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- Généralités :

En 2003, le Dr. Bonifati et collaborateurs ont associé le locus PARK7 situé sur le chromosome 1p36 (van Duijn et al., 2001) à la protéine, DJ-1 (Bonifati et al., 2003). Le gène de DJ-1, comprend 8 exons dont les exons 1a/b qui ne sont pas transcrits suggérant un épissage alternatif (Abou-Sleiman et al., 2004; Taira et al., 2001). Les exons 2 à 7 codent pour une protéine de 189 acides aminés très conservée dans de nombreuses espèces (Bandopadhyay and Cookson, 2004; Nagakubo et al., 1997) (Figure 32). Les séquences des protéines humaine et murine ont 90% d’homologie. Il existe également une homologie entre les séquences de DJ-1, celles des protéines HSP chaperonnes et celles des protéases à cystéine Thij/PfpI. Pourtant, DJ-1 ne semble pas posséder d’activité de protéase à cystéine (Halio et al., 1996; Mizote et al., 1996). La cristallisation de DJ-1 a permis de mettre en évidence une structure homodimérique (Huai et al., 2003; Lee et al., 2003; Tao and Tong, 2003; Wilson et al., 2003), structure confirmée dans des cultures cellulaires (Miller et al., 2003; Moore et al., 2003b) (Figure 32).

DJ-1 est une protéine ubiquitaire fortement exprimée aussi bien dans le cerveau que dans les organes périphériques. Elle est exprimée dans tous les tissus que ce soit chez la souris ou chez l’homme, avec une prédominance dans les testicules, le rein et le cerveau (Nagakubo et al., 1997; Olzmann et al., 2004). Différentes études sur des cerveaux murins ont mis en évidence une localisation des ARNm et la protéine à la fois dans des cellules neuronales et des cellules gliales (astrocytes, microglie, oligodendrocytes). La forte expression de DJ-1 dans ces différents types cellulaires n’est pas confinée à un seul système (GABAergique, glutamatergique, dopaminergique, cholinergique) ni à une seule région anatomique. En effet, l’immunoréactivité de DJ-1 est retrouvée dans des structures liées au système moteur telles que la substance noire, le putamen, le noyau caudé, le pallidium, le noyau rouge et les noyaux profonds du cervelet. Elle est également présente dans des structures liées aux systèmes non moteurs telles que l’hippocampe,

D’après Bader V., Brain Res. (2005) Vol.1041

Substance noire Hippocampe Cervelet

Figure 33 : Distribution des ARNm de DJ-1 dans le cerveau de souris adultes

Mutations Origines Gène Protéine Références

Leu166Pro Italie Mutation ponctuelle homozygote Perte de la stabilité de la protéine Bonifati et al, 2003 Délétion exons 1-5 Hollande Délétion de 14kb homozygote Pert de la protéine Bonifati et al, 2003 Met26Ile Juifs ashkénase Mutation ponctuelle homozygote Inconnue Abou-Sleiman et al, 2003 Asp149Ala Carraibe Mutation ponctuelle hétérozygote Inconnue Abou-Sleiman et al, 2003 Ala104Thr Latino Mutation ponctuelle hétérozygote Inconnue Hague et al, 2003 IVS 6-1 G→C Espagnole Mélange hétérozygote Protéine abérante Hague et al, 2003 c.56delC c.57G→A Espagnole Mélange hétérozygote Protéine tronquée Hague et al, 2003 IVS 5+2-12del Russe Hétérozygote Protéine abérante Hedrich et al, 2004 Délétion exons 5-7 Italie du nord Délétion hétérozygote Protéine abérante Hedrich et al, 2004 Arg98Gln Multiple Hétérozygote Inconnue Hague et al, 2003 Glu64Asp Turque Homozygote Inconnue Bonifati 2004 Glu163Lys Italie Homozygote Inconnue Amnesi et al, 2005 g.168_185dup Italie Homozygote Inconnue Amnesi et al, 2005

Figure 34 : Schéma et tableau récapitulant des mutations que l’on peut trouver sur le gène de DJ-1

les bulbes olfactifs, le noyau réticulaire du thalamus et le cortex piriforme (Bader et al., 2005; Bandopadhyay et al., 2005; Kotaria et al., 2005; Shang et al., 2004) (Figure 33). La prédominance de DJ-1 dans les différentes régions du cerveau est corrélée non seulement à sa présence dans les régions cérébrales liées aux symptômes moteurs mais également aux symptômes non moteurs de la maladie. Des études sur la distribution subcellulaire de DJ-1 ont montré que cette protéine est présente dans le noyau, dans le cytoplasme et dans la mitochondrie (Nagakubo et al., 1997; Zhang et al., 2005). Il est intéressant de noter qu’en condition de stress, le taux de DJ-1 mitochondriale augmente (Blackinton et al., 2005; Canet-Aviles et al., 2004). Tout ceci pourrait rendre compte des symptômes observés lorsque DJ-1 est mutée.

- Les mutations et la physiopathologie:

Les premières mutations identifiées sur le gène de DJ-1 furent une délétion homozygote des exons 1 à 5 dans une famille allemande, et une mutation faux-sens homozygote Leu166Pro (L166P) dans une famille Italienne (Bonifati et al., 2003) Plusieurs autres mutations furent identifiées par la suite (Abou-Sleiman et al., 2003; Annesi et al., 2005; Bonifati et al., 2004; Hague et al., 2003; Hedrich et al., 2004) (Figure 34). Les formes de la maladie de Parkinson liées aux mutations sur le gène de DJ-1 sont à transmission autosomique récessive et représentent environ 1 à 2% des formes précoces (Figure 21) (Abou-Sleiman et al., 2003; Clark et al., 2004; Hedrich et al., 2004; Klein et al., 2005; Lockhart et al., 2004). A ce jour aucune mutation sur DJ-1 n’a été identifiée dans les formes sporadiques (Abou-Sleiman et al., 2003). Par contre dans ces mêmes formes sporadiques on observe une très forte augmentation du taux de formes insolubles de DJ-1 (Moore et al., 2005b). De façon intéressante, DJ-1 n’est pas ou est faiblement exprimée dans les corps de Lewy (Bandopadhyay et al., 2004; Rizzu et al., 2004).

Sur un plan clinique, les formes de la maladie de Parkinson liées à DJ-1 sont caractérisées par un début précoce (pouvant être inférieur à 30 ans), une progression lente de la maladie, et une bonne réponse à la levodopa. On peut observer des

120 80 40 0 CT Lact ns DJ-1 endogène tubuline

Figure 35 : Expression de DJ-1 endogène dans des cellules neuronales après traitement à la lactacystine

Mesure de l’expression de DJ-1 endogène dans des cellules neuronales murines en conditions contrôle ou traité à la lactacystine (un inhibiteur du protéasome) par immunoempreinte. Le graphique illustre l’analyse densitométrique de 8 expériences indépendantes ; ns : non significatif ; lact : lactacystine.

troubles psychiatriques (anxiété et épisodes psychotiques), des troubles du comportement et une dystonie de fonction (incluant des blépharospasmes) (Abou- Sleiman et al., 2004).

La stabilité de DJ-1 dépend de sa capacité à former un dimère. La mutation L166P affecte cette capacité, ce qui induit une augmentation de la dégradation de DJ- 1 par le protéasome abolissant ainsi la fonction antioxydante de DJ-1 (Miller et al., 2003; Moore et al., 2003b; Olzmann et al., 2004). La dégradation de DJ-1 par le protéasome est sujette à controverse, en effet, Görner et collaborateurs ont montré que des inhibiteurs du protéasome n’ont aucun effet sur le métabolisme de DJ-1 (Görner et al., 2004), ce que nous avons également pu observer (Figure 35) lorsque l’on regarde l’expression de la protéine endogène. Cette controverse au sujet de la stabilité de DJ-1 peut s’expliquer. La protection de DJ-1 par des inhibiteurs du protéasome n’est visible que lorsque l’on est en conditions de surexpression, en effet ces inhibiteurs ont tendance à augmenter l’activité du promoteur CMV qui contrôle la transcription des protéines dans les constructions qui sont surexprimées (Dunys et al., 2006). La mutation L166P entraîne également des changements au niveau subcellulaire, en augmentant la localisation mitochondriale de DJ-1 au détriment de sa localisation cytoplasmique (Zhang et al., 2005). DJ-1 subit aussi des modifications post-traductionnelles, telle qu’une sumoylation par les protéines PIASxα ou PIASy sur sa lysine en position 130. Il existe un processus de balance entre la sumoylation et l’ubiquitinylation permettant de réguler l’équilibre entre dégradation et translocation des protéines au noyau (Hegde and DiAntonio, 2002). La sumoylation de DJ-1 suggère donc un rôle de cette protéine dans la signalisation cellulaire. De plus, la mutation L166P qui induit un défaut de sumoylation de DJ-1 entraine une augmentation de son insolubilité, une diminution de son adressage à la mitochondrie et une augmentation de sa dégradation par le protéasome (Shinbo et al., 2006).

Dans les cerveaux de patients atteints par les formes sporadiques de la maladie, DJ-1 est oxydée et endommagée de façon irrémédiable par une carbonylation. DJ-1 est également susceptible d’être oxydée sur ses méthionines (Choi et al., 2006).

- Les fonctions de DJ-1 :

Oncogène : Tout d’abord, DJ-1 fut identifiée comme étant un oncogène favorisant la transformation des cellules NIH3T3 en coopérant avec Ras (Nagakubo et al., 1997). De plus, DJ-1 transréprime PTEN un des suppresseurs de tumeur les plus souvent muté dans les cancers humains (Cantley and Neel, 1999; Kim et al., 2005a). Il a également été rapporté une augmentation du niveau de DJ-1 dans plusieurs cancers notamment des poumons, de la prostate et du sein. Dans ce dernier cas DJ-1 a d’ailleurs été montrée comme étant un bon biomarqueur, en effet, chez les patients un fort taux de DJ-1 a été mesuré dans la circulation sanguine quand on les compare à des sujets contrôles (Hod, 2004; Kim et al., 2005a; Le Naour et al., 2001; Sekito et al., 2005). Cependant, le rôle de DJ-1 dans la transformation des cellules n’est pas sa seule fonction.

DJ-1 et fertilité : Le fait que DJ-1 soit localisée au niveau des testicules, associé au fait que sa protéine homologue chez le rat est CAP1 (« contraception associated protein »), suggère que DJ-1 pourrait également être impliquée dans la fertilité masculine chez l’homme (Yoshida et al., 2003). Des études ont montré une corrélation entre les niveaux de CAP1/DJ-1 dans le sperme et l’épididyme, et l’infertilité masculine après des traitements toxiques (Klinefelter and Suarez, 1997; Wagenfeld et al., 1998; Welch et al., 1998). De plus, DJ-1 peut activer le récepteur aux androgènes, un membre de la superfamille des récepteurs nucléaires impliqués dans le développement, la croissance et la régulation de la fonction reproductrice masculine, par sa capacité à perturber l’interaction du récepteur avec ses régulateurs négatifs, PIASxα (« protein inhibitor of activated STAT ») et DJBP (« DJ-1 binding protein ») (Niki et al., 2003; Takahashi et al., 2001). DJ-1 est aussi capable d’interagir directement avec le récepteur aux androgènes et de réguler son activité transcriptionnelle (Pitkanen-Arsiola et al., 2006; Tillman et al., 2007).

Rôle de DJ-1 dans l’apoptose : Le rôle de DJ-1 dans le contrôle de la mort cellulaire est supporté par plusieurs études. Tout d’abord DJ-1 a été décrite comme régulant p53 et PTEN deux modulateurs clés des voies apoptotiques (Cantley and

Neel, 1999; Kim et al., 2005a; Shinbo et al., 2005). La diminution de l’expression de DJ-1 par différentes techniques (siRNA, invalidation) conduit à une augmentation de la sensibilité aux stress oxydatif et réticulaire (Kim et al., 2005b; Taira et al., 2004; Yokota et al., 2003). La protéine DJ-1 sauvage est capable de restaurer le phénotype induit par l’injection de 6-hydroxydopamine une neurotoxine chez des rats (la mort des cellules dopaminergiques, une diminution du niveau de dopamine et du transporteur de la dopamine associé à un déficit moteur), cette capacité est abolie par la mutation L166P (Inden et al., 2006). La fonction protectrice de DJ-1 semble dépendre de sa capacité à éliminer le peroxyde d’hydrogène in vitro par auto oxydation. De fait, la transfection dans des SH-SY5Y du mutant L166P ou de siRNA dirigés contre la protéine DJ-1 sauvage entraîne une augmentation de la sensibilité

des cellules à la mort cellulaire induite par différentes molécules oxydantes (H2O2,

MPP+, 6-hydroxydopamine) ainsi qu’une diminution des formes oxydées de DJ-1

(Taira et al., 2004; Yokota et al., 2003). De plus, l’oxydation de DJ-1 induit sa relocalisation à la mitochondrie ainsi qu’un rôle protecteur. La relocalisation est abolie par la mutation de la cystéine 106 en alanine, ainsi l’oxydation de la cystéine 106 en acide cystéine sulfonique est essentielle à la fonction protectrice de DJ-1 (Canet-Aviles et al., 2004).

DJ-1 est également capable de contrôler la mort cellulaire par d’autres mécanismes, par exemple, en interagissant avec Daxx, une protéine adaptatrice impliquée dans la voie du récepteur de mort Fas (Junn et al., 2005; Yang et al., 1997). DJ-1 empêche la translocation de Daxx dans le cytoplasme en le séquestrant dans le noyau, empêchant son interaction avec la kinase ASK1 et bloquant ainsi l’activation de cette kinase impliquée dans la mort cellulaire (Charette et al., 2001; Ko et al., 2001; Song and Lee, 2003).

DJ-1 et le stress oxydatif : Mitsumoto et collaborateurs ont démontré en condition de stress oxydatif (exposition à des ROS), un déplacement du point isoélectrique (pI) de DJ-1 de 6,2 vers 5,8, propriété physique des senseurs de stress. DJ-1 pourrait donc se comporter comme une HPRPs (hydroperoxide-responsive proteins) et fonctionner comme un indicateur du stress oxydatif (Mitsumoto and

Nakagawa, 2001). De plus, la spectrométrie de masse a permis de confirmer l’oxydation de DJ-1, ainsi qu’un déplacement de son pI et la formation d’acide cystéine sulfinique. La formation d’acide cystéine sulfinique est une modification post-transcriptionnelle importante associée aux protéines liées au stress oxydatif comme les peroxiredoxines (Kinumi et al., 2004). Des études ont montrées que DJ-1 est oxydé sur la cystéine en position 106. La mutation de cette cystéine abolie sa translocation à la mitochondrie induite par l’oxydation ainsi que ses propriétés anti- apoptotiques (Canet-Aviles et al., 2004). Les mutations pathogènes réduisent également les propriétés anti-oxydantes de DJ-1 (Taira et al., 2004; Takahashi-Niki et al., 2004; Yokota et al., 2003).

Protéine chaperonne : L’homologie de séquence existant entre DJ-1 et les protéines HSP, ainsi que sa présence au sein d’un large complexe moléculaire (>2000kDa) dans des cerveaux en conditions normales et en conditions pathologiques, ont conduit à envisager que DJ-1 pourrait avoir un rôle de chaperonne (Meulener et al., 2005b). Cette fonction de chaperonne a été démontrée in vitro par différentes techniques, et semble dépendante des propriétés redox de DJ-1 (Lee et al., 2003; Shendelman et al., 2004). En effet, ce phénotype est abolie lorsque la cystéine en position 53 dans la séquence de DJ-1 est mutée ou lorsque la protéine est pré-incubée avec du DTT empêchant l’oxydation de DJ-1. Cependant une oxydation excessive de DJ-1 induit une perte de son activité de chaperonne : l’inhibition de l’agrégation de l’α-synucléine par DJ-1 est abolie (Meulener et al., 2005b; Zhou et al., 2006). L’activité de chaperonne tout comme la capacité de protéger les cellules, sont dépendantes de la fonction de senseur du stress oxydatif de DJ-1.

Régulation de la transcription : Comme on l’a vu précédemment, DJ-1 est capable de réguler la transcription de plusieurs gènes. En effet, DJ-1 peut par exemple transactiver le récepteur aux androgènes (Niki et al., 2003; Takahashi et al., 2001), p53 (Shinbo et al., 2005) ou transréprimer PTEN (Kim et al., 2005a) et PSF (Xu et al., 2005). L’équipe du Dr Nishinaga a mis en évidence une autre cible de DJ-1 le gène SOD3 (« extracellular superoxide dismutase 3»), compatible avec sa fonction dans la réponse au stress oxydatif. Cette étude a également montré une régulation du

D’après Thomas B. and Beal F., Hum. Mol. Genetics (2007) Vol. 16

Figure 36 : Relations entre les différentes protéines impliquées dans la maladie de Parkinson et les différents systèmes

Grâce à toutes les études menées jusqu’à se jour on peut regrouper toutes les

protéines liées aux formes récessives de la maladie sur un même schéma. Il apparait de plus en plus qu’il existe des liens et des voies entre toutes ces protéines.

taux d’ARNm et du promoteur de Tau (protéine majeur dans la pathologie de la maladie d’Alzheimer) (Nishinaga et al., 2005).

DJ-1 possède donc plusieurs fonctions avérées et intervient dans de nombreux processus cellulaires comme le confirment différents travaux effectués dans des souris déficientes pour le gène de DJ-1. En effet, ces souris présentent des déficits moteurs liés à l’âge, des dysfonctions dopaminergiques mais sans perte neuronale (Chen et al., 2005; Goldberg et al., 2005). Kim et collaborateurs ont également observé une augmentation de la sensibilité au stress oxydatif induit par le MPTP (1-methyl-4- phenyl-1,2,3,6-tetrahydropyrindine) ((Kim et al., 2005b), sensibilité qui pourrait être due à l’augmentation de l’expression de p53 et de BAX (Bretaud et al., 2007), ou à un déficit dans la signalisation PI3kinase/Akt (Yang et al., 2005).

DJ-1 a également la capacité d’interagir avec d’autres protéines impliquées dans les formes familiales de la maladie, ce qui en fait une protéine importante dans l’étude des mécanismes liés au développement de la maladie de Parkinson.

A.VI.2.e) Interactions entre les différentes protéines

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