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Vasopressine et maladie rénale au cours du diabète

III. V ASOPRESSINE /C OPEPTINE ET MALADIE RENALE

3- Vasopressine et maladie rénale au cours du diabète

Les concentrations plasmatiques de vasopressine sont augmentées chez les sujets avec un diabète de type 1 ou 2 ainsi que dans les modèles animaux avec diabète spontané ou induit par la streptozotocine [56]. Les causes d’élévation des taux de vasopressine au cours du diabète ne sont pas entièrement élucidées mais parmi les hypothèses émises une constriction du volume extracellulaire induite par la glycosurie dans le diabète incontrôlé et/ou une réinitialisation de l'osmorécepteur pour la régulation osmotique de la sécrétion de vasopressine [169]. D’un point de vue adaptatif, l’élévation de la vasopressine serait bénéfique à court terme puisqu’en augmentant l’activité de concentration urinaire, elle limite les quantités d’eau nécessaires à l’excrétion de la charge en solutés représentés essentiellement par le glucose [56, 170]. En revanche, à long terme des concentrations élevées de façon chronique de vasopressine sont délétères pour le rein. De nombreuses études épidémiologiques observationnelles et des données expérimentales sont à l’appui de cette hypothèse.

3.1- Etudes expérimentales

La contribution de la vasopressine au stade précoce de la néphropathie diabétique – hyperfiltration glomérulaire, albuminurie et hypertrophie rénale – a été étudiée chez des rats Brattleboro rendus diabétiques par une injection de streptozotocine. Les rats ont été suivis pendant 4 semaines et comparés à des rats Long-Evans rendus diabétiques aussi (groupe témoin). A la fin de l’étude, la clairance de la créatinine et l’excrétion urinaire d’albumine étaient augmentées chez les rats témoins et sont restées inchangées chez les rats Brattleboro. L’hypertrophie rénale était également atténuée chez les rats diabétiques dépourvus de

vasopressine [171]. Ces résultats montrent que la vasopressine est fortement impliquée dans les complications rénales du diabète. L’implication du récepteur V2 de la vasopressine dans les effets délétères de l’hormone a été étudiée chez des rats Wistar, avec sécrétion normale de vasopressine, atteints de diabète insulinoprive induit par la streptozotocine. Les rats ont été répartis en deux groupes : groupe témoin et groupe traité. Ce dernier a été traité pendant trois mois avec un antagoniste sélectif du récepteur V2 de la vasopressine (SR121463, Sanofi Aventis) à des doses réduisant l’osmolalité urinaire à un niveau proche de l’osmolalité plasmatique, aux alentours de 400 mosm/L. Le blocage des récepteur V2 a empêché la hausse de l’albuminurie qui était deux fois plus basse dans le groupe traité par rapport au groupe témoin. Le traitement n’a pas eu d’effet sur la clairance de la créatinine, l’évolution de la glycémie et de l’excrétion urinaire de glucose qui étaient similaires dans les deux groupes, traité et témoin. Dans cette étude, une grande variabilité dans l’excrétion urinaire d’albumine et de la clairance de créatinine au cours du temps a été observée dans le groupe diabétique témoin. A la fin de l’étude, on a noté chez les rats non-traités de fortes corrélations entre la clairance de la créatinine ou l’excrétion urinaire d’albumine et la réabsorption d’eau TcH2O,

meilleur indice de l’activité de concentration des urines [172]. Les signes précoces de la néphropathie diabétique étaient plus prononcés chez les rats qui avaient l’activité de concentration des urines la plus forte. Ces observations suggèrent que chez les rats comme chez les êtres humains, la susceptibilité individuelle à la néphropathie diabétique est variable et que la VP par son effet antidiurétique joue un rôle dans le stade précoce de la maladie rénale au cours du diabète type 1.

Les effets délétères de la vasopressine sur le rein et l’effet rénoprotecteur du blocage de son récepteur V2 ont également été étudiés dans un modèle de diabète type 2. Cette étude correspond au volet expérimental de la thèse qui sera détaillé plus loin dans le manuscrit.

3.2- Etudes épidémiologiques

Les effets de la copeptine plasmatique ont été explorés dans plusieurs cohortes de sujets diabétiques type 2. Dans une étude du groupe réalisée sur les données de 3101 sujets diabétiques type 2 avec albuminurie persistante (micro- ou macro-albuminurie), de la cohorte DIABHYCAR (non-insulin dependent DIABetes, Hypertension, microalbuminuria or proteinuria, Cardiovascular events and Ramipril), une copeptinémie élevée à l’entrée de l’étude était associée à un déclin plus rapide du DFGe au cours d’un suivi d’une durée médiane de 5 ans [27]. L’association était significative après ajustement sur l’âge, la durée du

diabète, la pression artérielle, les taux de HbA1c, l’excrétion urinaire d’albumine et le DFGe à l’entrée de l’étude. Dans la cohorte suédoise ZODIAC (Zwolle Outpatient Diabetes project Integrating Available Care), chez 1 328 sujets récemment diagnostiqués diabétiques type 2, avec un suivi de 6,5 ans, une copeptinémie élevée était associée d’une part à des valeurs de DFGe plus faibles et de ratio albumine/créatinine urinaires plus élevées à l’entrée de l’étude et d’autre part à un déclin plus rapide du DFGe [26] ainsi qu’à la mortalité cardiovasculaire et la mortalité toutes causes confondues pendant le suivi [173]. Chez des sujets suédois récemment diagnostiqués diabétiques (The Skaraborg -Diabetes Register), une copeptinémie élevée était encore une fois associée au déclin du DFGe après 12 ans de suivi [174]. La valeur pronostique de la copeptine plasmatique est aussi pertinente dans le diabète de type 1. Dans l’étude transversale CACT1 (Coronary Artery Calcification in Type 1 Diabetes), une copeptinémie élevée était fortement associée à la maladie rénale diabétique et à la maladie coronaire [175]. Plus récemment, nous avons montré ont montré que ces associations restent valables en prospectif. Dans deux cohortes de patients diabétiques type 1 (GENESIS et GENEDIAB), la copeptine était associée avec la prévalence de néphropathie diabétique établie et avancée. Au cours du suivi (durée médiane de 10,2 et 5,0 ans pour GENEDIAB et GENESIS, respectivement), la copeptine à l’entrée de l’étude dans les tertiles sexe-spécifique supérieurs était associée à une plus grande incidence d’insuffisance rénale terminale (HR tertile 3 vs tertile 1 : 26,5 [95% CI 8,0-163,3 ; p<0.0001], d’évènements cardiovasculaires (HR 2.2 [95% CI 1,2-4,0 ; p=0.01]), et de mortalité toutes causes confondues (HR 3,3 [95% CI 1,8-6,5 ; p<0.0001]). L’association de la copeptinémie de base avec le risque d’insuffisance rénale terminale était indépendante des facteurs de risque classiques, à savoir l’âge, la durée du diabète, la pression artérielle, l’HbA1c, le DFGe et l’excrétion urinaire d’albumine à l’inclusion [18]. Enfin, dans une étude transversale cas- témoins (cas : micro- albuminurie ≥30 mg/g ; témoins : normo-albuminurie <10 mg/g, matché sur l’âge et la durée du diabète) réalisée chez des hommes uniquement, les sujets albuminuriques avaient des concentrations de copeptine plus élevées par rapport aux sujets normo-albuminuriques dans le témoin. La copeptinémie plus élevée était associée à une albuminurie et un DFG altéré, une association indépendante des facteurs de risques connus [176].

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