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Variations de la piézométrie aux Ménudes et variation de g

2. Article: Time-lapse microgravity surveys reveal water storage heterogeneity of a karst aquifer

3.3. Variations de la piézométrie aux Ménudes et variation de g

Un capteur de pression a été installé au hameau des Ménudes (voir figure 7.1 de l’article précédent) par H. Jourde et P.Brunet (Hydrosciences Montpellier). Nous mentionnons ces variations de niveau dans l’article précédent comme ayant une éventuelle contribution sur les variations de pesanteur mesurées en surface. Les variations de niveau sont présentées à la figure suivante, en rapport avec les quatre périodes de levés gravimétriques. Le signal haute fréquence observé sur la courbe de niveau est dû au pompage de l’eau des habitants des Ménudes de ce forage. Des oscillations journalières ponctuent ainsi la chronique.

Les variations du niveau d’eau entre les différents levés atteignent plus de trois mètres (figure 7.15). Ces variations de niveau d’eau contribueront d’autant plus aux variations de pesanteur en surface si les conditions suivantes sont remplies :

- la nappe doit être considérée comme libre, par opposition au nappes captives où peu de variations de masses ont lieu (voir annexe Ploemeur)

7.3. Discussions complémentaires

- les variations de niveau ne doivent pas être purement locales, l’effet gravimétrique du battement d’une éventuelle nappe tend vers un effet de plateau si le battement affecte une distance horizontale bien supérieure à la profondeur de la nappe.

Nous allons maintenant considérer que cette nappe est suffisamment grande et que les variations de son niveau sur le long terme sont spatialement homogènes pour pouvoir considérer l’effet de plateau des variations de son niveau. Si ces hypothèses sont vérifiées, alors la variation de pesanteur causée par le battement de la nappe peut s’écrire :

2

sat e

g

π ρ ω

G h

∆ = ∆ (7.18)

avec ρe la densité de l’eau, ω la porosité utile de la roche et ∆h les variations de niveau de la nappe. En outre, les variations de pesanteur en surface peuvent aussi être occasionnées par des variations de teneur en eau dans l’épikarst et dans la zone phréatique, comme c’est peut-être le cas au Ménudes. Ainsi, les variations de gravité en surface

∆g

surf sont la somme d’une contribution épikarstique

∆g

ep et d’une contribution phréatique ∆gsat :

surf ep sat

g g g

∆ = ∆ + ∆

(7.19)

Sans autre mesure que la gravité en surface, ces deux contributions ne peuvent pas être dissociées. Ici, nous connaissons les variations de niveau d’eau mais l’équation ci-dessus reste sous déterminée car ni la porosité ni la contribution de l’épikarst est connue.

Figure 7.15 : Niveau mesuré aux Ménudes (profondeur relative à la surface), les quatre périodes de levé sont indiquées.

Plaçons nous d’abord dans l’hypothèse peu réaliste d’un stockage épikarstique nul : les variations de g en surface sont donc exclusivement à mettre en relation avec les variations du niveau d’eau de la nappe. La relation entre

∆g

surf et ∆h est alors donnée par l’équation (7.19). La figure 7.16 illustre les variations de g par rapport aux variations de niveaux de la nappe, une tendance linéaire y est observée.

La pente de la droite passant au mieux par les points est de 5.5 µGal/m, ce qui implique une porosité ω de ~ 13%. Cette valeur est une valeur maximale car on considère que toutes les variations de teneur en eau proviennent de la zone saturée.

Figure 7.16 : Variation de g mesuré aux Ménudes en fonction des variations de niveau de la nappe. La droite passant au mieux par les données est indiquée.

Considérons maintenant que

∆g

ep aux Ménudes peut être approximé par les variations de g à BLAQ, qui ont sûrement une origine épikarstique (voir section 6.2). L’épikarst à la station BLAQ est ici considéré comme un épikarst type, ce qui peut être contesté.

Dans ce cas, on trouve un rapport ∆gsat /∆h de ~ 3 µGal/m, ce qui implique une porosité de ~ 7 %. Cette valeur de porosité est à rapprocher de celle trouvée par les différences de g entre surface et profondeur (voir section 6.2), qui est du même ordre de grandeur.

Une quantification de la contribution de la zone saturée sur les variations de gravité aux Ménudes reste à faire, celle-ci passe par une étude hydrogéologique plus classique impliquant le suivi du niveau de la nappe en plusieurs forages pour quantifier son extension et son fonctionnement.

On atteint ici les limites de la méthode gravimétrique, qui ne peut discriminer à quelle profondeur les variations de masse ont lieu.

4. Conclusion partielle

La microgravimétrie répétée est un outil puissant pour détecter les variations de stock d’eau en une multitude de sites. L’hétérogénéité spatiale des propriétés de stockage du karst est ici mise en évidence : des zones à fortes et faibles variations de stock d’eau sont délimités. D’un point de vue méthodologique et instrumental, notre protocole de mesure et notre traitement permettent la détection sans équivoque de ~0.25 m de variation de lame d’eau en 40 points d’une surface de ~100 km2. En prenant l’hypothèse que les variations de gravité observées sont représentatives des variations de stock d’eau sur l’ensemble du karst, nous apportons des contraintes supplémentaires sur l’évapotranspiration réelle à l’échelle du karst. Ainsi, nous trouvons que le coefficient d’évapotranspiration kET est faible pendant la période hivernale et fort pendant les périodes estivales. Ceci est par ailleurs bien connu des

7.4. Conclusion partielle

agronomes, ou le coefficient ‘cultural’ (Allen et al., 1998) varie en fonction du stade végétatif des plantes. Dans de futurs études, la gravimétrie pourrait donc servir pour quantifier les flux évaporatoires, à conditions que les autres flux soient connus, et particulièrement le flux d’infiltration profonde. De façon analogue, l’évapotranspiration doit être précisément déterminée pour étudier le fonctionnement interne du karst par gravimétrie. Ainsi, pour les périodes estivales où les variations de stock sont dominées par la perte évaporatoire, la dynamique interne du karst ne peut être appréhendée du fait des incertitudes sur l’évapotranspiration.

La période hivernale de recharge, caractérisée par une faible évapotranspiration, est donc une période privilégiée pour l’étude des phénomènes de variations de stock sur le karst. Malheureusement, une seule période hivernale a pu être encadrée par des levés gravimétriques. Cette période de recharge a été toutefois forte en enseignement : elle nous a permis d’émettre l’hypothèse de variations de stockage dans des horizons phréatiques, en particulier aux Ménudes. Nous butons ici une fois de plus sur l’ambiguïté de la mesure gravimétrique de surface: si les variations de stock sont détectées, leur localisation et leur répartition en profondeur ne peuvent être établies avec certitude sans des mesures complémentaires.

8.

INFILTRATION SOUTERRAINE ET

DEFORMATION INCLINOMETRIQUE