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Chapitre 7 Discussion générale, conclusion et perspectives

2. Evolution temporelle des stratégies des producteurs laitiers

1.2. La valorisation alternative de la production laitière, stratégie adoptée par les

La valorisation alternative de la production laitière étudiée dans la présente thèse englobe toutes les possibilités de valoriser le litre de lait produit autrement que par le paiement au litre de lait livré de manière conventionnelle à la laiterie. Cela concerne donc la transformation à la ferme, la vente à des petites fromageries indépendantes des grandes industries agro-alimentaires, la production biologique, la production de lait de qualité différenciée permettant une rémunération au litre de lait significativement supérieure au lait conventionnel. La transformation à la ferme est une stratégie de production peu présente en Région Wallonne mais qui tend à se développer (Collège des Producteurs, 2018). Ainsi, en 2018, le Collège des Producteurs (2018) estimait de 5 à 10 % le pourcentage de lait transformé à la ferme. En 2018, 527 producteurs étaient agréés par l’Agence Fédérale de la Sécurité de la Chaine Alimentaire pour la transformation à la ferme, soit 14% des producteurs wallons (Collège des Producteurs, 2018). Concernant la production biologique, 249 producteurs laitiers y sont répertoriés en 2018, soit 6,5% des producteurs laitiers wallons (Collège des Producteurs, 2018).

L’évolution de la transformation à la ferme de la production laitière n’a pas pu être étudiée dans un passé proche en raison de sa faible occurrence dans la base de données technico-économique de l’Elevéo de 2007 à 2017.

A l’horizon 2020

Lors de l’enquête 2015, 10% de producteurs planifiaient une valorisation alternative de leur production dans les 5 années à venir (Chapitre 3). Ce pourcentage est en accord avec une étude réalisée au niveau de plusieurs pays européens de l’Est (Lituanie, Pologne et Slovénie) où une valeur de 15% a été observée (Verhees et al., 2018). La mise en œuvre à court terme d’une telle stratégie de production est donc marginale, rejoignant ainsi les conclusions formulées par De Herde et al. (2019).

Cela peut s’expliquer par le fait que cette stratégie demande des changements importants dans la structure, la manière de travailler et l’organisation du travail (allocation de temps, équipements, collaborateurs de vente …). Elle comporte donc un risque alors que les laiteries conventionnelles garantissent une collecte du lait et un paiement mensuel, même si ce dernier fluctue en fonction du marché. De Herde et al. (2019) identifiaient également ces freins à la valorisation alternative à travers les interviews réalisées auprès d’acteurs du secteur laitier. C’est pourquoi, les producteurs préféreraient des stratégies impactant directement la production car celles-ci permettent de conserver les activités, les collaborateurs et les équipements semblables et donc de rester dans un domaine maîtrisé. Une autre explication concernant le faible engouement des producteurs pour la valorisation alternative pourrait également être liée au fait que les producteurs ne redoutaient pas un grand changement de revenu suite à la fin du système des quotas laitiers. En effet, lorsqu’un impact important sur le revenu est attendu, comme la fin pure et simple des aides liées à la Politique Agricole Commune, les producteurs laitiers seraient davantage enclin à mettre en place une valorisation alternative de leur production (Weltin et al., 2017).

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Cependant, il est intéressant de remarquer que parmi les producteurs qui souhaitaient valoriser de manière alternative leur production de lait (N = 24 sur 245 répondants), 9 producteurs souhaitaient également augmenter leur production, 14 producteurs la garder constante, 1 producteur la diminuer (Chapitre 3). Par conséquent, pour la majorité, la valorisation alternative ne signifiait pas une substitution d’activités, mais plutôt une activité supplémentaire engendrant un surplus du temps de travail. Pour près de la moitié de ces producteurs, c’est donc une combinaison de deux stratégies (augmentation de la production et valorisation alternative) qui était décidée. Aux Pays-Bas, Samson et al. (2016) observaient, eux, que les producteurs laitiers se dirigeaient soit vers l’augmentation de la production soit vers la valorisation alternative, mais pas les deux de manière combinée.

Le futur considéré à long terme

Dans la vision des producteurs pour la ferme idéale du futur, le marché global (43%) était d’abord plébiscité au détriment du marché local (32%) en 2015 (Chapitre 4). Mais en 2020, cette tendance s’est inversée (Tableau 7-2). Le marché local reprend l’idée de vendre sa production au niveau de son territoire, et de potentiellement valoriser sa production via des filières alternatives mais peut également traduire une volonté que les laiteries choisissent des débouchés plus locaux et suivent une stratégie à l’échelle locale, le tout dans un but de s’éloigner du prix du lait fixé par le marché mondial. Parallèlement à tout cela, l’intérêt pour la production de lait de qualité différenciée était déjà marqué en 2014-2015 (45% vs 38%, Chapitre 4) et s’est renforcée de manière très hautement significative en 2020 (Tableau 7-2). De plus, significativement moins de producteurs sont sans avis sur cette question (Tableau 7-2).

Conclusion préliminaire

La stratégie de production liée à la valorisation alternative aura donc été peu mobilisée par les producteurs laitiers dans un passé proche, ne permettant pas de l’étudier à partir de la base de données technicoéconomiques de 2007 à 2017. Elle a été également peu choisie comme stratégie mise en place à l’horizon 2020. Par contre, elle semble être beaucoup plus envisagée à long terme, cette tendance se renforçant après 5 années sans régulation de la production.

Le fait que la stratégie de valorisation alternative ne soit pas mesurée par les mêmes variables dans un futur proche et dans un futur envisagé à long terme peut expliquer en partie les différences observées à court et long terme. Néanmoins ces différences expriment également le fait que les producteurs souhaitent une relocalisation de la valorisation de leur production. S’ils ne l’envisagent pas autant à court terme et en le faisant par eux-mêmes, ils l’envisagent par contre comme idéal pour le futur, soit en le faisant eux-mêmes, soit à tout le moins que les laiteries prennent cette direction. Cette option leur semble en 2020 la plus pertinente.

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1.3. Avoir des activités complémentaires à la production de

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