• Aucun résultat trouvé

Depuis l’adoption de la Déclaration universelle, les États ont maintes fois rappelé que les droits de l’homme étaient universels et indivisibles. Lors de la Conférence mondiale de Vienne, ils ont spécifiquement reconnu que les droits des femmes faisaient partie des droits fondamentaux universels, ce qu’ils ont réaffirmé par la suite, notamment à la quatrième Conférence mondiale sur les femmes. Comme on l’a vu ci-dessus, le Programme d’action de Vienne a lui aussi insisté sur la nécessité de « venir à bout des contradictions qu’il peut y avoir entre les droits des femmes et les effets

préjudiciables de certaines pratiques traditionnelles ou coutumières, de préjugés culturels et de l’extrémisme religieux ».

En dépit des engagements ainsi pris par les États, la question de l’universalité s’est souvent posée quand des États ont tenté de justifier des violations des droits des femmes au nom de la culture. Dans son rapport sur les pratiques culturelles au sein de la famille qui constituent des formes de violence contre les femmes (E/CN.4/2002/83), la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes mentionne les mutilations génitales féminines, les «  crimes d’honneur  », la préférence accordée aux garçons et la chasse aux sorcières comme exemples de coutumes qui ont été protégées sous prétexte qu’elles faisaient partie d’une culture.

Les stéréotypes et normes culturelles qui prescrivent aux femmes des rôles dans la société empêchent également les femmes de jouir de leurs droits. Par exemple, on a parfois justifié le refus de donner une éducation aux filles en partant de l’idée que, en tant que mères et épouses, elles n’entreraient pas sur le marché du travail et n’avaient donc pas besoin d’éducation.

L’universalité des droits de l’homme et leur validité dans un contexte local donné ont souvent été contestées dans des discours relativistes qui les qualifient d’idées étrangères incompatibles avec la culture locale13. Cependant, la Rapporteuse spéciale dans le domaine des droits culturels a mis en garde contre les discours qui minimisent le fait que la culture n’est pas statique et qu’elle change avec le temps. Elle a également attiré l’attention sur le manque d’influence des femmes dans les processus décisionnels qui définissent la culture d’une communauté (A/67/287).

Comme on l’a déjà indiqué, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes appelle les États à

«  modifier les schémas et modèles de comportement socioculturel de l’homme et de la femme en vue de parvenir à l’élimination des préjugés et des pratiques coutumières, ou de tout autre type, qui sont fondés sur l’idée de l’infériorité ou de la supériorité de l’un ou l’autre sexe ou d’un

13 Voir « Relations entre culture et violence à l’égard des femmes » (A/HCR/4/34).

rôle stéréotypé des hommes et des femmes ». Dans sa recommandation générale no 19 (1992), le Comité fait observer, à propos des articles 2 f), 5 et 10  c), que les attitudes et pratiques selon lesquelles les femmes sont subordonnées aux hommes enferment les femmes dans des rôles subordonnés dans la société et donc les empêchent de jouir de leurs droits, de l’égalité des genres et de la non-discrimination. Le Comité mentionne à cet égard des pratiques comme les violences et les sévices dans la famille, les mariages forcés, les meurtres d’épouses pour non-paiement de la dot, les attaques à l’acide ou l’excision. Dans ses commentaires relatifs à l’article 12 sur le droit à la santé, le Comité note que certaines pratiques traditionnelles et culturelles nuisent à la santé des femmes et des enfants. Ces pratiques incluent notamment les restrictions alimentaires imposées aux femmes enceintes, la préférence pour les enfants mâles, l’excision ou la mutilation des organes génitaux féminins.

La Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, dans son rapport sur les relations entre la culture et la violence à l’égard des femmes, soutient qu’il est possible d’interroger et de négocier la culture et d’en identifier les éléments positifs, notamment la culture des droits de l’homme, pour les intégrer à des stratégies visant à transformer les pratiques oppressives défendues au nom de la culture. Elle conclut

« qu’il est exclu de faire des compromis sur les droits des femmes. Par conséquent, l’enjeu est aujourd’hui de respecter et de chérir nos différentes cultures tout en élaborant des stratégies communes pour résister aux pratiques oppressives imposées au nom de la culture et pour promouvoir et défendre les droits de l’homme universels tout en rejetant toute atteinte fondée sur une pensée ethnocentrique » (A/HRC/4/34, par. 71)14. La Rapporteuse spéciale dans le domaine des droits culturels a également examiné l’interaction entre le principe de l’universalité des droits de l’homme, la reconnaissance et la réalisation des droits culturels et la nécessité de respecter la diversité culturelle (A/HRC/14/36). Elle

14 Voir aussi HCDH, Fact Sheet No. 23 : Harmful Traditional Practices Affecting the Health of Women and Children et Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, recommandation générale no 14 (1990) sur l’excision.

considère que la promotion et la protection universelles des droits de l’homme – y compris des droits culturels, d’une part, et de la diversité culturelle, de l’autre – se renforcent mutuellement. Rappelant la Déclaration et le Programme d’action de Vienne, la Déclaration universelle sur la diversité culturelle et la résolution 10/23 du Conseil des droits de l’homme, elle affirme que le respect des droits culturels et de la diversité culturelle ne peut porter atteinte à l’universalité des droits de l’homme.

C. NON-DiSCRiMiNATiON ET ÉGALiTÉ DE L’HOMME ET DE LA FEMME