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8/ SANTÉ ET BLESSURE

8.1. Une blessure quasi-inéluctable

La quasi-totalité des sportifs interrogés (n = 21/28) a connu au moins une blessure au cours des quatre années qui ont précédé les Jeux Olympiques de Rio :

« Le problème c’est que je me suis aperçue, c’est qu’à chaque début d’année j’avais des blessures » ;

« Après j’ai eu aussi une entorse aux cervicales, commotion cérébrale parce que je me suis pris une fille sur la tête. Après j’ai eu une déchirure du quadriceps, ça ce n’était pas longtemps avant les JO, peut-être trois mois avant » ;

« On a beaucoup de blessures mais à long terme, c’est-à-dire qu’il n’y a pas grand-chose qui arrive sur le coup. Et moi c’était souvent mon cas, j’avais souvent mal quelque part et vu que je ne faisais pas de soins, je continuais à m’entraîner. Et c’est là qu’après la blessure elle arrivait ».

« Je n’ai jamais eu de blessures depuis que je suis gamin, j’ai une bonne hygiène de vie ça aide mais bon, j’ai eu juste une grosse contracture au dos qui m’a bloqué un mois mais c’est tout » ;

« Niveau musculaire j’ai dû avoir une ou deux micro-déchirure ma première

année, et sinon je n’ai rien, je n’ai que des trucs articulaires, donc de l’usure ou du choc ».

• Certains de ces traumatismes sont ponctuels :

« J’ai eu des petites blessures mais pas plus d’un mois. Donc ça, on va faire une écho, on voit, et puis on met un peu de temps de repos, le temps que ça aille mieux » ;

« Les grosses blessures que j’ai eues, enfin, je me suis fait une cheville, j’ai été plâtré et tout » ;

« En février, je me déchire le psoas sur 5 centimètres, donc je prends un mois d’arrêt. Je reviens mi-mars je crois un truc comme ça, j’avais compet’ deux semaines plus tard. Donc deux semaines de compet’ ça se passe bien, en gros je m’entraîne pendant un mois entre le jour de la reprise du psoas et le jour ou là je me reblesse, je tombe dans les escaliers du métro et je me fracture le sacrum. Avec déplacement et tout, donc je prends deux mois ».

• D’autres sont plus récurrents :

« Donc j’ai une pubalgie, j’ai un œdème osseux sur le pubis, une

inflammation du tendon des adducteurs, tout du même côté. C’est une blessure d’usure en fait » ;

« J’ai une protrusion L5-S1. En fait j’ai deux trucs, j’ai comme un pincement postérieur donc j’ai besoin de faire des extensions pour replacer mon disque vers l’avant, mais j’ai aussi une surcompression au niveau des articulations postérieures, donc j’ai aussi besoin de flexions » ;

« J’ai une scoliose elle me faisait mal mais sans plus. Là vraiment ce qui me gêne le plus jusqu’à présent c’est la discopathie. Je ne me voyais pas capable de continuer » ;

« J’avais des douleurs chroniques, j’allais chez le kiné, c’était durcîtes et tendinites, ce que toutes les [sportives de la discipline concernée] ont à peu près ».

Pour de nombreux sportifs, la blessure semble inéluctable dans le sport de haut niveau même lorsque tous les dispositifs sont mis en place pour la prévenir, car l’accident est toujours possible :

« Ce qui m’est arrivé ce n’est pas des blessures parce qu’on a eu une mauvaise

hygiène de vie, ça a été vraiment deux blessures, de ‘pas de cul’ » ;

« Si t’arrives à faire vraiment une programmation optimale peut-être, mais

après tu as des blessures qui arrivent c’est des accidents » ;

« Après on peut réduire le risque au maximum, mais il y a toujours une notion de risque ».

La blessure en vient à être banalisée :

« On a toujours des petits trucs » ;

« Faire du sport c’est bien, mais beaucoup comme on en fait, on sait que nos corps ils ne tiennent pas, au bout d’un moment c’est compliqué, je pense

qu’on est un peu obligé de se blesser » ;

« Plus l’objectif est haut et plus on se rapproche du point de rupture » ; « Tu ne peux pas passer à travers sur une carrière, c’est impossible. Il y a

De manière générale, les sportifs estiment que la blessure fait partie de leur carrière si bien qu’elle devient anecdotique. Les corps sportifs, en tant qu’outils de performance, finissent alors par être meurtris, laissant des traces parfois irréversibles : « Est-ce que je repars pour quatre ans à me faire mal tous les jours ? Là j’ai fait un bon résultat, mais je ne suis pas sûr de faire mieux dans quatre ans. Est-ce que ça vaut le coup ? Parce que je vais le payer, quand j’aurais quarante piges, je vais le payer. Est-ce que ça vaut vraiment le coup ? Donc c’est peut-être ça aussi qui fait que maintenant je fais peut-être un peu plus gaffe à

l’hygiène de vie, la nutrition et la récup’. Je me prépare tout de suite, parce que sinon, après la facture, c’est toute la vie quoi. Si j’arrête à 25 ans, plié en deux, et qu’il me reste encore je ne sais pas, 60-70 ans à vivre… On est déjà censé avoir mal au dos vieux, mais si on commence à avoir mal déjà à cet âge-là. Parce qu’aujourd’hui je ne peux pas rester debout plus d’une heure quoi. Quand on va faire les courses à la fin je finis assis dans le caddie quoi ».