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Le pouvoir anti-tumoral du système immunitaire peut constituer une arme puissante dans l’élimination des tumeurs. Les stratégies d’immunothérapie visent alors à recruter et/ou activer les leucocytes sur le site de la tumeur afin de déclencher une réponse immunitaire anti-tumorale efficace. Étant données les propriétés chémoattractantes des chimiokines vis à vis les différentes populations leucocytaires, leur utilisation dans les stratégies d’immunothérapie apparaît comme pertinente. Certaines auront également comme avantage de limiter voire d’empêcher l’angiogénèse tumorale (Homey et al., 2002; Lechner et al., 2011).

Une des premières approches à consister à transférer les gènes codant pour certaines chimiokines dans les cellules tumorales, puis à évaluer la capacité de ces chimiokines à modifier le recrutement des leucocytes dans les tumeurs dans des modèles précliniques de cancers chez

74 l’animal. Ainsi, dans de nombreux modèles expérimentaux de tumeurs induites chez la souris, les cellules tumorales utilisées ont été modifiées génétiquement afin d’exprimer ou de surexprimer des chimiokines dans le but de stimuler le recrutement intra-tumoral des leucocytes et d’amplifier la réponse immune anti-tumorale de l’hôte. Dans ces essais précliniques, une diminution de la tumorigénicité des cellules tumorales a été observée, suite au recrutement et à l’activation des lymphocytes T CD4+, CD8+, des cellules NK et/ou des cellules dendritiques. Ces résultats ont été

observés pour la surexpression de CCL5 ou de CX3CL1 dans les lymphomes (Lavergne et al., 2003, 2004), de CCL7 dans le mélanome (Fioretti et al., 1998; Wetzel et al., 2007), de CCL16 ou CCL19 dans le cancer du sein (Braun et al., 2000; Giovarelli et al., 2000) et de CX3CL1 dans le cancer des poumons, les neuroblastomes et dans l’hépatocarcinome (Guo et al., 2003a, 2003b; Tang et al., 2007; Zeng et al., 2005). Dans le cancer colorectal, des expériences similaires ont été réalisées avec CCL3, CCL20, CCL21 ou CX3CL1 (Crittenden et al., 2003; Vicari et al., 2000; Xin et al., 2005). De façon intéressante, le laboratoire a également montré que la transduction de CX3CL1 par les cellules cancéreuses coliques C26 diminuait le développement tumoral dans un modèle de tumeur sous-cutanée et dans des modèles de métastases expérimentales au niveau du foie et des poumons (Vitale et al., 2007).

Par ailleurs, afin d’envisager une utilisation en clinique des chimiokines dans les thérapies anticancéreuses, l’administration de chimiokines d’intérêt comme ‘médicament’ anticancéreux a été développée. Une des stratégies privilégiées est celle du transfert de gènes codant pour une chimiokine d’intérêt au niveau de tumeurs préétablies. Quelques exemples d’études chez l’animal sont donnés dans le tableau 11. Les effets anti-tumoraux sont concluants et la nature des populations leucocytaires impliquées dépend des chimiokines administrées, mais également du modèle tumoral étudié. En plus de ces essais précliniques, il est intéressant de citer ici une étude chez des patients atteints de neuroblastomes auxquels a été administré un adénovirus codant pour la chimiokine XCL1 et la cytokine IL-2 (Rousseau et al., 2003). Chez tous les patients inclus dans cette étude, un recrutement massif de lymphocytes T CD4+, T CD8+ et de cellules de Langerhans a été observé au niveau du site d’injection. Six patients sur vingt et un ont présenté une augmentation significative de l’activité cytolytique des cellules NK. Deux patients ont été déclarés en rémission complète et un patient a présenté une réponse partielle. Cette combinaison chimiokine/cytokine peut donc induire une réponse immunitaire anti-tumorale efficace et ce, avec une faible toxicité pour l’homme. Ces stratégies d’immunothérapie couplées aux stratégies thérapeutiques existantes offrent des perspectives encourageantes et doivent continuer à être développées (Franciszkiewicz et al., 2012).

75 Chimiokines Modèles tumoraux Technique de libération des

chimiokines sur le site tumoral

Leucocytes infiltrants impliqués dans la réponse

immunitaire

Résultats Références

CCL16 Cancer du sein Adénovirus injecté dans les tumeurs Lymphocytes T CD4

+, CD8+ et

cellules dendritiques

Diminution de la taille des tumeurs et de la formation de métastases spontanées

(Guiducci et al., 2004, 2005)

CCL17 Cancer du côlon Adénovirus injecté dans les tumeurs Lymphocytes T CD8

+ et

macrophages Régression tumorale (Kanagawa et al., 2007)

CCL20 Cancer des poumons, cancer colorectal et mélanome Adénovirus injecté dans les tumeurs sous-cutanées Lymphocytes T CD8

+ et cellules

dendritiques

Diminution de la taille des tumeurs et

augmentation de la survie des animaux (Fushimi et al., 2000)

CCL22 Cancer des poumons Adénovirus injecté dans les tumeurs Lymphocytes T CD4+, CD8+ et

cellules dendritiques Régression tumorale (Guo et al., 2002)

CXCL9,

CXCL10 Cancer du sein et fibrosarcome

Injection intra-tumorale de 2 adénovirus codant CXCL9 ou CXCL10 et l’IL-12 respectivement

Non décrit Régression tumorale et augmentation de

la survie des animaux (Palmer et al., 2001)

CXCL10

Hémangiosarcome métastatique Cancer colorectal (CCR)

Myélome

Parvovirus injecté dans les tumeurs ou dans le péritoine

Injection intra-tumorale de 2

adénovirus codant CXCL10 et l’IL-12 respectivement

Injection intra-tumorale de 2

adénovirus codant CXCL10 et l’IL-18 respectivement

Lymphocytes T cytotoxiques IFN +

Lymphocytes T CD4+, CD8+ et

cellules NK

Lymphocytes T CD4+, CD8+

Inhibition de la progression tumorale Éradication de 100% des tumeurs

Régression de tumeurs préétablies

(Giese et al., 2002) (Narvaiza et al., 2000)

(Liu et al., 2002)

CX3CL1 Métastases pulmonaires de

CCR et d’ostéosarcome

Plasmide codant CX3CL1 formulé avec un copolymère à bloc administré par aérosol

Non décrit Inhibition des métastases pulmonaires (Richard-Fiardo et al., 2011)

XCL1 Cancer du sein

Injection intra-tumorale d’un adénovirus codant XCL1 et l’IL-2 ou adénovirus codant XCL1 et IL-12

Lymphocytes T CD4+, CD8+ Régression tumorale (Emtage et al., 1999)

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I. Les chimiokines et leurs récepteurs, des acteurs pro-

tumoraux : implication du récepteur de chimiokines CXCR7

dans le processus métastatique

Le récepteur CXCR7 facilite la progression des carcinomes coliques

au niveau des poumons et non au niveau du foie

Cette étude a fait l’objet d‘une publication dans British Journal of Cancer en décembre 2012 Guillemot E, et al. Br J Cancer (2012) 107(12):1944-9 (Article I)