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Découverte de manuscrits bouddhiques chinois au Japon

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Academic year: 2021

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Submitted on 23 Mar 2020

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Découverte de manuscrits bouddhiques chinois au Japon

Frédéric Girard, Liying Kuo

To cite this version:

Frédéric Girard, Liying Kuo. Découverte de manuscrits bouddhiques chinois au Japon. Bulletin de l’Ecole française d’Extrême-Orient, EFEO, 1996, 83 (1), pp.368 - 375. �10.3406/befeo.1996.3809�. �halshs-02515010�

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Japon. Découverte de manuscrits bouddhiques chinois au Japon

Conférence prononcée par Monsieur Ochiai Toshinori

Frédéric Girard

,

Liying Kuo

Citer ce document / Cite this document :

Girard Frédéric, Kuo Liying. Japon. Découverte de manuscrits bouddhiques chinois au Japon. In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 83, 1996. pp. 368-375;

doi : https://doi.org/10.3406/befeo.1996.3809

https://www.persee.fr/doc/befeo_0336-1519_1996_num_83_1_3809

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368 Chronique BEFEO 83 pour les études coréennes en France, de maintenir et de développer les activités du centre EFEO de Séoul dans le cadre d'une coopération scientifique accrue avec les chercheurs coréens, d'animer des programmes collectifs de recherche avec les collègues coréens, portant tout aussi bien sur la culture coréenne proprement dite que sur les études chinoises, japonaises ou sud-est asiatiques.

Pierre F. SOUYRI

JAPON

Découverte de manuscrits bouddhiques chinois au Japon Conférence prononcée par Monsieur Ochiai Toshinori

Monsieur Ochiai Toshinori, professeur au Kaj б Junior College de Kyoto (Japon), dirige une série où sont publiés des manuscrits bouddhiques copiés à la fin de l'époque Heian (XIe - XIIe siècle), conservés dans un monastère bouddhique à Nagoya, les Nanatsu-dera ]. Ces manuscrits sont pour la plupart des sutra rédigés en Chine entre IVe et VIIe siècle et jamais imprimés. Certains sont des œuvres inconnues à ce jour. Leur découverte est due à M. Ochiai. À la demande de l'URA 1063 du CNRS, et de l'EFEO, M. Ochiai a obtenu une bourse du Ministère l'Enseignement Supérieur et de la Recherche pour un séjour de deux mois à Paris. Durant son séjour (15 août - 14 octobre 1995) il a travaillé avec les chercheurs du programme d'étude des textes apocryphes de l'URA 1063 et de l'EFEO. On trouvera ci- dessous le texte de sa conférence donnée pour le grand public aux Instituts d'Extrême-Orient du Collège de France, le 28 septembre 1995. Sa conférence fut prononcée en japonais ; elle a été traduite par M. Frédéric Girard et Kuo Li-ying. Ce texte constitue une introduction aux collections monastiques japonaises de copies de textes bouddhiques ; la plupart ne sont pas encore bien répertoriées. M. Ochiai a attiré l'attention sur ces collections qui conservent des versions plus anciennes que celles utilisées pour éditer le canon dit Taishô. // a essayé d'expliquer pourquoi les originaux de ces textes n'existent plus en Chine. Ses arguments nous paraissent parfois discutables. Ils méritent toutefois d'être examinés.

1. Ochiai Toshinori, Manuscrits of Nanatsu-dera. A Recently Discovered Treasure-House in Downtown Nagoya, with related remarks by Makita Tairyô and Antonino Forte, translated and edited by Silvio Vita, Kyoto : Italian School of East Asian Studies, Occasional Papers 3, 1991, 102 p. + 18 fig. ; Makita Tairyô ^Hjn Ш^ et Ochiai Toshinori Ш'щЩ.Ш (éd.), Nanatsu-dera kôitsu kyôten кепкуп sos h o ■Ь^'^ШШШШ^иШШ (The Long Hidden Scriptures of Nanatsu-dera, Research Series) I : Chugoku senjutsu kyôten (sono ichi) ^ЩЩШ^Ш^ (Ж^- — ') (Scriptures Composed in China, volume I), Tokyo :

Daitô^jR, 1994, 536 p. ; idem, vol. Ill, 1995, 1278 p. Un compte-rendu des deux premiers livres a été fait par Kuo Li-ying, BEFEO, vol. 82 (1995), p. 38-44.

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Texte de la conférence

La transmission du canon bouddhique de Chine au Japon

II est difficile de savoir exactement à partir de quand et dans quelles circonstances les sutra bouddhiques chinois ont été transmis au Japon pour la première fois '.Ona une connaissance plus précise de la diffusion des textes bouddhiques à partir de l'époque de Nara (710-784). De nombreux matériaux provenant du « Bureau de copie des sutra bouddhiques » (ЖШ.Щ) sont en effet conservés dans le célèbre Shôsôin ТьМШ,, trésor de la famille impériale 2. Les recherches faites jusqu'ici n'ont concerné que les documents qui en proviennent.

En 735, le moine japonais Genbô^fô [?-746] a apporté de la capitale chinoise, Chang'an, une version complète du canon (— WM), en 5 048 rouleaux, conforme au Catalogue de l'ère Kaiyuan (Kaiyuan Shijiao lu ^ж>ШШ.Ш) compilé en 730 par le moine chinois Zhisheng ЩЩ- [669-740] [T. 2154]. Ce canon semble être une copie de la version effectuée à la cour impériale de Chang'an. D'autres copies du canon bouddhique ont existé antérieurement au Japon. Elles correspondaient au Catalogue des livres bouddhiques des Grands Tang (Da Tang neidian Ш-КШП&Ш) [Т. 2149], [compilé en 664] par DaoxuanUt: [596-667], mais les textes utilisés pour ce canon sont de provenances diverses et, par voie de conséquence, très divers. En effet ces textes ont été peu à peu apportés au Japon grâce aux efforts incessants de moines érudits japonais : certains provenaient de la péninsule coréenne, d'autres de la Chine, mais ils différaient des versions recopiées sous l'égide de la cour chinoise. De nombreuses questions de philologie subsistent les concernant.

En possession d'un canon constitué en bonne et due forme, la cour impériale japonaise a patronné une entreprise massive de copie de ce canon. C'est l'origine de la célèbre copie du canon bouddhique exécutée à l'instigation de l'impératrice Котуо^злИ/р [701-760] à partir de 740. Les exemplaires copiés à Chang'an par la cour chinoise sont perdus, mais nombre de textes qui en ont été recopiés d'après les copies chinoises au Japon par des scribes officiels et des moines nous sont heureusement parvenus.

De nouvelles traductions [et rédactions] d'ouvrages bouddhiques sont continûment apparues en Chine. Des moines japonais se sont efforcés de les rapporter au Japon. Tel est le cas de religieux comme SaichôUil (767-822) et Kukai^ïg (774-835), qui ont ainsi transmis très tôt beaucoup de textes jusqu'alors inconnus sur le sol japonais.

Histoire de la copie des textes bouddhiques au Japon

Au Japon, la plus ancienne copie de texte aujourd'hui connue date de 686. C'est le Recueil de dhâranï de l'aire de diamant (Jingangchang tuoluoni jing&ffll^jfcMfžM) [T. 1345]. Nombre d'autres textes ont dû être copiés antérieurement de façon irrégulière. À partir de l'époque de Nara des copies du canon ont été entreprises systématiquement et régulièrement sous l'autorité de l'État. Jusqu'à présent, on n'a guère prêté attention aux copies de textes mentionnés dans la « liste des ouvrages non inclus dans le canon » [T. 2157 (30), LV, 1046b- 1048a : ^АШВШ]. Ces textes étaient considérés comme faisant double emploi dans les catalogues bouddhiques chinois [infra], et donc au Japon où on suivait le modèle continental. 1. Les sources anciennes font état de deux dates pour l'introduction du bouddhisme, à titre officiel : 552 (Nihon shoki Ы^Щ%п, «Annales du Japon ») et 538 («Biographie du Prince Shôtoku » -Ы^ШШШЗТ-^Ш et « Historique et catalogue des biens du Gangôji » тпШ^ШШШШ^ШШШЫШ)- On préfère en général cette dernière date.

2. Shôsôin тпощо^Е'йШ^СЩ, « Archives du Shôsôin », in Dainihon котощ'оу^.Ц^'ёз'ЗСЩ, « Archives anciennes du Grand Japon », 1-25. Cf. Ishida Mosaku 1EJ EU/^fr, Shakyô yori mitaru Nara bukkyô no kenkyu

ШШ.Х Ь %.fz &'ъ%)З.ШШ(7)ЩЗъ (« Recherches sur le bouddhisme de Nara d'après les copies des textes bouddhiques »), Tokyo : Tôyôbunko, 1930 (réimpression 1966).

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370 Chronique BEFEO 83 Cependant, il existait un bureau d'examen des textes, où l'on collationnait ces textes écartés du canon.

Le travail de copie du canon a connu au Japon un regain de succès aux XIe et XIIe siècles : environ quarante de ces entreprises sont attestées ; elles s'appuient sur le Catalogue de l'ère Zhenyuan (Zhenyuan luMftM) compilé en 800 [T. 2157] pour la plus grande partie, mais utilisent également des textes de l'édition compilée sur ordre impérial sous les Song du Nord entre 971 et 983. Celle-ci se fonde sur le Catalogue de l'ère Kaiyuan, compilé en 730. Cependant, on a peu recopié de textes non intégés dans le canon.

Seuls subsistent quelques exemplaires. En voici un aperçu, monastère par monastère : 1. Le Tôji Ж#. 52 titres en 137 rouleaux d'ouvrages répertoriés comme « exclus du canon » с^АШШ) dans le Catalogue du canon du Tôji Щ^—ШШШШ) [Taishà : Shôwa hobô збтокигокиЩ^пШ^ШШШ, vol. I, 1015b-1016a]. Or, le catalogue chinois de l'ère Zhenyuan donne 118 titres en 247 rouleaux de textes exclus du canon [T. 2157 (30), LV,

1046b-1048a]. Il manque donc 66 titres et 110 rouleaux. Il est intéressant de noter que le Catalogue du Tôji mentionne 16 titres en 60 rouleaux de textes rares qui ne correspondent pas

au catalogue des Tang [idem, vol. 1, 1016a-c : '

2. Les Nanatsudera -t# à Nagoya. 13 titres en 105 rouleaux de textes écartés du canon. Le canon des Nanatsudera s'appuie sur la copie conservée au Hôshôjifëiî$xf du Catalogue de l'ère Zhenyuan. On peut le déduire du fait qu'il porte dans les colophons écrits sur l'exemplaire du même catalogue conservé aux Nanatsudera, au-dessus des titres recopiés, la mention : version du Hôshôji, cochée avec un trait rouge à droite ; version de Fushimi (inconnue), cochée avec un trait rouge à gauche ; version du Bonshakuji, cochée avec un rond noir au centre (£K SžENř &«.£15 Ш?ЖМ& Я«##).

Le canon du Hôshôji est perdu. Le Hôshôji était un temple fondé sur le vœu de l'empereur Shirakawa (1053-1129), qui héritait de la tradition des grands temples de Nara (Tôdaiji

3. Le Saihôji Шз#. 2 629 rouleaux au total. Sa copie du canon (dite aussi du Daimonji ÏÏJM) se fonde sur « la liste de textes inclus dans le canon (Л$Ш) » du Catalogue de l'ère Zhenyuan [T. 2157 (29, 30), LV, 1024a-1056a], en ajoutant 6 titres en 6 rouleaux de plus. Le canon de Saihôji renferme un copie de la Biographie du bodhisattva Ašvaghosa (Maming pusa zhuan ШМЩЩ^) [Т. 2046] et une autre du 9e et 10e juan du Grand sutra des noms de buddha (Da foming jingý^^x^) [cf. T. 441]. À partir de ces deux copies, on peut déduire la provenance de l'original : les copies du Saihôji appartiennent à la tradition de Nara et sont fondées sur le choix du Catalogue de l'ère Zhenyuan.

4. Le Kôshôji^s^ [temple de la secte Rinzai ЩЩ de Kyoto]. 4 000 rouleaux copiés pour la plupart après l'époque de Heian selon les recherches faites par Oya ТокщоХШ'ШШ- Y figurent également des copies manuscrites et des livres imprimés des époques Kamakura (1183-1331) et Muromachi (1392-1569). Une copie (colophon daté de 785) du premier rouleau de la Relation sur les contrées occidentales (Ta Tang Xiyu }1-ХШШШ£) [Т. 2087] a été exécutée à l'époque de Nara. Toutes ces copies se présentent sous forme de livres à soufflet et ont été rangées dans des coffrets en bois. Cependant, l'ordre en a été perturbé et le classement a été refait par Ogata Kushuz^frW en suivant la classification du Catalogue de l'ère Zhenyuan. Un travail d'investigation de ces textes a été entrepris par le Département de la Culture à partir de 1994. Il devrait se solder par un rapport détaillé.

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5. Le Hôryujijz^^-. Le canon de ce monastère comporte 1 262 rouleaux dont 401 de l'époque de Nara (710-781) et 625 de l'époque de Heian (781-1183). Le travail de copie du canon s'étant échelonné sur une longue période, on ne peut savoir avec certitude quels catalogues on a pris pour modèle. Pour ce qui est des copies de l'époque de Heian, on s'est, semble-t-il, fondé sur celui de l'ère Zhenyuan. Parmi elles, on compte notamment une copie du deuxième rouleau des Biographies des moines éminents des Grands Tang en quête de la Loi dans les contrées occidentales (Ta Tang Xiyu qiufa gaoseng гкиапукЩЩШт^ШШШШ) [T. 2066] de Yijing ШШ (635-713), ainsi qu'une copie des rouleaux 6, 8, 9, 11 et 12 du Catalogue de la dynastie des Grands Zhou (Da Zhou kanding zhongjing mulu ;*сЛ1¥ШЖ®ЕШ) [Т. 2153, compilé en 695], dont on a fait une étude purement formelle portant sur les mensurations, non sur le contenu.

6. Le Natori Shingûji^^îffg^. 3031 rouleaux. Les copies conservées dans ce canon ont été faites aux époques Heian et Kamakura. Le choix des textes semble se fonder également sur le Catalogue de l'ère Zhenyuan. Les numéros 2349 à 2366 du catalogue de cette collection semblent être le Sutra des noms de buddha en 16 rouleaux J. Il existe également deux rouleaux : le 6ejuan du Kinguanming jing &УаЩШ #ИтЧ) et le 3e juan du Xiukongzang suowen jing {Щ&ШЩЩШ. ШШ=.), qui sont classés parmi les textes exclus du canon par le Catalogue de l'ère Zhenyuan sans être toutefois des « apocryphes » (yijingffîM) [ce sont des extraits de sutra déjà inclus dans le canon].

7. Le Ishiyamadera 5Ш#. Le canon de ce monastère comporte 4 485 fascicules. Le travail de copie de ce canon s'est concentré à la fin de l'époque de Heian (milieu Xe siècle - 1183), mais il s'est poursuivi jusqu'à la fin de l'époque Momoyama (1569-1615). Les copies faites au début et au milieu de l'époque de Heian (784 - milieu Xe siècle) l'ont été à partir du canon copié à l'époque de Nara, tel que celui conservé au Tôdaiji ЖЛтр et au Daianji ýzžc^f à Nara, ainsi que celui des monastères de Kyoto, comme le EnryakujiM®^ ou le Kanjin'in de Gion ШРШФШс- Ces copies faites à la fin de l'époque de Heian suivent l'édition du canon des Song. Dans cette collection une copie du 11e rouleau du Catalogue de la dynastie des Grands Zhou est probablement identique à celles des Nanatsudera et du Myôrenji, mais diffère de celle éditée dans le Taishô.

8. Le canon ayant appartenu au sanctuaire shinto Matsunoosha fàWM. de Kyoto conservé maintenant au monastère bouddhique Myôrenji $>Ш#, fut copié à la fin de l'époque de Heian. Il devait comporter 4 000 rouleaux environ. Considéré longtemps comme perdu, il fut retrouvé il y a deux ans, sauf 45 rouleaux conservés au monastère Hônen-in ШШШ de Kyoto et un rouleau conservé au musée national de Kyoto.

La découverte de ce canon est due au professeur Nakao Takashi ФЩЩ, de l'Université Risshô (Tokyo), qui Га exhumé au Myôrenji, attenant au sanctuaire de Matsunoo, quelque 4 000 rouleaux datant de la fin de l'époque de Heian 2. La copie de ce canon semble avoir été entreprise à l'instigation de la puissante famille des Hâta ЩС, entre les années 1115 et 1163 environ. Mais la collection inclut cependant des textes extérieurs à cette entreprise, telles des copies du canon conservé au Лгб-тЩШ et une version du Mahàprajnâpâramitd-sutra qui est

de présentation, de facture et de calligraphie différentes des autres copies 3.

1. [Natori Shinguji issaikyô chôsa hókokusho^^lfř^^— ШШ. ШШ Ш^зШ, éd. par Tôhoku rekishi $Ытуок.&пШШ.$ЖЩШ, Sendai, 1980.]

2. Nakao Takashi, « Shinhakken no Matsunoosha issaikyô ni tsuiteilfritíli^tŽ^ífc — 'ШШ. t^ "OXi^X. » (Nouvelle découverte du canon bouddhique du sanctuaire de Matsunoosha), Rakuseifâ^ (publié par le bureau du Matsunoosha).

3. Cette copie est constituée de rouleaux de papier bleu foncé sur lequel on a collé un papier en couverture. Sur la couverture ainsi que sur les pages de garde, on a dessiné des représentations de la Terre pure et des enfers. L'axe du rouleau est décoré de nacre et de motifs dessinés, cf. Nakao Takashi, op. cit., p. 7.

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372 Chronique BEFEO 83 Un examen des manuscrits révèle que les copies de Matsunoosha appartiennent à la lignée du canon copié à l'époque de Nara. Les canons copiés à partir du XIe siècle ont en général été considérés comme ayant peu de valeur du fait qu'on n'y voyait que des répliques du canon des Song. Mais il en va tout autrement s'agissant de textes reproduisant le canon copié à l'époque de Nara. Toutefois un examen minutieux des manuscrits de cette collection du sanctuaire shinto s'impose : outre qu'ils comportent des erreurs de copistes, les manuscrits sont souvent endommagés par les insectes ou l'humidité. Leur utilisation s'avère donc délicate pour établir des textes critiques, d'autant qu'il n'est pas aisé d'en prendre des photographies, pour des raisons notamment financières. Il faudra sans doute attendre au moins trois années avant qu'on en dresse un catalogue détaillé.

9. Le Daitokuji ytffè^f, grand monastère Zen de Kyoto. Sa collection, qui devait comporter environ 6 000 rouleaux, n'a pas été compilée ni copiée en une fois. C'est tout au long des époques de Muromachi (1392-1569) et d'Edo (1615-1867) qu'on a, à plusieurs reprises, rassemblé les textes qui la constituent. Sa teneur est, pour ce motif, souvent composite. On y trouve plusieurs centaines de textes appartenant au canon copié à l'époque de Nara, ainsi que des spécimens des collections du Bonshakuji 3£P# et du Kôzanji i^[Jj# qui sont représentatives des copies de l'époque de Heian. Les lacunes sont comblées avec l'édition dite ОЪакиШШШ. (1669-1681). On ne semble pas avoir cherché à constituer un canon complet, mais seulement à rassembler des copies anciennes qui commençaient à passer au second plan devant la vogue, à la fin de l'époque de Heian et au cours de celle de Kamakura (1183-1331), des éditions imprimées.

La découverte de manuscrits considérés comme perdus aux Nanatsudera

Les Nanatsudera de ТоепгапМИШ-Ь^, sont un monastère Shingon de la branche Chizan Ж'Шъ^ЩтМШ. Situé dans la ville de Nagoya, préfecture d'Aichi, le monastère se trouve dans un environnement privilégié, entouré qu'il est par le sanctuaire shinto d'Atsuta ШШЩЩ et le monastère bouddhique d'Osu Kannon -ХМШШ. La légende en attribue la fondation au moine GyôkifxS (668-749), à l'époque de Nara. On sait seulement de façon certaine qu'à la fin de l'époque de Heian, le gouverneur surnuméraire de la province d'OwariM?R (actuelle préfecture d'Aichi), Onakatomi no Yasunaga;*;4>f§;£:R, a apporté sa protection financière et son soutien politique pour la copie du canon bouddhique. Deux moines se sont chargés de l'entreprise, Eigei Ш~% et Eishun 1Ш. Ils avaient pratiquement achevé la copie de 300 rouleaux entre 1175 et 1178. Par la suite, ils ont conçu le projet de copier des siitra, des traités et des commentaires non inclus dans le canon. Mais leur travail semble avoir été interrompu en 1180.

Le canon des Nanatsudera a été désigné « Trésor national » en 1900, puis, dans les années qui ont suivi la fin de la seconde guerre mondiale, il est devenu « Bien culturel important ». On a alors organisé des missions d'enquête qui se sont soldées par la publication en 1968 du Catalogue du canon bouddhique des Nanatsudera, Matériaux historiques de la province d'Owari (ЩШ.Я.Ц.-кЗ?— ЙШёШ). Ce catalogue a été distribué à des institutions universitaires ainsi qu'à des chercheurs, mais curieusement, personne ne semble y avoir prêté attention. La raison en est que, jusqu'à présent, on a considéré que les copies du canon bouddhique effectuées à la fin de l'époque de Heian reproduisaient le canon de l'édition des Song. Ce préjugé tenace est pourtant sans fondement scientifique. Certes, l'édition impériale faite durant l'ère Kaibao des Song septentrionaux (itftffl&MiiW) (968-976), apportée du continent par le moine Chônen (938-1016) en 986, a constitué un texte de base important qui était fort prisé. Cependant, les milieux qui y avaient accès étaient fort limités.

Par ailleurs, de nombreux textes rares non inclus dans les catalogues ont été imprimés dans de grandes collections japonaises, comme le Canon bouddhique compilé sous l'ère Taishô (Taishô shinshu аа1гокубу^1ЕШШУШШ), le Corpus bouddhique du Grand Japon

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(Dainihon bukky 5 zensho -ХВ^ЩШ^Ш), le Canon bouddhique du Japon (Nihon daizôkyô B^XWM), la Suite au Canon bouddhique (Zokuzôkyô ШШШ), les Œuvres complètes de la secte Jôdo (Jôdoshu zensho №±ШОкШ), les Œuvres complètes de la secte Shingon (Shingonshu zensho Ж'ШШ^Ш) ou les Œuvres complètes de la secte Tendai (Tendaishu zensho ЗИзж&Ш)- Mais en raison du fait qu'ils se présentaient sous une forme déjà imprimée, trop accessible peut-être, on n'y a pas accordé l'intérêt qu'ils méritaient. En outre, les spécialistes du bouddhisme au Japon se sont surtout penchés sur l'Inde et le Tibet et n'ont guère pris en considération la Chine et le Japon, si ce n'est dans une optique sectaire. Les meilleurs chercheurs travaillant sur les manuscrits chinois se sont malheureusement concentrés presque exclusivement sur les manuscrits de Dunhuang et non sur ceux conservés au Japon, plus ou moins convaincus qu'ils étaient qu'aucun manuscrit nouveau touchant le bouddhisme chinois ne pouvait y être retrouvé à l'heure actuelle.

Or, pendant une période prolongée, la Corée et le Japon se sont trouvés sous l'influence culturelle de la Chine où fleurissait le bouddhisme. Le peu que laisse entrevoir la richesse des manuscrits de Dunhuang fait imaginer qu'il devrait en être de même dans les autres régions périphériques de la Chine qu'ont été la péninsule Coréenne et le Japon. Toutefois, la question était de savoir si des documents d'importance y subsistaient ou non. L'opinion prévalait que presque plus aucun manuscrit ne pouvait y être retrouvé.

Au Japon cependant, on a conservé plusieurs milliers de textes copiés à l'époque de Nara et plusieurs dizaines de milliers pour l'époque de Heian. Ceux de l'époque de Nara reproduisent fidèlement les versions qui avaient cours sous les Tang. Ce sont eux qu'on aurait dû utiliser en priorité pour établir les éditions critiques reproduites dans les grandes collections comme le Canon imprimé sous l'ère Taishô. En effet, ce dernier s'est fondé sur les versions coréennes qui datent du XIIe siècle, en mettant en parallèle les variantes que présentent les éditions des Song, des Yuan et des Ming. Elles sont toutes éloignées dans le temps des éditions des Tang, qui marquent l'apogée du bouddhisme. Le canon copié au Japon à l'époque de Nara a en fait une plus grande valeur que celui des Song, car il est plus fidèle aux originaux que lui.

Je prendrai pour exemple la Biographie d'Asvaghosa traduite par Kumârajïva. Une copie datée de la fin de l'époque de Heian est conservée aux Nanatsudera et au Kôshôji. La version du Taishô (éditions coréenne, des Song, des Yuan et des Ming) [T. 2046] en diffère sensiblement. À l'époque où s'est constitué le Catalogue de l'ère Kaiyuan établi par Zhisheng (669-740) en 730, la version de cette biographie, largement recopiée au Japon à l'époque de Heian, devait présenter une teneur identique à une version provenant des grottes de Dunhuang, si une telle version s'avérait y être conservée.

Ainsi, les canons bouddhiques recopiés à l'époque de Heian à partir de la copie de l'époque de Nara, reproduisent de ce fait fidèlement des versions qui avaient cours à l'époque des Tang. On pourrait par voie de conséquence déduire, à partir de leur examen minutieux et systématique, ce que devait être le canon de l'époque des Tang.

La plus grande partie des textes conservés aux Nanatsudera proviennent d'ouvrages qu'on a recopiés dans des monastères de la province d'Owari. Cependant l'entreprise ne s'est pas limitée à cette seule province. Elle a nécessité un grand déploiement de moyens et d'énergie qui n'a été rendu possible que grâce à l'influence de la famille des Onakatomi, et en particulier de Yasunaga, sur les sanctuaires shinto et les monastères bouddhiques. Celui-ci a cherché à se procurer des textes jusque dans la région de Kyoto.

Il est important de noter qu'on a suivi la structure donnée par le Catalogue de l'ère Zhenyuan. Ce catalogue, tel qu'il est édité dans le Taishô, ne correspond pas à la version primitive ainsi que l'a montré Tsukamoto Zenryu^^:^^ \ Le canon des Nanatsudera s'est

1. [Tsukamoto Zenryu, « Nihon ni izonsuru gempon Jôgen shintei shakkyô mokurokuS 2^С МтЬШШЩШпШ », Shoshigaku ronshu ЩйМЩШ, Kyoto, 1957, p. 423-435.]

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374 Chronique BEFEO 83 fondé, outre sur des manuscrits d'Owari, sur ceux conservés dans trois temples de Kyoto qu'on a utilisés afin de faire un travail de collationnement : ce sont ceux mentionnés plus haut par ordre d'importance (1) du Hôshôji, (2) de Fushimi et (3) du Bonshakuji $£##). Ensuite, le Catalogue de l'ère Zhenyuan, qui se trouve dans ces trois monastères, mentionne une « liste d'ouvrages non inclus dans le canon », dont plus de la moitié était conservée au Hôshôji et au Bonshakuji. On a donc cru devoir les recopier scrupuleusement et systématiquement.

En conclusion, on peut avancer que : 1. le canon des Nanatsudera a pris pour modèle celui du Hôshôji ; 2. les moines qui ont copié ce canon ne comprenaient pas le sens exact du terme « ouvrages non inclus dans le canon ». Le Hôshôji est un grand monastère impérial représentatif du début de l'époque de Heian, et le Bonshakuji est un grand centre d'études scolastiques représentatif de la fin de la même époque. Il est naturel que tous deux aient hérité de la tradition des Sept monastères de Nara, que sont le Tôdaiji Ж;*:тр, le Kôfukuji №Ш# , le

, le Daianji ;*:£#, le Yakushiji ШШ^, le Saidaiji B;*:^ et le Hôryûji ШШ^. La « liste d'ouvrages non inclus dans le canon » СрХШШШ) recense ceux que Zhisheng a écartés du canon pour plusieurs raisons :

1. Les textes déjà intégrés dans la Somme du Grand sutra aux amas de joyaux [Mahàratnakuta-sutra on Da baoji jingýz®mM] [T. 310].

2. Les versions d'un même texte, mais comportant un nombre de rouleaux différent en raison d'un autre découpage.

3. Des textes déjà catalogués sous un autre titre.

4. Des textes figurant deux fois dans le Catalogue de la dynastie des Zhou, constitué en 695 sous l'impératrice Wu ZetianM^ (624-705).

5. Des extraits de sutra copiés comme sutra complets.

6. Des récits tirés du vinaya des Mulasarvâstivâdin et donnés comme textes complets. 7. Des ouvrages répertoriés dans le Catalogue des Zhou, mais qui ont été perdus. 8. Des textes douteux et apocryphes.

Zhisheng dénombre en tout 118 titres pour 247 rouleaux [T. 2157 (30), LV, 1046b- 1048a].

Ces textes étaient recopiés et étudiés à l'époque de Nara en dépit de leur caractère « extracanonique ». Or il se trouve que pour des raisons historiques les Nanatsudera, qui ont hérité de cette tradition de Nara, sont le monastère qui en a conservé le plus grand nombre, soit 13 titres et 105 rouleaux, dont certains sont des unica.

Réévaluation des copies du canon bouddhique faites à l'époque ancienne au Japon

J'espère avoir donné une idée de l'importance des canons bouddhiques recopiés au Japon à époque ancienne. Pour ne pas prêter à méprise, je voudrais rajouter que, loin de faire peu de cas des éditions actuellement imprimées du canon bouddhique (Tais ho) ainsi que des manuscrits de Dunhuang, c'est tout-à-fait conscient de leur importance que j'ai poursuivi mes recherches et en ai présenté les résultats. Il me semble pourtant que le Taishô et les manuscrits de Dunhuang doivent être étudiés en même temps que le canon d'époque des Tang, aujourd'hui conservé dans celui de Nara et dans ceux de l'époque de Heian qui le prolongent. Les canons copiés au Japon ont eu tendance à être gardés jalousement secrets en raison de leur haute valeur artistique et esthétique ; on n'a jusqu'à présent relativement peu eu l'occasion de se pencher sur eux en tant que documents, dans une optique philologique.

Aujourd'hui, quiconque le veut est en mesure de consulter des éditions en facsimile de l'édition coréenne, de même que celle de Qisha des Song (1238) ou de Jiaxing des Ming (1522-1566). Les manuscrits de Dunhuang sont reproduits en microfilms, édités en facsimile, et l'on commence à en publier des éditions photographiques très accessibles et lisibles.

Mais qu'en est-il actuellement des copies du canon au Japon ? Pas l'ombre d'un projet pour les prendre en microfilm ou en photographie sur une grande échelle. À tout le moins, un

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organisme officiel devrait se donner pour tâche d'entreprendre ce travail pour le canon de Nara. Au Japon, on accorde un prix extrême aux biens culturels du pays. Mais on ne fait que les garder comme des détenus dans une prison, et on adopte une politique de protection du patrimoine telle qu'on ne les rend que trop rarement publics, comme si l'on craignait de les exposer en plein jour.

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