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Parmi les entreprises de service public, France Télécom représente un cas à la fois spécifique et représentatif. Spécifique, car l'opérateur français des télécommunications est passé récemment de l'état d'administration à celui d'entreprise, tout en conservant le statut de fonctionnaire pour ses agents; mais aussi représentatif, car cette organisation, qui affronte depuis plusieurs années une concurrence croissante et se prépare à voir disparaître totalement son monopole en 1998, met en oeuvre depuis le début des années 1990, comme les autres services publics, une politique radicalement nouvelle pour sa gestion des ressources humaines.

La présentation des principes et des outils de cette gestion est un passage obligé pour celui qui s'interroge sur la mise en pratique de cette nouvelle logique de gestion. Mais elle ne peut pas se faire indépendamment du contexte particulier qui l'a vu apparaître, ni de la situation sociale et économique qui prévaut lors de sa mise en application. Nous verrons ainsi comment la préparation d'une réforme d'envergure (1) a concrétisé cette nouvelle logique de gestion (II).

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1 - LA PREPARATION D'UNE REFORME

Sans faire ici l'histoire détaillée des Télécommunications françaises - travail qui nécessiterait, à lui seul, largement une thèse -, nous devons préciser de quelle manière cette Réforme est apparue et a apporté des éléments de changement dans l'organisation de France Télécom1. Les

1La présentation de la structure et des effectifs actuels de France Télécom est prévue au chapitre suivant (II).

"Télécom" se présentent à la fin des années 80 comme une administration "modernisée" (1), qui évolue alors vers une réforme d'envergure (2), négociant alors urie nouvelle gestion des ressources humaines (3).

1) France Télécom àla fin des années 1980: une administration "modernisée"

L'histoire de la Réforme qui a conduit France Télécom à changer de statut en 1990 et à introduire ensuite une nouvelle logique de gestion commence à la fin des années 1980. A ce moment-là, l'administration des télécommunications, qui emploie 156.000 personnes2 au sein du ministère

des PTT, fait figure de "vitrine" pour le mouvement de modernisation du service public3 : face à l'évolution technique et économique, les Télécom ont

développé une logique en rupture avec le modèle administratif, avant d'être un banc d'essai réceptif aux méthodes issues de la "modernisation".

a - Face à l'évolution technique et économique4

Parmi les facteurs de contingence traditionnellement retenus pour

expliquer l'impact d'un environnement sur une organisation, la

technologie et la situation des marchés figurent en bonne place. Ces deux facteurs ont effectivement, dans le cas de France Télécom, une influence déterminante.

Du télégraphe à la visioconférence, en passant par le téléphone et la télécopie, l'évolution des techniques de communication se présente comme une histoire continue, alternant périodes de stabilité et phases de forte expansion. On sait que le premier réseau organisé et structuré de télégraphie aérienne est mis en place par les frères CHAPPE, à la fin du XVIDème siècle, et que le télégraphe représente dès ses origines un enjeu politique et militaire. La télégraphie électrique est mise au point dans les années 1840, et

2 Chiffres du bilan social de 1989.

3 F. PAVE note ainsi en 1989 que "France Télécom est particulièrement exemplaire. (...) France Télécom a fait la démonstration qu'il est possible de réussir à introduire de nouveaux modes de management dans le secteur public" . Cf. "Modernisation et démocratisation: aperçu des actions en cours", p. 78, inProjet,nO220, décembre 1989.

4Ce passage reprend quelques aspects de l'histoire des PTT. On trouvera en annexe 2 a quelques grandes dates de cette histoire.

il faut attendre la fin du XIXème siècle pour que les premiers réseaux téléphoniques se développent. A cette époque, les pouvoirs publics ne destinent pas cette innovation à un grand avenir: entre 1879 et 1889, l'Etat

concède les réseaux téléphoniques à des compagnies privées. La

nationalisation des réseaux intervient pourtant en 1889, mais le téléphone n'est qu'une branche de l'administration des Postes et Télégraphe, elle- même fortement dépendante de l'administration des Finances.

Cette double subordination du téléphone, par rapport à l'activité postale et aux Finances, est très tôt l'objet de préoccupations. En 1910, un député propose de "conférer la personnalité civile à l'administration des PTT", et la création d'un conseil d'administration tripartite est plusieurs fois proposée, sans suite. En 1921, Henri FAYOL, célèbre pour ses principes généraux d'administration, insiste dans un rapport rendu au ministre des Travaux publics sur cette domination et surtout sur la mauvaise application qui est faite, selon lui, des principes régissant le budget de l'Etat: ceux-ci

"demandent à être appliqués avec intelligence et mesure : le meilleur principe mal appliqué peut conduire à des désastres ... Dans l'application des principes d'annualité, d'universalité et de spécialité aux PTT, on n'a tenu compte ni de la mesure, ni des besoins des services" . L'auteur énumère également les "vices d'administration de l'entreprise gouvernementale des Postes, Télégraphes et Téléphones", citant notamment: "aucun stimulant pour le zèle ; aucune récompense pour les services rendus ; absence de responsabilité"5.

En 1923, l'institution du budget annexe reconnaît l'individualisation du budget des PTT par rapport au budget général, mais le service postal, considéré comme essentiel, se voit attribuer la plus grande partie des maigres crédits d'investissement, dans un contexte où l'Etat puise dans ce budget annexe pour alimenter le budget général. Les télécommunications restent donc sous l'emprise des services postaux. Entre les deux guerres, les télécommunications françaises ont en.core largement les caractéristiques de l'organisation administrative : contrôle budgétaire, soumission à des tutelles et à la comptabilité publique, hiérarchie et centralisation.

J.

CHEVALLIER note qu'alors "une discipline quasi-militaire est imposée aux agents ; les procédures sont uniformes sur l'ensemble du territoire ; toutes

5 L'incapacité industrielle de l'Etat: les PIT, Paris, Dunod, 1921. Les citations se trouvent

les décisions de quelque importance que ce soit sont arrêtées au niveau central "6.

Pourtant, dès le début du siècle, le téléphone se caractérise par un rythme d'innovation technologique rapide et régulier. Tous les vingt ans un nouveau procédé apparaît : liaisons radioélectriques en 1900, commutation électromécanique et liaisons par câbles de grande distance à partir de 1920, naissance de la télévision dans les années 1930, transmission par faisceaux hertziens au cours de la seconde guerre mondiale, satellites dans les années 1960... Ce rythme s'accélère sur les trente dernières années, avec la commutation électronique (fin des années 1960), la numérisation (années 1970), la mise au point du réseau numérique à intégration de services dans les années 1980... A partir des années 1970 convergent trois secteurs qui s'étaient développés jusque-là de manière parallèle : la téléphonie, l'informatique et l'audiovisuel sont désormais associés par le procédé de numérisation des signaux, qui permet de transporter sur un même support données, sons et images. A la téléphonie classique s'ajoutent désormais les "services à valeur ajoutée" et de nombreux produits tels que les télécopieurs.

Parallèlement à l'accélération de l'évolution technique, les marchés internationaux se caractérisent par un mouvement de déréglementation dans ce secteur des télécommunications. Dès les années 1970, les Etats-Unis introduisent, face à la concurrence japonaise, une déréglementation7 qui

s'organise au niveaux local et international : ATT, suite à une action "antitrust", se sépare de ses filiales d'exploitation de réseaux téléphoniques locaux, transformées en compagnies indépendantes ; le marché des communications de longue distance est ouvert à des sociétés concurrentes ; des firmes privées reçoivent l'autorisation de lancer des satellites8.

Ainsi, l'évolution de la technique et l'accélération de l'influence économique extérieure amènent les. Télécommunications françaises à se transformer progressivement. Jusqu'à la fin des années 1980, les

6 "La mutation des postes et télécommunications", p. 667-673, L'actualité juridique - Droit administratif, Paris, 20 octobre 1990.

7 Au sens général de suppression ou d'allégement du contrôle public sur une industrie. 8 Le monopole d'AIT est ainsi complètement démantelé en 1984.

transformations ont cependant lieu dans le cadre juridique de l' administration.

b - Dès les années 1970, une rupture avec le modèle administratif

La nécessité affirmée par les pouvoirs publics, dans le VIème Plan, de rattraper le retard téléphonique, puis une volonté politique clairement affichée après la grève des PTT de 1974, donnent aux Télécom l'opportunité d'affirmer leur spécificité, de s'affranchir du carcan de la Poste9, et de

développer une logique entrepreneuriale tout en se prêtant aux obligations de la comptabilité publique et aux contraintes de la Loi de finances. Le sociologue C. GIRAUD analyse ce passage "du 22 à Asnières à la télématique"10 comme un contre-exemple manifeste de l'idée du cercle vicieux bureaucratique, selon laquelle toute organisation bureaucratique ne peut se réformer que par une crise violente.

En effet, selon C. GIRAUD, "cette forme de mutation

organisationnelle oblige à une relecture sociologique de l'organisation bureaucratique" : dans cette période d'incertitudes et d'évolutions qu'ont été les années 1970, l'administration des télécommunications dispose d'espaces de jeu beaucoup plus larges que la distribution bureaucratique des rôles ne le laisse prévoir. Même si la situation économique est alors celle du

monopole, l'administration des télécommunications connaît une

incertitude généralisée sur le produit, les méthodes, les règles de l'action et les moyens pour y parvenir. Cette incertitude, associée à une ligne politique favorisant le changement et relayée par un corps de hauts fonctionnaires porteur d'innovation, permet la découverte de nouvelles règles du jeu et l'existence de ressources suffisantes, qui à leur tour produisent un changement des comportements, des attitudes et des valeurs. C'est ainsi, conclut Claude GIRAUD, que la bureaucratie des Télécom peut relever le défi du "téléphone pour tous" et apparaître comme une organisation efficace.

Cette analyse, intéressante par la remise en cause du paradigme du "phénomène bureaucratique" et son souci d'attention aux faits plutôt qu'à

9 Tout en restant au sein du ministère des PIT.

10 Bureaucratie et changement. Le cas de l'administration des télécommunications, Paris, L'Harmattan, 1987,262 p. La citation qui suit se trouve p. 20.

ce que laissent prévoir les modèles, doit être complétée. TI convient en effet, tout d'abord, de souligner davantage l'importance, dans cette évolution des années 1970, du réformisme autoritaire en provenance des cabinets ministériels et de la volonté politique très forte qui s'est exercée. TI s'agit, ensuite, de relever, outre la découverte de toutes les règles du jeu, le détournement des règles existantes. Ce "jeu sur les règles" est d'ailleurs bien souligné par deux autres observateurs, E. COHEN et J.-M. SAUSSOISll. Ces derniers, partant de l'expression d'" administration entreprenante"

employée par le ministre Paul Quilès, discernent une stratégie de compromis pour les gestionnaires des télécommunications: greffer la prise de risques et l'innovation, vertus de l'entreprenariat, sur l'administration qu'est la Direction Générale des Télécommunications. Mais cela se réalise au prix d'un jeu sur les règles du droit administratif, qui sont vidées de leur sens par l'invention de nouvelles fonctions, le recrutement par contrat de nouveaux profils, le détachement-récompense en filiale ... France Télécom réussit pourtant son "hybridation", grâce aux grands projets qu'elle poursuit. Si bien que, comme le déclare J. RANDE12, "dans les années

quatre-vingt, le système de gestion était un système maison, en infraction avec le statut de la fonction publique dans beaucoup de cas. Des règles particulières aux PTT : un système de mutation, d'avancement d'échelon, une politique de modulation des échelons pour le service général, un système propre pour de tableau d'avancement..."

En parallèle, l'environnement économique continue de se modifier. Au début des années 1980, la Grande-Bretagne s'engage à son tour dans la déréglementation avec deux lois, en 1981 et 1984, qui entraînent la privatisation de British Telecom, l'ouverture d'un régime concurrentiel

pour les services nouveaux, et l'institution d'une autorité de

réglementation. Les Pays-Bas suivent quelques années plus tard, en créant en 1989 une société de droit privé, dont la filiale télécommunications prend en charge l'installation et l'exploitation des services de base, laissant à la concurrence les services à valeur ajoutée. Entre-temps, la Communauté économique européenne, par un Livre Vert de 1987, préconise la séparation

Il "France Télécom : une hybridation réussie ?", Politiques et Management Public, nO1, 1989, p. 235-245.

12 Ancien Directeur régional des télécommunications, dont les propos sont cités par J. BARREAU, La Réforme des PIT. Quel avenir pour le service public ?, Paris, La Découverte, 1995,p.23.

des fonctions de réglementation et d'exploitation13 et délimite les

dérogations à la libre concurrence. Le 7 décembre 1989,un accord passé entre les douze Etats membres stipule que tous les services, hormis la téléphonie vocale et le télex, seront soumis à la concurrence dans un délai de trois ans.

Ce processus d'autonomie croissante des Télécom par rapport à la Poste et au reste de l'administration se trouve renforcé et légitimé au cours des années 1980 par l'aventure du commercial, puis la "modernisation des services publics".

c - Un service public réceptif aux méthodes de la "modernisation"

L'introduction de la logique entrepreneuriale à France Télécom se renforce dans les années 1980 avec d'abord la valorisation de l'activité commerciale. N. ALTER l'a particulièrement bien analysée au cours de ses années passées comme sociologue interne à l'organisation, et notamment en conclusion d'une importante enquête qualitative14 sur la population des

commerciaux. La pratique quotidienne de ces agents et cadres fait apparaître une mise en veilleuse de la "contrainte bureaucratique" (consistant à faire les choses dans les règles) au profit de la "contrainte managériale" (vendre d'abord, légiférer après). Pourtant, la référence au service public n'est pas abandonnée : celle-ci est en fait investie d'un caractère entrepreneurial, après avoir été utilisée pendant des décennies pour s'opposer à toute forme d'écart à la règle.

"L'aventure du commercial" est ainsi l'occasion, selon N. ALTER, de la découverte d'une forte autonomie et d'une nécessaire prise de risques: il y a là une "rupture culturelle" importante. Mais cette rupture n'est pas réalisée par tous les acteurs dans les mêmes proportions : des pôles de comportements, permettant d'identifier des logiques d'acteurs différentes, se repèrent. Il y ainsi les "nostalgiques", cherchant à administrer le commercial et à rester d'honnêtes fonctionnaires ; les "pionniers", qui

13 La situation d'un opérateur public, comme l'administration des Télécommunications en France, établissant lui-même la réglementation pouvant s'imposer à ses concurrents, contredit en effet les règles de concurrence fixées par le Traité de Rome (articles 85, 86 et 90).

14Pour cerner l'apprentissage culturel que l'essor de l'activité commerciale induit à France Télécom, N. ALTER s'est appuyé sur 205 entretiens semi-directifs, réalisés dans quatre régions différentes. Cf. "Service public et action commerciale : le dilemme organisationnel des télécommunications", p. 363-379, Sociologie du travail, n° 3, 1989.

s'impliquent dans les activités d'échange avec le client et de marketing, informelles et non réglementées; et les "gestion na ires ", majoritaires, sans logique d'action propre, qui penchent vers l'un ou l'autre des pôles. Le fonctionnement quotidien des services commerciaux qui en résulte dépend des rapports de force entre ces logiques d'acteurs: malgré l'uniformité du statut de l'organisation ou du personnel, on observe tantôt une "stabilité bureaucratique" où domine l'activité de gestion réglementaire, tantôt un

"management rigide" où l'on applique de façon scolaire quelques principes

"modernes", ou bien un "management flexible" correspondant à la logique des vendeurs, ou encore le "chaos" lorsque le conflit entre nostalgiques, pionniers et gestionnaires ne se résout pas.

La même diversité d'initiatives ou de crispations sur les règles s'observe un peu plus tard à l'occasion de l'adoption des méthodes typiques de la "modernisation des services publics". Dès 1986, autrement dit avant le "renouveau du service public" du gouvernement Rocard, mais en cohérence avec les premières vagues de "modernisation" qui se développent dès 1984, France Télécom lance officiellement une politique de management participatif. En avril 1986, une "note d'orientation pour la conduite d'un projet" est envoyée par le service du personnel de la Direction générale des Télécommunications, incitant "chaque service à

engager une réflexion approfondie sur les finalités de l'organisation et la place de l'individu dans cette organisation", mais sans proposer de schéma normatif. Comme l'indique W. IAZYKOFF15,sociologue interne de France Télécom et responsable du projet, différents dispositifs ont vu le jour: groupes de résolution de problèmes, cercles de qualité, groupes contact- client ... Avec des destins divers, de la réalisation de leurs objectifs à l'essoufflement. Selon W. IAZYKOFF, les "premières avancées" mettraient en évidence les lacunes des modes traditionnels de management : missions peu définies, objectifs peu clairs et non partagés, réunions inefficaces... Ce type d'outils, bien que "peu propices pour l'introduction de changements",

auraient permis un "processus d'appre.ntissage" rendant par la suite possible l'introduction d'autres outils de gestion des ressources humaines.

Il semble en effet qu'au terme des années 80, les dirigeants de l'administration des Télécom, qui ont jusqu'ici cherché à mobiliser de 15 "Le management participatif à France Télécom", Politiques et management public, nO 1,

manière collective et en contournant le statut du personnel, soient prêts à enclencher un changement de logique de gestion plus radical. Bien que contemporaine des vagues de "modernisation" et notamment du "renouveau du service public" prôné par le gouvernement de M. Rocard, la réforme du statut des Télécom et de ses règles de gestion représente une rupture par rapport aux méthodes jusqu'ici employées. TI ne va plus s'agir d'utiliser des leviers collectifs, mais d'utiliser toutes les ressources du statut, y compris la possible individualisation des carrières.

2) 1988-1990 : l'évolution vers une réforme d'envergure

C'est le 1er janvier 1991 que France Télécom et La Poste deviennent tous deux des "exploitants autonomes de droit public", officiellement séparés16, conformément à la loi du 2 juillet 1990. Relisant le processus qui avait mené à la création de l'entreprise publique et à la négociation de ses nouvelles règles, trois chercheurs du Conservatoire National des Arts et Métiers rendent l'année suivante à France Télécom un rapport sur "les réformes de 1990", dont le propos est notamment d'indiquer d'éventuelles difficultés que l'application de celles-ci pourrait rencontrer17. Pour leurs

auteurs, l'apparition d'une entreprise publique en charge des

télécommunications se situe au carrefour de mouvements d'idées et de contraintes économiques, et, contrairement aux tentatives précédentes, réussit à opérer le changement de statut dans une relative paix sociale.

a - Au carrefour de mouvements d'idées et de contraintes économiques

La Réforme conduisant à la constitution d'un exploitant autonome de droit public des télécommunications représente un choix qui s'est fait à la fois en référence à un contexte général aux entreprises de service public et en fonction d'atouts et de contraintes spécifiques aux Télécom.

Le contexte général dans lequel évoluent les services publics à la fin des années 80 a été évoqué: la pression des directives européennes et les

16 Ce qui vaut d'ailleurs à "la" Poste de devenir, en 1990, "La" Poste.

17 MERCIER, N., REYNAUD, E., et REYNAUD, J.O. (1991) - Lesréformes de 1990 àFrance Télécom, rapport de recherche CNAM, 88 p.

exemples de réformes engagées dans d'autres pays européens sont des incitations à agir pour les tutelles de services publics; parallèlement, les mentalités et l'opinion évoluent à la suite du "durcissement dans la manière de présenter l'opposition entre les secteurs privé et public" des années 86-88. Les tentatives de réforme, comme la diminution volontaire des moyens d'action du ministère de l'industrie, la restriction des crédits de la recherche fondamentale, ou le projet "conquête de nouveaux espaces" du ministre G. Longuet, ont un effet sur l'opinion même si elles dépassent peu le stade de l'exhortation : "elles donnent une réalité et une proximité à ce que les salariés des secteurs concernés ne peuvent percevoir que comme une menace et contribuent à faire des performances du service public le sujet d'un débat généralisé"18. Le courant de "modernisation du service public" lancé par le gouvernement suivant, s'il apaise la confrontation public/privé, renforce ce questionnement sur l'efficacité.

Mais la situation des Télécom présente aussi des aspects spécifiques. D'une part, la pression européenne est à la fin des années 80 certainement plus importante pour le secteur des télécommunications que dans les

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