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Partie 1 : Effets attendus du changement climatique sur l’agriculture dans les

1.3.4 Dans la zone tropicale humide

L’agriculture en Afrique tropicale humide

Dans les zones tropicales humides, les conditions climatiques favorisent une végétation dense. La production alimentaire est basée sur les forêts. Le riz pluvial est souvent l’une des cultures de base (International Sustainability Council, 2013).

Changements climatiques en Afrique tropicale humide

La littérature sur l’évolution climatique en Afrique tropicale humide et ses conséquences pour l’agriculture est plus restreinte que pour les autres zones étudiées. Les températures moyennes augmentent globalement tandis que la durée des vagues de chaleur s’allonge. Selon la Banque mondiale (2013), aucune tendance sur le long terme n’a été observée dans les zones tropicales humides concernant la pluviométrie, même si on estime que les précipitations moyennes annuelles devraient diminuer dans les forêts tropicales (Boko et al., 2007). Au Nord Congo par exemple, les précipitations ont diminué d’environ 3 % entre 1960 et 1998 (Somorin et al., 2010). La pluie devrait se concentrer dans des saisons humides plus courtes, tandis que les périodes de sécheresse s’allongent. En Sierra Leone par exemple, des périodes prolongées de jours secs ont été observés même pendant les saisons humides. En outre, les températures plus élevées et l’humidité de l’air provoquent des pluies extrêmes (Ministry of environment, water and forests of Madagascar, 2006). En effet, les pluies violentes deviendront plus intenses et plus fréquentes à mesure que les températures globales augmentent (Pachauri et al., 2014).

De plus, la fréquence des cyclones a doublé au cours des 15 dernières années en comparaison avec les 15 années précédentes dans les zones tropicales humides de Madagascar (expert d’ONG).

Effets sur les ressources en eau

Paeth et al. (2008) prévoient un réchauffement de surface qui affaiblirait le cycle hydrologique dans la majorité de l’Afrique tropicale. La disponibilité de l’eau serait inégalement répartie sur l’année.

Effets sur les sols et les paysages

Paeth et al. (2008) soulignent l’influence de la couverture du sol sur le climat en Afrique tropicale. Ils estiment que les sécheresses de la deuxième moitié du 20ème siècle en Afrique tropicale ont été au moins en partie la conséquence de l’évolution de la couverture du sol vers moins de végétation. Il est donc primordial de protéger cette couverture dans ces régions, afin de limiter le dessèchement. De plus, maintenir un couvert végétal pourrait limiter les impacts des pluies violentes et des cyclones sur la fertilité des sols.

Implications pour l’agriculture

Les vagues de chaleur plus longues et les sécheresses intercalaires en saison humide pourraient accentuer le stress thermique des cultures et des animaux. Les sécheresses saisonnières perturbent le calendrier cultural des systèmes pluviaux (Ministry of environment of the Democratic Republic of Congo, 2006). Cependant, des plantes tropicales comme le

maïs, le sorgho, le mil ou la canne à sucre devraient pouvoir s’adapter. En effet, Denhez (2007) explique que le réchauffement devrait être favorable aux plantes appréciant les climats chauds. Gerardeaux et al. (2012) estiment aussi que la croissance du riz devrait être favorisée par l’augmentation de la température et de la concentration en CO2 à Madagascar, même si la durabilité des systèmes de riz pluvial est menacée par la diminution des pluies. En Afrique de l’Ouest, des pluies violentes sans précédent ont été observées, perturbant les pratiques agricoles tout en favorisant les adventices. Ces extrêmes pluviométriques, ainsi que les cyclones, causent aussi des pertes de cultures (Jalloh et al., 2013).

Influence sur la sécurité alimentaire

Les évènements extrêmes comme les pluies violentes causent des destructions d’infrastructures, ce qui affecte le stockage et la distribution des aliments, donc la sécurité alimentaire.

Les systèmes agricoles pluviaux et basés sur la forêt d’Afrique tropicale humide sont menacés par les tendances majeures du changement climatique suivantes : une augmentation des températures moyennes ; un raccourcissement de la saison des pluies, des cyclones plus fréquents et plus intenses ; des pluies violentes plus fréquentes et plus intenses ; des sécheresses temporaires plus fréquentes et plus longues pendant la saison humide ; et des vagues de chaleurs plus longues. Ces évolutions engendrent des enjeux importants pour les paysans, qui sont résumés dans le Tableau 5.

Tableau 5 – Principaux enjeux du changement climatique pour les paysans des zones tropicales humides d’Afrique

Facteurs affectés

Impacts sur les ressources naturelles et les moyens de

production Enjeux pour les paysans

Paysage Réduction de la couverture

végé-tale Réchauffement de la surface et

réduction de l’humidité du sol Eau Incertitude accrue de la

disponibi-lité spatiale et temporelle de l’eau Raccourcissement des saisons des pluies

Diminution de la quantité d’eau disponible

Difficulté à prévoir le calendrier cultural

Approvisionnement insuffisant en eau

Sol Dégradation par les pluies vio-lentes et les cyclones

Réduction de la couverture végé-taleAugmentation de l’érosion des sols

Diminution de la fertilité des sols

Plantes Sensibilité des cultures aux séche-resses intercalaires

Réchauffement de surface Développement des maladies Développement des adventices Sensibilité des cultures aux vagues de chaleur

Destruction par cyclones

Diminution des rendements des cultures

Pertes de cultures

Diminution de la durée de vie des produits

Plantes Destruction des infrastructures de stockage par les évènements extrêmes

Animaux Sensibilité des animaux aux sé-cheresses intercalaires et vagues de chaleur

Développement des maladies

Diminution de la productivité ani-male

Sécurité

alimen-taire Destruction des infrastructures par

les évènements extrêmes Accès plus restreint aux marchés

Globalement, les températures augmentent et les régimes pluviométriques de-viennent de plus en plus imprévisibles en Afrique, avec des disparités régionales.

De plus, des évènements climatiques extrêmes divers se multiplient dans de nom-breuses régions. Les effets du changement climatique vont très vraisemblable-ment restreindre la production agricole et l’accès aux alivraisemblable-ments dans de nombreux pays africains, dont les populations continuent de croître. La vulnérabilité du sec-teur agricole est accentuée par des enjeux existants du développement comme la pauvreté, les aspects institutionnels et de gouvernance, un accès limité au capi-tal, la dégradation des écosystèmes et des désastres et conflits complexes. Les paysans seront les plus affectés alors qu’ils contribuent pour près de 90 % de la production agricole en Afrique.

Même si la société mondiale arrêtait aujourd’hui d’émettre des gaz à effet de serre, le réchauffement serait de toute façon inévitable dans les prochaines décennies (IPCC, 2014).

Il est donc urgent de trouver des solutions pour réduire la vulnérabilité des paysans. Si des changements au niveau institutionnel sont difficiles à obtenir, on devrait pouvoir agir à l’échelle des pratiques agricoles5. D’un côté, le secteur agricole contribue pour 14 % des émissions de gaz à effet de serre (Branca et al., 2013). D’un autre côté, l’agriculture présente un potentiel majeur d’atténuation. En effet, des pratiques améliorées de gestion des cultures et de l’élevage pourrait respectivement permettre une réduction des émissions de CO2 et de Ch4 et N2O. En outre, la séquestration du carbone peut être stimulée grâce aux techniques de l’agriculture de conservation, de l’agroforesterie, de gestion améliorée des pâturages et de restauration de terres dégradées. L’adoption de pratiques agricoles durables pourrait donc jouer un rôle majeur dans l’atténuation du changement climatique.

Les paysans mettent en place des techniques agricoles qui conviennent à l’environnement dans lequel ils produisent. En effet, ils ont développé des pratiques qui permette de subvenir aux besoins des cultures et des animaux selon la disponibilité des ressources naturelles dans des régions variées présentant une grande diversité de climats, de types de sols et de végétation.

En réponse aux effets directs et indirects du changement climatique sur la production agricole, les paysans peuvent adapter leurs systèmes afin de continuer à produire des aliments et assurer la sécurité alimentaire. Certains imaginent des pratiques innovantes ou améliorent des techniques traditionnelles pour répondre aux nouvelles conditions climatiques. Parmi la diversité des stratégies d’adaptation paysannes, nous avons choisi de nous concentrer sur les stratégies agroécologiques. La deuxième partie de l’étude présente donc des pratiques d’adaptation basées sur l’agroécologie.

5 Le terme “pratique” regroupe les systèmes techniques et organisationnels mis en place par les paysans à différentes échelles : la parcelle, l’exploitation et le territoire.

Partie 2 : Pratiques agroécologiques d’adaptation