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Chapitre cinq : Une identité culturelle à définir

1. Créolisation ou créolité

2. Les commémorations créatrices d’identité

Chapitre six : Quand la pratique se nourrit des discours identitaires

1. L’Ecole Négro-Caraïbe 2. Le groupe Fwomajé 3. Les volontés individuelles

Chapitre sept : les balbutiements du dispositif : avancées et carences

1. Les carences d’un dispositif encore jeune 2. L’art : un enjeu politique

L’histoire de l’art martiniquais est née dans un contexte complexe associant conflit mondial, exactions coloniales, remises en cause du système et médiations d’acteurs motivés. De 1956 à 1998, le dispositif associant création, légitimation, diffusion et transmission de l’art s’est développé. Depuis la démission retentissante de Césaire du Parti Communiste Français en 1956 jusqu’à la commémoration du cent-cinquantenaire de l’abolition de l’esclavage largement célébrée en 1998, les revendications politiques, identitaires et esthétiques ont prospéré nourrissant le développement de l’art.

Dans quelle direction l’histoire de l’art martiniquais a-t-elle progressé ? La synergie des différents éléments du dispositif est-elle toujours exploitée ? La dichotomie résistance/lutte au postcolonialisme, si déterminante dans l’éclosion du dispositif, continue-t-elle à l’alimenter ? Les nouveaux acteurs poursuivent-ils le travail initié par les précurseurs tels René-Corail, Julien Lung-Fu ou Bertrand ou bien construisent-ils leur propre esthétique en se défiant du passé ?

Dix ans après la départementalisation, la situation politique et sociale de l’île est toujours aussi critique. Des émeutes violentes dues tant à la misère qu’au comportement raciste de certains CRS et pieds-noirs venus des pays nouvellement indépendants du Maghreb, bouleversent la politique de l’île. L’Etat ne veut pas d’une autre Algérie, aussi mise-t-il sur la répression et sur la migration. En effet, une politique migratoire est mise en place dès 1963 et envoie des milliers de jeunes antillais travailler dans l’Hexagone. La résistance s’organise, elle aussi. Le monde politique se construit, notamment à travers la création du Parti Communiste Martiniquais et du Parti Progressiste Martiniquais, deux partis indépendants du pouvoir politique hexagonal. Des associations apolitiques, comme l’OJAM, participent aussi à la remise en cause de la présence coloniale. C’est ainsi que le fait national martiniquais est établi. De fait, les revendications statutaires évoluent passant de l’autonomie à l’indépendance.

Si la Martinique est une nation, aussi se doit-elle de mieux définir son identité. De nombreux intellectuels se sont attelés à cette tâche en faisant fluctuer cette notion. Alors que Glissant prône une identité ouverte, en perpétuelle construction, nourrie de la rencontre avec

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l’autre, les auteurs de la créolité préfèrent une définition essentialiste. Selon eux, l’Etre Créole, doit d’abord se trouver et, seulement ensuite, aller à la rencontre des autres. Malgré ces divergences, tous s’accordent sur les conséquences encore néfastes du colonialisme et sur le rôle fondamental de l’artiste dans le combat qu’il doit mener contre celles-ci. L’identité martiniquaise s’est aussi construite à travers les rituels commémoratifs et notamment ceux entourant l’abolition de l’esclavage. L’histoire de cette commémoration célébrant d’abord le rôle de Schœlcher, puis insistant de plus en plus sur l’insurrection des esclaves, participe à la quête identitaire. 1998 marque un tournant dans cette valorisation du rôle du peuple martiniquais : le cent-cinquantenaire de l’abolition de l’esclavage est un événement historique majeur servant d’exemple aux luttes à venir.

Les artistes, qui ont d’ailleurs largement participé aux commémorations de cet événement, intègrent le discours identitaire naissant dans leur production plastique et dans leur réflexion théorique. Des groupes se forment, comme l’Ecole Négro-Caraïbe ou le groupe Fwomajé, tous deux défendant chacun une esthétique singulière. Guédon, Hector Charpentier et Habdaphaï participent, individuellement à la construction d’une expression plastique prompte à retranscrire l’identité martiniquaise. Le refus des postulats occidentaux conduit ces artistes à une production syncrétique, originale, locale et parfois mystique.

Les artistes martiniquais sont, comme leurs prédécesseurs, fortement impliqués dans le dispositif « histoire de l’art ». Ils théorisent leur pratique, l’enseignent, et s’engagent dans des processus de diffusion. Petit à petit, l’histoire de l’art martiniquais s’organise entre avancées – ouverture d’une école nationale d’art, articulation d’un discours scientifique – et carences – peu de lieux de diffusion, statut précaire de l’artiste. Mais, la résistance et la lutte au postcolonialisme sont présentes jusque dans les institutions artistiques ; la culture devient un enjeu politique, ce qui ne favorise pas toujours la création.

Chapitre quatre

Face à la répression, la question statutaire évolue

La dégradation de la situation économique et sociale renforce l’un des moteurs de l’histoire

de l’art de l’île : la dichotomie subir/résister au postcolonialisme. Dix ans après la loi de

mars 1946, la départementalisation déçoit. Le chômage est endémique, les aides sociales ne

sont pas au niveau de celles de l’Hexagone. La tension est palpable et ce, d’autant plus que

le comportement raciste de certains, CRS et Pieds-noirs, ne fait qu’attiser la situation. Des

émeutes éclatent en 1959 et en 1961. L’Etat craint qu’aux revendications sociales ne se

greffent des revendications politiques. Pour éviter toute dérive, il renforce la répression et

instaure un système de migrations qui vide la Martinique de ses forces vives : la jeunesse.

Malgré ces mesures, la résistance s’organise. Le monde politique s’éloigne du modèle

français, des partis indépendants sont ainsi créés. Des associations, comme l’Organisation

de la Jeunesse Anticolonialiste Martiniquaise, revendiquent une Martinique autonome.

Malgré la popularité de De Gaulle, ces résistances imposent le fait national martiniquais.

Sommaire

1.

Un pouvoir colonial toujours aussi répressif

1.1. La Martinique des années 1960 : une crise profonde

Les conséquences de la départementalisation

Les émeutes de décembre 1959 : résistance à l’oppression coloniale

1.2. L’obligation de trouver des solutions

Eviter que la situation ne dégénère La solution migratoire

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