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Nous avons construit à partir de la température de surface un groupe d’indicateurs de la variabilité interannuelle du SVU en terme d’intensité, d’extension spatiale et de durée. Les résultats de la simulation de référence CTRL montrent que le SVU présente une forte variabilité interannuelle, avec un écart type de l’indicateur total UIy égal à 64% de sa moyenne. Nous obtenons des années très contrastées, certaines avec seulement un faible upwelling côtier, et d’autres avec un upwelling côtier et un fort upwelling se développant au large. L’analyse statistique des simulations de sensibilité suggère que la variabilité interannuelle du SVU est en grande partie liée au forçage atmosphérique, mais qu’elle est fortement modulée par la variabilité intrinsèque océanique (OIV), qui peut représenter ~50% de la variabilité totale, ainsi que par, dans une moindre mesure, le débit des rivières et la circulation océanique de grande échelle.

L’étude détaillées de cas d’études issus de nos simulations permet de comprendre les mécanismes associées à ces conclusions statistiques.

Elle montre d’abord que la variabilité interannuelle du SVU est en grande partie pilotée par le vent, avec une corrélation de 0.81 (p<0.01) entre le rotationnel du vent en été et l’intensité totale du SVU UIy, confirmant les résultats obtenus dans les précédentes études (Xie et al., 2003, 2007; Dippner et al., 2007). De plus, on observe que la circulation océanique dans la région influence fortement le développement du SVU : l’intensité du SVU est augmentée les années où des tourbillons cycloniques associés à une vorticité positive coïncident spatialement et temporellement avec le rotationnel positive du vent. De ce fait on obtient une corrélation de 0.68 (p<0.01) entre la vorticité de surface moyenne dans la région du SVU en été et UIy. Cette influence de la vorticité de surface, largement liée au champ de tourbillons dont le comportement est fortement chaotique, est à l’origine de la contribution de l’OIV à la variabilité interannuelle du SVU. La quantification et l’explication de la contribution de l’OIV est un résultat novateur.

Nos résultats confirment en outre que le SVU est soumis à l’influence d’ENSO, avec une corrélation de 0.71 (p<0.01) entre UIy et l’index ONI en février. Cette influence est en fait liée à l’impact d’ENSO sur la circulation atmosphérique et

en particulier sur le champ de vent dans la région. Ainsi, les hivers El Niño/La Niña induisent respectivement une anomalie négative/positive du rotationnel du vent en SCS l’été suivant, et donc de l’intensité du SVU. Pour les hivers fortement El Niño, on observe de plus une diminution du vent hivernal qui induit une anomalie négative de la vorticité de surface qui persiste jusqu’à l’été et s’ajoute à l’anomalie négative du rotationnel du vent, atténuant d’autant plus le SVU.

Afin d’optimiser le réalisme du jeu de simulations utilisées pour obtenir ces résultats, et en particulier de corriger les biais et dérives de température et salinité de surface, un rappel vers les température et salinité de surface observées a été utilisé. Afin de tester l’impact de ce rappel, qui impose une contrainte sur la représentation des caractéristiques hydrologiques et dynamiques de surface, nous avons effectué un second jeu de simulations. Nous avons successivement testé l’impact du coefficient de rappel utilisé, puis mis en place des simulations sans rappel mais utilisant une correction des flux atmosphériques de chaleur et d’eau afin de corriger les biais de surface. Les résultats de ces simulations montrent que nos conclusions sur l’ordre de grandeur de la contribution des différents facteurs à la variabilité interannuelle du SVU restent valables et sont robustes à ces choix de méthode de correction de biais, mais suggèrent aussi que l’impact de l’OIV pourrait être plus important que celui estimé à partir de la simulation avec rappel de surface.

Perspectives

Outre la méthode ad-hoc utilisée pour corriger les biais de surface, la méthodologie utilisée et les outils disponibles pour réaliser cette étude induisent automatiquement certaines limitations dans notre approche. D’autres études seront nécessaires pour s’affranchir de ces limitations mais également mieux comprendre le fonctionnement, la variabilité et l’influence de la SVU :

● Notre étude ainsi que les travaux précédents (Chen et al., 2012) montrent que les débits des rivières pourraient influencer la dynamique dans la région et donc le SVU. L’explication exacte de l’influence de l’eau douce des rivières liée à leur flottabilité et/ou leur participation à l’OIV nécessite des études plus approfondies, et en particulier une amélioration de la prise en compte des rivières et de la variabilité de leur débit dans le modèle mais aussi de l’impact de la marée qui joue un rôle important dans la dispersion des panaches d’eau douce.

● Nos simulations ne prenaient pas en compte l’influence de la marée, qui conditionne non seulement la dispersion des panaches de rivières mais également le mélange des masses d’eau, en particulier dans les zones de

faible profondeur. Ce travail sur la prise en compte de la marée dans notre modèle est en cours et les premiers résultats ont été présentés en annexe A2.

● Notre étude a mis en évidence la forte contribution de l’OIV à la variabilité du SVU, confirmant les conclusions émises pour d’autres régions et processus (Penduff et al., 2011; Gregoria et al., 2015; Serazin et al., 2016; Waldman et al., 2018). Ce résultat souligne d’une part la nécessité de mettre en place des simulations à haute résolution permettant de représenter encore mieux les structures de (sub)méso-échelle qui contribuent significativement à l’OIV. Il remet également en question les approches purement déterministes basées sur l’utilisation d’une simulation unique d’une période d’intérêt, et soulignent la pertinence de mettre en place des approches numériques ensemblistes.

● La dynamique océanique en SCS fait intervenir un grand nombre de processus couplés entre l’océan et l’atmosphère (en particulier les typhons), et notre étude a mis en évidence l’importance des interactions vent-tourbillons. La mise en place d’un modèle couplé océan-atmosphère permettrait de mieux prendre en compte et étudier l’impact de ces processus couplés.

● Le SVU participe non seulement à la dynamique océanique de la SCS, mais également au fonctionnement des écosystèmes marins et des ressources halieutiques. Le LMI (Laboratoire Mixte International) LOTUS (Study center of the Land-Ocean-aTmosphere coUpled System) réunit des scientifiques de l’IRD, de l’ULCO (Université du Littoral de la Côte d’Opale), de l’Université de Toulouse, de l’USTH (University of Science and Technology of Hanoi) et de la VAST (Vietnam Academy of Science and Technology), dont une partie développe des simulations couplées physique-biogéochimie à partir des outils numériques du groupe SIROCCO afin d’étudier cette influence du SVU sur les écosystèmes marins.

● La modélisation numérique n’a de sens que si elle est utilisée en complémentarité avec les observations réelles, satellites et in-situ. En particulier, contrairement aux données satellites qui présentent une bonne couverture spatio-temporelle mais restent limitées à la surface, les observations in-situ permettent d’accéder aux caractéristiques hydrologiques et dynamiques de toute la colonne d’eau. La région de la SCS et du SVU sont pour le moment sous-échantillonnées. Pour participer à combler ce manque,

le projet franco-vietnamien VIRGIL mené par l’IRD, le CNRS et la VNU-HUS (Vietnam National University - Hanoi University of Science) prévoit de déployer un glider de la DT-INSU (Division Technique de l’Institut National des Sciences de l’Univers) au printemps-été 2018 dans la région.

● Un travail important a été réalisé afin de mettre en place notre modèle. Nos simulations pluri-annuelles à haute résolution devraient être utilisées afin d’étudier d’autres processus d'intérêt en SCS, en particulier le fonctionnement et la variabilité de la circulation de surface, de l’activité de méso-échelle, du transport au détroit de Luzon (LSTTF). Une meilleure compréhension de la dynamique de la région permettra en effet de progresser dans notre connaissance du SCSTF, qui joue un rôle important dans le transport d’eau, de chaleur et de sel entre l’océan Pacifique et l’océan Indien et participe ainsi à la circulation thermohaline globale.

APPENDIX

A1. Impacts of the relocation of the Pearl River

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