Matériaux hydrophiles pour l’adsorption préférentielle
de l’eau à hautes températures
Mémoire
Marwa Ghodhbene
Maîtrise en génie chimique
Maître ès sciences (M. Sc.)
Québec, Canada
Matériaux hydrophiles pour l’adsorption préférentielle
de l’eau à hautes températures
Mémoire
Marwa Ghodhbene
Sous la direction de :
Maria Cornelia Iliuta, directrice de recherche
Francis Bougie, codirecteur de recherche
Résumé
Le dioxyde de carbone (CO2) est l'un des plus importants gaz à effet de serre émis par les
activités anthropiques. Les émissions de CO2 peuvent être diminuées en le valorisant en
plusieurs produits chimiques tels que le méthanol, l'éthanol, le diméthyléther et des hydrocarbures par conversion catalytique du CO2. Cependant, la conversion et le rendement
en produit sont faibles en raison de la grande quantité d'eau produite (en tant que sous-produit) qui a un effet négatif sur le catalyseur et limite thermodynamiquement le système réactionnel. L'élimination de l'eau du milieu réactionnel, un exemple d’intensification des procédés par élimination d’un produit à l’aide d’adsorbants, est appelée « sorption enhanced reaction process » (SERP). Peu d'études concernant l'adsorption de l'eau à hautes températures sont disponibles dans la littérature.
Ce projet consiste en l'étude de l'efficacité de plusieurs matériaux zéolithiques potentiels (LTA, FAU et SOD) pour l’adsorption de l'eau jusqu’à 250 °C qui est la température moyenne de réaction de tous les produits mentionnés ci-dessus. Les expériences ont été réalisées en utilisant un analyseur gravimétrique intelligent (IGA, Hiden Isochema). L'effet de différents paramètres tels que la température, la granulométrie et la pression partielle de l'eau a été étudié.
Pour les zéolithes étudiées, la capacité d’absorption a montré une diminution à des températures élevées, en restant néanmoins significative à 250 °C. Les résultats démontrent que les zéolithes FAU-13X et LTA-4A ont la plus grande capacité d'adsorption. Les zéolithes en poudre ont une capacité d’adsorption plus élevée que celles sous forme de perles. La faible cinétique d'adsorption de la SOD limite son utilisation. Les données expérimentales ont été corrélées par des modèles mathématiques. Une équation de type « double exponentielle étirée » a été utilisée et les constantes cinétiques ont été déterminées pour chaque zéolithe. Ces résultats permettront la modélisation et l’optimisation des procédés SERP.
Abstract
Carbon dioxide (CO2) is one of the most important greenhouse gases released from
anthropic activities. The emissions of CO2 can be reduced by its valorisation into many
chemical products like methanol, ethanol, dimethylether and hydrocarbons by catalytic conversion of CO2. However, CO2 conversion and product yield are low because of the
large amount of water produced (as by-product) that has a negative effect on the catalyst and thermodynamically limits the system. The removal of water using adsorbents, an example of process intensification by the removal of a product, is called sorption enhanced reaction process (SERP). Few studies concerning adsorption of water at high temperatures were found in the literature.
In this work, a comparative study was conducted with various potential water adsorbents. The efficiency of several potential zeolitic materials (LTA, FAU and SOD) was investigated for water adsorption up to 250 °C which is the reaction temperature of all products mentioned above. The experiments were performed using an Intelligent Gravimetric Analyser (IGA, Hiden Isochema). The effect of different parameters like temperature, particle size and partial pressure of water were studied.
For all zeolites, the water uptake showed an important decrease at higher temperatures but the capacity at 250 °C was still significant. Zeolites FAU-13X and LTA-4A have the higher adsorption capacities. Zeolites in powder form have a higher adsorption capacity than pearls. Meanwhile, the poor adsorption kinetics of SOD limits its use. The experimental data were correlated by mathematical models. A double stretched exponential equation was found to correlate all data and the kinetic constants were determined for each zeolite. These results will allow the modelling and the optimization of SERP process.
Table des matières
Résumé ... iii
Abstract ... iv
Liste des tableaux ... vii
Liste des figures ... viii
Liste des notations ... ix
Remerciements ... xi
Avant-propos ... xii
1 Chapitre 1 : Introduction ... 1
1.1 Problématique du CO2 ... 1
1.2 Valorisation du CO2 ... 2
1.3 Élimination de l’eau in-situ ... 3
1.3.1 Séparation par membrane ... 4
1.3.2 Séparation par les adsorbants... 4
1.4 Matériaux hydrophiles ... 6
1.4.1 Définition ... 6
1.4.2 Critères de sélection ... 7
1.4.3 Comparaison des matériaux hydrophiles ... 8
1.5 Sélection des matériaux ... 16
1.6 Élimination de l’eau à hautes températures ... 19
1.7 Adsorption sélective de l’eau sur les zéolithes ... 19
1.7.1 La sélectivité de l’eau par rapport au CO2 ... 20
1.7.2 La sélectivité de l’eau par rapport aux alcools ... 23
1.8 Conclusion ... 25
1.9 Objectifs ... 26
2 Chapitre 2 : Méthodologie ... 27
2.1 Appareil pour l’étude d’adsorption ... 27
2.2 Adsorbants ... 29
2.3 Déroulement des expériences ... 30
2.3.1 Étude de la capacité d’adsorption en fonction de la température et en fonction de la granulométrie ... 30
2.3.2 Étude de la capacité d’adsorption en fonction de la pression partielle de l’eau : isothermes d’adsorption ... 30
3 Chapitre 3 : Hydrophilic Zeolite Sorbents for In-Situ Water Removal in High Temperature Processes ... 33 Résumé ... 33 Abstract ... 34 3.1 Introduction ... 35 3.2 Experimental ... 37 3.2.1 Materials ... 37
3.2.2 Adsorption Setup and Procedure ... 37
3.2.3 Experiments under Reaction Conditions ... 38
3.3 Results and discussion ... 38
3.3.1 Effect of Experimental Conditions on the Adsorption Capacity ... 39
3.3.2 Kinetics Study ... 45
3.3.3 Adsorbent Effect under SERP Conditions ... 50
3.4 Conclusion ... 52
4 Conclusions générales et recommandations ... 53
Liste des tableaux
Tableau 1.1. Comparaison des capacités d’adsorption de l’eau des zéolithes LTA (3A, 4A
et 5A) et FAU (13X) ... 15
Tableau 1.2. Comparaison entre différents matériaux hydrophiles. ... 17 Tableau 2.1. Caractéristiques des zéolithes ... 29 Table 3.1. Values of water adsorption capacity for zeolites LTA-(3A, 4A and 5A) and
FAU-13X obtained in this work and in the literature1... 40
Table 3.2. Values of the DSE model parameters for zeolites LTA-(3A, 4A, and 5A) and
FAU-13X1 ... 47
Table 3.3. Activation energy (Ea) values related to the kinetic constants k1 and k2 in the
Liste des figures
Figure 1.1. Classification des isothermes d'adsorption d'eau selon l'IUPAC ... 6 Figure 1.2. Étapes d'adsorption de l'eau par les matériaux mésoporeux ... 12 Figure 1.3. Structure des zéolithes basées sur la cage sodalite ... 13 Figure 1.4. Configuration autours de l'atome d'aluminium neutralisé par un cation sodium
... 14
Figure 1.5. Différence entre deux granulométries de zéolithe: granule et perle... 14 Figure 1.6. Isothermes d’adsorption du CO2 sur la zéolithe 13X à 0 °C ... 21
Figure 1.7. Capacité d’adsorption des COV sur les zéolithes de type Faujasite et Mordenite
... 23
Figure 2.1. Schéma de l’appareil (IGA) ... 28 Figure 3.1 Water weight uptake under a 20 °C-saturated N2 flow at different temperatures
and 100 kPa total pressure for bead-shaped zeolites FAU-13X and LTA-(3A, 4A, and 5A)1
... 41
Figure 3.2. Water adsorption capacity as a function of time for zeolite powders FAU-13X,
LTA-4A, and SOD under a 20 °C-saturated N2 flow, 100 kPa total pressure, at 25 °C and
250 °C1 ... 42
Figure 3.3. Comparison of water weight uptake between beads and powders for zeolites
FAU-13X and LTA-4A under a 20 °C-saturated N2 flow at 100 kPa total pressure1 ... 43
Figure 3.4. Isotherms of water weight uptake for zeolites FAU-13X and LTA-4A powders
at different temperatures and 100 kPa total pressure1 ... 44
Figure 3.5. Fit and residuals of DSE, DE, SE, and LDF kinetics equations for zeolite
FAU-13X powder at 25 °C under a 20 °C-saturated N2 flow and 100 kPa total pressure1. ... 46
Figure 3.6. Arrhenius law verification for the rate constants given by DSE model; k1 and k2
for zeolite FAU-13X powder1 ... 49
Figure 3.7. Effect of the addition of water adsorbents on CO concentration at the exit of
RWGS reactor at 250 °C and 500 kPa1 ... 51
Liste des notations
1 Acronymes AC activated carbon Ar argon C2H5OH ethanol CnH(2n+1) hydrocarbons CA charbon actif CaCl2 chlorure de calciumCa(NO3)2 nitrate de calcium
CH3OCH3 dimethylether
CH3OH methanol
CH4 méthane
CO2 carbon dioxide
CO carbon monoxide
COV composés organiques volatils CsOH hydroxyde de césium
DE double exponential equation DME dimethylether
DSE double stretched exponential equation FAU Faujasite
FT Fischer-Tropsch
GES gaz à effet de serre GHG greenhouse gases
H2 hydrogen
H2O water
HCl chlorure d'hydrogène
IGA intelligent gravimetric analyzer KOH hydroxyde de potassium LDF linear driving force equation LiBr bromure de lithium
LiCl chlorure de lithium LTA Linde Type A
MgCl2 chlorure de magnésium
MgSO4 sulfate de magnésium
MOFs Metal-organic frameworks MOR Mordenite
Na2SiO3 silicate de sodium
NaOH hydroxyde de sodium PSA Pressure Swing Adsorption RWGS reverse water gas shift reaction SE stretched exponential equation
SERP sorption enhanced reaction process
SG silica gel
SiC silicon carbide SO2 sulphur dioxide
SOD Sodalite
VOC volatile organic compounds WGS water gas shift reaction
Variables
1-A1 the fractional contributions for the process mechanism corresponding to
adsorption rate constants k2
A1 the fractional contributions for the process mechanism corresponding to
adsorption rate constants k1
Ea1 activation energy for the process mechanism corresponding to adsorption
rate constants k1 (kJ/mol)
Ea2 activation energy for the process mechanism corresponding to adsorption
rate constants k2 (kJ/mol)
k1 rate constant (min-1)
k2 rate constant (min-1)
Mt uptake at time t (g)
Me equilibrium uptake (g)
Pwater water partial pressure (kPa)
t adsorption time (min)
T temperature (K)
Lettres Grecques
β1 relative exponent to rate constant k1
Remerciements
Mes remerciements les plus profonds vont d'abord à ma directrice de recherche Pr. Maria-Cornelia Iliuta. Je tiens à lui exprimer ma sincère reconnaissance pour son accueil bienveillant au sein de son laboratoire et de m’avoir encadré et dirigé.
Je tiens à exprimer mes vifs remerciements à mon codirecteur de recherche Dr. Francis Bougie pour m’avoir orienté et me faire profiter de son expérience et ses conseils sans lesquels je n’aurais pu mener à bien ce travail.
Je tiens aussi à remercier le support financier du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG) qui m’a permis de réaliser ces travaux.
Je dédie ce travail à mon très cher mari Sami Aziz Ameur. Cet accomplissement est le fruit de ta générosité et de la confiance que tu as toujours portée en moi. Tu es mon modèle de labeur et de persévérance.
Avant-propos
Le présent mémoire a été rédigé en quatre parties : (1) l’introduction consiste en une mise en contexte et la présentation de la problématique de la recherche. La revue de la littérature se base essentiellement sur les adsorbants de l’eau (notamment les zéolithes) et leur efficacité. L’introduction est complétée par la définition des objectifs du projet de maîtrise; (2) la méthodologie porte sur l’utilisation de l’IGA et le déroulement des expériences d’adsorption, la préparation des adsorbants et enfin la présentation des équations utilisées pour la modélisation cinétique; (3) le manuscrit de l’article publié constitue la troisième partie du mémoire; (4) les conclusions générales et les recommandations.
L’article a été publié dans le journal scientifique The Canadian Journal of Chemical
Engineering en Octobre 2017 :
Ghodhbene, M., Bougie, F., Fongarland, P., Iliuta, M.C. Hydrophilic zeolite sorbents for in-situ water removal in high temperature processes. Canadian Journal of
Chemical Engineering, 2017, 95, 1842-1849.
Je suis l'auteure principale de cet article. J'ai effectué l'ensemble des travaux expérimentaux (à l’exception des tests d’application dans un réacteur catalytique à haute température et pression qui ont été réalisés par Dr. Francis Bougie dans le laboratoire de Génie des Procédés Catalytiques, CNRS, CPE Lyon, Université Claude-Bernard Lyon 1) et l’interprétation des données sous la supervision de mes directeurs de recherche. J'ai rédigé cet article en tenant compte des suggestions et corrections des coauteurs ainsi que des réviseurs.
1 Chapitre 1 : Introduction
1.1 Problématique du CO2
La pollution atmosphérique est l’un des problèmes environnementaux actuels les plus importants. Les gaz à effet de serre (GES) sont l’un des facteurs qui causent le réchauffement climatique et le dioxyde de carbone (CO2) est l’un des GES les plus émis
dans l’atmosphère. La concentration atmosphérique de CO2 était de 280 ppm avant la
révolution industrielle et elle devrait atteindre 570 ppm à la fin du siècle.[1]
Pour réduire les émissions de CO2, plusieurs stratégies ont été mise en place[2; 3] :
- La réduction de la consommation énergétique : améliorer l’efficacité énergétique en augmentant le rendement et les performances énergétiques des moyens de transport, des procédés industriels, des appareils et des machines;
- L’utilisation des sources d’énergie à faibles teneurs en carbone comme l’hydrogène;
- L’utilisation des énergies renouvelables comme l’énergie hydraulique, l’énergie solaire, l’énergie éolienne, l’énergie nucléaire et la biomasse comme biocarburants; - La diminution de la quantité des déchets et l’utilisation des produits recyclés; - La capture et le stockage du CO2 : les sources fixes et concentrés comme les
centrales thermiques, cimenteries et raffineries sont des sources majeures d’émission du CO2. Dans ce concept, le CO2 est capturé pour être ensuite
transporté et stocké.
Parmi ces options, la capture du CO2 des installations industrielles de grande taille
constitue une approche très prometteuse pour minimiser l’effet néfaste sur l’atmosphère de ces émissions fortement polluantes. Beaucoup de technique de séparation et de capture du CO2 ont été développées. Parmi ces techniques, on trouve l’adsorption, l’absorption, la
cryogénie, les membranes, les gaz hydrates et la combustion en boucle chimique. [4; 5] Une
fois le CO2 capturé, il est soit utilisé dans différents procédés, soit transporté vers des sites
de stockage appropriés. Le transport se fait par pipeline ou sous forme liquide par des bateaux, des camions et des wagons citernes. Plusieurs emplacements sont disponibles pour
le stockage par l'injection comme les gisements de pétrole et de gaz naturel épuisés, les aquifères salins profonds et les veines de charbon non exploitées.[3] Néanmoins, la
séquestration peut engendrer beaucoup de problèmes techniques et environnementaux comme la contamination des eaux souterraines occasionnée par les fuites.[2; 6]
Une alternative à la séquestration est l’utilisation du CO2. L’utilisation peut être directe
comme dans l’industrie agroalimentaire, l’industrie pharmaceutique, les extincteurs, l’industrie de l’acier, comme agent propulseur ou dans divers processus comme le traitement de l'eau, l’emballage et la décaféination.[7] L’autre possibilité d’utilisation est la
valorisation du CO2 par transformation en produits chimiques à haute valeur ajoutée.
1.2 Valorisation du CO2
À part l’avantage environnemental lié à la réduction des émissions du CO2, sa valorisation
en produits à haute valeur ajoutée présente un important avantage économique. Plusieurs applications sont largement utilisées comme la synthèse de l’urée, la synthèse de l’acide salicylique et la synthèse des polycarbonates.[2]
Le reformage du méthane (CH4) est une autre application qui vise à produire le gaz de
synthèse (CO/H2) qui pourrait être converti en produits chimiques ou en carburants propres.
Le reformage à sec consiste à faire réagir le CO2 avec du méthane à sec (Réaction 1).[8]
Toutefois, la réaction RWGS (Reverse Water Gas Shift, « réaction du gaz à l'eau inversée ») (Réaction 2) a lieu simultanément ce qui augmente la conversion du CO2 et
diminue la conversion du CH4.[3]
CH + CO ↔ 2CO + 2H ∆H° = 247,3 kJ/mol (1)
CO + H ↔ CO + H O ∆H° = 41,2 kJ/mol (2)
Le reformage à la vapeur permet d’ajouter la Réaction 3 ce qui permet d’augmenter la conversion du méthane.
Toutefois, l’hydrogénation du CO2 pour produire des produits oxygénés et des
hydrocarbures est le domaine de conversion le plus étudié. La réaction RWGS (Réaction 2) est une réaction clé qui se produit simultanément dans les réactions de synthèse des produits issus l’hydrogénation catalytique du dioxyde de carbone. Parmi les produits issus de l’hydrogénation catalytique du CO2 on trouve le méthanol [2], l’éthanol [9] et le
diméthyléther (DME) [10] selon les réactions 4, 5 et 6 respectivement.
CO + 3H ↔ CH OH + H O ∆H° = −49,4 kJ/mol (4)
2CO + 6H ↔ C H OH + 3H O ∆H° = −173,6 kJ/mol (5) 2CO + 6H ↔ CH OCH + 3H O ∆H° = −121,8 kJ/mol (6) Toutefois, la grande quantité d’eau produite en sous-produit, dans toutes ces réactions, limite la conversion du CO2 et bloque les sites actifs du catalyseur. La combinaison entre
l’état d’équilibre de ces réactions et l’élimination de l’eau in-situ permet le déplacement de l’équilibre de ces réactions vers la droite selon le principe de Le Chatelier, en augmentant ainsi la conversion du CO2, le rendement et la sélectivité.[11]
La synthèse des hydrocarbures par le procédé Fischer-Tropsch (FT)[12] (Réaction 7) se fait
par la conversion du gaz de synthèse. De nouvelles études ont proposé l’incorporation du CO2 comme réactif en utilisant le CO comme intermédiaire. La conversion du CO2 en CO
se fait en favorisant la réaction RWGS (Réaction 2) par élimination de l’eau.[13]
"2 + 1#H + nCO ↔ C%H" %& #+ nH O ∆H° = −158 kJ/mol (7)
1.3 Élimination de l’eau in-situ
L’élimination sélective d’un composé d’un milieu réactionnel au fur et à mesure qu’il soit produit (in-situ) nécessite le couplage des systèmes réactionnels avec des formes de séparation in-situ. Ces configurations hybrides, basées sur le principe de Le Châtelier, permettent [11; 14]:
- L’amélioration de la sélectivité du produit ; - L’établissement d’un meilleur état d’équilibre; - La diminution de la température de réaction ;
- La diminution des opérations de purification et les coûts des procédés.
Généralement, les procédés de séparation in-situ sont soit des techniques membranaires ou des procédés d’adsorption.[11]
1.3.1 Séparation par membrane
Les membranes constituent des barrières sélectives pour certaines molécules. Ceci permet l’élimination exclusive d’un produit indésirable ou la séparation des composés présents dans le même milieu réactionnel. Les avantages des systèmes de séparation par membranes ont été démontrés à travers un grand nombre d'études[11] concernant, entre autres, la
synthèse Fischer-Tropsch, la déshydrogénation de l’éthane, du cyclohexane et de l'éthylbenzène, l'hydrogénation de l'acétylène, la production du monoxyde de carbone par la réaction RWGS, le reformage à la vapeur du méthane et la réaction de synthèse de diméthyléther.
Différents problèmes techniques peuvent accompagner l’utilisation des membranes comme le colmatage, la stabilité thermique et mécanique et la dilution causée par les gaz de balayage.
1.3.2 Séparation par les adsorbants
Les systèmes combinant les réactions chimiques avec l’adsorption in-situ consistent en l’utilisation d’un adsorbant sélectif directement mélangé avec le(s) catalyseur(s). Ce procédé est nommé « Sorption-Enhanced Reaction Process » (SERP). Il présente l’inconvénient de la discontinuité car il faut régénérer l’adsorbant quand il atteint sa capacité limite d’adsorption.[11] Très peu d’études se sont intéressées à l’application de ce
procédé à l’élimination in-situ de l’eau, la plupart étant dirigées vers l’adsorption sélective du CO2 pour la production de l’hydrogène par reformage à la vapeur (par ex., à partir du
méthane ou du glycérol).[15-17] Parmi les études qui ont appliqué le procédé SERP à
la RWGS en utilisant comme adsorbant la zéolithe 4A et ont démontré que cela permet d’avoir une conversion du CO2 de 36% à 250 °C qui ne pouvait être atteint qu’à 565 °C.
Dans ce cas, le procédé SERP permet d’avoir le même taux de conversion à une température beaucoup plus basse. Bayat et al.[18] ont investigué la synthèse FT avec
l’élimination de l’eau in-situ par la zéolithe 4A en vue d’augmenter le taux de conversion. Leur modélisation démontre qu’en éliminant l’eau, le rendement en hydrocarbures augmente de 6 à 9% et le taux du CO2 diminue de 40 à 20%. Le rendement en eau diminue
aussi de 23% à moins de 1%. Ils concluent que le procédé SERP est une idée intéressante pour une application dans la synthèse des hydrocarbures par le Procédé FT. Iliuta et al.[11]
ont étudié par simulation la production du DME dans un réacteur à lit fixe avec et sans élimination de l’eau in-situ par adsorption par la zéolithe 4A. Les résultats obtenus démontrent que l’élimination de l’eau par adsorption permet de déplacer la RWGS et ainsi améliorer la conversion du CO2 en méthanol et améliorer la productivité et la sélectivité du
DME. Les maximums de l’amélioration de la conversion du CO2 (300%) et de la sélectivité
en DME (20,6%) ont été observés à un ratio de H2/COx = 1. Les maximums de
l’amélioration du rendement en méthanol (240%) et en DME (310%)ont été observés à un ratio de H2/COx = 2. Ces résultats démontrent que l’utilisation potentielle du CO2 au lieu du
CO pour la synthèse du DME peut être intéressante industriellement en éliminant l’eau in-situ par adsorption.
Plusieurs éléments sont à prendre en considération pour le choix de l’adsorbant. L’adsorption de l’eau, qui est un processus physique, est favorisée à basses températures. Par contre, les réactions mentionnées auparavant pour l’hydrogénation catalytique du CO2
se produisent toutes à des températures autour de 250 °C. L'adsorbant doit alors avoir une bonne capacité d'adsorption et une bonne sélectivité à cette température. La cinétique d’adsorption est aussi un paramètre très important parce que l’eau doit être adsorbée aussi rapidement qu’elle est produite. La stabilité structurale des adsorbants pendant les étapes d'adsorption/désorption et leur capacité d’adsorption cyclique doivent également être considérées.
Le présent travail concerne l’investigation des différents adsorbants de l’eau en vue de l’application du procédé SERP pour l’hydrogénation catalytique du CO2.
1.4 Matériaux hydrophiles 1.4.1 Définition
Figure 1.1. Classification des isothermes d'adsorption d'eau selon l'IUPAC[19]
Le caractère hydrophile est quantitativement et qualitativement classé selon l’IUPAC sur la base du type de l’isotherme d’adsorption (Figure 1.1). Il existe sept types d’isothermes :
- L’isotherme de type I :
Caractérise un matériau à haute capacité d’adsorption d’eau et une saturation très rapide même à une basse pression partielle. Ce matériau est considéré avoir une grande affinité pour l’eau même à faibles pressions partielles.
- Les isothermes de type II, IV et VI:
Les matériaux présentent une forte adsorption d’eau à une pression partielle basse à
modérée. Les matériaux ayant l’isotherme de type VI sont considérés hydrophiles et présente une adsorption par étapes.
- Les isothermes de types III et V :
Caractérisent des matériaux hydrophobes ou faiblement hydrophiles à une pression partielle basse à modérée et une adsorption soudainement élevée de l'eau aux pressions partielles élevées.
- L’isotherme de type VII :
Est attribuée aux adsorbants fortement hydrophobes. Ces matériaux possèdent une faible adsorption d'eau pour toutes pressions partielles.
1.4.2 Critères de sélection
Le matériau choisit doit obéir à certains critères afin de répondre aux attentes. Les critères les plus importants sont :
- Température
La température d’opération est aux alentours de 250 °C. À cette température, le matériau doit pouvoir adsorber l’eau produite dans le milieu réactionnel.
- Vitesse d’adsorption
L’eau doit être éliminée aussi vite qu’elle est produite. L’adsorption doit être caractérisée par un isotherme de type I. Une adsorption lente peut diminuer le taux de conversion.
- Sélectivité
Le matériau doit montrer une affinité seulement pour l’eau afin de déplacer l’équilibre dans le sens voulu. Une adsorption compétitive entre l’eau et d’autres composés présents dans le milieu réactionnel diminuerait l’efficacité du procédé SERP qui se base sur l’élimination exclusive de l’eau.
- Capacité cyclique d’adsorption/désorption
Dans le procédé SERP, l’adsorbant est mélangé avec le catalyseur. L’une des contraintes de cette approche est la nécessité de l’adsorbant à être régénéré plusieurs fois et de revenir à son état initial après régénération. Une stabilité importante pendant plusieurs cycles d’adsorption/désorption est donc requise pour éviter l’augmentation des coûts (perte de catalyseur et d’adsorbant).
- Neutralité
Le matériau est utilisé seulement à des fins d’adsorption. Il ne doit pas être doté d’une capacité catalytique et de sites actifs, sinon l’eau produite ne sera pas adsorbée.
- Coût et disponibilité
Le coût du matériau ne doit pas être élevé et il doit être facilement trouvable pour les besoins d’approvisionnement.
1.4.3 Comparaison des matériaux hydrophiles
Beaucoup de matériaux ont été utilisés pour l’adsorption de l’eau. Cependant le choix du matériau dépend de l’application ou du procédé dans lequel il sera utilisé. La discussion des caractéristiques des matériaux les plus utilisés sera présentée dans ce qui suit.
Sels hygroscopiques et hydroxydes alcalins
Les sels hygroscopiques comme LiBr, CaCl2, Ca(NO3)2, MgSO4 et MgCl2 sont utilisés pour
contrôler l’humidité par adsorption. LiBr, CaCl2 et MgSO4 ont une capacité d’adsorption
qui dépasse 0,9 g/g même à une faible humidité relative de 30 %.[20] Le problème souvent
rencontré avec ces sels est la dissolution dans des conditions très humides et la tendance à l'agglomération ce qui limite généralement leur utilisation.[19] Ils sont aussi instables et se
décomposent à hautes températures comme pour le MgCl2 qui libère du HCl au-delà de 190
°C[21]. Le Ca(NO
3)2 se décompose et produit de l’oxygène et des nitrites cancérigènes à 132
°C[22] alors que le CaCl
2 ne doit pas être régénéré à des températures supérieures à 50 °C.[23]
Les hydroxydes alcalins comme le NaOH, KOH et CsOH ont été utilisés comme alternatifs aux sels hygroscopiques mais leur application montre beaucoup de limites parce qu’ils sont partiellement ou totalement solubles s’ils sont exposés à une humidité élevée, posant aussi des problèmes de corrosion surtout à hautes températures.[19]
Charbon actif
Le charbon actif (CA) est largement utilisé comme adsorbant grâce à sa grande porosité et sa grande surface spécifique (300–4000 m2/g).[22] L'eau est adsorbée en créant des liaisons
hydrogènes avec la surface du CA et la quantité d'eau adsorbée dépend en grande partie du nombre de groupes fonctionnels oxygénés à la surface. Toutefois, une partie des groupes fonctionnels est décomposée à hautes températures, ce qui réduit le caractère hydrophile du charbon actif.[22] L’isotherme d’adsorption de l’eau sur le CA est de type V ce qui fait que le CA a une bonne capacité d’adsorption de l’eau à hautes pressions partielles (ex. 0,38 à 0,67 g/g à 30 °C).[24] L’imprégnation du CA avec les sels hygroscopiques améliore sa
capacité d’adsorption de l’eau surtout à basses pressions partielles d’eau. Spiridon et al.[25]
augmente la capacité d’adsorption : avec 15% de CaCl2, la capacité d’adsorption de l’eau
est de 0,15 g/g alors qu’avec 30% de CaCl2, elle est de 0,20 g/g. À basses pressions partielles d’eau de 0,1 à 0,3 kPa et à 25 °C, le CaCl2 augmente la capacité d’adsorption de l’eau du CA de 0,04 à 0,52 g/g lorsqu’il est ajouté à 70 %.[26] Le CA traité par Na
2SiO3 (10
%) et imprégné avec CaCl2 (43 %) a une capacité d’adsorption de l’eau à 0,85 g/g à 25 °C
et à une humidité relative de 80%.[27]
En général la température de régénération du CA est de 110 °C. Dans le cas de ces composés, elle peut aller jusqu’à 150 °C comme pour le cas du CA/CaCl2 pour lequel l’eau
commence à se désorber à partir de 100 °C et à 200 °C l’eau est totalement désorbée et la matrice du CA commence à s’oxyder.[22] Pour le cas de CA/CaCl
2/ Na2SiO3, la température
de régénération doit être inférieure à 100 °C (à 55 °C, 80 % de l’eau est désorbée).
Gel de silice
Le gel de silice est l’un des adsorbants pour l’eau les plus étudiés grâce à son caractère hydrophile et sa grande affinité à l’eau même aux faibles humidités. Les molécules d'eau sont adsorbées sur la surface de la silice par la formation des liaisons hydrogènes avec les groupes silanol Si-OH.[19] La capacité d’adsorption de l’eau du gel de silice est de 0,4 à
0,45 g/g à 25 °C à haute pression partielle de l’eau. Par contre, les températures de régénération du gel de silice restent relativement basses pour un maximum de 150 °C.[19]
Lorsque la température dépasse 200 °C, les groupes silanol se détachent de la surface de la silice.[22]
L'imprégnation des gels de silice par les sels hygroscopiques est un moyen simple et efficace pour améliorer leur capacité d'adsorption de l’eau. Le gel de silice/CaCl2 peut
atteindre une capacité d’adsorption de l’eau de 1,06 g/g à 30 °C mais cette capacité diminue à 0,23 g/g à 70 °C.[28] Le gel de silice/LiBr peut avoir une capacité d’adsorption de l’eau de
0,80 g/g à 25 °C.[19] Le gel de silice/LiCl, à une humidité relative de 80% et à 30 °C, a une
capacité d’adsorption de l’eau de 0,70 g/g.[22] Par contre, l’imprégnation diminue leurs
températures de régénération comme pour le cas des gels de silice imprégnés par le CaCl2
pour lesquels la température de régénération diminue jusqu’à 90 °C, pouvant même descendre jusqu’à 75 °C pour la silice modifiée par le nitrate de calcium.[24]
Argile
Les argiles sont des minéraux composés par des silicates et des aluminosilicates. Les argiles sont constituées par des couches parallèles formées par des tétraèdres de silicate (SiO4) et
des octaèdres d’aluminate (AlO6). La charge négative distribuée sur les oxygènes de la
structure est neutralisée par des cations qui s’insèrent entre les couches. Pendant l’adsorption de l’eau et des solvants polaires, l’argile gonfle jusqu’au point où il n’y a plus d’interaction entres les couches.[19] Après la déshydratation à 120 °C, les argiles sont
restaurées dans leur état original. Toutefois, la déshydratation à des températures élevées peut provoquer l'effondrement irréversible de la structure et la perte de leur capacité d’adsorption.[19] Ainsi, ces matériaux sont moins attirants dans les applications d’adsorption
d’eau. Ils sont plus appropriés pour une étape d'adsorption unique tel que dans le domaine cosmétique.[19]
Polymères adsorbants
Un polymère est un matériau composé par une répétition de plusieurs monomères qui peuvent être de la même nature ou de nature différente. Ils peuvent être naturels ou issus de la synthèse chimique. Ils ont été largement étudiés comme adsorbants pour l’eau grâce à leur capacité d’adsorber jusqu’à 80% de leur poids et grâce à leur flexibilité à être modifié pour atteindre les isothermes d’adsorption désirés selon l’application demandée.[24] Parmi
eux, on trouve les MOFs (Metal-organic frameworks ou Matériaux à réseaux métallo-organiques) et les polyélectrolytes.
Les MOFs sont des polymères de coordination poreux constitués d’ions métalliques liés par des ligands organiques. L’architecture de ces matériaux offre une grande surface spécifique, un grand volume des pores et une grande variabilité de propriétés physico-chimiques du fait de leur composition facilement modifiable.[24] Les MOFs de type MIL
sont les plus étudiés pour l’adsorption de l’eau. Leur capacité d’adsorption peut atteindre 1,43 g/g à 25 °C et à haute pression partielle de l’eau mais l’adsorption commence à partir d’une humidité relative supérieur à 35% ce qui limite leur utilisation à faibles humidités.[29]
En plus, cette grande capacité diminue considérablement en augmentant la température. Dans le cas du MIL-101(Cr) et du MIL-100(Fe), la capacité d’adsorption de l’eau a
diminué de 1,50 g/g et 0,84 g/g respectivement à moins de 0,2 g/g en augmentant la température de 30 °C à 60 °C.[30] Les températures de régénération maximales restent tout
de mêmes relativement basses et un maximum de 140 °C a été reporté.[24] Plusieurs MOFs
sont disponibles dans le commerce et ils ont montré une grande dégradation après plusieurs dizaines de cycles d'adsorption-désorption.[22]
Les polyélectrolytes représentent une autre classe de polymères dont la majorité des unités sont des groupes ionisables ou ioniques. Les polyélectrolytes ont une bonne capacité d’adsorption de l’eau à haute pressions partielles qui peut atteindre 0,80 g/g à 22 °C pour le type PASS[31] et 1,05 g/g à 30 °C pour le type SDP.[32]Ils sont caractérisés par une bonne
régénération cyclique et sont facilement régénérables mais à basses températures uniquement, ce qui limite leur utilisation à des températures relativement élevées.[24]
Les matériaux mésoporeux
Les matériaux mésoporeux sont synthétisés en utilisant des tensioactifs à longue chaîne. Cette famille de matériaux comporte plusieurs variétés comme MCM-48, MCM-50, FSM-16, KIT-1, SBA-2, SBA-15, etc. Ces matériaux présentent une grande capacité d’adsorption de l’eau qui est due à sa surface mésoporeuse et à la grande quantité des groupements silanol à sa surface. L’adsorption sur ces groupements est suivie d’une condensation capillaire. Comme exemple, à 25 °C et à une très haute humidité relative, la capacité d’adsorption de l’eau est de 0,83 g/g pour le MCM-48, 0,84 g/g pour le SBA-15 et 0,78 g/g pour le FSM-16.[19]
Toutefois, l’adsorption à basses pressions partielles de l’eau est très lente car ces matériaux ont une surface hydrophobe. À hautes pressions partielles de l’eau, l’adsorption devient plus importante grâce à la condensation des molécules d’eau. La plupart de ces matériaux présentent une isotherme de type V et des températures de régénération inferieures à 100 °C.[19] Cependant, le cycle d’adsorption est généralement long. Une cinétique d’adsorption
basse limite leur utilisation.[22] La Figure 1.2 montre les étapes d’adsorption de l’eau sur les
matériaux mésoporeux. Ils présentent aussi l’inconvénient d’avoir une grande affinité pour les molécules organiques.[19]
Figure 1.2. Étapes d'adsorption de l'eau par les matériaux mésoporeux[19]
Les zéolithes
Les zéolithes sont des composés à structure cristalline formés par un arrangement tridimensionnel des tétraèdres de SiO4 et AlO4. Elles sont soit naturelles soit obtenues par
synthèse chimique à partir de solutions ou gels aluminosilicates. La formule structurale des zéolithes s’écrit :[33]
Mx/n (AlO2) x (SiO2) y
Où
n : valence du cation M,
y : nombre de tétraèdres SiO4 par maille élémentaire
x : nombre de tétraèdres AlO4 par maille élémentaire
y/x : rapport atomique Si/Al
Chaque atome d’oxygène est partagé entre deux tétraèdres pour former ainsi des sous-unités ou cages qui sont liées entre elles pour former une maille élémentaire caractéristique d’un type de zéolithe. Comme exemple, la Figure 1.3 représente la formation de la cage sodalite qui, par différent assemblage, mène à plusieurs types de zéolithe.
Figure 1.3. Structure des zéolithes basées sur la cage sodalite[19]
Chaque maille renferme un vide. L’assemblage des mailles élémentaires forment une structure poreuse. Les zéolithes sont généralement classées en fonction de leur taille des pores qui est définit par le nombre d’atomes d’oxygène constituant l’entrée du pore (8 : petit, 10 : moyen, 12 : large et 14 : ultra large).
Le remplacement de l’atome de silicium par un atome d’aluminium (Figure 1.4) crée une charge négative dans la structure qui sera neutralisée par des cations de métaux alcalins ou des alcalino-terreux.[22] Cette charge donne aux zéolithes un caractère hydrophile. Plus le ratio Si/Al est faible plus la zéolithe est hydrophile. En raison du fort champ électrique créé par la présence de l’atome d'aluminium et du cation dans la zéolithe, les molécules d'eau sont fortement attirées au voisinage du cation[34] Les zéolithes riches en aluminium sont les
plus utilisées comme agent desséchant grâce à leur forte concentration en sites actifs hydrophiles due à la forte concentration en cations qui équilibre la charge négative de la zéolithe. Ces cations sont mobiles et échangeables. Les molécules d’eau interagissent avec ces cations et forment des complexes.[19]
Figure 1.4. Configuration autours de l'atome d'aluminium neutralisé par un cation
sodium[35]
Les zéolithes sont généralement vendues sous trois granulométries : poudre, perle et granule. La Figure 1.5 montre la différence entre les perles et les granules.
Figure 1.5. Différence entre deux granulométries de zéolithe: granule et perle
L’étude des isothermes d’adsorption de l’eau à 5 °C sur du charbon actif, de l’alumine activée et une zéolithe (le type n’est pas mentionné dans l’article) a démontré qu’ils avaient respectivement des isothermes d’adsorption de type V, II et I. La zéolithe a donc une meilleure affinité pour l’eau à basses pressions partielles. Par exemple, à 1 kPa la capacité d’adsorption de l’eau est de 0,16 g/g pour la zéolithe alors qu’elle est de 0,04 g/g pour le charbon actif et de 0,03 g/g pour l’alumine.[36] Dans une autre étude, à plus haute
température, soit 100 °C, et une humidité relative de 1,3%, l’adsorption de l’eau par les zéolithes peut aller jusqu’à 0,15 g/g qui est 10 fois plus que le charbon actif et 20 fois plus que le gel de silice.[22]
Les zéolithes avec un faible ratio Si/Al sont les plus utilisées pour adsorber l’eau.[19] Le
ratio Si/Al est de 1,5 à 3 pour la zéolithe FAU-Y et supérieur à 2 pour la zéolithe MFI. Ces zéolithes sont généralement utilisées pour l’adsorption des composés hydrophobes. Les zéolithes MOR ont un ratio Si/Al supérieur à 5 et sont généralement utilisées en catalyse.[33; 37]
Tableau 1.1. Comparaison des capacités d’adsorption de l’eau des zéolithes LTA (3A, 4A
et 5A) et FAU (13X)
Zéolithe Granulométrie Température (°C)
Capacité
(g/g) Peau (kPa) Référence
3A Granules (3,7 mm1) 20 0,24 2,21 [39] Granules (3,7 mm1) 30 0,18 2,32 [39] Granules (3,7 mm1) 40 0,17 2,22 [39] Granules (3,6 mm1) 100 0,14 2,33 [40] Granules (3,6 mm1) 200 0,16 2,33 [40] -2 25 0,20 2,33 [41] 4A Poudre 25 0,26 2,33 [42] -2 25 0,27 2,33 [43] 5A Granules (3,6 mm1) 25 0,20 2,33 [44] Perles (1,5-2,5 mm) 25 0,24 1,58 [45] Perles (1,5-2,5 mm) 50 0,19 1,23 [45] Perles (1,5-2,5 mm) 100 0,13 1,27 [45] 13X Perles (2,1 mm) 20 0,33 2,20 [39] Perles (2,1 mm) 30 0,29 2,32 [39] Perles (2,1 mm) 40 0,27 2,25 [39] Perles (1,5-2,5 mm) 25 0,25 1,83 [45] Perles (1,5-2,5 mm) 50 0,21 1,68 [45] Perles (1,5-2,5 mm) 100 0,15 1,52 [45] Poudre 25 0,32 2,33 [42]
Les zéolithes de type LTA (Linde Type A), SOD (Sodalite) et FAU-X (Faujasite) ont le ratio le plus bas (LTA : 1, SOD : 1 et FAU-X : 1-1,5).[33; 37; 38] Ils sont régénérées à des
températures supérieures à 200 °C en raison de la forte liaison avec les molécules d'eau dans les zéolithes.[24] Ces dernières sont les plus utilisées pour l’adsorption de l’eau pour
contrôler l’humidité, à des fins de séparation comme le séchage d’autres composés et pour l’élimination de l’eau des milieux réactionnels. Le Tableau 1.1 montre une comparaison des capacités d’adsorption de l’eau des zéolithes LTA (3A, 4A et 5A) et FAU (13X).
1.5 Sélection des matériaux
La Tableau 1.2 énumère les différentes caractéristiques des matériaux hydrophiles utilisés dans la littérature.
Tableau 1.2. Comparaison entre différents matériaux hydrophiles. Matériau Capacité (g/g) Condition opératoires (T, Peau) Température de régénération recommandée (°C)
Références Sélectivité Stabilité
hydrothermale Sels hygroscopiques Moyenne Faible CaCl2 ≥ 0,9 25 °C, 3,17 kPa ≤ 50 [23] MgCl2 ≥ 0,9 25 °C, 3,17 kPa ≤ 190 [21] Charbon actif Faible Elevée CA 0,67 30 °C, 4,24 kPa 110 [24] CA/CaCl2(15%) 0,15 25 °C, 3,17 kPa 120-150 [25] CA/CaCl2(30%) 0,20 25 °C, 3,17 kPa 120-150 [25] CA 0,04 25 °C, 0,1 à 0,3 kPa 110 [46] CA/CaCl2(70%) 0,52 25 °C, 0,1 à 0,3 kPa 120-150 [46]
CA/Na2SiO3/CaCl2 0,85 25 °C, 1,87 kPa 55-100 [27]
Gel de silice
Elevée Faible
Gel de silice 0,4-0,45 25 °C, 3,17 kPa 150 [19]
Gel de silice/CaCl2 1,06 30 °C, 4,24 kPa 95 [28]
0,23 70 °C, 4,24 kPa 95 [28]
Gel de silice/LiBr 0,80 25 °C, 2,53 kPa 125 [19]
Gel de silice/LiCl 0,70 30 °C, 3,39 kPa 90 [22]
Polymères adsorbants
Moyenne Faible
MOF-MIL-101(Cr) 1,50 30 °C, 2,42 kPa 70 [30]
MOF-MIL-101(Cr) 0,20 60 °C, 4,78 kPa 70 [30]
MOF-MIL-101(Fe) 0,84 30 °C, 2,42 kPa 70 [30]
MOF-MIL-101(Fe) 0,20 60 °C, 4,78 kPa 70 [30]
Polyélectrolyte- PASS 0,80 22 °C, 2,11 kPa 50 [24]
Polyélectrolyte- SDP 1,05 30 °C, 2,97 kPa 50 [24] Matériaux mésoporeux Faible Faible MCM-48 0,83 25 °C, 3,17 kPa 150 [47] SBA-15 0,84 25 °C, 3,17 kPa 150 [47] FSM-16 0,78 25 °C, 3,17 kPa 100 [19] Zéolithes Moyenne à élevée Elevée LTA-3A 0,20 25 °C, 2,33 kPa 200 [41] 0,17 40 °C, 2,22 kPa 200 [39] 0,14 100 °C, 2,33 kPa 220-240 [40] 0,02 200 °C, 2.33 kPa 220-240 [40] LTA-4A 0,27 25 °C, 2,33 kPa 300 [42] LTA-5A 0,20 25 °C, 1,58 kPa 175 [45] 0,19 50 °C, 1,23 kPa 175 [45] 0,13 100 °C, 1,27 kPa 175 [45] FAU-13X 0,25 25 °C, 2,33 kPa 300 [42] 0,32 25 °C, 1,83 kPa 175 [45] 0,22 50 °C, 1,68 kPa 175 [45] 0,15 100 °C, 1,52 kPa 175 [45]
La comparaison de ces caractéristiques montre bien que les zéolithes sont les seuls adsorbants utilisés à des températures supérieures à 200 °C. Les zéolithes ont donc été choisies dans la présente étude, sur la base des critères suivants :
- Possibilité d’adsorption à hautes températures
- Bonne capacité d’adsorption même à de basses pressions partielles - Stabilité hydrothermale
- Sélectivité
Plus spécifiquement, les zéolithes LTA (3A, 4A et 5A), FAU (13X) et SOD ont été choisies car elles sont les plus hydrophiles. La section 1.6 sera donc dédiée à la caractérisation de ces matériaux.
1.6 Élimination de l’eau à hautes températures
Beaucoup d’études ont été faites sur les zéolithes surtout pour la déshydratation des alcools mais la température d’étude pour ces systèmes ne dépasse pas 100 °C.[36; 40; 45; 48-50] Peu
d’étude se sont intéressées à l’utilisation des zéolithes pour l’élimination de l’eau à des températures plus hautes, mais ne dépassant pas 200 °C. Ces études sont axées sur la séparation membranaire des gaz et le tamisage moléculaire et ne sont pas orientées vers des études d'adsorption.[38; 40; 51-53] En ce qui concerne la séparation in-situ de l’eau à hautes
températures par le procédé SERP, uniquement des études de simulation et de modélisation ont été réalisées.[11; 18]
1.7 Adsorption sélective de l’eau sur les zéolithes
Grâce à leur propriété de tamis moléculaire, les zéolithes ont été largement étudiées pour l’adsorption sélective des molécules dans un but de séparation, purification ou déshydratation des mélanges. La fonction demandée dépend de la nature de la zéolithe et certaines s’avèrent plus efficaces dans un domaine que dans l’autre. Dans ce qui suit, le focus sera fait sur l’utilisation des zéolithes pour la séparation sélective des mélanges eau/CO2 et eau/alcool (surtout l’éthanol et le méthanol) car ce sont les composés les plus
1.7.1 La sélectivité de l’eau par rapport au CO2
Beaucoup de recherches ont été faites pour étudier l’adsorption du CO2 par les zéolithes.
Jadhav et al.[54] ont étudié la capacité de la zéolithe 13X pour l’adsorption du CO
2 à partir
d’un flux CO2/He (15%) à 52 ml/min. Ils ont constaté que la capacité diminuait
considérablement avec la température. À 30 °C, la capacité est de 0,05 g/g alors qu’elle est cinq fois plus inférieure à 120 °C soit 0,01g/g.
L’effet de la présence de l’eau sur la capacité d’adsorption du CO2 est un autre paramètre
largement étudié. Jaramillo et Chandross[55]ont calculé les isothermes d’adsorption de l’eau
et du CO2 sur la zéolithe 4A en utilisant deux modèles différents. Ils ont constaté que l’eau
saturait la zéolithe 4A même à des pressions partielles d’eau aussi faibles que 0,01 kPa pour la plage de température de 25-50 °C. Selon les isothermes obtenus, l’adsorption de l’eau est 5 fois plus importante par rapport au CO2.[55]
Joos et al.[56] ont fait une étude de simulation moléculaire pour étudier le mécanisme
d’adsorption du mélange eau/CO2 (1% eau, 99% CO2)sur la zéolithe 13X à 25 et 100 °C à
100 kPa. Ils ont conclu que l’eau a une interaction beaucoup plus forte avec la zéolithe 13X que le CO2. L’adsorption de l’eau est plus facile car les enthalpies de désorption sont
significativement plus élevées et les molécules d'eau ont une grande interaction avec les cations de sodium de la zéolithe 13X (NaX). Donc lorsqu'un mélange eau/CO2 s’adsorbe,
l’eau s’adsorbe préférentiellement et ce qui réduit considérablement les sites d'adsorption disponibles pour le CO2.
Wang et LeVan [45; 50] ont étudié l’adsorption de l’eau et du CO
2 (purs et en mélange) sur
les zéolithes 13X et 5A. L’adsorption de chaque composé pur a été étudiée sur une plage de température de -45 à 175 °C pour le CO2 et de 0 à100 °C pour l’eau. L’adsorption de leur
mélange binaire a été étudiée à 0, 25 et 50 °C. Leurs résultats montrent que pour l'adsorption du CO2, les zéolithes 5A et 13X ont des capacités similaires. À 175 °C et à 100
kPa, les capacités d’adsorption du CO2 sont de 0,039 et 0,035 g/g pour les zéolithes 5A et
13X respectivement. À basse température, soit 25 °C, elles sont de 0,22 et 0,21 g/g pour la zéolithe 5A et 13X respectivement. Cependant, pour la vapeur d'eau, la zéolithe 13X a une capacité légèrement supérieure à celle de la zéolithe 5A. À 100 °C et à 2 kPa, les capacités
d’adsorption de l’eau sont de 0,126 et 0,144 g/g pour les zéolithes 5A et 13X respectivement. À 25 °C, elles sont de 0,24 et 0,27 g/g pour la zéolithe 5A et 13X respectivement. Les deux zéolithes possèdent de très bonnes capacités d'adsorption pour la vapeur d'eau à de faibles pressions partielles. À 0,01 kPa et 25 °C, les capacités d’adsorption de l’eau sont de 0,108 et 0,144 g/g pour la zéolithe 5A et 13X respectivement. Pour le mélange binaire, les capacités d’adsorption du CO2 obtenues pour la 13X sont
moins élevées que pour le CO2 pur (Figure 1.6). Ces capacités diminuent encore plus avec
l'augmentation de la quantité d'eau. Lorsque la quantité d’eau préalablement adsorbée est de 0,018 g/g, les capacités diminuent de plus de 30% par rapport à l'adsorption du CO2 pur.
Avec des quantités d’eau préalablement adsorbées augmentant à 0,061 et 0,17 g/g, les capacités baissent, respectivement, de plus de 50% et 80%. Ce même comportement a été observé pour la zéolithe 5A : lorsque la quantité d’eau adsorbée est de 0,061 g/g et à température ambiante, l'adsorption du CO2 diminue de plus de 50% par rapport à
l’adsorption du CO2 pur.
Figure 1.6. Isothermes d’adsorption du CO2 sur la zéolithe 13X à 0 °C (ο CO2 pure,
Montanari et al.[57] ont étudié l’efficacité des zéolithes 13X et 4A pour la séparation CO 2
-CH4 du biogaz sec et humide à température ambiante. Les résultats ont montré que la
zéolithe 13X a une importante capacité d'adsorption du CO2 à partir du biogaz sec (0,15
g/g), qui augmente à 0,22 g/g en présence d'humidité. Ce comportement a été expliqué par les auteurs par la formation d’ions bicarbonates qui interagissent avec l’eau adsorbée. Ils ont aussi trouvé que la capacité d'adsorption du CO2 seul de la zéolithe 4A (0,04 g/g) est
moins importante que la zéolithe 13X (0,15 g/g) mais qu’elle n’est pas vraiment affectée par la présence de l’eau. Ces résultats sont en contraste avec la plupart des résultats dans la littérature.
Ces mêmes résultats ont été rapportés par Bertsch et Habgood[58] qui ont étudié le
mécanisme d'adsorption du CO2 sur les zéolithes et qui ont trouvé qu’il implique à la fois la
physisorption et la chimisorption. La physisorption est favorisée à hautes pressions du CO2
alors que la chimisorption conduit à la formation des carbonates en présence de l’eau. Ils ont démontré que la présence de quantités approximativement équivalentes d'eau et de CO2
augmente considérablement le taux de chimisorption du CO2 mais à de faibles pressions
CO2.
Rege et Yang[59] ont aussi étudié la coadsorption de l’eau et du CO
2 sur la zéolithe 13X à
température ambiante. Les résultats ont révélé qu'il y a eu une augmentation de la capacité d’adsorption du CO2 en présence de l’eau seulement à des faibles concentrations de CO2
(inférieures à 300 mg/L). Cette augmentation diminue progressivement puis disparait à des concentrations de CO2 plus élevées (supérieures à 1000 mg/L). Ceci a été expliqué par une
formation de bicarbonates ou par une amélioration de la diffusion du CO2 due à
l'occupation des sites à haute énergie par des molécules d'eau. Il est à noter que la présence de l’eau augmente la capacité d’adsorption du CO2 à des quantités de CO2 adsorbées
1.7.2 La sélectivité de l’eau par rapport aux alcools
Joong et al[60] ont étudié l’adsorption des composés organiques volatils (COV) dont des
alcools sur les zéolithes Mordenite et Faujasite X et Y à 25 °C et à pression atmosphérique. La Figure 1.7 montre la capacité d’adsorption des différentes zéolithes étudiées. Ils ont démontré que la capacité d’adsorption des COV ne dépend ni de l’acidité ni de la surface spécifique des zéolithes mais de la taille des canaux. Les zéolithes Faujasite sont formées par des anneaux à 12 atomes avec un diamètre libre de 7,4 X 7,4 nm. Les zéolithes Mordenite sont formées par deux types de canaux : des anneaux à 12 atomes avec une coupe transversale elliptique de 6,5 X 7 nm et des anneaux à 8 atomes avec une structure sinusoïdale complexe avec une coupe transversale elliptique de 2,6 X 5,7 nm et de 3,7 X 4,8 nm. Les zéolithes de type Faujasite ont donc une meilleure capacité d’adsorption que les zéolithes de type Mordenite grâce à leur taille des canaux qui est plus grande.
Figure 1.7. Capacité d’adsorption des COV sur les zéolithes de type Faujasite et
Cheng et al[61] ont étudié l’adsorption de trois alcools à savoir le méthanol, l’éthanol et
l’isopropanol par la zéolithe 13X à différents débits et concentrations. Ils ont trouvé que la capacité d’adsorption des trois alcools est bonne (méthanol : 0,13 à 0,14 g/g, éthanol 0,13 à 0,14 g/g et isopropanol 0,13-0,15 g/g). Ils ont aussi signalé qu’il est très important d’étudier l’effet de la présence de l’eau, qui peut affecter la capacité d’adsorption des alcools.
L’adsorption du méthanol a été étudiée sur la zéolithe 13X à 23 °C pour déterminer l’influence de l’humidité sur sa capacité d’adsorption.[62] Les résultats montrent que la
capacité d’adsorption du méthanol diminue considérablement en présence de l’eau de 0,05 g/g à 0,03 g/g. Ce comportement est dû à l’occupation des sites actifs par l’eau. La capacité d’adsorption de l’eau est de 0,03 g/g.
Pahl et al.[63] ont étudié la capacité d'adsorption de l'eau des zéolithes 3A et 4A à partir des
mélanges eau-alcool (méthanol, éthanol, 1-butanol, 1-pentanol et 1-hexanol) à 20 °C et il l’ont comparé à la capacité d’adsorption de l’eau pure. Pour les mélanges de l’eau avec les alcools à faible diamètre moléculaire (méthanol (0,408 nm) et éthanol (0,469 nm)), la capacité d’adsorption de l’eau par la zéolithe 4A a diminué. La capacité d’adsorption de l’eau pure est de 0,20 g/g alors qu’elle est de 0,13 g/g en présence d’éthanol et de 0,06 g/g en présence de méthanol. Pour la zéolithe 3A, le même comportement est observé. La capacité d’adsorption de l’eau pure est de 0,17 g/g alors qu’elle est de 0,07 g/g en présence d’éthanol et de 0,02 g/g en présence de méthanol. La diminution de capacité d’adsorption de l’eau en présence des alcools à faible diamètre moléculaire montre qu’il y’a une coadsorption de ces derniers sur les zéolithes 3A et 4A. Il est aussi à noter que la zéolithe 4A a une plus grande capacité d’adsorption de l’eau que la zéolithe 3A. Pour les mélanges de l’eau avec les alcools à diamètre moléculaire élevé (1-butanol (0,558 nm), 1-pentanol (0,594 nm) et 1-hexanol (0,628 nm), la capacité d’adsorption de l’eau par la zéolithe 4A a légèrement diminué. La capacité d’adsorption de l’eau pure est de 0,20 g/g alors qu’elle est de 0,16 g/g en présence de butanol, de 0,16 en présence de pentanol et de 0,15 g/g en présence d’hexanol. Par contre, pour la zéolithe 3A, les capacités n’ont presque pas changé. La capacité d’adsorption de l’eau pure est de 0,17 g/g alors qu’elle est de 0,16 g/g en présence de butanol, de 0,16 en présence de pentanol et de 0,15 g/g en présence d’hexanol. Ils ont conclu que la coadsorption des alcools à diamètre moléculaire élevé est plus
importante sur la zéolithe 4A que 3A. Ceci est dû au fait que la zéolithe 4A à une taille de pores plus élevé : 0,38 contre 0,32 nm pour la 3A.
À plus hautes températures, Simo et al.[40] ont étudié l’adsorption de l’eau et de l’éthanol
par la zéolithe 3A pour l’application au procédé PSA. Les résultats ont montré que la zéolithe 3A absorbait une quantité importante d'eau de 0,108 g/g et une très faible quantité d'éthanol de 0,0013 g/g à 167 °C et à une pression de 448 kPa. Le facteur de sélectivité pour le procédé PSA pour l’eau et l’éthanol a été évalué à 900.
1.8 Conclusion
La valorisation du CO2 par sa conversion en produits à haute valeur ajoutée représente une
bonne alternative à la séquestration. La conversion se fait à travers plusieurs procédés mais l’hydrogénation catalytique du CO2 en produits oxygénés comme le méthanol, l’éthanol et
le DME et en hydrocarbures demeure le champ d’études le plus important. L’hydrogénation catalytique du CO2 est limitée par la grande quantité d’eau produite en sous-produit ce qui
limite la conversion du CO2 et bloque les sites actifs du catalyseur. Selon le principe de Le
Chatelier, l’élimination de l’eau in-situ permet le déplacement des réactions vers le sens qui
augmente la conversion du CO2, le rendement et la sélectivité. L’intensification des
procédés par adsorption (SERP) permet de combiner le système réactionnel avec l’élimination sélective de l’eau. La synthèse des produits d’intérêt (méthanol, éthanol, DME...) se produit généralement à une température aux alentours de 250 °C. Le choix de l’adsorbant repose essentiellement sur la capacité d’adsorption de l’eau à cette température. Plusieurs matériaux possèdent une grande capacité d’adsorption de l’eau. Toutefois, cette capacité diminue considérablement avec l’augmentation de la température et la plupart des matériaux sont instables à hautes températures ce qui limite leur utilisation aux conditions souhaitées dans ce projet. Les zéolithes sont les seuls matériaux qui peuvent être utilisés à des températures supérieures à 200 °C. Les zéolithes avec un faible ratio Si/Al sont les plus hydrophiles. Parmi elles, les zéolithes LTA (3A, 4A et 5A) et FAU (13X) sont les plus utilisées pour adsorber l’eau. La zéolithe SOD constitue un adsorbant à explorer qui peut être prometteur grâce à sa petite taille des pores (0,27 nm) qui peut contribuer à une bonne sélectivité. La comparaison des études faites sur la sélectivité laisse à penser que la
d’études utilisant les zéolithes sont faites à hautes températures. Ces études ne sont pas orientées vers des études d'adsorption.
1.9 Objectifs
Dans ce contexte, l’objectif principal de ce projet consiste en l’étude et la caractérisation des matériaux hydrophiles pour l’adsorption préférentielle de l’eau à hautes températures. Plus spécifiquement, ce travail concerne l’évaluation de l’efficacité des zéolithes LTA (3A, 4A et 5A), FAU (13X) et SOD pour la séparation in-situ de l’eau dans le procédé SERP. À notre connaissance, cela n’a jamais fait l’objet des travaux dans la littérature ouverte.
Objectifs spécifiques :
a) Étude de l’efficacité des zéolithes pour l’adsorption de l’eau à hautes températures;
b) Étude de l’effet de la granulométrie des adsorbants sur la capacité d’adsorption; c) Étude de l’effet la pression partielle de l’eau;
d) Étude des isothermes d’adsorption;
e) La modélisation de la capacité et de la cinétique de l’adsorption; f) Tests d’application dans les conditions du procédé SERP.
2 Chapitre 2 : Méthodologie
2.1 Appareil pour l’étude d’adsorption
L’étude de l’adsorption consiste à mettre l’adsorbant en contact avec un flux saturé d’eau pour évaluer sa variation de masse au cours du temps et déterminer sa capacité d’adsorption à l’équilibre. Ces expériences ont été réalisées en utilisant l'analyseur gravimétrique intelligent (IGA, Intelligent Gravimetric Analyser, Hiden Isochema, Royaume-Uni) muni d’une microbalance très sensible avec une résolution de 0,1 μg et une stabilité à long terme de ± 1 μg. Il permet l'acquisition de données de tous les états transitoires et à l’équilibre pendant les expériences d'adsorption afin de déterminer, respectivement, la cinétique et la capacité d'adsorption (points isotherme) d'un échantillon donné. Le dispositif comprend un système de contrôle de débit utilisé pour régler la pression et la composition du débit d'entrée qui peut être composé à la fois de vapeurs et de gaz. Des échantillons sont chargés sur la microbalance dont la température est contrôlée soit avec une enveloppe d'eau (0-80 °C) soit avec un four (80-1000 °C) avec une précision de 0,2 °C. Les connexions entre le générateur de vapeur et la microbalance contenant l'échantillon sont chauffées à 50 °C pour éviter la condensation.
P P 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Figure 2.1. Schéma de l’appareil (IGA). 1- Cylindres de gaz 2- Générateurs de vapeurs 3- Contrôleur de flux 4- Microbalance 5- Réacteur 6- Contrepoids 7- Échantillon 8- Contrôleur de température 9- Ordinateur
2.2 Adsorbants
Différentes zéolithes hydrophiles ont été testées en tant qu'adsorbants potentiels pour l’eau à hautes températures. Les zéolithes LTA- (3A, 4A et 5A) et FAU-13X en perles ont été fournies par Zeochem (Louisville, USA). La poudre de zéolithe LTA-4A et FAU-13X a été fournie par Advanced Specialty Gas Equipment (ASGE, Middlesex, USA).
L’hydroxysodalite (SOD) a été synthétisée directement à partir d'aluminate de sodium (NaAlO2, Anachemia, Montréal, Canada, CAS n°1302-42-7, qualité technique), de
métasilicate de sodium nonahydraté (Na2SiO3·9H2O, Acros organics, NJ, USA, CAS
N°13517-24-3, 44-47,5% en poids de solides totaux) et d'hydroxyde de sodium (NaOH, VWR, Westchester, USA, CAS n ° 1310-37-2, qualité ACS). Ces réactifs ont été mélangés avec de l'eau distillée pour former une solution de précurseur ayant une composition molaire de 50Na2O: Al2O3: 5SiO2: 1005H2O selon le mode opératoire proposé par Lafleur
et al..[64] La poudre de SOD a été obtenue après la synthèse hydrothermale effectuée dans
des autoclaves en acier inoxydable avec inserts en Teflon à 140 °C (four Isotemp, Fisher Scientific) pendant 3h30. La poudre a été lavée avec de l'eau distillée jusqu'à pH neutre, puis séchée pendant une nuit à 90 °C.
Les caractéristiques de toutes les zéolithes utilisées sont présentées dans le Tableau 2.1.
Tableau 2.1. Caractéristiques des zéolithes Type de
zéolithe
Forme Taille des pores (Å)
Si/Al ratio Taille des particules Perles (mm) Poudre (µm) 3A K-LTA 3,2 1 1,5-2,5 - 4A Na-LTA 3,8 1 1,5-2,5 53-250 5A Ca-LTA 4,8 1 1,5-2,5 - 13X Na-FAU 7,4 1-1,5 1,5-2,5 53-250 SOD Na-SOD 2,7 1 - 53-250
2.3 Déroulement des expériences
Toutes les expériences d'adsorption ont été réalisées selon la même procédure. Chaque échantillon d'environ 30 mg a été chargé sur la microbalance et régénéré à 300 °C sous un débit d'azote de 100 ml/min (Praxair Canada, 99,998%) jusqu'à ce qu'aucune variation de masse ne soit enregistrée. La température de l'échantillon a ensuite été réduite à celle choisie, entre 25 et 250 °C, et lorsque la stabilité de la température a été obtenue, le flux d'azote a été envoyé au générateur de vapeur pour le saturer avant d'atteindre l'échantillon. La pression partielle d'eau souhaitée a été réglée en changeant la température du générateur de vapeur préchauffé dans la plage de 5-45 °C. La pression totale a toujours été fixée à 100 kPa et la variation de la masse a été enregistrée jusqu'à ce qu'un plateau soit atteint. Les données ont finalement été utilisées pour déterminer la cinétique du processus d'adsorption et obtenir les isothermes.
2.3.1 Étude de la capacité d’adsorption en fonction de la température et en fonction de la granulométrie
Le but de ces expériences est d’étudier la variation de la capacité d’adsorption des zéolithes LTA-(3A, 4A, 5A), FAU-13X et SOD sur une plage de température de 25 à 250 °C, pour analyser l’effet de la température, sous un flux de N2 saturé en eau à 20 °C et une pression
totale de 100 kPa. Dans une première série d’expériences, les zéolithes LTA-(3A, 4A, 5A) et FAU-13X ont été testées sous forme de perles pour démontrer l’effet de l’augmentation de la température. Par la suite, les zéolithes LTA-4A, FAU-13X et SOD ont aussi été étudiées sous forme de poudre pour analyser l’influence de la granulométrie sur la capacité d’adsorption. La pression partielle de l’eau a été maintenue à 2,33 kPa.
2.3.2 Étude de la capacité d’adsorption en fonction de la pression partielle de l’eau : isothermes d’adsorption
Pour l’étude de l’effet de la pression partielle, des expériences ont également été réalisées à des températures constantes et à différentes pressions partielles d'eau pour les zéolithes 13X et 4A. Dans le but de démontrer l’efficacité des zéolithes à hautes températures, quatre isothermes ont été étudiées à hautes températures à savoir 100, 150, 200 et 250 °C. La