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Marguerite Yourcenar et Théocrite 

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Academic year: 2021

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Caesarodunum L-LI bis, Clermont-Ferrand, 2017, ISBN : 978-2-900479-22-3

MARGUERITE YOURCENAR ET THÉOCRITE

par Rémy POIGNAULT

(Université Clermont Auvergne, CELIS, EA 4280)

Marguerite Yourcenar lisait déjà « avec passion » (YO, p. 28)1 à l’âge de huit ans, en traduction, Les oiseaux d’Aristophane. Son père, ensuite, s’est « mis dans la tête de [lui] apprendre l’anglais […] dans une traduction anglaise du Manuel de Marc Aurèle » (YO, p. 29), expérience pédagogique qui s’est rapidement conclue pour le père par l’envoi du volume à travers la fenêtre. Mais l’amour de Yourcenar pour le grec est demeuré intact : elle a, ensuite, commencé à apprendre cette langue vers douze ans (OR, p. XIV) « avec un répétiteur »2. Nul doute qu’elle partage le sentiment qu’elle prête, à juste titre, à l’empereur Hadrien : « J’ai aimé cette langue pour sa flexibilité de corps bien en forme, sa richesse de vocabulaire où s’atteste à chaque mot le contact direct et varié des réalités, et parce que presque tout ce que les hommes ont dit de mieux a été dit en grec » (MH, p. 312).

Ses poèmes de jeunesse, Le Jardin des Chimères (composé en 1919 et publié en 1921), Les dieux ne sont pas morts (qui, bien que publié en 1922, comporte des poèmes bien antérieurs) montrent une vision idéalisée de la Grèce. Elle publie en 1932 un Pindare, rédigé à partir de 1926, biographie émaillée de traductions personnelles ; elle s’est intéressée à la mythologie grecque particulièrement dans la « série de proses lyriques » Feux3, ses pièces de théâtre Qui n’a pas son

Minotaure ?4, Électre ou la Chute des masques5 et Le Mystère d’Alceste6,

ouvrages composés entre 1932 et 1944 ; son attachement à Hadrien est d’autant plus grand qu’il est un empereur philhellène. « [E]n guise de délassement ou d’exercices » (OR, p. XXIII), mais aussi pour mieux entrer dans le personnage d’Hadrien, car, à ses yeux, « [l]’une des meilleures manières de recréer la pensée d’un homme[, c’est de] reconstituer sa bibliothèque » (MH, p. 524), elle traduit des poètes grecs antiques, travaux qui donneront lieu à la publication en 1979 du recueil La Couronne et la Lyre.

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Même si c’est Pindare et non Théocrite qui a inspiré une biographie à Yourcenar, l’auteur des Idylles est loin d’être un inconnu pour elle.

Se référer

Certes, l’absence d’un auteur dans une bibliothèque ne signifie pas forcément que le propriétaire de celle-ci ne l’ait pas lu et, à l’inverse, qu’il y figure n’implique pas une intimité avec le texte ; mais dans le cas de Yourcenar, qui se débarrassait des livres qu’on lui envoyait et qu’elle jugeait peu essentiels et tenait sa bibliothèque soigneusement classée, on peut être assuré que les ouvrages qu’elle a gardés étaient considérés par elle comme dignes d’intérêt. Elle a conservé ainsi plusieurs éditions de Théocrite dans les rayonnages de Petite Plaisance, sa demeure dans le Maine aux États-Unis, tous rangés dans la même bibliothèque de son cabinet de travail :

- l’édition de Fr. Ameis parue dans les Poetae Bucolici et Didacti chez Ambroise Firmin Didot à Paris en 1862, Theocritus, Bion, Moschus (n° 3700)7

- l’édition de 1904 des Bucolicorum Graecorum Theocriti Bionis Moschi Reliquiae accedentibus Incertorum Idyllis de Henri Ludolfus Ahrens parue à Leipzig chez Teubner (n° 3638)

- la traduction de Leconte de Lisle, Hésiode, “Hymnes orphiques”, Théocrite, Bion, Moskhos, Tyrtée, “Odes anacréontiques”, Paris, Lemerre, [s. d.] (n° 3537)

- la traduction en prose anglaise de A. Lang, Theocritus, Bion and Moschus, London, Macmillan and Co., 1920 (n° 3643)

- la traduction en prose anglaise de J. M. Edmonds, Greek Bucolic Poets (Theocritus, Bion, Moschus), Cambridge, Harvard University Press, Loeb Classical Library, dans une édition de 1950 (n° 3684)

- l’édition avec traduction française en prose de Ph.-E. Legrand parue aux Belles Lettres, Bucoliques grecs. Tome I : Théocrite, Paris, 1925 (n° 3671).

Elle possède aussi l’étude de Ph.-E. Legrand sur La poésie alexandrine, Paris, Payot, 1924 (n° 3644).

On trouve, en outre, dans les listes d’ouvrages qu’elle se souvient avoir lus, « soit qu’ils [l’]aient passionnée, ou aient eu sur [elle] quelque influence, ou aient été lus dans des circonstances particulières qu[’elle] n’[a] pas oubliées »8, listes qui ont été publiées dans Sources II, Théocrite

dans ses lectures « de la 15e à la 18e année »9, et elle précise que ces

poèmes ont été « expliqués avec [s]on père »10. On voit là que la lecture de Théocrite s’est effectuée à l’époque de l’adolescence et qu’elle est liée à l’image du père, un père présenté dans Le Labyrinthe du monde comme un homme cultivé, épris de liberté et aimant les plaisirs. Dans Souvenirs

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pieux elle reconnaît aussi avoir, comme ses grands-oncles Octave et Rémo Pirmez plus d’un demi-siècle auparavant, lu, dans un cadre bucolique pourrait-on dire, « sous les arbres Hésiode et Théocrite » (SP, p. 874).

Le poète sicilien est mentionné à plusieurs reprises dans la correspondance publiée de Yourcenar. À Wells Hively qui entreprend un opéra à partir de Mémoires d’Hadrien elle conseille de ne pas utiliser dans son spectacle, pour la scène de rencontre entre Hadrien et Antinoüs, au cours de laquelle, selon l’ouvrage, fut lue « une pièce assez abstruse de Lycophron » (MH, p. 404), Cassandra, « totalement incompréhensible, et volontairement telle » qui nous est parvenue11, mais « un poème grec

authentique, […] plus cantabile », soit du Simonide, s’il souhaite « un poème philosophique », soit s’il veut « un poème d’amour », « la XIIe

idylle de Théocrite (L’Ami) »12 (lettre du 14 juillet 1956, HZ, p. 558),

poème qu’elle a, d’ailleurs traduit dans La Couronne et la Lyre13. Théocrite est ici retenu comme poète de l’amour particulièrement adapté à l’atmosphère de la naissance d’une passion. Le choix des vers de Simonide « sur la destinée de l’homme » qu’elle évoque sont de toute évidence ceux qu’elle a traduits, cités par Stobée, Florilège, 105, 9 et qu’elle donne dans La Couronne et la Lyre (p. 144) ; ces vers placeraient, au contraire, mais de façon tout aussi juste, la découverte de l’amour sous le signe de la fragilité et de l’éphémère.

Au professeur Rudolf Allers, d’autre part, qui considère « l’époque de “l’Hellénisme” comme une des grandes époques romantiques » (lettre du 18 juillet 1956, HZ, p. 566), elle concède qu’ « [i]l est possible de parler d’un romantisme de Théocrite » (HZ, p. 567), mais aussi de Méléagre ou de Plutarque, qu’elle définit en trois expressions qui semblent caractériser les auteurs tour à tour : « (sens et goût de la nature ; accent mis sur l’émotion individuelle, retour exalté et mélancolique vers les grands moments du passé) » (HZ, p. 567) ; ce qui revient à Théocrite est donc le sentiment de la nature, même si, comme Yourcenar le reconnaît dans la « Préface » de La Couronne et la Lyre, « le Grec tend à donner à la nature forme humaine, ou plutôt divine. La Déméter de Théocrite n’est pas que la déesse des récoltes : elle est la récolte et le fécond été » (CL, p. 29).

Ailleurs, Yourcenar prise « certains dialogues exacts et légers de Théocrite, d’Hérondas, du Lucien des Courtisanes » (lettre du 16 octobre 1958, HZII, p. 273). Elle rapproche aussi certaines Idylles de Théocrite des mimes d’Hérondas dans la notice qu’elle consacre à ce dernier dans La Couronne et la Lyre, rapprochement qui n’est pas nouveau dans la critique ; mais elle établit des nuances et voit chez Théocrite, alors qu’ils sont absents chez Hérondas, des « élans lyriques » « réduits, dans Les Commères {…], à une cantate d’apparat ; dans ses Moissonneurs, à une

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chanson folklorique » et elle trouve que Théocrite est plus « plantureux » et plus « coloré » qu’Hérondas (CL, p. 337). Réfléchissant dans « Ton et langage dans le roman historique »14 sur les vestiges que la littérature peut nous laisser du ton des propos tenus par les Anciens, elle voit à la fois réalité et artifice : Théocrite dans ses pièces qui confinent au mime, comme Hérondas, « offre des propos d’une précision réaliste exquise, mais […] basée sur la condescendance ironique » ; toutefois dans des pièces « lyriques » comme La Magicienne, elle perçoit « le ton parlé, crié ou chanté de l’émotion »15. Tout se passe comme s’il y avait une

oscillation entre art et nature.

Yourcenar considère aussi Théocrite comme un poète témoin ou écho de son temps, dans une dimension en quelque sorte réaliste, quand, invitée à parler de la poésie grecque devant des étudiants américains, elle propose en 1961 comme sujet de conférence au Smith College de Northampton dans le Massachusetts « [l]’Histoire grecque vue par les Poètes (de Théocrite à Constantin Kavafis) » (lettre du 23 janvier 1961, HZIII, p. 37). Une semaine plus tard, elle précise son sujet en disant qu’elle travaillera sur « Théocrite, Callimaque, Hérondas et Méléagre, compte tenu du fait que leurs œuvres reflètent leur époque » (lettre du 30 janvier 1961, HZIII, p. 43) ; elle rejoint ainsi les analyses de Philippe-Ernest Legrand, qui intitule l’une des subdivisions de son ouvrage La poésie alexandrine « La curiosité réaliste » et décèle une coexistence entre « une certaine complaisance pour les rêves et les chimères » et « un penchant décidé à l’exacte représentation du réel »16, qu’il met en rapport avec les « sciences » et les « arts » de l’époque qui se « consacre[nt] résolument à l’étude des réalités »17.

Théocrite, en fait, représente surtout pour Yourcenar un climat d’hédonisme champêtre et, dans Souvenirs pieux, elle l’associe à plusieurs reprises à son grand-oncle Octave Pirmez, poète et essayiste belge, qui, à la différence de ce qui se passe en général dans les « pays de langue française », où la culture gréco-latine « fut toujours rare […] hors du groupe des spécialistes et des professeurs, chez qui elle prend d’habitude des aspects plus étroitement philologiques et scolaires » (SP, p. 846), est familier de la littérature grecque et latine, lui qui a lu, « Hésiode et Théocrite » « sous les arbres d’un parc » (ibid.) : il s’agit d’une culture vivante, avec un contact pour ainsi dire charnel, comme sera la culture de Yourcenar. Dans la reconstitution qu’elle opère de la vie et de la pensée d’Octave Pirmez, elle caractérise ainsi en quelques mots ce que Théocrite pouvait représenter pour le jeune homme, mais le système énonciatif peut laisser penser que la narratrice retient elle aussi ces images : « les paysages et les corps ensoleillés de Théocrite » (SP, p. 834). Théocrite demeure surtout pour ses décors lumineux et la plastique de ses portraits d’éphèbes, symbolisant une sensualité

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hellénique qui impose son évidence innocente. D’ailleurs, Yourcenar croit déceler chez Octave une attirance pour les corps d’éphèbes qui apparaît comme la conséquence directe de son intimité avec les poèmes du Syracusain : « On sent de très bonne heure chez ce lecteur de Théocrite un goût de la beauté adolescente » (SP, p. 862). Les émotions esthétiques qu’il éprouve à la contemplation d’« enfants du village pêchant à la ligne », devant « la grâce des attitudes et des corps demi-nus » (ibid.) trouvent peut-être un équivalent dans les descriptions de Théocrite. Cette émotion peut prendre la forme d’une amitié : dans les Lettres à José, Octave Pirmez écrit : « “Que faut-il pour goûter des heures de joie profonde ? La vue d’une tête candide, le seul spectacle d’un paysage pastoral” » (SP, p. 836) : il suffit, donc, d’un cadre et d’un être cher. Yourcenar de conclure à propos d’Octave et José : « Leurs rencontres dans les bois sont une chaste idylle grecque dans le gris et chrétien Hainaut » (ibid.). On perçoit le renvoi implicite à Théocrite, comme référence d’un paysage bucolique et des émois de l’âme et du corps, mais le soleil grec est remplacé par un ciel gris et la liberté sensuelle par la chasteté ; c’est là, sans doute, l’adaptation belge et chrétienne de l’idylle grecque païenne18.

Une autre caractéristique de Théocrite, qui vient contrebalancer ce que Yourcenar dit ailleurs des reflets de l’actualité dans sa poésie, est une tendance à offrir, comme, d’ailleurs, Virgile, une image idéalisée de la vie à la campagne. Elle s’attendait, en effet que, dans Jours de solitude, ce « lecteur passionné de Théocrite et de Virgile » qu’était Octave Pirmez « y allât d’une idyllique description » de la campagne romaine ; or il n’en est rien : le jeune homme retient l’image de « “deux agneaux mourants balancés aux branches d’un frêne” » égorgés par le berger et il conclut avec amertume : « “Telle fut pour moi la pastorale de la Sabine” » (SP, p. 856)19. Le lettré désenchanté constate ainsi le décalage entre l’image

donnée par la littérature et la réalité.

Mais Yourcenar sait que l’idylle de Théocrite n’est pas à confondre avec ce qu’est devenu la pastorale, et elle relève, dans sa notice de présentation de Théocrite dans La Couronne et la Lyre, l’évolution sémantique du mot “idylle”, mais pour insister sur le réalisme de bien des textes de Théocrite : « Le mot Idylles, donné d’ailleurs assez tard pour titre à son recueil de poèmes, n’avait pas alors la signification bucolique, encore moins les résonances doucereuses qu’il a acquises depuis ; il semble n’avoir guère signifié que “descriptions” » (CL, p. 316). Yourcenar, d’une part, sait que cette dénomination n’appartient pas à Théocrite et, d’autre part, elle ne retient pas la signification qu’on donne d’ordinaire au mot εἰδύλλιον, où l’on voit plutôt une forme poétique caractérisée par sa brièveté, comme semblent le suggérer le suffixe diminutif ainsi qu’un passage d’une lettre de Pline le Jeune20. La

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signification de “descriptions”, dont je n’ai pas trouvé l’origine, permet à Marguerite Yourcenar d’insister sur la dimension visuelle de poèmes où l’observation de la réalité joue un grand rôle.

Il est une présence plus allusive de Théocrite dans l’œuvre de Yourcenar, qu’on peut percevoir dans une tentation bucolique et dans celle d’une Arcadie qui ne sont pas rattachées directement au poète, mais relèvent plutôt de la tradition qui suivit. Yourcenar a publié en 1956 un recueil de poèmes intitulé Les Charités d’Alcippe et autres poèmes, dont la plaquette est ornée d’un dessin d’Aristide Maillol montrant un pâtre jouant de la flûte devant trois chèvres dans un paysage bucolique21 ; et on

décèle dans certains poèmes une empreinte bucolique, comme dans la « Cantilène pour un joueur de flûte aveugle » où la mélodie, à l’unisson de l’univers, est comparée au « Miel coulant d’une bouche sombre / Comme un baiser fait à la nuit »22.

Le Nord de la France prend à certains moments privilégiés, dans Quoi ? L’Éternité, une teinte bucolique. Yourcenar imagine son père faisant le matin le tour du parc, passant devant des vaches qui « paissent dans les prairies » et rencontrant « en descendant une pente herbue un berger avec son troupeau » avant d’aller voir « les quelques chevaux ragaillardis par la fraîcheur du matin [qui] caracolent » (QE, p. 1200-1201). Yourcenar, elle-même, évoque avec une certaine distance ironique son propre bestiaire de pastorale : « J’eus une chèvre blanche dont Michel dora lui-même les cornes, bête mythologique avant que je sache ce qu’était la mythologie. J’eus un gros mouton tout blanc qu’on savonnait chaque samedi dans la cuve de la buanderie ; il en sortait pour se rouler sur l’herbe humide […] » (QE, p. 1328). S’y ajoutent des lapins dont l’enfant observe les cabrioles avec émerveillement, mais elle se réfère non tant au monde bucolique qu’« au pays des fées ».

Au centre de Mémoires d’Hadrien, dans le groupement de chapitres Saeculum aureum, les années qui ont suivi la rencontre avec Antinoüs placée sous le signe de la musique et de la poésie, années de passion partagée et qui voient la politique mise en œuvre par l’empereur porter ses fruits, sont présentées à la fois comme une sorte d’âge d’or et d’Arcadie : « J’emmenai Antinoüs dans l’Arcadie de ses ancêtres : les forêts y restaient aussi impénétrables qu’au temps où ces antiques chasseurs de loups y avaient vécu » (MH, p. 408)23. Hadrien voit dans

l’éphèbe des traces des « bergers de l’Arcadie antique » (MH, p. 460), et, une fois mort, « [l’]Arcadie ancestrale l’associe à Pan et à Diane, divinités des bois » (MH, p. 508). Cette période où humain et divin semblent se mêler dans une Grèce idéale comporte, on le voit, des germes de mort et se termine par la noyade d’Antinoüs. On pourrait penser à la

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fin de Daphnis dans l’Idylle 1 de Théocrite, mais avec cette différence que la mort d’Antinoüs s’accomplit de façon rituelle dans les eaux du Nil.

Présenter

Marguerite Yourcenar a consacré à Théocrite – assez tardivement, à partir de 197324 – dans La Couronne et la Lyre, quatre pages environ, qui adoptent un plan assez attendu : d’abord des informations biographiques (l’homme), puis une présentation de sa poésie (l’œuvre).

Pour sa biographie, Yourcenar fait la part de la légende ; ainsi de son apprentissage de la médecine à Cos elle précise : « dit-on » (CL, p. 315), mais elle semble prendre cette information à son compte, puisqu’elle indique que « [l]a littérature l’[a] emporté sur la matière médicale ». Elle mentionne sa fréquentation des « cercles poétiques à la mode » à Alexandrie et les louanges adressées à « Ptolémée Philadelphe et sa terrible sœur-épouse, Arsinoé »25. Elle évoque ensuite la fin de sa vie en Sicile en signalant la légende de sa décapitation « pour avoir critiqué les excès de Gélon » (CL, p. 316), mais en la mettant fortement en doute.

Elle entend rendre justice à Théocrite en lui restituant sa place dans la littérature, car elle juge qu’il « est peut-être le plus méconnu des grands poètes grecs » (CL, p. 316). Il est, à ses yeux, victime de l’évolution d’« un genre qu’il a porté très haut ». Les continuateurs de Théocrite (de Virgile aux « bergeries du XVIIIe siècle » en passant par Sannazar) ont, en effet, selon le jugement de Yourcenar, infléchi le genre dans le sens de l’« artificialité », alors qu’avec Théocrite nous sommes dans un « puissant réalisme ». Elle rejoint en quelque sorte encore le jugement de Ph.-E. Legrand, pour qui « À vrai dire, nous ne lisons nulle part dans les poésies alexandrines quelque chose d’aussi explicite que la fameuse apostrophe virgilienne : O fortunatos nimium, sua si bona norint, agricolas ! Et Théocrite, qui n’était pas dupe de la mode, ne s’est point fait faute de dépeindre plusieurs de ses acteurs campagnards comme de pauvres hères, non moins misérables que grossiers »26. Virgile, dont

Marguerite Yourcenar apprécie le charme poétique, a, en quelque sorte, changé l’éclairage et la tonalité en installant des demi-teintes là où resplendissait l’éclat du soleil : « […] Virgile […] le plagia avec génie, et recouvrit de ses pâleurs crépusculaires ou lunaires les fonds ensoleillés du poète de Syracuse » (CL, p. 316) ; elle rejoint là les analyses de Panofsky27. Dans un essai intitulé « Wilde rue des beaux-arts », elle

souligne encore la dette de Virgile, à propos cette fois de la deuxième Bucolique, « faite elle-même de centons de Théocrite, et exprimant un amour interdit depuis mais alors tout simple » (PE, p. 507)28.

Si Yourcenar donne ici une image minorée du grand Virgile, ce n’est sans doute pas qu’elle ait connu le commentaire de Servius qui fait du

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latin un imitateur de Théocrite29, mais c’est que, pour elle, la Grèce en général représente surtout l’authenticité ainsi que l’innocence solaire originelle. Elle insiste, d’ailleurs, sur l’ancrage des descriptions du monde paysan par Théocrite « dans le milieu sicilien où il a grandi » (CL, p. 316)30 et en cherche confirmation dans des uestigia, que sont des objets

rustiques du XIXe siècle conservés dans le musée de Palerme « dont la

forme et le dessin rappellent les beaux et naïfs objets qu’échangeaient les bergers du poète antique », de même que dans les survivances du folklore31 « quasi jusqu’à nos jours » avec « les concours musicaux et les

chants alternés d’un lyrisme exquis entremêlé çà et là de grosses injures » (CL, p. 316). Pour Yourcenar il existe une nature humaine une qui persiste à travers les âges. Déjà, dans les « Carnets de notes de Mémoires d’Hadrien » (OR, p. 529), elle affirmait : « La substance, la structure humaine ne changent guère. Rien de plus stable que la courbe d’une cheville, la place d’un tendon, ou la forme d’un orteil. Mais il y a des époques où la chaussure déforme moins. Au siècle dont je parle, nous sommes encore très près de la libre vérité du pied nu ». On pourrait ajouter que ce qui est vrai du second siècle l’est encore plus de l’époque de Théocrite32.

Continuant sa présentation de l’œuvre de Théocrite, elle met l’accent sur une certaine diversité, dans les genres, certains de ces poèmes étant des mimes, comme « Les Commères » ; dans les décors, qui ne sont pas exclusivement ruraux, mais peuvent être urbains (Cos, Alexandrie) ; dans les types de personnages qu’elle passe en revue. Elle en vient ensuite à ses pièces mythologiques, la transition consistant dans le réalisme de tous ces poèmes. Elle s’attache surtout à « Hylas » (une quinzaine de lignes) pour son atmosphère et sa vérité humaine : elle est sensible au « mystère des rives inhabitées », rapproche le sort d’Hylas attiré par les nymphes au fond de l’eau de celui des « adolescents des légendes celtiques ou scandinaves » séduits par des ondines (CL, p. 317) et voit ainsi dans le mythe une constante de l’imaginaire humain. Mais surtout elle trouve dans ce poème une amorce de « l’idéal classique », qu’elle définit ainsi, « une sorte de sérénité subsistant sous-jacente aux affres et aux vicissitudes humaines », et qu’elle perçoit dans le « mélange de l’immuable majesté des bois et la violente douleur humaine » d’Hercule « hurlant vainement le nom de l’ami perdu ». Elle donne, comme exemple pictural de ce classicisme, les paysages où « s’enfonce l’Orion aveugle de Poussin “en marche vers le soleil levant” » (CL, p. 317). Elle a consacré un essai au peintre, « Une exposition Poussin à New York » (PE, p. 468-473) en 1940, où elle ne cite pas l’Orion, mais où elle constate que « La Sainte Famille au bassin » « transpose d’emblée sur le plan divin une scène qui ferait ailleurs figure d’illustration ou de tableau de genre » et que le réalisme du détail est comme sublimé : « l’art de

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Poussin consiste à dégager de tout cela le général, l’éternel » (PE, p. 472), ce qui est aussi une caractéristique du classicisme. S’il n’est pas question là de Théocrite, Yourcenar n’en emploie pas moins une référence à l’idylle : le monde de Poussin est « [u]n monde idyllique et héroïque » (PE, p. 472) qui ne saurait se réduire au classicisme : le « Narcisse », « ce chef-d’œuvre crépusculaire qui fait honte à nos plates définitions de classique et de romantique se situe au bord de l’indicible » (PE, p. 473)33. On se trouve dans une situation assez analogue à celle de

Mémoires d’Hadrien, où l’empereur parvient à une forme de sagesse faite de résignation active, pourrait-on dire, puisqu’elle consiste à accepter l’inévitable tout en faisant de son mieux pour agir conformément à ses propres plans, dans une forme d’« humanisme qui passe par l’abîme » (SBI, p. 169).

Ensuite, Yourcenar retient « L’Ami », « sans doute le plus beau des derniers grands poèmes consacrés à “l’amour grec”,34 à une époque où

cette nuance d’amitié héroïque était déjà à peu près effacée » (CL, p. 317), poème qu’elle traduit ; elle évoque « L’Épithalame d’Hélène », où elle voit un possible « poème de circonstance », « La fête des moissons », dont la splendeur des récoltes et l’exubérance animale lui font penser « aux dernières esquisses mythologiques de Rubens, à ses puissantes figures telluriques ou célestes qui semblent contenir en elles toute la plénitude des saisons » (CL, p. 318). Par cette nouvelle référence picturale – pour un poète qui donne tant à voir – elle souligne que Théocrite est aussi un poète qui exprime la vigueur des forces de la nature. Yourcenar cite encore « La Quenouille » pour la « délicate galanterie » avec laquelle est évoquée « la discrète présence d’une épouse aimée » (CL, p. 318), puis « La Magicienne », qui n’est « rien qu’une humble amoureuse » (CL, p. 318)35. Dans ces deux derniers cas, c’est à la

réception littéraire de Théocrite qu’elle s’attache, car référence est faite à Racine, qui, d’une part traduisit « La Quenouille » pour le roi et, d’autre part, a pu se souvenir de l’ardeur de Simétha pour sa Phèdre. Ailleurs, dans « Mythologie grecque et mythologie de la Grèce », Marguerite Yourcenar montre comment Théocrite, comme, d’ailleurs, Xénophon, a influencé au moins dans le choix des noms « les romans à la mode du début du XVIIe siècle, L’Astrée ou Le Grand Cyrus », signe du

« triomphe de “la matière antique” » dans le domaine de la mythologie littéraire (PE, p. 442).

Yourcenar passe ensuite à des poèmes qu’elle dit « à mi-côte », entendant par là qu’ils n’ont pas la même fraîcheur dénuée d’artifices alexandrins. C’est le cas du « Cyclope » et d’« apocryphes, ou crus tels » comme « L’Amant », « L’Oaristys ». Il y a là du « fade » et du « sentimental » (CL, p. 318). Elle renvoie à La Fontaine pour « L’Amant », « gentiment traduit » par celui-ci36, mais en reprochant au

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poète français d’avoir édulcoré le texte en « chang[eant] le sexe de l’objet aimé sans embellir ce quelconque poème » (CL, p. 318) : elle regrette ainsi que l’innocente sexualité théocritienne37 ait été occultée dans les draperies d’une morale d’un autre temps. Elle vante, en revanche, la version qu’André Chénier a donnée de « L’Oaristys » : car le poète a « admirablement rendu » cette œuvre ; toutefois elle note que la « grâce un peu sèche [de Chénier] semble bien éloignée de l’ampleur théocritienne » (CL, p. 318).

Elle termine par « Les Pêcheurs » ; la question de l’authenticité lui importe peu et elle dit assez cavalièrement qu’ils ont été « adjugés par la critique moderne à Léonidas de Tarente ou à son école » (CL, p. 318) – ce qui est un peu rapide, puisque Ph.-E. Legrand, dans son édition de la CUF38, n’y retrouve pas l’aspect pompeux du style de Léonidas de Tarente –, mais elle ajoute plus loin qu’elle ne prend pas position. Toutefois, si elle conclut son exposé par ce poème, c’est visiblement parce qu’elle lui trouve de l’intérêt – et, de fait, elle l’a traduit : s’ils ne sont pas de Théocrite, ces vers « sont néanmoins dignes de Théocrite par la chaleureuse poésie qui se dégage d’humbles objets et d’humbles propos » (CL, p. 318-319)39. Les critères qu’elle utilise sont la vérité de la peinture, l’absence de sensiblerie romantique qui suscite une grande émotion, la communauté de sentiment qui fait que le lecteur se retrouve dans le « thème du rêveur déçu » (CL, p. 319).

Traduire

Dans sa présentation Yourcenar analyse une douzaine de poèmes de Théocrite. Elle en traduit trois et quelques vers d’un quatrième : « La Magicienne » (Id. II), « L’Ami » (Id. XII), « Les Pêcheurs » (Id. XXI) et seulement le début de l’Idylle I. Elle délaisse ainsi l’Idylle VII, qu’on a tendance à considérer aujourd’hui comme la plus importante, ce qui tend à montrer, si besoin était, qu’il s’agit d’un choix tout à fait personnel. Les propos élogieux qu’elle tient sur les trois premiers poèmes dans sa notice expliquent pourquoi ils ont été choisis : la peinture de la passion amoureuse dans « La Magicienne », celle de l’« amour grec » dans « L’Ami », la vérité et la poésie des humbles pour « Les Pêcheurs ». Les deux vers et demi de l’Idylle I semblent davantage le fait d’un exercice de style. La brièveté de l’extrait nous permet de nous arrêter un peu sur la traduction40 :

ἁδύ τι τὸ ψιθύρισµα καὶ ἁ πίτυς, αἰπόλε, τήνα ἁ ποτὶ ταῖς παγαῖσι, µελίσδεται, ἁδὺ δὲ καὶ τύ συρίσδες·

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Il est doux, chevrier, le murmure de ce pin, qui chante là à côté de ces sources ; non moins doux le son de ta syrinx. (trad. LEGRAND 1925)

Il est doux, ce grand pin tout murmurant au vent. Il est doux, chevrier, le bruit des eaux chantantes ;

Et tes pipeaux sont doux… (trad. Marguerite Yourcenar, CL, p. 328)

Marguerite Yourcenar a pris le parti de traduire la poésie par de la poésie, rendant les hexamètres dactyliques par des alexandrins. Mais elle a averti le lecteur dans sa Préface : « pas plus qu’une juste traduction en prose n’est une photocopie d’un texte, une traduction en vers, bonne ou non, n’offre un fac-similé des rythmes originaux : la dissimilarité des prosodies s’y oppose, comme celle des structures du langage au mot à mot de la prose. Le jeu et l’art consistent à chercher des équivalents » (CL, p. 36). Elle est pleinement consciente que l’alexandrin est « moins ample » (CL, p. 36 n. 1) que l’hexamètre et que les poètes grecs ont pratiqué aussi d’autres mètres.

Ainsi dans cette traduction intitulée « Début d’une idylle », au jeu binaire ἁδύ / ἁδὺ δὲ elle substitue un rythme ternaire plus ample en répétant trois fois l’adjectif « doux » tout en conservant quelque chose de la binarité par l’anaphore « Il est doux ». Yourcenar met ainsi l’accent, dans la droite ligne de Théocrite, sur l’harmonie, voire la communion, du chevrier avec la nature. Nous touchons là une des caractéristiques essentielles de l’imaginaire hellénique de Yourcenar, présent dès ses poèmes de jeunesse, la symbiose entre l’homme et l’univers. On notera aussi qu’au lieu de l’exotique « syrinx » elle choisit les plus communs « pipeaux », estompant ainsi l’arrière-plan mythologique…

On retrouve dans ses traductions des autres poèmes de Théocrite ce souci d’éviter les termes techniques qui renverraient trop le temps de Théocrite à un passé révolu et étrange. En cela elle est aux antipodes de la traduction “archéologique” d’un Leconte de Lisle qui joue sur la poésie de l’étrangeté des vocables41.

De la même façon, dans « La Magicienne », elle ne rend pas ἶυγξ, comme le fait Ph.-E. Legrand, par son calque français, « Iynx », incompréhensible sans note, mais par « oiseau magique », expression qui toutefois nécessite quand même une note où il est précisé qu’il s’agit d’« une sorte de rouet dont Simétha se sert pour ses conjurations » (CL, p. 319). C’est ainsi encore que « l’hippomane » « plante au pays d’Arcadie » dont « sont folles, dans les montagnes, toutes les jeunes pouliches et les rapides cavales »42 a disparu de la traduction, mais non

l’image équine, puisqu’on lit : « Qu’il [l’amant volage] se lasse de la palestre, et, de lui-même, / Me revienne, tout plein de feu, et bondissant, / Comme un poulain dans les prés verts de l’Arcadie ! » (CL, p. 320). On pourrait multiplier les exemples. Dans « L’Ami », elle traduit εἴσπνηλος

(12)

par « l’Amant » et ἀίτης par « l’Aimé » (CL, p. 324), mais en indiquant en note les mots grecs dont elle précise que ce sont « deux termes dialectaux »43. Elle omet certaines expressions proverbiales peu claires qui peuvent ralentir le dialogue dans « Les Pêcheurs »44. Elle supprime les clichés du type « Le char de Séléné n’était pas encore au milieu de sa course » (« Les Pêcheurs », v. 19 : κοὔπω τὸν µέσατον δρόµον ἄνυεν ἅρµα Σελάνας) au profit d’une notation plus réaliste : « La lune encor n’était qu’à mi-chemin des cieux » (CL, p. 326). Mais, inversement, il lui arrive de créer des images qui doivent contribuer à une atmosphère de mystère : c’est ainsi que dans « L’Ami » il est question des « gens de Mégare aux fortes mains ailées / D’avirons » (CL, p. 324) pour rendre Μεγαρῆες, ἀριστεύοντες ἐρετµοῖς (v. 27 : « Habitants de Mégare […], qui excellez au maniement des rames », trad. Legrand) ; on aura reconnu là un souvenir du remigio alarum (« avec ses ailes comme des rames »45)

de Virgile (Énéide, I, v. 301) qui désigne ainsi le vol d’Hermès vers Carthage. Par un subtil retour des choses, voilà que Yourcenar emprunte à Virgile, l’imitateur, pour traduire Théocrite, l’original.

Elle supprime aussi des détails pour aller à l’essentiel : toujours dans « La Magicienne » « La fille d’Euboulos, Anaxo, vint chez nous comme canéphore au sanctuaire d’Artémis »46 devient simplement « La prêtresse, la jeune Io » (CL, p. 321) et « La nourrice de Theucharidas, Thrassa, morte depuis peu, qui habitait alors porte à porte avec moi »47 est « [m]a voisine »48.

Yourcenar insiste sur la souffrance amoureuse et le désir de rendre mal pour mal : « Delphis m’a fait du mal ; moi, à l’intention de Delphis, je brûle cette branche de laurier ; et comme elle craque fort en prenant feu, comme elle s’est embrasée tout d’un coup sans laisser même de cendre visible, ainsi puisse la chair de Delphis s’anéantir dans la flamme »49 devient : « Delphis m’a fait du mal : qu’il souffre ; j’ai

souffert. / Que sa chair se dessèche ; et qu’il brûle et qu’il meure, / Ou qu’il m’aime à nouveau, et revienne, et demeure » (CL, p. 320) ; mais, comme on le voit, Yourcenar met aussi en lumière le trouble de l’amante, qui unit haine et amour en manifestant immédiatement après ses imprécations son désir de voir l’amant revenir à elle, ce que l’amante de Théocrite n’exprimait qu’après le refrain en comparant la fonte de la cire à sa volonté de voir Delphis fondre d’amour pour elle et les rotations du disque d’airain utilisé pour le charme à son désir de voir tourner Delphis autour de sa porte. Toutefois le ressentiment de Simétha semble plus grand chez Marguerite Yourcenar ; en effet, si le poème se termine, comme chez Théocrite, par l’idée qu’elle devra supporter le poids de son amour, son désir d’anéantissement de l’aimé est plus accentué, car la malédiction était, chez le poète grec, différée :

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νῦν µάν νιν φίλτροις καταδήσοµαι· αἰ δ’ ἔτι κά µε λυπῇ, τὰν Ἀίδαο πύλαν, ναὶ Μοίρας, ἀραξεῖ· τοῖά οἱ ἐν κίστᾳ κακὰ φάρµακα φαµὶ φυλάσσειν, Ἀσσυρίω, δέσποινα, παρὰ ξείνοιο µαθοῖσα

Maintenant donc, je veux l’enchaîner par des philtres. Mais s’il m’afflige encore, c’est à la porte d’Hadès qu’il frappera, par les Moires ! Telle est, je le déclare, la puissance des poisons que je garde pour lui dans un coffret, et que m’a enseignés, souveraine, un étranger d’Assyrie. (trad. LEGRAND 1925, v. 159-162)

Outre l’estompage d’une terminologie trop antique, toute condition a disparu dans la traduction de Marguerite Yourcenar :

[…] Mais j’ai dessein de me venger. Je garde dans un coffre un poison étranger, Assyrien, qu’on dit insidieux et fort. Et dès demain Delphis aux portes de la mort Ira frapper. (CL, p. 323)50

La traduction de Marguerite Yourcenar est ici plus courte que l’original : 144 vers au lieu de 166, et va dans le sens d’une plus grande intensité, mais ce n’est pas une constante : pour « L’Ami », on a 36 vers au lieu de 37, et pour « Les Pêcheurs », la proportion s’inverse : 77 vers au lieu de 67.

Dans « L’Ami », Marguerite Yourcenar laisse de côté l’imagerie infernale et les poncifs pour condenser l’expression du désir d’immortalité du souvenir amoureux :

εἰ γὰρ τοῦτο, πάτερ Κρονίδη, πέλοι, εἰ γάρ, ἀγήρῳ ἀθάνατοι, γενεῇς δὲ διηκοσίῃσιν ἔπειτα

ἀγγείλειεν ἐµοί τις ἀνέξοδον εἰς Ἀχέροντα· ἡ σὴ νῦν φιλότης καὶ τοῦ χαρίεντος ἀίτεω πᾶσι διὰ στόµατος, µετὰ δ’ ἠιθέοισι µάλιστα.

Puisse-t-il en être ainsi, auguste fils de Cronos ! puisse-t-il en être ainsi, Immortels qui ne vieillissez point ! Puisse, dans deux cents générations d’ici, quelqu’un venir me dire aux bords de l’Achéron d’où l’on ne ressort pas : “L’amour qui t’unissait à ton charmant bien-aimé est maintenant sur les lèvres de tous, principalement dans le monde des jeunes gens” (trad. LEGRAND 1925, v. 17-21)

Les cinq vers en deviennent deux, plus percutants :

Et que toujours, de lendemains en lendemains,

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De même, elle omet cinq vers où le narrateur de Théocrite célèbre l’aimé qui, s’il lui arrive de lui faire de la peine, sait se faire pardonner. À ces mièvreries sentimentales Marguerite Yourcenar préfère l’exaltation de l’amour héroïque ; c’est pourquoi elle développe l’allusion à « Dioclès le tendre amant » (trad. LEGRAND 1925, v. 29 : Διοκλέα τὸν φιλόπαιδα) en insérant pour ainsi dire dans sa traduction du poème une partie de la note de Ph.-E. Legrand qui expliquait que Dioclès « avait perdu la vie dans un combat en sauvant celui qu’il aimait »51 : Yourcenar précise, en effet, « Qui jadis, sous vos murs, prit sa part du combat / Pour sauver un ami, et près de lui tomba » (CL, p. 325). Nous retrouvons là un idéal – cher à l’auteur moderne – qui est aussi celui d’Hadrien quand il fait restaurer « la tombe où Épaminondas tué en pleine bataille, repose auprès d’un jeune compagnon frappé à ses côtés » (MH, p. 408), et qui, racontant l’épisode de chasse où il a sauvé la vie d’Antinoüs, commente : « nous nous sentions pourtant rentrés dans ce monde héroïque où les amants meurent l’un pour l’autre » (OR, p. 432).

Élagage et infléchissement du sens se retrouvent dans « Les Pêcheurs », où Yourcenar supprime les cinq premiers vers à valeur sentencieuse. Elle ne reprend pas exactement les mêmes éléments du décor de la cabane52, insistant sur son dénuement, mais aussi ajoutant du

pittoresque dans les méthodes de pêche : « Des lignes, des épieux, et des fagots qui font, / Plantés dans l’eau de quelque crique, un labyrinthe / Où l’imprudent poisson va s’engager sans crainte. / Des pots pour la langouste et le poulpe […] » (CL, p. 325). Dans le récit du rêve où le pêcheur imagine prendre un poisson tout en or, Marguerite Yourcenar, en particulier, par le rejet, met bien en évidence les efforts fournis par le pêcheur, mais elle n’entre pas dans le détail de certaines opérations précisées par le texte grec : ferrer à nouveau le poisson, puis lui laisser du fil pour ne pas casser. D’autre part, la leçon que donne l’autre pêcheur diffère quelque peu : au lieu que ce rêve soit interprété comme la promesse d’une bonne pêche si l’on scrute bien les côtes et s’intéresse aux poissons véritables, Yourcenar insiste sur la fatalité du travail pour le pauvre : « Sache / Que jusqu’au bout notre vieillesse est condamnée / À besogner sur mer, journée après journée » (CL, p. 328). La morale tirée de l’anecdote se trouve ainsi détournée, car elle est déplacée de l’affirmation de la nécessité de mobiliser ses forces pour subvenir à ses besoins à la condamnation du pauvre à un travail incessant pour survivre.

Pour conclure, on pourrait dire que Marguerite Yourcenar se livre à une véritable appropriation de Théocrite, qu’elle réécrit à sa façon, lui imprimant ses propres rythmes en estompant ce qui est historiquement trop marqué pour faire de lui un Théocrite de toujours. Elle se défie de

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tout ce qui peut faire écran entre le texte antique et le lecteur et lui substituer une tonalité d’une autre époque du passé : c’est ainsi que, bien qu’elle apprécie les autres traductions des poètes grecs par J.-M. Edmonds53, « [elle] n’aime pas son Théocrite, pour lequel il s’inspire des pastorales anglaises de la Renaissance » (YO, p. 115). Dans ses commentaires, elle retient surtout de Théocrite – et à travers son art – la lumière, l’aspect visuel, la vérité de la peinture de la passion et de la peinture des petites gens. Théocrite est aussi pour elle, à l’image de la Grèce : il appartient au monde des origines et des plaisirs innocents. Si la source est un élément du locus amoenus bucolique, la comparaison de Théocrite avec Virgile fait que, pour Marguerite Yourcenar, qui n’aborde pas en amont la question de l’intertextualité théocritienne, c’est Théocrite lui-même qui est source.

NOTES

1 Nous utilisons les abréviations usuelles de la Société Internationale d’Études

Yourcenariennes pour les œuvres de Marguerite Yourcenar. La pagination, pour les

Œuvres romanesques et les Essais et Mémoires est celle de la « Bibliothèque de la

Pléiade ».

2 SAVIGNEAU 1990, p. 58.

3 1935 (F, p. 1075). Pour Feux et les pièces de théâtre, nous indiquons la date de

composition.

4 1932, 1933 ou 1934 (ThII, p. 176), puis 1944 (ThII, p. 177). 5 1943 (OR, p. XXII ; ThII, p. 99) ou 1944 (ThII, p. 20). 6 1942 (OR, p. XXII).

7 Nous faisons suivre chaque volume de son numéro dans BERNIER 2004. 8 SII, p. 224.

9 Il y figure à côté, pour les poètes antiques, d’Homère, de Sophocle, des anacréontiques

et des « classiques latins » sans plus de précision et de « deux ou trois ouvrages sur les présocratiques, particulièrement Héraclite » ; elle signale aussi « les traductions » de Leconte de Lisle.

10 SII, p. 225-226. D’autres listes, qu’elle a établies, nous apprennent qu’elle a lu « avant

la douzième année » « quelques passages » de Virgile, L’Odyssée, et Les Oiseaux d’Aristophane, SII, p. 222.

11 En fait, elle pensait, dans Mémoires d’Hadrien, à un « fragment […] tiré des tragédies

perdues », HZ, p. 558. Sur l’obscurité de Lycophron, cf. CUSSET, PRIOUX 2009.

12 Nous désignons, dans cet article, les poèmes de Théocrite par les titres que leur donne

Marguerite Yourcenar.

13 Marguerite YOURCENAR, La Couronne et la Lyre, Paris, Gallimard, 1979, p.

324-325.

14 TGS, p. 290-291.

15 TGS, p. 290-291 ; elle continue : « Nous sentons que tel cri de passion dans La

Magicienne de Théocrite a dû être proféré à peu près de la sorte ». Dans Pindare, EM,

p. 1501, elle relevait déjà le lien du style de Théocrite avec le réel, puisqu’elle le présentait comme inspiré par les « paysans [siciliens] habiles à lancer [de] longs couplets alternés ». Cet aspect a été examiné par LEGRAND 1898. Plus tard, elle retient surtout l’écart entre la littérature et ce que serait une tonalité authentique : de l’Antiquité, « [n]ous

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n’avons même pas un dialogue amoureux, cela n’existe que dans le style poétique comme celui des Idylles de Théocrite » (YO, p. 150).

16 LEGRAND 1924, p. 106. Yourcenar semble aussi ancrer Théocrite dans la réalité

quand, dans Pindare, p. 1500, elle constate que Théocrite et Pindare ont aimé « la claire Aréthuse », cf. Idylles, I, v. 117 ; XVI, v. 102.

17 LEGRAND 1924, p. 108.

18 Marguerite Yourcenar parle d’idylles pour désigner une affection sentimentale qui ne se

concrétise pas forcément, comme ici, ou dans le cas de Fernande, qui, visitant l’Allemagne dans sa jeunesse, remplie d’un besoin d’aimer qu’elle « ennuage de littérature » (SP, p. 916), a dû voir « s’ébaucher » « de pâles idylles » dans la pension de famille où elle était hébergée (SP, p. 917), avant de connaître « son idylle allemande » dans une clairière, assise sur le gazon avec un livre, où l’a rejointe « un jeune forestier à culotte courte » (SP, p. 918) ; c’est aussi le cas de la jeunesse d’Egon : « les vagues idylles moitié rieuses, moitié bagarreuses, où l’on ramasse ensemble les myrtilles, renverse sournoisement un panier, et barbouille de force les visages et les mains » (QE, p. 1260). Le mot peut être employé aussi pour évoquer la félicité espérée avec, pour pendant, un terme qui renvoie aux revirements du sort ou des sentiments : le narrateur de

La Nouvelle Eurydice présente son âge de vingt-deux ans comme « l’âge où l’on

commence à chercher autour de soi les personnages de l’idylle, et peut-être du drame, qu’on se croit dû par la vie » (NE, p. 1251) ; dans les récits de l’ami d’Egon, Franz, le terme renvoie à la légèreté d’une existence heureuse et est opposé à une expression qui évoque les malheurs de l’existence : « l’Allemand se raconte, tantôt sur le ton de l’idylle et tantôt sur celui du roman noir » (QE, p. 1311).

19 La tonalité chez Octave Pirmez, selon Marguerite Yourcenar, attentive à la mort

sanglante des animaux, est bien différente de celle du sacrifice rituel évoqué par Tityre dans la Bucolique I (v.7-8) de Virgile.

20 Pline le Jeune, Ep., IV, 14, 9 : Proinde, siue epigrammata siue idyllia siue eclogas siue,

ut multi, poematia seu quod aliud uocare malueris, licebit uoces ; ego tantum hendecasyllabos praesto (« Ainsi donc, préfères-tu les appeler “Épigrammes”, “Idylles”,

“Églogues” ou, comme beaucoup le font “Petits poèmes”, libre à toi ; je ne cautionne, moi, que “Hendécasyllabes” », trad. MÉTHY 2011). Cf. aussi, DUBEL 2005, p. 2140 : « le terme grec adopté par les commentateurs antiques de Théocrite, eidúllion, ne signifie pas autre chose que “forme brève”, “petit poème” ».

21 En fait, le dessin de Maillol a été choisi par l’éditeur et n’a pas été vu par Yourcenar

avant la publication ; elle désapprouve ce choix : « quelle que soit mon admiration pour d’autres dessins de cet artiste, celui-ci ne me paraît pas du tout convenir au texte des poèmes » (lettre du 1er novembre 1956 à Alexis Curvers, HZ, p. 586-7) ; cf. DELCROIX,

GRAVET 2008.

22 P. 13. L’édition définitive, Paris, Gallimard, 1984, p. 13, supprime « Comme un baiser

fait à la nuit ».

23 Sur les origines du mythe en Arcadie, cf. KOSSAIFI 2012.

24 Marguerite Yourcenar, Sources II, Élyane DEZON JONES éd., Paris, Gallimard, 1999,

p. 40 : on lit dans les « Projets 1973 » « La Couronne et la Lyre (presque terminé, ajouter un Théocrite, un Lycophron, un Apollonius, un Musée) ».

25 Dans la « Préface » de La Couronne et la Lyre (p. 31) Yourcenar présente Théocrite

comme faisant partie des « poètes salariés » « à la cour des Ptolémées ».

26 LEGRAND 1924, p. 97.

27 Yourcenar possédait un exemplaire en anglais et un autre en français d’Erwin

PANOFSKY, Meaning in the Visual Arts, Garden City, New York, Doubleday and Company Inc., 1955 et L’Œuvre d’art et ses significations, traduit de l’anglais par Marthe et Bernard TEYSSÈDRE, Paris, Gallimard, 1978, portant respectivement les n° 4210 et 4208 dans BERNIER 2004.

(17)

28 Réécriture de « Abraham Fraunce traducteur de Virgile : Oscar Wilde », Revue bleue,

20, 19 octobre 1929, p. 621-627.

29 Préface au Commentaire de Servius aux Bucoliques et préface de son Commentaire aux

Géorgiques ; cf. DASPET 2007 ; DASPET 2011.

30 Dans sa « Préface » elle évoque le « souffle » du « génie » de Théocrite dans les

« saynètes de la vie populaire » (CL, p. 18) ; cf. aussi la n. 15.

31 Nous remercions Christine Kossaifi de nous avoir fait remarquer que la thèse de

LEGRAND 1898, étudie en détail l’influence des chants folkloriques siciliens sur Théocrite.

32 Mais il est à remarquer qu’aller pied nu dans l’idylle n’est pas sans risque (Théocrite,

Idylle IV, v. 50-57).

33 Cf. SAINT 1998 ; SAINT 2000.

34 C’était déjà le cas dans la « Préface », où Yourcenar l’associait à « Hylas » (CL, p. 18). 35 Il s’agit « non d’une professionnelle de la sorcellerie, mais d’une pauvre fille de petite

condition qui s’efforce de ramener à elle un amant volage » et le poème « donne une idée plus franche des mœurs populaires [que dans bien des œuvres littéraires]» (CL, p. 20).

36 Yourcenar indique « Fables, XII, 26, Daphnis et Alcimadure », mais cette fable porte

d’ordinaire le n° 24 ; par exemple, COLLINET 1991.

37 Bien que désormais ce soit l’adjectif “théocritéen” qui semble s’être imposé, nous

utilisons ici l’adjectif employé par Marguerite Yourcenar.

38 LEGRAND 1967 [1927], p. 48.

39 Marguerite Yourcenar critique les « érudits » qui tranchent de l’authenticité d’un texte

d’après des raisons stylistiques, car un changement de sujet ou l’évolution de l’écrivain peuvent susciter un changement de style ; elle donne alors comme exemples Théognis et Théocrite (YO, p. 236).

40 Nous indiquons comme référence académique la traduction de LEGRAND 1925 ou

1967 [1927].

41 Sur ces questions de traduction, cf. BERNARD-PRADELLE, LECHEVALIER 2013. 42 V. 48-9 (trad. Ph.-E. LEGRAND) : ἱπποµανὲς φυτόν ἐστι παρ’ Ἀρκάσι, τῷ δ’ ἔπι πᾶσαι

/ καὶ πῶλοι µαίνονται ἀν’ ὤρεα καὶ θοαὶ ἵπποι.

43 Dans son édition LEGRAND 1925, p. 82, propose, d’ailleurs, une note où il explique

l’étymologie de ces deux termes.

44 Ainsi : […] τί γὰρ ποιεῖν ἂν ἔχοι τις / κείµενος ἐν φύλλοις ποτὶ κύµατι µηδὲ καθεύδων;

/ ἀλλ’ ὄνος ἐν ῥάµνῳ τό τε λύχνιον ἐν πρυτανείῳ· / φαντὶ γὰρ ἀγρυπνίαν τάδ’ ἔχειν : « Que pourrait-on faire couché sur les feuilles auprès des flots, si l’on ne sommeille pas, mais qu’on soit comme un âne dans les épines ou la lampe du prytanée, qui, dit-on, ne dorment jamais ? » (trad. LEGRAND 1967 [1927], v. 34-37).

45 Trad. HEUZÉ 2015.

46 Trad. LEGRAND, v. 66-7 : ἦνθ’ ἁ τωὐβούλοιο καναφόρος ἄµµιν Ἀναξώ / ἄλσος ἐς

Ἀρτέµιδος.

47 Trad. LEGRAND, v. 70-71 : καί µ’ ἁ Θευχαρίδα Θρᾷσσα τροφός, ἁ µακαρῖτις, /

ἀγχίθυρος ναίοισα.

48 Marguerite Yourcenar justifie les modifications apportées par le souci de « rendre

surtout quelque chose de la fougue et du mouvement de l’original » (CL, p. 471).

49 Trad. LEGRAND, v. 23-6 : Δέλφις ἔµ’ ἀνίασεν· ἐγὼ δ’ ἐπὶ Δέλφιδι δάφναν/ αἴθω· χὠς

αὕτα λακεῖ µέγα καππυρίσασα / κἠξαπίνας ἅφθη κοὐδὲ σποδὸν εἴδοµες αὐτᾶς, / οὕτω τοι καὶ Δέλφις ἐνὶ φλογὶ σάρκ’ ἀµαθύνοι.

50 L’analyse que Ph.-E. Legrand effectue de l’Idylle II révèle beaucoup moins de

véhémence chez l’amoureuse délaissée Simaitha, dont la colère retombe : « Aussi, après des alternatives d’abattement et de demi-confiance, d’attendrissement et de haine, le monologue s’achèverait sur une note menaçante, si la sérénité du ciel et de la nuit n’apaisait pour un temps l’âme meurtrie » (LEGRAND 1924, p. 81).

(18)

51 LEGRAND 1925 p. 83 n. 3.

52 « La description du mobilier de la cabane et des instruments de la pêche est légèrement

écourtée », « Notes », CL, p. 471.

53 J. M. Edmonds éd., Greek Bucolic Poets (Theocritus, Bion, Moschus), Cambridge,

Harvard University Press, Loeb classical Library, ouvrage que Marguerite Yourcenar possède dans sa bibliothèque, cf. supra.

BIBLIOGRAPHIE

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Europe (XIXe-XXe siècles), L. BERNARD-PRADELLE, C. LECHEVALIER éd.,

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critique de l’Antiquité à la Renaissance, Bruno MÉNIEL, Monique BOUQUET,

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LEGRAND 1967 [1927] = Bucoliques grecs II Pseudo-Théocrite, Moschos,

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(19)

l’exil, A. DE MEDEIROS, B. DEPREZ éd., Louvain-la-Neuve,

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SAVIGNEAU 1990 = J. SAVIGNEAU, Marguerite Yourcenar. L’invention

d’une vie, Paris, Gallimard, 1990.

Les ouvrages de Marguerite Yourcenar sont indiqués avec les abréviations de la Société Internationale d’Études Yourcenariennes et sont cités, quand ils sont publiés dans cette collection, d’après l’édition de la “Bibliothèque de La Pléiade” :

Œuvres romanesques, Paris, Gallimard, coll. “Bibliothèque de La Pléiade”,

2005 : OR

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Références

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