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xxw L’importance des pertes

Dans le document La conservation des grains après récolte (Page 37-42)

Les céréales restent, encore aujourd’hui, la base de l’alimentation mondiale, notamment dans les pays du Sud où elles constituent souvent l’essentiel de la ration alimentaire. Pendant des décennies, l’objectif principal de nombreuses politiques agricoles a été d’accroître la production pour chercher à atteindre l’autosuffisance alimentaire. Les efforts, en particulier de la recherche agronomique, ont permis d’obtenir des progrès notables sur les rendements grâce à la création de variétés améliorées et au développement de moyens de production plus performants. Mais tout ce qui est produit n’est pas directement consommé par l’homme ou par les animaux d’élevage car une partie des récoltes est perdue au cours des opérations après récolte et de transformation.

En raison de la croissance considérable des marchés urbains, il est devenu évident qu’une stratégie fondée uniquement sur l’amélio-ration de la production agricole ne suffirait pas à faire face à l’aug-mentation de la demande alimentaire. Afin de maximiser le volume de production agricole disponible pour la consommation, il faut accorder plus d’importance aux systèmes post-récolte et précisément à la réduction des pertes tout au long de la filière. Dès 1976, dans un manuel du Centre de Recherches pour le Développement international (CRDI), on précisait que « Bien compris, le système post-récolte devrait commencer au moment et au lieu de la récolte et se terminer seulement à la table du consommateur. D’un bout à l’autre, il devrait assurer un revenu maximum à tous ceux qui œuvrent, tout en minimisant les pertes et en maximisant les bénéfices » (Spurgeon, 1976).

1. Gasga : Groupe d’Assistance aux systèmes concernant les grains après récolte. Les huit membres du Gasga étaient : ACIAR (Australie), Cirad (France), CRDI (Canada), FAO (Italie), GTZ (Allemagne), KIT (Pays-Bas), KSU (USA) et NRI (Royaume-Uni).

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Les pertes post-récolte ont diverses origines et dépendent de nombreux facteurs endogènes (évolution naturelle d’une denrée vivante) ou exogènes physiques (humidité, température…) et biologiques (moisis-sures, insectes, rongeurs…) et la complexité des systèmes post-récolte selon les filières et les pays rend parfois difficile leur évaluation. On peut néanmoins bien distinguer les zones tropicales humides des zones tropicales sèches car les problèmes de conservation y sont souvent très différents. Dans les zones humides, c’est la stabilité du produit qui est prépondérante (problème de séchage, moisissures, mycotoxines….) et les risques de pertes sont importants alors que dans les zones sèches, les problèmes majeurs, en dehors des périodes d’hivernage, restent essentiellement liés aux ravages des déprédateurs (insectes, rongeurs…).

À la fin des années 1970, les premières informations disponibles sur l’importance des pertes avaient été récapitulées par l’Académie des Sciences aux États-Unis et presque toutes les données concernaient les céréales et des légumineuses. Les données des pertes sur les racines et les tubercules ou sur les fruits et légumes étaient beaucoup plus rares. Les pertes post-récolte mesurées en Asie du Sud dans les années 1970 (De Padua, 1979) ont été validées par différents projets et ont long-temps été considérées comme des standards pour la filière riz. Elles sont rappelées dans le tableau 2.1.

Tableau 2.1. Pertes post-récolte de riz en Asie du Sud-Est.

Séquence post-récolte Pertes en poids (%)

Récolte 1 – 3 Manutention 2 – 7 Battage 2 – 6 Séchage 1 – 5 Stockage 2 – 6 Transformation 2 – 10 Total 10 – 37

En 1998, une synthèse des résultats de mesures de pertes réalisées par différents projets Prevention of Food Losses dans différents pays d’Asie a été réalisée (tableau 2.2).

Pour l’Afrique, des valeurs sur les pertes au stockage de certains produits agricoles relevées dans les années 1970-1980 sont données dans le tableau 2.3 (Schulten, 1982).

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Tableau 2.2. Comparaison des pertes post-récolte en riz (exprimées en %) dans différents pays d’Asie.

Séquence post-récolte Bangladesh (%) Myanmar (%) Indonésie (%) Népal (%) Sri Lanka (%) Thaïlande (%) Récolte 2,3 2,1 0,8 1,9 0,8 10,1 Séchage au champ 0,7 0,4 - 1,9 0,5 1,2 Transport 0,5 0,4 - 0,5 - 1,0 Mise en meule et battage 1,4 0,4 - 2,2 3,3 2,3 Séchage 1,6 - 2,9 1,6 - -Étuvage 1,9 - - - - -Stockage 0,9 - 3,2 6,3 7,5 -Transformation 3,8 - 4,4 4,4 - -Total estimé par projet 13,2 - 12,2 16,2 12,0 14,6

Les valeurs doivent être interprétées avec prudence, elles permettent néanmoins d’identifier les séquences où se produisent les pertes post-récolte et leur importance relative (Ashburner, 1998).

Tableau 2.3. Pertes (en % du poids) au stockage de quelques produits agricoles en Afrique (Schulten, 1982).

Produit Pays Pertes (%) Remarques

Maïs Bénin 8 - 9 8 mois de stockage

Côte d’Ivoire 5 - 10 12 mois de stockage en épis

Ghana 15 8 mois de stockage

Togo 5 - 10 6 mois de stockage centralisé

Rwanda 10 - 20 Stockage à la ferme

Mil Mali 2 - 15 2 - 4 % stockage à la ferme

10 - 14 % en stockage centralisé

Sorgho Zambie 0 - 10 Variétés améliorées : 10 %

Légumineuse Ghana 7 - 45 En grains de 1 à 5 mois; en gousses :

22%

Zambie 40 Niébé

Kenya 30 Stockage à la ferme

Riz Afrique Ouest 6 - 24 Séchage, 1–2 % ; stockage à la ferme,

2-10 % ; étuvage, 1-2 % ; usinage, 2-10 %

Sierra Leone 10

Racine Ghana 10 - 50 Igname

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Les principaux constats, qui sont encore d’actualité, étaient les suivants : – les pertes dans le maïs stocké sont généralement importantes, notamment avec les variétés améliorées et les hybrides ;

– les légumineuses ont des niveaux de pertes plus élevées que les céréales et le niébé est l’objet de pertes particulièrement importantes pendant le stockage ;

– des pertes de transformation sont spécifiquement mentionnées pour le riz.

Pour de nombreuses denrées comme les céréales, l’importance des pertes varie selon la nature du matériel végétal. Les variétés tradi-tionnelles sont davantage résistantes à l’attaque des insectes que les variétés améliorées ou les hybrides. Des recherches réalisées au Malawi ont montré que les pertes en poids de maïs stocké pouvaient être supé-rieures à 20 % avec des maïs hybrides alors qu’elles n’étaient que de 3 % avec des variétés locales (Schulten, 1982).

Figure 2.2.

Pourcentage de grains de maïs attaqués par les insectes au Malawi (d’après Schulten, 1982).

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Plus récemment, la base de données African postharvest losses informa-tion system (APHLIS) a été créée pour estimer les pertes de céréales en Afrique subsaharienne à partir de données d’experts. Les pertes en poids cumulées sont habituellement estimées entre 10 et 23 % et les niveaux de pertes selon les différentes séquences post-récolte sont donnés dans le tableau 2.4.

Tableau 2.4. Pertes en poids au niveau des différentes séquences de post-récolte pour les céréales en Afrique subsaharienne.

Séquence de post-récolte Pertes en poids (%)

Récolte – séchage au champ 4 – 8

Transport vers l’habitation 2 – 4

Séchage 1 – 2 Battage 1 – 3 Vannage 1 – 3 Stockage à la ferme 2 – 5 Transport au marché 1 – 2 Stockage au marché 2 – 4 Pertes cumulées 10 – 23

Le niveau total des pertes estimées, selon différentes céréales, au cours des dernières années est rappelé dans le tableau 2.5.

Tableau 2.5. Pertes (en % du poids) pour différentes céréales en Afrique subsaharienne (Hodges et al., 2014).

Céréale Pertes (%) 2010 2011 2012 2013 Maïs 18,8 17,8 18,0 17,6 Riz 12,6 12,1 13,6 12,2 Sorgho 12,6 12,4 12,4 12,3 Mil 9,9 10,1 10,1 10,1 Fonio 12,2 11,7 11,8 11,7 Teff 12,5 12,5 12,4 12,5 Blé 14,0 13,1 12,9 15,2

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