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« Pas de chance ! »

Monsieur UKR n’a vraiment « pas de chance ». Il se fait prendre « bêtement »

M. UKR : Oui, il y a eu une récidive. La première fois c’était suite à mon anniversaire. Je n’ai pas vraiment eu de chance. […] C’était mon anniversaire, j’avais bu quelques bières l’après-midi, concours de boules avec des copains en vacances en Bretagne. Nous avons mangé un peu, mais ça n’a pas suffi pour éponger. Et je me suis fait arrêter bêtement car je n’avais pas la ceinture. J’étais arrêté, il y avait la queue sur une nationale. J’étais à une intersection, j’attendais pour pouvoir m’engager sur la voie et comme il y avait la queue. J’étais en vacances sur la presqu’île. Deux motards sont passés, ont vu que je n’avais pas la ceinture, papiers, etc. J’ai eu une amende et puis le 2e motard est venu avec l’alcootest et alcoolémie, puis voilà.

M. UKR : Oui, un peu au-dessus, à 1,90 g.

Ses problèmes viennent des autres, pas de lui

M. UKR : comme je n’avais pas d’avocat, je ne me suis pas trop bien défendu. Car normalement comme j’étais en état d’ivresse, les motards n’avaient pas à m’escorter. Ils m’ont laissé conduire depuis mon lieu d’arrestation alors qu’ils n’avaient pas le droit de le faire. Il y avait quelques trucs comme ça. C’était pour la première fois. J’ai pris 18 mois de retrait avec un permis blanc.

À nouveau pas de chance pour la récidive. Cette fois, il est victime du sadisme du gendarme et n’établit aucun rapport entre son arrestation et sa prise d’alcool

AH : alors la récidive ?

M. UKR : au mois de Juillet 2003, il y a un an et demi. C’était un lundi, pas de tabac dans mon village, je fais 3 km, je croise deux trois copains au tabac, on boit 4, 5 bières. Je rentre chez moi, je double une voiture de police. Je ne savais pas que c’en était une, une Laguna break bleu mais sans la rampe ni tout le cinéma. Une ligne droite d’1 km et demi, j’ai mis le clignotant, j’avais la ceinture j’ai doublé et ils ont estimé que je roulais vite.

AH : simplement la vitesse, pas de ligne blanche.

M. UKR : non. Seulement la vitesse quand je les ai doublés. Ils m’ont arrêté, contrôle papier, j’avais la voiture de mon frère, leur plaisir a été le ballon à la gendarmerie. Et ils m’ont emmené au poste. J’étais à 0,85 d’alcool. Là, ils laissent la voiture sur place et m’emmènent chez moi car je n’avais pas les papiers et après, le cinéma devant tout le monde, devant chez moi. Direction la gendarmerie, je souffle dans le ballon, l’officier de police judiciaire téléphone au juge ou au préfet (je ne sais plus) directement comme j’étais en récidive. Pas de garde-à-vue; ils m’ont relâché dès que j’ai signé le procès-verbal. Ils m’ont laissé téléphoner chez moi pour qu’on vienne me chercher. Ils ont bien vu que je n’étais pas ivre mort. J’ai reconnu que j’avais doublé.

Il peut s’arrêter de boire quand il veut… (mais ça n’arrivera sans doute pas)

AH : ils ont estimé que vous aviez une dépendance avec l’alcool.

M. UKR : eux, oui. Je ne vais pas dire que je n’ai pas de dépendance mais je ne suis pas dépendant non plus.

En bon élève, il fait tout ce qu’on lui demande, mais n’en pense pas un mot

AH : et vous rouliez souvent avec une dose d’alcool un peu au-dessus ?

M. UKR: non. Ça m’arrivait de rouler au-dessus – j’ai fait un stage à la sécurité routière et je sais que la réglementation c’est trois verres maximum. J’ai fait tout ce que le tribunal m’a proposé.

Il faut les sensibiliser (les jeunes, les autres… pas lui)

M. UKR : c’est-à-dire qu’à la télé avec tout ce qu’on voit, je pense que ce n’est pas à la télé de faire de la prévention mais plutôt à l’inscription des jeunes aux autos-écoles. Des stages de formation, de prévention routière. Le stage de deux jours obligatoires avant de passer sa première leçon de code, histoire de les sensibiliser. Comme on voit la conduite accompagnée maintenant, à 16 ans c’est bien. Mais à 17 ans, il peut boire un Ricard, et conduire en conduite accompagnée.

Il boit bien sûr - qui ne boit pas ? surtout en France…

AH : Avez-vous l’impression que le système ne fait pas vraiment la différence et vous traite comme un alcoolique ?

M. UKR : oui, c’est ce que j’ai essayé de dire à mon conseiller. Il m’a dit : « vous êtes un alcoolique ». Je l’ai regardé dans les yeux, je me suis retenu – je suis quelqu’un qui part assez vite – et dans ma tête je me suis dit : « hé toi, j’aimerais que tu me dise ce que tu bois le midi, le soir, ce que tu fais de tes week-end », car quelque part on est tous alcoolique. Le Français va boire son verre de rouge le midi, son apéro... Après, il y a se lever le matin et commencer la bière ou le café/calva à 8H, à 9H c’est la bière, à 11H c’est l’apéro, après c’est la bouffe et le rouge après, le café/calva. C’est sûr qu’il y a l’alcoolisme. Moi, j’en vois sur les chantiers qui font ça dès le matin.

Dans le privé, lui seul sait ce qui est bon pour lui. Il veut s’amuser avec ses amis sans que personne ne lui dise rien

M. UKR : Je suis payé pour bosser 8H pour mon patron. Si je suis arrêté sur la route avec le véhicule de fonction parce que j’ai picolé vers 14H, c’est licenciement, faute grave, tu n’as droit à rien et tu es à la rue. Ce que je fais après ces 8H de travail ça ne regarde que moi. Si je me fais arrêter parce que j’ai bu 5 bières un soir...

Quelle motivation pour arrêter de boire ? Ne pas se faire choper, point final

M. UKR : Quand j’aurais de nouveau mon permis, si je conduis, il ne faut pas que je boive. Car si je me fais arrêter et souffle dans le ballon, c’est 4 mois direct. Déjà avant, je faisais attention. Il y a des soirées où je sais que l’on sera entre potes tranquilles, qu’on va s’amuser. Et puis il y aura des soirées plus festives au point de vue boisson.

Le probationnaire veut l’envoyer en prison… Qu’il fasse son travail

AH : le rapport avec votre conseiller, est-ce un jeu ?

M. UKR : non. Il est déjà un peu moins agressif. Et je lui ai dit aussi si c’est pour faire ça comme ça, on me renvoie devant le juge direct et puis en prison direct. Après on ne se voit plus, je reste en prison 4 mois, avec la remise de peine cela fait trois semaines et je ne le revois plus et je suis tranquille. Car il me menaçait en me disant : « si ça ne se passe pas comme ci ou comme ça, je vous renvoie devant le juge ». C’est vrai que s’il fait ça, ça m’ennuie de retourner en prison, mais je préfère lui faire comprendre qu’être chez moi, devant la télé où en prison... Après, lui, il fait son travail.

Il dit « amen » à tout sur le coup et se dégage aussitôt

M. UKR : Il [son conseiller] m’a donné les adresses des hôpitaux de désintoxication et m’a demandé si j’allais me renseigner. J’ai dit : « oui, bien sûr ». Je n’allais pas lui dire non ! Il me voyait déjà en cure pendant un mois. Il m’a dit : « En passant par moi, vous pouvez entrer plus vite car il y a une liste d’attente ». J’aurais dit « oui », je serais allé faire un mois de cure dans un hôpital avec je ne sais qui, pour faire je ne sais quoi ?! Car à mon avis je n’en ai pas besoin.

Point frappant : la mise à l’extérieur de tout et l’absence totale de mise en cause de lui- même. L’incarnation même du « ce n’est pas moi », ni faille ni ouverture dans la cuirasse.