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La commande publique d'architecture

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Academic year: 2021

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HAL Id: hal-03089193

https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-03089193

Submitted on 28 Dec 2020

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To cite this version:

Bernard Hamburger, Anne Querrien, Didier Rebois, Alain Thiébaut. La commande publique d’architecture : 1945-1975. [Rapport de recherche] 0097/79, Centre d’études et de recherches ar-chitecturales (CERA); Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts; Comité de la recherche et du développement en architecture (CORDA). 1979. �hal-03089193�

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L A COMMANDE

PUBLIQUE

D ’ARCH ITECTURE

1945-1975

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LA C O M M A N D E P U B L IQ U E D 'A R C H IT E C T U R E 1 9 4 5 - 1 9 7 5

Rech erch e ré a lisé e pour le C O R D A n ° 77 7304100202 7501 M in istère de l'En viro n n em en t et du C a d re de V ie

Nous rem ercions J . P Epron et B. F o rtie r pour l'a id e apportée dans la rech erch e et M a rie - A n n e S ic h è re pour sa c o lla b o ra tio n e ffic a c e pendant ia mise au point de cet ouvrage. B i B S J Ü l H E S U * 5 1 n o rr L L

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l'affirm e l'in g é n ie u r consulté : "L e bâtim ent en retour, bien que détaché pour permettre le passage de la grue, constitue une suggestion pour l'o rg an isa­ tion du ch an tier et pour l'e n s o le ille m e n t, l'ép u re de l'a rc h ite c te fa it

apparaftre que les appartements à simple o rien tatio n placés dans ce grand corps de bâtim ent au droit de l 'a ile en retour ont à l'éq u in oxe une durée d 'en so leillem en t v a ria n t de 1 h à 2h30 su ivan t le plan d 'im p la n ta tio n .

L 'a u to rité de tu telle consultée pour acco rd , estime que les suggestions apportées par les bâtiments en retour ju stifien t leur suppression". Dans sa 6ème esquisse recomm encée l'a r c h ite c te élim in era toute intention de projet et proposera des tours identiques a v e c une trame constructive uniform e.

L 'a cco rd de l'a u to rité de tu te lle sera im m édiat car " la standardisation et l'organ isation du ch an tier se trouveront de ce fa it notablem ent a m é lio ré e s ".

C e tte autocensure et ce tte soumission constituent la r é a lité de la pra­ tique des a rc h ite c te s . Ils ont perdu toute au to rité sur le projet et seuls les critères de décision de l'ad m in istratio n sont retenus comme pertinents. O n cite souvent en exemple la terreur des arch ite cte s in vités 6 présenter leurs projets au d irecteur de la Caisse des Dépôts, grand maître dans l'a r t de la vex atio n : les a rch ite cte s reg ard aien t sans rien dire leur projet rem anié par ce d irecteur qui d é p la ç a it comme dans un jeu d 'en fan t les barres et les tours de la maquette ; et la d o c ilité é ta it le prix à payer pour obtenir la com m ande.

Pour sauver les ap p a re n ce s, l 'adm inistration prodiguait des discours rassu­ rants : "Tout c e la ne met pas en cause ni l'a rc h ite c tu re , ni même sa l i b e r t é " . . .

"Les projets perm ettent à peu près toutes les compositions de plan , masse : ils ne se lim iten t pas comme on l'a cru à quelques bâtiments types, ils pré­ sentent de m ultiples v a ria n te s. En bâtim ent long comme en bâtim ent p lat ou en tour, n'im porte quel nombre d'étages est possible. Des c e llu le s spéciales pour an gle droit sont toujours prévues et même pour an gle obtu. C ertain es façades peuvent v a rie r, l'a rc h ite c te peut donc composer des volumes a v e c

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référence o cc u lté e de ce jeu abstrait de tours et de barres.

Les a rch ite cte s n 'é ta ie n t prêts à reprendre à leur compte cette idée abstraite de la composition qu'en la re lia n t à un système de v a le u r, à une représentation de l'a rc h ite c tu re é te rn e lle . Il s 'a g it de renforcer la coupure entre arch ite ctu re et construction et de survalorîser ce tte dimension

abstraite pour légitim er leur position s o c ia le . Le projet peut être élim iné pourvu que ce soit au nom d'une doctrine qui montre comment l'a rc h ite c tu re a y a n t intégré ses nouvelles contraintes est rattach ée à des valeurs intem po­ re lle s . "L a p réfab ricatio n peut être à la base d'une a rc h ite ctu re c a r a c té r i­ sant son époque à l'é g a l du classicism e ou du gothique, cap ab le peut-être de rendre moins cruel le souvenir de tont de choses de q u a lité îi jamais disparues. En effe t l'o b lig a tio n de composer su ivan t une loi m odulaire est une d iscip lin e salutaire o b lig e a n t l'a r c h ite c te à chercher l'expression dans le rythme e t la proportion au détrim ent de pittoresque a r b it r a ir e " . (Pol Abraham /"L 'a rc h ite c tu r e p ré fa b riq u é e ").

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C H A P IT R E II

LE T R A V A IL A R C H IT E C T U R A L P O U R L 'A D M IN IS T R A T IO N

L'adm inistration a cru p a llie r les insuffisances du tra v a il a rc h ite c tu ra l, l'in c a p a c ité de la profession,du fa it de son organisation hiérarch iq u e et m althusienne, à co u vrir l'ensem ble de la France de prestations d 'é g a le q u a lité . Comment réduire l'é c a r t considérable entre le type d 'a rch ite ctu re à tendance monumentale produit par les arc h ite cte s des Bâtiments C iv ils et des Palais N atio n au x e t les arch itectu res variées produites par des arch ite cte s de province "m al formés" ou régionalistes ? La réduction de ce t écart a été en effe t indispensable à une p o litiq u e natio n ale du lo g e­ ment comme à la réa lisa tio n de la réforme pédagogique dont l'o b je c t if essentiel é ta it la dém ocratisation de l'enseig nem ent" c'est- à-d ire l'a c c u e il de tous les enfants jusqu'à 16 ans dans les mêmes locaux ou du moins dans des locaux éq u ivalen ts.

D evan t ces disparités/ 1'administration a été amenée à opérer une réd u c­ tion par ie bas et à adopter une d é fin itio n du tra v a il a rch ite ctu ra l adaptée aux a rch ite cte s les moins com pétents. E lle se d e v a it de d éfin ir les moyens de co u vrir le défaut de perform ance qui en ré s u lta it. C 'e s t ainsi que l'a rc h ite c tu re a été réduite à un jeu de construction dont l'ensem ble des éléments d e v a it être au maximum d é fin i, de m anière à laisser aux arch ite cte s un nombre de degrés de lib erté ré d u it, de m anière à assurer une q u a lité

moyenne de prestations co n ven ab le .

En fa it tout é ta it à inventer dans la mesure où les modes de tra v a il développés par une a rch ite ctu re é litis te n 'é ta ie n t pas fin an cièrem en t transposables à une arch ite ctu re de masse, et qu'inversem ent les modes de

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a rc h ite ctu ra l : transférer les modèles élaborés par l'é lit e dans la production de masse.

O n assiste dès 1952 à une sorte de ratio n alisatio n de la h iérarch ie constatée au sein de la profession a rc h ite c tu ra le . L'ad m in istratio n , poussée par les entreprises au xquelles e lle s 'é ta it adressée dans la rech erch e de m atériaux fabrîquables en grandes séries et de techniques de construction plus économ iques, distingue assez rapidem ent des "a rc h ite c te s de co n cep tio n " dits au début "d 'e n sem b le" qui définissent les règles d'un jeu constructif, et les "a rch ite cte s d 'o p é ra tio n ", appelés seulement à oeuvrer au sein des règles d éfinies par les prem iers, et qui seront eux en nombre suffisant pour

la su rve illa n ce des chantiers et la réa lisa tio n de chaque cas p a rtic u lie r. Lorsque l'ad m in istration d ît : "L a composition a rc h ite c tu ra le serait rendue plus aisée par l'u tilis a tio n d'élém ents norm alisés'(note interne au M inistère de l'Ed u ca tio n N a tio n a le ,d e 1952), il est é v id e n t q u 'il s 'a g it de la composition par des "m éd iocres" non susceptibles de réaliser des compositions a rch ite ctu ra le s co n ven ab les, in cap ab les de contrôler toutes

les dimensions du tra v a il a r c h ite c tu ra l, dont la plupart sont par conséquent incorporées aux données : surfaces e t dimensions des lo cau x, m atériau x. "L e rôle de l'a rc h ite c te demeure essen tiel. C 'e s t à lui qu'incom bent l'im p lan ta tio n et la disposition des locaux en fon ction des données locales e t notamment du terrain " (suite de la même note de 1952).

L 'a rc h ite c te em p ile, dispose, des fragments so ciau x. O n met en valeu r la flu id ité des c irc u la tio n s , sans égard pour la communauté hum aine, prise dans son ensem ble, q u 'il n'a pas à faire ex ister. En tant qu ensemble

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sécurité isolent par a ille u rs des espaces environnants, créan t une rupture très nette entre les constructions publiques et le tissu urbain limitrophe. Dans les études de projets, la morphologie urbaine au sein de la q u e lle le bâtim ent s'in sère, n'est jamais prise en com pte. Le tra v a il d 'ad ap tatio n au terrain se lim ite au c a lc u l des fondations et la ta ille norm alisée du terrain co n ­ duit toujours à un plan masse de même type : groupes de bâtiments au sein d'un terrain v id e . La déterm ination n atio n ale des m atériaux de fa ç a d e , de la trame e t c . . . rend de plus impossible la prise en compte de la typ o lo gie a rc h ite c tu ra le lo c a le .

Le tra v a il a rc h ite c tu ra l, et ses conditions, contribue donc à produire ia séparation des constructions publiques d 'a v e c la c it é . Un espace p u b lic national s'affirm e comme te l.

C e tte organisation du tra v a il a rc h ite ctu ra l qui commence à se mettre en p lace dès 1952 demeure à travers toute la période de construction industrialisée m assive. C 'e s t au cours de la mise au point des catalog u es de modèles q u 'e lie prend meme toute sa consistan ce. L 'o b je t des concours "C o n cep tio n -con stru ctio n " semble a vo ir été plutôt de réa lise r la d élég atio n d'une opération en tière à une équipe a rc h ite cte - e n tre p rise . Les lim ites de c a p a c ité de contrôle d 'e x é c u tio n d'une agence d'archîtectessont bien inférieures aux exigences de série d'une entreprise pour industrialiser ses procédés de fa b rica tio n .

De pIus,iI est impossible de m aintenir l'u n ic ité de l'a rc h ite c te sur une même opération in d u s trie lle , sans encourager une monopo­

lisation du tra v a il d iffic ile m e n t a c c e p ta b le par les a rch ite cte s lo cau x. Les concours 'C o n cep tio n - co n stru ctio n " ont cependant permis

de dégager des listes d'équipes arch ite cte -e n tre p rise auxquelles a pu être demandée la co n fectio n de m odèles, mais dans une inversion

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de constructions scolaires qui exam inent les projets ne sont Jamais mentionnés par les commissions. Seuls apparaissent dans les d é lib é ra ­ tions les entreprises détentrices des modèles et les arch itectes d 'opératio

1 ) Un service lib éral ad m in istratif

A u moment du lancem ent des concours "C o n c e p tio n - c o n stru c tio n ", le souci d'économ ie est subordonné au souci de ra p id ité . Il s 'a g it de réaliser le plus possible dans le plus court laps de temps possible.

Moins ce la coûtera plus sur un budget donné il sera possible de ré a lis e r. La durée de l'étu d e des solutions les plus économiques doit elle-m êm e être réd u ite, notamment par la réa lisa tio n d'un

ensemble d'opérations à la suite d'une étude un iq u e. C 'e s t le m écanis­ me des commandes groupées, d 'au ta n t plus économique en temps q u 'il a il les procédures de contrôle puisque de chaque projet sont déjà connus, par l'agrém ent an té rie u r, les m atériaux, les c e llu le s de base, le niveau de q u alité a tte in t, et q u 'il ne reste plus pour chaque opération q u 'à v é rifie r le bien fondé du plan masse et le respect du programme.

La sim p lificatio n extrême des programmes est la condition de cette réduction ach arn ée des d é la is . Les d élais d'études ex clu en t toute recherche sur l'e s p a c e . O n estime que plus la portée des études est lim ité e , plus il y a de chances d'obten ir des solutions va la b le s dans le temps im parti. M ais il est c la ir q u 'à lim iter ainsi le problème à tra ite r, on le change de nature : on demande à l'a rc h ite c te de rem­ p lacer la procédure d 'a d ju d ic a tio n et d 'ap p el d'offres auprès des

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entre-prises par une entente p ré a la b le , et de v é rifie r q u 'e lle a lieu aux m eilleures conditions. "L e but à attein d re étant une ex écu tio n ra ­ tio n n e lle sans à coups ni fausse manoeuvre dans les d élais les plus courts, les plans dressés par l'a rc h ite c te ont été établis a v e c le

maximum de p récisio n " (n ° 242 du concours "C o n cep tio n - co n stru ctio n " de l'E d u ca tio n N a t io n a le ).

Chaque a rc h ite c te propose sa solution et les solutions sont com parables puisque toutes d éfinies par un parti a rc h ite ctu ra l p ra ti­ quement identique aux d éta ils de façade et de m atériaux près. L 'a r c h i­ tecte est traité comme une sorte de p u b liciste du procédé de l'e n tre ­ prise q u 'il a ch oisie : les d ifféren ces entre les projets tiennent aux différen ces entre les procédés. Il n'est pas sûr que l'éco n o m ie fin a n ciè re a toujours suivi lors de l'ad ap tatio n des projets aux con­ ditions rée lle s d 'im p lan ta tio n et de programme.

L'économ ie du tra v a il a rc h ite ctu ra l se trouve profondément m odifiée par ce déplacem en t de la commande. C h oisir une entreprise pilote et un procédé co n stru ctif en est l'e n je u essen tiel. L 'a rc h ite c te se fa it en quelque sorte le promoteur, le vendeur de ce procédé aux maîtres d 'ouvrag e ou aux c o lle c tiv ité s lo ca le s, pour le compte de I"adm inistration c e n tra le , promoteur assez p a rtic u lie r puisque par les ordres donnés aux entreprises il doit s'assurer q u 'e lle s tr a v a ille n t au plus juste p rix, en faisan t le minimum de b én éfices. En faifyil joue un rôle assez proche de c e lu i que lui fa it jouer la promotion immo­ b iliè re p riv é e , soucieuse avan t tout des bénéfices des propriétaires fonciers y compris au détrim ent des entreprises. Les entreprises vont d 'a ille u rs souvent être mises en f a illit e par le non respect des en ga­ gements verbaux de l'ad m in istration dans le domaine des procédures de passation des marchés p u b lics.

Le rôle de p u b liciste donné aux a rch ite cte s par ces concours n'est pas seulement borné au dessin, au rendu, à i h a b illag e

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idéo-logique des procédés de construction définis par les entreprises et les bureaux d'études. Il leur est demandé de choisir au sein de la m u ltip li­ cité des procédés proposés par les entreprises ceux a v e c lesquels ils aim eraien t t r a v a ille r , ceux qui coûtent le moins cher et se montent le plus v it e . Le dessin demandé a pour but de faire la preuve de la possi­ b ilité de tra v a ille r a v e c le procédé c h o is i, de le faire |ouer pour éviter une trop grande apparence in d u strie lle .

V o ic i l'o b je t du concours "C o n cep tio n - co n stru ctio n " de l'E d u c a ­ tion N a tio n a le d éfin i d'après le ca h ie r des clauses adm inistratives et fin an cières : "R ech erch er les solutions de construction associant l'e n ­ semble des corps d 'E ta t dans une technique coordonnée présentant sur le plan de la q u a lité , de l'éco n o m ie et de la rap id ité de la mise en o eu vre, des avantages indiscutables par rapport aux techniques h abi­ tuellem ent em ployées dans les constructions sco laires. C e concours tout corps d 'E ta t a v e c un jugem ent g lo b a l, a pour but de sélectio n n er des types de construction répondant à des exigences définies q u 'il conviendra ensuite d 'ad ap ter à chaque cas p a rtic u lie r. C e tte adap­ tation portera d'une part sur la construction elle-m êm e et sur les équipements de locaux et d 'au tre part sur les travaux d'am énagem ent extérieurs aux bâtiments pour permettre de réaliser les différents é ta ­ blissements dont l'u rgen ce aura été reconnue nécessaire, en fonction de programmes pédagogiques possédant chaque fois des caractéristiq u es p ro pres".

Com pte tenu de l'é t a t du marché des entreprises que le d é p o u ille ­ ment du concours ré v è le encore attach ées aux procédés trad itionnels : ossature en béton armé coulée sur p lace e t remplissage en m atériaux divers, il est même demandé aux a rch ite cte s d 'im a g in e r, en relatio n a v e c les entreprises, des procédés constructifs nouveaux. L 'in n o v a tio n tien d rait notamment à une m o d ificatio n des rapports entre corps d 'Etat.

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M aïs la norm alisation poussée du programme, où la d éfin itio n des espaces va jusqu'à l'e x iste n ce de plans types, conjuguée à l'absence de volo n té des a rch ite cte s d 'a g ir sur les relations entre corps d 'E ta t, engage ce tte rech erch e de procédés nouveaux vers la seule p réfab ri­ cation des éléments de façade ou de p lan ch er, dans un cadre dimension­ nel rigoureux, propre au programme Education N a tio n a le . O r des m até­ riaux ou des procédés intégrables à un tra v a il a rc h ite ctu ra l normal ex ig en t au co n traire un grand jeu dim ensionnel.

Il y a déplacem en t de la commande du rôle de conception de la production de l'esp ace vers le seul rôle de coordination et de contrôle des corps de m étiers, des entreprises. L 'a rc h ite c te est en quelque sorte intégré au service ad m in istratif comme éch elo n interm édiaire d 'a d a p ta ­ tion de ses ex ig en ces, dans la mesure où ce service est in cap ab le de traiter d irectem ent a v e c le monde des entreprises, trop dispersé notam­ ment. D 'où l'im p o rtan ce du statut lib éral mais assermenté des a rc h ite c te s . De même l'a rc h ite c te d 'o p ératio n ne re ç o it pas tant une commande

d 'a rch ite ctu re - le tra v a il d 'ad p atatio n au terrain de projets aussi

normés re lè v e bien plus des bureaux d'études ca lcu la te u rs de fondations sp éciales - qu'une commande d 'in te rlo c u tio n a v e c les c o lle c tiv ité s locales et a v e c les maftres d 'o u vrag e .

Il faut croire que la m anoeuvre connaissait pas mal de ratés/puisque le décret sur l'in g é n ie rie in stitu tio n n alise dans cette position m édiatrice entre Etat et c o lle c t iv it é lo c a le ou maître d 'ouvrag e un nouvel in te rlo ­ cu teu r, le conducteur d 'o p ératio n qui la rem plit a v e c des méthodes

rad icalem en t d ifféren tes. L 'a rc h ite c te ren vo yé vers le rôle de concepteur est amené à red éfin ir son tr a v a il, d 'au ta n t que les nouvelles données économiques ne poussent plus à bétonner ou à m étallîser à o u tran ce, et définissent de nouvelles exigences par rapport à la phase p récéd en te.

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Dans la mesure où le ren o u vellem en t du parc de bâtiments ne peut plus être envisagé comme solution à l'ab sen ce de satisfaction de leurs usagers - on notera au passage que l'éco n o m ie de la phase précédente é ta it donc c e lle du provisoire permanent - chaque bâtim ent doit p réve­ nir les critiques par l'ad o p tio n de nouveaux critères de q u a lité .

2) Un test de s e rv ilité

Le d irecteur de l'E q u ip e m e n t S c o la ir e , U n iversitaire et Sp o rtif au cours d'u n e com m unication au C o n seil G é n é ra l des Bâtiments de France a déjà proposé d'engager la recherche a rc h ite c tu ra le sur des voies nouvelles en 1 963. M ais le représentant de la d ire ctio n du B udget lui a répondu

que le changem ent d 'o rie n ta tio n envisagé é ta it incom patible a v e c la p olitiq u e de stab ilisation des p rix. D errière ce t argument massue - qui condam nait une p o litiq u e à moyen terme au nom d'une politique co n jo n c­ tu relle -, se dressaient les promesses faites aux industriels du bâtim ent et surtout aux entreprises de constructions m étalliq ues, de séries de marchés continues sur plusieurs années. Q u e lq u es jours plus ta rd é e D . E . S . U . S é ta it changé et le nouveau D . E . S . U . S en g a g e ait à une a llu re record la construction des " C . E . S . in d u stria lisé s". Ces enjeux économiques se lisaien t d 'au ta n t mieux qu'alors que les propositions de constructions m étalliques é ta ie n t très m inoritaires parmi les réponses au concours

"C o n cep tio n - co n stru ctio n " de l'E d u c a tio n N a tio n a le (à peine 10 % ), les entreprises de constructions m étalliques se sont fa it attrib uer un tiers du marché pour les premières années du programme de constructions industria­ lisées. Les fa illite s ont s u iv i,c a r ces entreprises é ta ie n t incapables de mettre en oeuvre un tel volum e de tra v a il a v e c les aléas de la passation des marchés publics et l'absence d 'arrières et de possibilités d'am ortis­ sement des investissements, constitués pour les entreprises concurrentes,

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Il esf apparu brutalem ent que l'ad m in istration n 'a v a it nullem ent co n fié aux arch ite cte s la mission de tester la c a p a c ité des entreprises de répondre à ses programmes, que même ce tte commande rela tive m e n t tra d itio n n e lle de jouer le rôle d 'in te rm é d iaire entre adm inistration et corps d 'E ta t a v a it disparu. C e qui a v a it été détecté par le concours c'e st que les a rch ite cte s a c c e p ta ie n t de se mettre au service des en tre­ prises e t de les aider à vendre leurs procédés constructifs en les adaptant aux programmes des adm inistrations com m anditaires.

3) Industrialisation du bâtim ent ou b ureaucratisation de la construction Dans toute cette période,on constate une forte id en tité des propos tenus sous les deux titres "p a rti a rc h ite c tu ra l" et "système co n s tru c tif", sauf dans les cas où il est admis que le parti a rc h ite ctu ra l est déterm iné par le plan typ e.

O n peut se demander si les authentiques interlocuteurs de l'adm ïnis tration dans ces concours n 'é ta ie n t pas les bureaux d'études à l'agrém ent desquels e lle v e n a it juste de procéder, et dont e lle v o u la it jauger les effets de l'in sertio n dans le processus de construction, à un moment où les a rch ite cte s s'estim aien t encore capables de contrôler l'ensem ble des corps d 'E ta t, malgré le degré de te c h n icité croissant des procédés mis en oeuvre et surtout des c a lc u ls de co n trô le de q u a lité . Les a r c h i­ tectes non formés à ces c a lcu ls ne pouvaient être les agents qui e x i­ geraient des entreprises une m eilleu re q u alité pour le meme prix et qui surtout soum ettraient ce tte ex ig en ce de q u a lité à une g rille a n a ­

lytiq u e en d é ta illa n t ch acu n des éléments constitutifs, comme îl est de règ le chez les ingénieurs, et comme le tra v a il est distribué dans les bureaux d 'étu d es. A chaque élém ent de construction, à chaque m atériau est associé un staff s p é c ia lis é . C h e z les a rch ite cte s au contraire la

démarche qui se veu t synthétique en traîn e une d ivision du tra v a il de l'ag en ce selon les étapes du processus de tra v a il a rc h ite c tu ra l, selon

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la nature des documents à rendre successivem ent, mais dans une vision toujours globale de la construction à ré a lis e r. Un jugem ent qui obéît à une g rille an a lytiq u e séle ctio n n e im p licitem en t les candidats appelés à s 'y soumettre : ce sont les organismes dont le fonctionnem ent o b éît à ce tte g r ille . Q u an d bien même les arch ite cte s seraient toujours con ­ sidérés comme les seuls interlocuteurs de la commande ad m in istrative,

la transform ation de la commande en ce sens les o b lig e soit à s'associer avec un bureau d 'étud es, soit à en créer un au sein de l'a g e n c e en m odifiant l'org an isatio n du tr a v a il ca racté ristiq u e de c e lle - c i. C e tte

m o d ifica tio n va très lo in , puisque la nature des relations entre staffs spécialisés de bureaux d'études et métiers d 'ag en ce n'est pas la même,

la coordination des travaux étan t d iffé re n te . O r la co n fectio n d 'une g rille de jugement de plus en plus p erfectio n n ée a été une p réo ccu p a­ tion constante de l'ad m in istratio n depuis 1945. Il f a lla it rendre le plus précisém ent com parables les dossiers fournis par les a rc h ite cte s , et no­ tamment le co û t, indiqué comme d evan t être c e lu i de la construction. Pratiquem ent, il f a lla it a rrive r à d éfin ir des éch e lle s de mesure de

ch acu ne des qualités ex ig ées, et sur ces é c h e lle s un n iveau de prestation norm al. La d éfin itio n de ces g rilles par les ingénieurs, notamment du C . S . T. B, is o la it chaque q u a lité l'u n e de l'a u tre , a lors que les a r c h i­

tectes par form ation et sen sib ilité jo u a ie n t plutôt sur leurs relatio n s aboutissant au résu ltat par une tout autre dém arche que c e lle qui leur é ta it brutalem ent im posée. Leur dém arche ne c h e rc h a it pas sur chaque dimension de q u a lité ainsi d é fin ie un niveau de q u a lité m axim al, d'où sa remise en question. E lle c h e rc h a it plutôt à d éfin ir un n iveau de q u a lité raisonnable par aju stem en t mutuels des différen tes prestations. A v e c

l'in te rv e n tio n des bureaux d 'étu d es, c 'é t a it peut-être la fin de l'a r c h i­ tecture de l'h o n n ête homme, du co n v e n a b le , la fin d 'une ce rta in e é c h e lle ,

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et l'e n tré e dans une ère =de ra tte p a lîs a tîo n , d 'am élio ratio n s permanentes, l'ad o p tio n d'une é c h e lle lin é a ire , caractéristiq u es du versant bureau­ cratiq u e plus que c a p ita lis te du monde in d u striel. Peut-on parler d'une bureaucratisation de l'a r c h ite c tu r e , ou de la construction, qui condui­ ra it à minorer vo ire à rendre impossible la geste a rc h ite c tu ra le , le tra v a il de mise à l'é c h e lle et de dimensionnement approché ?

Le problème n'est pas propre aux a rc h ite c te s . Il se rencontre égalem ent chez les ingénieurs, chez les spécialistes du génie c iv il par exem ple. Les c a lc u ls de résistance des m atériaux, les co e fficie n ts de sécu rité; e tc . l'é v e n tu a lité d 'une mise sur ordinateur de tout le tra v a il de c a lc u l des ponts, font du tracé à main levée d'un pont, de l'in v e n tio n dans ce dom aine, une p ersp ective de moins en moins probable. O r ces techniques nouvelles de c a lc u l, ces exigences de sécu rité , a lo u r­ dissent très nettem ent les silhouettes et ferment la v o ie d 'une recherche qui pourrait notamment porter sur les insuffisances de la form alisation mathématique existante pour traiter certains problèmes spatiaux que les a rch ite cte s et ingénieurs in ven tifs ont résolu ju sq u 'ici grâce à des études de maquettes, par des méthodes spécifiquem ent a rc h ite ctu ra le s , puisque fondées sur le changem ent d 'é c h e lle .

C e tte b ureaucratisation de la construction peut s'ex ercer soit vers l'am ont par la transform ation a n a ly tiq u e du tra v a il de co n cep tio n , soit vers l'a v a l par la co n cep tio n de procédés de construction à appliquer par les entreprises pour am élio rer la q u alité de leurs prestations ou d im i­ nuer leurs coûts. Les bureaux d'études se font donc bureaux de méthodes, soit pour les a rch ite cte s,so it pour les entreprises. M a is en norm alisant le produit de l'en trep rise, ils le rendent in d iscu tab le puisque d éjà co n trô lé, et dim inuent le pouvoir de négo ciatio n de l'a r c h ite c te qui d oit alors se soumettre au m atériau que lui propose l'en trep rise et notamment à ses normes dim ensionnelles que le bureau d'études a c a lcu lé e s d 'a v a n c e

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conformes à la commande ad m in istrative.

C 'e s t ce type de ra tio n alisatio n qui est préféré par les leaders de bureaux d'études, plutôt que l'in té g ra tio n au tra v a il de conception a rc h ite ctu ra le (c f . Rapport Barets). La con cep tion des procédés de p réfab ricatio n par ces bureaux d'études se moule à l'organ isation trad itio n n e lle du marché du bâtim ent, par chantiers successifs, pour lesquels à chaque fois sont réin stallées les m achines. Il s 'a g ît plus d'une ratio n alisatio n des méthodes des entreprises qui leur permet une re la tiv e économie d 'em p lois, un plus gros ch iffre d 'a ffa ire s a v e c la même main d 'o e u vre , que d'une ind ustrialisation v é rita b le , puisqu'il y a peu d'investissem ents. La démarche est cen trée sur le tra v a il et non sur le c a p it a l.

Une fois le système co n stru ctif adopté, rodé et confirm é par la réa lisa tio n de quelques établissements conformes au m odèle, la v o ie est ouverte pour une rech erch e sur la couverture par le même système de besoins fonctionnels différen ts, pouvant s'in scrire dans des volumes de modules dimensionnels sem blables: "A lo rs que chaque opération conçue de toute p ièce par un a rc h ite c te est qu'on le v e u ille ou non, une aventure parfois très heureuse, parfois beaucoup moins, le modèle

industrialisé permet la co rrectio n très concrète de ses im perfections. O n part chaque fois du résu ltat du cas précéd en t. Et cette démarche caracté rise vraim ent l'esp rit in d u strie l" (G u y Le M eu r, ch ef du Service Techntcftre des Constructions S c o la ire s , "L 'in d u s tria lis a tio n comme solution du p ro b lèm e", in "A rc h ite c tu re sco laire et pédagogie n o u v e lle ", la

D ocum entation Française 1976).

C ep en d an t; ce tte ouverture in d u strielle n'existe pas rée lle m e n t. Les ate lie rs de p réfab ricatio n fo ra in e , dans lesquels on m odifie la t a ille des moules pour chaque c h a n tie r, ne demandent pas d'im agin er

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D'ou la préférence pour ces a te lie rs ,c a r les risques courus sont bien moindres, comme l'o n t prouvé les fa illite s des entreprises de construc­ tions m étalliq u es. C e tte o b lig a tio n d 'in n o va tio n fo n c tio n n e lle , sinon a rc h ite c tu ra le , puisque les termes du dimensionnem ent approché sont

imposés par le système co n stru ctif, a été p articu lièrem en t sensible dans l'e x p é rie n c e de G E E P - In d u s trie , promoteur de nombreux é ta b lis ­ sements expérim entaux, c a lcu lé s pour faire effet de modèles et provo­ quer des adjonctions de bâtiments spécialisés aux bâtiments existants. A in si se serait maintenu ouvert le marché après sa saturation en éléments de première g énération . Il s 'a g it alors de l'organ isation d'une politique de fuite en a v a n t du type de c e lle qu'on peut co n n aître dans l'in du strie au tom obile, mais d iffic ile m e n t com patible a v e c les modes traditionnels de gestion de l'ad m in istration qui exigent que tout effort p a rticu lie r témoigne de son succès par son abandon.

4 ) Commande et contrôle

C e tte é vo lu tio n de la commande opère le transfert progressif des contrôles en amont par une p o litiq u e p ré v e n tiv e .

Il s 'a g it d 'iso le r les problèmes communs à tous les projets pour borner le contrôle à l'exam en des problèmes singuliers posés par chaque o p ératio n . La norm alisation des prestations à fournir et des éléments de construction, des plans, l'agrém ent national de m atériaux homologués perm ettent à nouveau de renvoyer à l'é c h e lo n départem ental et à un niveau in férieu r de la h iéra rch ie l'exam en de la conform ité des projets a v e c la règlem entation ou les modèles agréés dont ils sont issus.

La mise en p lace de g rilles de jugement pour f a c ilite r le tra v a il de contrôle est un des moyens les plus sensibles de transformer la com­ mande, d'ordonner le passage de la démarche synthétique de l'a rc h ite c te

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à la démarche an a lytiq u e de l'in g é n î eur et du bureau d 'étud es, d'assim iler l'a rc h ite c tu re à la construction ou à l'ob servance stricte des besoins

fon ction n els. En effe t seules ces deux préoccupations sont mentionnées par les g rilles successives que nous avons rencontrées.

A v e c les concours "C o n c e p tio n - c o n s tru c tio n ", la recherche de ratio n alisatio n im plique un examen plus fon ction nel des éléments de construction. O n ne se borne plus à d é ta ille r les m atériaux et leurs

q u alités, mais on an alyse égalem ent la s ta b ilité , les liaisons, la d u ra b ilité , l'e n tre tie n , l ’étanchéf'té et la sécu rité , les isolations phoniques et ther­ miques, la co rrectio n aco u stiq u e. C 'e s t la découverte importante au sein de l'adm in istration de l'E d u ca tio n N a tio n a le que la q u a lité d'un bâtim ent sco laire ne se juge pas du seul point de vue de la f a c ilit é de la s u rv e illa n c e , mais de plusieurs autres points de v u e , ce qui ouvre la possibilité d'un

rem aniem ent important de l'esp ace s c o la ire , même si cette découverte a lieu sur des plans-types restés trad itio n n els. C e c i marque l'en trée de l'esp ace sco laire dans l'è re du fonctionnalism e et des objets possibles des théories a rch ite ctu ra le s modernes.

C ep en d an t,les réunions du jury du concours "C o n cep tio n -con stru ctio n de l'E d u ca tio n N a tio n a le consacrées à l'é la b o ra tio n de la g rille montrent une ce rtain e in ertie de l'ad m in istratio n par rapport aux p o ten tialités

ouvertes par son in it ia t iv e . Le ch ef du service des constructions scolaires propose en effe t de procéder comme dans la période précédente à un jugement sur les m atériau x, en réservant à un second temps un jugement plus proprement a r c h ite c tu ra l. Les a rch ite cte s membres du ju ry, quoique m inoritaires, font fin alem en t p ré v a lo ir, grâce à la pression de l'ordre des a rc h ite cte s, un double jugem ent par les a rch ite cte s et les ingénieurs sur la même g rille :

50 points pour le système con stru ctif 30 points pour la q u a lité des m atériaux 20 points pour la mise en o e u v re .

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L 'a rch ite c tu re n 'e s t- e lle que ce q u 'én o n ce, ce que produit la personne reconnue comme a rc h ite c te , par sa form ation et sa cotisation 6 l'o rd re, sans autre critè re de reconnaissance o b }e c tif . Le rapport de forces créé par l'ordre des a rc h ite c te s , d écid é à em pêcher le déroulem ent du concours si la profession n 'y est pas suffisamment respectée, conduit en effe t à cette corporatisation de l'a rc h ite c tu re . E lle se combine aisément a v e c l'a c c e p ta tio n des critères fonctionnels et an alytiq u es des ingénieurs qui d icte n t l'organ isation de la g rille le long de laq u e lle sera énoncée une double paroie : c e lle des a rc h ite c te s , c e lle des ingénieurs, parole minorée pour les arch ite cte s par l'a c c e p ta tio n d'une dém arche étrangère a v e c laq u e lle il faut sans cesse composer, et qu'on impose aux auteurs des pro­ jets ainsi contrôlés.

Les projets en e ffe t d o iven t s'énoncer dans la langue a n a lytico - fo n c - tio n n e lle promue au rang de langue unique de la construction.

5) La ré c o n c ilia tio n dans la norme

Dans le domaine de l'E d u c a tio n N a tio n a le , où on a connu des plans types très stricts à tous les moments d 'in tense construction s c o la ire , on est tenté de croire au discours de l'adm in istration qui laisse entendre que

l'esp ace ainsi réglem enté n'est que l'expression des besoins fonctionnels ca lcu lé s au plus juste et que la commande émane très d irectem ent de l'usager ad m in istratif. O r,si on regarde ce qui se passe dans des périodes floues où l'ad m in istratio n n'a pas encore arrêté de position o f f ic ie lle , comme dans l'im m éd iat après guerre par exem ple, on s 'a p e rç o it que les arch ite cte s lui proposent des solutions, des évalu atio n s de ses problèmes, parmi lesquelles e lle va ch o isir, en é lim in a n t ensuite rad ica lem en t les autres p o te n tia lité s. C 'e s t ainsi qu'un numéro d 'A rc h ite c tu re d Aujourd hui d 'a v ril 1949 présente sur le problème des constructions scolaires deux positions arch ite ctu ra le s : l'u n e consiste à construire des écoles adpatées aux pédagogies n o u velles, à un recensem ent de besoins fonctionnels

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des procédés de p réfab ricatio n pour réalise r rapidem ent et en quantité ce qui a v a n t guerre n 'é ta it fa it qu'au coup par coup sans remettre en question le programme existan t.

A M arseîl le,par exem ple,sont réalisées en une année une cin q u an tain e d 'éco le s primaires grâce à un p ré ta illa g e des pierres à une dimension

unique pour tous les ch an tiers, des planchers en béton céram ique p réfa­ briqués, des ferraillag es identiques, et bien sur une conception a rc h ite c ­ turale u niq ue. C e tte ré p é titiv ité organisée permet d'économ iser tra v a il de conception et d 'in s ta lla tio n des ch an tiers, et de réduire les coûts

suffisamment pour faire tenir une réa lisa tio n massive dans un budget an n u el. C e t exemple est souvent c ité dans les documents internes au M in istère pour montrer le bien fondé de la solution in d u strialisée, alors qu il n y correspond pas. Ces écoles ont été conçues par l'a g e n c e Egger-PouiI Io n . De ces deux positions arch ite ctu ra le s en présence en 1949, I Education N a tio n a le a évidem ment choisi c e lle qui la resp e ctait comme d éten trice du bon usage de l'esp ace s c o la ire . C h o ix d 'au ta n t plus é vid en t que les solutions arch ite ctu ra le s propres à des pédagogies nouvelles éta ie n t assorties de systèmes constructffs trad itio n n els, inaptes â en assurer la production à grande é c h e lle , sans parler des adaptations à envisager dans la formation des m aîtres.

M ais les pôles de ce ch oix réd u isaien t l'a rc h ite c tu re à l'un seu le­ ment des trois termes qui la constituent : venustas, firm itas et commoditas. En f a ît /1'architectu re é ta it absente de démarches pour qui la v a rié té

des solutions a rch ite ctu ra le s é ta it lié e par une re la tio n biunivoque à la v a rié té des programmes ou des systèmes constructifs, alors que précisém ent

l'a rc h ite c tu re commence a v e c la possibilité d 'o ffrir une d iversité de solutions spatiales pour un même programme et un meme système cons­ tru c tif. C e tte éclip se de l'a rc h ite c tu re nous semble l'aboutissem ent de la convergence du mouvement moderne (fon ction n aliste et construc­ tiv is te ) et de l'académ ism e au sein de l'E c o le . La nécessité pour l'a c a

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-A lo rs que la commoditas lie l'a rc h ite c tu re au c lie n t et la firm itas à l'en trep rise, la considération de la venustas est indispensable à

l'ex iste n ce de l'a rc h ite c tu re comme champ de m édiation entre les deux autres termes, insertion de la construction dans le s o c ia l, dépas­

sement de la simple entente clien t-en trep rise, d é rive à partir de la fonction de re la tio n entre eu x . L 'o u b lî de la venustas réd u it l'a r c h ite c te au rôle de dessinateur, metteur en formes et en dimensions ou adaptateur à une solution constructive imposée. C 'e s t cette réduction qu'organise la

formation même de l'a r c h ite c te en le prenant en te n a ille s entre ces deux théories ré c o n c ilié e s .

Dès lors on peut affirm er que la commande ad m inistrative ne fa it q u 'en térin er les codes que se donne la profession elle-m êm e, notamment dans ses positions dominantes : arch ite cte s d éjà détenteurs de commandes im portantes, soucieux d'assurer les lendemains d'agences nombreuses.

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Le jeu de construction : (1 ) Le tra v a il a rch ite ctu ra l se ramène à un jeu de cons truction de volum es. Le cube dans la main est l'im age des modèles réduits où

chaque élém ent est une to ta lité dont la conception a échappé à l'a rc h ite c te (2) Il représente aussi la transformation du logement en o b jet m anîpulable par

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Le tra v a il a rc h ite c tu ra l un rendem ent maximum de l'esp ace et de l'ag en ce. Les c e llu le s constituent l'é lé m e n t de base du tra v a il a rc h ite c tu ra l. Il s 'a g ît de rechercher l'arrangem ent du plan des logements qui s'adaptera le mieux au système constructif,, qui répondra aux critères fon ction n els, qui élim in era les "surfaces in u tile s" qui permettront par leur rép é titio n systématique le lin é a ire de la barre.

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Façades d'un grand a rc h ite c te e t d'autres

Le même q u ad rillag e s'applique à la façad e et au plan masse. Les casiers à b o u teille de Le Corbusier s'épurent pour devenir une trame qui re ç o it les panneaux p réfa­ briqués identiques.

(Les 4 premiers exemples sont les 4 unités d 'h ab itatio n de Le C orb usier, les deux suivants sont les façades de ZUP o rd in aires).

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g e n c e s d o iv e n t p ro u v e r le u r c a p a c it é d e "m o n te r

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Le plan m asse,partie imposante du tra v a il des agences,et la mise en ordre géom étrique de ces éléments indépendamment du co n tex te.

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C H A P I T R E III

LE P R O J E T D 'A R C H IT E C T E , P R O D U C T IO N S O C I A L E

1 ) Q u 'e s t- c e qu'un projet d 'a rc h ite c te ?

Dans les analyses qui vont suivre, nous parlerons du projet d 'a r c h i­ tecture e t nous montrerons q u 'il a été exclu du tra v a il des a rch ite cte s tel q u 'il a été d éfin i im p licitem en t par la commande depuis les années 50. Par projet d'arch îtecte/nous entendrons le tra v a il de conception a r c h ite c ­ turale qui d é fin it le bâtim ent à construire.

Les théoriciens définissent souvent l'a rc h ite c tu re par le tra v a il in te lle c tu e l qui lui donne naissance. A in si l'a ffirm a tio n cé lè b re de Boullée î" 11 faut co n cevo ir pour effe ctu e r, nos premiers p ires n'ont construit leur cabane qu'après en a v o ir conçu l'im a g e : c 'e s t cette production de l'e sp rit qui constitue l'a r c h it e c t u r e " . Sans doute le bâtim ent peut-être conçu de plusieurs façons et les sociétés nous en offrent plusieurs exemples d ifféren ts. Néanm oins,dans des conditions déterm inées de production et de cu ltu re ,le projet s'élab o re selon une démarche assez précise e t qui peut être d é c rite . C e tte dém arche s'ap p u ie sur un certain nombre de techniques spécifiques qui ont été analysées par des recherches récentes e t dont on a une bonne connaissance a u jo u rd 'h u i. Le tra v a il de projet a été étudié par P h ilip p e Boudon, en p a rtic u lie r dans son étude sur la v i l l e de R ic h e lie u , égalem ent par J.P .E p r o n

dans sa recherche sur la pédagogie de l'E c o le des Beaux-Arts. C ertain es m odalités de ces techniques de mise en forme intègrent étroitem ent des données cu ltu re lle s et sociales qui lie n t le projet à la so ciété dans

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l'a rc h ite c tu re est une représentation des valeurs morales et idéologiques d'une s o cié té . C 'e s t pourquoi lorsqu'on critiq u e le caractè re "in d iv id u e l et a rb itra ire " du projet d 'a r c h ite c te , on renonce en fa it à assumer une image de la société que ce projet ne peut manquer de ren vo ye r.

2) La trad ition académ ique

Dans la tradition académ ique, un système com plexe r e lia it le projet d 'a rch ite ctu re à la com m ande. C e système in c lu a it l'A cad é m ie , lieu de la théorie o f f ic ie lle , admise par l ' Et at et dont les valeurs é ta ie n t reconnues par la s o cié té . Il in c lu a it égalem ent l'enseignem ent par

l'E c o le des Beaux-Arts, m aillon essentiel du ren o u vellem en t de la théorie o ff ic ie lle par les doctrines qui lui é ta ie n t opposées par les

professeurs "d 'a v a n t- g a rd e " et par leurs étudiants. Ces doctrines éta ie n t peu à peu récupérées par la théorie o ff ic ie lle en atten dant d etre à leur tour contestées par de nouvelles générations (1 ).

Ces débats permanents sur la théorie de l'a rc h ite c tu re portent sur la m anière de faire le projet et sur les présupposés,, philosophiques et moraux qui le fondent. A in si : "A u X V IIè m e ,e lle est la représentation du pouvoir du R o i. Et c 'e s t ce tte mise en scène de la m ag n ificen ce du pouvoir qui la fonde alors qu'au X V H Iè m e s iè c le l'a rc h ite c tu re opère un rep liem en t. Les idées du s iè c le des lumières ren vo ien t l'a rc h ite c tu re à fonder son savoir sur l'harm onie et les proportions considérées comme les idées d'une raison de l'arch itectu re". De la même m anière les textes

• • • (1) Epron, "Enseigner l'a rc h ite c tu re , l'a rc h ite c tu re en p ro jet"

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théoriques de D urand, ou plus tard de Labrouste et de V io lle t- le - D u c sont les bases du ren o u vellem en t des théories à travers des débats, quelquefois acharnés, qui opposent les arch ite cte s entre eu x. L 'e n jeu de ces débats est bien la m aîtrise de la commande et de la fonction de coordination des métiers du bâtim ent par les a rc h ite c te s . M ais ce sont des débats sur le projet et ce qui le fonde qui tien n en t lieu de stratégie d 'in sertio n s o c ia le . L 'A c a d é m ie débat du beau o b je c tif ou du beau a rb itra ire , de savoir si l'a rc h ite c tu re est de toute étern ité ou un produit de la c iv ilis a tio n mais ces sujets en apparence fu tiles sont ,en r é a lité la rech erch e in q u iète et permanente d'une lég itim ité morale de l'a c te a rc h ite ctu ra l qui puisse fonder l'in se rtio n professionnelle des a rc h ite cte s .

Le système s'est dissout dans l'e ffo rt d 'ad ap tatio n des arch ite cte s â la c iv ilis a tio n in d u s trie lle . L 'E ta t protecteur des arts n 'é ta it plus rep résen tatif de la so ciété en mouvement que l'in d u s trie naissante e x ig e a it. La mise en cause du système n 'a pas porté d'abord sur le contenu p o litiq u e de la dém arche académ ique mais sur une critiq u e "a rtis tiq u e " ("a c a d é m iq u e " est devenu une injure de critiq u e d 'a r t ). M ais l'org an isatio n subtile qui r e lia it la commande p u b liq u e, l'in sertio n professionnelle des a rc h ite c te s , les institutions qui les ré g la ie n t, l'e n ­ seignem ent et la form ation qui leur é ta ie n t associés, n 'o n t jam ais été consciem m ent mises en cause en tant que te lle s . Les critiq u es les plus vio le n te s du mouvement moderne contre l'académ ism e ont été non pas une c ritiq u e esthétique mais une c ritiq u e contre l'e s th é tiq u e elle-m êm e.

3) Le mouvement moderne et l'o c c u lta tio n du projet

Le C o rb u s ie rs e moque de J 'E c o le des Beaux-A rts, des axes et des figures a v e c lesquels les prix de Rome dessinent leurs plans. C e qui n'est pas co n v e n a b le , c 'e s t que les arc h ite cte s p arien t de com position, d 'ax es, de modèles (à l'é p o q u e , d 'a rc h ite c tu re cla ssiq u e ), tout un disoours sur un savo ir- faire esthétique ap p liq u é au p rojet alors q u 'il fau t parier des

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satio n " leur perm ettra d 'a c c é d e r au c é n a c le de la "grande industrie" et de son univers scie n tifiq u e et te ch n iq u e . G ropius d é c la re : " la tâche p rin cip a le de l'a r c h ite c te est a u jo u rd 'h u i c e lle d'un organisateur qui a à confronter tous les problèmes b iologiques, sociaux, techniques et plastiques et â en faire la synthèse dans une unité autonom e" (" L a nou­ v e lle arch ite ctu re et le B au h au s"). L'enseignem ent va se tourner vers

l'a n a ly s e et la d é fin itio n de ces problèmes et la rech erch e de " l 'a p ­ proche la plus d irecte et la plus nette dans leur réso lu tion " déterm inant ainsi le cadre dans lequel devra s'in scrire le tra v a il de l'a r c h it e c t e . Le tra v a il de projet proprement d it sera laissé de côté au profit de l'étu d e de ce que l'on pourrait ap p eler les déterm inants du projet qui se situent dans deux registres p rincip aux : c e lu i de la fon ction et c e lu i de la tech n iq u e. Paradoxalem ent ce tte vo lo n té de réalism e dans la prise en compte du programme et de la tech n o lo g ie s'accom pagne d 'une dématé- ria lîs a tio n du projet dont la dém arche d e v ie n t de plus en plus im palp ab le.

A la n Colquhoun dans "T y p o lo g y and design m ethod" re lè v e cette opposition entre, d'un côté ce q u 'il a p p e lle un "déterm inism e b io - tech ­ nique ", et de l'a u tre une affirm ation du "to u t est p erm is".

A in s i Le Corbusier d é c riv a n t la ch a p e lle de Ronchamp expliquera que "l'a r c h ite c tu re n'est pas une a ffa ire d'événem ents plastiques régentés par des formules scolastiques ou académ iques, ils sont libres et innom­ b ra b le s ". En ex clu a n t de leur discours toute référen ce à la pratique de projet les a rch ite cte s modernes débouchent sur une défense de l'expression

lib re . Les événements plastiques "lib re s et innom brables" régissent le tra v a il a rc h ite ctu ra l "é te rn e lle m e n t insondable et par conséquent ù jamais fa scin a n t" (G ro p iu s ).

Le Corbusier compare alors l'é d ific e à une bu! le de savon "p ar­ faitem ent harmonieuse si le souffle est bien ré p a rti, bien rég lé de l 'i n ­ té r ie u r ". Le mouvement moderne exclut donc le tra v a il de projet de ses discours et ainsi s'am orce une c u lp a b ilité des arch ite cte s qui se

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précî-4 ) Les doctrines a rc h ite ctu ra le s contre le projet

O n peut distinguer deux approches : un refus de la méthode et de la technique de p ro jet. Une critiq u e portant sur la lég itim ité so cia le du tra v a il de p ro jet. Nous prendrons A lex an d e r et son ouvrage "L a synthèse de la form e" comme exemple de la première a ttitu d e ., le s propositions du chercheur N ic h o la s Habraken comme exem ple de la seconde.

La critiq u e technique

A le x a n d e r, tr a v a illa n t à B e rk e le y, propose une méthode n o u velle de con cep tion a rc h ite c tu ra le . D 'une façon g é n é ra le ,il rech erch e une procédure logique de "synthèse de la form e" à partir d'une mise en ordre des données du programme, adaptée à la con cep tion d 'une "b o u illo ire ou d'une v i l l e " . A partir d'u n e an alyse et du traitem ent inform atique de ces données, il produit des schémas regroupés d 'une façon logique.

L 'in té rê t de ces recherches est d 'a v o ir montré les relatio n s complexes q u 'en tretien n en t les divers éléments d'un programme en p a rtic u lie r en terme de cohérence ou de contradictions et d 'a v o ir proposé des o u tils pour les a n alyse r. Pour l'o b je c t if in itia l (la synthèse de la forme) ces recherches ont p artiellem en t éch o u é, au dire d 'A le x a n d e r lui-même qui d éclare en 1971 abandonner toute recherche m éthodologique et inform atique sur l'a rc h ite c tu re q u 'il avaîtjponnmencée en 1958, d even an t bientôt " le plus important th éo ricie n des méthodes de co n c e p tio n " (1 ).

M ais ces travaux ont fa it l'o b je t d'une grande diffusion et ont in flu e n cé durablem ent les esprits.

C e qui est rem arquable, c 'e s t q u 'à propos d 'une rech erch e tout à fa it p a rtie lle portant sur une phase lim itée du processus de co n cep tio n a rc h ite c tu ra le , A le x an d e r pense d'abord d evo ir se lancer dans une v io le n te attaque des a rch ite cte s comme si e lle d e v a it légitim er son propre t r a v a il. Ces attaques pourraient fa ire cro ire q u 'il s 'a g it d 'une a lte rn a tiv e aux

(1 ) "M a x Jaco b so n in terview s Christopher A le x a n d e r",A rc h ite c tu ra l D esign, volum e X L U , D ecem b er, 1971.

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méthodes de projet, ce qui est loin d 'être le cas, ni dans ses travaux ni après quinze ans de tra v a il d'autres chercheurs.

Sa critiq u e porte d'abord sur le fa it que le concepteur u tilise l'in tu itio n "qui ne doit inspirer que très peu de c o n fia n c e ", les co n cep ­ teurs devan t la com plexité des problèmes "se rabattent sur un agencem ent formel arb itrairem ent c h o is i". Pour préserver cette dém arche " a r b itr a ir e " , les concepteurs refuseraient la lo g iq u e î " la logique, à l'in star des

mathématiques, est l'o b je t de suspicion de la part des co n cep teu rs". E lle provoque chez eux "a n x ié té " ou "in q u ié tu d e ". S u ive n t des quolibets sur les a rch ite cte s en tant que personnes. O n les compare aux mages des sociétés arch aïq u es, m agiciens ou prophètes qui

s'opposent au progrès m ettant en cause leurs méthodes et leurs p rivilèg es en considérant " le don" comme une c a p a c ité humaine rem arquable. Leur d éfaut est aussi (et surtout) d 'être des individus ("L a résolution in tu itiv e des problèmes de con cep tion est hors de portée des facu ltés d'appréhension et d 'in te rp ré tatio n d'un seul hom m e"). Il a le défaut supplém entaire d 'être éven tu e lle m en t un artiste : " I l compte de plus en plus sur sa situation d 'a rtis te , sur un v o c a b u la ire d 'in it ié doublé d'un idiome personnel, et sur l'in tu itio n : tous ces éléments le soulagent en effe t d'u n e part du fardeau de la d écisio n , et rendent accomrnodables et "tra ita b le s " ses problèmes de conn aissance. Cantonné dans ses propres ressources, in cap ab le de v e n ir à bout de la com pléxité de l'in form ation q u 'il est supposé organiser, il masque son incom pétence sous une frénésie d 'in d iv id u a lité a rtis tiq u e ". Et plus loin : "Les concepteurs enfouissent leurs dons sous d'irresponsables prétentions au g é n ie ".

Le résultat est donc d ép lo rab le, et M ies van der Rohe a fa it la maison Farnworth sans penser à l'é co n o m ie , ni aux inondations de l'Illin o is . Buckmînster F u lle r a o u b lié que les coupoles ne p o u vaien t

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re c e v o ir de portes, et Le Corbusier ne s'est pas o ccup é des "commodités é lé m e n ta ire s ".

En fin , "l'a c a d é m is m e ", maTtre mot des doctrines arch ite ctu ra le s du mouvement moderne dont les textes d 'A le x a n d e r m arquaient à cette époque à la fois l'accom plissem ent et la fin .S e lo n A lex an d er, la

m éfiance des arch ite cte s actu els serait la même que c e lle des contem po­ rains des progressistes Lodolî et Laugier au X IX è m e se réfu g ian t dans "to u te une v a rié té de "m an ières" et de styles, tels le néo-tudor, le

néo-classîssisme, la ch in o ise rie et le néQrgothique". D 'a iIle u rs A lexander, en bon fo n ctio n n aliste , re je tte jusqu'aux mots du passé : "Com pte tenu des changements conceptuels qui sont en cours, il n'est guère u tile de continuer à u tilise r pour traiter des problèmes de logem ent, de mots solidem ent ancrés dans la cu ltu re du passé; ils ne peuvent que nous

égarer dans notre rech erch e a c tu e l le de solutions mei I leu res:"ap p artem en ts", "maisons en bandes", "maisons in d iv id u e lle s ", "co u rs", "ja r d in s ",

"o rd u res", "p la ce s de statio n n em en t", "s a lle de s é jo u r", " c u is in e " , "sal le-à- m an g er", "cham bre à c o u c h e r", "s a lle - d e - b a in s ". Tous ces mots sont chargés d'un lourd passé qui fa it surgir dans notre esprit des images hors de p ro po s."

A v e c la dém arche a rc h ite c tu ra le , c 'e s t donc enfin l'h isto ire et la mémoire q u 'il faut re je te r et il est s ig n ific a tif q u 'e lle s soient réunies dans cette opprobe. M ais l'im portant reste que les recherches d 'A le x a n d e r à cette époque exprim ent fortement la c u lp a b ilité des a rch ite cte s co n cer­ nant le projet, c u lp a b ilité "te c h n iq u e ", désir de rejoindre le monde

sécurisant de la conform ité au modèle dominant (te c h n o lo g ie , inform atique, re cu e ils de données, traitem ent de l'in fo rm ation e t c . ) , mais surtout

conform ité idéologique en reje ta n t des q u a lific a tifs mal vus : in d ivid u , artiste e t fin alem en t injure pourtant typique d'un artiste , acad ém iste.

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La dém arche d 'A le x a n d e r est le point cu lm inan t du fonctionnalism e qui depuis longtemps tente de fonder la lég itim ité de la créatio n

a rc h ite c tu ra le . Comme ce tte lég itim ité ne peut être que sociale/ le fonctionnalism e et la dém arche d 'A le x a n d e r ne d o iven t pas être analysés comme des méthodes scien tifiq u es mais plutôt comme des ten tatives des a rch ite cte s pour fonder leur statut et s'in tég rer à certains modes de pensée contem porains. Tentatives illu so ires, car la plus grande part du tra v a il a rc h ite ctu ra l e ffe c tif doit être n ié e . La commande se d ép lace alors vers d'autres tâches.

Une autre fa m ille de critiq ues contre le projet d 'a rc h ite c tu re , développées égalem ent dans les années 60, ne portent pas sur la méthode, mais sur la lég itim ité " s o c ia le " du p ro jet.

La critiq u e so cia le

N ic h o la s Habraken d irig e a it en 1 960 le S .A . R ., groupe de recherches a rch ite ctu ra le s fin an cé par cinq agences importantes des Pays-Bas. Il

développe à cette époque, 6 travers plusieurs ouvrages (1) une théorie a rc h ite c tu ra le qui a l l a it a v o ir un grand retentissem ent.

Habraken an alyse l'h a b ita t comme la rencontre de deux domaines, c e lu i de la communauté et c e lu i de l'in d iv id u (ou de la fa m ille ). A l'o rig in e, ces deux domaines é ta ie n t séparés et tous deux in te rve n a ie n t dans l'h a b ita t. M ais les professions et agents de la "sp h ère" so cia le se sont au jo u rd 'h u i emparés aussi de la sphère p riv é e . Ils ont confisqué le pouvoir des habitants. De là d éco u le la m onotonie, le ca ractè re inhumain des ensembles d 'h ab itatio n s modernes et aussi les échecs de l'in d u s tria li­ sation du bâtim ent.

C 'e s t pourquoi il propose de considérer le logement comme constitué de deux parties : les "supports", terrains a r t ific ie ls , planchers a v e c tous les équipements nécessaires (flu id e s , energies e t c ). Ces supports sont du

(1 ) N ic h o la s H abraken, "A a p noot mies h u is", in C onsultation In te rn a tio n a le , A R E A , 1974 ,

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domaine de la c o lle c t iv it é et les arch ite cte s peuvent les déterm iner. Les "unités d é ta c h a b le s ", composants du logem ent, p artitions, cuisines, sali es-de-bains, placards, éléments de façade , sont du domaine de

l'in d iv id u . Elles se prêtent à l'in d u stria lisa tio n et peuvent être l'o b ie t de la consommation. L'usager doit pouvoir les choisir et les agencer à sa guise. C 'e s t grâce à ce tte p a rticip a tio n que l'h a b ita t peut red evenir harm onieux.

Ces théories ont eu une grande in flu e n c e . Elles fondaient les recherches sur la f le x ib ilité , l'a d a p ta b ilité et la p a rtic ip a tio n , recherches c a ra c té ­

ristiques des années 60. Citons pour se lim iter â la Fran ce : "Recherches pour un h abitat personnalisé" de l'a t e lie r 3, "L a maison à M eud on" de Je a n Prouvé, les recherches des frères Arsène Henry en p a rticu lie r à M ontereau et "Les espaces construits ad ap tab les" de Bernard Kohn et Georges M aurîos. D 'autres ten tatives eurent lieu en Suède (dès 1954) et en A n g le te rre , il est impossible de les cite r routes et bientôt il n y a plus de projets ou de système de construction qui ne prétendent à la fle x ib ilité et l'in te rv e n tio n des habitants.

Le reflu x v ie n t, en p a rtic u lie r lorsque les sociologues observent que les usagers ainsi provoqués reproduisent, a v e c les cloisons mobiles (peu isolantes et fra g ile s) les seules dispositions possibles dans l'e x ig u ïté des logements modernes. Henry Raymond montre qu'une in terven tion authentique des habitants n'est pas dans l'arrangem ent laborieux des fonctions du logement et de son plan q u 'ils laissent volontiers aux professionnels, mais dans l'expression plus libre des modes de v ie , par une action sur le sens même de la maison. O r la s ig n ifica tio n des struc­ tures arc h ite ctu ra le s qui servent de cadre à ces expériences sont tellem en t prévalentes sur toutes actions in d ivid u e lle s que c e lle - c i risquent de

d even ir un jeu d ériso ire .

D'autres dém arches, comme c e lie de Lu cien K ro ll qui cherche à faire s'exprim er et à interpréter les intentions des usagers pendant le processus de construction lui-m êm e, semblent plus prometteuses.

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M ais revenons à H abraken, en rech erch an t les fondements de sa dém arche. Il met en question la lég itim ité de l'in te rv e n tio n de l'a r c h i­ tecte d'un point de vue moral : il est c e lu i qui d écid e à la p lace des gens pour ce qui les co n cern e . Comme A le x a n d e r, il leur reproche leur v a n ité : "Les a rch ite cte s ont apparemment du mal à se rendre compte que des bâtiments peu ven t être construits sans leur concours. Ils ont encore plus de mal à comprendre que, de tout temps, des m illions de gens ont été logés sans l'in te rv e n tio n des arch ite cte s et que les

résultats démontrent que, selon les circonstances de temps et de lie u , il fut obtenu autant d'harm onie que possible entre l'homme et son m ilieu m atériel '0 ).

A in si est mise en question la lég itim ité so cia le de la conception a rc h ite c tu ra le . Les a rch ite cte s sont d 'au ta n t plus sensibles à ces

critiques q u 'ils sont peu assurés de la lég itim ité des systèmes tech n o cra­ tiques de la commande et de la maftrîse d 'o u vra g e .

Le d écalag e entre le système de production des logements et les pratiques des habitants é ta it cru ellem en t ressenti dans les années 60 e t les a rch ite cte s n 'é ta ie n t pas pressés de le prendre en ch arg e. Les critiques d 'H ab raken towent un terrain favo rab le e t si les arch ite cte s a c ce p te n t si fa cile m e n t ses idées, c 'e s t en p a rtic u lie r pour se dégager d'une responsabilité d even u e; d if f ic ile à assumer. M ais le projet d 'a rc h ite c te a servi à cette o ccasio n de bouc ém îssaire,de te lle sorte que les a rch ite cte s se font ap p eler au jo u rd 'h u i "te ch n ic ie n s so ciau x " aux Pays-Bas..

O n pourrait aussi rapprocher de ces orientations les recherches de B. Rudolfskî sur les "A rc h ite c tu re s sans a rc h ite c te s ", m erveilleu x re c u e il de constructions v e rn a c u la ire s d 'A friq u e et d 'A s ie . Ces construetions sont souvent le fa it d'artisans sp écialisés, e t " l'a r c h it e c t e " est donc c ité dans le titre dans le sens re s tric tif d 'a rc h ite c te "d ip lô m é ".

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