, les DA permettent aussi de résoudre les éventuels

problèmes de communication entre la famille et l’équipe médicale : « Quand on a

été à V., en réanimation, on a eu beaucoup de difficultés à échanger avec le groupe médical, car ils étaient pris. Ils ne voulaient pas essayer de m’extuber, on a pas mal bataillé. Je pense que les DA vont aider à résoudre ce problème de communication. I4P7 »

e. Motivations extérieures

(20)

patient rapporte « Je vois ça aussi d’un point de vue économique. I2P4 «, explique-t-il en parlant de la limitation des soins. De plus, un autre explique qu’il pensait que la rédaction des DA était une obligation légale : « J’ai senti que ça devenait presque

obligatoire car à cette époque on ne m’avait pas dit qu’il n’y en avait que 3%, j’ai compris que tout le monde allait les écrire … I5P3 »

4.

Contexte rédactionnel :

Nous avons abordé avec chaque patient les modalités de rédaction de leurs DA.

a. Des dates de rédaction variables

Tout d’abord nous avons relevé les dates de rédaction de chaque DA, que nous avons classés selon chaque grand projet de Loi sur les DA : Loi Léonetti de 2005, nouvelle Loi de février 2016. Il en ressort qu’un patient a rédigé ses 1ères DA ( ou du moins équivalent) avant 2005 (octobre 2001), quatre ont rédigé leurs DA entre 2005 et janvier 2016, et un patient a rédigé ses DA après la nouvelle Loi (février 2016).

b. Nécessité d’un initiateur

Ensuite nous avons cherché à savoir qui était l’initiateur de cette rédaction. Ce mot qui nous semble clé nous a été donné par le patient 4.

Cet initiateur peut tout d’abord être le patient lui-même, ce qui était le cas chez deux de nos patients interviewés : « Non on ne me l’a pas proposé, c’est moi qui ai décidé.

I3P73. »

Pour trois autres patients, il a fallu la proposition d’une équipe de soins palliatifs pour initier cette rédaction : « L’EMASP est venue me voir […], ils ne m’ont pas parlé

au début spécifiquement des DA […]. Puis ils sont venus à la maison, le Dr M. m’a dit il faudrait peut-être les rédiger, j’ai dit banco. I2P5 »

Enfin un patient a été motivé par la proposition d’une infirmière de l’Association des

Paralysés de France (APF) : « Mme M., qui est infirmière coordinatrice à l’APF qui a

voulu engager les directives anticipées. I5PA »

Par contre, chez aucun de nos patients l’initiateur n’a été le médecin traitant. 4

c. L’importance de trouver le bon moment

Une autre notion clé qui ressort de ces entretiens est qu’il faut trouver le bon

moment pour commencer la rédaction. : « Je me souviens que la cadre infirmière de

la clinique S.Y. s’est battue pour que je les rédige lors de ma dernière hospitalisation il y a un mois. Mais je n’ai pas voulu les rédiger à ce moment-là, il a fallu le Dr M. I2P7 » ; « Je pense qu’il ne faut pas poser la question quand la période est critique, car la personne elle pense à autre chose. Elle pense à sa maladie, elle pense à l’opération,

(21)

à ses gros problèmes … elle ne pourra pas réfléchir sereinement. Par contre, après avoir eu un gros problème, être passé pas très loin du décès, quand les choses se sont stabilisées, là je pense que c’est le bon moment. I4P5 »

Et même lorsque le patient est lui-même l’initiateur, il faut parfois un élément

déclencheur pour pouvoir se lancer : « J’ai mis du temps à écrire les premières. Non

pas en me disant ça va attirer tous les corbeaux … non simple négligence … Mais quand cela m’est tombé dessus je me suis dit hop-là … il faut que je fasse quelque chose, et tout de suite, je les ai écrites dans la foulée. I3P7 »

C’est pourquoi cinq patients sur les six interrogés expriment l’importance d’avoir un

délai de réflexion (huit verbatim) : « C’était le fruit d’une longue discussion entre nous

deux, M. connaissait bien ce qu’il se passait dans ma tête. Il m’a aidé à découvrir des choses me concernant. I1P3 » ; « Donc j’ai mis quelques temps à les rédiger, ça ne peut pas se faire du jour au lendemain. […] Et le faire en plusieurs fois, ça ne peut pas se faire comme ça « je vous prends à défaut, je viens vous voir et on en discute », il faut voir ses dires, et en reparler 2 mois après, les retravailler. I4P6 » ; « Elle est venue à plusieurs reprises pour discuter sur ce même sujet, et si je n’étais pas réceptif elle repartait. I5P4 »

Par contre, de façon singulière, un patient explique qu’il a rédigé ses DA au

moment où il l’avait décidé, presque sur un « coup de tête » et sans avoir besoin

de trouver « le bon moment » : « C’est moi qui ai fait cela comme cela, un soir. I6P1 »

d. Des difficultés pour rédiger

Concernant la rédaction en elle-même, la moitié des patients avoue avoir eu

des difficultés. Pour deux patients, elles sont d’ordre purement administrative / juridique : « C’est sûr qu’un bon rédacteur peut les faire, mais quelqu’un comme moi

qui n’est pas trop au fait des idées juridiques, c’est mieux qu’il y ait quelqu’un qui aide. I2P7 ». Concernant l’aspect administratif, un patient aurait préféré l’utilisation d’un

formulaire type, plutôt qu’un écrit libre comme il l’a réalisé : « Je voudrais qu’il y ait

un formulaire type, ou un questionnaire pour mettre des croix pour dire vraiment : « Mr P., on va faire une lettre type et vous triez ce que vous voulez faire, jusqu’où vous voulez aller » ». Pour un patient, ces difficultés étaient plutôt d’ordre émotionnelles : « J’ai mis du temps à les rédiger, ça ne peut pas se faire du jour au lendemain. I4P7 ».

Par contre, pour l’autre moitié des patients, se lancer dans la rédaction des DA, lorsque leur décision a été précise, a été très simple, que ce soit sur le plan émotionnel ou concernant la formalité administrative en elle-même : « Parce que je trouve que c’était

normal, il n’y a pas à se creuser le ciboulot, c’est comme ça. I6P4 » ; « Cela était une pure formalité. I1P5 »

e. L’information reçue

Nous nous sommes ensuite intéressés à l’information délivrée aux patients avant qu’ils ne rédigent leurs DA. Nous n’avons pas pris en compte les informations délivrées dans les médias par les brochures, mais nous nous sommes concentrés sur l’intervention d’une personne du milieu médical ou paramédical.

(22)

Sur les six patients interrogés, deux n’avaient pas cherché à recevoir une information d’une tierce personne, car ils n’en n’ont pas éprouvé le besoin : « Je n’ai pas eu de

papier officiel dans les mains, de questionnaire d’explication. C’est moi qui ai fait cela comme ça un soir. […] Personne ne vous en a parlé après votre diagnostic de cancer ? Non. I6P3 » ; « Est-ce que quelqu’un vous a aidé, vous a donné une information ? Non, tout seul. I3P6 »

A l’inverse, les quatre autres patients ont reçu une information qu’ils

estiment être détaillée, avant de rédiger leurs DA : « Puis on a commencé à discuter

des DA […] Le Dr M. m’a expliqué ce que c’était. I2P5 » ; « C’est Mme M. qui m’en a parlé. Car je ne savais pas ce que c’était, ni ce que cela voulait dire ou ce qu’il fallait mettre. C’est là qu’elle m’a dit que ce sont mes dernières volontés […] Elle m’a dit les DA c’est la Loi Léonetti et elle m’a expliqué. I5P4 » Cette information n’a jamais été

brève ou peu développée pour tous les patients interrogés.

Elle a été délivrée soit par une équipe de soins palliatifs (deux équipes d’EMASP, un médecin de soins palliatifs) soit par un membre paramédical (infirmière APF). Par contre, aucun médecin traitant n’a délivré d’information aux patients recrutés concernant leurs DA.

f. L’aide apportée

Enfin, nous avons cherché à savoir si les patients avaient été aidés pour

écrire leurs DA. Il en ressort que ce sont les mêmes patients qui ont reçu une information détaillée qui ont été aidés dans leur rédaction : « J’ai dit que je ne

savais pas comment les rédiger, je lui (NB : Dr M. médecin EMASP) ai demandé son aide pour les rédiger. I2P5 ».

Sans surprise, ce sont les mêmes personnes ayant délivré l’information et qui ont aidé le patient à écrire ses DA. De plus, une patiente a demandé l’aide de son époux pour réfléchir avec elle sur ses DA. Encore une fois le médecin traitant n’est pas

intervenu dans la rédaction des DA. Mais ceci est à nuancer : pour un patient,

l’EMASP avait convié le médecin traitant à la discussion autour des DA. Cependant, selon le patient, celui-ci n’a tenu qu’un rôle minime dans cette discussion et n’a pas réellement apporté son aide.

A l’inverse, les deux patients qui n’ont pas reçu d’information les ont rédigées

seul : « Non tout seul, j’ai fait ma rédaction. I3P6 ».

5.

Place du médecin traitant

Dans cette partie nous nous sommes intéressés à la place du médecin traitant dans la rédaction des DA.

a. Chaque généraliste connaît l’existence des DA …

Premièrement nous avons cherché à savoir si le médecin traitant était au

(23)

interrogé, le médecin traitant connaît leur existence : tous ont fait la démarche

d’en informer leur médecin généraliste : « Mon médecin traitant est au courant.

I5P6 » ; « Si ça la regarde, elle est au courant, elle sait. I6P4 ».

Mais ensuite, chaque médecin est impliqué de façon différente. Certains ont gardé une

copie des DA (quatre patients) : « Je lui ai juste donné comme ça, il les a mises dans

mon dossier médical. I5P5 » ; « Oui ! C’est elle qui les a scannées et qui les a mises dans mon dossier. I6P4 ». Mais d’autres patients (2) n’ont pas insisté pour que

leur médecin en garde un exemplaire : « Je lui en ai parlé mais il ne les a pas en sa

possession. I1P3 »

b. … mais ne délivre pas d’information complémentaire

Ainsi, nous avons voulu savoir si les médecins traitants avaient délivré un

complément d’information à leurs patients quand ces derniers les ont informés de

leur volonté de rédiger leurs DA. Mais encore une fois, il n’y a eu aucune information

ou discussion autour des DA entre les médecins généralistes et leurs patients : « Elle est au courant, elle sait. Mais quand elle vient là on n’en parle plus.

I6P3 » ; « Je lui avais demandé combien de temps il me restait à vivre […] mais il n’a pas abordé le sujet des DA. I2P6 » ; « Le médecin traitant je lui en ai parlé, je lui avais dit je vais faire ça, il m’a dit « bien sûr pourquoi pas ». Mais on en n’a pas discuté plus que ça. I3P6 ».

Il en est de même concernant une proposition d’aide pour la rédaction des directives anticipées. Certes, pour un des patients cette rédaction s’est faite lors d’une hospitalisation, le médecin traitant n’a pas pu intervenir. Mais concernant les cinq

autres patients, le médecin traitant n’est pas intervenu de façon marquée pour la rédaction des DA : « Non, mon médecin traitant est peu loquace à ce sujet. I1P4 » ;

« Mais il ne m’avait pas guidé du tout dans la rédaction. I3P6 ».

La seule exception reste ce médecin traitant qui avait été convié par l’EMASP

pour discuter autour des DA, mais selon les souvenirs du patient, il n’a pas eu de place majeure dans le débat : « [I] Avez-vous rediscuté avec votre médecin

traitant de vos DA pendant votre temps de réflexion ? [P] Non, non jamais. Enfin si, pardon, erreur de ma part. L’équipe de soins palliatifs a souhaité que mon médecin traitant soit présent lors de leur passage à domicile, ce qu’elle a accepté. Donc elle était présente lorsque j’ai rédigé mes DA avec le Dr M.[I] Elle est intervenue de quelle façon dans la discussion ? [P] Je ne m’en souviens plus. C’est surtout le Dr M. qui est intervenu. Je ne sais plus de quoi ils ont discuté tous les deux. I2P5 »

c. Le médecin traitant n’a pas un rôle majeur dans l’aide à la rédaction De ce fait, nous avons demandé aux patients le rôle que devrait avoir leur

médecin traitant dans la rédaction de ces DA. Majoritairement (cinq patients sur

six), ils nous ont répondu que la place du généraliste n’est pas au 1er plan : « Je ne vois pas pourquoi ça ne serait pas son rôle, mais il faudrait qu’il soit éventuellement épaulé par une équipe de soins palliatifs. I2P6 » ; « Mon médecin traitant a une place importante, il en a une copie, mais son pouvoir s’arrête là. I3P6. » Seul un patient

accorde une place majeure dans le rôle du médecin traitant : « S’il avait pu m’aider à

(24)

Mais, de façon contradictoire, quatre patients pourraient voir à intérêt à ce qu’on leur propose une consultation dédiée à l’information et à la rédaction des directives anticipées, par leur médecin généraliste : « S’il avait pu m’aider à les rédiger, cela

aurait été l’idéal. I1P3 », « Donc que ce soit formalisé au stade de rédaction avec le médecin traitant, complétement d’accord […] Mais cela doit être au choix du patient : si le patient est d’accord, en avant ! On fait cette rédaction et on la consigne quelque part. Après on peut la remettre en forme dans l’imprimé dédié à ce problème très personnel. I3P6 ». Un autre patient émet quelques doutes sur l’intérêt de cette

consultation mais n’y serait pas opposé : « Je ne me sens pas concernée car c’était

fait avant le diagnostic (NB : a rédigé ses directives anticipées avant la découverte de

son cancer). Mais je ne ferais pas la démarche pour cette consultation … Qu’est-ce

que je dirais ? […] Oui j’en parlerais bien avec elle, mais maintenant je suis trop fatiguée. I6P4 »

Par contre, pour un patient l’idée de cette consultation ne fait pas sens : « Je ne

verrais pas l’intérêt. I5P4 ».

d. Les patients expliquent les difficultés rencontrées par le généraliste Enfin, certains patients ont émis spontanément leurs opinions concernant les

difficultés potentielles que pourraient rencontrer leurs médecins généralistes

pour les aider à rédiger leurs DA. Un patient avance d’abord le risque des difficultés

émotionnelles : « Mais il y a le côté humain … Vous n’êtes pas des machines. […] A

croire qu’il y aussi des médecins qui ont peur de la mort, de la mort de leurs patients. I2P6 ». Un autre patient soulève aussi la question du manque de temps : « Mais actif comme il est, pris par le temps avec tous ses patients, il n’aurait pas le temps de s’occuper de moi comme ça. Peut-être qu’il déléguerait quelqu’un pour ça. I5P4 ».

Enfin, 3 patients émettent spontanément des doutes sur l’intérêt que leur

généraliste porte au dispositif : « Et je ne sais même pas s’il était pour, il m’a dit que

« Vu le pourcentage de gens qui les ont rédigées, car ne sera jamais appliqué. Jamais les gens ne feront confiance à ces DA car ils ne sauront même pas si elles seront lues par les médecins qui s’occupent d’eux. I5P4 », « Je n’ai trouvé que pratiquement peu de compréhension et de connaissance de la part des médecins concernant les DA, je n’ai pas eu d’écoute sympathique, pas de compréhension. Notamment concernant mon médecin traitant. I1P1 »

6.

Ressenti

Dans cette partie, nous avons balayé les différents aspects émotionnels liés à la rédaction des DA.

a. Des sentiments contradictoires

Premièrement nous nous sommes intéressés à l’aspect émotionnel propre à l’écriture des DA en demandant aux patients comment ils se sont sentis juste après

(25)

avoir rédigé leurs DA.

On retrouve ainsi des sentiments variés et souvent contradictoires. En effet quatre patients (six verbatim) expriment des sentiments que l’on peut catégoriser comme

négatifs : de la colère : « Et de la rébellion aussi, à l’encontre de nos élus qui sont

infoutus de faire un pas devant l’autre pour avancer. I3P7 », de la tristesse : « Mais surtout beaucoup de nostalgie, à l’évocation de moments tristes, très tristes ; I3P7 »,

de l’angoisse : « Mais, malgré le stress, on sait bien ce que cela veut dire : il y a la

mort au bout. I2P7 », « Cela a été difficile de les écrire, mais maintenant le cheminement est fait, je pourrai les écrire de nouveau. I5P3 ».

Pour d’autres, cette écriture n’a suscité que peu de réaction : « Cela était une pure

formalité. Cela ne m’a ni angoissé, ni soulagé. Mais cela ne me rassure même pas sur ma fin de vie. I1P3 ».

Enfin, mêlé aux sentiments négatifs, il apparaît aussi un ressenti positif, notamment du soulagement (quatre patients, neufs verbatim) : « Mais je me suis

aperçu, avec l’assurance que m’a donnée le Dr J., et tous les médecins […] que tout le monde est ok pour suivre ma ligne de conduite. Depuis ça je sens une partie de l’esprit un peu libérée. I3P6 », « Je me suis trouvée beaucoup plus tranquille et soulagée, comme ça je me suis dit « Ils savent ce que je veux, je sais ce que je voulais… ». Comme un gros poids de moins à porter. I4P3 ».

Deux patients avancent aussi le fait que les DA leur ont permis de cheminer autour de l’évolution de leur maladie : « Ça m’a fait assimiler qu’il fallait que

j’intervienne autour de ma tombe. I5P5 », « Au début c’est un peu difficile, car ça fait penser à sa propre mort, donc c’est un peu difficile. Et ensuite j’ai trouvé ça vraiment intéressant d’y réfléchir, donc après j’ai trouvé ça bien. I4P6 »

b. Certains prérequis sont nécessaires à la rédaction

Dans un second temps, les patients ont exprimé tout ce qu’impliquait cette volonté d’écrire leurs DA.

Tout d’abord ils mettent en avant la nécessité de cheminer avant de rédiger leurs

souhaits concernant leur fin de vie : « Le fait de prendre un papier et un stylo, c’est

qu’il y a une acceptation. I2P7 », « Mais quand les fils sont tirés bon ben… Il faut s’y faire… la fin ce n’est pas simple non plus. Enfin… c’est de l’acceptation consentie largement, réfléchie et décidée. I3P5 », « Parce que pour avoir dans la tête de faire ses DA, il faut déjà avoir dans la tête que tu vas partir. I5P3 »

Ils soulignent de même l’importance d’être aidé et guidé dans ce processus. D’abord par leurs proches : « Il ne faut pas que ça soit brutal, que ça soit amené en

douceur. Et avec la famille, enfin la personne très proche. Il faut qu’il y ait la personne la plus proche : le mari, l’enfant ou la grand-mère, n’importe qui qui soit proche. I4P5 »

Puis ils parlent de l’importance de la collaboration médecin-patient : « Il est

peut-être utile pour vous les médecins qu’il y ait une collaboration entre le médecin et le patient. Ne pas lui dire écrivez vos DA, je les récupère puis on verra. I2P6 ».

(26)

D’autre part, les patients expriment leur sentiment concernant le

retentissement de leurs DA sur l’évolution de leur maladie.

Tout d’abord, nous leur avons demandé ce qu’ils pensent de l’impact qu’auront

leurs directives sur l’évolution future de leur maladie. La moitié des patients

(trois patients, cinq verbatim) doute réellement de leur efficacité pour obtenir ce qu’ils souhaitent lors de leur fin de vie : « Mais je n’attribue pas une puissance forte aux DA.

La plupart des médecins ignorent que cela existe. Elles ne sont pas imposées aux médecins (NB : interview réalisée peu de temps avant la publication de la nouvelle loi) I1P2. », « Non j’ai des doutes justement : qu’on me laisse quand même trop souffrir. I6P4 ». Pour l’autre moitié, cette efficacité reste nuancée : « Je l’espère, je ne l’ai pas fait pour rien ! I3P7 ».

Dans ce même esprit, les patients parlent de la confiance qu’ils ont vis-à-vis

des médecins pour appliquer leurs DA : « J’ai la certitude du Dr J. ici, ainsi que celle

de mon médecin traitant, le Dr L. à Rennes. On en a discuté, tout le monde est d’accord, tout le monde a vu mes papiers signés. I3P3 » Mais cette confiance absolue

ne concerne qu’un seul patient, les autres émettent encore des doutes : « Ce n’est

pas le fait que j’ai écrit ça ou ça qui va changer leurs actes. La décision elle sera prise à la fin, c’est eux seuls qui peuvent faire le geste. I5P7 ».

On retrouve chez un patient une ambivalence importante sur le pouvoir qu’il accorde aux DA ; en effet ce même patient nous dit à la fois : « Je me dis que peut-être elles

ne seront même pas lues … […] Je ne sais pas dans quelles mains elles vont tomber. Et vu la faible proportion de personnes qui les ont écrites … je me dis que les praticiens ne les regardent même pas. Vous vous rendez compte ce que c’est 3% ? C’est infime, ce n’est rien du tout ! I5P5 » et « C’est une maladie qui est irréversible … donc il faut savoir que s’il y a des écrits qui prouvent que l’on peut faire plaisir en exécutant ce que le patient a marqué ça le soulagera déjà ; s’il se réveil avec une trachéotomie il pensera « ah j’avais marqué ça sur ma feuille », rien que ça ça me guérira beaucoup plus. I5P3 »

Enfin, un patient insiste sur le fait que les DA doivent se développer de façon plus importante au sein de la population française : « Non il faut faire ça, il faut que ça se

développe autant que possible. I4P7 ».

d. Le soutien des proches

Pour finir, les patients nous parlent de la réaction de leurs proches.

Chez absolument tous les patients rencontrés, les proches ont manifesté du soutien concernant la rédaction des DA : « Mon entourage m’a écouté avec sympathie et

respect. I1P3 », « Mon mari a été surpris d’abord, puis il a trouvé que c’était une bonne solution. I4P7 », « Mon fils a trouvé ça normal. I5P6 ».

Par contre deux patients disent avoir eu des difficultés à en discuter avec certains membres de la famille malgré leurs liens étroits : « Mais je n’en ai pas parlé à mon fils

car sa femme est en train de se battre contre son quatrième cancer. I6P5 », « Mais je ne lui [sa fille] ai pas parlé des DA. Ce que je devrais faire d’ailleurs. Pareil pour ma sœur. Alors que cela la concerne ma fille … I2P8 »

(27)
(28)

V. Discussion

A. Forces et faiblesses de l’étude

1.

Les apports de cette étude

Tout d’abord la méthode de recherche utilisée, par entretiens individuels semi-dirigés avec analyse qualitative, a permis de faire ressortir des écueils, des bénéfices et des contraintes insoupçonnés ou peu mis en lumière par la littérature actuelle sur les modalités de rédaction des directives anticipées.

Ensuite, ce qui fait vraiment l’originalité de notre travail réside dans l’angle abordé : nous avons choisi de rencontrer les rares personnes ayant déjà écrit des DA dans un cadre palliatif. En effet, très peu de données de la littérature analysent ce point de vue.

Enfin, la question de la place du médecin traitant est elle aussi nouvelle. Car jusque-là, les études et le nouveau texte de loi projetaient de mettre en avant le généraliste pour l’aide à la rédaction des DA, sans que l’avis des patients n’ait été étudié.

2.

Limites et biais

La première limite que l’on peut soulever est que cette thèse était un premier

travail de recherche qualitative pour l’enquêteur : or la qualité de l’analyse dépend

des compétences et de l’expérience des chercheurs [21].

Deuxièmement, il existe un risque de biais d’interprétation : le recueil et l’analyse des données peuvent être orientés par l’opinion et l’implication du chercheur.

Concernant le recueil des données, il y a une possibilité de biais liés aux opinions propres de l’enquêteur (biais d’intervention). Nous avons tenté de le limiter par le choix

de questions ouvertes et en essayant de rester neutre tout au long des entretiens.

De plus, l’enregistrement audio intégral des entretiens a permis une restitution fidèle des propos des patients, sans traduction ni interprétation. Cependant, reste le problème de la communication verbale qui peut être difficile à maîtriser pour l’interviewer qui a peu d’expérience.

Concernant l’analyse des données, nous avons fait réaliser une seconde analyse et

une seconde interprétation des données des 3 premiers entretiens (qui ont servi à

réaliser l’arbre thématique initial) par un relecteur externe pour augmenter la validité interne de l’étude. Nous sommes conscients qu’une véritable triangulation des données aurait consisté à employer deux intervenants extérieurs qui auraient participé à la réalisation des entretiens, la retranscription, l’analyse et l’interprétation des données dans leur totalité. Cette technique n’était pas réalisable par manque de temps et de personnes disponibles dans notre entourage.

Figure

Tableau 1 : Caractéristiques des patients

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