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Précarité et maternité dans l’Espagne contemporaine

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Academic year: 2021

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UFR ALLSH

Département d’Anthropologie

Master 1 d’Anthropologie sociale et culturelle, Spécialité recherche, Parcours Santé

Précarité & Maternité

dans l’Espagne

contemporaine

Julia Fassini

Sous la direction de Sandrine Musso 2017-2018

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Remerciements

Je remercie chaleureusement ma directrice de recherche Sandrine Musso pour sa patience, son écoute et sa bienveillance.

À mes parents, je vous dois tout. Merci de m’avoir appris l’Amour inconditionnel, vous êtes mon préambule et mon éternel. Dans mes yeux vous brillerez toujours.

À mon frère Enzo, mon âme sœur.

Mes sœurs Jenna et Jessika, merci à vous et vos enfants de faire vivre notre famille dans la joie.

Mes oncles, mes tantes, mes cousins et ma grand-mère je vous remercie de m’avoir appris à tout partager, notre famille est ma plus grande fierté. Une pensée particulière va pour ma tante Patou, et mes cousines Vanessa et Mélodie.

Merci à ma cousine Julie pour son infinie patience dans les corrections de mes écrits.

Merci à Monsieur Dutron pour m’avoir fait faire connaissance avec moi-même, vos conseils restent ancrés en moi.

Je remercie ma famille de Madrid, Begoña, Estefan et leurs enfants pour m’avoir donné toute la chaleur du monde pendant ces quelques mois, j’espère pouvoir en faire autant un jour.

Merci à Hager, Marianne, Eleonora, Mélanie, Chainaise, Mérane, Camille, Andréa, Younes, Islam et Fatima pour m’avoir ouvert le champ des possibles.

À Toupie, merci d’exister.

À Zahra, tu es ma plus belle rencontre, merci de m’avoir donné des ailes.

À Ali, merci de partager ma vie et de m’apprendre un peu plus chaque jour les vertus de la communication.

C’est tout naturellement à mon Abuelo que je dédicace ce mémoire, merci de guider mes pas, ignorant les mondes et les années qui nous séparent, tous les chemins me mènent à toi.

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3 Sommaire p.3

Introduction p. 8

Précarité & Maternité dans l’Espagne contemporaine p. 11 I- Le contexte espagnol

1. L’Espagne : pays en pleine mutation

A. Un puzzle d’identités sociales

Les conséquences de la guerre civile sur les revendications régionales L’exemple du pays Basque et de la Catalogne

B. Une société affectée par la crise La crise en Espagne

« Los indignados » La fin du bipartisme

Les conséquences de la crise sur les jeunes

2. L’Héritage chrétien dans les représentations de genre

A. La place des femmes dans la Bible La femme porte de l’enfer Une propriété privée Le sexe

La punition B. Violences de genres

Protection et droit d’assistance aux victimes Le rôle des médias

Conséquences de la violence de genre sur les fils et filles exposées C. Le droit des femmes à disposer de leur corps, un exemple : l’avortement

Un droit constamment menacé

L’interruption volontaire de grossesse aujourd’hui

3. L’Encadrement de la grossesse en Occident

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4 Sexualité et capitalisme

La sexualité féminine assujettie au contrôle scientifique B. Les femmes et la grossesse

L’éviction progressive des femmes du savoir médical

Les violences obstétriques : un exemple de violence de genre dans le système biomédical

II-Genre et Précarité

1. Précarité : cadre théorique

A. La précarité, conséquence d’une dégradation des conditions de travail

Les conséquences de la révolution industrielle sur la perception de l’humain Précarité et identité sociale

B. La précarité économique : fruit d’une série de rupture sociale, affective ou spatiale Le capital social

La vulnérabilité relationnelle

2. Maternité et condition sociale

A. Parentalité et Education

L’expérience de la parentalité La pratique de la parentalité B. Les mères célibataires

Histoire des mères célibataires

La Maternité un facteur accentuant la précarité

Le risque moindre pour les femmes de se trouver sans abri

3. L’Histoire coloniale et son influence dans le contexte migratoire

A. Femmes en migration

Les rapports de genre dans la migration Une stigmatisation liée à un passé colonial Quelques effets de la migration sur les migrantes B. Une inter-influence entre migration et précarité

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5 Une orientation vers le Care

L’exclusion des travailleuses migrantes des politiques du Care III-La vie en centre d’hébergement social

1. Une vie sociale complexe

A. Les rapports familiaux Les parents proches La relation aux enfants La place des hommes

B. L’Espace, la notion du privé et du publique L’intimité

Les rapports entre mères C. L’éducation comme bien social

Une valorisation du rôle de mère Education et migration

2. Les professionnels sociaux : des acteurs clés dans la vie en centre d’hébergement social

A. Un cadre normatif exigeant

Le rythme au sein des centres Les normes pratiques

B. Des relations dissymétriques L’échange

La décentralisation et ses conséquences sur le social

3. Un objectif unique : L’émancipation par le travail

A. « L’intégration » des femmes au travail

Typologie de l’intégration professionnelle L’emploi au féminin

B. L’insertion professionnelle

La formation des professionnels sociaux Les formations proposées aux usagères Conclusion

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6 Bibliographie

En moins d’un demi-siècle, l’Espagne a connu de profonds changements, non seulement politiques mais aussi sociaux et économiques.

Depuis la fin de la dictature franquiste de nombreuses mutations politiques ont eu lieu, depuis la transition démocratique en passant par la monarchie, mais également l’entrée dans l’union Européenne en 1986 pour qui la fin du Bipartisme sur la scène politique espagnole a sonné un nouveau rebondissement.

Au niveau social la transition démocratique n’est pas restée sans conséquences.

Les revendications régionales étouffées pendant plus de 40 ans renaissent de leurs cendres et réclament plus d’autonomie, les mutations relatives au bouleversement de l’emploi tel que le déversement du secteur primaire vers le secondaire et du secondaire vers le tertiaire ont entrainé un exode rural sans précédent.

Ces ruptures spatiales ont elles aussi contribué aux profondes transformations de la famille. Après le départ de Franco et la diminution de la prégnance catholique dans les meurs on observe une redistribution des rôles masculin et féminin, notamment au niveau législatif, puisque à la notion de puissance paternelle on voit se substituer le principe de coparentalité (Brunetti-Pons ;2004).

La loi légalisant l’avortement dès 1985 témoigne d’un changement spectaculaire dans des mœurs profondément marquées par le Catholicisme.

Le gouvernement de Zapatero est porteur de nouvelles mesures, plus particulièrement avec les réformes législatives de 2005 qui tendent vers la flexibilité d’une construction familiale, particulièrement en légalisant le mariage homosexuel ou le divorce express.

L’Espagne surprend et étonne, c’est un pays paradoxal ou malgré la séparation de l’Eglise et de l’Etat depuis 1979 le pouvoir religieux reste omniprésent sur la scène politique, il participe activement aux débats sociaux actuels (comme l’avortement), et son enseignement reste obligatoire dans les programmes scolaires. Loin du principe de laïcité franco-français, les discours religieux tendent à se diffuser et se redessinent dans les domaines sociaux ou médicaux. Le corps des femmes et leur droit d’en disposer ne sont jamais vraiment acquis et ils restent toujours au centre des discours et des débats politiques.

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Nous connaissons tous les conséquences dramatiques de la crise en Europe, et plus particulièrement dans la Péninsule Ibérique où elle a largement contribué à une paupérisation de la société.

Il importe ici de différencier et de préciser les termes de pauvreté et de précarité. La pauvreté serait définie en rapport au bien-être économique, elle peut être traditionnelle, marginale ou disqualifiante (Paugman 2005). Les économistes ont tenté de quantifier la pauvreté, ils ont perçu le revenu, la consommation et la qualité de vie comme indicateurs privilégiés permettant de la rendre mesurable, ces indicateurs fonctionneraient toujours en résonnance avec les autres membres de la société (Wagle 2002). La précarité est ici perçue comme une fragilisation des liens sociaux, plus particulièrement des cadres intégrateurs, séparant l’individu d’un système d’interdépendance favorisant la solidarité. La précarité caractérise une incertitude vis-à-vis du futur, plus particulièrement dans le cadre professionnel.

Le genre a été défini comme la construction d’un rôle social autour d’une différenciation sexuelle. Pour Ann Oakley initiatrice de cette notion en 1972, les différences entre les sexes ne sont non pas innées, mais dues à un apprentissage social.

Elle perçoit l’assignation de la femme à la maternité et aux tâches domestiques, l’excluant de la vie professionnelle et politique, comme une croyance qui ne s’appuie nullement sur la biologie.

La parentalité a été un débat central autour de cette théorie.

Le rôle masculin contraignant l’homme à assurer le revenu du ménage et la femme à créer les conditions psychologiques au bon vivre dans la maisonnée, ont vu des transformations législatives modifier ces dynamiques, notamment en substituant la notion de « puissance paternelle » à celle de « coparentalité ».

Aujourd’hui c’est la question des familles monoparentales qui se pose, avec pour une immense majorité de « chefs de famille » des femmes.

Lorsque ces femmes se trouvent déjà en situation de précarité le fait d’avoir des enfants a un effet multiplicateur sur les discriminations dont elles sont déjà victimes. Dans des situations telles, le recours au social est parfois inévitable pour ces familles monoparentales.

Dans ce cadre d’analyse nous nous demanderons dans quelle mesure, Le traitement social et médical de femmes en situation de précarité met en lumière sa place dans l’Espagne contemporaine.

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L’analyse du contexte espagnol, au niveau politique, social et religieux nous permettra de construire une grille de lecture, permettant d’appréhender les questions de genre et de précarité autour de la maternité et la migration, puis nous prendrons l’analyse des CHRS de Paris comme cadre référentiel permettant d’approcher la question sociale en France, non seulement dans son traitement politique, mais aussi dans le type d’aide qu’elle propose aux usagers.

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I- Le contexte espagnol

Après la guerre civile qui opposa le camp des nationalistes et des républicains de 1936 à 1939, une dictature s’établie avec un régime Franquiste, celui de Franco. L’objectif est une uniformisation de l’Espagne, un effacement des spécificités régionales, une valorisation de la religion catholique, un despotisme visant à abattre toutes catégories de population qui ne correspondent pas à un modèle prédéfini (comme les homosexuels, les communistes, les étrangers...) et le pays vit petit à petit en autarcie. Cette dictature a duré plus de 36 ans et le travail de deuil et de mémoire autour de cette période n’a pas été totalement fait.

Pourtant les conséquences de cette époque sur la société espagnole actuelle sont très nettement observables. Les revendications régionales, la relation à l’église, l’omniprésence des partis de gauche instrumentalisant un discours articulant droite et franquisme en témoignent. C’est à la lumière de cette histoire qu’il devient pertinent d’analyser les revendications régionales, l’impact de la crise boursière, et la place des jeunes dans cette société.

1. L’Espagne : un Pays en pleine mutation

A. Un puzzle d’identités régionales

Les conséquences de la guerre civile sur les revendications régionales

Profondément marqué par la guerre civile le travail de mémoire en cours est au centre des débats politique et sociaux.

En effet la centralisation, visant à une uniformisation à l’extrême, tentée par Franco il y a trente ans connait aujourd’hui un effet boomerang : l’Espagne est à présent l’Etat le plus décentralisé d’Europe, sur le plan administratif comme sur le plan culturel.

L’exemple du pays Basque et de la Catalogne

En 1977 le président du Conseil Adolfo Suarez reconnait aux autorités catalanes, et au président de la Généralité de Catalogne leurs statuts.

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Certaines régions comme la Catalogne, le Pays Basque et la Galice sont appelée « régions autonomes historiques », les différenciant des régions dissemblables dénommées « communautés autonomes » désignant ainsi leurs spécificités territoriales et culturelles. Ce mouvement de décentralisation s’est montré tout à fait bénéfique en termes de politique publique, pourtant il n’a pas réussi à étouffer les mouvements nationalistes.

Bien au contraire ces mouvements ont connu un renforcement de leur notoriété, donnant naissance à une multitude de débats et à une émergence de nouveaux partis.

A l’échelle nationale ces « petits partis » ont eu une influence conséquente puisqu’ils participent activement à la construction de majorités parlementaires.

En 2003 les dynamiques politiques traditionnelles et le bipartisme ont été bouleversés par le mouvement indépendantiste Catalan Esquerra Republicana de Catalunya (ERC).

Le monopole du pouvoir nationaliste aux élections régionales prendra donc fin pour laisser sa place à une coalition entre le parti socialiste catalan ERC, le parti écologiste et le parti communiste (Pellistrandi,2006)

Concernant le pays Basque, depuis 1980, la région est gouvernée par le Parti Nationaliste Basque (PNV) d’abord en coalition avec les socialistes puis seul.

Le chef du gouvernement basque a proposé un projet de nouveau statut d’autonomie incluant la possibilité d’un vote d’autodétermination. Lequel a été rejeté en utilisant la Constitution de 1978, explicitant le fait que « la souveraineté réside dans tout le peuple espagnol et ne peut être divisé en sous-souverainetés nationales ».

La récente annonce d’un cessez-le-feu de l’ETA se fait miroir des mutations sociales ayant eu lieu dans la région depuis les années 1980, et annonce de nouveaux défis pour l’exercice politique au Pays Basque. Les débats politique se sont déplacées vers une reconquête idéologique de l’importance du politique sur la scène sociale, mais surtout une alternative à une société en grande difficultés face à la crise

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11 En 1998, malgré une économie instable, l’Espagne est qualifiée pour faire partie de l’Eurogroupe. Progressivement elle rééquilibre ses comptes publics, fait reculer le chômage jusqu’à 11,5% et réduit la dette publique à 40% du PIB.

La crise de la zone euro a particulièrement affecté l’Espagne, en effet entre 2007 et 2010, trois millions d’espagnols perdent leur emploi, le PIB connait un déficit de 9%, les taux d’emprunt sont extrêmement haut car une prime de risque relativement élevée est imposée.

Cette crise économique a entrainé une crise politique sans précédent, en effet Pedro Solbes, membre du Parti Socialiste Ouvrier Espagnol, été partisan d’un plan de rigueur dès le début de la crise, auquel Zapatero (Parti socialiste espagnol) s’est fermement opposé, ce qui a provoqué la démission du deuxième vice-président du gouvernement.

Une des premières réponses à la « décroissance » fut celle de créer une allocation de 426 € mensuels pour les chômeurs en fin de droit pendant six mois.

Une partie importante de la population ayant connu une perte d’emploi relativement durable, la durée de l’allocation a été allongée à un an afin de subvenir aux besoins d’individus n’ayant plus aucun moyen de subsistance.

Après 2010 ces mesures « de gauche » ne portent pas leurs fruits et l’Europe entière se préoccupe pour la situation de l’économie espagnole.

Zapatero change alors de politique et déploie un vaste plan dit « de rigueur ». Il baisse le salaire des fonctionnaires, supprime l’aide aux chômeurs en fin de droits, réforme les retraites en 2011, il fait également privatiser la loterie nationale ainsi que plusieurs aéroports (dont celui de Madrid).

L’effondrement de la bulle immobilière a eu des conséquences sociales dramatiques sur la population et rend compte d’une économie principalement basée sur la construction et la consommation.

Los indignados

De nombreux mouvement sociaux cherchant à contester les expulsions massives des logements dont le crédit n’a pas été payé se sont mis en place.

La Puerta del Sol à Madrid est devenue le point d’ancrage de ces contestations, les manifestants appelés « los indignados » 1.

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12 Différentes actions spectaculaires ont été menées, comme l’occupation d’immeubles appartenant à des banques par des familles sans hébergement.

Ces actions ont donné une visibilité mondiale au mouvement, et une notoriété nationale au mouvement des « indignados ».

Après toutes ces actions menées, une illusion de retour au calme se ferait presque sentir dans la société espagnole, pourtant s’annonce une nouvelle tempête, politique cette fois.

La fin du bipartisme

Issu du mouvement « los indiganados », nait le groupe « Podemos » en 2014, il prône les mêmes changements qu’à la Puerta del Sol, mais utilise des outils politiques.

Pourtant le 20 décembre 2015 les deux premiers partis (PSOE2 et PP3) ne raflent que 50% des voies.

Podemos s’est en moins d’un an, imposé dans le paysage politique espagnol.

Le groupe Ciudadanos au centre libéral fait aussi son apparition sur la scène politique et cherche à modifier un système électoral qui privilégie les deux parties ayant la notoriété la plus marquée.

Le paysage politique espagnol se distingue relativement des autres pays de la coalition, en effet aucun mouvement anti-européen n’a été créé, la guerre civile ayant profondément marqué les esprits, aucun parti xénophobe n’a vu le jour et ce malgré la crise ainsi qu’une augmentation du solde migratoire sans précédent.

Les conséquences de la crise sur les jeunes

Cette crise mondiale n’a pas été sans conséquence sur le quotidien des jeunes, en effet ils ont été les premiers touchés par la précarisation du marché du travail. Ils sont les premiers à occuper les 29% d’emplois à temps partiel, et 39% d’entre eux sont au chômage d’après le conseil espagnol de la jeunesse.

Enfin 55% d’entre eux occupent un emploi en dessous de leur qualification et la fuite des cerveaux devient un phénomène de société. Ils voient donc leur processus d’émancipation retardé, développent des stratégies de survies marquant une rupture avec les générations précédentes et font preuve d’une capacité d’adaptation plus accrue (Pellistrandi, 2012).

2 Parti Socialiste Ouvrier Espagnol 3 Parti Populaire

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Ils développent diverses stratégies pour survivre, comme l’acceptation d’emplois même précaire, et une émancipation plus tardive (la moyenne d’âge actuelle étant de 28,1 ans). Ces diverses mutations rendent compte d’une certaine cassure entre les générations, pourtant un fil conducteur se fait voir, emprunte à un héritage chrétien.

2. L’Héritage chrétien dans les représentations de genre

Dans les écrits chrétiens la misogynie est omniprésente, la violence faite aux femmes apparait comme naturelle, et dans le discours religieux prend corps une lutte tendant à effacer certaines attitudes féminines afin « d’éviter la provocation ».

Au fur et à mesure de ces lectures se forge l’idée que la femme est une « méritante » de cette violence, et que si elle va à l’encontre des prescriptions de l’Eglise ou de l’homme étant son responsable il va de soi qu’elle rencontrerait de multiples punitions telles que la violence ou le viol.

La religion n’est ici pas appréhendée comme responsable de la genèse de la violence de genre, mais plutôt comme un outil ayant permis d’enraciner et de diffuser un discours banalisant des rapports de domination en Occident.

A. La place des femmes dans la Bible

Depuis plus de 2000 ans, la Bible, rassemblant l’ancien et le nouveau testament, est LE livre qui a imprégné les mentalités d’hier et d’aujourd’hui.

En effet même si la société française se réclame laïque, il va de soi que c’est une société profondément marquée par le concept judéo-chrétien. En Espagne en revanche, l’idée de la laïcité est beaucoup moins ancrée, puisque religion et Etat forment un duo fusionnel.

Cet attachement pour la tradition chrétienne se note par exemple dans la transmission des connaissances religieuses, notamment par le biais de l’école. En effet en Espagne 47% des élèves fréquentes une école privée (essentiellement monopolisée par l’Eglise Catholique) et « Education religieuse » est une matière obligatoire dans les collèges publics.

Le programme de cette matière est essentiellement composé d’enseignement portant sur la religion chrétienne (lectures de la Bible, analyse de certains passages…).

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Cette transmission d’une culture religieuse via l’éducation n’est pas sans influence sur les jeunes puisque 65% se déclarent chrétiens (et 20% pratiquants) (Lucas Beltràn). Il apparait alors particulièrement pertinent d’analyser la place de la femme à travers certains passages de la Bible afin de pouvoir analyser l’éventuel impact que cela pourrait avoir sur la perception des genres.

Tout d’abord nous étudierons les conséquences de la genèse sur le reste de l’histoire biblique, puis nous analyserons comment le système punitif appréhende les rôles de genre.

La femme porte de l’enfer

La transgression de Eve dans la genèse fait partie de la tradition de l’infériorité féminine et du mérite de la punition, très explicite quand Salmon dit « fille de Babel dévastatrice, heureux celui qui te rend le mal que tu nous as fait, heureux soit celui qui t’empoigne et te cogne contre la roche ».

Les pères de l’Eglise ont rapidement présenté la femme comme instrument du pouvoir diabolique comme l’illustre Tertulien qui écrit dans les années 200 : « …la sentence de Dieu sur votre texte persiste dans cette époque, la faute, par nécessité persiste aussi. Vous êtes la porte de l’enfer. Tu es celle qui a commencé le fruit défendu, celle qui a déserté la loi divine ». Genèse 19.

Une propriété privée

Dans la Bible la transgression sexuelle est perçue comme la violation de l’homme à qui appartient la femme.

Dans l’Exode 20 « tu ne désireras pas la femme de ton prochain » renforce l’idée qu’il n’est pas possible de désirer la femme en possession d’un autre homme. L’institution du lévirat qui obligeait à la veuve à se marier avec le frère du défunt époux reflète cette idée de propriété des femmes aux hommes. La lapidation d’un homme s’appliquait dans le cas où ce dernier aurait violé la femme d’un autre homme.

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Le chapitre 19 du livre des juges présente l’histoire d’un lévite qui choisit une concubine de Bethlehem de Juda. Elle lui a été infidèle et s’en va chez son père où le lévite viendra la chercher quelques mois après.

Après avoir passé plusieurs jours chez son beau-père le lévite décide d’entreprendre un voyage de retour à la maison en ramenant sa femme. Il devait passer une nuit dans la ville de Guibea (Tribu de Benjamin), un homme les invite à manger en sa maison et :

« …ils passaient un moment agréable quand les hommes de la ville, des gens pervertis, entouraient la maison et commencèrent à frapper à la porte en disant à l’ancien propriétaire de la maison « emmène dehors l’homme que tu as fait rentrer dans ta maison pour qu’on ait des relations avec. » mais l’ancien propriétaire leur répondit : « non mes frères ne soyez pas si pervertis, parce que cet homme est mon invité, ne commettez pas cette infamie ! J’ai une fille, elle est vierge, on l’emmènera dehors pour que vous puissiez abuser d’elle et la traiter comme bon vous semble. Mais ne commettez pas cette infamie avec cet homme. »

Le lévite pris sa concubine et l’a emmenée dehors, les hommes ont profité d’elle et l’ont maltraitée toute la nuit jusqu’au lever du soleil, et le lendemain matin ils l’ont abandonnée. Au petit matin la femme est arrivée à la maison et tombe à l’entrée de la maison où était son mari. La femme était morte.

« Quand l’homme rentra dans son village, il prit un couteau et coupa en douze morceaux le corps de sa concubine ; après il les envoya dans tout le territoire d’Israël. »

Beaucoup d’autres textes bibliques justifient les violences faites aux femmes, comme ceux des prophètes Oseas, Jeremy et Ézéquiel, qui banalisent la violation et la mutilation et la chargent d’érotisme (selon eux, après la violence renaitrait la passion amoureuse et sexuelle).

Le système punitif

La lapidation de la femme connait une justification différente qui expose le raisonnement suivant « si un homme prend une femme, arrive à elle et l’accuse ensuite d’actes honteux et la diffame publiquement en disant « J’ai pris cette femme mais je me suis rendu compte qu’elle n’était pas vierge » alors le père et la mère de la jeune femme prendront les preuves de virginité (les draps). En revanche s’il n’y a pas de preuves et que la jeune femme n’était pas vierge, alors ils l’emmèneront à la porte de la maison de ses parents et les hommes de sa

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famille la lapideront jusqu’à ce qu’elle meure parce qu’elle a commis une infamie en Israël en se prostituant dans la maison de son père. » Deutéronome 22 :13-17

Les violences sexuelle,physique et émotionnelle sont tout à fait palpables dans ces différentes histoires et suscitent « peur, inquiétude, honte et culpabilité ».

Se dessine au fur et à mesure le portrait d’une femme à la fois coupable puisqu’elle fait de l’homme sa victime et à la fois inférieure car elle n’est que propriété de l’homme.

B. Violences de Genre

Le 8 mars 2018 près d’un million de personnes se sont rassemblées dans la ville de Madrid pour la journée de la femme. Cet engouement reflète le fruit d’une série de changements, et plus particulièrement de la démocratisation d’articles sociologiques et féministes dans des journaux à grande influence, par exemple, le quotidien « El País » publie un article au sujet d’interventions dans les établissements scolaire (et seulement publics) sur les notions de genre, des sexualités, et des violences de genre.

Les jeunes générations sont donc particulièrement conscientisées et sont donc plus nombreuses à vouloir lutter pour une société moins discriminante.

C’est à travers la législation et les médias que ces mutations peuvent s’observer puis se reproduire.

Pourtant en 2017, 51 femmes sont mortes sous les coups de leurs maris en Espagne, 30% d’entre elles avaient entre 31 et 40 ans et 11% d’entre elles avaient une mesure de protection en vigueur.

Des disparités significatives se donnent à voir entre les régions, comme la Communidad Valenciana est la région observant le plus de décès due à la violence de genre puisque 15,7% des meurtres en Espagne ont lieu dans cette région. C’est un pourcentage semblable à celui de la Catalogne, alors que cette dernière connait une population 4 fois plus élevé.

Protection et droit d’assistance aux victimes

Par définition, lorsque nous abordons la nécessité de protéger une victime, nous partons du fait que cette personne a déjà souffert d’un ou plusieurs actes violents.

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De fait, la directive 2012/29/UE du parlement Européen et du conseil du 25 octobre 2012 par laquelle s’établissent les normes minimums sur les droits, élargie le concept de « victime » et considère également comme victime les différents parents de l’individu pour qui la mort a causé une souffrance morale.

Ce qui conjugue le fait de vivre avec la victime, d’entretenir avec elle une relation personnelle, intime et engagée, dans un lieu commun et de manière stable et continue ; incluant les parents directs, les frères et sœurs, et les personnes à charge de la victime (Art.2, a et B)

De plus l’Espagne connait depuis 2003 la « mesure de protection ».

La finalité est que lesdites victimes puissent obtenir un statut de protection intégrale. Cette dernière s’érige comme un titre habilitant pour que les victimes puissent accéder à d’autres ressources relatives au travail, à l’assistance ou au domaine social, en vue d’une reconstruction personnelle aux marges de la violence.

Le rôle des médias

L’Anthropologue espagnole Dolors Comas publie dans « Los medios de comunicación en la lucha contra la violencia de genero. Avances y retrocesos »4 une analyse de l’engagement que les medias ont eu dans le fait de représenter la violence comme un problème public et non comme un problème individuel.

Cela suppose un changement important dans la manière de retransmettre les informations et d’augmenter la conscience sociale sur ce problème. Les données empiriques qui servent pour cette analyse sont ceux du conseil audiovisuel de Catalogne

L’auteure montre comment les avancées obtenues sur le traitement de la violence de genre ne correspondent pas aux changements substantifs dans la politique de représentation des femmes dans le reste des informations où elles sont surreprésentées et associées à des rôles déterminés et des stéréotypes.

Conséquences de la violence de genre sur les fils et les filles exposées

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En Espagne, d’après une en enquête de 2011 chaque année 840.000 enfants vivent dans des lieux où les pères exercent des formes de violence sur la mère, ce qui représente 10% des enfants espagnols. Les fils et les filles qui vivent dans ces lieux souffrent tout autant des conséquences de cette violence. La continuité de cette dernière est un sentiment d’humiliation, de le rejet et de dénigrement.

Les investigations les plus récentes indiquent que pratiquement tous les jeunes immergés dans des relations de ce type souffrent d’une ou plusieurs de ces conséquences.

Ils seraient 40% à souffrir de violence physique directe comme conséquence des violences conjugales.

Les séquelles les plus significatives sont des troubles du comportement et des problèmes émotionnels, occasionnant des conduites intériorisées, comme par exemple des réactions dépressives, anxieuses mais également des conduites extériorisées, entre autres l’agressivité, la désobéissance et la violence.

C. Le droit des femmes à disposer de leur corps, un exemple : l’avortement

Un droit constamment menacé

En 2015 de nombreux débats autour de l’avortement ont vu le jour, notamment à cause du « Partido Popular » qui avait promis dans son programme électoral la réduction de l’accès à l’avortement seulement si la grossesse était susceptible de provoquer un danger vital.

À la suite de nombreux débats politiques, qui se sont aussi donnés à voir sur la scène sociale, le projet de réduction de l’accès à l’avortement n’a pas vu le jour, mais a connu quelques modifications.

Plus particulièrement pour les mineures qui requièrent le consentement des représentants légaux afin d’avorter.

Cela signifie qu’elles doivent se déplacer à la clinique accompagnée d’un des représentants légaux et doivent posséder l’accord écrit de l’autre s’ils sont deux.

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La loi actuelle sur l’avortement garanti l’interruption volontaire de grossesse dans le cas où elle est réalisée par un médecin ou spécialiste, dans un centre public ou privé mais au moins agrémenté.

Il existe un réseau de cliniques privées agrémentées qui sont en constante coordination avec les services publics qui garantissent une bonne prestation.

Jusqu’à 14 semaines de grossesse, toute femme majeure pourra choisir d’avorter par sa propre volonté, qu’elle qu’en soit la cause.

En cas de risque mettant en danger le processus vital du fœtus, la grossesse pourra être interrompue jusqu’à 22 semaines d’aménorrhées.

En 2010 quand la loi sur l’avortement a été approuvée, l’âge légal a été fixé à 16 ans.

L’avortement est donc pris en charge à 100% s’il se réalise dans un établissement public, il suit une procédure très stricte avec deux entretiens espacés de quelques jours qui seront suivis d’une prise médicamenteuse ou d’une opération chirurgicale. Il ne peut s’écouler plus de sept jours entre le premier entretien et l’acte d’avortement.

Pourtant aujourd’hui 60% des avortements se réalisent dans des établissements privés, ce qui suppose des frais supplémentaires.

Cela pourrait s’expliquer par le fait que ces derniers n’imposent pas les deux entretiens précédent l’intervention.

Les régions qui connaissent le taux d’avortement le plus élevé en comparaison aux femmes en âge de procréer sont la Catalogne et la région de Murcia.

Le domaine de la sexualité représente un enjeu considérable puisque ses normes permettront de modeler et fixer le cadre de la reproduction de toute une société.

3. L’encadrement de la grossesse en Occident

A. La perception de la sexualité

Après les Trente Glorieuses (1945-1973) la bonne santé économique de la France est un terrain fertile à la réflexion et voit naître de nombreux ouvrages qui ont profondément marqué des disciplines comme l’anthropologie ou la philosophie.

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Sexualité et Capitalisme

C’est dans ce contexte que Foucault écrit l’« Histoire de la sexualité I » en 1976.

Sa réflexion porte sur la répression croissante qu’il lie particulièrement à l’émergence du capitalisme.

Paradoxalement il observe une mise en discours du sexe, valorisant certains aspects au détriment d’autres mais toujours en corrélation avec des normes déterminées.

Cette norme déterminée serait à l’image de la sexualité de l’éléphant : monogame, pudique et rare. Les déviances aux règles régissant la sexualité ne pourraient relever que de la maladie mentale ou la condamnation judiciaire.

Il attribue au christianisme un double rôle, puisqu’à la fois il diffuse une éthique sexuelle basée sur le contrôle et la pudeur pour éviter excès et violence, mais il donne aussi un terrain d’expression verbal à la sexualité, notamment par le biais de la confession.

Ce terrain d’expression permet de lire les rapports de dominations, qui ne se pratiquent pas sur celui qui s’exprime, mais sur celui qui garde le silence (Foucault,2018)

Le parallèle entre sexualité et capitalisme est aussi fait par Silvia Federeci.

En effet elle explicite le rôle prépondérant des femmes dans le développement du capitalisme, ainsi la division sexuée du travail réduisant les femmes à leur fonction reproductive, comme reproduction de la force de travail, a pour conséquences la construction d’un nouvel ordre patriarcal, fondé sur l’exclusion des femmes du travail salarié les assujettissant au rôle de « chef de famille ».

L’outil principal du capitalisme est la mécanisation du corps prolétaire et sa transformation, pour le cas des femmes c’est en une machine de production de nouveaux travailleurs que leur corps se transforme. (Federeci,2004)

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Elle voit la grossesse comme capitale dans la reproduction de la société, où les hommes ayant pris conscience de l’importance des naissances tant que de l’éducation, ont cherché à se réapproprier ces outils capitaux, par le contrôle des grossesses et de l’instruction.

La sexualité, outil de reproduction de la société représente donc un enjeu majeur permettant de contrôler et de transformer la société et plus particulièrement les femmes.

À la fois tabou et très exposée la communication autour de cette dernière n’est pas sans signification quant aux rapports entre hommes, entre femmes et entre hommes et femmes.

La sexualité féminine assujettie au contrôle scientifique

Dans la « Matrice de la race » Elsa Dorlin démontre par le biais d’une étude historique comment la sexualité féminine a toujours été assujettie au contrôle scientifique, légitimé par l’alibi de la sécurité, que le corps scientifique et médical serait le seul à pouvoir assurer et préserver.

Le contrôle médical sur le corps des femmes ne date donc pas d’hier. La période de grossesse permet d’observer sa cristallisation .

Elle définit la « Matrice de la race » comme un mécanisme par lequel un « même ensemble de principes sous-jacents a présidé à l’émergence des catégories de sexe et de race ».

B. Les femmes et la grossesse

La grossesse et l’accouchement sont longtemps restés dans l’angle-mort des études féministes puisqu’elles étaient perçues comme un outil d’asservissement de la femme.

Aujourd’hui, ces thèmes sont au centre de débats contemporains (droit à l’avortement, méthodes de contraception, procréation médicalement assistée) et pointent du doigt le fait que les hommes se sont approprié le pouvoir décisionnel des femmes sur leur propre corps. L’interrogation et les hypothèses relatives à cette volonté de monopole sur la capacité de produire « le semblable et le différent » sont nombreuses mais toujours en lien avec des rapports de domination et de pouvoir.

La gynécologie, littéralement « l’étude de la femme », est basée sur le fonctionnement de l’appareil génital féminin issu de la médecine antique.

Cette dernière fut détachée en 1965 de l’obstétrique devenant une spécialité à part entière. Cette distinction n’est pas sans conséquence pour la discipline et pour les termes relevant de

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22 son champ lexical (gynécologues, sages-femmes…), dont les terminologies reflètent la valorisation de pratiques au détriment d’autres et les logiques de pouvoir qui lui sont associés.

L’éviction progressive des femmes du savoir médical

Au XIIème siècle on observe un échange entre savoir littéraire masculin et tradition empirique féminine, pourtant peu à peu les femmes se sont vues exclues des réseaux d’instructions au niveau global. (Green, 2008)

Auparavant appelé matrone, le rôle de la femme est ambivalent. En effet, il consiste à assurer la surveillance et l’encadrement de la fonction maternelle, et parallèlement -probablement en s’associant à une identité féminine commune- il participe à une transmission de moyens magico-contraceptifs pouvant parfois aller jusqu’à l’avortement.

La solidarité entre accoucheuse et accouchée laissait aux femmes le monopole de contrôle des naissances pouvant créer le semblable et le différent.

La volonté de l’Eglise était tout d’abord de contrôler les matrones. Associées à l’image de sorcières, en mettant en place une chasse aux sorcières, puis en renommant sages-femmes les femmes qui pratiquaient l’accouchement (il était capital d’être une femme « saine » pour donner la vie).

La non transmission du latin, langue de transmission du savoir scientifique par excellence, a eu une influence prépondérante sur la formation ou non des acteurs accompagnant l’accouchement. (Knibiehler,2003)

La médicalisation accrue n’a fait qu’accentuer ce processus d’appropriation de la reproduction humaine par les hommes. En effet, les sages-femmes elles-mêmes ont participé à la diffusion de l’hygiène pastorienne qui fût à l’origine du déménagement progressif des parturientes dans les établissements médicaux consacrés à la suprématie des obstétriciens.

Bien que les sages-femmes y trouvent une certaine sécurité (recul de la mortalité maternelle), elles y travaillent sous contrôle puisqu’elles deviennent des salariées (non plus libérales) mais elles connaissant une perte d’autonomie et une dévalorisation de leur savoir-faire entrainant une perte de reconnaissance influent sur leurs relations avec les parturientes.

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23 La manipulation de la technologie et des images joue ici un rôle capital permettant au corps médical de redéfinir le vécu et la grossesse des femmes, où dans la salle d’accouchement celui qui manipule la technologie se situe en haut de l’échelle des connaissances, auquel sera opposée la parturiente considérée en bas de cette échelle. (Bellon Sanchez, 2015)

Aujourd’hui la féminisation de la discipline obstétrique ne valoriserait que très peu la relation entre soignantes et soignées dû au fait que de nombreuses gynécologues s’identifient plus à leurs statuts de médecins qu’à celui de femmes. (Knibiehler, 2003)

Les violences obstétriques : un exemple de violence de genre dans le système biomédical

Les violences obstétriques sont définies comme une « appropriation du corps et des procédés reproducteurs de la femme par le personnel de santé, qui s’exprime par un traitement déshumanisant, un abus de médicalisation et une pathologisation de procédés naturels ayant pour conséquences une perte d’autonomie, de capacité de décider librement sur son corps et sa sexualité, et un impact négatif sur la qualité de vie des femmes » (Bellon Sanchez, 2015). Elles peuvent se manifester par un manque d’information des usagers sur les procédés médicaux employés pendant l’accouchement ; des pratiques hospitalières qui humilient ou nient les nécessités exprimées par les parturientes ; la réalisation de césariennes sans nécessité avérée ; et l’administration de médicaments sans effet positif sur le corps du fœtus ou de la femme due à une vision pathologisante de l’accouchement.

La construction de la discipline médicale comme science dure, lui donne de fait, une légitimité.

Pourtant elle se base sur des principes relativement andro-centrés (des raisonnements binaires tels que : les organes génitaux féminin seraient l’inverse des organes génitaux masculins, ou encore l’ovule opposé aux spermatozoïdes).

La grossesse est donc un outil permettant d’assurer la reproduction d’une société, c’est donc dans les pays où les taux de natalité sont les plus bas que l’on peut observer le plus grand nombre de violences obstétriques.

Ces logiques de pouvoir et de domination peuvent être exercées tant dans le dressage des corps (par le biais de la sexualité, des représentations qui lui sont inhérentes, par les

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24 conceptions associées à l’accouchement), que par la transmissions de connaissances, influant sur la production de ces connaissances même.

Ces logiques de reproduction de la domination par la domination ne concernent pas seulement les rapports genrés mais donnent aussi à voir une hiérarchie des classes sociales dont certaines bénéficiant d’un accès aux connaissances privilégiées, posséderaient un pouvoir décisionnel plus conséquent.

II. Genre et Précarité

Le mot précaire est apparu au XVIe siècle. Il provient du latin « precarius », un terme juridique qui signifie « obtenu par la prière ».

Entre le registre religieux et juridique il semble que cela s’apparente toujours à une demande, en effet précaire désignerait une chose qui est allouée, et que l’on pourra donc reprendre à tout moment, une chose dont la stabilité n’est pas assurée. Un lien est fait entre durée et solidité. L’objectif est ici d’étudier la variété de définitions sociologiques corrélée à la précarité, mais aussi les contextes dans lesquelles cette dernière se manifeste et se développe.

1. Précarité : cadre théorique

Dans la précarité est définie comme « caractérisée par une forte incertitude sur la possibilité de pouvoir retrouver dans un avenir proche la situation qui est considérée comme « acceptable ». Elle est donc une notion subjective et relative car elle se définit par un rapport à une situation « acceptable » au sein d’une société donnée. C’est une notion facilement adaptable à différents contextes. Elle peut qualifier un contexte social, politique ou une situation relative au travail, elle est facilement modelable et permet une appropriation très aisée.

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25 A. La précarité, conséquence d’une dégradation des conditions de travail

La révolution industrielle du XIXe siècle désigne la transition d’une économie basée sur le secteur primaire (agricole) vers une économie basée sur le secteur secondaire (industrie). Elle ne voit pas naître le capitalisme qui existait déjà sous différentes formes depuis le Moyen-Âge.

Des inventions comme la machine à vapeur ou le boom ferroviaire des années 1940 ont probablement été des éléments déclencheurs de cette « nouvelle ère ».

Les conséquences de la révolution industrielle sur la perception de l’humain

Dans les mentalités de l’époque ces nouvelles innovations entrainent une série de mutation. L’éloge de la précision et de l’exactitude font leur apparition dans une Europe qui devient froide, hydraulique et mécaniste.

Cette mécanisation accrue n’a pas été sans conséquences sur les conditions de travail des salariés. En effet ces derniers ont connu un accroissement de leur rythme de travail et de la précision dont ils devaient faire-part.

Les conditions de travail se dégradent, pour assurer un maximum de profit, les tâches à l’usine sont décomposées, le travail à la chaîne se multiplie. C’est l’aliénation du travailleur qui n’est plus qu’une « machine de plus » facilement remplaçable.

Les grands patrons observant une population active croissante, due notamment à l’exode rural, la sécurité de l’emploi se dégrade donc et les salaires aussi.

En sciences sociales, un autre secteur a recours à cette notion : les travaux sur la pauvreté et son traitement ou bien encore l’analyse du marché du travail et de l’emploi.

La littérature nord-américaine décrit alors « les vulnérables ».

Ce sont des personnes dont les ressources économiques sont insuffisantes ; des personnes considérées comme pauvres ou proches du niveau de pauvreté ; des personnes qui sont à la fois mal rémunérées et mal logées, mais aussi qui n’accèdent pas à différentes sources de

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protection et de droits -comme les droits sociaux- ce qui s’accompagne aussi d’une faiblesse de représentation par un certain nombre de groupes de pression et de représentation, comme les syndicats (Saunders, 2003).

Mais dans cette tradition de recherches sur la pauvreté, l’approche est essentiellement socio-économique, tentant encore une fois d’appréhender les déficits de ressources et leurs effets sur les trajectoires des individus et des groupes.

La différence est cependant de sortir de l’approche probabiliste, du cumul de facteurs de risques entrevus précédemment.

Pour Robert Castel, c’est non seulement la révolution industrielle mais aussi la mondialisation socio-économique qui ont entrainé une dégradation des conditions de travail accentuant la flexibilité des horaires et les inégalités des salaires.

D’après le sociologue français ces changements auraient eu comme conséquences la précarité, qu’il définit comme « une absence ou, tout au moins le sentiment d’absence ou d’affaiblissement des protections face aux principaux risques sociaux, notamment le chômage ou la pauvreté » (Castel, 1991).

Précarité et identité sociale

Quelques années auparavant Erving Goffman avait étudié les relations entre identité sociale et identité personnelle.

Pour lui l’identité personnelle relèverait de la personne physique d’un individu déterminé par un ensemble de marques spécifiques, tandis que l’identité sociale serait une mise en avant, une présentation volontaire faisant intervenir des rôles.

« L’identité pour Soi est un sentiment subjectif de l’individu qui élabore une image de lui-même avec une grande marge de liberté » (Thierry ; Goffman, 1975)

La stigmatisation influence donc directement l’identité sociale puisque l’individu développe une certaine ambivalence dans la perception de sa propre personne.

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B. La précarité économique : fruit d’une série de ruptures sociales, affectives ou spatiales.

Comme nous l’avons vu précédemment la précarité est une des conséquences de la révolution industrielle, mais il serait réducteur de ne pas analyser les facteurs sociaux comme aussi responsables de cette situation.

Nous avons brièvement évoqué l’exode rural comme facteur pouvant accroitre les possibilités de précarité.

Les réseaux peuvent être envisagés d’un point de vue individuel et sont alors centrés sur la personne, ou d’un point de vue sociétal et décrivent alors la trame des divers réseaux individuels, perspective qui parfois perd en signification et ce qu’elle gagne en complexité.

Le capital social

Pierre Bourdieu défini le capital social comme « l’ensemble des ressources actuelles ou potentielles qui sont liées à la possession d’un réseau durable de relations plus ou moins institutionnalisées d’interconnaissance et d’interreconnaisance ; ou ,en d’autres termes, à l’appartenance à un groupe, comme ensemble d’agents qui ne sont pas seulement dotés de propriétés communes (susceptibles d’être perçues par l’observateur, par les autres ou par eux-mêmes) mais sont aussi unis par des liaisons permanentes et utiles ». (Bourdieu, 1980)

Le capital social est donc un réseau relationnel, mais aussi l’ensemble des ressources potentielles que peuvent mobiliser chacun des membres du réseau, c’est donc « la somme des capitaux et des pouvoirs qu’un réseau permet de mobiliser ». (Cohen, 1997)

Le potentiel de ressources fait référence à « l’ensemble du système d’échanges de biens et services matériels et symboliques dans lequel est inséré un acteur social » (Cohen, 1997)

La vulnérabilité relationnelle

Des personnes entretenant un nombre faible de relation peuvent être rassemblées dans la catégorie « faible sociabilité ». Cette observation peut être nuancée par différents invariants et par une redéfinition de la vulnérabilité relationnelle.

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Ces invariants peuvent relever de la position de classe, du statut familial et du cadre de vie. Nous pouvons observer une corrélation entre différents types de sociabilité ainsi qu’une convergence entre les capitaux économique, culturel et social.

Le sociologue Claude Martin observe que dans les classes populaires les réseaux sont plus souvent basés sur la sociabilité familiale, il est donc intéressant d’observer la fragilisation des collectifs primaires, puisque cela expliquerait une précarisation d’autant plus forte dans les classes les plus populaires.

Les individus vulnérables ont non seulement moins de relation, mais disposent de moins de relations susceptibles d’offrir un système d’échanges de biens et de services cariés.

Cette vulnérabilité peut aller jusqu’à entrainer la perte d’un logement. Les sans-abris

La « figure » du sans-abri s’est modifiée, aujourd’hui ce ne sont plus seulement des hommes d’un certain âge, mais aussi des jeunes, des sans-papiers, des femmes, des travailleurs pauvres ou encore des malades mentaux.

Pourtant le quotidien est toujours le même : un sentiment d’effacement du monde, la violence et la honte.

La prise en charge sociale n’a lieu que l’hiver alors que la saison la plus meurtrière pour les SDF est l’été. La prise en charge par les institutions est toujours perçue dans le cadre de l’urgence et l’imposition d’un rythme représente parfois un gigantesque effort à surmonter. (Quesemand Zucca,2007)

Des mères de familles avec plusieurs enfants et occupant un emploi, constituent aujourd’hui contre toute attente, une nouvelle catégorie de sans-abris.

2. Maternité et condition sociale

Nous allons maintenant nous intéresser à l’exercice de la parentalité, et à l’influence des conditions sociales sur cette dernière.

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Dans la société actuelle la conception de la parentalité est modelée par sa définition législative, cette dernière décrit les possibilités de parenté sous différentes formes, elle peut relever de la parenté domestique (vivre sous le même toit), la parenté biologique (la conception charnelle d’un enfant), ou de la parenté juridique (désignation officielle).

Le Code Civil français définit l’autorité parentale comme « un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant. Elle appartient aux pères et mères jusqu’à la majorité ou l’émancipation de l’enfant pour le protéger dans sa sécurité, sa santé et sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son développement dans le respect dû à sa personne. Les parents associent l’enfant aux décisions qui le concernent, selon son âge et son degré de maturité. » (Loi n° 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale, article 2).

La législation sur la parentalité et ses changements sont le reflet des mutations de la perception du rôle de parents, intimement lié avec des changements intergénérationnels et entre les sexes.

L’exercice de la parentalité régule les échanges sociaux, et participe à la construction de la personnalité de chacun. (Houzel 1999)

L’expérience de la parentalité

Le concept de parentification désigne le processus qui décrit l’évolution de tout individu qui devient parent.

Ce dernier ne se contente pas seulement d’un acte biologique ou d’une prise de conscience, il s’agit de devenir parent au sens fonctionnel et dans sa propre personnalité.

Le « devenir parent » suppose de longues transformations psychiques, passant parfois par une crise d’identité, aboutissant à une nouvelle place dans la constellation familiale.

Il est tout à fait intéressant de comparer le processus de parentification avec les « rites de passages » énoncés par Arnold Van Gennep.

La première période, celle des rites préliminaires et de la sacralisation pourrait correspondre à l’annonce et le vécu de la grossesse pour les deux parents se réclamant de la parentalité.

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30 L’accouchement pourrait concorder avec les rites liminaires donnant lieu à une marginalisation du groupe, et l’arrivé du bébé serait la renaissance symbolique du couple, conférant une nouvelle identité sociale : celle de parents.

La pratique de la parentalité

La pratique de la parentalité regrouperait selon Houzel les différentes tâches que les parents doivent réaliser pour assurer le bienêtre de l’enfant.

En effet, la dépendance d’un nouveau-né à l’égard des soins qu’on lui prodigue est considérable, celle-ci concentre des soins physiques (alimentation, vêture, protection physique, propreté, soins médicaux éventuels etc.…), tout comme les soins psychiques puisque sans ces soins l’enfant pourrait développer de graves troubles affectifs et cognitifs (Houzel,1999).

La pratique de la parentalité est selon Houzel, profondément imbriquée avec l’expérience de cette dernière.

Cette grille de lecture a toutefois été l’objet de nombreuses critiques, notamment de la part de S. Sellenet (2007) qui, malgré sa participation à l’ouvrage collectif, trouve que le discours a trop été focalisé sur une approche clinique délaissant une approche pluridisciplinaire, ce qui aurait réduit le contexte ,juridique institutionnels, et entrainé la modification de certains éléments négativement ou positivement. (Thierry ; Sellenet)

B. Les mères célibataires

Les femmes chefs de familles monoparentales sont aujourd’hui présentées comme un phénomène récent, pourtant, il semblerait qu’elles aient toujours existées.

C’est leur position dans la société qui a été l’enjeu de reconnaissance ou non suivant les contextes et les idéologies dominantes.

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Dans notre société actuelle le vécu dans l’entrée de la maternité est toujours perçu comme le fruit d’un projet parental commun. Toutefois, la grossesse ne fait pas toujours l’objet d’un projet en amont, et encore moins d’un projet commun en amont.

Le modèle référentiel dominant est celui d’une coparentalité basée sur un modèle égalitaire de la famille, ce modèle est loin d’être une évidence pour toutes les classes notamment pour les plus populaires qui peinent à le mettre en place.

Histoire des mères célibataires

Dans son ouvrage « Evolution de la condition de mère » Yvone Knibielher observe l’évolution de la condition de mère comme indicateur permettant d’observer l’évolution de la famille.

Au Moyen-Âge l’historienne observe un statut très élevé pour une concubine ayant engendré un « bâtard ». Mais le XVI siècle est marqué par de profonds changements et plus particulièrement une redéfinition de la famille, c’est plus spécifiquement après le renforcement du sacrement du mariage que ce phénomène s’accentue.

Avec l’âge des Lumières et la naissance d’une philosophie des droits de l’homme, on accorde un peu plus de droits aux mères sans mari.

En 1793 une convention ouvre des maternités aux femmes démunies et s’engage à leur verser une pension. Mais le code Napoléon rend les femmes coupables de leurs actes et protège les hommes.

Suite à la révolution industrielle on observe chez les hommes une augmentation du chômage de la prison et de l’alcoolisme.

Le XXe siècle verra donc se succéder différentes politiques natalistes et certaines permettront aux mères ou jeunes filles-mères d’élever seules leurs enfants en se substituant aux pères absents ou tués en guerre.

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La maternité, un facteur accentuant la précarité

Lorsqu’une femme connait des difficultés pour se loger elle est déjà fréquemment issue d’un milieu populaire.

Ces difficultés sont souvent accentuées par l’arrivée de l’enfant.

En effet elles font souvent appel à des réseaux qui ne disposent pas de logement permettant leur hébergement et celui d’un bébé. Aux angoisses propres à la grossesse s’ajoutent donc la précarité matérielle et sociale.

L’apogée de cette précarité pourrait être observable lorsque l’enfant est en âge préscolaire. La mère cumulera des difficultés pour le faire garder, et l’éloignement des centres urbains entraineraient donc des complications conséquentes à la rencontre d’un emploi.

Cette précarité n’aura pas de conséquence sur l’éducation donnée à l’enfant puisque dans les familles populaires les rôles sont plus strictement définis que dans les familles bourgeoises où la personnalité de l’enfant est d’avantage prise en compte.

Dans chaque classe sociale des valeurs inhérentes à la précarité sont observables, par exemple, les familles précarisées revendiquent généralement une identité parentale qui compense les difficultés professionnelles et sociales. (Fine ; 2001)

Le risque moindre pour les femmes de se trouver sans abri

Dans « Un avantage sous contrainte : le risque moindre pour les femmes de se trouver sans abri » Maryse Marpsat décrit la pauvreté des femmes comme plus fréquente que chez les hommes, et paradoxalement elles sont beaucoup moins nombreuses, en proportion, qu’eux à être sans domicile.

Ici la théorie avancée est que les femmes bénéficient d’une meilleure protection que les hommes dues à une représentation très manichéenne des rôles de chacun, en effet la femme perçue comme de nature une hypothétique mère, plus fragile économiquement et moralement, mais surtout plus vulnérable face aux dangers de la rue.

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3. L’Histoire coloniale et son influence dans le contexte migratoire

Pour permettre la compréhension de l’histoire coloniale et son influence sur le contexte migratoire actuel, il convient de définir la notion de frontière.

Didier Fassin la définit comme « la démarcation des territoires (« borders » en anglais), les

limites des ensembles (« boundaries » en anglais) qui permettent de mettre en valeur des séparations physiques et mentales ».

Il cherche dans son ouvrage « Les nouvelles frontières de la société française » à décliner deux aspects des frontières : les frontières externes, qui correspondent à une double histoire de colonisation et d’immigration, et les frontières internes qui correspondent à des limites entre catégories sociales racialisées.

Pour l’anthropologue français c’est par des pratiques et un imaginaire relatif à la politique coloniale qu’est définie et redéfinie la place sociale assigné aux immigrés. (Fassin ; 2010)

A. Femmes en migration

Les rapports de genre dans la migration

La question de l’émancipation par la migration a longtemps été envisagée, et d’après certaines analyses comme celle de Catarino, les effets de la migration ne traduisent pas forcément une modification des rapports sociaux de sexe au sein du couple.

Dans le contexte français les rapports de genre connaissent effectivement des modifications, notamment par le biais de l’engagement associatif.

En effet cet engagement permet parfois de renégocier les rapports de forces au sein du couple. Dans le contexte migratoire, hommes et femmes recourent à différentes stratégies, les uns pour assoir leur domination, les autres pour échapper aux différentes tensions dans lesquelles elles se sentent impliquées.

En réalité ce sont deux modes de contrôle sur les femmes qui cohabitent ici. (Quiminal,Moujoud)

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L’émigration féminine a longtemps été perçue comme une « conséquence » du regroupement familial, réduisant la femme à sa place d’épouse et de mère et fait référence à une « organisation mentale de la saisie de l’autre ».

Même dans le cadre du regroupement familial, les femmes connaissent une pluralité de situation et participent activement à l’élaboration du projet.

Les femmes en situation migratoire travaillent principalement dans les métiers de l’agriculture (beaucoup d’études ont été menées sur le travail saisonnier des Marocaines en Espagne) et font référence à un contexte colonial.

On observe par exemple, une survisibilisation des saisonnières vers l’Espagne dans les médias tout comme dans les études scientifiques.

En 2005, suite à différentes polémiques le projet espagnol CATAYA prend en charge les saisonnières de « manière éthique ». Il offre aux femmes une couverture sociale et le défraiement mais demande en échange une autorisation maritale (les femmes célibataires voient leur demande rejetée).

Les femmes ont dénoncé l’exigence de cette autorisation à quoi se sont ajoutées sur place, des conditions de travail déplorables

L’histoire coloniale continue d’agir sur les représentations et les stigmates dont sont les objets les migrantes dans la société d’accueil. (Lmadani ; 2012)

Ces travaux font échos à la notion d’intersectionnalité. L’idée selon laquelle, les discriminations ont un effet multiplicateur entre elles.

Kimberlé Crenshaw tente de définir le processus de stigmatisation par une appréhension des identités collectives au détriment des trajectoires individuelles.

Les effets de la migration sur les migrantes

Cet article fait écho aux études de Nassima Moujoud qui pose la question des effets de la migration sur les migrantes.

Elle critique les féministes anglophones qui, dans une perceptive évolutionniste perçoivent l’émigration comme source d’émancipation. En effet elles délaissent l’influence des rapports sociaux de pouvoirs, les rôles des Etats de départ et d’arrivée dans les rapports de sexes.

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L’idée inhérente à ces théories serait donc que seule « l’intégration » pourrait-être synonyme « d’émancipation » en se basant sur des critères tout à fait subjectifs et discriminatoires tels que le travail, le mariage et la sexualité.

Ces pratiques discriminatoires de l’Etat se retrouvent dans bon nombre de procédures administratives.

D’après une enquête réalisée auprès des usagers du 115 au Samu Social de Paris, 45% des migrantes sont sans ressources et sans réseaux d’entraides à leur arrivée.

La prise en charge par le SAMU est souvent très longue car elles ne bénéficient pas de la même protection que les françaises.

B. Une inter-influence entre migration et précarité Une population fragilisée par la migration

La migration ne signifie pas seulement une rupture spatiale, mais aussi sociale et culturelle Comme nous l’avons évoqué précédemment, nombreuses sont les migrantes qui arrivent dans la société d’accueil démunies de ressources humaines et économiques.

En effet, déjà sans ressource économique, le manque de ressources humaines complique d’autant plus leur arrivée dans la société d’accueil, posant la question de l’hébergement mais aussi dans l’appréhension du territoire, la création d’un réseau, et l’apprentissages de normes relatives au monde du travail.

À la précarisation et la stigmatisation s’ajoute souvent la diminution d’un statut social dans la société d’arrivée.

Orientation vers le Care

En effet dans les sociétés d’accueil le système patriarcal favorise largement une orientation des femmes visant à reproduire les rôles de genre.

Les métiers du Care, regroupant les métiers où une des fonctions principales est celle de prendre soin, connaissent une survisibilisation féminine

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