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La voie NB-LRR réprime de manière spécifique la traduction des ARNs viraux

3.1 Mécanismes moléculaires et acteurs protéiques en jeu lors du décoiffage et de la

3.1.1 La voie NB-LRR réprime de manière spécifique la traduction des ARNs viraux

Afin de pouvoir se concentrer exclusivement sur la réponse NB-LRR, un système d'induction de cette voie de défense a été élaboré au laboratoire. La lignée transgénique de Nicotiana benthamiana pTA50 a été générée. Elle possède la particularité de contenir un transgène codant pour le fragment p50 de la réplicase de la mosaïque du virus du tabac, sous le contrôle d'un promoteur inductible à la dexaméthasone (Aoyam & Chua, 1997; Peart et al., 2002). Une fois exprimé, p50 est reconnu par la protéine NB-LRR N, ce qui déclenche la réponse de défense NB-LRR. La lignée pTA50 permet ainsi d'activer la voie NB-LRR après traitement à la dexaméthasone (DEX). Cette voie de défense, une fois activée, est capable de cibler de manière indiscriminée tout pathogène.

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Dans le but d'étudier le devenir traductionnel des ARNs viraux après déclenchement de la voie NB-LRR, des plantes pTA50 ont été agroinfiltrées avec une construction PVX-LUC codant pour PVX en association avec l'enzyme bioluminescente de la luciférase Firefly, ainsi qu'avec une construction codant pour la luciférase Renilla, sous le contrôle d'un promoteur 35S. La Renilla luciférase fait office de marqueur d'efficacité de transformation et d'extraction. Trois jours après l'infiltration, les plantes ont été traitées à la dexaméthasone afin d'induire la réponse NB-LRR. Des sections de feuilles ont été prélevées directement après traitement à la dexaméthasone (0h) et au bout de 8h, et le ratio de luciférase Firefly sur Renilla a été déterminé. Le calcul de ce ratio permet de normaliser l'activité de la luciférase Firefly sur celle d'un contrôle interne, ici la luciférase Renilla, afin d'éviter les biais que des efficacités de transformation et d'extraction variables pourraient induire au sein de l'analyse. 8h après traitement à la dexaméthasone, ce ratio a décru d'environ 50%, ce qui indique un niveau de traduction des ARNs de PVX réduit de moitié (Figure 5A). Ce phénomène ne semble pas être la conséquence du mécanisme d'interférence par ARN, comme l'absence de restauration significative du ratio F/R en présence de P19 le démontre (Figure 5A). De plus, lorsque la région codante pour la capside est absente dans la construction PVX (PVX∆CP), ce phénomène de répression traductionnelle déclenchée par la réponse NB-LRR via N n'apparaît pas (Figure 5A).

Ainsi, nous avons montré que la réponse NB-LRR déclenchée par N induisait la répression de la traduction des ARNs de PVX et que cette répression dépendait de la présence de la région codante pour la capside.

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Nous avons ensuite démontré que l'inhibition de l'expression des ARNs de PVX engendrée par la réponse NB-LRR se faisait exclusivement au niveau de la traduction. En effectuant un Northern Blot anti-LUC sur l'ARN total, aucune différence n'apparaît entre la condition contrôle et de réponse NB-LRR ainsi qu'entre les constructions PVX∆CP-LUC et PVX-LUC (Figure 5B). Ce résultat prouve bien que la réponse NB-LRR ne cause pas la dégradation des ARNs viraux.

En effectuant un autre Northern Blot sur des ribosomes culottés après ultracentrifugation sur coussin de sucrose, nous avons démontré que la réponse NB-LRR induisait une diminution drastique de la quantité d'ARNs PVX-LUC liés aux ribosomes (Figure 5B). En revanche, aucun changement en terme d'abondance d'ARN n'a été observé dans les fractions ribosomales de PVX∆CP- LUC entre les conditions contrôle ou réponse NB-LRR (Figure 5B). Ces résultats indiquent donc que l'inhibition de l'expression des ARNs viraux engendrée par la réponse NB-LRR n'a lieu qu'au niveau de la traduction et uniquement lorsque les ARNs viraux contiennent la séquence codante pour la capside virale.

En outre, nous avons démontré que l'inhibition de la traduction ne portait pas sur l'ensemble des ARNs messagers. En effet, cette inhibition est hautement spécifique et ne concerne que les ARNs viraux, comme l'absence de variation entre des profils de polysomes en condition contrôle et de réponse NB-LRR le démontre (Figure 5C). Ainsi, l'activation de la réponse NB-LRR après reconnaissance du virus PVX dans la cellule végétale se traduit par un mécanisme d'inhibition traductionnelle totalement différent de celui qui peut être causé par un stress abiotique comme une irradiation aux UV (Figure 6). Cette inhibition traductionnelle est d'une amplitude bien moindre et est spécifique aux transcrits d'origine exogène.

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Figure 5. La résistance causée par N implique l’interruption de la traduction des ARNs de PVX mais pas la répression globale de la traduction de la cellule. (A) Tests d’activité de

luciférases sur des tissus infectés par PVX-LUC. L'activité de la F-LUC est normalisée sur celle de la R-LUC. Les barres d’erreur représentent l’erreur-type. Les astérisques indiquent les différences statistiquement significatives avant et après traitement au DEX, pour une p-value inférieure à 0,001 sur un test ANOVA, tandis que ns indique une absence de différence significative. (B) Northern Blot basé sur une sonde anti-LUC et effectué sur des feuilles pTA50 agroinfiltrées avec des constructions PVX-LUC ou PVX∆CP-LUC. Les triangles rouge et blanc représentent l’ARN génomique et subgénomique respectivement. Une coloration au bromure d’éthidium des ARNs ribosomaux est montrée en tant que contrôle de chargement. (C). Profil de polysomes effectué sur des feuilles pTA50 agroinfiltrées avec PVX ou un vecteur vide (EV) et traitées avec DEX ou le tampon seul.

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Figure 6. L’irradiation aux UVs induit une interruption globale de la traduction. Profils de

polysomes de feuilles de Nicotiana benthamiana contrôles ou irradiées aux UV. Une coloration au bromure d’éthidium des ARNs ribosomaux est présentée en dessous des profils de polysomes.

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