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Chapitre II – Généralités sur l’évolution des régimes climatiques : moyennes, extrêmes

II.4. Variabilité des pluies

L’étude des pluies est complexe car elle peut être envisagée sous de très différents aspects. Non seulement la quantité est importante, mais aussi la fréquence, l’intensité et la durée (Trenberth et al., 2003), voire de nombreuses autres variables liées aux distributions spatiales, saisonnières et intra-saisonnières. Plusieurs études ont révélé que le 20ème siècle a été caractérisé par des tendances significatives des précipitations à différentes échelles spatio- temporelles (New et al., 2001, Folland et al., 2001). A l’échelle globale, une augmentation statistiquement non significative des précipitations, en surface, est observée pour la période entre 1901 et 2005 (Figure II.5 ; Trenberth et al., 2007). A l’échelle locale, une augmentation générale des pluies est enregistrée en Europe du nord et une diminution dans les régions subtropicales (Figure II.5 ; Trenberth, 2011 ; Trenberth et al., 2007).

Depuis 1900, les précipitations ont diminué de plus de 5% sur la plupart des terres bordant la mer Méditerranée, à l'exception d’une bande allant de la Tunisie à la Libye où elles ont légèrement augmenté (Nicholls et al., 1996). Au sein de ces tendances générales, des alternances régulières entre périodes humides et sèches sont perceptibles. Les enregistrements pluviométriques pour la Méditerranée occidentale et les Balkans indiquent l’apparition de périodes humides importantes de 1900 à 1920, 1930 à 1956, et de 1968 à 1980 avec l'apparition de périodes sèches (Maheras et Kolyva-Machera, 1990). Les enregistrements à partir de 1951 montrent une légère tendance à la baisse des précipitations dans presque toutes les régions méditerranéennes et au cours de toutes les saisons (Palutikof et al., 1996). La seule tendance positive claire est sur l’est de la Méditerranée en automne.

Ces tendances régionales minimisent l’ampleur des changements des précipitations connues localement. L’étude des tendances pluviométriques locales révèle une image plus détaillée des conclusions générales. Au cours de la période de 1975 à 1994, les précipitations se sont réduites en moyenne, de 17% par rapport aux deux décennies précédentes sur une grande partie de l’Afrique du nord-ouest, l’Espagne, l’Italie et la Grèce (Nicholls et al., 1996). Sur une période plus récente, de 1979 à 2005, la variabilité sous régionale est élevée, en particulier dans les zones à topographie contrastée près des côtes où des tendances

43 significatives dans la variabilité des totaux pluviométriques ont été observées (Turkes, 1996, 1998 ; Trenberth et al., 2007).

Figure II. 5 : Tendances des cumuls annuels des précipitations en surface entre 1901 et 2005

(% par siècle) et 1979 et 2005(% par décade). Les données utilisées sont issues du GHCN (Global Historical Climatology Network) du NCDC (National Climatic Data Center). Le pourcentage est basé sur les moyennes de la période 1961-1990. Les zones avec insuffisance de données sont en gris. Les tendances significatives à 5% sont indiquées par des signes + noirs et gras (Trenberth et al., 2007).

Généralement, les modèles climatiques répondent au réchauffement global avec une hausse des cumuls des précipitations, mais avec des grandes disparités entre régions (Figure II.6 ; Christensen et Christensen, 2007 ; Christensen et al., 2007a, b). Ces derniers auteurs rapportent des valeurs médianes des changements prévus des précipitations. Pour le nord et l'Europe centrale, on s'attend à une augmentation de 10 à 15% à toutes les saisons sauf l'été, où le signal est faible (2%).

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Figure II. 6 : Changement projeté des précipitations annuelles (haut), hivernales (centre) et

estivales (bas) (%) simulé par la moyenne de 21 modèles climatiques (scénario A1B) sur l’Europe et la Méditerranée (Christensen et al., 2007a).

45 Les perspectives de précipitations sur la région méditerranéenne dans un monde plus chaud sont très incertaines en raison de la faiblesse générale des MCG pour prédire les précipitations régionales. Les modèles offrent des témoignages contradictoires sur la façon dont les précipitations peuvent changer en moyenne sur la région méditerranéenne. Certains modèles suggèrent une augmentation globale des précipitations dans la région alors que d’autres une diminution comprise entre 1.5 et 7.3% (Rosenzweig et Tubiello, 1997).

La plupart des modèles montrent un élargissement du gradient des précipitations saisonnières avec plus de précipitations en hiver et moins en été. Une moyenne des résultats des modèles étudiés par Palutikof et al. (1992) pour l'ensemble de la région méditerranéenne d'ici 2100 soutient cette hypothèse et ce constat est largement supporté par d’autres modèles pour l'Europe du sud et la Turquie (Kattenberg et al., 1996).

Les régimes des précipitations produits par différentes séries de modèles sont si divergents qu'il est très improbable d’accorder une significativité à une projection unique. Néanmoins, une caractéristique commune à de nombreux modèles est la diminution des précipitations annuelles sur la majeure partie de la région méditerranéenne, au sud de 40 à 45°N, et l'augmentation des précipitations au nord (Cubasch et al., 1996 ; Palutikof et Wigley, 1996).

Si les modèles des changements des précipitations étaient globalement corrects en modélisant la réponse à l’augmentation des gaz à effet de serre, les sécheresses simulées dans la région méditerranéenne pourraient être causées par l’influence humaine croissante sur le climat de la région. Les conditions plus humides pourraient refléter la forte influence des aérosols. À court terme, les effets des aérosols peuvent contrer l'effet de l'augmentation des concentrations des gaz à effet de serre sur certaines régions. Les résultats de certains modèles pour le milieu du 21èmesiècle suggèrent que, une fois les effets des aérosols pris en compte pour les précipitations en Europe du sud et en Turquie, ces dernières peuvent augmenter légèrement (Kattenberg et al.,1996). Ces changements sont loin d'être certains car ils dépendent à la fois du scénario utilisé pour les aérosols et de la représentation des aérosols dans les modèles. De façon générale, les modèles à long terme pour la région méditerranéenne suggèrent qu’à partir de 2050, les précipitations diminueraient nettement parallèlement à l'influence relative de l’augmentation des gaz à effet de serre (Palutikof et al., 1996).

De toute évidence, la façon dont les précipitations changeront, reste très incertaine, selon la composition changeante de l'atmosphère sur la région méditerranéenne. Cependant, de nombreux modèles semblent indiquer une réduction des précipitations sur une grande

46 partie de la région, avec une possible période de transition pour certaines régions en raison des effets inverses des aérosols.