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La brevetabilite des methodes commerciales aux etats-unis et en Europe : enjeux et perspectives

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(3)

A thesis submitted to the Faculty of Graduate Studies and Researchin partial fulfI1ment of the requirements of the degree ofLLM

La brevetabilité des méthodes commerciales aux

Etats-Unis et en Europe: Enjeux et perspectives

Clothilde Delbecq

Faculté de droit, McGill University, Montreal Novembre 2001

(4)

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0-612-79112-2

(5)

Abstract

The new information society coming along with the development of the e-commerce are now taking a itnportant place in the economy. They have put the patent systems of tlze United States and Europe face to a new challenge: the patentability of business methods a/one or implelnented on a computer. The debate has been great in each system. The history ofeach system and the requirenlents ta be filled by a patent application highlight the variolls and sometimes opposed reactions in the US and in Europe face to the question of the field of patentability. Ho'tvever. there are nlallY stakes al issue wltich may be concentrated around the essence of patent /aw: the promotion of innovation through the grant ofproperty rights.

(6)

Abstract

L'arrivée de la société de l'information et du commerce électronique, qui occupent aujourd'hui une place de plus en plus importante au plan économique a provoqué un nouveau défi GLU:

systèmes de brevets. La question s'est posée de savoir s'il était possible et souhaitable d'obtenir un brevet pour une méthode c011l1nercilile seule ou mise en œuvre par infonnatique. La discussion a été très forte alL"c Etats-Unis et en Europe. L'histoire de la mise en place des systèmes de brevets, les critères utilisés lors de l'exalnen d'une denzande de brevet mettent en lumière les positions différentes et parfois concurrentes de l'Europe et des Etats-Unis face à la question de l'étendue de la brevetabilité. Pour autanT, les enjeux en la matière sont nombrelL"C et se regroupent autour de ce qui constitue l'essentiel du droit des brevets: l'encouragenZell1 de l'innovation par ['octroi de droits de propriété.

(7)

INTRODUCTION

3

CHAPITRE 1 LES SYSTEMES DE BREVETS ..•••••••••••...•....•...••••••••...•••••••••.•••••••••••...••6

SECTION 1. LES PHILOSOPHIES DU DROIT DES BREVETS 6

§ /.AlL\"origines du droit des brevets 7

A. Les premiers pas vers le droit des brevets 7

1. Le brevet: privilège ou monopole 7

a) L'influence italienne 8

b) L'influence anglaise 10

2. La mise en place des systèmes de brevets 12

a) La mise en place du système américain 12

b) La mise en place du système européen 15

§2. Les justifications apponéesalcesystèmes de brevet /8

A. L'innovation: un atout économique 19

1. La fonction de l'innovation: un moteur économique 19

2. La nature de rinnovation: une création intellectuelle 22

B. L'innovation: un objet de propriété 24

1. La propriété: un droit naturel 24

2. La propriété: un outil efficace 26

SECTION2LES BASES ACTUELLES DES SYSTÈMES DE BREVETS .••...27

§ /. Les critères!ondllnlentalLtdu droit des brevets 28

A. La notion d'invention 28

1. L'invention ou des objets brevetables définis 29

a) La notion d'invention en droit américain 29

b) La notion d'invention en droit européen 32

2. L'appréhension de l'ingéniosité de l'invention 35

a) L'activité inventive de l'invention en droit américain 35

b) L'activité inventive de l'invention en droit européen 38

B. Les caractéristiques de l'invention .40

1. L'appréciation de la nouveauté .40

2. L'application industrielle et l'utilité .43

a) L'utilité en droit américain .43

b) L'application industrielle en droit européen 44

§2. L 'organisation des systèmes de brevets 46

A. Les administrations en charge du brevet. .47

1. Les offices de brevets 47

2. La procédure suivie devant rOEB et rUSPTO .48

B. Le rôle judiciaire en la matière .49

CHAPITRE 2 LES lVlETHODES COMlVIERCIALES 54

SECTION 1LA BREVETAB 1LITE CONTESTEE ...•...55 § /. Le rejet de la brevetabilité des méthodes cOl1l1nerciales 55

A. L'évolution de la position américaine 55

B. Le rejet complet par le droit européen 61

§2.La brevetabilité des inventions dans le domaine du logiciel 63

A. Les étapes du droit américain 65

1. L'interprétation jurisprudentielle de la catégorie« procédé» 65

2. L'analyse de la Cour Suprême et ses conséquences 69

B. La position européenne en matière de logiciels 73

(8)

§/ Labrevetabilité affinnée aux Etats-Unis 77

A. Les premiers signes en faveur de la brevetabilité des méthodes commerciales 78

B. State Street Bankou la fin des exceptions jurisprudentiellesà la brevetabilité 82

1. Les faits deI~espèce 82

2. La position du Circuit Fédéral 85

§2. Une brevetabilité limitée en Europe pour les logiciels et les méthodes commerciales88

A. La brevetabilité des logiciels: la nouvelle donne 89

B. La brevetabilité des méthodes commerciales: une protection limitée 92

CHAPITRE 3 LES PERSPECTIVES EN l\'IATIERE DE BREVETABILITE ••.••••.•••..••98 SECTION 1LES PERSPECTIVES PRATIQUES DEL~ELARGISSEMENT DE LA BREVETABlLlTE AUX ETATS-UNIS ...••.•...••...•...•....•••••...•...••...•...•...••....••..•98

§/.Les premières suites de l'élargissement de la brevetabilité 98

§2. Les batailles judiciaires américaines / 03

A. Le cas de Amazon.com 103

8. Les autres affaires dans le domaine du commerce électronique 106

SECTION2LES MESURES ENVISAGEES EN MATIERE DE BREVETABILlTE DES INVENTIONS

INFORMATIQUES 108

§/. Les mesures envisagées par les Offices de brevets /09

A. Les mesuresd~encadrement envisagées par l'USPTO 109

B. Les mesures envisagées par rOEB . 111

§2. LES MESURES ENVISAGÉESAUPLAJ.'llNSTITUTIONNEL 114

A. La réforme limitée du Congrès 114

B. L~échecde la réforme de la CEB 117

CONCLUSION GÉNÉRALE ...•..••...•.••...•.••...•••...•...•....••••••...••....••.•••..•.•....•••.••..121 • BIBLIOGRAPHIE 123 LEGISLATION 123 JURISPRUDENCE 123 Jllrisprll(lence améric..·aine /23 Jurisprudence européenne /26 DOCTRlN"E ...•...•...•...•.•...•...•.••.•...•...•...127 Monographies /27 Articles /28 AUTRES SOURCES J38 SITES WEB ...•...•...•...139

(9)

Introduction

L'une des grandes questions actuelles en matière de propriété intellectuelle est de savoir si

)'émergence dans notre société de l'ère de )'information~ le développement du commerce

électronique et le poids que représentent aujourd~hui pour les entreprises les titres de

propriété intellectuelle, imposent une remise en cause des cadres législati fs et jurisprudentiels

de protection ou si les nouveaux modèles qui émergent à l'heure actuelle~ nécessitent

d'adopter une position nouvelle, différentel.

Le droit des brevets n'échappe pas à cette remise en cause, avec tout particulièrement de

grands changements qui se profilent ou se précisent sur le terrain de la brevetabilité.Le brevet est un titre de propriété industrielle, dont l' histoire démontre en partie que sa mise en place et son développement ont été perçus comme une nécessité par les différents acteurs. Né en

• Europe vers le XVe siècle, pour récompenser l'inventeur d"une nouvelle technologie, le

brevet est aujourd'hui un stimulant économique de premier ordre.

Les demandeurs de brevets ne sont plus des inventeurs individuels, ce sont à présent les entreprises qui sont les «consommateurs» de brevets1.Ce dernier a grandement intluencé les

stratégies mises en place par l'entreprise tant dans son secteur recherche & développement que dans son positionnement concurrentielJ•Le brevet est aujourd'hui une arme, un bouclier face aux concurrent, mais également une référence de crédibi 1ité et une source definancement lorsqu'il s'agit de trouver des partenaires ou encore un outil demarketing~.

1Voir généralement c(Commerce électronique et propriétés intcllectuelles».Colloquc organisé par

r

Institut de

recherche en propriété intellectuelle Henri-Desbois le 7 novembre 2000. Paris. Litec. 2001.

2R. Merges.« One Hundred Years of Solicitudc: Intellcctual Property Law 1900-2000n(2000) 88 Calir. L.

Rev. 2187.à la p. 2220. [ci-après Merges.«One Hundrcd Years afSolicitudc»)1.

3Ibid.

~ A. Banow. "Separating Marketing Innovation From Actual Invention: A Proposai for a New. Improved.

(10)

Dans un tel contexte~ savoir ce qui est brevetable de ce qui ne l'est pas est essentiel. Et lorsqu~uneinvention n'est pasbrevetable~la question reste de savoir comment la rendre telle.

L'ensemble des acteurs économiques qui opèrent dans le domaine des nouvelles technologies

et notamment sur l'Internet se tourne actuellement de plus en plus vers le droit des brevets

considéré comme la protection la plus efficace d'une nouvelle technologie. Le brevet permet

en effet à son détenteur d~empêcher quiconque d'utiliser l'invention objet du brevet, et

permet donc au détenteur d'une nouvelle technologie de se procurer un avantage

concurrentiel de premier ordre. Il constitue par ailleurs une garantie très appréciée des investisseurs. Or, le poids économique de l'Internet est en pleine explosion. Selon les prévisions données par le directeur de l'Organisation Mondiale de la Propriété intellectuelle. Mr. Idris, l'Internet est susceptible d'engendrer en 2003 un chiffre d'affaires de l'ordre de

3200 milliards de dollars américains. Les perspectives économiques sont telles que les

entreprises ont tout intérêtà obtenir un avantage concurrentiel tel que procuré par le brevet.

Dans cet environnement très concurrentiel que constituent le commerce électronique et le

• développement de nouvelles technologies de l'infonnation. un nouveau type de brevet a vu le

jour. Il s'agit des brevets relatifs à des méthodes commerciales ou encore à des concepts

commerciaux. On considèrera que l'expression méthode commerciale ou «business method»

désigne « toute méthode utilisée dans les contacts directs entre l'entreprise et ses clients ainsi que toute méthode permettant à l'entreprise de fonctionner. tant en interne que dans ses rapports avec ses fournisseurs ou avec différentes administrations »6.

De telles méthodes peuvent-elles constituer une invention et bénéficier de la protection assurée par le droit des brevets? Cette question s'est posée, en deux temps. dans le système américain et dans le système européen des brevets. Les méthodes commerciales sont-elles des

procédés brevetables à elles seules? Le deviennent-elles lorsqu'elles sont mises en

application à l'aide d'outils informatiques et en particulier des logiciels?

5J-C. Galloux.«Brevets d'invention. logiciels: accélérateurs ou freinsà l'Interner?~) dans Commerce

électronique et propriétés imellectuel/es. Paris, Litec. coll. IRPI, 2001.5,àla p. 6. [ci-après Galloux..(Brcv~Js

d'invention, logiciels»).

(11)

Les systèmes de brevets ont été mis en place pour protéger des inventions ressortissant du

domaine de la technologie plutôt que de purs concepts7• Pourtant, détenniner le domaine

actuel de la technologie reste sans arrêt une question ouverte, une sorte de recherche en

, 1 8

perpetue mouvement.

Dès lors, deux éléments peuvent guider toute analyse de la brevetabilité: l'histoire et la politique. Dans un premier temps, l'histoire des systèmes de brevets peut nous éclairer sur les valeurs qui les ont modelés et sur les motifs pour lesquels une invention mérite une protection légale telle que le brevet. Dans un second temps, il con vient également de se poser certaines questions et de discuter l'opportunité d'octroyer une protection aussi forte que celle que

procure le brevet eu égard à l'avantage concurrentiel qu'il procure. Ces deux dimensions

planent constamment sur la question de savoir si les méthodes commerciales rentrent ou non dans le domaine des inventions brevetables.

Afin de bien comprendre la place qu'occupe actuellement cette question de la brevetabilité

des méthodes commerciales, il est essentiel donc de remonter quelque peu dans le temps, là

où l'invention prenait ses premières marques juridiques, et étudier comment les systèmes de brevets en Europe et aux Etats-Unis se sont mis en place (Chapitre 1). Il sera alors possible d'étudier plus précisément le sort des méthodes commerciales, qu'elles soient considérées seules ou dans leurs versions informatisées (Chapitre 2). Enfin, les perspectives et enjeux actuels de la brevetabilité seront discutés (Chapitre 3).

7R. Mcrges,«AsMany As Six Impossible Patents Bcfore Brcakfast: Property Rights For Business Concepts And Patent System Reform).(1999) 14Bcrk. Tech. L J. 577. à la p. 581. [ci-après Merges. ( Propcrty Rights For Business Concepts

),!-8A.L. Durham, "Uscful Arts in the Information Agc"(1999)B.Y.V.L. Rcv. 1419. aux p. 1444-1452. qui relève

qu'il n'cxiste aucune acceptation générale du tenne dont la signification dépend largement en partie du contcxtc.[ci-après Durham. "Uscful Arts'"!.

(12)

Chapitre

1

Les systèmes de Brevets

L'analyse de la matière brevetable ne peut se faire sans avoir une cel1aine compréhension du contexte plus général du système en cause. Afin de poser les bases de chaque système, il convient de rechercher les moteurs philosophiques et économiques de la construction des systèmes de brevets. De manière générale, il apparaît que les philosophies qui animent le système européen et le système américain de brevets sont assez convergentes dans la mesure où elles révèlent des buts similaires (Section 1). Toutefois, la mise en pratique de ces buts se réalise différemment aux Etats-Unis et en Europe puisque les critères choisis afin de définir l'invention brevetable diftërent quelque peu (Section 2).

Section

1.

Les Philosophies du droit des brevets

• Rechercher à percevoir la philosophie de chaque système de brevet revient finalement à en déterminer les valeurs essentielles. En tant que telles, ces valeurs constituent également les moteurs des systèmes, justifiant leurs constantes améliorations afin de mieux réaliser leurs objecti fs. La compréhension globale du système européen comme du système américain

implique le recours à l'histoire età l'économie.

En effet, la construction historique présente la façon par laquelle le brevet est apparu et donc la façon par laquelle il a été conçu (§ 1), alors que les théories économiques qui sous-tendent le brevet, présentent la façon par laquelle le brevet s'est définitivement implanté dans le paysage juridique de la propriété industrielle (§2). Dès lors, l'ensemble des valeurs de chaque système et donc les philosophies qui les animent pourront transparaître.

(13)

§1.

Aux origines du droit des brevets

• Dans le système européen et dans le système américain, deux étiquettes collent souvent au

brevet. Le brevet serait, d" une part, un monopole ou une source de monopole, légal et/ou

économique et, d'autre part, un droit légalement consacré. A rorigine, c'est sous la fonne

d'un privilège que le brevet prendra vie, et de là dérive sa filiation économique et monopolistique (A), alors que c'est en tant que droit de propriété (industrielle) que se conçoit la notion contemporaine, et dont découle sa filiation juridique (B).

A. Les premiers pas vers le droit des brevets

A ses débuts, la lettre de brevet est une faveur accordée par la couronne ou son équivalent

séculier9• [] s'agit donc d'un véritable privilège, accompagné parfois de droits de vente

exclusifs (l). Puis, peu àpeu les systèmes se construisent avec l'objectif de se départir de la précarité attachée au privilège (2) .

1. Le brevet: privilège ou monopole

Des deux continents qui nous intéressent, l'Europe peut très certainement se prévaloir d'avoir

été le berceau de la notion de brevet et par extension. du droit des brevets10. Deux pays

européens, (' Italie (a), et l'Angleterre (b), ont notamment joué un rôle particulier dans la diffusion et la construction juridique d'un tel pan du droit.

9E.C. Walterschcid,« The Early Evolution of the United States Patent Law: Antcccdcnls» (1994) 76 J. Pat.& TradcmarkOrF.Soc'y849[ci-après Waltcrscheid.«Antecedents>./.

10F.D. Pragcr, ··A History of [ntcllcctual Property From 1545 to 1781" (1944) 26 J. Pal. Orf. Soc'y 711.

(14)

a) L'influence italienne

• Au XVe siècle, l'Italie développe un commerce florissant et c'est naturellement dans ses

villes, et principalement Venise, qu'apparaît pour la première fois une coutume en matière de

brevets11• Dans un premier temps, on trouve une forme de coutume octroyant un

«privilège». II semble que cette coutume se soit développée au profit de la production de la soie avant d'être élargieà d'autres industriesl2•

Il s'agit pour son bénéficiaire d'obtenir le droit de réaliser. de fabriquer, de vendre ou encore d'utiliser une invention, quand bien même cela aurait pour effet de violer les droits des corporations existantes13•Or, le propre de l'organisation collective que sont les corporations,

au Moyen-âge, est de détenir le monopole de fabrication et de vente d'un commerce en particulier, comprenant notamment la fixation du prix et des standards de fabrication14.

L'apparition du privilège va donc permettre à celui qui détient une nouvelle technologie, lorsque celle-ci est utilel5, de pouvoir l'exploiter sans encourir les représailles factuelles ou

judiciaires des maîtres et compagnons. L'attribution d'un tel privilège n'est cependant pas exclusive et dépend alors de la seule volonté étatique.

Puis, la pratique coutumière est consacrée avec la promulgation, en 1474, par le Conseil des Dix de la République de Venise, d'un Edit relatif au statut des inventeursl6• Un lTIonopole de

dix ans est alors accordéàcelui qui construit ou perfectionne « any new and ingenious device

in this City, not previously made in our Commonwealth »17 .

Il Pragcr. "A Hislory of Inlcllcclual Property". supra note 10.àla p. 711.

12G.F.Takach.Patellts.ACalladiall Compediunl ofLalI,'and Practice. Edmonton. Jurilibcr. 1993,na1.1. à la p.

1 [ci-après. Takach.Patems!.

UComme le souligne Pragcr. "Whoevcr proposcd new technology necded. in the first place. a spccially crcated power or liccnse10infringe cxisling guild monopolics by making. sdling or using lhe new invention. Such specially crcatcd rights werc calicd privilcgcs". Prager. "A History of Intellectual Propcrty". supra nole 10.àla

714.

.. Pragcr. "A History of Intcllcclual Property" . supra note 1O.àla p. 713. ISPrager. "A Hislory of IntcllecluaI Property". supra note 1O.àla p. 714.

16P. Mathély.Le NOll1:eau Droit Français des Brevets d·/m'elltioll. Paris. JNA. 1991.àla p. 27; Voir

également Prager.«A Hislory of InlcIlectuaI Propcrty».supra note 10. à la p. 715.

(15)

Les conditions dYobtention sont présentées comme suit:

Every person who shaH build any new and ingenious device [... ] shaH give notice of it

to our General Welfare Board when it has been reduced ta perfection so that it can be

used and operated: it being forbidden ta every other person [... ) ta make any device confonning with and similar to said one, without the consent and license of the authorJ8•

Dès son introduction, le privilège/monopole est accordé de façon temporaire. Il est accordé

suite à l'enregistrement de [' invention, qui doit toutefois être nouvelle et susceptible de

reproduction. Ce monopole s'exprime par le pouvoir dYempêcher, puisque seul le

consentement de l'inventeur peut rendre l'utilisation ou la réalisation de l'invention licite. Les caractéristiques essentielles du brevet sont d'ores et déjà posées.

En tant que texte juridique, reconnu comme la plus ancienne loi sur les brevets, l'édit apporte

une contribution supplémentaire à l'analyse des origines du droit des brevets, avec les

considérations qui l'ont sous-tendues. En effet, le préambule contient déjà les premières fonnes de justifications pour l'attribution d'un monopole, et par-là même à la construction d'un système de brevets, lorsqu'il précise notamment que:

We have among us men of great genius, apt to invent and discover ingenious devices [ ... ) Now, if such provision were made for the works and devices discovered by such persons, so that others who may see them couId not build them and take the inventor's honour away, more men would then apply their ftenius, would discover. and would build devices of great utility to our commonwealth 9.

C'est donc l'idée de rétribution et de récompense individuelle qui marque le recours à la

notion de privilège. Eu égard à l'organisation sociale de l'époquey seul un privilège pouvait

empêcher la sclérose technique à laquelle tendait le modèle des corporations.

n

y avait

cependant nécessité sociale, car le progrès économique et social ne pouvait advenir dans un statu quo des pratiques et des techniques utilisées. Cette dualité de la rétribution, dans sa

18ED. Prager. '"The Early Growth and Intlucnce of Intcllectual Propcny" (1952) 34J. Pat. Off. Soc'Y106.

Il)F.M. Schercr.The Economies Effects a/Compulsar)' Parent Licellsillg. New York University Monograph

(16)

dimension individuelle et dans sa dimension collective et sociale, présente lors des prémices du brevet, marquera par ailleurs l'ensemble des systèmes de brevets2o•

L'Europe a encore exercé une certaine intluence dans la formation des systèmes de brevet,

notammentàtravers l'Angleterre.

b) L'influence anglaise

L'Angleterre a été à la fois un exemple et un contre exemple, par son développement

industriel et par son vécu en matière de n10nopoles21• Enfin, dans la mesure où son droit s'est

exporté dans ses colonies, l'Angleterre a été en partie à l'origine du droit américain et du droit canadien22.

C'est en 1236 que l'on trouve le premier monopole royal, accordé par Henry

m

23• Il s'agit

• d'une forme de gratification royale. Toutefois, cette prérogative roy.ale dépend du bon vouloir

du souverain et le monopole reste donc intrinsèquement précaire, le roi pouvant toujours reprendre ce qui a été accordé.

La précarité du monopole est ensuite accentuée par le fait que les cours ont accepté de connaître de l'étendue du pri vi lège sous

r

angle de la common law. Ainsi, la validité de tels monopoles a été contestée, notamment dans ce qu'il est convenu d'appeler le «Case of

Monopolies »2~, concernant un jeu de cartes, et dans lequel la cour a affirmé que le brevet

était nul, caril avait pour effet de créer un monopole contraire à la common law ainsi qu'à un

20'The patentlaws of France. along wÎlh those of England and the United States, arc branches of a single system ofjurisprudence. and thalthey aIl go back to a system ofprivileges, dcveloped in Vcnicc". voir Prager. "A History of [ntelIectuaI Property". supra note Il.àla p. 711.

21S. Lapointe.«L'histoire des brevets».cn ligne :<hup://www.robic.calpublicarions/246.htm> (date d'accès: 17 octobre 200 1).

21Durham. "Use fui Arts", supra note 8. à la p. 1429; En ce sens égalementLGoldsmith. Patents of Invention 1981. CarswcIl. au para 6.àla p. 50 qui souligne que "Although the philosophie basis of gram may have diverged in the systems in force in Great Britain and on the North American continent. both have their raots in the common law of England as cxpressed in the Statute of Monopolies", [ci-après Goldsmith. Patellts of

Im·elltiolll·

23Takash. Patellts. supra note ID,au para 1.2.àla p. 2.

(17)

certain nombre d~actes du Parlement. Face à la couronne et face aux juges" le privilège ne vaut pas grand chose.

C"est toutefois principalement avec le «Statute of Monopolies », adopté par le Parlement

anglais, en 1623, sous James

t

que l'Angleterre a le plus marqué les origines des systèmes de brevets15•Ce texte représente, en effet, rune des premières lois issues d'une nation moderne"

reposant sur des « bases objectives»26. LeStatut accorde en effet un monopole, au profit des

«true and first inventors».

L'objet principal de ce texte est de mettre fin" à la dérive royale, des privilèges injustifiés, mais une exception est cependant prévue en ces tennes

any letters patents and grant of privilege for the term of the fourteen years or under, hereafter ta be made of the sole working or making of any manner of new manufactures within this realm, ta the true and first inventor and inventors of such manufactures, which others at the time of making such letters patent and grant shaH not use" sa as also they shaH not be contrary ta the law" nor mischievous to the state, by raising prices of commodities at home" or hurt of trade, or generaHy inconvenient27•

Il faut relever que le Statut n'apporte aucune définition de l''invention. Le monopole du brevet

n'apparaît ni comme un droit ni comme découlant du régime de la propriété18• En réalité,

l'impact de ce texte réside dans le concept de brevet qu'il a adopté. Le brevet représente non pas le droit de vendre ou d'utiliser l'invention mais le droit exclusif d'empêcher quiconque d'utiliser l'invention. Une nouvelle caractéristique essentielle du brevet est alors acquise. Il reflète également l'opinion de l'époque, selon laquelle la technologie est quelque chose de spécial" et que seules les inventions nouvelles et utiles peuvent prétendre au brevet29• Dès

lors, l"ensemble des exigences de fond en matière de brevets se trouve déjà réuni.

En réalité. le Statut est un compromis entre la pratique royale d"accorder des brevetsà titre de faveur particulière et la reconnaissance que ces brevets" lorsqu'ils sont utilisés pour

25Goldsmith, Patellts of !m'elltioll . supra nole 22,§1 p. 49

1ftl.Schmidt-Szalewski et l.L. Pierre, Droit de la Propriété Industrielle. Paris. Litec. 1996. na 10.àla p. 5

1ïStatutc of Monopolies, section 6.

28Takach:'Patents", supra note 12. n° 1.5.àla p. 3.

(18)

l'avancement de la technologie.. sont des droits de propriété spéciaux qui peuvent améliorer le bien-être social.

Ayant ses origines dans la notion de privilège, telle qu'utilisée par les Italiens ou les Anglais, et ayant acquis ses principes de fond, c'est vers la fin du XVIDe siècle que le tenne de

« brevet» connaît un nouveau sens. A cette époque, les Etats-Unis et la France adoptent leurs premières lois sur les brevets et mettent ainsi en place de véritables systèmes.

2. La mise en place des systèmes de brevets

Bien que le droit moderne des brevets se soit construit en partie à l'encontre du concept

« brevet/privilège », l'analyse contemporaine du brevet, plus aux Etats-UnisJO qu'en Europe,

ne se départ pas totalement des origines monopolistiques du brevetJ). Afin de bien saisir la place du brevet de nos jours, nous distinguerons la mise en place du système américain (a) de celle du système européen (b).

a) La mise en place du système américain

En Amérique du Nord, le droit des brevets est d'abord un droit éclaté, et d'obédiences variées. Le Congrès Continental n'ayant pas reçu de compétence dans ce domaine, chaque Etat conserve donc la maîtrise de sa loiJ2•

En 1641, la Cour Générale du Massachusetts adopte un texte équivalent au Statute of

Monopolies, abolissant tous les monopoles à l'exception de ceux concernant les inventions

.10E.C., Waltcrschdd, -"To Promote the Progrcss of Science and Useful Arts: The Background and Origin of the lntellectual Property Clause of the United States Constitution" (1994) 2J.[ntell. Prop_ L. 1.n03. [ci-après WaItersheid, '"To Promote the Progress'ï .

.11 K. W. Dam, ''The Economie Underpinnings of Patent Law" (1995) 27 lnl. Prop_ L. Rev. 3.àla p. 17 qui relève pourtant qu'analyser le brevet en terme de monopole est trompeur dans la mesure où l'octroi d'un brevet n'aboutit pas à un monopole au sens économique du tenne, [ci-après Dam, ( The Economie Undcrpinnings of Patent Law»)1.

(19)

nouvelles et profitables au pays33. D'autres Etats sui vent la voie et adoptent leur propre loi relative aux brevets. Dans d'autres Etats, c'est une forme de coutume qui intervient parfois en matière d'inventions et d'importations pour reconnaître un privilège exclusif d'une durée détenninée. Dès lors, aucune uniformité administrative ou légale ne peut concrètement exister

àcette époque.

L'hannonisation a lieu, aux Etats-Unis, dès lors que la matière est attribuée à la comPétence fédérale. Ceci fût réalisé avec le vote de la Constitution américaine, qui contient ce qu'il est convenu d'appeler la clause de propriété intellectuelle. Le Congrès s'est alors vu accordé toute autorité afin de "promote the progress of science and the useful arts by securing for limited times to authors and inventors the exclusive rights to their respective writings and discoveries,,34. Cette clause constitutionnelle va imprégner le droit américain des brevets de tout l'optimisme de l'époque, de la foi envers la technologie et le progrès35. Elle pennettra

également une appréhension sans limite de la matière brevetable au cours du développement

Istonque u systeme e revet .. d ... d b 36

• Dès 1790, le Congrès légi tère et vote la première loi sur les brevets37. Cette loi est intitulée

«Act to Promote the Progress of Useful Arts »38 et sera signée par le Président Washington le

10 avril. Est considéré comme brevetable «any useful art.. manufacture, engine, machine or

device, or any improvement therein not before known or used ». L"inventeur doit présentersa demande auprès du Ministre de Affaires étrangères, du Ministre de la Guerre, et du Ministre de la Justice, qui ont reçu le pouvoir d'accorder un brevet lorsque au moins deux d'entre eux

jugent l'invention ou bien la découverte «sufficiently useful and important»39. Ils ont

également compétence pour fixer la durée du brevet qui ne peut toutefois excéder quartoze ans.

•~3«There shall be no monopolies granted or allowed among us. but for new inventions thm are protitable to the

country. and only for a short time ~). in Banner D.W.. "An Unanticipated. Nonobvious Enabling Portion of the Constitution: The Patent Provision. The Best Mode'· (1988) A.B.A. "Celebrating the Bicentennial of the US Constitution·'.àla p.1 0 [ci-après. Banner, '"Tht: Patent Provision'·] .

.l-fConstitution of the United States of Amt:rica,art.I.section 8. clause 8 (1787)

]5K.J. Burchfield, "Revising the 'Original" Patent Clause: Pseudohistory in Constitutional Construction" ( 1989) 2 Harv.J. Law& Tee. 155.

36Mergcs.«Property Rights For Business Concepts )). supra nOle 7.àla p. 587.

]7Le système mis en place reste assez indéfini. dans la mesure où l'attribution d'un brevet dépend de la question

de savoir si le Département d'état s·cstime convaincu par la description de l'invention.clpar le fait que celle-ci est suffisante et utile.

38Patent Act of April 10. 1790.

(20)

Lesystème est refondu en 1793~ suite à 1~intervention de Thomas Jefferson notamment~qui

était le Secrétaire d'Etat de Washington et a donc vécu la première loï'~o. L'obtention d'un

brevet devient alors une fonnalité administrative dans la mesure où la procédure consiste en

un simple enregistrement de l'invention. Cette nouvelle organisation se justifie par le fait que les demandes de brevet sous le premier système se sont fortement accumulées et le bureau n~a pu assurer le traitement intégral de celles-ci. Une organisation différente a donc été choisie~ mais n'apportera pas meilleure satisfaction41•

Ce n'est qu'en 1836 que l'Office des brevets sera créé et que la procédure d~obtention du

brevet se trouve établie en fonction de critères objectifs, plus ou moins définis42: le

Commissaire aux brevets peut octroyer un brevet lorsqu'il estime qu'une invention est

«sufficiently useful and important~ it shall be his dutY ta issue a patent therefor »43.

La

loi

sera par la suite plusieurs fois modifiée~ en [839-w puis 1874 jusqu'à la réforme de [95245,

toute intervention législative ayant pour objectif de renforcer l'efficacité du système46•

La volonté de renforcer le système de brevet ressort~ en dernier lieu, pour les Etats-Unis, de

• leur engagement dans une zone de libre échange. Le premier janvier [994, les Etats-Unis, le

Canada et le Mexique ont formé une zone de libre échange47• Aucun régime unique,

concernant les droits de propriétéintellectuelle~n'a été mis en place, seuls quelques standards minimaux ont été prévus. Toutefois. le chapitre dédié à la propriété intellectuelle démontre la

volonté politique des états membres d'hannoniser leurs droits des brevets. Cette

harmonisation est rendue nécessaire par le fait que le droit des brevets peut constituer une barrière au 1ibre commerce.

Le préambule précise d'ailleurs que l'un des objectifs de l'ALENA est «d'encourager la

créativité et l'innovation ainsi que de promouvoir le commerce des biens et services qui sont

~oE.C. Walterscheid.«The Use and Abuse of Histoty: The Supremc Coures Interpretation of Thomas Jefferson·s Influence on the Patent Laws·' (1999) 39J. L. Tee. 195.

~I Un système de simple enregistrement aétémis en place en 1793.

·t!Patent Act of July 4. 1836, ch. 357,5 Stat. 117.

·BBanner. '"The Patent Provision·', supra note 33.àla p. 15.

+1Patent Act 1839, ch. 451. 53 Stat. 1212.

45Patent Act of 1952. ch. 950. 66 Stal. 792 (codified as amended at 35 V.S.C.§§ 1-376 (1994» .

46Auteur inconnu. '"The North American Patent Office'! A Comparative Look at the NAFfA. the European

Community, and the Community Patent Convention" (1993-1994) 27 Geo. Wash.J. Intï L.& Econ. 501. 47Accord de Libre Echange Nord Américain, Dcc. 17, 1992, U.S.-Can-Mcx., 321.L.M. 276 [ci-après ALENAI.

(21)

objet de droit de propriété intellectuelle»~8 «notre traduction ». Les parties de la zone de libre-échange s'engagent à fournir une protection adéquate et effective aux droits de propriété intellectuelle, et également àassurer leur mise en oeuvre~9. Cette protection est détenninée par le droit national propre à chaque Etat. Cependant, une autre disposition prévoit que

«patents shall be available and patent rights enjoyable without discrimination as to the field of technology, the territory of the parties where the invention was made and whether products are imported or locally produced »50.

Cette dernière disposition est particulièrement importante dans la mesure où, sans pour autant atteindre un système unique et central isé en matière de brevets, il est certain les droits nationaux sont susceptibles de s'influencer. Ledroit américain est sans aucun doute celui qui est le plus à même d'intluencer révolution juridique des autres pays membres. Les Etats-Unis ont le système de brevet le plus lourd économiquement, leur position en la matière est donc importanteàsaisir1•

b) La mise en place du système européen

Le droit européen est tributaire de sa construction historique. AI'origine, la zone

géographique que représente l'Europe est caractérisée par une multitude de pays, ayant

chacun développé son propre système juridique en matière de brevets5:!. L'Italie et

l'Angleterre représentent assez bien la typologie des situations nationales lors des prémices de la mise en place de systèmes53•

-ISALE NA. supra note 47. Préambule. -19ALENA. supra note 47.art. 1701 (1).

50ALENA. supra note 47.art. 1790(7).

51~<Les entrepriscs américaines arrivent en tète au niveau mondial par le nombre de brevets déposés. Ce sont également les plus importantes exportatrices de brevets. Puis viennent par ordre décroissant le Japonet l'Europe ».S. Boutillier.«L'cntreprencur face à la propriété industriclle : Histoirc ct actualité»dans B. Laperche. dir..Propriété Industrielle et Innovation. La flOu\'elle économie fausse-t-e/le "enjeu? , Paris.

L'Harmattan. 2001.25àla p. 42 [ci-après Boutillier,«L'cntrcprencur faceàlapropriét~industriellc: Histoire et actualité»1.

51G. P. Paterson,The European Patellt System. The Laws and Practice of the European Patent COllventioll,

Londres. 1992, Swect & Maxwell. [ci-après Patcrson.The European Patellt System

1.

(22)

La majeure partie des pays situés en Europe se dotera d'un système de brevet au cours des

XVme et XlXe siècles54• Plusieurs systèmes seront expérimentés, tout comme aux

Etats-Unis, du simple enregistrement administratif à l'attribution justifiée en fonction de critères spécifiques, jusqu'à la création d'organismes spécialisés chargés de gérer l'ensemble des demandes de brevets.

Et c'est à peu près à la même époque que les Etats-Unis, qui ont opéré leur grande réfonne en

1952, que le droit en Europe apparaît. C'est sous

r

impulsion de la construction européenne

que les grands changements auront lieu. En 1950, le sénateur français Longchambon présente le premier projet de brevet européen, suivi par d'autres! dont aucun n'aboutit55•

Puis, trois conventions sont signées à Strasbourg: une signée le Il décembre 1953

hannonisant les fonnalités prescrites pour les demandes de brevet; une autre signée le 19 décembre 1954 établissant une classification internationale des brevets d'inventions et une dernière signée le 27 novembre 1963 qui unifie quelques éléments du droit des brevets. Cette dernière convention a particulièrement rapproché le droit des différents pays européens.

Dans la même période, la construction européenne se poursuit avec le Traité de Rome, signé le 25 mars 1957, qui institue un marché commun entre les pays signataires. Ce marché connaît la libre circulation des personnes56• des capitaux57, des biens58 et des services59•

Cependant, un tel marché s'accommode mal du cloisonnement de marché qu'opèrent les droits de propriété industrielle60• Dès lors, les pays signataires se sont penchés sur l'idée d'un

brevet européen.

5-SPrager. supr.l note 11.àla p. 71 1.

55P. Mathely.Le droit européen des brevets d'Ùn'elltioll. Paris. JNA. 1978.àla p. 8 [ci-après Mathély.Droit

EllropénJ.

56Article 48-58 Traité de Rome instituant la Communauté Economique Européenne. 25 mars 1957. enlign~ : Conseil de l'Union Européenne <hup://uc.cu.intlfrlsumm.hrm >(date d'accès: 10octobre2001).(ci-après. T. Romel

57Article 67-73 T. Rome. supra note 56.

58Article 9-37 T. Rome. supra note 56. 59Article 59-66 T. Rome. supra note 56.

()() L.A. Askew.« The ECJ. The rCI and rntellcctual Property : [s Harmonisation the Key'!)J(2000)7 Tulsa J.

Comp.& [m'I L.375. à la p. 377 qui souligne que<cthese basics freedoms of the common market can only he

realised by approximating the laws of the EU membcr states. thus involving a system through which aIl obstructions to competition are rcmoved".

(23)

Plusieurs projets ont été présentés et c'est finalement dans le courant des années 70 que le système européen des brevets se met en place. Deux systèmes voient le jour, sans qu'aucun

ne soit fondé sur un instrument juridique communautaire. Le premier système résulte de la

Convention de Munich, signée le 5 octobre 1973, concernant le brevet européen61• Lesecond

résulte de la Convention de Luxembourg, signée en 1975, sur le brevet communautaire62•Ces

deux conventions étaient destinées à créer un droit européen complet, pour autant, ce vœu

restera pieu puisque la Convention de Luxembourg n'est toujours pas entrée en vigueur, faute de ratification suffisante63•

LaConvention sur le Brevet Européen (ci-après CEB) est en vigueur en 197i>-l.Le préambule précise que les états contractants ont décidé de renforcer la coopération des pays d'Europe

pour la protection des inventions. La Convention met en place une rationalisation de la

délivrance des brevets par l'institution d'une procédure centralisée, gérée par ("Office Européen des Brevets65•

Le brevet européen devient un titre de propriété industrielle, qui est délivré à la suite d'une

• procédure européenne unique et centralisée en fonction de règles de fond unifonnes66• La

CEB ne crée pas de titre uniforme de protection. Le brevet s'applique dans chaque Etat figurant dans la demande et éclate donc en autant de brevets nationaux que le demandeur en a souhaité67• Le brevet européen produit alors les mêmes effets qu'un brevet national68• Il est

également soumis au même régime qu'un brevet national.

n

n'y a pas de Cour compétente au niveau européen pour trancher les litiges en matière de

brevets. Chaque Etat conserve la maîtrise de rapplication et du respect de sa propre loi, et

61Convention sur le brevet européen. en ligne: Office Européen des brevets

<hup://www.europcan-patcnr-officc.orglcpc/pdf htm >(demière moditication: 8 novembre 2000).

62Accord en matière de brevets communaUlaires. faitàLuxcmbourg. version définitive signée Ic 15décembre 1989. J.O. du 30.12.89, N°L401. 1.

03J-C. Galloux.«Ledroit des brevets en tin de XXème siècle: éclatement ou rccomposition»danslvfélanges offertsàJeall-Jacques Burst, Paris. Litce. 1997. à la p. 213..

~Ci-après CES.

65Ci~aprèsOES.

66Préambule CEB. supra note61.

fJ7Livre~'ertsur le brevet communautaire et le système de brerets en Europe. 1998. à la p. 4. en lignc : Office

Européen des Brevets <hup:llwww.curopa.cu.inllcomm/intcrnaL markcllcn/inLprop/patfr.pdf> (date d'accès: 10 octobre 200 1). {ci-après. Livre vertl : Article 3 CEB, supra note 61.

(24)

c"est pourquoi les cours nationales ont à connaître du droit européen des brevets et à en développer leurs interprétations69• En conséquence.. le risque existe de voir se développer des

approches différentes, voire opposées, en matière de brevet européen70•Le système européen

reste donc marqué par une certaine complexité. Les brevets nationaux.. les brevets européens et le brevet communautaire (bien que non entré en vigueur à ce jour) coexistent71•

Le droit moderne des brevets s'est développé de façon concomitante à l'évolution industrielle et économique de chaque zone étudiée. La notion même de brevet s'est finalement détachée quelque peu de ses origines historiques pour se révéler à travers le prisme de la propriété dès lors que la mise en place des systèmes a été opérée. Les justitications apportées à l'élaboration et au renforcement de ces systèmes nous éclairent encore sur les enjeux en matière de brevets.

§2.

Les justifications apportées aux systèmes de brevets

Plusieurs théories se sont développées pour justifier ou promouvoir la mise en place d'un système de brevet ainsi qu'une large compréhension de la matière brevetable7:!. L'essentiel de

la justitication apportée à la mise en place d'un système de brevet provient de l'analyse économique (1). De celle-ci ressort la nécessité de stimuler l'innovation, et c'est là qu'entre en jeu le brevet en tant que droit de propriété (2).

bl)Pour plus d'information sur le fonctionnement de l'DEB. voir en ligne: <hup://www.c:uropcan-patcnl-oflicc

.on!lcpod~lailcd.htm>(dcmièœ modification: Il septembre 2001). 70Livre vert. supra note 67. au para. 1.1àla p. 5.

71Livre vert. supra noie 67. au para 2.2.àla p. 5.

n A.S. Oddi. "Un-Uniticd Economie Theories of Patents-The NOI-Quitc-Holy Grair' (1996) 71 Notre DameL. Rev. 267 [ci-après üddi. "Un-Uniticd EconomieTheories'l~E. Mansfield. "[nlcllectual Property. Teehnology and Economie Growlh" dans F.W. Rushing & C.G. Brown. dir.. /Iltelleetlta/ Propeny ill Science, Tee/m%gy

and Ecollomie Peifonllallce.Boulder. WcstvÎcw. 1990.17.àla p. 23 [ci-après Manstield. "[nlcllcelual Propcrty. Technology and Economie Growth"J.

(25)

A. L'innovation: un atout économique

• Historiquement" plusieurs théories sont venues justifier ("attribution de brevets en matière

d'invention et la mise en place de véritables systèmes de brevets. Une première analyse économique, centrée sur les fonctions de ("innovation" justifie la mise en place d"une protection adéquate (1). Une seconde analyse, centrée sur la nature de rinnovation, justifie également une protection juridique (2).

/. La

fonction de l'innovation : un moteur économique

Sur un plan tout à fait général, la connaissance est une ressource qui pennet d'augmenter

("efficacité économique ainsi que la productivité73• La connaissance et le savoir sont le

berceau de l'innovation7-l, qui se nourrit de multiples savoirs et savoir-faire. L'innovation, quelle qu'en soit le domaine" semble constituer un facteur clé d'une part, du développement technique, industriel et commercial de la société et, d'autre part, du progrès économique75•

L'innovation est l'élément qui a permis, depuis le Moyen-âge, de développer l'activité

agricole, lorsque la société était essentiellement agricole, puis l'activité industrielle lorsque la société était essentiellement industrielle. Avec la révolution industrielle" les avancées

technologiques « deviennent de façon quasi systématique des marchandises et alimentent

l'expansion industrielle»76. A présent, l'innovation joue pleinement son rôle, au moment

même où la société est très orientée vers l'ère de l'information77•

D'un point de vue macro économique, les économistes soulignent aujourd'hui l'importance de l'accumulation du savoir, de la connaissance, et de l'innovation dans le processus de

73E.S. Maurer. "An Economie 1ustification For a Broad Interpretation of Patentable Subject Matter" (200 1) 95

Nw. U.L. Rev. 1057.àla p. 1070 [ci-après Maurer. "Economie Justification"].

74L'innovation correspondàl'application d'une technologie ou encore d'une invention.

7SA. Chavanne ct 1-1. Burst.Droit de la propriété industrielle.5c~d.,Paris. Dalloz. 1998.àla p. 2 ; G. Finniss.

~(Les brevets ct l'expansion économique»dansMélanges Bastian.t 2.Droit de lapropriét~industrielle, Paris. Lib. Tech..àla p.223 .

76BoutiIlier. ( L'entrepreneur face à lapropri~téindustrielle: Histoire ct actualité»).supra note 51. à la p. 25.

77R.P. Merges. ··Commercial Success and Patent Standards: Economie Perspectives on Innovation" (1988) 79

(26)

croissance économique78• Et certains voient dans l'avancée technologique le facteur

détenninant de la croissance79• Ainsi~ comme le soulignent Rushing et Ganz, ....Nonetheless

based on available evidence, technological change seems to have been a very important

factor, perhaps the most important factor~ underlying long-tenn economic growth in the

United States and elsewhere"so.

L'innovationsrest donc considérée comme un «bien» précieux, qu'il faut préserver mais

surtout encourager81• Dans cette perspective~ la mise en place d'un système devant stimuler

les créations technologiques est une nécessité puisque l'innovation ne peut survenir sans qu'il n' y ait eu recherche, développement et inventions8J.

Le but de ce système est d'abord de garantir un accès à la connaissance développée par

l'inventeur puis un accès àl'invention elle-même. En contrepartie de l'octroi de droits, d'une protection juridique, la société s'assure la connaissance des inventions et favorise par là même la diffusion du savoir. L'innovation stimule alors l'innovation, par cette accessibilité au savoir84•

78E. Kitch. '"The Nature and Function of the Patent System"(1977)20 J.L. &Econ. 265 [ci-après Kitch. "The Patent System"); Voir également Durham. "Usefui Arts", supra note 8.

79B.J. Riordan. "WhaCs Driving Patent and Trade Mark Applications FilingsT'(2000)22 Eur. I.P. Rev. 349.à la p. 350 [ci-après Riordan. ( What's Driving Patent and Trade Mark Applications Filings?»1.

gOMansfield, "intellectual Property. Technology and Economie Growth". supra note72.àla p. 19.

81 Merges. ( Economic Perspective On [nnovation».supra note 77. à la p. 807, qui souligne que la distinction entre invention et innovation est crucial pour comprendre le développement de la technologie ainsi que les fonctions du système de brevets, notamment en ce que l'invention est la réalisation de ridée de l'inventeur alors ~ue .I:innova~ionest la versiontonction~elledeYinvcnti.onI~rsqu'elle:st mise~urle marché. #

- L economlste Joseph Schumpeter a de montre que mamtemr un certam pouvOIr de monopole sur le marche, en cc compris la protection assurée par le droit des brevets. permet d'assurer à la société I"obtention des bénéfices de l'innovation technologique. voirL.l.Raskind. ( The State Street Decision»)(1999) 10 Fordham LP.• Media

& Enl.L.l.6I. à la p. 69; La Commission Européenne souligne que ( la protection de l'innovation est indispensable. Sur le plan économique. il est clairement établi que les entreprises possédant un savoir-faire ct commercialisant des produits de marque et des produits ou procédés brevetés. sont dans une meilleure position concurrentielle pour gagner ou maintenir leurs parts de marchés»),Livre vert. supra note 67.àla p. 4.

8.1L.l.Raskind. "The State Street Bank Decision: The Bad Business of Unlimited Patent Protection for Methods of Doing Business"(1999) 10 Fordham LP.. Media& Ent.L.l.61 [ci-après Raskind. '"The Seate Street

Dccision"l·

8-1 B. Laperche.«Brevets etnorm~stechniques. Oc l'incieutionàl'invention au contrôle de J'innovation» dans

B. Laperche dir.,Propriétéindustrielle et ùmovaûon.La« IlOin'elle économie» jausse-t-e/le l'enjeu ? Paris.

(27)

La jurisprudence a souligné régulièrement cet aspect du système de brevet. Ainsi, dans

l'affaire KewalZee Oif Co. c. Bicron Corp.R5, la cour précise que rexigence de divulgation,

mise à la charge du demandeur, «will stimulate ideas and the eventual development of

funher significant advances in the art»86. De même, le fait d'accorder un brevet à un

inventeur «gives something of value to the community by adding the sum of human knowledge,,87.

Il Y a très certainement la même analyse du rôle de l'innovation dans une économie

capitaliste, en Europe et aux Etats-Unis. Ainsi, et à plusieurs reprises, la Commission

Européenne a souligné l'importance de l'innovation dans le développement économique et social. Notamment elle a argumenté en faveur d'une protection légale renforcée en précisant

Effective legal protection is a vital incentive for innovation. It offers innovators the guarantee of a right to profit from their innovation. There is also a need for existing

rules to he constantly adapted to the new circumstances introduced by technological

innovation. This is particularly crucial in the field of new technologies. The various systems for gi ving legal protection to innovation are, over and above their protection function, of growing economic importance in conquering export markets, combating piracy and in valuing a business (in the event of take-over or acquisition of holdings, for example)88 •

La protection par le brevet permet de satisfaire le besoin d'encouragement économique des inventeurs, mais surtout cette protection juridique joue un rôle direct dans les cycles

économiques guidés par l'innovation technologique89• Si l'invention peut donner lieu à une

innovation, à savoir d'un produit commercialisable, celle-ci est d'abord un produit intellectuel. En tant que création intellectuelle, et du fait de ses caractéristiques, une protection juridique est également rendue nécessaire.

85Kell.:alleeOilCD.c. Bicroll Corp .•416 V.S. 470: 94 S. Ct 1879: 40 L.Ed. 2d 315: 1974 U.S. Lexis 134: 181

U.S.P.Q. (BNA) 673 (Sup. Ct. 1879). [ci-aprèsKewaneeVil Co. 1

!l6KewalleeOilCD..supra note85. au para. 481.

117United Statesc. Dllblilier Condenser Corp.. 289 V.S. 178. au para. 186.

ilSCommission Européenne. Livre ...en surl'im.m'ation.déc. 1995. COM (95) 688 f. Déc. 1995. en ligne: Union Européenne <hup://www.curopa.cu.intlcnlrccord/gn:cn/gp002fr.doc> (date d'accès: 15 sept. 200 1).

(28)

2.

La

nature de l'innovation: une création intellectuelle

Avant toute chose, l'invention provient d'une idée mise en œuvre par l'inventeur et qui a abouti àun résultat efficace. L'idée àla base de la création n'est pas protégeable, et cela vaut aussi bien en droit du brevet que pour les droits d'auteur. La propriété intellectuelle, au sens large, protège la mise en application. La prise en compte de la création par le droit est rendue nécessaire par les caractéristiques de toute création intellectuelle.

Le propre des créations intellectuelles ou des objets intellectuels est d'être non exclusifs. C'est à dire que plusieurs personnes peuvent utiliser ces objets au même moment, sans pour autant les épuiser. En d'autres tennes, la possession ou l'utilisation d'un objet intellectuel n'empêche pas d'autres possessions ou utilisations concomitantes9o•

La valeur de la création est constituée par le fait qu'elle est rare, voire unique ou en tous cas que son utilisation peut être contrôlée. En effet, si cette création était accessible à tous, au même moment, elle ne serait rien de plus qu'une infonnation, telles que celles qui constituent le domaine public. Les agents économiques n'investiront dans des créations intellectuelles que s'ils sont à même d'en garantir une certaine appropriation.

Quel intérêt un agent économique aurait-il àinvestir s'il n'était pas en mesure de garantir un certain retour sur investissement? Sans protection, les autres agents pourront, dès lors que la création est rendue publique, bénéficier de ces investissements91• Le brevet permet un contrôle de l'invention. Ainsi, « le brevet réconcilie l'entreprise privée et ['innovation, en

facilitant l'appropriation des techniques »92.

'JOE.C. Hettinger. "lustifying Intellectual Propcrty" dans A.O. Moore dir../Iltellectllal Property. Moral. Legal

and /mematiolla/ Dilemmas. Lanham. Rowman & Littlefield. 1997. 17. à la p. 20 [ci-après Hcttinger.

"lustifying Intellectual Property·ï.

'JIKitch, "The Patent System", supra note 78,àla p. 266. « The patent is a rcward that enahles the inventor to

capture the returns from his invcstment in the invention. returns that would othcrwise (absent secrecy) bc subject tCl appropriation by others»).

(29)

Dès lors~ et d"un point de vue micro-économique~ la théorie de la récompense justifie également la mise en place d'un système de brevet. Cette reconnaissance des contraintes économiques qui pèsent sur ceux qui investissent dans l'innovation est partagée par les deux systèmes juridiques. Toutefois, cette dimension est particulièrement présente en droit américain: les juges y décèlent le cœur de la philosophie des brevets. La Cour Suprême a ainsi considéré que

the economic philosophy behind the clause empowering Congress to grant patents and copyrights is the conviction that encouragement of individual effort by personaI gain is the best way to advance public welfare through the talents of authors and inventors (... ] Sacrificial days devoted to such creative activities deserve rewards commensurate with the services rendered93.

Dans une autre affaire, la Cour Suprême est encore plus explicite et souligne que la mise en place du système américain se justifie historiquement et économiquement comme suit

The stated objective of the Constitution in granting the power to Congress to legislate in the area of intellectual property is to « promote the Progress of Science and useful

Arts ». The patent laws promote this progress by offering a right of exclusion for a

limited period as an incentive to inventors to risk the often enonnous costs in terms of time~ research and development. The productive effort thereby fostered will have a positive effect on society through the introduction of new products and processes of manufacture into the economy, and the emanations by way of increased employment and better lives for our citizens. In return for the right of exclusion this '''reward for inventions...., the patent laws impose upon the inventor a requirement of disclosure94•

Aujourd"hui, la prise en considération de la valeur de la création intellectuelle est particulièrement présente dans les analyses développées en matière de brevets. Comme le souligne la Commission Européenne, la valeur des choses produites réside davantage aujourd'hui dans leur part d'investissement immatériel95~et les droits de propriété revêtent une importance grandissante.

9.1Ma::.erc. Stein,347V.S.20t. 219: 74S.Ct. 460;98L. Ed. 630.1954U.S.Lexis 267; 100U.S.P.Q.(BNA)

325(Sup. Cl. 1954).

I~Kewanee Oil Co.,supra note86. au para. 480.

(30)

Ainsi, le droit des brevets est avant tout un droit économique. Si l'invention participe à la

création de richesse~ elle est aussi en elle-même une richesse, puisque c'est un bien

susceptible de propriété. Elle fait partie, de nos jours, des actifs essentiels des entreprises96•

B. L'innovation: un objet de propriété

L'attribution de droits de propriété sur l'invention a parfois été justifiée par l'influence de la pensée du droit naturel (1) mais c'est surtout l'intérêt pratique de la propriété qui la fait s'ajuster parfaitement aux objectifs recherchés du droit des brevets (2).

1. lA propriété: un droit naturel

Le recours à la notion de propriété a été particulièrement défendu par l'école du droit naturel, et notamment le philosophe anglais John Locke97•Il considère en effet que toute personne est

maître de son corps et par extension de son travail, et qu'il est naturel qu'elle puisse récolter les fruits de son travail en devenant propriétaire de ceux-ci9S•Travail, résultats et individu se

trouvent ainsi donc intimement liés.

Edwin Heuinger synthétise la conception lockéenne en disant« What a person produces with

her OWIl intelligence. effort. and perseverance aught ta belong ro her and ta no ane

else »99.Dès lors, les inventeurs ont intrinsèquement des droits sur leurs inventions, dont le

droit de propriété, et il est de bonne justice que la société reconnaisse, respecte et protège ces droits. Toutefois, si la propriété est liée au travail personnel accompli, elle ne doit pas s'étendre au-delà du travail investi dans l'invention. Il faut donc limiter la propriété à sa juste valeur.

% B. Warusfel. ··Entreprises innovantes ct propriété intcllectuelle: les limites de la protection juridique du

patrimoine immatériel" dans B. Laperche dir.. Propriété illdustrielle et iWIO\,'atiOfI.La'lOcn·elle«économie»

fausse-t-el/e l'enjeu ? Paris. L . Hannannn. 2001.àla p.49.

'J11.W. Chi Id. '1"he Moral Foundations ofIntangible Propcrty·· dans A.D.Moore.dir.. /Ilte/lecrual Property.

Moral. Legal and /Illematiolla/ Dilemmas. Lanham. Rowman& Liuleticld. 1997. à la p. 57.

1)81. Locke. The Second Treatise ofGo\'emmellt. Cambridge. Cambridge Universily Press. 1960.

(31)

Or la question de la valeur du travail fourni n'est pas si simple. Toute création intellectuelle

n'est jamais créée ex nihilo. Les connaissances~ les idées d'un individu dépendent non

seulement de ceux qui l' ont précédé~ mais encore de ceux qui l'entourent au point que nous

pouvons souscrire à la formulation selon laquelle « intellectual products are fundamentally

social products»100.Dèslors~comment départager la contribution de chacun?

La valeur de la création intellectuelle s·exprime en valeur de marché. Or. la contribution

personnelle de l'inventeur n~est pas runique facteur déterminant la valeur de marché de

l'invention. En d'autres termes~la théorie lockéenne présente un intérêt certain à développer l'idée d'un droit naturel aux fruits du travail produit, mais elle ne peut se suffire à elle-même pour combler l' analyse juridique et économique de la question101 •

Cette approche~laquelle mélange respect du droit des personnes et des droits de propriété, est très répandue, en Europe, au XVIIe et surtout XVIDe siècles, et a très certainement marqué la

construction des droits de propriété industrielle102. Au contraire~ le droit américain est

nettement moins marqué par ces écoles de pensée. Il se développe dans une perspective

• utilitaire, comme en témoigne l'opinion de Thomas Jefferson, qui s'est exprimé dans une

lettre qu'il adressait le 18 août 1813 à Isaac McPherson. Il y rejette clairement toute justification du droit des brevets par le droit naturel

It has been pretended by sorne, (and in England especially), that inventors have a natural and exclusive right to their inventions [... ] [However, inventions} cannot in nature, be a subject of property. Society may give an exclusive right ta the profits arising from them, as an encouragement to men to pursue ideas which may produce utility, but this may or may not be done, accordin~to the will and convenience of the society, without daim or complaint from any body03.

100Heltinger. "Justifying IntelleclUal Propeny", supra note 90,àla p. 22.

101Quand bien même Locke apporte lui-même quelques limites, à la consécration de la propriété de ce qui est

produit par "individu. Notamment. l'appropriation des fruits du travail ne peut sc réalise que s'il y a« enough and as good left in common for others )). En d'autres tennes, l'appropriation ne doit pas non plus entraîner la dépravation d'autrui. Ensuitc, seule l'appropriation légitime doit être reconnue ce qui implique de ne reconnaître

~uece qui est suffisant afin d'éviter tout gaspillagc, voir notamment Hellinger, supra note 90. aux pp. 21-28.

1 :!A titre d'cxemple, la loi française sur les brevets de 1791 précise que toute nouvelle idée dont la réalisation

ou le développement peut devenir utile à la société appartient d'abordàcelui qui ra conçue. et que cela serait violer les droits de l'homme dans leur essence si une invention industrielle n'était pa'i regardée comme la

~ropriété de son créateur.

0.1Maurer. "Economie Jusitifaction" supra note 73,àla note de bas de page 45, citant une lettre de Thomas

(32)

En fait, l'octroi d'un droit de propriété sur l'invention est le moyen le plus efficace de faire produire aux systèmes de brevet toute leur fonction stimulante.

2.

La

propriété: un outil efficace

L'attribution de droits de propriété n'est pas la seule « récompense» possible de l'activité créative. On peut très bien envisager d'autres méthodes, tel!es que des systèmes de redevances, de soutien financier public, de reconnaissance socialelO4•Toutefois, l'attribution

de droits de propriété permet de garantir au mieux la stimulation économique de l'innovation. Le recoursà la propriété trouve également sa source dans la philosophie du XVllIe siècle. Sir William Blackstone considérait en son temps que « incentive ro devise conveniences or

creations improving life would no! be present

if

the creator could not subsequ.ently enjoy the benefits ofownership »105.

Qu'il s'agisse du droit américain106 ou du droit européen, le recours à la propriété présente rintérêt d'avoir accès à l'une des caractéristiques essentielles de celle-ci, à savoir l'excIusivitéI07. La propriété offre à son titulaire la capacité de bénéficier seul de la propriété

et d'empêcher quiconque d'utiliser, reproduire ou copier son invention108. C'est là que le

brevet trouve sa force. Les attributs de la propriété permettent de faire de l'invention un objet aliénable et facilite donc la transmission de l'invention.

Il Y a là moyen de stimuler l'individu inventeur, en lui garantissant des droits sur les fruits de son travail. L'entreprise est également stimulée que ce soit au titre de son service de R&D ou

104Ht:uingcr. "Justifying Intellectual Propt:rty". supra note 90.àla p. 25.

105Cite: par J.M. Hanissc. "An Economie View of Innovation and Property Right Protection in the Expanded Regulalory Statc" (1994) 21 Pcpp. L. Rev. 127.à la p. 145 [ci-après Hanisse. "An Economie Vicwof Innovation"J.

10635 U.S.C. 261. ··Subject to the provisions of this tille. patents shaH have the attribUlcs of personal property··.

107Hanissc. "An Economie View of Innovation". supra notc 105. à la p. 146. qui précise que "Judge Posner best states the classic economic position writing that there are three criteria in a efficient systcm of property right: universality. exclusivity and transferability. Universality refers to the bclief that ail rcsources exccpt those50 plentiful that consumption is unlimitcd should be owned or he capable of being owned by someone. Exclusivity ensurcs that the owner rathcr than third party will reap the benefits of her property. Transferability providcs rcroperty's highest value through voluntary cxchangc".

08Voir notamment.S.L. Carter. "Does h Malter Whether InteliectuaI Property rs PropertyT' ( 1993) 68 Chi.-Kent.L. Rev. 715.

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