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Nous proposons une typologie qui distingue quatre catégories de dépenses socio-fiscales, en fonction de la manière dont celles-ci s’articulent à la protection sociale : 1- le renoncement à des recettes sociales pour motif de politique économique, 2- les dépenses socio-fiscales assimilables à des prestations en espèces, 3- les dépenses socio-fiscales destinées à stimuler la dépense privée (appelées également « incitations »), 4- la non-imposition ou l’imposition à taux réduit de prestations sociales. Le premier item concerne le seul financement de la protection sociale, les items 2 et 3 concernent les dépenses socio-fiscales ayant un but de protection sociale explicite, le dernier item renvoie à des dépenses socio- fiscales ayant une fonction de protection sociale indirecte (via l’imposition spécifique des prestations). Cette typologie est construite comme une extension de la typologie utilisée par Adema et al. (2011) qui, sur un champ d’analyse plus restreint, utilisent uniquement les catégories 2 et 3.

La première catégorie concerne donc les dispositifs qui répondent à un objectif de politique économique non explicitement lié à la protection sociale (généralement il s’agit de stimuler l’emploi dans son ensemble, certains emplois en particulier, ou de soutenir le pouvoir d’achat). Ces dispositifs sont recensés ici sous l’intitulé suivant :

• Catégorie 1 : renoncement à des recettes sociales pour des motifs

de politique économique : cette catégorie inclut à la fois des

exonérations de cotisations sociales (compensées ou non) et les exemptions d’assiette de cotisations sociales. Nous incluons dans notre analyse ces dépenses socio-fiscales dans la mesure où ces dispositifs influent de manière significative sur la structure du financement de la protection sociale (voir Zemmour [2012]). Toutefois, nous ne recensons pas ici le détail des dispositifs d’exonération et d’exemption de prélèvements sociaux, ceux-ci étant très nombreux et portant sur des montants relativement faibles. Par

exemple, nombre d’exonérations de cotisations employeur ciblées sont regroupées dans une catégorie commune. Le lecteur intéressé en trouvera le détail dans l’annexe 2 du rapport Guillaume et dans le rapport du COE (2013).

Parmi les dépenses sociales et fiscales ayant une fonction explicite de protection sociale (les TBSP, dans la terminologie de l’OCDE), nous distinguons deux catégories, reprenant ici la typologie utilisée par Adema et al. (2012) et servant de base aux données OCDE sur le sujet : d’une part les dépenses fiscales assimilables à des prestations en espèces, d’autre part les dépenses fiscales visant à stimuler la dépense privée à des fins de protection sociale.

• Catégorie 2 : les dépenses socio-fiscales assimilables à des

prestations en espèces sont celles qui « remplissent la même

fonction politique que des prestations de transfert qui, si elles existaient, seraient classifiées comme des dépenses sociales33 » (Adema et al. [2011] p. 29).

• Catégorie 3 : dépenses socio-fiscales d’incitation/ destinées à

stimuler la dépense privée de protection sociale : il s’agit des

dépenses socio-fiscales conditionnées à la consommation, la production ou la vente d’un bien ou d’un service de protection sociale privée. Ces dépenses peuvent aussi bien concerner les montants versés par les particuliers ou les employeurs à des contrats de protection sociale privée, que les dépenses destinées à stimuler l’offre dans les secteurs relevant de la protection sociale (par exemple, taux réduit de TVA ou de cotisations pour les services à des personnes « fragiles »).

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La distinction entre ces deux catégories nous paraît utile et pratique pour distinguer deux formes de recours aux TBSP. Toutefois, la distinction entre les deux catégories n’est pas totalement hermétique. Ainsi, nous plaçons les réductions d’impôt pour garde d’enfants dans la catégorie « incitations à la dépense privée34 » là où l’OCDE considère des dispositifs voisins comme des dépenses fiscales assimilables à des prestations familiales en espèces.

Enfin, une dernière catégorie complète cette typologie:

• Catégorie 4 : la non-imposition ou l’imposition à taux réduit des

prestations sociales. Cette catégorie n’est pas enregistrée par

l’OCDE sous forme de dépenses socio-fiscales pour éviter un « double comptage35 ». Sur le fond, cette catégorie pourrait être incluse dans l’ensemble des dépenses socio-fiscales assimilables à des prestations en espèces car leur effet est largement comparable (il ne s’agit clairement pas de mesures d’incitation), mais nous comptons ces dépenses à part pour deux raisons : d’une part parce que la taxation ou la non taxation des prestations sociales ne relève pas toujours d’une politique explicite de protection sociale (mais peut être le fruit de l’histoire, ou de la distinction fiscale entre types de revenus) ; d’autre part pour une question de niveau d’analyse : on peut rapprocher les catégories 2 et 3 des dépenses sociales brutes (c’est-à-dire des prestations en nature ou en espèces ), tandis que les dépenses de la catégorie 4 relèvent de la discussion du montant net

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Parce qu’elles sont conditionnées à cette dépense.

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En effet, comme l’OCDE calcule par ailleurs la valeur des prestations nettes d’imposition, les taux d’imposition applicables aux prestations sociales à taux plein ne sont pas comptés dans les dépenses socio-fiscales ; toutefois, il n’est pas certain que les taux d’imposition dérogatoires sur certaines prestations soient parfaitement pris en compte dans les données OCDE qui s’appuient davantage sur les taux généraux d’imposition. Zaidman (2013) expose également une présentation des dépenses nettes de protection sociale qui prend en compte cet aspect de la fiscalité. Comme notre propos n’est pas d’abord de viser une évaluation « nette » mais bien de mettre en évidence l’utilisation des dérogations aux prélèvements obligatoires, nous intégrons cette catégorie dans notre recensement.

des prestations sociales , c’est-à-dire après que ces prestations ont été soumises à des prélèvements obligatoires.

Ces 4 catégories permettent de confronter les dépenses socio-fiscales aux différents niveaux d’analyse de la protection sociale du point de vue des finances publiques :

Tableau 2: Les dépenses socio-fiscales en regard du cadre d'analyse des comptes de la protection sociale

Cadre analytique des comptes de la protection

sociale Ajout des dépenses socio-fiscales

Recettes

Budget de l'Etat Recettes sociales

(prélèvements affectés)

Catégorie 1: Renoncement à des recettes sociales affectées Prestations nettes = (A) - (B) (A) Prestations brutes dont Prestations en espèces Catégories 2 et 3: Dépenses socio- fiscales à des fins

explicites de protection sociale dont Cat. 2: Assimilables à des prestations en espèces dont Prestations en nature dont Cat. 3: Destinées à stimuler la dépense privée de protection sociale (B) Prélèvements obligatoires sur les prestations sociales dont Prélèvements

obligatoires directs Catégorie 4: Non-imposition ou imposition à taux réduit des prestations

sociales36 dont Prélèvements obligatoires indirects37! 36

Dans le présent travail, il ne s’agit que de dépenses fiscales. En pratique, on pourrait y intégrer certains dispositifs concernant les prélèvements sociaux (cf. section 3.2).

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