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Chapitre 3. PcAU-1003 improves the psoriatic phenotype in a human reconstituted skin model of psoriasis and

4.1 Utilité des PcAUs pour traiter le psoriasis

Les PcAUs ont avant tout été caractérisés comme des inhibiteurs de l’IL-6. Cependant, l’utilité de bloquer spécifiquement cette cytokine pour traiter le psoriasis n’est pas encore démontrée. On pourrait penser que ce serait le cas puisqu’il a été démontré que la surexpression de l’IL-6 dans l’épiderme est suffisante pour induire des symptômes similaires au psoriasis chez la souris (Turksen, Kupper, Degenstein, Williams et Fuchs, 1992). Il existe actuellement deux anticorps contre le récepteur à l’IL-6, le tocilizumab (TCZ) et le sarilumab, qui ont été approuvés par la Food and Drug Administration en 2010 pour le traitement de l’arthrite rhumatoïde (Blauvelt, 2017; Tsai et Tsai, 2017). Malheureusement, les premiers essais avec le TCZ faits sur deux patients atteints de PsA ont montré que l’anticorps était inefficace pour faire disparaître les plaques, contrairement à un anticorps dirigé contre TNFα (Ogata, Umegaki, Katayama, Kumanogoh et Tanaka, 2012). De plus, des cas d’apparition de symptômes du psoriasis ont été rapportés chez des patients atteints d’arthrite rhumatoïde et traités avec le TCZ (Grasland, Mahé, Raynaud et Mahé, 2013). Cet anticorps n’est donc généralement pas utilisé pour traiter le psoriasis et on favorise plutôt les anti-TNFα, dont l’utilité est mieux documentée (Braun et Sieper, 2003). Cependant, des cas ont été rapportés où le TCZ s’est montré efficace, mais pour traiter les cas de psoriasis pustuleux palmoplantaire causés par la prise d’inhibiteurs de TNFα (Jayasekera, Parslew et Al-Sharqi, 2014; Rueda-Gotor et al., 2012; Younis et al., 2012).

Ce phénomène est inattendu, car l’IL-6 est connue pour favoriser la différenciation des lymphocytes T naïfs en lymphocytes Th17 pro-inflammatoires au profit des lymphocytes T régulateurs, qui sont responsables de l’homéostasie lors des réponses immunitaires (Kimura et Kishimoto, 2010). Une étude a été réalisée

souris IL-17C+ normales. Cependant, après 14 semaines, les souris IL-17C+KO développent un phénotype similaire. On a remarqué chez ces souris une forte augmentation de l’expression de TNFα, S100A8/A9, IL36α/β/γ et IL-24 par rapport aux souris IL-17C+. Il semble donc que l’absence d’IL-6 soit compensée par une surexpression d’autres cytokines. Même si le blocage de la voie de l’IL-6 semble être contre-productif dans le traitement du psoriasis, il faut rappeler que les anticorps ont des effets systémiques et on ne sait pas si le TCZ peut inhiber l’IL-6 dans la peau. Il est donc tout à fait envisageable que le blocage de l’IL-6 aux sites des lésions psoriasiques de la peau puisse être bénéfique pour le patient.

Pour réaliser notre criblage, nous avons choisi de mesurer la production de l’IL-6 pour évaluer et comparer l’efficacité des PcAUs entre elles parce que l’effet de la tBEU et de la cHEU sur l’expression et la production de l’IL-6 était relativement constant d’une expérience à l’autre. De plus, comme elle est sécrétée dans le milieu de culture, l’IL-6 est rapidement quantifiable en ELISA, ce qui nous a permis d’étudier simultanément les effets d’un grand nombre de PcAUs. L’IL-6 est aussi généralement considérée comme un pronostic fiable du psoriasis et d’autres maladies auto-immunes (Hunter et Jones, 2015).

Cependant, nous avons aussi étudié les effets de la PcAU-1036 sur d’autres gènes de l’inflammation et nous avons observé qu’elle diminuait fortement l’expression de COXII, de TNFα et d’IL-8 (Figure 4.1). TNFα a un rôle clef dans le psoriasis en perpétuant l’inflammation dans la peau par l’activation de la voie NF-κB et en activant l’inflammation chez les cellules dendritiques et endothéliales (Grine et al., 2015; Holbrook, Lara-reyna, Jarosz-griffiths et Mcdermott, 2019). Pour sa part, l’IL-8 est une chimiokine qui recrute et active les lymphocytes aux sites d’inflammation (Sticherling, Sautier, Schröder et Christophers, 1999). Il serait donc pertinent de cribler par ELISA l’effet des PcAUs pour sur ces deux médiateurs inflammatoires.

COXII permet la conversion de l’acide arachidonique en PGE2, un médiateur de l’inflammation qui contribue au psoriasis en stimulant la prolifération des kératinocytes et la vasodilatation (Bakry, Samaka, Shoeib et Aal, 2015; Lee, Mukhtar, Bickers, Kopelovich et Athar, 2003). Il a été démontré que ce gène est surexprimé dans les plaques psoriasiques (Bakry et al., 2015). Cependant, COXII n’est pas sécrété par les cellules et n’est donc pas directement détectable par ELISA. Il est néanmoins possible de mesurer indirectement son activité enzymatique par des essais biofonctionnels qui impliquent la métabolisation d’un substrat. On pourrait tester les PcAUs de cette façon pour leur capacité à inhiber l’activité de COXII.

Donc, il est plausible que les effets anti-psoriasiques de la PcAU-1003 sur les modèles précliniques du psoriasis ne soient pas simplement causés par l’inhibition de l’IL-6. 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 1,2

COX2 IL-1β IL-6 IL-8 TNFα

Ni v e a u d 'e x p ression rela tif

Niveau de base PcAU-1036 100 µM

PcAU-1036 fraîche. Les résultats représentent la moyenne des valeurs de trois

qPCR ± erreur type de la moyenne (expérience non dupliquée). Les niveaux

d’expression sont normalisés par rapport au niveau d’expression du gène constitutif U6.

Puisque nos molécules ont été principalement étudiées dans l’optique de développer un traitement topique contre le psoriasis, nos expériences ont surtout été réalisées sur des kératinocytes. D’autres types de cellules sont aussi impliquées dans la pathologie. Entre autres, les cellules du système immunitaire comme les lymphocytes T, les cellules dendritiques et les macrophages sont des contributeurs majeurs des maladies auto-immunes. D’ailleurs, des expériences préliminaires faites sur des macrophages dérivés de monocytes THP-1 et stimulés avec du LPS montrent que les PcAUs ont aussi un effet sur ce type cellulaire (Figure 4.2). On observe que les PcAUs efficaces à inhiber IL-6 dans ce modèle ne sont pas les mêmes que celles agissant sur les kératinocytes HaCaT. Par exemple, la PcAU- 1003, qui est efficace sur les HaCaT, n’a pas d’effet sur les macrophages dérivés des THP-1 dans les conditions testées. Cette différence pourrait s’expliquer par le fait que les PcAUs modulent l’activation de la voie AHR. En effet, la voie de signalisation AHR joue un rôle différent dans les macrophages en induisant l’expression de la cytokine anti-inflammatoire IL-10 (Zhu et al., 2018). De plus, elle favorise la polarisation des macrophages vers le sous-type M2, qui est immunomodulatoire, au détriment du sous-type M1, qui est plutôt pro-inflammatoire.

Figure 4.2 : Criblage des PcAUs par ELISA contre IL-6 sur des macrophages dérivés des THP-1 et stimulés avec du LPS. Des monocytes THP-1 ont été

différenciés en macrophages par un traitement avec du PMA 50 ng/mL pendant 48 heures. Ensuite, les cellules ont été prétraitées 1 h avec les PcAUs à 10 µM, puis stimulées avec du LPS 100 ng/mL pendant 4 h. L’IL-6 dans le milieu de culture a ensuite été quantifiée par ELISA. Les résultats représentent la moyenne de 3 expériences indépendantes ± écart type.