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Chapitre I — Problématique des vibrations d’usinage

I.4 Tentatives de réductions des vibrations régénératives

I.4.4 Variation continue de la vitesse de rotation

Une dernière approche pour réduire l’effet régénératif consiste à faire varier la vitesse de rotation de la broche. L’objectif est alors de faire varier la fréquence du coup de dent afin de casser la régularité de la coupe. Cette approche est très similaire avec celle utilisée par les outils à pas variable. Cependant, son principal intérêt réside dans le fait qu’elle ne néces-site pas d’outil spécifique. Par contre, il est nécessaire de calculer les paramètres de la consigne de vitesse (amplitude, fréquence et forme).

Les premiers essais ont été effectués dans les années soixante-dix sur des opérations de tournage [TAK 74]. Cette approche expérimentale conduit à une réduction de l’amplitude des vibrations. Par contre, le choix des paramètres de variation est uniquement effectué à partir d’essais d’usinage [HOS 77].

I.4.4.1 Modélisations

Ces premières études ouvrent la voie aux modélisations pour faciliter le choix des paramè-tres. La modélisation des vibrations régénératives en usinage à vitesse de rotation variable implique une équation différentielle où le terme retard est variable, ce qui complique encore l’étude. Les premières tentatives de linéarisation, approximant le terme retard par une valeur moyenne, conduisent à des gains théoriques importants liés à des hypothèses de calcul trop restrictives [INA 74]. À la suite des travaux de J.S. SEXTON, les premières modé-lisations « analogiques » confirment les gains modestes obtenus par les essais de tournage

[SEX 77] [SEX 78]. De plus, dans certains cas, des vibrations transitoires peuvent dégrader l’état de surface [SEX 80]. Ces travaux ont été repris pour l’analyse de la stabilité du

tour-Figure 17 — Outils de coupe spéciaux 90°

90° 90°

90°

Pas constant Pas variable 78,7° 86,2°

93,7°

nage. L’utilisation de fonction périodique permet d’approximer la solution de l’équation à retard variable. La décomposition de ces fonctions périodiques en série de Fourier permet d’approcher la solution analytique [JAY 00]. Dès lors, l’utilisation du critère de stabilité de Nyquist permet de tracer les lobes de stabilité en tournage. Cette approche permet de modéliser uniquement le cas du tournage où la coupe est continue avec une seule dent en prise, c’est là son principal défaut.

Par la suite, les chercheurs se sont orientés vers l’étude de la stabilité de l’usinage à vitesse variable pour le cas plus complexe du fraisage. Les travaux de Tsu-Chin TSAO font référence dans le domaine, car il a présenté un des premiers modèles pour le fraisage [TSA 93]. Cette modélisation considère l’angle parcouru comme variable à la place du temps, ainsi les équa-tions sont fonction de cet angle et elles ont des coefficients périodiques. La décomposition en série de Fourier des coefficients de coupe permet alors l’utilisation du critère de Nyquist

[SAS 02]. Comme à vitesse constante, cette modélisation nécessite la prise en compte de plusieurs harmoniques afin que la solution converge, cela implique des calculs très lourds

[ZAT 08].

Une autre approche consiste à utiliser la théorie de Floquet. Il est alors inutile de décom-poser les efforts de coupe en série de Fourier. Par contre, le calcul de l’opérateur Φ néces-site une approximation numérique non triviale. L’approximation peut alors être effectuée par la discrétisation complète de la période principale, méthode introduite par István GYORI[GYO 95]. Cette discrétisation a ensuite été appliquée au cas du tournage [YIL 02] et du fraisage à vitesse variable [SAS 01]. Cette approche induit des temps de calcul très longs, car il faut discrétiser la période principale du système. Cette période dépend directement de la période de variation de la vitesse de rotation, durée de l’ordre de la seconde.

La semi-discrétisation introduite pour le cas du fraisage à vitesse constante par Tamás INSPERGER [INS 04A], a également été reprise pour le cas du tournage à vitesse variable

[INS 04B]. Cette approche réduit les temps de calcul, car seuls les termes périodiques et retardés sont discrétisés. Bien que performante, cette approche n’a pas fait l’objet de vali-dation expérimentale et n’a pas été étendue au cas du fraisage.

Enfin, l’étude des équations différentielles à coefficients périodiques et terme retard variable, modélisant l’usinage à vitesse variable, est un domaine de recherche à part entière qui fait intervenir des approches mathématiques afin d’analyser la stabilité du système. De nombreux travaux utilisant la dynamique non-linéaire sont disponibles, par exemple

[PAK 97] [NAM 03A] [NAM 03B]. Ces travaux très calculatoires voient l’usinage à vitesse variable uniquement comme un exemple applicatif des méthodes générales d’analyse proposées.

Des études ont également utilisé la polyvalence de la simulation temporelle pour modéliser le fraisage à vitesse variable. La prise en compte d’une vitesse de rotation variable est plus facile qu’avec les approches fréquentielles précédentes. Pour cela, il suffit de modifier le pas de temps à l’issue de chaque itération afin d’introduire une vitesse de rotation variable

[ALT 92B]. Avec cette approche, les auteurs ont choisi de considérer un pas angulaire constant, mais le temps pour le parcourir est variable. Cette approche a largement été reprise par la suite, elle est notamment utilisée pour le fraisage de face [RAD 97A]. Des travaux montrent également l’effet de cette solution à haute vitesse, mais là encore sans vali-dation expérimentale [BED 06]. Cependant, l’interprétation des résultats de la simulation temporelle est délicate, car il n’existe pas de critère clair permettant de détecter la stabilité d’un usinage à vitesse variable. Cette lacune s’explique par le peu de travaux utilisant la simulation temporelle au regard des études privilégiant le tracé de la limite de stabilité. I.4.4.2 Essais

Différents auteurs s’accordent pour dire que les paramètres de variation doivent être les plus importants afin d’augmenter les gains en usinage [RAD 97B] [AL 03]. Avec cet objectif démonstratif, les essais de fraisage sont effectués pour de faibles vitesses de rotation, de l’ordre de 1 000 tr/min [ALT 92B] [SOL 97]. Les différents essais avec des formes sinusoïda-les montrent alors une réduction de l’amplitude des vibrations [RAD 97B] ou une réduction du pic de broutement dans la FFT [BED 07], mais pas les états de surface associés.

Des travaux en tournage présentent une amélioration de l’état de surface avec l’utilisation de la variation de vitesse [YIL 02] [AL 03]. La variation de plusieurs paramètres tels que la vitesse de rotation et l’angle de coupe induit également une réduction des vibrations

[YAN 03].

Enfin, d’autres auteurs ont travaillé sur l’impact des consignes de variation : sinusoïdale, triangulaire et carrée [LIN 90]. Ils concluent que le suivi de consigne est plus facile avec une fonction sinusoïdale, car l’accélération et le jerk sont toujours finis. Par contre, la fonction triangulaire utilise l’accélération maximale de la broche pour la variation. La fonction carrée produit des discontinuités sur la vitesse de rotation, impossible à réaliser en pratique. I.4.4.3 Bilan

Cette étude bibliographique, sur la variation de la vitesse de rotation, présente beaucoup de modélisation aussi bien en tournage qu’en fraisage. Par contre, beaucoup de modèles utilisent une approche très calculatoire, dont l’usinage est uniquement un exemple d’appli-cation. On peut cependant noter que la semi-discrétisation, largement utilisée à vitesse constante, n’est pas encore développée pour le cas du fraisage à vitesse variable.

Les différentes études expérimentales publiées montrent uniquement des usinages à basse vitesse dont l’objectif est d’être le plus démonstratif possible et d’afficher un gain, quitte à s’éloigner des conditions d’usinage standard. Les auteurs utilisent alors le critère qui permet de montrer des gains importants : réduction de l’amplitude, du pic de la FFT, etc. Cepen-dant, à notre connaissance, aucun travail ne montre un gain sur l’état de surface en fraisage. Enfin, peu d’études s’intéressent à l’application de cette solution en UGV.