33-653-A-10
Cancers
du
pancréas
exocrine
U.
Duran,
D.
Brisbois,
R.
Materne,
C.
Tchuisse
Noukoua,
N.
Blétard,
E.
Mutijima,
A.
Nchimi
Les
tumeurs
du
pancréas
exocrine
sont
fréquentes
et
souvent
létales.
Sur
le
plan
histologique,
l’adénocarcinome
canalaire
en
est
le
type
le
plus
fréquent.
Cet
article
décrit
les
signes
cliniques,
bio-logiques
et
radiologiques,
ainsi
que
la
contribution
respective
de
ceux-ci
au
diagnostic
et
à
la
prise
en
charge
des
tumeurs
du
pancréas
exocrine.
Un
algorithme
décisionnel
prenant
en
compte
la
valeur
diag-nostique
et
le
coût
de
chaque
technique
dans
l’évaluation
des
cancers
pancréatiques
est
discuté.
Une
mention
spéciale
est
accordée
à
l’utilisation
optimale
des
progrès
en
imagerie
médicale,
ainsi
que
leurs
bénéfices
escomptés.
Une
bonne
connaissance
de
la
sémiologie
radiologique
permet
actuellement
un
pronostic
de
résécabilité
précis
des
tumeurs
pancréatiques.
L’impact
des
progrès
de
l’imagerie
sur
la
courbe
de
mortalité
des
cancers
du
pancréas
exocrine
demeure
cependant
modeste.
En
effet,
la
mortalité
des
cancers
du
pancréas
exocrine
dépend
essentiellement
de
la
résécabilité
des
tumeurs.
Cette
dernière
est
souvent
proportionnelle
à
la
taille
de
la
tumeur
à
sa
découverte.
Pour
diverses
raisons
incluant
la
situation
anatomique
du
pancréas,
les
signes
cliniques
susceptibles
de
justifier
le
recours
à
l’imagerie
à
la
recherche
d’un
cancer
du
pancréas
manquent
de
précision
diagnostique,
tandis
que
les
seules
indica-tions
d’imagerie
chez
les
sujets
asymptomatiques
sont
les
risques
génétiques
élevés.
L’amélioration
de
l’estimation
du
risque
de
cancer
du
pancréas
sur
la
base
d’analyses
biologiques,
combinée
aux
bonnes
valeurs
diagnostiques
des
techniques
d’imagerie,
pourraient
donc
in
fine
faire
reculer
la
mortalité
des
cancers
du
pancréas.
©2015ElsevierMassonSAS.Tousdroitsréservés.
Mots-clés :Cancers;Résécabilité;Cancersexocrines;Adénocarcinome;Pancréas;Diagnostic
Plan
■Introduction 1
■Considérationstechniquesenimageriedupancréas 2
Échographie 2
Tomodensitométrie 2
Imagerieparrésonancemagnétique 2
Tomographieparémissiondepositrons 3
■Élémentssémiologiquesenimageriepancréatique 3
Anomaliesdelatrophicité 4
Voiesbiliairesetcanauxpancréatiques 4
Changementdespropriétéstissulaires 4
Envahissementdesstructureslocorégionales 6
■Typeshistologiques 10
Adénocarcinomecanalaireetvariants 11
Autrestumeursdupancréasexocrine 13
■Diagnosticdifférentiel 14
Affectionstumorales 15
Affectionsnontumorales 16
■Conclusion 17
Introduction
L’incidenceducancerdupancréasseclasseàlatreizièmeplace chezl’homme.Samortalitéenestla huitièmecauseparcancer sur l’ensemble du globe, et la quatrième dans les pays déve-loppés[1]. EnEurope, le nombre annuel moyen de décès varie actuellemententrecinq etdixpar 100000habitants.Il semble avoiraugmentédanstouslespaysdepuislesannées1950jusqu’à lafindesannées1980pourleshommes,etdesannées1990pour les femmes[2]. Cette stabilisation est mise en rapport avec la maîtrisedesfacteurscarcinogènesconnus,aupremierrang des-quels le tabagisme[2]. Malgré une avancée technologique sans cesse croissantede l’imagerie,aucun effet bénéfique directn’a été démontré jusqu’alors sur la survie des patients. Ce béné-fice potentiel peut cependant être anticipé,dans la mesure où les méthodes actuelles d’imagerie permettent de détecter des tumeursde petite taille (moins de 2cm) dont le pronostic est meilleurqueceluides tumeursclassiquementdécouvertesàun stadeavancé[3].Quelquesdifficultésstratégiquesetdiagnostiques restent néanmoins bien présentes sur la voie d’un infléchisse-ment de la courbe de mortalité du cancer du pancréas. Elles incluentd’unepartlaproblématiquequereprésentelasélection
EMC-Radiologieetimageriemédicale-abdominale-digestive
1
de groupesdepersonnes àdépister,au seindelaquelle le gain en termes de survie serait réel, et d’autre part la difficulté iconographique à différencierles tumeursdu pancréasde cer-taines anomalies non tumorales. Il est ainsi impératif que les patients avecune prédispositiongénétique,souslaforme d’un syndromedecancers héréditairesoud’unemutation génétique déterminée,quireprésententenviron10%despatientsavecun cancer du pancréas[4] soient soumis à une surveillance régu-lière. En revanche, dans la population générale, la recherche des signes cliniques liés auxcancers du pancréas, ainsi que le dosage biologique des enzymes pancréatiques et de l’antigène CA19-9,n’ontpasla spécificiténécessaire,etsontdoncdepeu d’utilitépréventive.Ilsgardentcependanttouteleurutilitédans l’algorithme diagnostique chezdespatients symptomatiqueset suspects. Les difficultés du dépistage des tumeurs du pancréas confinentl’imageriedansunrôledesecondeligneoù elledoit établir des critères de caractérisation et de résécabilité tumo-rale.Danscetarticle,lastratégiediagnostiquetirantlemeilleur partidesprincipalestechniquesquesontl’échographie,la tomo-densitométrie(TDM),l’imagerieparrésonancemagnétique(IRM) et la tomographie par émission de positrons (TEP) fait l’objet d’unediscussionexhaustive.Lesprincipauxeffetsdel’avènement destechniquesencoupessontlarelégationausecondplandes techniques diagnostiques ancillaires comme la cholangiopan-créatographierétrogradeendoscopique(CPRE)etl’artériographie, ainsi que la diminution du nombre de laparotomies explora-trices.
Considérations
techniques
en
imagerie
du
pancréas
L’échographie, la TDM, l’IRM et la TEP sont les techniques d’imagerie actuellement le plus souvent utilisées pour le diag-nosticetlamiseaupointdestumeurspancréatiques.Quelques approchesconsensuellessurlamanièred’acquériretdetraiterles imagesontrécemmentvulejour,alorsqued’autressonttoujours matièreàdiscussion.
Échographie
L’examenéchographique du pancréasse pratique à jeun par voietransabdominalemédiane.Cetexamendepremièreligneet facilementaccessiblepossèdel’avantagedese réaliserentemps réel,etd’explorerdemanièrenonirradiantelepancréas,lefoie, lesvoiesbiliairesetlesorganesadjacents.Récemment,les tech-niques d’imagerieharmonique tissulaire,de balayageangulaire multipleetdefiltrageadaptatifontpermisd’améliorerlerapport signalsurbruitdel’imageéchographiquesurlestransducteursde bassefréquenceutiliséspourl’imageriedupancréas,cecisanseffet surlacadencedecalculdesimages.Latechnologieharmonique permetégalementuneexplorationdemeilleurequalitéen profon-deurenaméliorantlavisualisationdupancréasetdesstructures rétropéritonéales.
Lafaisabilitédel’échographietransabdominalerestetributaire du statut pondéraldes patients, dela fenêtre acoustique et de l’opérateur.Afin depallier cesinconvénients,l’approche endo-scopique qui permet de conduire des sondes échographiques radialesoulinéairesdehauterésolutiondirectementaucontact du pancréasviala lumièregastriqueouduodénalea vulejour au cours des années1980. Cet appareillage peut être combiné à une aiguille permettant en tempsréel un prélèvement cyto-logique par aspiration du tissu pathologique. La technologie harmoniquea permisledéveloppementetl’utilisationd’agents de contrasteéchographiques intravasculairesrenforc¸ant les fré-quencesharmoniques etpermettantuneétudedelaperfusion. Ilsagissentenaugmentantaussibienl’intensitédusignal Dop-pler couleur que le contraste entre tissus sain et tumoral en modeB-harmonique.Cesagentsdecontrastepeuventêtreutilisés aussibien enéchographietransabdominale[5] qu’en échoendo-scopie[6].
Tableau1.
Délaimoyen(secondes)entreledébutdel’injectionetl’acquisitiondes
différentesphasesentomodensitométrie,enfonctiondudébit[8].
Débit Phase artérielle Phase pancréatique Phase hépatique Phase d’équilibre 3ml/s 30 50 70 >120 4ml/s 25 45 65 >120 5ml/s 20 40 60 >120
“
Point
fort
Échographie• Techniquelargementdisponible. • Réalisationentempsréel. • Techniquenonirradiante.
• Possibilitéd’utilisationdecontrasteintraveineux. • Possibilitéd’utilisationendoscopiqueinterventionnelle.
Tomodensitométrie
LaTDMestunetechniqueefficacequiest,deparsa disponibi-lité,latechniquelaplussouventutiliséeaprèsl’échographieen casdesuspiciondecancerpancréatique. Surleplan technique, aucune étude à notre connaissance n’a démontré la supério-ritéd’uneopacificationoraleaumoyend’unagentdecontraste positif par rapport à un agent de contraste négatif dans le bilan d’extensionpéritonéaldes cancerspancréatiques.En pra-tique,l’administrationoraled’unagentdecontrastepositifaltère la qualité des reconstructions vasculaires et peut masquer des calcifications. Afin d’obtenir une meilleure distension gastro-intestinaleetdelimiterlepéristaltisme,ledécubituslatéraldroit etlaspasmolyseintraveineuseontétéproposés[7].L’acquisition en contraste spontané est débattue pour deux raisons: d’une partlescalcificationsqu’ellepermettraitdedémontrersont éga-lement visibles après contraste intraveineux et, d’autre part, l’analysedel’évolutiondesdensitéstissulairesdansletempsaprès l’administrationintraveineused’unagentdecontrasteiodé per-metdedifférencierunrehaussementd’unezonespontanément hyperdense mais non rehaussée[7]. La technique par multidé-tecteurs restitueles donnéesextraitesdela rotationde tubes à rayonsXauxquels faitface une rangée deplusieursdétecteurs. Cette technique,combinée à unaccroissementde lavitessede traitement informatique et descapacités de stockage,a permis de diminuerd’un facteurdeprès dedixl’épaisseur descoupes et le temps d’acquisition. La TDM permet donc actuellement d’étudierplusieurs«volumes»devoxelsisotropiquesdeprèsde 1mm3 acquisenquelquessecondesà un tempsdéterminé par
rapportàl’administrationintraveineused’unagentdecontraste iodé.LeTableau1 définitlesdifférentes phasesenfonctiondu débit d’injection chez des patients dont la fonction cardiaque n’estpasaltérée[8].Lavitessedesnouveauxscannersa étémise à profit parcertaines équipespour réaliserune phaseartérielle «pure» destinéeà préciser le bilanvasculaire, parfoisau détri-mentdunombredephases.Cettephaseartériellen’acependant pasdémontrésasupérioritéparrapportàlaphasepancréatique dans le bilan de résécabilité des cancers pancréatiques[8,9].En revanche,ellepeutpermettreunemeilleuredétectiondestumeurs hypervasculaires[10].
Imagerie
par
résonance
magnétique
Lesexamensdoiventidéalementêtreréalisésaprèsspasmolyse intraveineuse.L’opacificationdigestivepeutêtrepositiveou néga-tiveenpondérationT2,enfonctiondel’indicationdel’examen. Enpratique,descoupesenpondérationT2,diffusionetenécho de gradient en pondérationT1 en phase et en opposition de
Cancersdupancréasexocrine33-653-A-10
“
Point
fort
Tomodensitométrie
• Granderésolutionspatiale.
• Granderapiditéd’acquisitiontridimensionnelle permet-tantdesreconstructionsvasculaires.
• Possibilitédedétectiondescalcifications. • Largechampdevue.
• L’acquisitionpeutêtrecoupléeàcelled’uneTEP.
phase sontobtenues avant une étude dynamique pondéréeT1 avecsaturation du signal dela graisse avant etaprès adminis-tration intraveineuse d’un chélate de gadolinium. Les phases d’acquisitiondynamiqueaprèscontrasteintraveineuxsont simi-lairesàcellesdelaTDM.Lespropriétésnonirradiantesdel’IRM permettentdes’affranchirdelalimitationdunombredephases, rendantpossiblel’acquisitionenroutinedelaphaseartérielleet delaphasepancréatique. Lesséquencesà fortepondérationT2 doiventégalementêtre réalisées, carellespermettentd’obtenir uneimageriecanalairesansavoirrecoursauxagentsdecontraste àexcrétionbiliaire.L’usaged’unautretyped’agentdecontraste (àbasedemanganèse),lemangafodipirtrisodium,quipossèdela propriétédesefixersurlepancréasetlefoie,àl’inversedestissus tumoraux,s’estavérésupérieuràlaTDMpourladélimitationde petitestumeurspancréatiquesethépatiques[11].Cetyped’agent decontrasten’estcependantpasrecommandéenroutinedansla littérature.
“
Point
fort
Imagerieparrésonancemagnétique
• Techniquenonirradiante. • Excellenterésolutiontemporelle. • Excellentecaractérisationtissulaire.
• Possibilitéderéaliserunecholangiopancréatographie.
Tomographie
par
émission
de
positrons
La TEP est une technique d’imagerie fonctionnelle dont le marqueurle plussouventutilisé enoncologieest le 18-fluoro-désoxy-glucose (18-FDG). Cette molécule est un analogue du glucose;elleestactivementtransféréeauseindescellules expri-mant à leur surface un transporteur du glucose de la famille GLUT(GLUT1à5),phosphoryléeparunehexokinase (glucose-6-phosphatase)enun substrat, le18-FDG-6-phosphate, qui est ensuite stocké dans les cellules. L’expression du transporteur membranaireestréguléeparlesbesoinsdumétabolisme,et exces-sivedanslaplupartdestumeurs[12].Enpratique,l’acquisitiondes imagessefaituneheureaprèsadministrationintraveineusedu 18-FDG.Cettetechniqueproduitdesimagesdecontraste extrême-mentmarquéentrelestissusanormalementhypermétaboliques et les tissus sains. La résolution spatialedes images classiques d’émission est de l’ordre du centimètre. L’acquisition TEP est désormaissystématiquementcoupléeàuneétudeTDMqui per-metdecorrigerl’atténuationdesimagesenfonctiondeladensité destissusetd’augmenterlarésolutionspatialedelatechnique[13]. LaTEPestunetechniquecomplémentairedelaTDMetdel’IRM dansl’évaluationdu pancréas, spécialementpour sacapacitéà distinguerles cancers de certaines affections non cancéreuses, détecter les métastases ganglionnaires, détecter les métastases occultesàdistance,etdétecterprécocementlesrécidiveschezles patientsopérés.Malgrél’impactremarquabledecettetechnique, ellenepeutpasêtreutiliséeenpremièrelignepourladétection descancerspancréatiquesenraisondesoncoût.Deplus,quelques tumeurspeuventêtrefaussementnégativesetquelquesanomalies noncancéreusesdupancréass’avérer18-FDG-avides.
Figure 1. Représentationanatomique schématique dupancréas, de
sescanauxdedrainageexocrines,desvoiesbiliairesetdesorganesde
voisinage.
Tableau2.
Intervalles de confiance à 95% des valeurs diagnostiques des
principauxexamensd’imageriedansladétectiondestumeurs
pancréa-tiques[14,15,24].
Sensibilité(%) Spécificité(%)
IRM 84(78–89) 82(67–92)
TDM 91(86–94) 85(76–91)
Échographie 76(69–82) 75(51–89)
Échographieaveccontraste 87(Ind) 94(Ind)
Échoendoscopie 77(71–81) 92(86–95)
TEP 90(86–93) 76(69–82)
TEP/TDM 90(87–93) 76(66–84)
IRM:imagerieparrésonance magnétique; TDM: tomodensitométrie;TEP: tomographieparémissiondepositrons;Ind:indéterminé.
“
Point
fort
Tomographieparémissiondepositrons
• Techniqued’imageriemétabolique. • Bilanlocorégionaletàdistance. • Acquisitionsystématiqued’uneTDM. • Complémentaritéavecl’IRMetlaTDM.
Éléments
sémiologiques
en
imagerie
pancréatique
La Figure 1 représente l’anatomie régionale normale du
pancréas.Pourtouteslestechniquesd’imagerie,l’approche sémio-logique des tumeursdu pancréas est similaireet regroupe: les anomalies de la trophicité, la dilatation des voies biliaires et des canaux pancréatiques, le changement des propriétés tissu-lairesetl’envahissementdesstructureslocorégionales. Surcette base,leTableau2résumelesvaleursdiagnostiquesdesprincipaux examens d’imagerie dans la détection des tumeurs pancréa-tiques[14,15].
Figure2. Représentationschématiquedel’hypertrophiepancréatiquerésultant
d’unprocessustumoral.L’envahissementtumoraldelaglandepancréatiquepeut
êtrediffus(A)oulocalisé.L’atteintelocaliséesemanifesteparuneanomaliede
contour(B)ouuneffacementdeslobulations(C).
Anomalies
de
la
trophicité
L’hypertrophiedela glandepancréatiqueest souvent retrou-véedansles pathologiestumorales. Elle peutêtre globale(5%) oufocale(95%)(Fig.2)[16].Enraisondesimportantesvariations individuellesdevolumedutissupancréatique,cette augmenta-tiondetailleestestiméedemanièresubjectiveparcomparaison avecletissunormaladjacent.L’hypertrophieglobalerésulteplus souventd’unepancréatiterétro-obstructivequed’uneinfiltration tumoralediffuse.Cettehypertrophiepeutêtredifficileàestimer lorsque l’augmentationdevolumeestdiscrète etqueles autres signes sont absents[16]. En cas d’hypertrophie focale, l’atteinte peut parfoisêtre sidiscrètequeseule est démontréeunepetite anomaliedecontour,ouunedisparitionfocaledel’aspect lobu-lairedelaglandeoudesintersticesgraisseuxdutissudesoutien pancréatique.
Voies
biliaires
et
canaux
pancréatiques
Ladilatationd’unestructurecanalairedoitfairerechercherune tumeuràhauteurdelazoneoùcelle-ciretrouveuncalibre nor-mal (zonetransitionnelle) ou,à défaut,à sonextrémité distale (Fig.3). Ladilatationdesvoiesbiliairesetdes canaux pancréa-tiquesrésulted’uneinvasiondirectedeceux-ciparlatumeurou d’une compression. Il s’agitd’un signeobjectif, carles canaux secondairesdupancréasetlesvoiesbiliairesintrahépatiquessont desstructuresenprincipevirtuellesenimagerieconventionnelle. Chezlesujetsain,lediamètremoyenducanaldeWirsungestde 3mmetpeutvarierde1à6mm[17].Lecholédoque intrapancréa-tiquedoitmesurermoinsde7mm(9mmchezlespatientsaprès cholécystectomie)etlesvoiesbiliairesintrahépatiquesmoinsde 3mm.Danslestumeursdelatêtedupancréas,lesvoiesbiliaires et les canaux pancréatiques sontdilatés dans77%des cas, les voiesbiliairesseulesdans9%descasetlescanauxpancréatiques seulsdans12%descas[16](Fig.4).L’associationdeladilatation desvoiesbiliairesetdescanauxpancréatiquesestdoncfortement suggestived’uncancer,mêmesiaucunsyndromedemassen’est démontré[18].Cetaspectdedilatationbicanalaireseprésentedans environ5%descasetnécessitealorsuneexploration échoendo-scopiqueouuneCPRE.
Canaux
pancréatiques
Karasawaetal.[19]ontdécritquatretypesanatomiquesde dila-tationducanalpancréatiqueprincipalquisont:
• ladilatationrégulière(type1);
• ladilatationrégulièreencollierdeperles(type2); • ladilatationirrégulière(type3);
• ladilatationirrégulièreaveccalculscanalaires(type4). Les fréquences respectives de ces dilatationsavec un cancer pancréatique sontd’environ 40% pourles types1 et2, moins de 15% pour le type3 et 2% pour le type4. La combinai-son d’une dilatation du canal de Wirsung avec une atrophie pancréatiquetraduitlachronicité del’obstacleetpeutsuggérer une tumeur, notammentsile rapportentrelasection pancréa-tique etla sectioncanalaireest inférieurà 0,5.Lavisualisation des canalicules pancréatiques secondaires est un signe patho-logique, malgré la résolution spatialesans cesse croissante des nouvellestechniquesd’imagerie.Enfin,cesdilatationscanalaires etcanaliculairespeuventprendreunaspectkystiquequidoitêtre différenciédespseudokystesetdestumeurskystiques(Fig.4).
Voies
biliaires
Ladilatationdesvoiesbiliairesparinvasiontumoraledirecte survientlorsqueleprocessuspathologiqueestsituéàlatêteouà l’isthmedupancréas.Cecritèren’estcependantpasabsolu,car destumeurs(mêmedevolumeimportant)situéesenregarddu processusuncinépeuventnepasentraînerdedilatationdesvoies biliaires.Danscertainscas,lavésiculeetlesvoiesbiliaires intra-hépatiquespeuventêtrelesseulesstructuresdilatées,notamment lorsque la tumeur s’accompagne d’adénopathies hilaires hépa-tiquesprovoquantunecompressionbiliaire.
Changement
des
propriétés
tissulaires
Lepancréasestunorganecontenantdutissuadipeuxen quan-titévariableselonlatrophicitéglandulaire.Larichesseprotéique du contenu acinaire fait du pancréas sain un organe sponta-nément enhypersignal parrapport au foie enpondérationT1. Les tumeursépithéliales pancréatiques se développent sur une matrice mucineuseou fibreuse le plus souvent hypervasculari-sée. Auseindecetissusedéveloppentdesairesdenécrosequi
Cancersdupancréasexocrine33-653-A-10
Figure3. PetitadénocarcinomecanalairedupancréassemanifestantparunedilatationcanalairepostobstructivevisibleenpondérationT2(A)(flèche),
unhyposignalenpondérationT1(B)(astérisque)etunrehaussementretardédupancréascaudalsurl’étudepost-contrastedynamiqueenpondérationT1
avecsaturationdusignaldelagraisse(CàF).
A
*
*
B
*
C
*
D
*
Figure4. Lesadénocarcinomesdupancréas(astérisques)ontsurleplanmacroscopiqueunaspect
solideetsquirreux(A),parfoishémorragique(B)kystique,mixte(C)ounécrotique(D).L’envahissement
desorganesdevoisinageestassociéàunaccolementàcesderniers(A,flèches),tandisquela
compres-sionoul’envahissementdesvoiesbiliairespeutêtreresponsabled’unedilatationpostobstructive(D,
flèches)nécessitantundrainageetlamiseenplaced’uneprothèsedontlesmaillessontvisiblesau
Tableau3.
Propriétéstissulairesdesprincipauxcomposantsdestumeurspancréatiquesparrapportautissusainenimagerie.
TDMa IRMa Échographiea TEPa
T1 T2 Coefficientdediffusion Tissutumoral =/– – + – – +++ Calcifications +++ Variable +++ Ombreacoustique = Mucus – −− +++ ++ −−− Renforcementacoustique – Sangb ++ +++ +/− ++ + – Nécrose – – ++ ++ −−− Renforcementacoustique – Pancréatite – – + – +/− + Fibrose = =/– – = = –
TDM:tomodensitométrie;IRM:imagerieparrésonancemagnétique;TEP:tomographieparémissiondepositrons. – :structureencontrastenégatifparrapportautissusain.
=:contrastetissulaireinchangé.
+à+++:structuredecontrastepositifd’intensitécroissanteparrapportautissusain.
aEnTDM,lecontrastetissulaires’exprimeentermesdedensité,enIRMentermesd’intensitédesignal,enéchographieentermesderéflectivitéetenTEPentermesde
métabolisme.
b Serapporteàundépôthémorragiquesubaigu.
secondairement peuventsaignerouse calcifier. Lechangement des propriétés tissulaires du pancréas normal est à l’origine de toutes les formes de contraste observables en imagerie classique et en imagerie de diffusion (Tableau 3). Le degré d’hypervascularisationpeutêtreappréciéenTDMouenIRMde manièredynamiqueaprèsadministrationintraveineused’agents de contraste extracellulaires. Ces produits de contraste ren-seignentaussibiensurla«densité»duréseauvasculairequesur levolumerelatifdelamatriceextracellulaire.Cesrenseignements sontévidemmentd’unegrandeimportancepourladétectionet l’évaluationdupronosticdestumeursquis’accompagnentd’une angiogenèsedontl’intensitéestproportionnelleàl’agressivité[20]. LarésolutiontemporelledelaTDM,del’IRMetdel’échographie permet à certaines équipes d’extraire des paramètres de per-fusion tissulaire comme le débit sanguin et le flux sanguin régionaux[20–22].Cesparamètressontélevésdanslestissus tumo-raux àdensitévasculaireélevéeetleurévolutiondansletemps estunparamètreobjectifderéponseauxtraitements.Ces explo-rationssontcependantencoreàunstaded’évaluation.
Envahissement
des
structures
locorégionales
LeTableau4détaillelaclassificationTNMdestumeurs
pancréa-tiques.LestumeursdestadeIIIetIVnesontpaséligiblespourune chirurgie(Fig.5)[23].
“
Point
important
Critèresdenon-résécabilitédestumeurs pancréa-tiques
• Envahissement de la veine porte, de la veine ou de l’artèremésentériquesupérieure.
• Envahissement du tronc cœliaque, des artères hépa-tiquescommuneetpropre.
• Envahissementduplexuscœliaque. • Envahissementdelalamerétroportale.
• Envahissement des structures adjacentes comme l’estomac,lecôlon,lesreins,lessurrénalesetlerachis. • Métastaseshépatiquesoupéritonéales.
Ladéfinitionprécisedecescritèresestlechampd’investigation principaldel’imagerie.LeTableau5résumelesvaleurs diagnos-tiquesdesprincipalestechniquesd’imageriedanslebilanglobal derésécabilitédestumeursdu pancréas.Uneméta-analyse rap-portedesscoresmoyensdesensibilitéde81%,82%et83%,etde
Tableau4.
ClassificationTNMdestumeurspancréatiques[23].
DéfinitionsTNM Tumeur (T)
TX Nepeutêtredéfini
T0 Pasdetumeurdémontrée
Tis Carcinomeinsitu
T1 Tumeur≤2cmdediamètre,confinée
aupancréas
T2 Tumeur>2cmdediamètre,confinée
aupancréas
T3 Extensionextrapancréatique,sans
atteintedel’artèremésentérique
supérieureetdutronccœliaque
T4 Atteintedel’artèremésentérique
supérieureoudutronccœliaque
Ganglions régionaux(N)
NX Nepeutêtredéfini
N0 Pasdeganglionrégionalenvahi
N1 Ganglion(s)régional(aux)envahi(s)
Métastasesà distance(M)
MX Nepeutêtredéfini
M0 Pasdemétastase(s)àdistance
M1 Métastase(s)àdistance
Stadetumoral Stade0 Tis,N0,M0
StadeI StadeIa T1,N0,M0 StadeIb T2,N0,M0 StadeII StadeIIa T3,N0,M0 StadeIIb T1-3,N1,M0 StadeIII T4,N0-N1,M0 StadeIV T1-4,N0-N1,M1
spécificitéde82%,78%et63%pourl’évaluationdelarésécabilité des tumeurspancréatiques,respectivementpourlaTDM,l’IRM etl’échographietransabdominale[24].Enraisond’unespécificité relativement faible de l’échographie transabdominale et d’un champd’explorationrelativementlimitédel’échoendoscopie,la TDM etl’IRM sontactuellementles techniquesrecommandées pourlaréalisationdecebilan.L’associationdelaTEPàlaTDM offreunealternativeséduisantecombinantlesdiagnostics anato-miqueetmétabolique,dontlesrésultatspubliéssontcependant contradictoiresd’unesérieàl’autre[25–27],appelantàdesanalyses surdepluslargesséries.
Cancersdupancréasexocrine33-653-A-10
Figure 5. Représentation schématique detumeurs inopérables dupancréas.
Lecritèred’inopérabilitépeutêtrelaprésenced’unecarcinomatosehépatique
oupéritonéale(A),unenvahissementdesstructuresvasculairesrégionalestelles
l’artèrehépatiquecommune(B),laveinemésentériquesupérieure(C)etun
enva-hissementdesorganesdevoisinagecommelasurrénale(D).L’envahissement
spléniqueisolé(E)n’estpasunecontre-indicationopératoire.
Tableau5.
Intervallesdeconfianceà95%desvaleursdiagnostiquesdesprincipaux
examensd’imageriedansle bilanderésécabilité descancers du
pan-créas[24,27].
Sensibilité(%) Spécificité(%)
IRM 82(69–91) 78(63–87)
Échographie 83(68–91) 63(45–79)
TDM 81(76–85) 82(77–87)
TEP 100(Ind) 44(Ind)
TEP/TDM 96(Ind) 82(Ind)
IRM:imagerieparrésonance magnétique; TDM: tomodensitométrie;TEP: tomographieparémissiondepositrons;Ind:indéterminé.
Envahissement
des
structures
vasculaires
Lesigne le plusspécifique del’envahissement d’un vaisseau est le rétrécissementde celui-ci;à l’extrême, ce rétrécissement peutconduireàuneocclusion.Unedistinctiondoitêtreréalisée entrel’envahissementveineux etl’envahissement artériel dans lamesureoùlepremiersesoldeparunesténoseouune throm-bose(Fig.6),alorsquelesecondsemanifesteleplussouventpar uncomblementdel’espacepérivasculairepardu tissutumoral, aveceffacement du liserécellulograisseux normalement visible aupourtourduvaisseau (Fig.7). Pourtémoignerd’un envahis-sementvasculaire,ceteffacement doits’effectuer suraumoins 50%delacirconférenceduvaisseau.Cettevaleur-seuilest débat-tue,puisqueplusieursauteursutilisentunseuilplusélevé,variant
Figure6. Tomodensitométriebiphasique(A,B)d’unadénocarcinomecanalairedelaqueuedupancréas(astérisques)démontrantunecarcinomatose
métastatiquehépatique.Lareconstructioncoronaledelaphasehépatique(C)montreunethrombosepartielledelaveinesplénique(flèche).
Figure 7. Tomodensitométriemonophasique(A)démontrantunetumeurducorpsdupancréas(astérisque)avecdilatationducanaldeWirsung et
atrophieduparenchymepancréatiqueenamont(flèche).Enimagerieparrésonancemagnétique,latumeurestenhypersignalenpondérationT2(B)et
hyposignalenpondérationT1(C);sapériphérieestprogressivementrehausséeparlecontrasteintraveineuxsurl’étudedynamiqueenpondérationT1avec
saturationdusignaldelagraisse(DàG).Unereconstructionaxialeenprojectiondumaximumd’intensitéàlaphaseartérielle(H)permetdedémontrer
unrétrécissementtumoraldel’artèresplénique(têtesdeflèches).Lediagnosticd’adénocarcinomecanalaireaétéposésurlabased’unebiopsie-aspiration
Cancersdupancréasexocrine33-653-A-10
Figure8. Lacholangiopancréatographieenprojection(A)etencoupes(B)parimagerieparrésonancemagnétiquedémontreunedilatationdesvoies
biliairesintra-etextrahépatiquesavecunesténosesituéedanslaportionintrapancréatiqueducholédoque(flèche).Ladilatationestdéterminéeparun
adénocarcinomecanalairedelatêtedupancréasenvahissantlalamerétroportale(têtedeflèche),auseinduquelonretrouvedefinsfoyersd’hypersignalen
pondérationT2(C).LatumeurestenhyposignalenpondérationT1(D)etprésenteunrehaussementretardéparrapportaupancréassurl’étudedynamique
post-contrasteenpondérationT1avecsaturationdusignaldelagraisse(EàG).Miseenévidenceégalementdeganglionscentimétriquesgastroduodénaux
apparaissantenhyposignalparrapportàlagraisseenpondérationT2(H)(flèchesenpointillés).
entre75%[28]et90%[29],sansdifférencesmarquéessurlesvaleurs desensibilitéetdespécificité.Lemésopancréasoulame rétropor-taleestuneattacheconjonctiveverticaleentrelebordgauchedu processusuncinéetleborddroitdel’artèremésentérique supé-rieure,àlafacepostérieureducarrefoursplénomésaraïqueetde la veine portequi constitueun repère anatomique fondamen-tal. Eneffet, son envahissement, mêmesans atteinte formelle desstructuresvasculairesadjacentes,constitueuncritèrede non-résécabilitécarelleestliéeaurétropéritoine(Fig.8)[30].
LescoupesTDMetIRMacquisesdemanièredynamiqueaprès contraste sont en général nécessaires à cette évaluation. Bien que la valeur ajoutée au diagnostic des reconstructions multi-planairesetenprojectiondu maximumd’intensitéà partirdes coupesnativessoitdiscutéedanslalittératureradiologique, celles-cisontavanttoutdenatureàfaciliterlediagnosticetaideràsa
compréhension.Lesautressignesd’envahissementdesstructures vasculairessontl’irrégularitédelaparoiduvaisseau,la visualisa-tiond’unfragmenttumoralauseindelalumièrevasculaireetla dilatationdesvaisseauxcollatéraux[31].
Envahissement
lymphatique
Les espaces péripancréatiquessont richesenrelais ganglion-nairesquiontétéclassifiésen18partiesdifférentes devantêtre examinéesdanslecadredubilandestumeurspancréatiques[32]. Cesrelaispeuventêtrerésumésenrelaispéripancréatiques (cépha-liques, corporéaux et caudaux), lombo-aortiques, cœliaques, gastrohépatiques,gastroépiploïquesetmésentériques(proximaux etdistaux).Leuraccessibilitéestvariableenfonctiondela tech-nique d’imagerie utilisée, et seules la TDM, l’IRM et la TEP
Figure 9. Tomodensitométrieàlaphase
hépa-tiqued’unadénocarcinomedelatêtedupancréas
envahissantl’artèremésentériquesupérieureetles
ganglionspéripancréatiques.Présenceégalement
demétastaseshépatiquesetd’uneascite
carcino-mateuse (astérisque) avecnodules
infracentimé-triquesrehaussésparlecontrasteintraveineuxle
longdesfeuilletspéritonéauxpériphériques(têtes
deflèches)(A,B).
donnentunevisualisationglobaledecesdifférentsrelais.Lesigne leplusconnud’envahissementganglionnaireestl’augmentation de sa taille (Fig. 8). La limitede 10mm de largeurpour diffé-rencier lesganglions envahisdes ganglionssains a étéutilisée, avec une sensibilité variant entre 14 et 33%, et une spécifi-citévariantentre60et92%[33–37].Ceschiffressuggèrentquele critère de taille n’est pas suffisamment sensiblepour la détec-tiond’unenvahissementganglionnaire.Deplus,lacoexistence d’affectionsinflammatoireslocalesrendcecritèrepeuspécifique. D’autres critères d’envahissementtels quela pertede la forme ovoïdenormaleduganglion,lanon-visualisationdesoncentre normalementricheentissuadipeuxoul’agrégationdeplusieurs ganglions ontété rapportés comme faiblement prédictifs d’un envahissement tumoral[34].De manièresimilaireauxautres cri-tères, la détectiondu métabolismeaccru des ganglions enTEP est également décevante.Il est recommandéactuellement que lasuspiciond’envahissementtumoraldeganglions péripancréa-tiquesnesoitpas uncritère denon-résécabilité,maispermette en revanched’orienter les prélèvementsganglionnaires lorsde l’intervention.
Envahissement
des
organes
adjacents
L’extensiondestumeursdupancréasauxorganesadjacentsest uncritèredenon-résécabilité.Lesorganesleplussouventatteints sontl’estomacetleduodénum,ainsiquelesorganes rétropéri-tonéauxtelsquelesreins,lessurrénalesetlerachis.Lescritères retenussontlaperteduliserégraisseuxentrelatumeuretl’organe, et l’infiltration de celui-ci par la tumeur. La TDM possède la meilleurerésolutionspatialepourcediagnostic,maisl’IRMdoit êtrepréféréelorsqu’ilexisteunesuspiciond’extensionaurachis.
Métastases
à
distance
La présence de métastases à distance (le plussouvent hépa-tiques et péritonéales) contre-indique la chirurgie. Sur le plan sémiologique,lesmétastaseshépatiquesseprésententcommedes lésions focales de propriétés tissulaires différentes de celles du parenchymehépatiquenormal.Enfonctiondutypedelatumeur primitive,ellesprésententunequantitévariabledenécrose cen-trale. Leurs propriétés spontanées sont doncsimilaires à celles de la tumeur primitive (Tableau 3). De manière générale, les métastases hépatiques présentent un rehaussement global ou périphériquemarqué.Lesmétastases péritonéalesseprésentent commedesimagesadditivesnodulairesouparfoislinéaires dispo-séeslelongdesfeuilletspéritonéaux.Ellespeuvents’accompagner d’asciteenquantitévariable.LeurdétectionenTDMetenIRM requiertleplussouventuneopacificationintraveineuse.La spéci-ficitédudiagnosticparTDMouIRMdemétastaseshépatiquesou péritonéalesestcompriseentre95et100%.Enrevanche,pour les deux techniques, la détection des métastases hépatiques et péritonéalesinfracentimétriquesconstituelaprincipaledifficulté diagnostique(Fig.9).EnTDM,lasensibilitépourlesmétastases hépatiquesinférieuresaucentimètreresteinférieureà80%,même aveclatechniquemultidétecteurs[38].Cettetendanceestsimilaire pourlespetitesmétastases péritonéales.L’IRMsembleprésenter une meilleuresensibilitépource typedelésionsdanslesséries
Tableau6.
Typeshistologiquesetfréquencerelativedesprincipalestumeursdu
pan-créasexocrine[23].
Tumeurs Pourcentage
Tumeursd’originecanalaire
Adénocarcinomecanalaire ±80%
Variantsdel’adénocarcinomecanalaire 6%
Carcinomeanaplasique
Nondifférencié
Àgrandescellulespléiomorphes
Àcellulesgéantesdetypeostéoclaste
Adénocarcinomeàcellulesenbagueàchaton 1%
Carcinomeadénosquameux 4%
Carcinomemixtecanalaireetendocrine 1%
Adénocarcinomemicrokystiquea 1%
Tumeurmucineusekystiquea 1%
Tumeurpapillairemucineuseintracanalaire ±3%
Tumeursd’origineacinaire
Adénocarcinomeacinaire ±1%
Cystadénocarcinomepapillaire
Tumeursd’histogenèseincertaine
Pancréatoblastome <1%
Tumeurpseudopapillaire 2%
aAppartiennentauspectremorphologiquedestumeurskystiquesdupancréas.
ayantspécifiquementadressécettequestion[11,39,40].Laprécision de la TEP combinée à la TDM dans l’évaluation préopératoire desmétastasesàdistancesembleraitsupérieureàcelledesautres techniques d’imagerie[30,41]. Cependant, cette combinaison est inférieureàl’IRMdansladétectiondespetitesmétastases hépa-tiquesetpéritonéales[42],etcettedernièreprésenteunesensibilité limitéeparrapportàlalaparoscopie.Cecidémontrequ’ilresteune indication pourla laparoscopiepréopératoireou périopératoire danslebilandescancerspancréatiques[43].
Types
histologiques
Surle plan histologique, les tumeursnon épithéliales primi-tivesdupancréastellesqueleslymphomesetlessarcomessont dominéesenfréquenceparlestumeursd’origineépithélialequi comprennent les tumeursexocrineset les tumeursendocrines. Lestumeursendocrinesnesontpastraitées danscetarticle.Le Tableau6listeetindiquelafréquencerelativedesprincipauxtypes histologiques destumeursdu pancréasexocrinediscutéesdans cet article[44].Lespectre morphologique destumeurskystiques dupancréas,comprenantlestumeursmucineuseskystiques (cys-tadénomes, cystadénocarcinomeset adénomesmacrokystiques) ainsiquelesadénomesmicrokystiques,etlestumeurspapillaires mucineusesintracanalaires,estégalementexcludecetarticle.
Cancersdupancréasexocrine33-653-A-10
Adénocarcinome
canalaire
et
variants
Stratégie
diagnostique
L’adénocarcinomecanalaireetsesvariantsreprésententprèsde 90%detouteslestumeurspancréatiques.Lenombredecas inci-dentsestestiméà185000paran,avecunpicsituéentre60et 70ansetuneproportionde1,2à1,5hommespourunefemme[45]. Sonpronosticestsombreetdépenddustadetumoral.Lasurvie moyenneàcinqanssansrésectionestinférieureà5%etaugmente àprèsde20%chezlespatientsopérés.Ilestmalheureusementle plussouventpeusymptomatiqueavantsadécouverteàunstade avancéinopérable.Cettefigureclassiquereprésenteprèsde80% descas[46].
Diagnosticcliniqueetbiologique
Certainsfacteursépidémiologiquesontunlienavecles adéno-carcinomescanalairesdupancréas[47–52].
“
Point
fort
Facteursderisque associésaux adénocarcinomes canalaires du pancréas (population-cible poten-tielled’undépistage)
• Histoired’épisodesdepancréatiteidiopathique. • Syndromes héréditaires (syndrome nævus multiple mélanome, polypose adénomateuse familiale, cancer héréditaire sein/ovaire1 et 2, syndrome non-polypose et cancer colique héréditaire, pancréatite héréditaire, syndromes de Peutz-Jeghers, Li-Fraumeni et ataxie-télangiectasie).
• Histoirefamilialedecancerdupancréas.
• Tabagisme, histoire professionnelle d’exposition aux aminesaromatiques.
Larelationentresymptômesetlocalisationtumoraleest impor-tanteetpeutdéterminerlepronostic.L’ictèreestprésentcomme symptôme initial chez près de 75% des patients, et pour des raisonsdeproximitéaveclesystèmebiliaire,90%des adénocar-cinomescanalairescéphaliquessontassociésàunictère,contre 10% des tumeurs caudales. Par conséquent, l’ictère nu est la présentationclinique laplusfréquente(52%)chezles patients avec une tumeur opérable[53], tandis que la douleur seule est présentechez85%depatientsavecunetumeur avancée. Man-nelletal.ontdémontrésurunesériedepatients opérésquela stéatorrhéepréopératoireétait associéeà une survieprolongée, àl’inversedel’existenced’unedouleurpréopératoire[54]. Cepen-dant,lessymptômessontpeuspécifiquesetpeuventserencontrer dansd’autres affections telles quela herniehiatale et lereflux gastro-œsophagien,lamaladiediverticulairecoliqueetlamaladie lithiasiquebiliaire.Laspécificitédecessymptômesprisensemble oucombinésestd’environ20%[55].D’autrepart,mêmeprésents, lessymptômespeuventêtresisubtilsquelespatientslestolèrent aisément,avec pour conséquence un retard important dansle diagnostic[56].
Le diagnostic d’adénocarcinome canalaire du pancréas peut égalements’aiderd’uneélévationdestauxsanguinsdel’antigène CA19-9.Pourunevaleur-seuilde37UI/ml,lasensibilitéetla spé-cificitésontrespectivementde70etde87%;lorsqueceseuilest portéà70UI/ml,cesvaleurssont86et87%[57,58].Lesfaux-positifs sontcausésparlamaladielithiasiquebiliaire,lacholécystite,la cholangiteettouteslesformesd’obstructiondesvoiesbiliaires.
Aspectmacroscopique
L’adénocarcinome canalaire du pancréas est diffus dans5% descas,céphaliquedans60%descasetcorporéocaudaldansles casrestants.Surle planpathologique, l’apparenceclassiqueest celled’unetumeursolidesquirreuseetinfiltrante,presque tou-jours accompagnée dephénomènes inflammatoires au seindu pancréasadjacent.Lanécrosecentraleetladégénérescence muci-neusenesontpasraresetpeuventdonneràlatumeurunaspect
“
Point
fort
Symptômesetsignescliniquesassociésaux adéno-carcinomescanalairesdupancréas
• Ictèreobstructif.
• Pertedepoidsinexpliquée.
• Douleurabdominaleinexpliquée,irradiantversledos. • Dyspepsie.
• Diabètesucréd’apparitionbrutale. • Stéatorrhéeinexpliquée.
• Cachexie.
• Vésiculepalpable(signedeCourvoisier). • Adénopathiesupraclaviculairepalpable. • Massepériombilicale.
• Nodule palpable dans l’espace rectovaginal ou dans l’espacerectovésical.
kystique (Fig. 4). Ces remaniements chroniques peuvent égalementsecompliquerd’hémorragiesetdecalcifications intra-tumorales(Tableau3).Lestumeursanaplasiquessontengénéral extrêmement larges et nécrotiques, s’accompagnant de volu-mineux ganglions d’aspect similaire; cette apparence est dite sarcomatoïde.
Diagnosticparl’imagerie
L’échographietransabdominaleestlatechniqued’imagerievers laquellesontadressésenpremièreintentionlespatientssuspects d’avoir une masse abdominale. Cette technique est peu coû-teuse,rapidementdisponibleetnonirradiante.Ellepermetavec une grande fiabilitéde diagnostiquer d’autres affections, telles quelamaladielithiasiquebiliaireetsescomplications.Dansdes mainsexpertes,elleidentifieaisémentuneobstructiondesvoies biliairesextrahépatiques, toutendéfinissant son niveau.Cette techniqueest malheureusementdépendantede l’expérience,et les sensibilités varient de moins de 50%à plus de 90%[59,60]. De plus, même pour les examinateurs les plus expérimentés, unexamenéchographiquecompletdupancréaspeut être tech-niquement irréalisable chez 15 à 20% des patients, pour des raisons qui incluent l’interposition de gaz, des remaniements post-chirurgicauxetl’obésité.
Par conséquent, un examen échographique négatif ne peut exclureunetumeurdupancréas.
L’efficacitéetladisponibilitédelaTDMenfontlapierre angu-laire de la détection des adénocarcinomes canalaires chez les sujetsavec une histoirecliniqueévocatrice. De plus,la largeur du champ d’exploration permet de réaliser simultanément un pronosticderésécabilitédes tumeurs.La sensibilitéde laTDM multicoupes biphasique est supérieure à 90% pour toutes les tumeursetavoisine100%pourles tumeursdeplusde2cm[8]. Lacomplémentaritéentrel’IRMetlaTDMn’apasétéétablieet, leplussouvent,unetechniquedoitêtrepréféréeàl’autre.Cette préférencedépenddel’accessibilitédel’appareillage,del’expertise ducentreetduniveaudecollaborationdupatient.Sansêtre irra-diante,l’IRMpartageactuellementlesqualitésdiagnostiquesde laTDM,etpeutmêmedanscertainscass’avérersupérieurepour identifierlalésion,grâceàunemeilleurecaractérisationtissulaire. Elleprésentecependant parrapportà laTDM lesdésavantages d’êtreplus onéreuseetmoinssouvent disponible.Ces proprié-tés tendent à suggérer, dans une simulation mathématiquede 2015,unbénéficeduscreeningparIRMchezdessujets asymp-tomatiquesavecdesprédispositionsgénétiques[61].Dansl’attente d’uneconfirmationdecettesimulationpardesétudesdecohorte, ledépistageducancer dupancréaspar desexamensd’imagerie n’estpasrecommandéchezdessujetsasymptomatiques.
L’échoendoscopiepartageavecl’approchetransabdominalele caractèreopérateur-dépendantetnepeutêtreutiliséeenpratique pourlebilanderésécabilitéenraisondesonchampd’exploration limité. Comparée à la TDM et à l’IRM, elle a une sensibilité similaire,voireplusélevéepourles tumeursdemoinsde2cm.
Figure10. Tomographieàémissiondepositrons(TEP)enprojectiondumaximumd’intensité(A)chezunpatientporteurd’unetumeurbronchiquedu
lobeinférieurdroitendisséminationdiffuse.Lescoupestomodensitométriques(TDM)encontrastespontané(B)etlafusionTDM-TEP(C)démontrentune
massehypermétaboliquedelaqueuedupancréas(astérisque),représentantunemétastaseintrapancréatique.
Néanmoins, des valeurs de spécificité de 53% ontété rappor-tées[62].Cettefaible spécificité est cependantcompenséepar la possibilité qu’offrecette techniquederéaliser une aspiration à l’aiguillefine.Cetexamendoitdoncêtreréservéà despatients àdeuxextrémitéssurleplanclinique:ceuxpourlesquels, mal-gré une importante suspicionclinique etradiologique, aucune tumeurn’aformellementpuêtredémontréeetchezlespatients ayantbénéficiéd’uneTDMdontlesrésultatssontformelsquantà laprésenced’unetumeurinopérable,afindepréciserlediagnostic pathologique.
Lapositiondela TEPdansla stratégiediagnostique des adé-nocarcinomescanalairesdupancréasn’estpasencoreclairement définie. Cette technique est souveraine pour l’exploration du corps entieretpeutpermettredemettreenévidencedes méta-stasesextra-abdominales,descancerssynchronesoudeslésions pancréatiquesdanslecadredubilandetumeurssituéesàdistance (Fig.10).LasensibilitédelaTEPestlimitéeparlatailledeslésions etsaspécificitéparlesréactionsinflammatoireschroniquesqui simulent l’adénocarcinome canalaire[63].LaTEP nepermet pas dedistinguerlesstructuresvasculairesetnepeutdoncêtre uti-liséepourlepronosticderésécabilité.Deplus,latechniqueest onéreuse.Enrevanche,sacomplémentaritéaveclaTDMest excel-lente,setraduisantdanslesfaitsparl’usagequasimentgénéralisé d’uneexplorationhybrideunique.
Diagnosticpathologique
L’échoendoscopiearéduitdemanièresignificativelerecoursà la biopsiepercutanéeainsiquelerisqued’essaimagepéritonéal quis’yassocie.Lanécessitéd’obtenirundiagnostichistologique lorsque l’histoiredel’affection,les symptômeset lesanomalies enimageriesuggèrentunadénocarcinomecanalairedupancréas estsujetteàdébat,puisquecediagnosticsevérifieplusdeneuf fois surdix[64].Laponction-biopsiepercutanéedes adénocarci-nomesdupancréasnes’indiqueplusquedanslescasoùellepeut être réaliséeparvoieextrapéritonéale chezdes patientsréputés inopérablespourlesquelslediagnosticdenatureestdouteux.De manièregénérale,lediagnosticdéfinitifd’adénocarcinome cana-laireestposésurlapiècederésection.Enrevanche,lorsqueles différentes techniques ne sont pas parvenues à établir le pro-nostic de résécabilité, le diagnostic est obtenu au moment de
lalaparoscopieexploratricequipréciselebilanvasculaireet sur-toutdéterminelaprésenceoul’absencedemétastaseshépatiques oupéritonéales[65].Surleplanpratique,Katzetal.intègrentles progrès del’imagerie en coupeset préconisent comme indica-tions de la laparoscopie exploratrice les tumeurs extrêmement larges, des anomalies TDM suggérant sans certitude des méta-stases et une forte suspicion clinique de cancer du pancréas, commeparexempleuneimportanteélévationdutauxsanguinde CA19-9.
Traitement
curatif
Ledétail des procédures chirurgicalesdu pancréasest décrit parailleurs.Quelquespointsrestentcependantd’intérêtdansla discussionduprésentarticle.Letraitementclassiquedes adéno-carcinomescanalairesdupancréasestladuodénopancréatectomie céphalique,décriteparWhippleen1942.Aucoursdecette pro-cédure, de 40 à 50% du sac gastrique (antre), la vésicule, le cholédoquedistal,latêtedupancréas,leduodénumetlejéjunum proximalsont réséquésenbloc.Larestitutionde lacontinuité desstructurescanalairesrequiertalorsune pancréaticojéjunosto-mie,unehépatojéjunostomieetunegastrojéjunostomie.Pourdes équipesexpérimentées,lamortalitéopératoiredecetteprocédure estinférieureà2%[64].Lamorbiditédelaprocédureestliéeàla pancréaticojéjunostomiequi,pourdesraisonsmicrocirculatoires, peut être le sièged’un lâchage de suture. Plus à distance, une pertedepoids etdesdéficitsnutritionnelsimportants sontliés àlagastrectomiepartielle.Lapréservationdupylore,quiest lar-gement pratiquéedepuislesannées1970,nes’accompagnepas d’effetpéjoratifsurlasurvieàcinqans,maisreste malheureuse-mentégalementsanseffetprouvésurlestroublesnutritionnelset pondérauxpost-chirurgicaux.
Àl’extrémitéopposéedelaprocéduredeWhipple,la spléno-pancréatectomie caudales’adresseauxtumeursdela queue du pancréas. Entre cesdeux options se trouve la pancréatectomie complète(ourégionale)quienlèveenbloclatotalitédupancréas, ainsiquel’artèremésentériquesupérieure,letronccœliaque, la veineporteetlabasedumésocôlontransverse.Cetteopérationa étéprogressivementabandonnéeenraisond’unemortalité opé-ratoireetd’unemorbidité(diabèteinstable)plusélevéesquepour
Cancersdupancréasexocrine33-653-A-10
lesautrestechniques,pouruneffetnondémontrésurlasurvieà cinqans.Ellesepratiquenéanmoinsencorepourlespatientsdits «marginalement»opérableschezlesquelsilexisteun envahisse-mentvasculaire,maisauversantveineuxportaloumésentérique. Lesrésultatsàlargeéchelledelaprocéduredanscetteindication sontàvenir.
Traitement
palliatif
Uncertainnombredegesteschirurgicauxsontdestinésà amé-liorerlaqualitédeviechezdespatientsinopérables.Cesgestes sont destinés à soulager la douleur, ainsi que les symptômes de l’ictère obstructif et de l’obstruction intestinale (duodé-nale).Cesprocéduresincluentuneanastomosebiliodigestivepar cholécystojéjunostomieou cholédocojéjunostomiepourl’ictère obstructif,unegastrojéjunostomiepourl’obstructionduodénale etuneneurolysesplanchniqueàl’éthanolpourladouleur.Bien quecesprocéduressoientdefaiblemortalité,ellespeuventêtre remplacéespardestechniquesmoinsinvasives.
La douleur est un symptôme important et parfois insup-portable, et peut être difficile à maîtriser par les traitements analgésiquesclassiques.Elle résultedel’envahissementtumoral desplexus splanchniques.Leprincipedu traitement percutané estdeguidersouscontrôleTDMuneaiguillefinejusqu’auplexus cœliaqueetd’yinjecterunesolutionde 95%d’éthanol.Avant cettealcoolisation, le positionnementcorrectdel’extrémitéde l’aiguilledoitêtrevérifiéparl’injectiondeproduitdecontraste iodé. Celui-ci doit se déposer en position rétropéritonéale, para-aortique et extravasculaire. Cette procédure est presque sans complication, avec des risques théoriques d’hémorragie, d’infectionoudeperforationdestructuresdigestives.Dansdes études randomiséesportant sur des patients non opérables, la neurolyses’estmontrée supérieureauplaceboet autraitement pharmacologiqueclassique[66]pourl’analgésieetlasurvie.
Ladécompressiondusystèmebiliairepeutêtreréaliséeparla mise enplace de prothèses expansibles.La technique percuta-néeconsiste à ponctionner,décomprimer et opacifierles voies biliairesintrahépatiques,àlescathétériserdemanièreantégrade avec un guide souple jusqu’au duodénum, puis à larguer une prothèsebiliairedecalibreetdelongueurvariablesenfonction des caractéristiquesde l’obstacle. Lediamètre interne minimal de la prothèse est de 6 à 8mm, afin de protéger des risques d’angiocholiteetderécidive.Dansuncertainnombredecas,le franchissementdelasténosedoitêtredifféréde48heures(avec poursuitedu drainage externe); il nepeut définitivementêtre obtenuquedans10%descas,obligeantlaprocédureàse limi-teràundrainageexterne.Lescomplicationsdecetteprocédure sontessentiellementinfectieusesourelativesàl’accèspercutané, incluantlapéritonitebiliaire,l’hémopéritoine,l’hémothorax,le pneumothorax,lafistuleportobiliaireetlafistulepleurobiliaire. Latechniqueendoscopiquerequiertuncathétérismerétrograde desvoies biliairespar unguide métallique,avec mise enplace d’uneprothèse.Lafaisabilitéimmédiatedecetteprocédure(81%) estsupérieureàcelledelatechniquepercutanée(61%)[67],mais ellen’offrepaslapossibilitéderecoursàundrainagede décom-pression en cas d’échec. Comme pour l’accès percutané, les complicationssontprincipalementinfectieuses.Leshémorragies etperforationsdigestivesou biliairespeuventégalement surve-nir,maisavecuntauxdecomplicationssensiblementplusfaible quepour la techniquepercutanée dans l’étude randomiséede Speeretal.[67].Lesdeuxtechniquespartagentégalementcomme complicationàmoyentermelaréobstructiondusystèmebiliaire. Celle-cipeut êtredueàlaprogressionducancer,àlamigration delaprothèseouàlaproliférationbiliaireàl’intérieurde celle-ci. Ces complicationssont plus fréquentes pour des prothèses souplesquepourdesprothèsesmétalliques.Ilestconseillé,pour lespatientsporteursdeprothèsesenplastique,unremplacement touslestroismoisafindenepass’exposeràcettecomplication[68]. Lespatientsatteintsd’uncancerdupancréasseprésentent rare-mentàlaphaseinitialeavecuneobstructionduodénale,mais15 à20%deceuxquinesontpasopérésendéveloppentles symp-tômesdansle décoursdeleurmaladie[69].L’usagedeprothèses métalliquesd’insertionendoscopiqueaétérapportéavecsuccès danscetteindication.
Lachimiothérapieetlaradiothérapiefontactuellementpartie del’arsenalpalliatif. Elless’adressentàdespatientsinopérables oudanslesessaisnéoadjuvantsderéductionduvolumetumoral. Cestraitementsextrêmementagressifsnedoiventêtreutilisésque chezdespatientsdontl’étatphysiqueetlatolérancesontsupposés bons.Lesprincipalesoptionsincluentunecombinaisonde radio-thérapieet de monochimiothérapie au 5-fluorouracile, ou une monothérapieàlagemcitabine.Legainensurviedela radiochi-miothérapiedanslescancersavancésdupancréasestfaible.Des techniquesd’ablationnonchirurgicaletelles quel’ablationpar ultrasonsenhautefréquence,laradiofréquence,l’électroporation irréversible, la thérapie photodynamique, la radiothérapie sté-réotaxique,la radiothérapie etla cryochirurgieà l’iode125ont été proposées avec un allongement moyen de la survie plus important[70].L’évaluation surde plusgrandessériesdes effets bénéfiquesetsecondaires decesdifférentsprotocoles de traite-mentspalliatifsrestenécessaire.
Suivi
Unsuivipostopératoirerégulierdoitêtreeffectué,incluanttous lestroismoispendantles deuxpremières annéesettouslessix moisau-delàun examenclinique,le dosageduCA19-9etune étudeenimagerie.Larécidivepostopératoireestcauséepardes cellulestumoraleslaisséesdanslerétropéritoineou lepéritoine pendantl’opération,ouparl’existenceméconnued’unetumeur destadeIV.Ensuivant régulièrement paréchographie, TDMet dosagedesmarqueurstumoraux24patientsayantsubiavec suc-cèsune opération deWhipple, Kloppel et Maillet ontobservé 20récidivesdansleshuitpremiersmois,souslaformed’une infil-tration rétropéritonéale chez 18patients et d’une adénopathie rétropéritonéalechezdeux patients.Chez les 20patients ayant récidivé, la récidive était démontrée par toutes les techniques desuividans50%descas,parlesuivienimagerieuniquement dans25%descasetparuneélévationdesmarqueurstumoraux d’aborddans25%descas.Actuellement,l’examenrecommandé danslesuiviestlaTDM.Cetteexplorationrequiertune connais-sancedumontagechirurgicaletdesesapparencesencoupes,et son degré deperformance est négativement affectépar le col-lapsusetlanon-opacification del’anseafférente.Stumppetal. ontproposél’usagedeproduitsdecontrasteà excrétionbiliaire afindecontournercetécueiltechnique[71].Àdéfaut,l’IRMpeut être réalisée dans les centres qui en possèdent l’expertise. En casd’élévationduCA19-9,la TEPestune techniqueà considé-rer,enparticulierlorsquelaTDMoul’IRMrestentnégativesou équivoques[72–74].
Algorithme
décisionnel
Danslalittérature,plusieursalgorithmesdécisionnelssont pro-poséspourlediagnosticetlesuividesadénocarcinomescanalaires du pancréas. La Figure 11 présente un algorithme tiré de la confrontationentrelesdonnéesdelalittératureetl’expérience personnelle.
Autres
tumeurs
du
pancréas
exocrine
Lesautrestumeursdupancréasexocrinediscutéesiciincluent les tumeurs acinaires et les tumeurs d’histogenèse incertaine incluantlatumeurpseudopapillaireetlepancréatoblastome.
Adénocarcinome
acinaire
Les signescliniques de l’adénocarcinome acinairesont simi-lairesàceuxdesautrestumeurspancréatiques,maiscettetumeur peut sécréter en quantité anormale les enzymes pancréatiques exocrines. Cette élévation des taux sériques d’enzymes lipo-lytiques peut, dans des cas extrêmes, être responsable d’une disséminationdefoyersdelipolysesystémiquecommedansdes épisodesdepancréatiteaiguësévère.Lessignescliniquesrésultant incluentdes nécroses graisseuses sous-cutanées,des arthralgies etdes lésions osseuseslytiques.Ce syndromeradiocliniqueest relativementspécifiquedecettetumeur[75].Lediagnostic patholo-giqueestbasésurlesrésultatsdel’étudeimmuno-histo-chimique positive pour les marqueurs membranaires acinaires et de la
Clinique + échographie évocateurs d'un cancer du pancréas
TDM/IRM
Indéterminé
Indéterminé CA 19.9
Résécable
Traitement Surveillance Surveillance Suivi
TEP ? Résection
--
-+
+
+
+
Diagnostics différentiels Traitement palliatif Non résécable Laparoscopie exploratrice Échoendoscopie + biopsieFigure11. Arbredécisionneldanslediagnosticetlesuividestumeurspancréatiques.TDM:tomodensitométrie;IRM:imagerieparrésonancemagnétique;
TEP:tomographieàémissiondepositrons.
microscopie électronique positive pour de nombreux granules cytoplasmiques et un abondant réticulum endoplasmique. Sur le planradiologique, Chiouetal.ontétudiédixcasetobservé unetumeurbiendélimitéechezhuitpatients,parmilesquelssix présentaient une capsule fortement vascularisée. Huit patients présentaientégalementdelanécroseenquantitévariableetcinq présentaientdescalcificationsaucentredelatumeur.Aucunedes tumeursneprésentaitdefoyerhémorragique[76].Tatlietal.ont retrouvé des caractéristiquessimilaires dansleur série[77].Dans une des séries, l’envahissement vasculaire étaitprésent chez la moitiédespatients[76]et,dansuneautre,unenvahissementdu duodénum observésurquatredes cinqmasses situées àla tête dupancréas[77].Cettetumeurétantdécouvertelargeet exopan-créatique, parfois multiple dansle pancréas, son pronostic est équivalentàceluidel’adénocarcinomecanalaire,àladifférence qu’ellesemblecependantdavantageradiosensible[78].
Tumeur
pseudopapillaire
Lestumeurspseudopapillairessontdestumeursd’histogenèse incertaine qui sont classiquement découvertes chez la femme jeune. Leur pronosticest excellent comparéà celui des adéno-carcinomes classiques du pancréas. Sur le plan pathologique, cestumeurssonttypiquementlargesetencapsulées,contenant desdegrésvariablesdecomposantssolides,kystiquesetsurtout hémorragiques. Bien querares, ces tumeursdoivent être diag-nostiquéeschaquefoisquepossible.Lesdonnéespathologiques offrentla possibilité des’approcherdu diagnostic enimagerie, carleshémorragiesintratumoralesnesontpasfréquentesdans lesautrestypeshistologiques[79].Leuraspectéchographiquen’est pascorréléavecl’apparencehistopathologique.Enrevanche,elles apparaissent hétérogènesenTDM,avecdesfoyers hyperdenses non calcifiés,etprésententdesairesd’hypersignalspontanéen pondérationT1enIRM[80].
Pancréatoblastome
Le pancréatoblastome est une autre tumeur rare du pan-créas, d’histogenèse incertaine, touchant principalement les enfants d’âge compris entre 1 et 8ans,et exceptionnellement lesnouveau-nésetlesadultes.Bienquecertainesformes congé-nitales aient été décrites en association avec le syndrome de Beckwith-Wiedemann, les pancréatoblastomes sont essentielle-ment sporadiques et d’étiologie inconnue. Cette tumeur est classiquement constituée d’un mélange d’éléments tumoraux primitifsacinaires,canalairesetendocrines,évoquantune rémi-niscencedepancréasfœtalpeudifférencié,commeàlaseptième semaine d’âge gestationnel[81]. Plusieurs marqueurs tumoraux tels que le CEA, le CA19-9 et l’alphafœtoprotéine peuvent être élevés[82]. Au plan macroscopique, le pancréatoblastome est une tumeur au moins partiellement encapsulée, de consis-tance variable et hétérogène. Elle peut présenter des aires kystiques et des calcifications macroscopiques; les anomalies enimagerieTDMetIRMreproduisentcette hétérogénéité[81,83]. L’envahissementdesstructuresvasculairesn’estpasexceptionnel, maislasurvie despatientsopérablesestmeilleure quepourles adénocarcinomes[84].
Diagnostic
différentiel
Lespectremorphologiquedestumeurskystiquesdu pancréas inclutdeslésionscongénitales(kystes),inflammatoires (pseudo-kystesetabcès)ettumorales(adénomesmicrokystiques,tumeurs mucineuses kystiques, tumeurs mucineuses papillaires intraca-nalaires ettumeursendocrines). Cestumeurs sontdécrites par ailleurs,maispeuventêtredifficilesàdistinguerdestumeurs hété-rogènes partiellement kystiques du pancréasexocrine, comme les formes fortement nécrotiques de l’adénocarcinome cana-laire, le pancréatoblastome et la tumeur pseudopapillaire[85–87]. Lediagnosticdifférentieldestumeursdupancréasexocrineinclut
Cancersdupancréasexocrine33-653-A-10
A
B
*
*
C
D
WirsungE
*
F
G
H
*
Figure12. Surleplanmicroscopique,l’aspecttypiquedesadénocarcinomescanalairesdupancréasestceluid’uneprolifération detissutubuliforme
contrastantavecletissupancréatiquenormal(àdroitedelaligneenpointillés)àfaiblegrossissement(A,HE×20).Leszonesdeprolifération(B,HE×40,
flèches)sontassociéesàunefibrosedesmoplasique(astérisques).Danssavariantelaplusfréquentequ’estlecarcinomeadénosquameux,onpeutobserver
unematurationcornéedesîlotstumoraux(C,HE×40,flèche).Lepointdedépartdelaproliférationauniveaudelamuqueuseduodénale(D,HE×20,
encadré)ouunedifférenciationmucineuse(E,HE×20,flèches)descellulestumoralesaudépartdelaparoid’unkyste(astérisque)signentrespectivement
l’ampullomeetlatumeurmucineusekystique,tandisquelestumeursneuroendocrinessontreconnaissablesàleurcellularitédense,uneabsencedefibroseet
destructurestubulaires(F,HE×20).Lesprincipalesaffectionsnontumoralespouvantmimerlesadénocarcinomescanalairesdupancréassontlespancréatites
chroniquesdanslesquellesonn’observepasdeprolifération,maisunaccroissementdelaproportiond’îlotsdeLangerhans(G,HE×20,flèches)etuneperte
deslobulespancréatiquesquisontdissociésparunefibrosedésorganisée(H,HE×40,astérisque).
égalementd’autresaffectionstumoralesetnontumoralesdu pan-créas et des espaces péripancréatiques qu’il est intéressant de connaître(Fig.12).
Affections
tumorales
Tumeurs
ampullaires
et
périampullaires
Les affections tumorales simulant le plus fréquemment les adénocarcinomes céphaliques sont les tumeurs ampullaires et périampullaires,quiincluentlesampullomes, lestumeursdela voiebiliaireprincipaleetlestumeursduodénalespériampullaires. Ellesse manifestentà un stade plusprécoce queles adénocar-cinomes et leuropérabilité est plusfréquente. Le pronosticde cestumeursaprèsprocéduredeWhipple estmeilleurquecelui destumeurspancréatiquescéphaliques.Surleplananatomique, l’ampouledeVater,quiestlecanalcollecteurrésultantdelafusion entrelescanauxbiliaireetpancréatique,n’estprésentequechez 60%dessujets.Ensonsein,lesépithéliumsduodénal,biliaireet pancréatiquesecôtoientdeprès.Cetteparticularitéanatomique peutrendredifficilel’identificationhistologiquedelatumeur,et
lediagnosticdéfinitif est souventbasé surl’analyse morpholo-giquedelapièceopératoire.Ladilatationdelavoiebiliaireet/ou descanauxpancréatiquesestl’anomalielaplussouvent rencon-trée.Lacholangiopancréatographie par IRMa progressivement remplacélaCPREpourlamiseenévidencedecestumeurs.Les pro-céduresendoscopiquesrestentcependantindiquéespourréaliser dessphinctérotomiespalliatives,identifierlalésionlorsqu’aucune autretechniquen’yestparvenue,etréaliserdesprélèvements.
EnIRM, l’ampullome apparaît commeune tumeur de petite tailleentraînantuneobstructioncupuliformedubascholédoque etfaisantprotrusionauseindelalumièreduodénale.Un épaissis-sementirrégulierdesparoisdistalesducholédoqueetducanalde Wirsungpeutêtredémontré.Rarement,lescanauxpancréatiques secondairessontdilatés,contrairementàcequiestobservédans lestumeurspancréatiques.
Les carcinomes de la voie biliaire distale se manifestentpar unesténoseprogressiveensablieravecparoisépaissesdelavoie biliaireouunemasseendoluminalebourgeonnanterehausséepar lecontrasteintraveineux.Cheztroispatientssur27(11%)dansla sériedeKimetal.,unedilatationducanaldeWirsungétait asso-ciée.Cettedilatationrésultaitd’uneextensionintrapancréatique