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CHAPITRE 5 : OUVERTURE ET CONCLUSION

5.2 Vers une typologie des régimes nominaux

Une grande partie des travaux futurs qui pourraient être menés dans la lignée de notre projet, notamment l’utilisation d’une base de régimes pour l’édition d’un grand nombre de fiches lexicographiques et la création d’articles de dictionnaire généralisés, présup- pose la généralisation des informations sur les régimes. Il va sans dire que les régimes présents dans notre base de données sont trop « complexes » pour être parfaitement uti- lisables dans le cadre de tels projets. Nous devons donc prévoir des étapes servant à factoriser les informations sur les régimes et permettant éventuellement de créer une ty- pologie des régimes du français. Nous utilisons donc ici quelques régimes nominaux de la base CARNAVAL afin de présenter certaines étapes de mise en commun des régimes semblables.

Mise en commun de la valence

Présentement, une section de nos régimes sert à indiquer à quels ASém corres- pondent les variables de la forme propositionnelle. Bien que l’utilisation de ces variables soit très utile, entre autres pour percevoir les liens qu’entretiennent les acceptions d’un vocable polysémique, elles ne relèvent pas de la syntaxe. La première étape pour la création de la typologie des régimes, est donc de regrouper les lexies qui ont le même régime, mais dont les noms de variables de la forme propositionnelle sont différentes. À titre d’exemple, nous pouvons regrouper les régimes r.N.2.002 et r.N.2.064.

Figure 5.1 – Comparaison des Régimes r.N.2.002 et r.N.2.064

Dans les deux cas, le premier actant peut être exprimé par la dépendance subjectale adnominale (syntagme de N) ou par la dépendance déterminative (A-poss) tandis que le deuxième actant n’est pas réalisé syntaxiquement auprès de la lexie ayant ce régime. La seule différence se situe dans l’utilisation des variables dans la forme propositionnelle des lexies correspondantes : l’ASém1 correspond tantôt à X tantôt à Y tandis que l’ASém2 correspond tantôt à Y tantôt à Z. Le régime r.N.2.064 est celui de la lexie FACTURE(1)]II és: conséquence fp: ∼ DE Y [QUE DOIT ASSUMER LA personne Z]. Ici, Y et Z ont été utilisés pour rendre explicite le lien avec la lexie FACTURE(1)]I és: document justificatif fp: ∼ faite par la personne X à la personne Z pour Y d’un montant W. Donc, Y correspond dans les deux cas à ce qui fait l’objet de la facture (ce qui coûte quelque chose), et Z correspond à la personne qui doit assumer la facture. Mais, il n’en demeure

125 pas moins que Y et Z correspondent aux ASém1 et 2 de la lexie FACTURE(1)]II. En ce sens, ce régime se rapproche du régime r.N.2.002, le régime des lexies suivantes (parmi d’autres) : CRIME]I.b, FAUTE]I.1a, IMAGINATION]1, IMAGINATION]2, LÂCHETÉ]2, NAISSANCE]I.1, PÉCHÉ, VOLTE-FACE]I.

Mise en commun des dépendants prépositionnels semblables

Comparons les régimes r.N.2.086 (XÉNOPHOBIE) et r.N.099 (INSOLENCE]1, IMPARTIALITÉ]a).

Figure 5.2 – Comparaison des Régimes r.N.2.086 et r.N.2.099

Nous remarquons que la différence entre ces deux régimes est assez ténue. En effet, les dépendances utilisées pour l’expression des actants sont les mêmes, seules les pré- positions possibles pour exprimer le deuxième actant par la dépendance objectale obliquesont légèrement différentes. Ces prépositions sont assez proches sémantique- ment, elles ont la particularité d’avoir le sens de ‘envers’. Prép-envers est utilisé pour indiquer qu’il est possible d’utiliser n’importe quelle préposition qui fait partie de cette partie du discours spécifique, c’est-à-dire une préposition qui a le sens de ‘envers’1. Dans le cas du r.N.2.099, on a listé les prépositions possibles, car on a jugé que c’était les

1. Cette façon de faire est relativement récente, elle n’est pas présente dans les DECFC. On l’a in- troduite dans le DiCo et le LAF et on la mentionne brièvement dans l’ILEC, mais il n’est pas possible pour l’instant de retrouver une liste complète de ces sous-groupes de la partie du discours Prép. Sans pré- tendre en donner une liste exhaustive, nous fournissons dans l’annexe II les informations que nous avons recueillies à divers endroits du DiCo et certaines modifications ou ajouts que nous proposons.

seules qui permettent d’exprimer l’ASyntPII (en excluant donc les autres prépositions du groupe Prép-envers).

En ce sens, il serait possible de créer une catégorie de régimes où l’ASynt- PII est exprimé par la dépendance objectale oblique à l’aide d’une préposi- tion faisant partie du groupe Prép-envers. Ce groupe de régimes comprendrait également les régimes r.2.019 (ADORATION]a), r.N.2.045 (CRIME]I.a), r.N.2.049 (DÉGOÛT), r.N.2.050 (DÉPIT), r.N.2.052 (DÉSIR]2), r.N.2.086, r.N.2.099, r.N.2.104 (INSOLENCE]2), r.N.2.108 (MÉCONTENTEMENT), r.N.2.116 (PARTIALITÉ]a), et potentiellement les régimes multiples r.N.2.020 (ANIMOSITÉ, AVERSION) et r.N.2. 041 (HAINE, HOSTILITÉ]I, COUP DE FOUDRE]1). La liste des prépositions pos- sibles serait alors donnée dans l’article lexicographique de L plutôt que dans son Tableau de régime.

Commentaires, notes d’usage, expression obligatoire d’un actant

Dans cette optique d’ontologisation des régimes, il serait également possible d’ex- clure les commentaires et contraintes des tableaux pour en arriver à des régimes plus simples. Prenons en exemple un régime assez simple, le r.N.2.003 (AMI]I.1, AMI]I.3, BAGUE]2, ENNEMI]I, ENNEMI]IV, ENVELOPPE]I, ÉQUIPAGE, FACTURE(2)]a, PARTIE(1)]I, PATIENT, PETIT AMI, POULE]II.a, VERROU]I). Si l’on forme un groupe avec tous les régimes qui ont cette base (ASém1 non exprimable et ASém2 exprimable par complétive adnominale de N ou déterminative A-poss), il comprendrait également certains régimes qui incluent des contraintes particulières, par exemple le r.N.2.004 (AMI]II, ENNEMI]II) où l’expression de l’ASém2 est obligatoire et où l’ASém2 est exprimable par A-poss seulement si Y est une personne).

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Figure 5.3 – Comparaison des Régimes r.N.2.003 et r.N.2.004

Regroupement des DépSyntS

Il va sans dire que ces premières étapes visent à regrouper des régimes assez sem- blables en offrant un patron de régime simplifié. Si l’on souhaite véritablement créer une typologie des régimes, on pourra envisager d’aller plus loin dans les regroupements, par exemple en rassemblant tous les régimes où l’ASém2 est exprimé par la dépendance objectale oblique(peu importe les prépositions possibles, peu importe s’il existe d’autres possibilités d’expression pour ce même ASém, peu importe le moyen d’expres- sion de l’ASém1, etc.).

Nous envisageons la création d’une telle typologie puisque nous croyons qu’il serait utile de développer un outil qui permette de faire des généralisations à plusieurs niveaux. Cela semble nécessaire, parce que les généralisations peuvent être assez spécifiques (par ex., les lexies qui dénotent des sentiments réciproques et leur modification de diathèse) ou plutôt générales (par ex., beaucoup de lexies quasi prédicatives – classées dans la hiérarchie sous l’étiquette sémantique entité – ont le premier actant de leur prédicat interne fusionné avec la lexie nominale (la lexie nominale correspond à ce premier ac- tant) : ‘femme X, qui est la mère de Y’ ⇔ MÈRE de N[=Y], ce qui fait que leur premier actant n’est pas syntaxiquement réalisé comme un D de L).

Il en est ainsi parce que les régimes peuvent être perçus comme des entités « lexico- syntaxiques » qui portent en elles-mêmes des sens, parce que leur structure offre la pos-

sibilité d’exprimer une structure actancielle donnée. Nous croyons donc que d’étudier ces patrons syntaxiques en tant qu’outils d’expression de groupes de sens (qui peuvent être complexes ou assez vagues) peut être intéressant.

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