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La recherche ici présentée ne se limite pas à la rupture quasi-statique, sujet en développement constant, encore plus exploré que la rupture dynamique. Nos intérêts principaux sont des développements numériques faisant appel aux théories cohésives pour la description de la rupture. Nous sommes convaincus que les modèles cohésifs peuvent jouer un rôle déterminant. Nous suivons des développements récents dans les approches variationnelles appliquées à l'analyse de la rupture, et notre eort est consacré à la combinaison des théories basées sur l'énergie avec des procédures de rémaillage.

Comme observé dans les sections précédentes, la complexité de la rupture sous conditions dynamiques suggère de raner le maillage des éléments nis pour mieux suivre le cheminement des ssures dans les matériaux fragiles. Ce n'est pas le cas pour l'analyse de la propagation de ssure sous conditions quasi-statiques. Le chem-inement quasi-statique de ssures impose inévitablement de faire appel à des outils plus

sophistiqués.

Comme beaucoup de phénomènes non-linéaires se produisant quand des solides sont déformés au delà de leur limite élastique (par exemple, bandes de cisaillement dans les matériaux granulaires, surfaces de glissement dans les cristaux ductiles, défauts dans la croûte terrestre), la rupture se localise dans des zones étroites. Contrairement aux déformations régulières, l'énergie associée aux déformations localisées est non convexe. La nature diérente de l'énergie induit une compétition entre les déformations régulières et localisées, conduisant en général à l'instabilité du matériau.

Les mathématiciens suggèrent une approche particulière pour l'analyse des déforma-tions localisées: ils supposent que le phénomène se produit sur une entité géometrique de dimension inférieure. Dans le cas de la rupture, cette entité (où se situe la discontinu-ité) est la surface inconnue de rupture. D'après la terminologie du calcul des variations présentée par De Giorgi, les problèmes de discontinuité libre sont des problèmes où l'inconnue est un couple (u, K), où K varie dans une classe d'hypersurfaces fermées (susamment régulières) contenues dans un ouvert xe Rn, et u : Ω\K Rn

(c'est-à-dire,u est déni partout excepté surK) appartenant à une classe de fonctions susamment régulières.

Les problèmes de discontinuités libres sont habituellement de la forme:

min{Ev(u, K) +Es(u, K) + lower order terms} (1.5)

Ev, Es sont interprétés comme des énergies de volume et de surface, respective-ment. Dans le cas d'un corps élastique dans la conguration de référence,K représente la surface de la ssure, etureprésente la déformation élastique dans la partie intacte du corps. Une expression simple de l'énergie globale peut être dérivée du critère de Grith de la propagation d'une ssure [75]. En tenant compte de l'inégalité dans l'équation (1.1), l'expression de l'énergie pour un corps isotrope en rupture est simplement pro-portionnelle à la supercie deK:

Es(u, K) =γHn−1(K) (1.6) Hn−1 est la mesure de Hausdor, qui sous l'hypothèse de régularité correspond à l'aire de rupture. Plus généralement, quand il est nécessaire de distinguer l'ouverture et le glissement le long de la ssure,Es est une intégrale surK dépendant de la normale

ν sur la surface de la ssure:

Es(u, K) =

Z

K

Φ(ν)dHn−1(K). (1.7) L'énergie de volume prend la forme

Ev(u, K) =

Z

\K

W(u)dx. (1.8)

La formulation des formes fonctionnelles appropriées de l'énergie d'un solide pour tenir compte des contribution en volume et en surface, a été le sujet d'une recherche active, voir par exemple les travaux par Braides and Chiadò Piat [27], Fonseca et Francfort [67], Braides et al. [29], et Ambrosio et Braides [5].

En raison de la dépendance des énergies par rapport à la surface K, le traite-ment des problèmes de discontinuité libre avec des méthodes directes de calcul des variations présente beaucoup de dicultés. À moins que les contraintes topologiques soient incluses, l'unique information que de telles énergies soient bornées ne permet pas en général de déduire les propriétés nécessaires de compacité. De Giorgi a pro-posé d'interpréter K comme ensemble de points de discontinuité de la fonction u, et de placer les problèmes dans un espace de fonctions discontinues, sujet à deux types de conditions. La première est une propriété de structure: siK est l'ensemble de points de discontinuité de la fonctionu, alorsKpeut être interprété comme une hypersurface, et u est diérentiable sur \K de sorte que l'énergie en volume qui dépend de ∇u, puisse être dénie. La seconde est une propriété de compacité: il est possible d'utiliser la méthode directe de calcul des variations en obtenant la compacité des suites de fonctions avec énergie bornée. L'espace qui satisfait aux deux conditions est l'espace des fonctions spéciales de variations bornées (space of functions of bounded variation, SBV) dénies par De Giorgi et Ambrosio [56]. En particulier, une fonction u appar-tient àSBV(Ω)si et seulement si sa dérivée au sens de distributionsDuest une mesure bornée qui peut être separée en deux parties, l'une en volume et l'autre en surface. Les détails mathématiques de la dénition peuvent être trouvés dans la littérature spéci-que, voir, par exemple, le livre de Dal Maso [48]. Ici, nous disons simplement que si u∈SBV(Ω), l'ensemble K peut être remplacé par un ensemble S(u), caractérisé par une normale théoriqueνn, des tracesu+ etu−des deux côtés de la discontinuité, et un

gradient approché. Le remplacement conduit à une formulation faible de la forme: E(u) = Z \K W(x, u,∇u)dΩ + Z S(u) Φ(x, u+, u, νu)dHn−1(K). (1.9) Ambrosio [3, 4] a donné une théorie d'existence pour des problèmes impliquant ces types d'énergies. Divers résultats de régularité montrent que, pour une large classe de problèmes, la solution faible u dans SBV(Ω) fournit une solution du problème de discontinuité libre correspondant. La théorie d'existence n'exclut pas malheureusement quelques inconvénients sérieux. D'abord, le manque de dierentiabilité dans n'importe quelle norme raisonnable implique l'impossibilité d'aborder directement les problèmes d'évolution. En second lieu, de très délicats problèmes numériques apparaissent dans la détermination de la surface de discontinuité inconnue.

Alternativement, on peut faire recours aux techniques numériques de solution et rechercher des approximations variationnelles en employant des énergies diérentiables dénies sur des fonctions régulières. Cette approche est basée naturellement sur la notion de Γ-convergence de De Giorgi [58]. Une famille (Fε) de fonctions à valeurs réelles dénies sur un espace métriqueX Γ-converge versF quandε→0+ si pour tout x∈X est satisfaite l'inégalité suivante en limite inférieure:

F(x)lim infε→0+Fε(xε) quand xε→x (1.10)

et l'existence d'une suite telle que:

F(x) = lim infε→0+Fε(xε) pour quelquexε, avec xε→x (1.11)

La Γ-convergence vérie des propriétés de compacité, et, selon des hypotèses addi-tionnelles appropriées, est susamment robuste pour garantir que les minimums et les minimiseurs pour des problèmes relatifs à Fε convergent vers les minimums et les minimiseurs relatifs à la fonctionnelle originale, voir le livre de Dal Maso [48].

Une formulation variationnelle pour l'évolution d'une surface de rupture dans un solide fragile et linéairement élastique a été proposée par Francfort et Marigo [68]. Bourdin et al. [24] ont combiné cette technique avec la méthode des éléments nis classique pour résoudre avec succès des problèmes de rupture à deux-dimensions. La généralisation à des fonctions vectorialles à fait l'object de démonstrations mathéma-tiques partielles. Ce domaine est actuellement l'object de nombreuses investigations.

tenant compte de l'irréversibilité, on élimine les solutions irréalistes, où des sauts d'un minimiseur à l'autre apparaissent avec l'augmentation du paramètre de chargement. L'irréversibilité est obligatoire dans la dénition d'une approche entièrement évolutive. La base théorique des approches évolutives a été développée par Dal Maso et al. [50, 49]. Motivé par le travail précédemment mentionné, notre idée d'approcher la rupture quasi-statique est basée sur le concept de minimisation de l'énergie combiné avec la discrétisation par éléments nis et les modèles cohésifs.

Nous avons déjà précisé la nécessité d'identier la position de la ssure à l'intérieur du corps, qui dans notre approche (décrite en détail dans le Chapitre3) est connée aux interfaces des éléments. La restriction réclame l'adaptation du maillage, sous une forme particulière appelée r-adaptivité. La r-adaptivité implique le mouvement des noeuds dans la conguration de référence; i.e., les coordonnées nodales ne sont pas xes mais peuvent se déplacer an d'améliorer la discrétisation des éléments nis. L'amélioration du maillage peut être poursuivie de diérentes manières, mais ici nous prenons en compte des considérations énergiques; et nous voulons que le maillage optimal soit celui qui réduise au minimum l'énergie totale du corps discrétisé. Ce concept a été exploité par Thoutireddy et Ortiz [182] dans le cadre de l'élasticité non-linéaire. En supposant une dépendance de l'énergie non seulement à l'égard le champ du déplacement, mais également à l'égard des coordonnées nodales d'une discrétisation, il est possible de dériver les équations d'Euler-Lagrange impliquant la stationarité de l'énergie. De telles équations dénissent un système non-linéaire qui inclut les résidus standards d'une approche par éléments nis et les résidus des forces basées sur la conguration, c'est-à-dire, les forces qui expriment l'inhomogénéité du volume induit par la discrétisation. En combination avec la rupture, la contribution des forces congurationnelles est employée pour détecter le chemin optimal de ssure en combinaison avec la discrétisation choisie. Cette recherche est actuellement en cours de développement, mais elle exploite toutes les ressources présentées dans ce travail et représente notre prochaine étape dans les applications des modèles cohésifs.

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