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L’ensemble des travaux de cette thèse a été réalisé chez le rongeur. Cependant, le métabolisme de ces animaux et celui de l’être humain, ne sont pas identiques413. Des études cliniques seraient donc nécessaires pour démontrer que les effets bénéfiques des souches bactériennes que nous avons étudiées dans les chapitres 2 et 3 (i.e. Lb102, Bf141 et P35), sont également reproductibles chez l’Homme. En effet, tel que discuté précédemment, l’effet des probiotiques est souche-dépendant, et de nombreux autres facteurs vont également déterminer l’impact de tels traitements sur la santé métabolique de l’hôte, tels que : la dose, la durée du traitement, le véhicule, l’état physiologique de l’individu ou encore l’espèce de l’hôte utilisé. Une étude comparative a notamment mis en évidence que certaines souches bactériennes pouvaient avoir un effet bénéfique en diminuant la prise de poids chez l’animal, sans avoir d’effet ou augmentant la prise de poids chez l’Homme, et inversement414.

Néanmoins, parmi l’ensemble des modèles animaux pouvant être utilisés pour l’étude du MI, le modèle murin représente une bonne alternative puisqu’au niveau des phyla, la composition du MI humain est similaire à celui de la souris415. De plus, en travaillant avec les animaux de laboratoire, nous limitons les variations interindividuelles en utilisant des souris mâles issues de la même base génétique et élevées dans un même environnement. Au

cours des protocoles expérimentaux, nous étudions les animaux dans un lieu confiné, sans changement d’environnement ni d’alimentation. Cependant, chez l’être humain, nous ne pouvons pas contrôler l’ensemble des paramètres qui varient quotidiennement et qui influencent le bilan énergétique de l’individu et donc son MI. Des études cliniques sont donc à envisager, tout en se rappelant que l’état métabolique initial d’un individu et la composante génétique, sont des paramètres importants qui vont moduler la réponse individuelle à un traitement. Dans un premier temps, il serait donc intéressant de valider les effets de nos traitements chez une large population d’hommes adultes consommant une nourriture riche en gras et en sucres, afin de se rapprocher, en quelques sortes, de nos conditions expérimentales. Pour étendre ces résultats au reste de la population, des études à plus grande échelle seraient à réaliser, en prenant en compte : l’âge, le sexe, le profil métabolique, l’ethnie, l’alimentation, etc.

La recherche actuelle se penche de plus en plus vers la médecine et la nutrition personnalisées, qui découlaient primairement des différences génétiques entre les individus et conditionnaient la réponse d’un individu à un traitement donné416. Cependant, la composition du MI est également très variable entre les individus, et ce au sein même d’une seule famille417. Malgré des variations interindividuelles au niveau des espèces, les chercheurs s’accordent sur le fait que grâce à la redondance du génome des bactéries, le MI d’un sujet « sain » à l’autre, présente des fonctions similaires131. Les analyses à grande échelle du MI humain ont permis de « classer » les individus selon 3 grands entérotypes135. Cependant, ces similarités interindividuelles au niveau de la composition du MI, ne signifient pas que ses fonctions sont identiques en tout point. En effet, à travers une vaste revue de littérature, il a été mis en évidence que la composition du MI, propre à chaque individu, est un facteur qu’il faut désormais prendre en compte dans les futures « prescriptions » personnalisées relatives à notre santé418. Dans ce contexte, une étude récente réalisée chez 800 individus humains métaboliquement « sains », a notamment démontré que la réponse glycémique postprandiale à un repas contenant des glucides est dépendante de la composition du MI419. Leurs corrélations ont ensuite été validées dans une seconde cohorte indépendante, comprenant une centaine d’individus. Ces résultats démontrent que lors d’études cliniques, les individus, même s’ils sont considérés comme étant métaboliquement similaires, ne vont

pas tous répondre de manière identique à un traitement donné. Il serait notamment intéressant de considérer la composition initiale du MI lors de la mise en place d’études cliniques, afin d’avoir un nombre n d’individus statistiquement fiable selon les différents groupes déterminés.

De manière intéressante, les traitements réalisés au cours de cette thèse et qui ont montré de forts potentiels anti-obésité et qui améliorent les désordres métaboliques, sont des composés nutritionnels ou des bactéries qui sont déjà présents dans l’alimentation ou dans le TGI. Les souches Lb102, Bf141 et P35 ont notamment été isolées du MI d’individus « sains » ou de produits laitiers. Ainsi, des études cliniques pourraient être facilement envisageables, sans avoir préalablement besoin de tester l’innocuité des bactéries, comme c’est le cas pour la majeure partie des traitements, en particulier pharmacologiques.

CONCLUSION  

 

Les travaux de cette thèse ont permis de démontrer que des changements qualitatifs de notre régime alimentaire ou la supplémentation en bactéries probiotiques, pouvaient grandement influencer l’obésité et améliorer les complications métaboliques qui y sont associées.

Dans un premier temps, nous avons démontré l’importance du contact direct des AG n-3 avec le TGI, dans leurs effets bénéfiques contre le développement de la stéatose hépatique, suggérant un rôle de l’axe intestin-foie. Cependant, il est intéressant de noter que malgré une forte augmentation de la proportion de n-3 au niveau hépatique, les souris gavées avec l’huile de poissons n’ont pas été protégées de la résistance à l’insuline induite par la diète HF. Au contraire, le modèle transgénique a engendré la production endogène de n-3 dans l’ensemble des tissus, ce qui a considérablement amélioré l’homéostasie du glucose altérée par la diète HF. Afin de comprendre les similitudes observées entre les 2 modèles au niveau de la réduction plasmatique du cholestérol et l’augmentation importante de la proportion du genre Allobaculum dans les fèces, nous allons nous concentrer sur le métabolisme du cholestérol, le profil lipidique au niveau intestinal dont l’analyse est en cours et les voies des acides biliaires.

Par ailleurs, les résultats des chapitres 2 et 3 démontrent que l’administration d’une seule souche bactérienne (i.e. Lb102, Bf141, P35) a permis de considérablement prévenir le développement de l’obésité et a engendré des effets bénéfiques au niveau métabolique et intestinal qui seraient souche-dépendants. L’analyse plus poussée des voies de signalisation au niveau intestinal et dans les tissus cibles de l’insuline (foie, muscle et TAV) vont nous permettre de potentiellement mettre en évidence les mécanismes d’action relatifs aux souches étudiées. Ces 3 souches sont très prometteuses, puisque les analyses de biocompatibilité ont démontré que Lb102 et Bf141 pouvaient être incorporées dans des produits laitiers tels que le yaourt et le fromage, permettant ainsi de créer de nouveaux produits alimentaires disposant de propriétés probiotiques anti-obésité. La souche P35 quant à elle, appartient à une espèce

bactérienne connue pour ses propriétés anti-inflammatoires, mais ne peut être incorporée dans les yaourts ou fromages classiques type Cheddar à cause de la production de gaz relative à sa croissance. Cependant, de nombreuses autres alternatives sont à proposer dont l’encapsulation qui pourrait renforcer le potentiel de la souche en la libérant directement au niveau de la partie basse de l’intestin.