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4. L’apoptose et l’épissage alternatif

4.2. Voie intrinsèque

Divers stimuli déclenchent l’initiation de cette voie, tels que les dommages à l’ADN, l’exposition à des agents chimiothérapeutiques ou à de l’irradiation, des défauts dans le cycle cellulaire, la perte de l’attachement à la matrice extracellulaire, l’hypoxie et la perte

69 de facteurs de survie (Adams 2003; Fuchs and Steller 2011; Fuchs and Steller 2015). La présence de dommages à l’ADN entraîne l’induction de la voie de la DDR, d’où l’implication critique du facteur de transcription p53 pour cette voie contrairement à celle extrinsèque. Le facteur p53 peut accroître aussi l’expression des récepteurs de mort cellulaire, renforçant l’engagement des cellules dans le processus apoptotique et soulignant à nouveau l’interconnectivité entre les deux voies de l’apoptose (Ashkenazi 2002). La décision d’aller en apoptose découlera donc de la capacité à la machinerie de réparation de surmonter ce stress au niveau de l’intégrité génomique.

La mitochondrie est la pièce centrale de cette voie. La perméabilisation de sa membrane externe (MOMP) permet le relargage au sein du cytoplasme de protéines indispensables à l’activation de la machinerie de dégradation de l’apoptose qui étaient auparavant situées dans l’espace intramembranaire mitochondrial. Parmi ces protéines se trouvent le cytochrome C indispensable à la formation de l’apoptosome, AIF qui induit l’apoptose de manière indépendante des caspases et les différents inhibiteurs des IAPs (protéines inhibitrices d’apoptose), soient SMAC/DIABLO et HTRA2/Omi. Ces deux dernières protéines libérées pourront alors aller s’associer aux IAPs et ainsi lever leur répression de l’activité des caspases. L’induction de cette perméabilisation découlera du côté où penchera la balance entre les différents membres anti et pro-apoptotique de la famille Bcl-2 (Adams 2003; Youle and Strasser 2008; Tait and Green 2010).

La protéine phare a été isolée comme étant un possible oncogène surexprimé par la translocation chromosomique t (14,18) dans les lymphomes de cellules folliculaires (d’où le nom B-cell lymphoma-2) (Bakhshi et al. 1985; Tsujimoto et al. 1985). Par la suite, il fut démontré que la surexpression de Bcl-2 entravait l’induction de la mort cellulaire, montrant par le fait même qu’une dérégulation de l’apoptose était l’un des facteurs clés de la tumorigénèse (Vaux et al. 1988). Une caractéristique commune à l’ensemble de ces protéines de la famille Bcl-2 est la présence d’au moins un domaine d’homologie à la protéine phare Bcl-2 (BH) qui contient une séquence conservée codant pour une hélice alpha. Ces protéines possèdent en C-terminal un domaine transmembranaire qui permet leur relocalisation du côté cytosolique de la membrane externe de la mitochondrie. Ces

70 protéines sont divisées en trois grands groupes structurellement différents. Le premier groupe, anti-apoptotique, est défini par la présence des quatre domaines d’homologie à Bcl- 2 au sein de ses membres (BH1, 2, 3 et 4) et comprend Bcl-2, Bcl-xL, Bcl-w, Bcl-2A1, Bcl- B et Mcl-1 (ou BCL2L11). Le second groupe, pro-apoptotique, est caractérisé par la perte du quatrième domaine (BH4) et comporte Bax, Bak et Bok. Finalement, le troisième groupe, pro-apoptotique également, est le plus divergent structurellement, ne conservant que le troisième domaine d’homologie (BH3). Ce groupe inclut les protéines Puma, Bid, HRK, BMF, Noxa, Bim, Bad et Bik (Adams 2003; Youle and Strasser 2008; Tait and Green 2010).

Le mécanisme exact par lequel les membres de la famille BH2 régulent la MOMP et l’activité des caspases reste encore nébuleux. Au niveau de la MOMP, trois modèles existent qui sont surtout au niveau du rôle clé joué par les membres de la famille Bcl-2 à domaine BH3 unique régule l’apoptose. Ainsi ces protéines peuvent soit activer directement (Fig. 13A) les membres pro-apoptotiques BH4 indépendant de cette même famille (particulièrement Bak et Bax) ou soit indirectement (Fig. 13B) par la levée de la répression exercée par les membres anti-apoptotiques de la famille Bcl-2 suite à leur inhibition ou soit être en mesure d’effectuer à la fois ces deux fonctions (Fig. 13C) (Adams 2003). Suite à la levée de leur répression, les protéines Bax et Bak pourront s’oligomériser.

Figure 13: Modèles de la relation fonctionnelle entre les membres de la famille Bcl-2. (A) Le groupe de la famille Bcl-2 à domaine BH3 unique, une fois activé, s’associe directement aux membres pro-apoptotiques Bax et Bak (B) ou inhibe les membres anti- apoptotiques de la famille Bcl-2, abolissant ainsi leur répression des protéines pro- apoptotiques Bax et Bak déjà ancrées via leur domaine C-terminal à la membrane externe mitochondriale. (C) Modèle où certaines protéines à domaine BH3 unique peuvent seulement inhiber Bcl-2 ou peuvent à la fois inhiber Bcl-2 et inactiver Bax et Bak (comme tBid) (Adams 2003).

71 Ainsi, ils stabiliseront des pores lipidiques déjà présents au niveau de cette membrane ou y entraîneront la formation de nouveaux pores protéiques avec l’aide de protéines transmembranaires déjà présentes. Ces pores, les MACs (mitochondrial apoptosis-induced

channel), permettront la sortie des protéines mentionnées précédemment de l’espace

intramembranaire mitochondrial (Tait and Green 2010).

Le cytochrome C relâché va s’associer à Apaf1 (apoptotic peptidase-activating factor 1), entraînant ainsi un changement de conformation et l’oligomérisation de celui-ci. L’oligomère d’Apaf-1 va par la suite recruter la procaspase 9 via une interaction avec son prodomaine et qui combiné au cytochrome C et à du dATP va former l’apoptosome, un cercle protéique heptamérique qui constitue en quelque sorte l’holoenzyme de la caspase 9 (Adams 2003; Youle and Strasser 2008; Tait and Green 2010). Ce complexe macromoléculaire qu’est l’apoptosome joue non pas un rôle d’initiateur, mais plutôt d’amplificateur du signal apoptotique, son inactivation ne bloquant pas la cascade apoptotique, mais réduisant fortement son efficacité. Le clivage et la dimérisation de la caspase 9 va activer l’apoptosome, le point de non-retour de l’apoptose, entraînant par la suite l’activation des caspases effectrices et la destruction de la cellule (Adams 2003; Youle and Strasser 2008; Tait and Green 2010).